Ecoutez l'interview du Général Ghislain Réty, Commandant du GIGN.
Regardez L'invité de RTL du 03 avril 2023 avec Amandine Bégot.
Regardez L'invité de RTL du 03 avril 2023 avec Amandine Bégot.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 RTL matin
00:06 RTL il est 7h43, excellente journée à vous tous qui nous écoutez. Amandine Bégaud vous recevez donc ce matin le général Gislain Retty
00:13 commandant du GIGN. Le GIGN en deuil, je le disais la semaine dernière, par la mort d'un des vôtres général Retty, le major Arnaud Blanc
00:21 Paxé, il était le papa de deux jeunes enfants, il avait 35 ans.
00:24 On va bien sûr revenir dans un instant sur les circonstances de son décès et sur votre mission là bas, celle du GIGN.
00:30 Mais d'abord peut-être un mot de l'hommage que lui a rendu vendredi Emmanuel Macron. Le président a salué un homme
00:35 souriant et libre. Est-ce que c'est ce que vous retiendrez vous aussi de lui ?
00:39 Oui je pense que c'est deux critères qui le caractérisent bien. C'est quelqu'un qui avait
00:43 toujours le sourire, qui était toujours très joyeux,
00:46 qui prenait beaucoup de plaisir à faire tout ce qu'il faisait, qui était passionné par la vie, passionné par sa famille,
00:52 passionné par son métier, passionné par la patrie. C'était quelqu'un d'extrêmement patriotique. Donc je pense que les deux caractéristiques
00:57 correspondent bien au personnage. Il était entré dans la gendarmerie en 2009 et
01:04 avait intégré l'antenne du GIGN en 2019.
01:07 Il a été tué le major Arnaud Blanc lors d'une opération de lutte contre l'orpaillage illégal en Guyane.
01:13 On va peut-être rappeler pour nos auditeurs ce qu'est l'orpaillage et pourquoi c'est interdit.
01:18 L'orpaillage c'est l'extraction d'or et la Guyane
01:22 regorge d'or. Donc il y a l'orpaillage illégal qui est très
01:27 encadré et il y a l'orpaillage illégal. Ce n'est pas le fait vraiment d'extraire de l'or, c'est les conséquences en fait de l'orpaillage illégal qui sont
01:35 dramatiques parce que c'est une atteinte à la biodiversité, parce que pour extraire l'or il faut énormément de mercure.
01:40 En gros pour extraire un kilo d'or, il faut un kilo de mercure.
01:45 Donc ce mercure est ensuite déversé dans les fleuves, donc c'est la population qui est complètement
01:50 empoisonnée par ce mercure et ça se ressent dans les chiffres qui peuvent être ressortis par l'agence
01:57 l'ARS.
01:59 C'est aussi la faune et la flore qui sont entièrement détruites et cet orpaillage aussi illégal
02:05 draine une forme de violence
02:07 parce qu'il y a des bandes armées qui essayent de s'approprier
02:11 cet or illégal, donc elles s'attaquent entre elles. Ça draine aussi de la prostitution forcée, c'est aussi
02:19 du travail de mineurs, donc c'est tout un écosystème de la délinquance qui est
02:24 créé par cet orpaillage illégal. - 500 sites environ répertoriés en Guyane et plus près de 9000 mineurs
02:32 clandestins. Le site que le major Arnaud Blanc et ses camarades étaient censés
02:36 démanteler est un site installé en plein coeur de la jungle guyanaise. Que s'est-il passé ?
02:42 - Effectivement c'est le site de Dorlin, sur le côté de Maripasoula.
02:45 Ce qui s'est passé, c'était une opération qui était prévue en coopération avec les forces armées guyanaises,
02:53 donc les militaires qui sont soit sur place soit en renfort.
02:57 C'était un détachement qui était prévu s'infiltrer. Ils ont été déposés en hélicoptère parce que là-bas les élongations sont extrêmement
03:03 grandes. La Guyane c'est grand comme la région Ronalp et la région Paca réunies.
03:10 - Et 95% c'est de la forêt. - Exactement, il n'y a pas de route ou très très peu, il y a quelques sentiers mais
03:15 en fait on se déplace sur les fleuves, donc c'est les piroguiers qui transportent tout ça.
03:20 Donc ils se sont fait déposer par hélicoptère pour regarder des élongations.
03:24 Ensuite il était prévu une marche d'approche pour démanteler
03:28 un lieu de ravitaillement.
03:31 Ils se sont approchés d'un premier carbet, donc c'est une petite maison. Là les individus ont été
03:37 neutralisés. Ils se sont ensuite déplacés sur un deuxième carbet.
03:40 Et là l'enquête est en cours, donc c'est un peu trop tôt pour dire vraiment les circonstances exactes.
03:45 Mais il y a eu un échange de coups de feu et Arnaud a été mortellement blessé.
03:49 - C'est une opération classique où vous saviez qu'elle était dangereuse ? Vous allez me dire il n'y a peut-être jamais d'opération classique ?
03:55 - C'est une opération qui est faite très régulièrement.
03:57 Ils savaient bien évidemment qu'elle était dangereuse. C'est l'objectif aussi de l'emploi du GIGN avec les forces armées.
04:06 Oui, potentiellement on sait qu'on peut tomber sur des bandes armées, potentiellement on sait qu'il peut y avoir un échange de coups de feu.
04:11 Mais notre objectif c'est de les prendre aussi par surprise pour éviter justement
04:16 ces tirs par balles. - Vous évoquiez tout à l'heure ces trafics, cette délinquance
04:21 extrême d'une extrême violence. Vous vous retrouvez face à des hommes qui sont surarmés ?
04:26 - Surarmés ? Pas forcément.
04:30 Il y a plusieurs niveaux en fait. On a les carimperos qui sont vraiment les extracteurs d'or.
04:36 Qui eux ne sont très peu armés, voire pas du tout. Par contre au niveau au-dessus on commence à avoir tous les
04:42 responsables de l'objestique parce qu'il y a une vraie manœuvre. - C'est un peu comme le fonctionnement d'une mafia ?
04:47 - C'est ça, il y a une sorte de mafia. Après il y a des individus qui sont armés pour garder éventuellement les camps. Et après on a des bandes armées
04:54 qui passent de camp en camp et qui même des fois se déplacent un petit peu sur d'autres sites que les sites d'orbaillage.
04:59 D'où une reconnaissance aussi de la violence sur les côtes ou
05:04 une augmentation des homicides, des vols à main armée. Après c'est la même population qu'on retrouve ailleurs. - C'est l'essentiel de votre mission en Guyane pour le GIGN ?
05:11 - C'est la principale mission, en tout cas c'est la plus emblématique.
05:15 Mais comme toute antenne, le GIGN dispose de sept antennes outre-mer, elle a d'autres missions.
05:21 Aussi bien sur Kourou, sur Cayenne, sur Saint-Laurent, qui sont la lutte contre la criminalité. Toute forme de criminalité. Ça peut être
05:29 les trafics d'armes, les trafics de stupes, les hauteurs d'homicides,
05:33 la lutte contre la pêche illégale. Donc on revient sur des
05:36 missions assez classiques. Mais c'est vrai que ça là sort un petit peu du carcan habituel.
05:40 - Ce drame, il marque d'autant plus que c'est très rare qu'un gendarme du GIGN meurt en mission ?
05:45 - En mission, le GIGN a perdu
05:49 trois personnes avant celle-là.
05:52 Notamment le premier en 97.
05:54 Donc il y a environ 25 ans.
05:57 Oui c'est très rare parce que tout est fait justement pour assurer la protection des personnels.
06:03 Tout en remplissant au maximum la mission et interpeller l'individu pour le remettre à la justice vivant.
06:07 Donc oui, heureusement c'est très très rare. Même si on a eu aussi beaucoup de blessés.
06:10 - Avec ces missions notamment particulièrement dangereuses dont vous parliez en Guyenne. Gérald Delarminin a indiqué la semaine dernière,
06:18 Général Péretti, qu'un médecin du GIGN avait été blessé lors de la très violente manifestation à Sainte-Sauline.
06:25 D'abord, est-ce que vous avez de ces nouvelles ?
06:27 - Alors non, je n'ai pas de nouvelles.
06:30 Ce n'est pas un médecin du GIGN, c'est un médecin du service de santé des armées.
06:34 Et au regard des risques que comportent toutes les missions du GIGN,
06:40 systématiquement il y a un médecin qui est complètement intégré au GIGN, mais ne dépend pas du GIGN. Mais ce médecin peut avoir d'autres missions.
06:48 Il peut avoir d'autres missions sur du maintien de l'ordre, comme c'était le cas. Donc il peut être employé par la gendarmerie puisqu'il est
06:54 en poste sur le territoire national. Et au regard de son expertise,
06:59 nous on les emploie, mais ils ne sont pas affectés au GIGN, ils ne sont pas gendarmes. - Donc c'est normal qu'un médecin,
07:04 comme on le présente, du GIGN puisse être affecté sur ce type de mission, de manifestation ? C'est pas parce que les autorités redoutaient
07:11 quelque chose d'extrêmement violent avec de très nombreux blessés ?
07:14 - Non, sous toute opération d'envergure, forcément il y a un soutien médical qui est envisagé. Et ce médecin faisait partie du soutien médical qui était prévu.
07:22 - Général Retty, vous commandez, je le disais, le GIGN qui va bientôt fêter ses 50 ans.
07:28 Qu'est-ce qui a changé en 50 ans ? J'imagine que vos missions ne sont pas les mêmes ?
07:32 - J'ai envie de dire que tout a changé.
07:35 Même si l'ADN du GIGN reste le même, c'est-à-dire qu'on a la même philosophie d'action.
07:40 Je le répète, notre objectif, c'est vraiment, notre mission principale, c'est d'interpeller les auteurs pour les remettre à la justice. Donc ça, ça reste
07:48 dans notre ADN. Après, bien évidemment, l'équipement a changé,
07:53 les techniques et les tactiques ont changé, les nouvelles technologies nous ont aussi beaucoup apporté. On s'est
07:59 professionnalisé dans de nombreux domaines, dans le domaine de la négociation, dans le domaine de l'emploi des explosifs,
08:04 pour être rentré dans le technique. Et après, il y a le volume aussi de l'unité qui a changé, puisque au départ, le GIGN, quand il est créé,
08:12 juste après la prise d'otage de Munich en 72,
08:15 c'est une toute petite unité d'une vingtaine de personnes. Aujourd'hui, le GIGN,
08:19 c'est 1000 personnes.
08:22 Donc c'est 400 qui sont sur Versailles,
08:25 ensuite les 600 autres sont répartis dans 14 antennes, 7 Outre-mer, dont l'antenne de GIGN française.
08:33 Et
08:34 13 autres antennes, donc 7 Outre-mer, 7 en métropole.
08:38 On parlait tout à l'heure
08:39 de ces interventions, il y a aussi celles que vous faites au quotidien sur des forcenés retranchés,
08:46 qui se terminent souvent bien d'ailleurs, par la négociation.
08:52 Est-ce que vous diriez aussi que la société a évolué en 50 ans ? C'est pas la même violence ?
08:58 Notre adversaire s'est durci, s'est sophistiqué aussi, puisque lui aussi s'est approprié les nouvelles technologies.
09:04 Le GIGN, c'est 2500 missions par an.
09:07 Donc ça fait quand même 7 à 8 missions par jour.
09:11 Toutes ne sont pas médiatisées, on a tous en tête des grandes opérations, mais c'est pas...
09:16 Oui, tout le monde va retourner à l'émission emblématique.
09:19 Mais on agit au profit principalement de la gendarmerie, mais pas que, on peut travailler au profit des douanes ou d'autres services de l'état.
09:26 Et on agit beaucoup, donc vous avez cité les forcenés, les prises d'otages, c'est un peu déjà l'émission emblématique.
09:31 Mais c'est beaucoup d'interpellations d'individus dangereux dans le cadre d'affaires judiciaires.
09:35 Donc ce sont des auteurs d'homicides, ce sont des auteurs de vols à main armée, ce sont des
09:40 braqueurs, voilà c'est un petit peu notre lot quotidien, ce sont nos clients.
09:46 D'un mot, c'est pas une unité comme les autres à diriger, d'un seul mot. Non, c'est forcément une unité atypique.
09:52 Vous en avez les yeux qui brillent d'ailleurs quand on te dit ça. Bien sûr, heureusement.
09:54 Merci beaucoup en tout cas.
09:57 2500 missions par an, je suis sûr que ce chiffre a surpris les auditeurs d'RTL,
10:00 effectué par le GIGN, Général Gist Narratif. Vous restez avec nous puisque vous êtes dans l'oeil de...
10:05 Merci.
10:06 [SILENCE]