L'Hebdo de l'Éco : Olivier Becht (Ministre délégué, chargé du Commerce extérieur)

  • l’année dernière
Eric de Riedmatten reçoit chaque week-end un invité dans #LHebdoDeLEco pour approfondir un sujet économique.

Transcript
00:00 On va parler de la France commerciale, celle qui devrait vendre plus à l'étranger.
00:04 Malheureusement, le commerce extérieur est en grand déficit.
00:06 On est avec Olivier Bescht. Merci d'être avec nous, ministre du Commerce extérieur.
00:10 Bienvenue sur CET News.
00:11 Bonjour.
00:12 Alors, on a dépassé 160 milliards de déficit l'an dernier. Il y a plein de raisons.
00:16 Mais est-ce que vous vous souvenez quand était le dernier solde positif ?
00:20 C'était en 2002. C'est le moment où on a commencé à payer le prix de la désindustrialisation du pays.
00:27 Rappelez-vous, dans les années 90, les usines s'en vont.
00:31 Elles vont produire ailleurs, notamment en Chine, dans le sud-est asiatique.
00:35 Forcément, quand on ne produit plus sur le sol national, c'est la double peine.
00:39 Un, on n'exporte plus. Et deux, on est obligé d'importer les produits dont on a besoin.
00:45 C'est ainsi que le déficit commercial s'est creusé année après année.
00:48 Après, cette année, on a une conjoncture un peu particulière parce que...
00:53 Oui, l'énergie.
00:54 On a été obligé, et ça tout le monde le voit dans son quotidien,
00:57 les prix de l'énergie ont été multipliés par deux.
01:00 La France a été obligée d'importer de l'énergie.
01:02 On l'a payée deux fois plus cher et donc on a doublé notre déficit.
01:05 Mais j'aimerais vous montrer un tableau parce qu'on a ressorti les chiffres.
01:08 Et quand même, il faut remonter à très loin, on le disait, pour avoir un solde positif.
01:11 C'est quand même une dégradation continue.
01:13 On se demande à quel moment on va pouvoir inverser la tendance.
01:16 Qu'est-ce qu'il faut de plus pour remonter la pente ?
01:19 Alors, il faut deux choses.
01:20 Et je mets à part le côté énergie parce que les prix de l'énergie sont en train de redescendre.
01:25 On a remis en marche le parc nucléaire.
01:27 Et donc, l'année prochaine, on ira bien mieux sur le plan de l'énergie.
01:32 En revanche, il y a une part structurelle de notre déficit commercial
01:37 qui nécessite un traitement de fonds en deux parties.
01:40 La première, c'est bien sûr la réindustrialisation.
01:42 C'est ce que nous sommes en train de faire avec le gouvernement.
01:45 Ça prendra du temps parce qu'il faut réinstaller des usines.
01:48 Il y en a déjà qui se font.
01:49 Je pense notamment au microprocesseur, à Kroll.
01:53 Je pense également au paracétamol, le principe actif.
01:56 C'est une usine qui est en train de se séquencer, qui est en train de se monter en isère.
01:59 Je pense au lithium qu'on est en train de reproduire dans l'allier ou encore dans le barin.
02:04 Mais ça, il faudra les vendre ces produits à l'étranger.
02:05 Alors, d'abord, si vous voulez, les produire en France, ça nous évitera des importés.
02:10 C'est déjà une première chose.
02:11 Et puis ensuite, effectivement, il faut aller au-delà des besoins nationaux
02:14 pour pouvoir ensuite les vendre également à l'étranger.
02:16 Ça, c'est la première chose.
02:17 La deuxième chose, c'est aller porter nos PME à l'exportation.
02:22 Et ça, on peut le faire à court terme.
02:24 Autant que vous avez raison, reconstruire des usines, ça prend du temps.
02:28 En revanche, les PME françaises sont très peu exportatrices.
02:32 Et c'est pour ça que moi, je prends mon bâton de pèlera, notamment pour aller en région
02:36 avec la Team France Export.
02:37 On comprend.
02:38 Parce qu'elles sont compétitives, ces entreprises.
02:40 Elles sont compétitives, oui, bien sûr.
02:42 Les entreprises françaises sont compétitives.
02:44 Nous sommes... Alors, il y a la compétitivité de coût,
02:47 mais il y a surtout la compétitivité qualité.
02:48 On fait des produits de très grande qualité, y compris en région, au sein de nos PME.
02:53 Mais il manque encore cette culture de l'international,
02:56 cette capacité de se dire, il faut avoir le monde comme horizon
02:59 et pas simplement sa petite région ou le niveau des...
03:02 Je comprends.
03:02 Mais comment vendre plus quand on s'appelle France ?
03:05 Parce que c'est une belle marque, vous le reconnaissez.
03:07 Mais comment aujourd'hui gagner de l'argent en vendant nos produits ?
03:10 On parle toujours d'Airbus, mais ce n'est pas la plus grosse partie.
03:13 On parle de l'automobile, pratiquement, a décliné.
03:16 Il ne reste plus que le luxe.
03:17 Non, on a des champions.
03:18 Si vous voulez, on a des champions de l'export.
03:20 Vous avez cité Airbus, vous avez cité le luxe, les cosmétiques.
03:24 Mais plus l'automobile.
03:25 Alors, l'automobile, un peu moins, même si on a retrouvé nos niveaux d'avant pandémie.
03:32 Mais c'est vrai qu'on fabrique peu d'automobiles en France par rapport...
03:36 Voilà, par rapport à nos voisins, notamment allemands.
03:39 Donc, il faut relocaliser un certain nombre de productions.
03:42 Et puis surtout, il faut oser l'export.
03:44 C'est ça le vrai sujet.
03:45 Je m'en prends d'accord.
03:45 Mais ça, on est d'accord là-dessus.
03:46 Mais 160 milliards de déficit, vous vous prenez quel engagement pour les deux ans qui viennent ?
03:52 Écoutez, l'engagement que nous prenons, c'est d'abord, avec le gouvernement,
03:56 c'est de réindustrialiser le pays, de réimplanter les usines petit à petit en France
04:02 pour produire ce dont on a besoin, notamment en souveraineté.
04:06 Et puis, moi, je prends l'engagement de continuer mon tour de France des régions.
04:11 Et du monde aussi.
04:12 Et du monde, mais ça, on en parlera si vous voulez.
04:14 C'est vendre la France.
04:16 Mais c'est surtout faire en sorte que les entreprises soient accompagnées,
04:20 que chaque entreprise soit démarchée en disant pourquoi vous n'allez pas à l'international ?
04:25 Pourquoi vous n'osez pas ?
04:26 Pourquoi elles ne veulent pas ?
04:27 Voilà.
04:27 Je pense que sincèrement, il y a une question de culture de l'export.
04:32 Notre pays, finalement, est plutôt...
04:34 On parle mal anglais ? On parle mal allemand ?
04:36 Ce n'est pas simplement une question de langue.
04:37 Je pense que souvent, les entreprises se contentent d'un marché local
04:41 dans lequel elles sont confortablement installées.
04:43 Ça fait du bien.
04:45 Et se dire, est-ce que ce n'est pas risqué d'aller à l'international ?
04:48 Moi, je veux convaincre les entreprises qu'on a tous les outils
04:51 pour les accompagner à l'international avec des risques extrêmement limités.
04:55 Et c'est vraiment l'engagement que je prends, c'est d'aller accompagner
04:57 et de faire en sorte qu'il y ait de plus en plus de PME.
04:59 Ça marche déjà.
05:00 Nous avions 120 000 entreprises à l'export.
05:04 On est à 144 400.
05:06 Donc, ça monte.
05:07 Ça monte.
05:08 On vous croit.
05:09 Mais alors, le SMR, les fameuses petites centrales nucléaires
05:11 que le gouvernement veut lancer dans les 10 ans qui viennent,
05:13 est-ce que ça rapportera de l'argent ?
05:14 Est-ce que ça va se vendre à l'étranger ?
05:16 Écoutez, on vend déjà du nucléaire à l'étranger.
05:20 On le fait y compris, bien sûr, sur la technologie EPR2.
05:24 C'est le cas notamment au Royaume-Uni où on a un réacteur
05:30 et on est en train de montrer...
05:31 Oui, c'est EDF, GER.
05:32 C'est EDF, une deuxième centrale.
05:33 Et on a aujourd'hui de nombreux pays qui sont intéressés par notre technologie
05:37 et donc, oui, j'ai bon espoir...
05:38 Il faut les vendre dès maintenant.
05:39 Il faut les vendre dès maintenant.
05:40 Et c'est ce que je fais cette fois-ci à l'international.
05:43 Quand je me déplace, j'ai fait une vingtaine de pays dans les derniers mois
05:47 et je recommence une tournée à la fois en Afrique, en Asie et en Océanie
05:54 pour vendre la France, pour vendre la marque France
05:56 en emmenant avec moi les grandes entreprises,
05:58 mais aussi les petites et les moyennes entreprises.
06:02 Là, c'est le Olivier Bescht commercial.
06:04 C'est ça. Vous êtes avec le bâton de pèlerin.
06:06 Si vous voulez, c'est un peu...
06:08 Ma mission, c'est d'aller vendre la France à l'étranger,
06:12 qui a à la fois emmené nos petites et moyennes entreprises,
06:15 nos grands groupes, acquérir des contrats.
06:18 Et puis, dans l'autre sens, c'est vendre aussi la marque France
06:21 pour les investissements à l'étranger.
06:23 Et force est de constater que depuis trois ans maintenant,
06:26 la France est devenue le premier pays en termes d'attractivité.
06:31 Nous sommes la première terre d'accueil des investissements étrangers en Europe.
06:34 Ce sont des milliers de projets.
06:36 Ce sont des usines qui se montent.
06:38 Ce sont des extensions également.
06:40 Ce sont des emplois qui sont créés.
06:42 Et tout ça, c'est bon pour l'économie.
06:44 Je voulais juste terminer par une question sur la réforme des retraites,
06:46 si vous pouvez me dire un mot.
06:48 C'est vrai que quand on voit le déficit commercial aujourd'hui,
06:50 160 milliards, la réforme des retraites, c'est une goutte d'eau.
06:53 Ça vous inspire quoi comme réflexion ?
06:55 Ce n'est pas du tout la même chose.
06:56 Si vous voulez, la réforme des retraites,
06:59 c'est faire en sorte que les comptes publics soient équilibrés.
07:04 C'est faire en sorte qu'on puisse continuer à payer les retraites dans le futur
07:08 avec la sauvegarde de notre régime de répartition,
07:12 qui est un régime qui permet justement une égalité entre les générations.
07:17 Nous avons sur le déficit commercial d'autres choses.
07:20 C'est-à-dire que globalement, c'est vrai que la nation ne s'enrichit pas
07:24 lorsqu'elle a un déficit commercial,
07:27 mais ce sont essentiellement des flux privés.
07:30 Ce sont des entreprises qui importent.
07:33 Mais vous comprenez que ce qu'il dit 10 milliards de déficit,
07:35 ce n'est rien par rapport aux commerces ?
07:37 C'est comme comparer des oranges avec des poireaux.
07:41 Ce n'est pas du tout la même chose.
07:43 Les 164 milliards de déficit commercial,
07:46 ce sont des acteurs privés essentiellement qui le réalisent.
07:50 De l'autre côté, ce sont les fonds publics qui financent les retraites de la population.
07:55 On a compris. Là, vous vous engagez à redresser la barre du paquebot France,
07:59 si on peut l'appeler comme ça.
08:00 C'est ce qu'on essaye de faire sur tous les domaines avec le gouvernement.
08:04 C'est à la fois essayer de redresser les comptes publics,
08:07 mais aussi essayer de redresser les comptes privés,
08:09 parce que globalement, c'est la nation qui doit être gagnante à la fin.
08:13 Olivier Becht, merci d'être venu sur CNews, ministre du Commerce extérieur.
08:16 Restez avec nous.
08:18 [Musique]
08:22 Merci à tous !

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