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A Cholet, l'annonce est tombée comme un coup de massue. D'ici 2026, l'usine Michelin va fermer ses portes, laissant 955 salariés sur le carreau. A leurs côtés, Grégory Blanc, ancien syndicaliste devenu sénateur du Maine-et-Loire en 2023. Sur le terrain et au Sénat, l'élu se mobilise pour assurer l'avenir industriel du site. Année de Production :

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00:00Générique
00:02...
00:09Musique douce
00:11...
00:17Ce matin, Grégory Blanc prend la route direction Cholet.
00:21Le sénateur du Maine-et-Loire part retrouver les salariés
00:24de Michelin en grève contre la fermeture de leur usine.
00:29Lui-même est un ancien syndicaliste.
00:31C'est là qu'est né l'engagement politique
00:34de cet élu étiqueté divers gauche
00:36qui a rejoint le groupe écologiste du Sénat.
00:39J'ai commencé à travailler à 18 ans
00:42et c'était évident pour moi
00:44de m'engager dans une organisation syndicale.
00:47Je me suis retrouvé au SGEN-CFDT.
00:49C'était une très grande école pour moi.
00:51On a les mains dans le concret.
00:52...
01:04A Cholet, la nouvelle est tombée comme un coup de massue.
01:08Bonjour. Tu vas bien ?
01:11L'usine Michelin, qui fabrique des pneumatiques pour camionnettes,
01:15va fermer.
01:17D'ici 2026, 955 personnes vont perdre leur emploi.
01:23L'année prochaine, au mois de juin, ça fera 36 ans que j'y suis.
01:26Donc ça fait une grosse partie de ma vie.
01:29Je pensais pas terminer ma carrière comme ça.
01:31C'est incompréhensible.
01:33Michelin est une grosse entreprise du CAC 40
01:36qui fait des milliards tous les ans.
01:38Tous les ans, ils font des bénéfices.
01:40C'est que de la colère, parce que cette usine est largement pérenne.
01:44Un mois après l'annonce,
01:45les ouvriers continuent de tenir le piqué de grève.
01:49Ils n'espèrent plus sauver leur usine,
01:51mais serrent les rangs pour tenter d'obtenir
01:54des indemnités de départ les plus hautes possibles.
01:57Michelin, ils doivent lâcher beaucoup de pognon.
02:00Tout le monde en discute,
02:01combien il nous faut comme chèque, pour l'ancienneté.
02:04Car le groupe Michelin se porte très bien.
02:07En 2024, il a engrangé plus de 2 milliards d'euros de bénéfices.
02:13On est une centaine d'ouvriers là,
02:15encore réunis, à prendre des décisions ensemble,
02:17à discuter de notre peau, de notre avenir ensemble.
02:20C'est important et ça leur fait peur, à Michelin.
02:24D'après la direction, le site de Cholet étant sur production,
02:29il ne serait plus viable économiquement.
02:32La production se fera désormais en Pologne et en Italie.
02:38Pourtant, les salariés, eux,
02:39assurent que leur usine est toujours rentable,
02:42mais impossible de connaître sa situation financière.
02:45Michelin ne communique jamais les résultats
02:48de ces différents sites.
02:52Le fait qu'il y ait du mépris, en plus,
02:54je crois que c'est pire que tout.
02:57C'est pire que tout.
02:58C'est... On s'en va, c'est pas de notre faute.
03:01Et c'est pas pour des raisons économiques.
03:04C'est pas ça.
03:05Michelin considère qu'il va vendre moins de pneus à l'avenir.
03:09C'est un choix qui leur appartient pour gagner plus d'argent.
03:12Par contre, c'est pas ni au territoire ni aux salariés
03:16de payer les peaux cassées.
03:18L'usine qui ferme,
03:20c'est presque une part de l'identité de la ville qui disparaît.
03:25Michelin est le plus gros employeur privé de Cholet.
03:29Son départ aura des conséquences,
03:31et pas seulement pour les 955 salariés du site.
03:35Saïd Kachani travaille pour le groupe Honnête,
03:39un sous-traitant de l'usine Michelin.
03:41Il y a des activités qui, auparavant,
03:43étaient gérées par Michelin,
03:45mais que Michelin a sous-traitées sur le site.
03:49De Richembourg fait le nettoyage industriel.
03:52Et vous, vous faites la logistique.
03:54Logistique, magasinage, préparation de vente, charge d'emploi.
03:57Rien que chez Honnête,
03:5925 emplois directement liés à l'usine Michelin vont disparaître.
04:04Malgré ses 20 ans d'ancienneté,
04:06Saïd Kachani n'aura droit à aucun accompagnement de Michelin.
04:11Ils nous ont fait une proposition qui est strictement illégale,
04:15soit disant, plus 30 % pour partir.
04:18Un départ volontaire.
04:20J'ai demandé un plan social et économique.
04:23Que les salariés soient accompagnés derrière,
04:25à des formations pour retrouver des emplois.
04:28D'après les calculs du syndicaliste,
04:312 à 300 postes vont disparaître chez les sous-traitants de Michelin.
04:36Ce sont les grands oubliés de la fermeture de l'usine.
04:39C'est là où il y a un problème en France.
04:42Michelin n'est pas responsable, comme il a sous-traité,
04:46alors que c'est lui qui est responsable direct.
04:52Autre victime collatérale de la fermeture de l'usine Michelin,
04:56les commerçants de Cholet.
04:59Cela fait 23 ans que Xavier Brunel
05:01dirige cette agence immobilière du centre-ville.
05:05L'impact est immédiat.
05:06En immobilier, on loge des gens qui travaillent.
05:091000 salariés, je multiplie par le nombre de salaires,
05:14c'est en millions d'euros chaque mois,
05:16et on n'a plus dans le tissu économique que Cholet.
05:19Les salariés de Michelin sont ses clients.
05:21Ils représentent 8 à 10 transactions par an,
05:25et déjà une de moins depuis la fermeture de l'usine.
05:28L'impact concret que j'ai eu, pas plus tard que mardi matin,
05:32c'est qu'un jeune couple qui avait acheté une maison chez moi
05:35n'obtiendra pas son financement parce que,
05:38concrètement, mardi matin, la fermeture était actée.
05:42Merci.
05:50Comme tous les parlementaires,
05:52Grégory Blanc partage son temps entre son département et Paris.
05:58En plein débat budgétaire, il s'apprête à déposer
06:02ce qu'il appelle un amendement Michelin
06:04pour empêcher le groupe d'échapper à la surtaxe
06:07sur les grandes entreprises.
06:09Je sais pas ce que t'en penses,
06:11mais je pensais faire d'abord une intervention sur l'article
06:15pour bien resituer ce qu'est la surtaxe Barnier,
06:19bien repréciser son fonctionnement, sa mécanique.
06:23Son idée ?
06:24Prendre en compte le chiffre d'affaires mondial
06:27et non pas seulement français
06:29pour décider quelles entreprises seront surtaxées.
06:32Une manière de pénaliser celles qui délocalisent
06:36et de faire pression sur Michelin.
06:39Moi, je considère, dans cette affaire,
06:41dans ce qui se passe sur Michelin-Cholet,
06:43que je suis un rouage du dispositif.
06:47Je suis pas un capitaine d'industrie,
06:49je suis pas délégué syndical, je suis pas maire de Cholet.
06:52Mon rôle, en tant que parlementaire,
06:54c'est de faire l'interface entre le local et le national.
06:57Élu il y a un peu plus d'un an,
06:59c'est la première fois qu'il va défendre
07:02son propre amendement dans l'hémicycle.
07:04Je te dis à tout à l'heure.
07:06Bon, un peu de pression, quand même.
07:09Son amendement Michelin a très peu de chances d'être adopté.
07:13Parlementaire de gauche dans un Sénat largement à droite,
07:17Grégory Blanc n'est pas en position de force,
07:20mais il espère encore rallier les voix des centristes.
07:23Il faut qu'on corrige ce dispositif pour valoriser le Made in France.
07:28Donc, un, il faut prendre comme champ d'application
07:31le chiffre d'affaires mondial et pas uniquement le français.
07:34Il faut qu'on adresse absolument au patronat un signal
07:37pour dire qu'on considère mieux
07:39ceux qui font le choix de produire en France
07:41et de payer leurs impôts en France.
07:44Merci, mon cher collègue.
07:47Malgré ses efforts, sa proposition est rejetée.
07:51Qui est pour ?
07:53Qui est contre ?
07:55Qui s'abstient ? Il n'est pas adopté.
07:58C'est pas passé, voilà.
07:59C'est assez... C'est comme ça.
08:02Il y a eu une belle bataille, un bon débat, aussi.
08:09Grégory Blanc a perdu une bataille,
08:11mais il reste bien décidé à défendre l'avenir du site Michelin
08:15dans son département.
08:18De retour à Cholet, le sénateur se rend à la sous-préfecture.
08:22Il participe aujourd'hui à la 2e réunion
08:25du comité de suivi sur le site Michelin.
08:29Autour d'une même table,
08:31le préfet réunit la direction de Michelin,
08:33les représentants des salariés
08:36et les élus du territoire pour préparer l'avenir du site.
08:44Après deux heures de réunion,
08:46la discussion s'engage entre Grégory Blanc
08:48et la représentante de Michelin.
08:52Le choix de Michelin, c'est de dire qu'on veut un taux de marge
08:55qui passe de 12 % actuellement à 14 % demain.
08:58De dire comment on peut gagner plus d'argent
09:01en se recentrant sur le pneu haut de gamme.
09:03Il faut l'assumer, ce serait plus humain.
09:06L'enjeu, il est de se dire où sont aujourd'hui les marchés
09:09et comment évoluent les marchés
09:11et comment on peut continuer à produire en France.
09:15On va garder, si ce projet va jusqu'au bout,
09:17on va garder 13 sites en France.
09:19On va garder notre centre de R&D en France.
09:22On est aux alentours de 19 000 salariés aujourd'hui.
09:28Michelin a su n'avoir pas d'autre choix
09:30que de fermer l'usine de Cholet.
09:32En cause, un marché en forte baisse
09:35et la concurrence des pays asiatiques.
09:39C'est une décision de dernier ressort.
09:42C'est-à-dire que quand une décision est prise
09:45d'avoir ce projet de faire une fermeture,
09:48c'est parce qu'on a épuisé l'ensemble des autres solutions.
09:53Nous ne laisserons tomber ni les personnes ni le territoire.
09:57Le groupe s'engage à redynamiser le site
09:59et recréer de l'emploi.
10:01Pour savoir si Michelin peut tenir sa parole,
10:04Grégory Blanc se rend à La Roche-sur-Yon.
10:07Cette ancienne usine, située en Vendée,
10:10produisait des pneus pour les poids lourds,
10:13mais elle a fermé en 2020,
10:15laissant plus de 600 salariés sur le carreau.
10:18Michelin dit avoir déboursé 3,7 millions d'euros
10:22pour aider les entreprises du territoire
10:25et d'autres emplois.
10:27Le groupe Michelin avait une obligation,
10:29recréer ou aider à recréer autant d'emplois
10:32que ceux qui ont été supprimés.
10:34A date, 635 postes ont été recréés
10:38sur le bassin d'emploi,
10:40et on espère même arriver à 825 dans les deux prochaines années.
10:46Autre engagement de Michelin, la reconversion de l'usine.
10:50Aux côtés des pouvoirs publics,
10:52le groupe va participer à hauteur de 6 millions d'euros
10:55pour la rénovation des bâtiments.
10:59L'idée, c'est de pouvoir scinder le site
11:03dans des plus petites unités pour pouvoir accueillir
11:06des entreprises, petites ou moyennes,
11:09qui veulent venir et notamment travailler et produire,
11:13faire de l'industrie et de l'innovation,
11:15notamment sur les mobilités durables et les énergies bas carbone.
11:23Pour le moment, seules 3 entreprises ont choisi de s'y installer.
11:28Parmi elles, Carenne, une filiale du groupe Dubreuil,
11:32spécialisée dans l'aménagement de véhicules utilitaires.
11:36On est sur un des anciens bâtiments du site Michelin,
11:40sur lequel, sur cette partie-là, de mémoire est stocké
11:43tout ce qui était pneumatique une fois qu'ils avaient été réalisés.
11:47D'accord. Donc c'est important,
11:49parce que vous, vous êtes la première et la seule
11:52véritable entreprise aujourd'hui installée sur le site,
11:555 ans après, et donc on voit qu'il y a un développement.
11:58Vous avez démarré à combien ? Vous êtes à combien de salariés ?
12:01On a démarré le 1er août, et nous sommes à 12 salariés.
12:04Et on prévoit sur 2025 d'embaucher également
12:064 nouveaux collaborateurs.
12:084 nouveaux salariés en 2025.
12:10Des anciens salariés de Michelin ?
12:12Non.
12:134 ans après sa fermeture,
12:15moins de 20 personnes travaillent aujourd'hui sur le site.
12:19Aucun des anciens de l'usine Michelin n'en fait partie.
12:22Pour Grégory Blanc, le compte n'y est pas.
12:25On installe une petite entreprise,
12:27puis on va en installer une autre, et puis encore une autre.
12:31Au final, sur la longue durée,
12:32il n'y a pas une politique de réindustrialisation
12:35avec de la valeur ajoutée sur le site,
12:37mais on voit qu'il y a des entreprises qui vont venir ici,
12:401 an, 2 ans, 3 ans, 4 ans, puis ils vont partir.
12:43Qu'est-ce qui se passe ? A la fin du fin,
12:45on a des entreprises logistiques qui viennent s'installer.
12:48Ca consomme beaucoup d'espace et ça crée peu d'emplois,
12:51et surtout des emplois à faible valeur ajoutée,
12:53faiblement qualifiés et donc faiblement rémunérés.
12:56C'est ça qu'il faut qu'on évite à Michelin-Cholet.
12:59Musique douce
13:01Michelin est loin d'être un cas isolé.
13:03En un an, le nombre de plans sociaux abondit de 27 %.
13:07200 000 emplois seraient menacés.
13:10Au-delà de l'enjeu social,
13:12c'est aussi l'indépendance industrielle de la France
13:15qui est en jeu.

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