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Frédéric Taddeï et ses invités débattent des grandes questions du XXIe siècle dans les #VisiteursDuSoir

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00:00:00 Ils seront neuf visiteurs du soir. Ce soir, quatre sont déjà là.
00:00:07 L'émission commence juste après le rappel des titres. Isabelle Piboulot.
00:00:12 Accident mortel à Villeneuve-Dasques. Ce matin, quatre personnes ont été tuées, dont trois jeunes policiers.
00:00:21 Deux passagers ont été grièvement blessés dans une collision entre un véhicule de police et une voiture.
00:00:27 Les premiers éléments confortent l'hypothèse d'un choc frontal. Gérald Darmanin se rendra dans le commissariat de Roubaix demain matin,
00:00:34 où travaillent les trois fonctionnaires. Une enquête est ouverte pour homicide et blessures involontaires.
00:00:40 C'est une première pour un président français. À l'issue du sommet du G7 au Japon, Emmanuel Macron s'est rendu en Mongolie,
00:00:47 où il a promu un partenariat axé sur l'énergie. Une visite symbolique dans ce pays enclavé entre la Chine et la Russie.
00:00:55 Emmanuel Macron a partagé à son homologue mongol sa détermination à soutenir l'Ukraine.
00:01:01 La France multiplie les efforts pour parler aux pays qui n'ont pas clairement condamné l'invasion russe.
00:01:06 Dans l'Indre, les participants au Teknival prennent la route. Il n'était plus qu'environ 15 000 sur le site dans l'après-midi.
00:01:14 La préfecture s'attend tout de même à voir l'événement se prolonger jusqu'à demain matin.
00:01:19 Pour son 30e anniversaire, le rassemblement, qui était interdit par les autorités, a dépassé la barre des 30 000 personnes la nuit dernière.
00:01:27 Bienvenue sur le plateau des visiteurs du soir. C'est la fin de la semaine. Il est 22h. L'heure où l'on peut tous dire et se poser toutes les questions
00:01:39 qu'on ne se pose pas ailleurs. Les jeux vidéo, par exemple, vont-ils devenir une discipline olympique ?
00:01:44 Le CIO y songe. Il organise du 22 au 25 juin à Singapour les Olympic eSports Series, dont la prochaine édition pourrait bien se tenir à Paris en 2024,
00:01:54 en marge des Jeux olympiques. L'eSport rassemble en effet tout un public jeune et brasse des fortunes. La question, c'est est-ce que c'est vraiment un sport ?
00:02:02 On en débattra à 22h20 avec Laurent Félusse, qui est avocat spécialisé dans le droit du sport, avec Philippe Rodier, qui est le manager d'Atletec,
00:02:10 un club d'eSport professionnel et l'auteur de "Jouer Sérieux, le phénomène eSport" raconté par les gamers.
00:02:17 Fernand Lepez, le grand entraîneur de MMA, sera également présent. On reviendra ensuite sur l'usage des drones par les forces de l'ordre.
00:02:24 La loi les autorise depuis un mois à s'en servir, mais un recours a été déposé devant le Conseil d'État par Jean-Baptiste Souffron
00:02:30 au nom de l'Association de Défense des Libertés Constitutionnelles. Il nous rejoindra à 23h et se retrouvera face à Virginie Benzou sans brûler,
00:02:39 avocate et locille, auteur de "Failles de sécurité et violations de données personnelles" qui estime au contraire que
00:02:45 la nouvelle réglementation ne porte pas atteinte à nos droits et libertés fondamentales. Il y aura également Philippe Cholous,
00:02:51 ex-colonel de gendarmerie, spécialiste du maintien de l'ordre. Enfin, on terminera l'émission avec Driss Ghali, qui vient de publier
00:02:57 une contre-histoire de la colonisation française, un livre politique qu'il veut un antidote contre la désinformation et la pensée unique,
00:03:05 je le cite, face à lui, l'historien Gilles Manseron, à qui l'on doit de nombreux livres sur la colonisation. Et on commence tout de suite
00:03:11 avec Sergueï Gouriev. Vous êtes le directeur de la formation et de la recherche de Sciences Po. Et vous avez fui la Russie il y a 10 ans.
00:03:19 Et vous venez de publier "Spin Doctors", "Spin Dictators", j'allais le faire, évidemment, avec un célèbre professeur de l'Université de Californie.
00:03:30 Alors, qui sont-ils, ces "Spin Dictators" ? Et pourquoi les appelez-vous comme ça ?
00:03:37 Merci beaucoup de m'inviter. C'est vraiment les "Spin Dictators". On a essayé de trouver le nom en français.
00:03:46 C'était très difficile parce qu'en anglais, il existe "Spin Doctors", comme vous avez évoqué. "Spin Doctors", c'est les conseillers
00:03:53 en politique qui donnent les récits, donnent les narratifs, aident les hommes et les femmes politiques.
00:04:00 On appelle ça le "storytelling".
00:04:02 "Storytelling", c'est ça ? C'est mon anglais, quoi. Et on a montré dans notre livre que la plupart, la majorité des leaders non-démocratiques
00:04:13 aujourd'hui, les autocrates, les dictateurs, maintenant, c'est "Spin Dictators", dictateur de la manipulation, dictateur de l'image,
00:04:21 et pas vraiment dictateur de violences ouvertes. Et donc on distingue les dictateurs de la peur et les dictateurs de la spin,
00:04:30 les dictateurs de la manipulation. Et donc c'est "Spin Dictators".
00:04:33 Parmi eux, vous mettez Vladimir Poutine, vous mettez évidemment Recep Tayyip Erdogan, vous mettez aussi Fujimori,
00:04:41 qui était le président du Pérou, vous mettez Orban. Vous en mettez beaucoup. Ils ont l'air très différents.
00:04:49 Alors justement, la question qu'on se pose, et c'est l'objet de votre livre, c'est en quoi c'est un nouveau visage de la tyrannie ?
00:04:55 Quelle différence existe-t-il entre ces dictateurs-là, ces "Spin Dictators", et les dictateurs du XXe siècle, qui eux faisaient plus peur ?
00:05:05 C'est ça. La différence, c'est la violence peur ouverte, répression ouverte, ou répression masquée, cachée, censure postmoderniste, cachée aussi.
00:05:17 Ils massacrent moins leurs opposants.
00:05:20 Ils massacrent moins, ils cachent les massacres aussi. Parfois, il y a des prisonniers politiques, mais les prisonniers politiques, les opposants,
00:05:28 ils sont en prison pour des raisons non politiques. Par exemple, en Turquie aujourd'hui, il y a Selahattin Demirtas,
00:05:36 un homme politique, leader du parti kurde, qui est en prison pendant 7 ans, pour des raisons qui ne sont pas liées au fait
00:05:45 qu'il est une vraie menace pour Erdogan, parce que c'est un vrai homme politique opposant.
00:05:51 Les mêmes choses en Russie, où le leader opposant, l'opposition russe, Alexei Navalny, est maintenant en prison,
00:05:59 mais il a été arrêté, persécuté depuis 2013, par des raisons non politiques en fait.
00:06:06 Et ils l'ont arrêté parce qu'il revenait dans le pays.
00:06:09 C'est ça.
00:06:10 S'il était resté dehors, ils étaient contents de s'en débarrasser.
00:06:13 Parfois, Vladimir Poutine utilise l'empoisonnement. C'est aussi un outil très moderne, parce que c'est un outil caché,
00:06:24 pour tuer quelqu'un sans en fait donner l'impression que c'est moi.
00:06:29 Donc l'idée, c'est pour donner l'idée que moi je suis démocrate, et c'est l'idée des spin dictators, des dictateurs,
00:06:37 de la manipulation, c'est pour faire semblant d'être démocrate.
00:06:41 Vous dites quelque chose de très intéressant, mais en parlant des...
00:06:44 Les dictateurs du XXe siècle censuraient toute critique pour ne pas avoir l'air faible.
00:06:49 Ceux d'aujourd'hui s'en abstiennent pour avoir l'air fort.
00:06:53 Au fond, il y a beaucoup moins de censures aujourd'hui chez les spin dictators qu'il y en avait chez les dictateurs du XXe siècle.
00:07:00 C'est ça. Et c'est ça. En Union soviétique, par exemple, j'ai né... Je suis né en Union soviétique.
00:07:08 Là, on a eu le département de la censure, Glavlit. On parle de ce ministère de la vérité, comme Orwell l'a dit.
00:07:17 Là, maintenant, la Constitution russe, en fait, interdit la censure.
00:07:22 La censure est cachée. La censure est vraiment, vraiment dissimulée.
00:07:28 Et donc les citoyens russes ne connaissent pas que l'information est censurée,
00:07:34 parce que l'information sur la censure est également censurée.
00:07:38 Et vous dites également que les dictateurs d'aujourd'hui, au fond, n'ont pas d'idéologie.
00:07:43 C'est ça. C'est ça. Quand vous vous souvenez de la grande idéologie du XXe siècle,
00:07:49 le nazisme, le bolchevisme, c'est complètement différent de l'idéologie de Viktor Orban,
00:07:55 qui est une idéologie conservatrice plutôt, anti-libérale, mais même, ce n'est pas une vraie idéologie.
00:08:02 C'est vraiment juste une idée que moi, je suis compétent, moi, je vais vous protéger.
00:08:10 C'est un peu comme les leaders populistes. Il y a beaucoup de spin-dictateurs qui ont commencé comme populistes.
00:08:16 Donc l'idée, c'est pour donner cette impression que moi, je suis ici, comme démocrate, très populaire.
00:08:23 Vous me soutenez parce que je suis compétent et je peux vous donner quelque chose comme leader démocratique.
00:08:30 Donc vous pouvez voir que visuellement, les leaders modernes, les spin-dictators, les autocrates modernes,
00:08:39 ils sont visuellement comme les leaders démocratiques, avec les tailleurs comme ça et pas l'uniforme militaire.
00:08:45 C'est Papinochet, Jaruzelski qui, eux, se montraient en…
00:08:49 En Staline, au moins, c'est aussi comme ça. C'est intéressant.
00:08:53 Il y a toujours les leaders du XXe siècle aujourd'hui, comme Assad ou Maduro, ils utilisent l'uniforme militaire.
00:09:03 Oui. Vous dites aussi qu'ils sont plutôt pacifiques.
00:09:07 C'est ça. Et en fait, cette traduction française, déjà qu'on prend le nouveau préface qu'on a écrit après le début de la guerre…
00:09:19 L'Ukraine.
00:09:20 L'Ukraine. Et donc on a dit que c'est en fait le changement du régime.
00:09:24 Donc Vladimir Poutine, maintenant, est en cours de venir à l'arrière, comme Maduro et le dictateur de la peur.
00:09:32 Vladimir Poutine 2,0. Vladimir Poutine d'aujourd'hui, c'est plutôt le Vladimir Poutine du XXe siècle, le dictateur de la peur.
00:09:41 Et sinon ?
00:09:42 La transformation de la régime russe. Parce qu'avant ça, il était plutôt spin-dictator et était aussi plutôt pacifique.
00:09:49 Et c'est vrai qu'en général, il déclenche assez peu de guerres.
00:09:52 C'est ça. Le livre est basé sur plusieurs articles scientifiques. On a collecté beaucoup de données et on a montré que le dictateur de la manipulation ne déclenche pas de guerres.
00:10:09 Et ils maintiennent des apparences de démocratie, mais au fond, il n'y a pas de contre-pouvoir en réalité.
00:10:14 C'est ça. L'idée, c'est d'éliminer les contre-pouvoirs, affaiblir les opposants, mais aussi garder les élections, faire semblant qu'on a les médias indépendants.
00:10:27 Il y a toujours quelques médias indépendants, mais très faibles et très affaiblis en fait.
00:10:34 Il y a des censures, il y a la cooptation des propriétaires des médias, c'est un outil très important dans ce régime, comme Victor Orban.
00:10:44 C'était la même chose avec Chavez en Venezuela.
00:10:50 Lee Kuan Yew, qui était le premier dictateur du spin, a utilisé la loi de la diffamation contre les médias.
00:10:58 Mais l'idée, c'est toujours d'affaiblir les opposants, affaiblir le débat public et donc concentrer les pouvoirs.
00:11:07 Alors très souvent, ce qui peut les rassembler tous, c'est qu'ils sont contre l'Occident.
00:11:11 Qu'est-ce qu'ils nous reprochent ?
00:11:13 Oui et non, parce que Orban…
00:11:17 Il y a eu des critiques régulières et sévères contre…
00:11:22 La démocratie libérale, mais il fait semblant d'être le vrai Occident.
00:11:28 La même chose, la Turquie, c'est un membre de l'OTAN.
00:11:32 C'est toujours difficile de distinguer ça, mais le vrai esprit de l'Ouest, c'est vraiment la démocratie libérale.
00:11:42 C'est différent de ce régime-là, c'est sûr.
00:11:45 Qu'est-ce qu'il faut faire contre les spin dictateurs, d'après vous ?
00:11:51 On a écrit dans ce livre, dans le dernier chapitre, c'est vraiment la liste des choses qu'on doit faire.
00:11:59 L'idée, c'est d'engager, mais en manière antagoniste, contradictoire.
00:12:06 Il faut souvenir qu'il faut lutter contre ce régime, parce que ce régime n'est pas aussi dangereux que le régime du XXe siècle.
00:12:20 Même s'ils sont dangereux.
00:12:22 Il faut, par exemple, lutter contre les exportations de la corruption,
00:12:29 qui est un vrai arme de ce régime, quand ils exportent la corruption au Parlement, au gouvernement.
00:12:43 C'est vraiment quelque chose qu'ils utilisent.
00:12:46 Mais en même temps, il faut engager, il faut maintenir les liens avec les sociétés civiles,
00:12:52 avec les hommes et les femmes des affaires légitimes dans ce régime-là,
00:12:59 parce que c'est aussi la faiblesse du régime comme ça.
00:13:02 Parce qu'ils ne veulent pas utiliser la répression ouverte,
00:13:06 et donc ils sont ouverts à quelques oppositions, à quelques représentants des sociétés civiles,
00:13:14 à quelques femmes et hommes des affaires légitimes.
00:13:18 Donc on peut soutenir ces éléments-là, comme on le fait maintenant.
00:13:23 Et ce n'était pas possible avec le régime soviétique ou naziste.
00:13:27 Ils utilisent souvent les erreurs que peuvent commettre les Occidentaux,
00:13:32 et notamment quand on déroge à nos propres principes.
00:13:35 Le deux poids, deux mesures, par exemple.
00:13:37 Ils le voient tout de suite quand on fait ça.
00:13:41 Est-ce que ça veut dire qu'il faut arrêter les interventions militaires
00:13:44 comme on a pu en faire en Afghanistan, en Irak, en Libye ?
00:13:50 Et est-ce qu'il faudrait qu'on arrête de maltraiter un certain nombre de nos dissidents,
00:13:55 que ce soit Julian Assange, Manning ou Snowden, qui est réfugié en Russie ?
00:14:01 C'est ça. Quand on n'utilise pas nos propres standards,
00:14:08 ça aide le narratif, le récit du dictateur du spin.
00:14:11 Parce qu'ils veulent dire à leurs propres concitoyens, comme patriotes,
00:14:16 que regarder à l'ouest, à Londres, à Washington, à Bruxelles,
00:14:20 c'est la même chose qu'on fait.
00:14:23 Et donc quand on ne garde pas nos propres standards d'éthique, de loi,
00:14:28 c'est vraiment le soutien pour un régime comme ça.
00:14:32 Donc il faut mettre notre propre maison en ordre, comme on dit en anglais.
00:14:38 Et c'est vraiment important. Vous avez évoqué quelques interventions,
00:14:43 comme Afghanistan et Irak, c'est aussi différent.
00:14:45 Afghanistan et Irak, c'était différent. Libye, c'est une autre chose.
00:14:49 Mais l'intervention en Irak, c'était contre l'ONU.
00:14:52 Et donc maintenant...
00:14:53 Oui, mais c'était un des arguments de Vladimir Poutine
00:14:55 au moment où il envahit l'Ukraine.
00:14:57 C'est exactement ça.
00:14:59 Et donc quand on fait ça, c'est toujours la nourriture
00:15:03 pour les récits des dictateurs du XXIe siècle.
00:15:07 Est-ce qu'ils ont de l'avenir, pour vous, ces dictateurs ?
00:15:11 Est-ce qu'ils dureront aussi longtemps qu'ont duré les dictateurs du XXe siècle ?
00:15:14 On ne le sait pas. On ne le sait pas du tout,
00:15:17 parce que c'est un phénomène nouveau.
00:15:21 C'est le phénomène des 2, 3, 4 décennies.
00:15:25 Ça a émergé en années 80-90.
00:15:29 Depuis ce moment-là, la plupart des régimes non démocratiques
00:15:34 sont les dictateurs du spin.
00:15:36 Mais on n'a pas de données sur l'évolution des régimes comme ça.
00:15:41 Et maintenant, on peut voir qu'il y a des démocratisations.
00:15:45 On donne l'exemple d'Équador ou de l'Arménie,
00:15:49 où les dictateurs spin dictators ont été transformés
00:15:53 dans les vraies démocraties, faibles et imparfaits.
00:15:57 Mais parfois, ils vont à l'arrière,
00:15:59 comme j'ai déjà évoqué avec Vladimir Poutine l'année dernière,
00:16:03 ou le régime de Venezuela,
00:16:06 où Chavez a été spin dictator parfait.
00:16:10 Mais Maduro, c'est vraiment un dictateur du peur.
00:16:13 Parce que parfois, ils sont coincés.
00:16:15 Ils voient qu'ils ne durent pas.
00:16:18 Donc, il faut choisir, soit essayer de garder le même régime,
00:16:22 c'est vraiment un précurseur pour la démocratisation,
00:16:26 ou essayer d'aller à l'arrière dans le régime du XXe siècle,
00:16:31 l'utilisation de la répression ouverte.
00:16:35 Est-ce que vous classez parmi les spin dictators,
00:16:39 par exemple l'Arabie saoudite ou les Émirats,
00:16:43 qui ne sont pas des démocraties,
00:16:45 mais qui ne ressemblent pas non plus aux régimes dont vous parlez ?
00:16:50 C'est un peu différent.
00:16:52 Vraiment, c'est un régime des Émirats et de l'Arabie saoudite.
00:16:58 Et la Chine aussi, c'est un peu différent.
00:17:01 C'est la dictature de la peur moderne, digitale, numérique.
00:17:05 C'est un peu différent, mais c'est la dictature ouverte.
00:17:08 La Chine ne fait pas semblant d'être une démocratie.
00:17:13 Même chose pour l'Arabie saoudite ou l'Émirat.
00:17:17 Mais ce ne sont pas les spin dictators.
00:17:20 C'est vrai que quand on regarde tous les autres régimes,
00:17:25 la plupart, la majorité des régimes non démocratiques d'aujourd'hui,
00:17:29 ce sont vraiment des régimes comme ça.
00:17:31 Merci, Sergueï.
00:17:33 C'est un livre dont on va certainement beaucoup parler.
00:17:36 Je vous libère.
00:17:37 On va nous maintenant s'intéresser aux jeux vidéo.
00:17:40 Font-ils devenir des disciplines olympiques ?
00:17:45 On fait d'abord une pause et on en parle tout de suite après.
00:17:49 C'est hyper intéressant parce qu'il vous lance sur la radio.
00:17:52 Les jeux vidéo vont-ils devenir une discipline olympique ?
00:17:56 Le CIO y pense.
00:17:57 Il organise du 22 au 25 juin à Singapour les Olympic eSports Series.
00:18:02 Il l'avait déjà fait en 2021 en marge des Jeux olympiques de Tokyo.
00:18:06 Il pourrait bien organiser la prochaine édition à Paris en 2024,
00:18:09 en marge des Jeux olympiques.
00:18:11 L'eSport rassemble en effet tout un public jeune et brasse des fortunes.
00:18:16 L'équipe OJ, vainqueur des championnats du monde de Dota 2 en 2019,
00:18:21 a remporté 15 millions de dollars.
00:18:23 Au tournoi de Roland-Garros la même année,
00:18:25 les vainqueurs hommes et femmes ont touché seulement 2,3 millions d'euros chacun.
00:18:30 La question, c'est est-ce que c'est vraiment un sport ?
00:18:33 On en débattra maintenant avec Philippe Rodier,
00:18:38 qui est manager d'Atletec,
00:18:43 c'est un club eSport professionnel,
00:18:45 et vous êtes l'auteur de "Jouer Sérieux",
00:18:47 le phénomène eSport raconté par les gamers.
00:18:49 Laurent Félous est avocat spécialisé dans le droit du sport.
00:18:53 Et Fernand Lopez nous a rejoint.
00:18:55 Vous êtes aujourd'hui l'un des plus grands entraîneurs de MMA.
00:18:59 La MMA, c'est ce sport de combat très violent,
00:19:02 dont on va voir tout de suite quelques images.
00:19:04 Un sport qui a lieu dans une cage
00:19:07 et qui a mis longtemps lui aussi avant d'être considéré comme un sport
00:19:10 parce qu'il était jugé trop violent justement.
00:19:13 C'est la première question que je voudrais poser à tous les trois.
00:19:17 Les jeux vidéo sont-ils un sport ?
00:19:19 Si on en croit un sondage réalisé en 2019,
00:19:22 70% des Français ne considèrent pas l'eSport comme un sport.
00:19:27 Vous, quel est votre avis, Fernand Lopez ?
00:19:29 Vous savez ce que c'est que le sport de haute compétition ?
00:19:32 Il n'y a aucun doute.
00:19:33 Il y a quatre éléments qui sont nécessaires pour qu'on puisse considérer un sport comme un sport.
00:19:38 C'est le fait déjà qu'on puisse développer une ou plusieurs qualités physiques.
00:19:43 Quand on joue au jeu vidéo, on développe des qualités physiques.
00:19:46 Notamment le fait d'avoir la préhension,
00:19:50 les fléchisseurs des doigts qui vont manipuler.
00:19:53 On a besoin d'avoir le dos, une posture avec une hypertonicité du dos.
00:19:58 Sinon on aura mal, on va mal vieillir.
00:20:00 Il faut avoir un cadre institutionnel.
00:20:03 Aujourd'hui, l'eSport se construit à des teams comme ça.
00:20:08 Il y a des grosses équipes qui jouent à des jeux.
00:20:11 Il faut une quatrième option.
00:20:16 Un quatrième point qui est important, c'est celui d'avoir de la compétition.
00:20:19 S'organiser pour avoir une compétition.
00:20:21 Aujourd'hui, on a des compétitions qui se créent.
00:20:24 Finalement, il y a un point qui est important, c'est de se fédérer.
00:20:27 On a les quatre points les plus importants pour pouvoir être un sport.
00:20:30 Aujourd'hui, je n'ai aucun doute dessus.
00:20:32 Je suis certain que l'eSport devrait être un sport.
00:20:36 On va voir quelques images de ces fantastiques rassemblements
00:20:42 occasionnés par l'eSport aujourd'hui.
00:20:45 Énormément de public, beaucoup de participants, d'énormes enveloppes.
00:20:49 Laurent Félus, pour vous, est-ce que pour autant, c'est un sport ce qu'on voit là à côté de vous ?
00:20:54 Je ne nie pas l'impact que ça peut avoir, l'essor considérable que ça peut avoir au quotidien.
00:21:00 Et sincèrement, l'intérêt que les jeunes et les moins jeunes peuvent avoir pour cette discipline,
00:21:05 qui n'est pas d'ailleurs une discipline, mais une catégorie discipline.
00:21:07 Ce qui importe aussi pas mal de difficultés.
00:21:09 C'est comme l'athlétisme ou la natation.
00:21:11 Il y a plusieurs disciplines au sein même de l'eSport.
00:21:13 On peut avoir un athlétisme, le 100 mètres, 200 mètres, etc.
00:21:16 Donc, ça complique un petit peu la tâche.
00:21:17 Maintenant, là où il y a des problématiques, c'est que, comme Fernand le disait,
00:21:20 il y a plusieurs critères.
00:21:21 L'un des critères, c'est aussi la recherche de la performance physique.
00:21:24 C'est aussi avoir pour objectif l'expression ou l'amélioration d'une condition physique.
00:21:29 Et là, là-dessus, il y a véritablement un doute.
00:21:31 Un deuxième point, c'est aussi, il faut qu'il y ait un développement des relations sociales.
00:21:35 Et je pense que c'est tout l'inverse.
00:21:37 Je pense que vous conviendrez que, certes, il y a des relations sociales qui sont créées,
00:21:41 notamment de manière numérique, mais certainement par rapport à des jeunes
00:21:45 qui vont avoir la possibilité de sortir et de pouvoir avoir des relations sociales
00:21:49 plus, on va dire, naturelles.
00:21:51 Ce niveau de développement ne sera pas le même.
00:21:54 C'est exactement ce qu'on entend, ce que disent les mamans quand elles voient leurs enfants
00:21:58 jouer un peu trop aux jeux vidéo.
00:21:59 "Fais plutôt de l'exercice physique et si tu pouvais aller voir tes copains,
00:22:03 ce ne serait pas plus mal."
00:22:04 Donc, vous êtes d'accord avec elle ?
00:22:06 Là-dessus.
00:22:07 D'ailleurs, il y a un point qui est important, c'est que, par rapport à cette activité physique,
00:22:10 il est souvent recommandé, d'ailleurs, tous les personnes qui pratiquent notamment l'e-sport,
00:22:14 recommandent aux e-sportifs de très haut niveau d'avoir en parallèle de cette activité
00:22:18 une activité physique à part entière.
00:22:20 Donc, ça vient bien finalement mettre en avant le fait qu'il faut cette activité physique
00:22:23 en parallèle et que, du coup, il y a un doute sur ces critères-là.
00:22:27 On va demander son avis à Philippe Rodier.
00:22:29 Ce qui me fait plaisir, c'est que je suis content que quelqu'un sera d'accord avec ma maman.
00:22:32 C'est déjà un point important.
00:22:33 Pour le coin des rencontres sociales, moi, je vais donner juste un exemple.
00:22:36 C'est qu'aujourd'hui, d'ailleurs, je salue l'équipe Vitality qui vient d'être nommée championne du monde.
00:22:40 Il y avait 12 000 personnes à l'Accord Arena.
00:22:42 Il y avait des gens qui ne se sont jamais vus et qui se sont réunis à ce tournoi pour se voir
00:22:45 pour la première fois et je trouve ça merveilleux.
00:22:48 Pour la question de l'amélioration physique, je tiens à dire que les processus cognitifs font partie du physique.
00:22:53 Et quand vous faites de l'e-sport, vous travaillez sur l'aspect mental et justement sur la concentration.
00:22:57 Elle s'augmente.
00:22:58 Et c'est bien pour ça que l'e-sport, par exemple, aujourd'hui, est intégré dans les maisons de retraite.
00:23:01 Parce que quand vous avez Alzheimer, l'e-sport peut permettre de ralentir.
00:23:04 Je ne dis pas d'annuler Alzheimer, mais de ralentir Alzheimer.
00:23:07 Comme les beaux croisés.
00:23:08 Exactement.
00:23:09 C'est ce que je conseille à mon grand-père.
00:23:10 Et puis, à un moment donné, je lui ai dit ce que tu pourrais jouer avec moi.
00:23:12 Il m'a dit non.
00:23:13 Mais effectivement, c'est ce point de travail sur le mental et sur la concentration qui est important.
00:23:18 Et au-delà de cette question, ce qui est important, c'est qu'on a besoin de cette reconnaissance en tant qu'e-sport.
00:23:23 Un sujet que M. Lopez connaît extrêmement bien.
00:23:25 Pour avoir une reconnaissance auprès de l'État, pour avoir des subventions,
00:23:28 pour que les jeunes soient bien encadrés justement, parce qu'aujourd'hui, ce n'est pas forcément le cas.
00:23:31 Alors justement, c'est une question subviscidiaire, mais quand on voit déjà ce qui se passe autour de l'e-sport,
00:23:36 on se dit pourquoi vous voulez devenir une discipline olympique ?
00:23:39 Vous avez déjà tout.
00:23:40 Ah non, on n'a pas tout.
00:23:41 Moi, je vais vous donner un exemple très simple.
00:23:43 Je le dis avec le cœur un peu serré, mais en un mois, on a eu cinq clubs qui se sont arrêtés.
00:23:47 Des très gros clubs français.
00:23:49 Il y a un club notamment qui s'appelle LDLC, qui est soutenu par l'Olympique lyonnais.
00:23:52 Ça fait beaucoup d'employés qui sont mis à la porte aujourd'hui.
00:23:55 Et nous, on cherche un modèle économique stable.
00:23:57 Aujourd'hui, on ne l'a pas, ce modèle économique stable.
00:23:59 C'est très difficile de l'avoir.
00:24:00 Et quand on parle des Jeux olympiques, en fait, c'est une exposition qui est extrêmement importante
00:24:04 et qui ne permettrait pas de convaincre les gens, mais de leur présenter ce qu'est l'e-sport.
00:24:07 Et en présentant ce qu'est l'e-sport, nous, on espère avoir cette reconnaissance juridique
00:24:11 qui finalement existe déjà à l'étranger.
00:24:13 Au Danemark, l'e-sport est un sport.
00:24:15 Mais le problème, c'est qu'en France, ça me fait mal de le dire parce que j'aime bien mon pays aussi,
00:24:18 mais on a toujours un problème avec les phénomènes de masse.
00:24:21 Et on a toujours besoin de temps pour apprendre ce que sont les choses.
00:24:24 Sur l'exemple du MMA, je vais vous donner un exemple très simple.
00:24:26 La France était le seul pays européen à avoir interdit le MMA.
00:24:31 Moi, je ne connaissais rien au MMA l'année dernière.
00:24:33 Je me suis intéressé à ce sport et je me suis demandé comment c'était possible, honnêtement.
00:24:38 Oui, effectivement.
00:24:40 On fait une pause et je vous donne la parole tout de suite après.
00:24:43 Ferdinand Lepestre, c'est le rappel des titres.
00:24:45 Trois morts après une fusillade dans le 11e arrondissement de Marseille.
00:24:52 Vers 5h du matin, des individus en voiture ont ouvert le feu à la Kalachnikov
00:24:56 sur un autre véhicule où se trouvaient cinq hommes.
00:24:59 Trois d'entre eux ont été tués.
00:25:01 Les agresseurs ont pris la fuite.
00:25:03 Leur véhicule a été retrouvé incendié.
00:25:06 Un mode opératoire connu dans les trafics de stupéfiants,
00:25:09 selon la préfète de police des Bouches-du-Rhône.
00:25:12 La première ministre italienne a rendu visite aux sinistrés des inondations.
00:25:16 Giorgia Meloni présidera un conseil des ministres mardi
00:25:20 pour débloquer des fonds d'urgence.
00:25:22 Le nord-est de l'Italie a été violemment touché.
00:25:25 14 morts sont à déplorer dans la région d'Emilie-Romagne.
00:25:29 Sous les 36 000 personnes déplacées, seulement 10 000 ont pu regagner leur domicile.
00:25:34 L'alerte rouge météo a été prolongée jusqu'à demain.
00:25:37 Et puis retour en France.
00:25:39 La même liesse qu'il y a un an, drapeau jaune et noir à l'honneur.
00:25:43 La Rochelle a célébré ses rugbymen au lendemain de leur sacre An Champions Cup.
00:25:48 Un deuxième titre européen consécutif après s'être offert le Leinster à Dublin, 27 à 26.
00:25:53 Des dizaines de milliers de personnes ont envahi les quais du Vieux-Port
00:25:57 pour acclamer leurs joueurs qui rêvent désormais d'un titre de champion de France.
00:26:01 "Tout est art aujourd'hui, mais tout est sport aussi.
00:26:07 La pêche c'est du sport, les fléchettes sont un sport, le bowling est un sport,
00:26:11 le bridge, les échecs, l'aéromodélisme..."
00:26:15 "Le tir à l'arc."
00:26:17 "Le tir à l'arc est olympique, le curling, où on frotte pour faire avancer la pierre."
00:26:24 "Attention, je suis un grand fan du tir à l'arc."
00:26:27 "Oui, oui, et j'adore le curling, c'est pas la question."
00:26:30 "Mais voilà, la question qu'on aille se poser sur le modèle de performance,
00:26:37 si la qualité physique, la force, l'endurance, la coordination
00:26:41 a une prédominance sur les capacités cognitives, c'est une chose.
00:26:45 Mais quand on dit qu'il n'y a pas de physique sur le e-gaming ou le e-sport,
00:26:49 non, ce n'est pas possible, on ne peut pas dire ça.
00:26:52 Quand on parle de socialisation, j'ai des élèves qui font du MMA,
00:26:56 je ne les ai jamais vus autant socialiser qu'en jouant aux jeux vidéo.
00:27:00 Cyril Gann est connecté pendant qu'on est en FAD.
00:27:04 - C'est votre champion.
00:27:06 - C'est ça, il est connecté avec Kylian Mbappé, avec Achraf,
00:27:09 avec tous ces sportifs-là qui socialisent sur le jeu vidéo.
00:27:13 Et parce qu'ils socialisent, moi, j'ai appris à connaître le monde du jeu vidéo
00:27:17 par ça, parce que j'ai rencontré le manager, les entraîneurs,
00:27:21 les infos-entraîneurs, les infos-formateurs.
00:27:25 - Je vais vous donner un exemple qui va dans le sens.
00:27:27 Moi, mon père était militaire et je m'intéresse beaucoup à ce qu'on fait dans l'armée.
00:27:30 L'armée, c'est des gens qui partent en OPEX à l'extérieur.
00:27:32 Et pour jouer avec leurs enfants, ils font quoi ? Ils jouent aux jeux vidéo.
00:27:35 - À distance, en ligne. - Je trouve ça beau.
00:27:37 Est-ce que c'est de l'e-sport de jouer avec son gamin ? Peut-être pas.
00:27:40 Mais il y a un aspect social qui existe.
00:27:42 - C'est drôle d'ailleurs, puisque moi, je parle de jeux vidéo et je le fais exprès,
00:27:45 ce sont des jeux vidéo. Et de l'appeler e-sport, déjà, c'est lui donner
00:27:48 une espèce de prestige qu'on n'est pas prêt forcément à lui accorder.
00:27:51 Qu'est-ce que vous en pensez, Virginie ? Je sais que ce n'est pas votre spécialité.
00:27:55 Vous êtes plutôt là pour parler des drones et de la police, mais...
00:27:58 - Merci de me donner la parole. Et en fait, je suis tout à fait d'accord avec vous,
00:28:01 parce que depuis 2016 en France, l'e-sport a un cadre juridique précis
00:28:06 et une définition. Et dans cette définition, on parle bien de compétition sportive
00:28:11 qui fait intervenir un jeu vidéo. Donc c'est là où je vous rejoins parfaitement.
00:28:15 Et c'est peut-être là, la difficulté, c'est que cette loi, elle n'a pas été codifiée
00:28:20 dans le code du sport, comme on pourrait le croire, mais dans le code de la sécurité intérieure.
00:28:24 Et une des raisons pour lesquelles on ne peut pas transposer tel quel
00:28:28 le droit du sport sur le droit de l'e-sport, c'est bien parce qu'il y a ce jeu vidéo
00:28:31 qui nécessite finalement pour les promoteurs, pour les organisateurs de compétitions
00:28:36 et de tournois, d'obtenir l'autorisation préalable de l'éditeur du jeu vidéo.
00:28:40 Donc les spécialistes que nous sommes en droit du numérique, de l'e-sport, du sport,
00:28:46 on penche plutôt vers des cadres juridiques distincts, pas besoin d'unifier
00:28:51 le droit du sport avec le droit de l'e-sport, en tout cas selon les juristes.
00:28:56 Laurent Félous ?
00:28:58 Alors j'aurais plutôt revenir, je suis tout à fait d'accord avec ce que dit ma conseilleure
00:29:01 sur plusieurs points. Là où il y a peut-être un sujet, c'est sur les compétitions,
00:29:04 parce qu'on parle notamment de compétitions qui soient institutionnalisées.
00:29:07 Là dessus on n'y est pas, d'ailleurs Fernand, si je me permets, tu parlais bien du fait
00:29:11 que l'e-sport se construisait, donc on n'y est pas encore, on est en pleine construction.
00:29:14 Et ça c'est un point qui est important.
00:29:16 On se construit, mais c'est pas encore tout à l'heure.
00:29:19 C'est ça le souci, nous on a connu sur l'OMMA pendant très longtemps, on était constitué,
00:29:23 on avait des fédérations, on avait...
00:29:25 Vous aviez des fédérations, parce que nous on n'en a pas.
00:29:27 C'est ça, on avait même la fédération internationale, en France il y avait tout cet organe
00:29:31 déconcentré jusqu'au département, mais on n'avait pas la légitimité aujourd'hui
00:29:35 d'aller aux Jeux Olympiques, c'est un label qui va permettre de mieux faire connaître
00:29:39 l'e-sport, de mieux développer aujourd'hui.
00:29:41 Je rappelle que l'OMMA n'y est pas encore non plus.
00:29:44 Il commence, mais il sera à Paris là, ça y est, c'est acquis ?
00:29:48 L'OMMA pourrait être aux Jeux Olympiques en démonstration.
00:29:51 C'est déjà une bonne chose, parce qu'on a toutes les valeurs qui vont vers ça,
00:29:56 c'est-à-dire que le faire, l'idéologie, l'éthique, et tout ce qu'il y a comme valeurs
00:30:00 d'équité, d'égalité sur l'e-sport et tout, on les a aujourd'hui.
00:30:04 On parle d'e-sport, une étude de 2005 montre que 40% des joueurs d'e-sport sont des femmes.
00:30:11 C'est incroyable.
00:30:13 C'est une étude qui prouve juste qu'on est complètement dans ce qu'on veut pour
00:30:18 le développement du sport en France.
00:30:19 L'une des raisons pour lesquelles le golf n'est plus une discipline olympique au début
00:30:23 du XXe siècle, c'est qu'il n'y avait plus que des hommes qui en faisaient, du golf.
00:30:27 C'est pour ça qu'on l'a retiré.
00:30:29 Donc oui, moi j'aimerais juste dire qu'il y a quelques années encore en arrière,
00:30:36 on ne savait pas c'était quoi les capacités cognitives, qu'est-ce que faisait l'e-sport.
00:30:41 Aujourd'hui, on a des gamers qui sont capables sur des sports comme le starcraft de faire
00:30:48 400 actions à la minute.
00:30:51 Si j'ai la possibilité moi d'avoir mes élèves en MMA qui me font autant d'actions
00:30:57 dans la minute ou qui se rapprochent de la capacité à résoudre des problèmes décisionnels,
00:31:04 des contraintes décisionnelles à cette vitesse.
00:31:06 C'est Mohamed Ali.
00:31:07 Bien sûr, je me permets d'arrêter M. Fernand Lopez, mais pour devenir justement ce que
00:31:11 vous êtes en train de dire, l'e-sport est utilisé dans des sports en tant qu'entraînement.
00:31:14 Je vais donner un nom, ça s'appelle le neurotracker qui est utilisé par des grands sportifs,
00:31:18 justement Israel Adesanya utilise ce type d'entraînement.
00:31:23 Bien évidemment, c'est important pour la capacité à réfléchir plus vite.
00:31:27 Moi, j'ai été joueur professionnel, j'ai été champion de France en 2010, donc j'ai
00:31:30 une carrière.
00:31:31 Pas de joueur professionnel véritablement comme c'est le cas aujourd'hui, mais je me
00:31:34 suis entraîné pendant 10 ans.
00:31:35 Je vois aujourd'hui pourquoi j'arrive à prendre des décisions plus rapidement, etc.
00:31:39 La plupart des e-sportifs de mon époque, aujourd'hui, gèrent des postes extrêmement
00:31:43 importants.
00:31:44 J'ai quelqu'un qui travaille à la City, dans des équipes extrêmement importantes,
00:31:47 justement parce qu'ils ont appris à réfléchir plus vite.
00:31:49 Ça peut être important, justement, comme on le disait tout à l'heure pour Alzheimer,
00:31:53 pour des enfants aussi qui ne sont pas forcément très éveillés.
00:31:56 Il y a plein de sujets auxquels l'e-sport peut apporter.
00:31:59 Malheureusement, comme je le dis à chaque fois, on en revient sur.
00:32:01 Je vais donner un exemple simple et je vais le faire.
00:32:03 Quand vous ouvrez votre reportage en montrant les premières images du MMA, le premier mot
00:32:07 qui est greffé, c'est violence.
00:32:08 Mais ça aurait pu être un autre mot.
00:32:10 C'est ça.
00:32:11 C'est comme ça qu'on le voit, le MMA.
00:32:13 Et c'est l'origine de ces problèmes.
00:32:15 Il faudrait rajouter qu'on jouait dans une cage.
00:32:17 Mais c'est-à-dire que les gens qui sont devant la télé, malheureusement, ils retiennent quoi ?
00:32:21 Ils ne sont pas assez éduqués pour comprendre tous ces détails.
00:32:24 Et le problème, c'est que ce mot "violence" que vous mettez en début d'émission permet
00:32:29 à l'audience de fonctionner très bien, mais détruit la culture même de ce truc.
00:32:34 Vous avez sans doute raison.
00:32:36 L'essence même d'un sport de combat, c'est la violence.
00:32:38 Quel que soit le sport, il y a une opposition physique et un besoin de suprématie physique
00:32:44 de Teddy Reiner en judo ou de la lutte ou de n'importe quel sport olympique
00:32:49 où il y a de la boxe, par exemple, c'est de la violence.
00:32:52 Mais est-ce que le MMA est plus violent qu'un autre sport ? Non.
00:32:55 Est-ce que quand on fait du tir à la carabine, est-ce qu'il y a un peu de physique
00:33:00 et beaucoup de cognitifs ? Oui.
00:33:02 Est-ce que c'est la même chose pour e-sport ? Oui.
00:33:05 Du coup, à quel moment on décide qu'e-sport ne serait pas un sport ?
00:33:08 Et qui décide surtout ?
00:33:09 Et pourquoi ? Qui décide ? Comment ?
00:33:10 Est-ce qu'on le décide parce qu'on ne sait pas encore et qu'il y a des vides juridiques
00:33:13 comme celui qui existe ? C'est ce qui est arrivé au MMA pendant longtemps.
00:33:16 On avait un vide juridique où le ministère ne savait pas quoi décider.
00:33:20 Et puis rapidement, aussitôt qu'on a compris et que la ministre de sport
00:33:24 est passée au MMA Factory, a découvri, comprend la logique interne du sport,
00:33:29 le modèle business du sport, rapidement, elle a dit, c'est actif.
00:33:33 La ministre des sports d'ailleurs qui espère bien que le prochain
00:33:37 Olympique Series sera à Paris en 2024.
00:33:44 Je me permets de vous remercier, c'est qu'on a besoin de l'avis de personnes
00:33:47 qui sont compétentes sur ces sujets juridiques parce que nous,
00:33:50 on cherche une reconnaissance.
00:33:52 Quand j'entends dire que l'e-sport ressemble à l'athlétisme,
00:33:54 c'est la meilleure chose que j'ai entendue parce qu'en fait, c'est de l'athlétisme.
00:33:57 Vous avez une trentaine de jeux différents avec des jeux un peu plus importants
00:34:00 que les autres. Donc c'est vrai que c'est très difficile à organiser
00:34:02 au niveau juridique et je souhaite bon courage aux gens qui vont le faire.
00:34:04 Mais nous, on en a besoin.
00:34:06 Mais vous comprenez bien que pour beaucoup de gens, quand vous dites
00:34:08 "les jeux vidéo c'est comme de l'athlétisme", ils disent "c'est de l'athlétisme,
00:34:12 on est assis quand même".
00:34:13 Et alors, qu'est-ce que ça veut dire "on est assis" ?
00:34:15 C'est pour ça qu'on a besoin de l'expertise. Aujourd'hui, ce que je vous dis,
00:34:17 ce que des études très sérieuses comme l'étude de Oxford qui a fait
00:34:21 sur la corrélation entre le jeu vidéo par exemple,
00:34:26 le call of duty qui est violent, avec la violence des jeunes,
00:34:29 on a prouvé qu'il n'y en était rien, que c'était complètement le contraire.
00:34:33 Des études ont prouvé qu'on prenait deux groupes de personnes,
00:34:36 certains jouaient à des jeux où il fallait prendre des décisions
00:34:39 et rapidement on leur donnait des problèmes mathématiques juste après,
00:34:42 on s'est rendu compte que ça va très vite.
00:34:44 Oui, mais c'est pas pour autant que quand on reste assis à jouer aux jeux vidéo,
00:34:46 on fait de l'athlétisme. C'est ce parallèle-là qui paraît plus...
00:34:49 Quand je suis en automobile et que je conduis une voiture, je suis bien assis.
00:34:53 Mais je fais de la course automobile, ça fait une voiture.
00:34:57 Parce que je prends des virages et que je manipule avec mes mains.
00:35:00 Et l'entraînement est sur simulateur derrière un écran, comme l'esport.
00:35:03 Moi aujourd'hui, je le dis, je vous dis, je suis comme vous,
00:35:06 je ne connais pas l'esport, mais je m'y suis penché, je suis allé chercher,
00:35:10 parce que j'aime comprendre le modèle de performance dans le sport
00:35:13 et je me suis rendu compte que les sportifs, enfin,
00:35:16 les athlètes de haut niveau s'entraînent vraiment avec des programmes de sport,
00:35:21 préparation physique, préparation mentale et tout ce qui va avec.
00:35:24 Alors justement, tu évoques les athlètes de haut niveau.
00:35:26 Merci, je me permets de t'interrompre.
00:35:28 Tu évoques les athlètes de haut niveau, mais en fait,
00:35:30 c'est là où je pense qu'il faut prendre de la hauteur.
00:35:32 Tu parlais de l'introduction avec la violence.
00:35:34 C'est là où il y a potentiellement un sujet, c'est que certes,
00:35:36 il y a d'autres disciplines, on parlait de plusieurs disciplines.
00:35:39 Il y a d'autres jeux vidéo qui sont moins violents, bien évidemment.
00:35:41 Mais en fait, l'idée, c'est qu'il y a ceux qui vont avoir une activité
00:35:44 qui sera professionnelle, qui vont être suivis,
00:35:46 qui vont avoir la capacité potentiellement cognitive qui sera plus élevée,
00:35:49 mais d'autres qui vont suivre aussi, ceux qui vont être professionnels
00:35:51 et qui n'auront pas forcément un, ces capacités.
00:35:53 Donc il n'y aura pas ce critère physique.
00:35:54 Et deuxièmement, il y aura la problématique des relations sociales.
00:35:56 Parce que vous évoquez notamment le fait qu'il y avait 12 000 personnes
00:35:59 lors d'une compétition, mais ceux qui ne sont pas présents
00:36:01 dans cette compétition sont seuls.
00:36:03 Alors certes, il va y avoir quelques connexions, il y a notamment l'aspect numérique.
00:36:06 C'est pour ça que je vais me permettre de vous arrêter.
00:36:07 C'est qu'il faut un cadre juridique pour qu'il y ait des clubs locaux.
00:36:09 C'est-à-dire que par exemple, un jeune qui soit dans un collège
00:36:11 et qui dise je veux être joueur e-sport, on puisse l'orienter vers un club.
00:36:14 Pour que sa pratique soit encadrée.
00:36:15 Aujourd'hui, ça n'existe pas.
00:36:16 Ça veut dire faire des clubs sans pour autant avoir la qualification d'e-sport.
00:36:18 Et comment on a les subventions du coup ?
00:36:19 Mais sinon...
00:36:20 Enfin pour autant...
00:36:21 Mais surtout que la non...
00:36:22 Moi j'ai besoin d'argent pour mes clubs et pour les faire vivre.
00:36:24 Donc j'ai besoin de subventions.
00:36:25 Surtout que la non-législation sur la pratique laisse la pratique sauvage...
00:36:30 Bien évidemment.
00:36:31 Et donc plus de risques, et donc plus de dérives.
00:36:34 Monsieur Lopez.
00:36:35 On a tout intérêt à encadrer toute activité de ce genre.
00:36:37 Je pense que vous avez connu ce sujet avec le nombre de salles sauvages
00:36:41 qui se sont lancées en disant faire du MMA.
00:36:43 Aujourd'hui, moi je vois des clubs qui se lancent et qui se disent
00:36:46 "nous faisons de l'e-sport".
00:36:47 Mais non, vous ne faites pas d'e-sport.
00:36:48 Vous essayez de vendre à peu près tout et n'importe quoi à des gamins.
00:36:50 Et le problème, c'est qu'à partir du moment où on n'a pas cette main
00:36:53 mise par le gouvernement sur ces clubs, on ne peut pas vérifier ce qu'ils font.
00:36:55 Tout ça a accéléré.
00:36:57 Le développement de la pratique de masse au MMA s'est accéléré
00:36:59 dès qu'il y a eu un cadre juridique, avec notamment l'obligation de qualification.
00:37:03 Sur ces limites.
00:37:04 Que contre tous les sports, un coach ne peut pas se promouvoir,
00:37:07 se dire coach, s'il n'a pas ses diplômes validés.
00:37:10 Le cadre juridique est important.
00:37:13 Laisser ça et faire comme si ça n'existe pas est une catastrophe.
00:37:16 C'est mon accord.
00:37:17 C'est mon accord.
00:37:18 Virginie ?
00:37:19 Oui, juste, le cadre juridique actuel, il protège la participation des mineurs,
00:37:24 des moins de 12 ans qui ne peuvent pas toucher de cash prize,
00:37:28 et ensuite des 12-16 ans.
00:37:30 Les cash prize, je rappelle, c'est les cagnottes, les prix en argent considérables.
00:37:34 Les dépenses monétaires, effectivement.
00:37:35 Et pour les 12-16 ans, de la même façon, le régime est adapté aux 12-16 ans,
00:37:42 c'est-à-dire jusqu'à l'obligation de scolarisation en France.
00:37:45 C'est pour ça que vous avez les moins de 12, 12-16 et 16 et plus,
00:37:48 d'où la barrière des 16 ans.
00:37:49 Et là, il faut l'autorisation parentale, et l'argent qui serait gagné
00:37:54 serait mis sous séquestre à la Caisse des dépôts et conciliations,
00:37:58 comme les enfants du spectacle, de la publicité ou de la mode.
00:38:02 Moi, je vais rebondir sur ça.
00:38:03 Ce qui est vrai, c'est qu'il faudrait vraiment des gens qui vérifient
00:38:06 que ça soit mis en pratique.
00:38:08 - Vous êtes finalement sanctionné d'une contravention de 5e classe,
00:38:11 c'est-à-dire qu'on passe en délit à partir du moment où un organisateur
00:38:16 ne respecterait pas la réglementation, et notamment celle protectrice sur les mineurs.
00:38:21 - J'entends exactement ce que vous dites.
00:38:22 Je pense qu'il faut exactement ce genre de modèle pour qu'on aille dans le bon sens.
00:38:25 Mais si j'étais malhonnête, je donnerais un nombre d'organisateurs de compétition
00:38:28 qui ne fonctionnent pas sous ce modèle-là.
00:38:31 Et moi, j'attends que la justice réagisse, justement.
00:38:33 Il y a plein de problèmes comme ça dans l'e-sport.
00:38:35 Vous avez entièrement raison, il faut ce cadre juridique.
00:38:38 Mais aussi, il faut des gens qui cherchent à le faire appliquer.
00:38:40 Et le problème, c'est que je n'ai pas l'impression qu'il soit appliqué tout le temps.
00:38:43 - Je voudrais soulever un autre problème.
00:38:47 C'est la liste des jeux vidéo qui ont été sélectionnés pour l'Olympic e-sports series
00:38:53 qui se tiendra en juin à Singapour.
00:38:57 Ce ne sont pas du tout les jeux vidéo les plus populaires,
00:39:07 ni les plus regardés sur Twitch, ni ceux qui attirent le plus de monde.
00:39:12 Donc, ce n'est pas League of Legends, c'est pas Dota 2, ce n'est pas Fortnite.
00:39:18 Le CIO a préféré des jeux qui simulent les véritables disciplines olympiques.
00:39:24 Il y aura la voile avec Virtual Regatta, le sport automobile avec Gran Turismo,
00:39:30 le tir à l'arc avec Tic Tac Bow, les échecs avec Chess.com, le cyclisme avec Swift.
00:39:36 Qu'est-ce que ça veut dire ?
00:39:38 Pourquoi ils ont choisi ces jeux vidéo-là et pas les jeux vidéo qui intéressent tous les fans de jeux vidéo ?
00:39:43 - Je crois que je comprends. Je ne vais pas être le seul à comprendre leur positionnement.
00:39:47 C'est qu'ils ont juste envie de prendre du temps.
00:39:49 Parce que si demain, vous mettez League of Legends devant une mère de famille
00:39:51 qui se retrouve à voir l'Aviron puis League of Legends à 14h, aïe, ça ne va pas le faire.
00:39:56 Donc, je comprends le procédé.
00:39:58 Et c'est là où je vais permettre de le dire, c'est que je pense que la communauté esport devrait un peu grandir
00:40:02 et déjà apprécier ce premier pas si elle estime qu'elle en a besoin au lieu de cracher sur la liste des jeux.
00:40:06 Parce qu'à un moment donné...
00:40:08 - Parce que c'est le cas, eux aussi.
00:40:10 - Oui, c'est le cas. Moi aussi, j'ai eu cette réaction aussi.
00:40:12 Mais à un moment donné, j'essaie de réfléchir, ça m'arrive.
00:40:14 J'essaie d'être pragmatique et je me dis si c'est ça la première étape, c'est déjà pas si mal.
00:40:18 C'est déjà une étape, exactement. C'est déjà une étape.
00:40:20 Je ne suis pas totalement contre.
00:40:22 Moi, je considère que quand on prend son temps, ça peut amener à des choses intéressantes.
00:40:25 - Mais c'est un peu comme si on refaisait Woodstock demain et qu'on invitait des joueurs de air guitare,
00:40:31 vous savez, ceux qui font semblant de jouer de la guitare,
00:40:33 plutôt que d'inviter des gens qui font vraiment de la musique avec des ordinateurs.
00:40:36 - Il y a une vraie question.
00:40:38 - Parce que si vous me demandez de faire la démonstration pour l'OMMA
00:40:43 ou même pour la course automobile, avant d'arriver à faire la Formule 1,
00:40:49 je vais d'abord amener des filles aux autotamponneuses.
00:40:53 Ensuite, je vais faire du karting.
00:40:55 Ensuite, je vais faire la Formule 3000.
00:40:57 Éventuellement, un jour, je vais faire la Formule 1.
00:40:59 Ce que je veux dire, c'est qu'il faut éduquer les gens.
00:41:01 Il faut aller progressivement.
00:41:03 Il faut laisser le temps aux gens de comprendre et d'accepter la culture et ce qui se passe.
00:41:07 Moi, je ne suis pas un fan de la tauromachie.
00:41:09 Mais quand j'ai vu... Enfin, je ne comprends pas.
00:41:11 Pauvre Thorey, il n'a rien demandé.
00:41:13 Mais on joue avec lui et puis il est mis à la mort à la fin.
00:41:15 Mais j'arrive dans une région où les gens vivent avec ça.
00:41:18 J'essaie de comprendre. Je les écoute.
00:41:20 On me laisse le temps de m'éduquer.
00:41:22 Peut-être un jour, je l'accepte.
00:41:24 - C'est ça.
00:41:25 - Ils sont le temps aux gens de...
00:41:26 - Mais ne croyez-vous pas que ça peut être contre-productif ?
00:41:28 C'est-à-dire qu'effectivement, quand on va voir des gens s'asseoir pour jouer à...
00:41:34 - Non, mais bien sûr.
00:41:36 - À conduire des voitures qui ne conduisent pas vraiment
00:41:38 ou à tirer à l'arc alors qu'ils ne tirent pas vraiment à l'arc.
00:41:41 Ça peut dévaloriser l'esport.
00:41:44 Si vous voulez qu'on l'appelle comme ça.
00:41:45 - Je me permets de rebondir sur ce que vient de dire Fernand Lopez.
00:41:47 La question, c'est est-ce qu'on va réintégrer la Formule 1 aux Jeux olympiques ?
00:41:50 Et le premier pas, justement, passe par l'intégration d'un jeu de voiture.
00:41:53 Ils ont décidé ça comme ça.
00:41:54 Maintenant, est-ce que ça peut choquer du monde ?
00:41:56 Est-ce que ça a du sens, etc. ?
00:41:58 Comment ça va être fait ?
00:41:59 Déjà, moi, je ne peux pas savoir parce que je n'ai pas vu visuellement
00:42:01 comment ces gens travaillent.
00:42:03 Je n'ai pas d'avis sur ça.
00:42:05 Je ne l'ai pas vu dans les faits.
00:42:07 Je vais vous dire, même si ça arrive et que c'est mal fait,
00:42:09 ça pourra aussi servir pour les prochains.
00:42:11 Je ne suis pas toujours dans cet avis négatif.
00:42:13 Maintenant, il est vrai que si j'allume ma télé,
00:42:15 comme je vous disais tout à l'heure,
00:42:16 et que je vois quelqu'un devant un PC
00:42:17 et quelqu'un qui fait de l'aviron juste après,
00:42:18 même moi qui viens de ce milieu-là,
00:42:20 je vais me poser des questions.
00:42:21 Si vous voulez mon avis vraiment sur la question,
00:42:23 j'appelle ça l'empire du moindre mal,
00:42:25 pour citer le livre de M. Michéa.
00:42:27 À un moment donné, il faut donner un petit peu
00:42:28 pour obtenir ce que tu veux vraiment.
00:42:30 Je suis prêt à faire cette concession
00:42:32 et vraisemblablement que le CIO fait le même calcul.
00:42:34 Ils ont envie qu'il y ait du sport,
00:42:36 donc ils y vont à ta tonte pour que les gens s'habituent.
00:42:39 Ce n'est peut-être pas la meilleure manière.
00:42:41 Ce n'est pas forcément les mêmes gens,
00:42:42 mais j'en ai connu, j'en croise assez souvent en ce moment,
00:42:44 qui me disait il y a 10 ans,
00:42:45 ce que tu fais, ça ne nous intéresse pas, c'est nul.
00:42:47 Et c'est les mêmes aujourd'hui qui viennent me voir
00:42:48 en me disant, écoute, ça m'intéresse
00:42:49 parce qu'il y a peut-être de l'argent à se faire.
00:42:51 Laurent Félus.
00:42:52 Oui, alors je pense qu'il y a aussi une volonté
00:42:54 de respecter les valeurs de l'olympisme,
00:42:56 qui, je le rappelle, a pour but notamment
00:42:58 de promouvoir la culture, promouvoir l'éducation.
00:43:00 Et là, là-dessus, les sports et les disciplines
00:43:02 qui ont été choisies dans le cadre du coup
00:43:04 de ces Olympiques et de ces Olympiques,
00:43:05 ont cette vocation-là.
00:43:07 Donc ça, c'est un premier point.
00:43:08 Et deuxième point, par rapport du coup
00:43:10 à ce fameux débat e-sport, c'est un point qui est important,
00:43:12 c'est que par rapport à l'éducation,
00:43:13 il y a un sujet qu'il faut aborder.
00:43:15 C'est que pour ma part, j'accompagne parfois
00:43:17 des joueurs de football, d'autres disciplines sportives
00:43:19 et souvent, je les vois après un match,
00:43:21 tout de suite aller jouer à des jeux vidéo.
00:43:23 Là-dessus, il y a un vrai problème.
00:43:24 Donc au niveau de l'éducation, d'ailleurs,
00:43:26 lorsqu'ils doivent, d'ailleurs, ça c'est des joueurs,
00:43:27 mais quand il s'agit de personnes qui sont étudiants,
00:43:29 qui sont plus jeunes, etc.
00:43:30 Si on met un cadre juridique, bien évidemment,
00:43:31 peut-être que ça pourrait permettre
00:43:33 de respecter et de protéger cette éducation-là.
00:43:36 Mais à ce stade-là, sans ce cadre-là,
00:43:37 il y a un vrai sujet et un problème.
00:43:38 - Je suis d'accord.
00:43:39 - Attendez, je n'ai pas bien compris.
00:43:40 Vous leur reprochez quoi ?
00:43:41 De se précipiter sur les jeux vidéo
00:43:42 au lieu d'aller lire un livre, vous voulez dire ?
00:43:44 - C'est ça ma question.
00:43:45 C'est quoi la contre-indication ?
00:43:46 - Non.
00:43:47 - Si je termine ma compétition et que j'ai le plaisir,
00:43:49 au lieu d'aller prendre une glace,
00:43:51 de jouer aux jeux vidéo, c'est quoi la contre-indication ?
00:43:54 - Si, vous terminez une compétition.
00:43:56 Mais là, je parle des joueurs de football que j'accompagnais.
00:43:58 Après, il y a aussi des jeunes, moins jeunes,
00:44:00 qui sont étudiants au moins, ou pas étudiants.
00:44:02 Et dans ce cas de figure, il y a un vrai problème,
00:44:03 parce qu'au niveau de l'éducation,
00:44:04 on voit qu'il y a un manque de concentration,
00:44:06 il y a des problèmes d'isolement social,
00:44:07 il y a des problèmes aussi d'obésité,
00:44:08 de roulement de la concentration assez régulier.
00:44:10 Et là, là-dessus, sur ces sujets,
00:44:11 je pense qu'un accompagnement est nécessaire.
00:44:13 - Vous pensez aussi pour les joueurs d'échec,
00:44:15 parce qu'il y en a certains quand même qui sont très isolés.
00:44:17 - Ah, bien évidemment !
00:44:18 - Ah bah, Magnus Carlsen, en plus d'être isolé,
00:44:20 il ne fait que jouer aux jeux vidéo.
00:44:21 Donc c'est un vrai problème.
00:44:22 - Donc le champion du monde !
00:44:23 - Tout à fait.
00:44:24 - Vous, c'est un cas social !
00:44:25 - Laurent a raison !
00:44:26 - Virginie ?
00:44:28 - Oui, peut-être que le débat,
00:44:32 il tourne au fait qu'on a choisi le terme de e-sport.
00:44:35 Pourquoi avoir utilisé le terme de sport
00:44:37 et de l'avoir connu avec l'électronique ?
00:44:39 Peut-être que le problème est ici,
00:44:41 et qu'en fait, on crée un débat qui ne devrait pas exister.
00:44:44 - C'est une vraie question.
00:44:45 - Et je vous rejoins sur les jeux vidéo.
00:44:47 - Vous voulez dire qu'ils auraient dû dire
00:44:48 que c'était des sports tout-tuts ?
00:44:49 - Des jeux vidéo.
00:44:50 - Ou des sports vidéo ?
00:44:51 - Non, pas la notion de sport.
00:44:52 - Non, jeux vidéo, en gaming.
00:44:53 - Voilà, t'étais peut-être pas obligée d'être utilisée.
00:44:55 - Alors, pourquoi c'est obligé ?
00:44:56 Parce que si vous mettez sport dedans,
00:44:58 les sponsors, ils sont contents, tout simplement.
00:45:00 Et que nous, on a besoin de développer un écosystème.
00:45:02 - Ah, je suis d'accord.
00:45:03 - Mais s'il ne s'agit pas d'une fédération sportive,
00:45:04 vous n'avez pas l'agrément ministériel,
00:45:05 et derrière, vous n'avez pas les solutions.
00:45:06 - Mais en France, on est d'accord,
00:45:07 parce que Danemark, c'est un sport, non ?
00:45:08 - Oui, mais évidemment.
00:45:09 Mais là, on est en France.
00:45:10 - Oui, mais donc s'il y a d'autres pays qui le font,
00:45:11 ce n'est pas des abordants aussi, je pense.
00:45:12 - Je parle qu'en France, à ce stade,
00:45:14 par rapport à la qualification de sport,
00:45:15 la fédération sportive apporte des considérations financières.
00:45:18 - D'accord.
00:45:19 S'il y a d'autres personnes qui le font à l'étranger,
00:45:20 je ne vais pas être capable d'aller dire aux Danois
00:45:21 qui ont décidé que l'esport est un sport, que c'est un casse-os.
00:45:44 - Je vous rappelle que cette question se pose pas seulement
00:45:46 pour l'apétant que les Français considèrent que c'est un sport,
00:45:50 mais aussi pour l'apétant que les Français considèrent que c'est un sport.
00:45:51 - Vous voulez mon avis sur la question du bridge ?
00:45:52 - Le bridge est un sport.
00:45:53 - Non, il n'a pas été considéré comme un sport.
00:45:56 - Il est considéré comme un sport.
00:45:57 - Non, justement, il y a un arrêt du Conseil d'État
00:45:59 qui a ensuite considéré ça en France.
00:46:01 - Mais la France n'est pas le monde, en fait.
00:46:03 La France n'est pas le noyau du monde.
00:46:04 On va peut-être regarder ce qu'il se fait à l'étranger.
00:46:06 - Je parle de l'aspect franco-français.
00:46:08 - Oui, mais la France, c'est un tout petit pays dans le monde.
00:46:10 - Ne parlez pas ensemble, parce que vous entendez Fernand Lepez.
00:46:13 - La réalité, c'est que moi, je comprends ça.
00:46:16 Il faut respecter le cadre juridique.
00:46:17 Si on est en France, on respecte le Conseil d'État.
00:46:21 Et tout ce qui se passe, on ne bouge pas.
00:46:23 Mais on compte sur vous pour passer ce message en disant,
00:46:28 bon, les collègues d'en haut, il y a peut-être un souci.
00:46:32 Ce n'est pas un hasard.
00:46:33 S'il y a tant de millions de personnes, ça devient relevant.
00:46:38 - Pertinent.
00:46:39 - Voilà, ça devient pertinent.
00:46:40 S'il y a un certain nombre de personnes qui pratiquent ce sport,
00:46:43 ou on y va en lancade, ou alors on fait comme si ça n'existe pas.
00:46:47 C'est le même problème qu'on a eu au MMA.
00:46:49 - Bien sûr.
00:46:50 - Oui, on était le dernier pays.
00:46:52 J'ai l'impression qu'ici, en France, il y a vraiment ce que disait Chopin.
00:46:57 C'est que toutes les idées qui sont bonnes vont d'abord être diaboliques.
00:47:01 C'est impossible, ça n'arrive pas.
00:47:03 Et puis à la fin, tout le monde aujourd'hui dit que c'est évident.
00:47:06 C'est que sur Canal+ on diffuse le MMA, sur RMS on diffuse le MMA.
00:47:11 Enfin, ça devient normal, le monde entier.
00:47:13 Nous, on était le dernier bastion, le dernier pays à diffuser le MMA.
00:47:17 - Est-ce qu'il y a honte ?
00:47:18 - Et là, on a la même chose qui se passe.
00:47:20 Et je voulais juste que les collègues, en face du juridique,
00:47:23 puissent monter l'info et dire, faites attention,
00:47:25 il y a quelque chose qui se passe, peut-être qu'il faudrait l'encadrer.
00:47:27 - Et juste pour rebondir sur ça, parce que moi, j'ai découvert le MMA,
00:47:30 donc il y a un an et demi, je suis un MMAX,
00:47:32 si on reprend le terme de foot-X au football.
00:47:34 En fait, quand quelqu'un était capable de dire à Francis Nganou, à Cyril Guen,
00:47:37 toi, tu ne fais pas du sport, alors que le mec, il a traversé le continent africain,
00:47:41 son histoire, elle mériterait 15 livres d'affilée, exceptionnel.
00:47:46 C'est un exemple pour la jeunesse, ce gars-là.
00:47:47 Donc il faut l'exposer, Cyril Guen.
00:47:49 Et dans l'e-sport, on a son équivalent qui s'appelle Mathieu Herbault-Zaïwo.
00:47:52 Son histoire, elle est exceptionnelle.
00:47:53 C'est un modèle pour la jeunesse.
00:47:55 L'humilité qu'il a, la rigueur à l'entraînement.
00:47:58 Parce que justement, quand vous dites qu'il faut passer des messages auprès de la jeunesse,
00:48:01 mais qui de mieux que les athlètes eux-mêmes pour dire justement à la jeunesse,
00:48:04 ne faites pas que de l'e-sport, faites du sport, inscrivez-vous à la natation.
00:48:08 Bien sûr qu'il faut ça.
00:48:09 Et l'un n'empêche pas l'autre.
00:48:11 C'est qu'on a toujours tendance à aller voir ce qui est possible comme dérive.
00:48:14 C'est qu'on prend le football.
00:48:16 Le football, il y a des grands joueurs, il y a l'équipe de France,
00:48:20 mais c'est une pyramide où il n'y a que la pointe là.
00:48:22 En bas de ça, il y a une grosse vase qui sont des pratiquants lambda
00:48:25 où il y a des dérives dans les quartiers, qui jouent les soirs où il n'y a personne.
00:48:29 On ne va pas stopper le pouvoir qu'on a donné à la FFF
00:48:36 de gérer le sport, le football, sous prétexte qu'il y a quelques dérives qui se passent.
00:48:40 Aujourd'hui, on a des exemples.
00:48:41 Je vous dis, je ne suis pas bien placé, en tout cas,
00:48:44 Cyril n'est pas bien placé au vu de son dernier combat.
00:48:46 Comment ça s'est déroulé au fait qu'il joue.
00:48:49 Mais cependant, ça ne change pas que sur les 14 combats d'Eme Makila,
00:48:53 il en a 12 qu'il a gagnés en jouant aux jeux vidéo.
00:48:56 Il ne faisait que ça jouer.
00:48:57 Mais je vous rappelle qu'il y a des sports que tout le monde reconnaît pour être des sports
00:49:02 et qui ne sont pas aux Jeux Olympiques.
00:49:04 Il y a le MMA, on en a parlé, démonstration seulement.
00:49:07 Il y a le karaté, il y a le squash, il y a la pétanque, il y a le golf, il y a le rugby,
00:49:12 il y a le polo, le polo il a été retiré, il y a le skateboard.
00:49:17 Ce n'est pas une évidence.
00:49:19 Non, mais monsieur Taddei, regardez qui c'est qui vient nous chercher.
00:49:22 Moi, quand vous parlez de la pétanque, moi, je vais vous le dire en tant que
00:49:24 pas de grand fan de pétanque, mais si la pétanque est demain avant l'e-sport aux Jeux Olympiques,
00:49:28 ça me paraît très logique.
00:49:29 Je n'ai pas de souci avec ça.
00:49:30 Mais c'est parce que la pétanque n'a pas les mêmes moyens.
00:49:32 Non, mais je veux dire, si on me disait par exemple, c'est un sport plus historique,
00:49:35 ça fait des années qu'ils attendent d'être aux Jeux Olympiques.
00:49:38 Ils l'ont été, je crois, quand Paris avait les Jeux Olympiques en 1924.
00:49:43 Bien sûr.
00:49:44 Et moi, ça ne me gênerait pas, je trouve ça tout à fait légitime.
00:49:46 Je ne suis pas en train de dire, hello, c'est moi l'e-sport, je veux passer avant tout le monde,
00:49:49 c'est hyper important.
00:49:50 Je suis dans cette démarche.
00:49:51 D'ailleurs, on regarde...
00:49:52 - Bruno Félus.
00:49:53 - Merci.
00:49:54 On regarde d'ailleurs de l'argent qui est brassé par notamment l'e-sport.
00:49:55 Vous évoquiez notamment les 15 millions de dollars.
00:49:57 Il y a la question qui se pose, c'est de savoir, est-ce qu'il y a un véritable intérêt,
00:50:00 notamment financier, même médiatique, populaire, de pouvoir disposer de cette...
00:50:04 - Ah ben si vous voyez le nombre d'emplois qui ont été créés avec l'e-sport aujourd'hui
00:50:07 et malheureusement, vu qu'on est en train de chercher le modèle économique stable,
00:50:10 bien évidemment qu'il y a un intérêt, oui, ça c'est sûr et certain.
00:50:12 Il y a beaucoup d'emplois qui sont créés honnêtement, mais là où vous avez raison,
00:50:14 c'est que sans ce cadre juridique, nous on cherche un modèle qu'on n'arrive pas à créer honnêtement.
00:50:18 Et là où je vous rejoue encore une fois, c'est que pourquoi on a appelé ça e-sport ?
00:50:21 Et en fait, ça existait déjà à mon époque dans les années 2000,
00:50:24 mais là ça arrange certaines personnes pour faire du marketing et vendre un modèle qui n'existe pas,
00:50:28 un modèle économique des clubs qui n'existe pas.
00:50:30 Aucun club dans l'e-sport n'est rentable.
00:50:32 Alors excusez-nous, on va essayer de se défendre.
00:50:34 - Au football non plus.
00:50:35 - Non mais d'accord, mais ce n'est pas du tout les mêmes revenus.
00:50:37 Il n'y a pas de billetterie, il n'y a pas de droits télé.
00:50:39 Et dans l'e-sport, on n'a pas de billetterie, on n'a pas de droits télé.
00:50:41 - Mais c'est depuis qu'il y a des droits télé en foot que les clubs de football sont endettés.
00:50:46 - Oui, mais ils sont encore en vie.
00:50:48 Barcelone joue encore.
00:50:50 - Il y en a beaucoup qui ont déposé bilan aussi.
00:50:52 - Ah mais pas dans les grands clubs.
00:50:53 - Virginie Bensoussan-Mollet.
00:50:54 - Ah non ?
00:50:55 - Non, je pense qu'on a tout dit, peut-être quand même pour rassurer les joueurs professionnels.
00:51:01 Le législateur est quand même bien là et a créé un contrat de travail ad hoc,
00:51:05 c'est-à-dire qu'ils n'ont pas les mêmes contrats de travail que les joueurs professionnels dans le milieu sportif.
00:51:10 Ils sont sous CDD, mais avec des CDD bien particuliers,
00:51:14 de 1 à 5 ans maximum, avec beaucoup d'obligations de la part des employeurs.
00:51:18 Donc voilà, selon moi, le cadre juridique existe.
00:51:21 Il y a les autorités pour contrôler, notamment une cellule spéciale au ministère de l'Intérieur.
00:51:25 - C'est le manque de fédération de toute façon qui...
00:51:28 - Voilà, c'est le manque de fédération là où je suis assez d'accord,
00:51:30 où il y a une diversité d'associations.
00:51:32 Vous ne parlez pas d'une seule voix, même au niveau européen,
00:51:37 et pour faire entendre...
00:51:39 - Vous ciblez un problème qui est vraiment clair.
00:51:41 - Mais il y a Twitch, évidemment, et puis il y a une chaîne qui vient de se créer,
00:51:45 qui est une plateforme plus exactement, qui veut faire la concurrence,
00:51:49 qui est en train de détourner un certain nombre de gamers professionnels de Twitch vers l'autre.
00:51:54 Donc il y a un marché là aussi, il y a des droits.
00:51:57 - Bien sûr, il y a une concurrence surtout.
00:51:58 C'est-à-dire qu'aujourd'hui, Twitch est une entreprise qui a un monopole terrible,
00:52:01 et qui mérite d'être mise en concurrence autant que la SNCF en France, tout simplement.
00:52:04 On a besoin d'un univers concurrentiel à tous les niveaux dans l'e-sport.
00:52:07 - Mais donc il y a des droits qui sont versés à gamers.
00:52:10 - Ah d'accord, je vois où vous venez en venir.
00:52:11 Non, ce n'est pas des droits télé, ça c'est par rapport...
00:52:13 Les streamers gagnent de l'argent comme s'ils allaient s'exposer à Bercy,
00:52:17 sauf que c'est sur Internet, et les gens payent pour les voir.
00:52:19 Mais les clubs ne touchent pas d'argent par rapport à ça.
00:52:21 Et c'est un vrai, vrai, vrai, vrai problème.
00:52:23 Il n'y a pas de droits télé, il n'y a pas de billetterie dans l'e-sport.
00:52:26 Et sans ça, on ne peut pas vivre.
00:52:28 La base d'un club de sport, si vous regardez le détail des gains par année d'un club de sport,
00:52:32 c'est billetterie, merchandising, et les droits télé, c'est la plus grande part.
00:52:36 - Et alors il y a une dernière question qu'on peut se poser quand on n'est pas familier avec tout ça,
00:52:40 et c'est une raison, j'imagine, pour laquelle il y a, je crois,
00:52:44 dans ce sondage de 2019, il y avait, je crois, 79% des Français
00:52:50 qui considéraient que ça ne devait pas être aux Jeux Olympiques.
00:52:53 C'est aussi parce que les gens ne comprennent pas très bien en quoi c'est un spectacle.
00:52:57 C'est-à-dire qu'à la limite, qu'on joue aux jeux vidéo,
00:52:59 à la limite, qu'on y fasse des efforts considérables,
00:53:02 et que ce soit très bon pour le physique et pour le moral,
00:53:06 mais qu'on vienne regarder en masse d'autres joueurs jouer,
00:53:10 ça ne paraît pas évident, bien que, vous allez me dire,
00:53:12 regarder des gens jouer au football et sans y jouer soi-même, ça peut avoir l'air stupide aussi.
00:53:16 - Absolument. C'est ça. C'est exactement ça la réponse.
00:53:20 - Au moment où vous voyez... - C'est naturel et merveilleux.
00:53:24 - Au moment où vous voyez tout ce beau monde qui regarde un match de foot,
00:53:29 dites-vous bien qu'il y a quelqu'un, quelque part en France,
00:53:32 qui ne comprend pas qu'on soit assis là à regarder 90 minutes
00:53:36 où on pousse une balle ronde.
00:53:38 C'est comme ça. C'est juste une affaire d'appréciation.
00:53:41 Il faut qu'on souffre de laisser certains apprécier le spectacle.
00:53:46 Certains aiment le concert, d'autres aiment... - Le curling.
00:53:49 - Mais voilà, il faut avoir cette liberté-là de s'imaginer que...
00:53:54 Le nombre de spectateurs sur Twitch vous donne juste l'intensité et l'intention
00:54:00 des gens qui pourraient être derrière l'écran.
00:54:03 Il y a quelques années encore, même quelques mois encore,
00:54:06 on se disait qu'il n'y avait personne qui avait envie de regarder du MMA.
00:54:10 C'est ce qu'on se disait.
00:54:12 Aujourd'hui, les droits de télévision du MMA montent pour l'UFC jusqu'à 1,5 milliard.
00:54:18 - C'est pourquoi vous croyez que le CIO s'intéresse au MMA.
00:54:21 - Récemment à Bercy, avec juste 4 athlètes français,
00:54:26 il y a eu quand même 250 000 demandes pour acheter des tickets qui volaient très haut,
00:54:33 avec dans la salle plus de 15 000 spectateurs.
00:54:36 Il y a toujours des personnes qui, de leur petit niveau,
00:54:40 sur l'écran se disent "moi j'aime le tennis, je ne comprends pas
00:54:45 qu'on me mette du handball, c'est normal, je ne leur en veux pas du tout".
00:54:49 - Peut-être parce que, encore une fois, c'est un manque de connaissance
00:54:51 que vous évoquiez tout à l'heure.
00:54:52 - Bien sûr.
00:54:53 - Tout simplement, si vous aviez fait ce sondage,
00:54:54 si vous l'aviez fait auprès des jeunes de 15 à 35 ans,
00:54:57 je pense qu'on n'en serait pas sur le 10%.
00:54:59 - Évidemment.
00:55:00 Je vous remercie d'avoir participé à ce débat.
00:55:03 Je vous libère tous les trois.
00:55:04 Je garde Virginie Bensoussin embollée puisqu'on va aborder maintenant
00:55:09 la question des drones et de la police.
00:55:11 Mais d'abord, le rappel des titres.
00:55:14 Virginie Piboulot, non Isabelle Piboulot, pardon.
00:55:18 - Accident mortel à Villeneuve-Dasques.
00:55:24 Ce matin, quatre personnes ont été tuées, dont trois jeunes policiers.
00:55:28 Deux passagers ont été grièvement blessés dans une collision
00:55:31 entre un véhicule de police et une voiture.
00:55:34 Les premiers éléments confortent l'hypothèse d'un choc frontal.
00:55:37 Gérald Darmanin se rendra dans le commissariat de Roubaix
00:55:40 demain matin où travaillaient les trois fonctionnaires.
00:55:43 Une enquête a été ouverte pour homicide et blessures involontaires.
00:55:47 En cette fin de week-end de l'ascension,
00:55:49 il y a eu du monde sur les routes.
00:55:51 Bison Futé a enregistré plus de 900 km de bouchons
00:55:54 cumulés au niveau national en fin d'après-midi.
00:55:57 Un dimanche classé noir dans le sens des retours.
00:56:00 Sur tous les grands axes du pays, les encombrements
00:56:03 devraient durer jusque très tard dans la soirée.
00:56:06 Et puis, en clôture de la 36e journée de Ligue 1,
00:56:09 le PSG s'est imposé 2-1 face à la Géoser.
00:56:12 Avec un Kylian Mbappé en forme dès le début de la rencontre,
00:56:15 l'attaquant a inscrit un doublé à la 6e et 8e minute.
00:56:19 Lassine Sinayoko réduit le score à la 51e.
00:56:23 Les Parisiens se rapprochent un peu plus d'un 11e titre de champion de France
00:56:27 alors que Lens a conforté sa deuxième place
00:56:30 plus tôt en battant l'Orient 3 buts à 1.
00:56:33 (Générique)
00:56:39 - Bienvenue, si vous nous rejoignez maintenant,
00:56:41 les visiteurs du soir, c'est jusqu'à minuit.
00:56:43 À 23h30, on parlera avec Driss Ghali de la contre-histoire
00:56:47 de la colonisation française que vous venez de publier
00:56:50 et que vous qualifiez en 4e de couverture d'antidote
00:56:53 contre la désinformation et la pensée unique.
00:56:56 L'historien Gilles Manseron est arrivé également.
00:56:59 Vous êtes l'auteur de nombreux livres sur la colonisation,
00:57:01 Marianne et les colonies, une introduction à l'histoire
00:57:04 coloniale de la France.
00:57:05 Mais d'abord, on va revenir sur l'utilisation des drones
00:57:08 par les forces de l'ordre.
00:57:09 La loi les autorise depuis un mois à s'en servir.
00:57:12 Mais vous, Jean-Baptiste Souffron, vous avez déposé un recours
00:57:15 devant le Conseil d'État au nom de l'Association de défense
00:57:18 des libertés constitutionnelles.
00:57:19 Vous allez nous dire pourquoi.
00:57:20 Virginie Bensoussan-Brulé, vous êtes avocate, vous aussi,
00:57:24 et vous êtes l'auteur de "Failles de sécurité,
00:57:26 violations de données personnelles".
00:57:28 Et on a en duplex Philippe Choulous, qui est ex-colonel
00:57:32 de gendarmerie, aujourd'hui consultant spécialisé
00:57:36 dans le maintien de l'ordre.
00:57:37 Est-ce que vous êtes là ?
00:57:39 Oui, je vous revois.
00:57:40 Bonsoir.
00:57:41 Vous êtes l'auteur de "L'ordre pour la liberté,
00:57:43 approche militaire de l'armée connue du maintien de l'ordre".
00:57:46 Alors, ma première question est pour vous.
00:57:48 En quoi les drones sont-ils utiles aux forces de l'ordre,
00:57:51 que ce soit la police, la gendarmerie ou les douanes ?
00:57:55 Les drones sont utiles aux forces de l'ordre,
00:57:59 au même titre que l'usage de l'hélicoptère
00:58:02 qu'on utilise depuis des années.
00:58:05 C'est un moyen d'observation qui permet d'anticiper
00:58:09 les troubles à l'ordre public, ou même plus largement
00:58:14 les manœuvres d'ordre public, et qui permet de basculer
00:58:18 des forces et de faire évoluer les dispositifs.
00:58:21 C'est tout simplement ça.
00:58:23 Et quand il y a un adversaire un peu plus dur,
00:58:27 type le Black Bloc, ou alors des gens qui viennent piller
00:58:33 dans les queues des manifestations, ça permet d'anticiper
00:58:35 la manœuvre, de prépositionner les forces.
00:58:37 Ou alors c'est simplement un moyen d'observation,
00:58:39 au même type que l'hélicoptère, qui, comme l'utilisation
00:58:43 de l'hélicoptère, doit être légalement encadré,
00:58:46 qui doit bien évidemment être techniquement encadré,
00:58:48 mais à mon avis, il n'y a pas de question là-dessus.
00:58:51 J'ai du mal à comprendre qu'on s'attache aux moyens
00:58:57 en lui-même, plutôt qu'à l'usage qui peut en être fait.
00:59:00 Alors Jean-Baptiste Souffron, expliquez pourquoi
00:59:05 effectivement ça vous pose problème.
00:59:07 Non, en fait, il y a plusieurs recours qui ont été déposés.
00:59:10 Ça fait à peu près un mois maintenant que le décret
00:59:13 qu'on a attendu pendant un an et demi sur les règles
00:59:16 qui s'appliquent aux forces de l'ordre qui souhaitent
00:59:18 utiliser des drones a été publié. Et si vous voulez,
00:59:22 il y a eu un gros débat sur ce sujet pendant plusieurs années,
00:59:25 avec des censures du Conseil d'État, des débats,
00:59:28 une décision du Conseil constitutionnel.
00:59:30 Et finalement, on s'était mis d'accord sur un ensemble de règles.
00:59:34 La première des règles, c'est que les drones,
00:59:37 ce n'est pas tout à fait comme un hélicoptère,
00:59:38 un drone quand même, parce que d'abord, ça vole
00:59:41 extrêmement haut et surtout, ça enregistre.
00:59:43 Si vous voulez, quand vous positionnez un drone,
00:59:46 il peut réussir à filmer sur à peu près 600 mètres de diamètre.
00:59:50 Donc, ça fait plusieurs milliers de personnes potentiellement,
00:59:53 avec là, par exemple, sur les drones qui sont déployés
00:59:56 en ce moment à Cannes, ils ont des...
00:59:58 - Pour le festival. - Pour le festival,
00:59:59 il y a des zooms qui permettent de zoomer 56 fois.
01:00:01 Et en plus de ça, un drone, quand il enregistre,
01:00:04 il ne fait pas trop attention à ce qu'il enregistre.
01:00:06 Il y a des opérateurs qui sont en plus des gens
01:00:08 qui sont bien formés dans les forces de l'ordre.
01:00:10 Mais si vous voulez, s'il passe devant une fenêtre,
01:00:12 par exemple, il va enregistrer ce qui se passe
01:00:14 derrière la fenêtre, donc dans l'appartement.
01:00:15 - Oui, ça, c'est la différence avec l'hélicoptère,
01:00:17 on pourrait dire. Et on l'a vu pendant le Covid.
01:00:19 - Bien sûr. - Les drones ont servi
01:00:21 à vérifier que le confinement était bien respecté.
01:00:26 Et à l'époque, c'est vrai, il n'y avait pas de réglementation.
01:00:29 - Exactement. Et depuis que cette réglementation,
01:00:31 donc, du coup, a fait l'objet d'un gros débat,
01:00:33 des règles ont été mises en place.
01:00:35 La première de ces règles, c'est que les drones,
01:00:38 d'abord, doivent être utilisés en situation
01:00:40 d'absolue nécessité. Ça ne veut pas dire
01:00:42 quand les forces de l'ordre sont en danger, etc.
01:00:44 Ça ne va pas jusque-là. Mais c'est plutôt pour dire
01:00:47 que, en fait, si on peut faire autrement,
01:00:49 on évite les drones. Si vous avez des caméras
01:00:51 dans la rue, si vous avez des forces de l'ordre
01:00:53 en nombre suffisant, s'il n'y a pas de point chaud,
01:00:56 vous voyez, à ce moment-là, pourquoi est-ce
01:00:58 qu'on irait déployer un outil qui, certes,
01:01:00 est très moderne, enfin, en 2023, je pense que
01:01:02 personne ici va expliquer que les forces de l'ordre
01:01:04 ne peuvent pas utiliser des drones, si vous voulez,
01:01:06 ce n'est pas le débat aujourd'hui.
01:01:07 C'est plus le comment. Donc, déjà, il faut que ça soit
01:01:10 vraiment quelque chose qui soit utile aux forces
01:01:12 de l'ordre pour qu'on accepte de l'utiliser.
01:01:14 – 12 intérro pour Virginie Bensous-Sambollé,
01:01:17 puisqu'on va les énumérer, les conditions, justement,
01:01:20 de cette nouvelle réglementation. Vous êtes d'accord ?
01:01:23 – Alors, moi, tout de suite, j'ai voulu dire que j'étais d'accord
01:01:25 avec votre autre invitée. Pour moi, c'est un non-sens
01:01:29 d'attaquer la technologie elle-même.
01:01:33 La technologie, elle est par définition neutre.
01:01:36 Quand bien même les drones, par rapport à la vidéoprotection,
01:01:40 puisque finalement, c'est plutôt par là que la ressemblance
01:01:44 peut se faire, a effectivement des spécificités
01:01:46 que vous avez rappelées, c'est-à-dire une zone géographique
01:01:49 couverte très importante et surtout, la capacité de se déplacer
01:01:53 et donc de suivre les cortèges. Mais la technologie,
01:01:56 en tant que telle, elle est neutre. Ça, c'était mon premier point.
01:01:59 Et le deuxième point, qui est plutôt juridique,
01:02:01 où je ne rejoins pas la position des associations Adelico
01:02:06 et la quadrature du Net, c'est d'indiquer que la réglementation
01:02:11 telle qu'elle existe aujourd'hui, imposerait que le recours
01:02:15 à la captation des images par drone ne puisse se faire qu'en cas
01:02:19 de nécessité absolue et que par la suite, lors par exemple
01:02:23 des manifestations du 1er mai, on n'aurait pas été dans
01:02:27 cette nécessité absolue. Mais là, et je pense qu'avec mon confrère,
01:02:31 on va pouvoir échanger sur ce point, c'est partir du principe
01:02:35 que les images en réalité qui vont être captées par le drone
01:02:40 vont permettre indirectement de connaître l'opinion syndicale,
01:02:46 l'opinion politique, voire dans certaines manifestations,
01:02:49 les convictions religieuses des manifestants.
01:02:52 Et s'il y a un traitement de telle donnée qui est réalisé,
01:02:55 effectivement, il est qualifié de sensible et alors les textes,
01:02:59 parce que la réglementation existe, imposent de n'y recourir
01:03:02 qu'en cas de nécessité absolue. Mais en réalité, ce qui se passe
01:03:06 aujourd'hui avec la vidéoprotection ou aujourd'hui avec les drones,
01:03:10 c'est que les images que l'on récupère, finalement, c'est indirectement
01:03:14 qu'elles vont révéler des convictions religieuses,
01:03:18 des opinions politiques ou des opinions syndicales des manifestants.
01:03:21 C'est déduit intellectuellement. Il n'y a pas de fichier derrière
01:03:26 qui est réalisé sur telle personne à cette manifestation,
01:03:30 à telle conviction religieuse, opinion syndicale ou opinion politique.
01:03:34 Donc en réalité, il me semble que l'argumentaire juridique
01:03:38 qui est utilisé par ces associations dans le cadre de leur recours
01:03:42 devant le Conseil d'État, sur la directive polyjustice,
01:03:45 mon confrère l'abordera, je pense, n'est pas le bon texte.
01:03:49 Aujourd'hui, ce ne sont pas des données sensibles,
01:03:52 ce sont ce qu'on appelle des données à caractère hautement personnel.
01:03:55 Elles doivent être protégées par des garanties appropriées
01:03:58 et il me semble que la réglementation telle qu'elle existe,
01:04:01 la loi validée par le Conseil constitutionnel,
01:04:04 le fameux décret "pris à vie, pris après avis de la CNIL"
01:04:08 permet ces garanties appropriées.
01:04:11 Vous ne le pensez pas ?
01:04:12 Ecoutez, ce n'est pas tellement ça. Moi, je vais être extrêmement concret.
01:04:15 Je pense que c'est une erreur et que ce qui vient d'autres jours est faux.
01:04:18 Ne serait-ce que parce que vendredi dernier, nous avons fait condamner
01:04:22 le procureur général de Lille pour avoir constitué justement
01:04:26 des fichiers à caractère politique sur les manifestants
01:04:29 au cours des manifestations à Lille.
01:04:31 C'est ça le problème, c'est que quand vous filmez une manifestation,
01:04:34 bien sûr que c'est politique et que l'usage qui en est fait peut être illégal
01:04:38 et que l'État a déjà été condamné là, en ce moment, récemment,
01:04:42 pour l'avoir fait et dans des termes qui ont été très durs
01:04:45 de la part du juge du tribunal administratif,
01:04:48 qui a dit que c'était vraiment quelque chose qui était grossièrement irrégulier.
01:04:52 Si vous voulez, on est dans une situation où le drone va filmer.
01:04:56 Un drone, vous ne le voyez pas, vous ne savez pas que vous êtes filmé.
01:04:59 Sachez que normalement, c'est prévu par la loi et on doit en faire état.
01:05:03 Alors, ça ne peut être qu'un tweet.
01:05:05 C'est tout le problème.
01:05:06 Mais on doit en faire état, on doit savoir qu'on va être filmé.
01:05:09 Comprenez-moi, ici, les caméras sont peut-être à quoi, à 20 mètres, 25 mètres ?
01:05:13 Non, non, beaucoup plus.
01:05:15 Voilà, mais ce drone, il va être à 600 mètres de vous.
01:05:18 À 600 mètres de vous, il va vous identifier parfaitement.
01:05:21 Comment voulez-vous avoir conscience que vous, vos amis, votre famille,
01:05:25 êtes en train d'être filmé dans une manifestation
01:05:28 où vous exprimez votre opinion politique ?
01:05:30 Parce qu'on a été normalement avertis par tout moyen approprié.
01:05:35 Parce que vous êtes sur Twitter, ce que disait la CNIL,
01:05:37 c'est qu'il fallait un avertissement sonore sur le lieu d'enregistrement.
01:05:40 Jusqu'à présent, ça n'est pas fait.
01:05:41 Et un avertissement visuel sur le lieu d'enregistrement,
01:05:43 c'est-à-dire, tout bêtement, un panneau.
01:05:46 Ah mais écoutez, si on commence à prévenir les gens, mettre des panneaux
01:05:49 et leur dire "attention, on va vous enregistrer",
01:05:51 je pense que les choses se résolvent d'elles-mêmes.
01:05:53 Tout ce qui est en train de se faire, et c'est d'ailleurs ce qu'a reconnu
01:05:55 le ministère de la Justice devant le Conseil d'État,
01:05:57 enfin le ministère de l'Intérieur,
01:05:59 ce qui est en train de se passer, si vous voulez, c'est aussi que,
01:06:02 on voit bien que les forces de l'ordre essaient un petit peu
01:06:05 la technique du fait accompli, comme ce qu'elles font depuis trois mois
01:06:08 dans plein de domaines pour ce qui concerne les libertés publiques.
01:06:12 Elles essayent de tirer la corde au maximum sur ce qu'elles peuvent.
01:06:16 Elles se font taper sur les doigts, et c'est pour ça que vous avez
01:06:19 des décisions de tribunaux administratifs qui invalident l'usage des drones.
01:06:22 Par exemple, à Rouen, le préfet voulait utiliser des drones
01:06:26 pour filmer une manifestation qui était de nature simplement
01:06:29 des conférences et des pique-niques dans la forêt.
01:06:32 Ça n'a pas lieu d'être ! Enfin, il faut savoir raison garder,
01:06:35 et c'est juste ça, il s'agit d'être...
01:06:37 Je rappelle que dans la loi, l'utilisation des drones
01:06:40 est soumise à autorisation des préfets.
01:06:43 On ne peut pas spontanément utiliser des drones,
01:06:46 comme le demandaient les forces de l'ordre, d'ailleurs.
01:06:48 Ça a été retoché.
01:06:49 Et il faut savoir aussi que c'est limité dans le temps et dans l'espace.
01:06:53 Quand ils en ont la possibilité, on leur dit que ça sera
01:06:56 jusqu'à tel moment et pas plus tard, que seuls les personnels
01:06:59 habilités pourront les consulter, que les images seront gardées
01:07:03 seulement sept jours avant d'être détruites,
01:07:06 sauf en cas d'enquête judiciaire.
01:07:08 La parole est à vous, Philippe Chelou.
01:07:11 J'écoute avec attention, et bien évidemment,
01:07:15 je crois qu'on se rejoint sur un point,
01:07:18 c'est que ce n'est pas le moyen en tant que tel,
01:07:20 c'est bien l'usage qui en est fait.
01:07:22 Moi, j'aurais plusieurs observations.
01:07:24 D'abord, sur le fait que les drones peuvent enregistrer de très loin.
01:07:27 Les hélicoptères aujourd'hui, les hélicoptères de la gendarmerie,
01:07:31 notamment, sont équipés de moyens optroniques
01:07:33 d'excellente définition.
01:07:35 Alors, évidemment, on voit l'hélicoptère,
01:07:37 mais ce n'est pas quelque chose de nouveau,
01:07:39 c'est un modèle qui a été réutilisé.
01:07:41 Ça n'a jamais donné lieu à un usage qui ne soit pas approprié.
01:07:46 Donc, je crois que là-dessus, on peut aussi avoir un retour d'expérience
01:07:49 et on ne part pas complètement de zéro.
01:07:53 Ce que je voulais dire aussi, c'est qu'en termes de...
01:07:55 Ce qu'il faut bien comprendre, alors moi, je suis un peu le technicien là-dedans,
01:07:58 dans cette affaire, et je crois que...
01:08:00 Alors, le maître...
01:08:05 Souffrons, souffrons.
01:08:07 On en a dit, on en a dit,
01:08:09 la police tente de...
01:08:11 La gendarmerie tente de pousser...
01:08:13 Non, non, je crois que dans tout moyen nouveau...
01:08:17 Moi, à Valenciennes, je travaillais avec M. de Montgolfier,
01:08:20 qui était le procureur, qui me disait,
01:08:21 "Mais mon capitaine, allons à la jurisprudence."
01:08:23 Quand il y a les nouvelles règles Schengen,
01:08:24 "Allons à la jurisprudence pour voir."
01:08:26 Voilà, ce n'est pas forcément...
01:08:27 Il ne faut pas voir quelque chose, on emploie, oui,
01:08:29 parce que c'est quelque chose...
01:08:30 On a eu les moyens, on a fait les expérimentations,
01:08:32 notamment au Centre national d'entraînement des forces de gendarmerie à Saint-Astier.
01:08:35 C'est un moyen qui est maîtrisé.
01:08:36 Il n'y a aucun enregistrement, il n'y a pas de déviance.
01:08:38 Voilà, bon, on les utilise dans le cadre de la loi,
01:08:40 et puis parfois, tout n'est pas prévu par la loi.
01:08:42 Je crois qu'il ne faut pas...
01:08:43 Et puis, deuxièmement, dernièrement,
01:08:45 dernier point qui est très important,
01:08:47 je crois qu'il faut avoir aussi une vision globale
01:08:49 et voir ce qui est positif dans l'utilisation de ce type de moyens.
01:08:52 Et ce qui est positif,
01:08:54 et là, je pense qu'on va se mettre d'accord,
01:08:57 c'est aussi, par exemple, d'économiser des moyens
01:09:00 et de ne pas avoir recours à des moyens qui sont parfois discutables.
01:09:04 Je veux dire, si on a une vision globale d'une manifestation,
01:09:06 de là où peuvent être les points durs,
01:09:08 ça permet de faire des bascules de force,
01:09:11 de faire des manœuvres qui permettent d'utiliser au mieux
01:09:13 des forces qui sont réduites,
01:09:15 mais qui sont spécialisées,
01:09:16 type gendarmerie mobile, compagnie républicaine de sécurité,
01:09:21 et de ne pas engager, comme on le fait actuellement,
01:09:23 des pléthores d'effectifs,
01:09:25 notamment des unités non spécialisées,
01:09:27 qui, parfois, elles, posent problème.
01:09:29 Vous parlez de la BAC ?
01:09:31 Oui, je parlais de la BAC,
01:09:32 qui sont d'excellentes unités, mais qui ne sont pas faites pour ça, clairement.
01:09:35 Vous savez, moi, je suis breton,
01:09:37 et en Bretagne, on a un proverbe, on dit
01:09:39 "Boulanger, pâtissier, mauvais pain, mauvais gâteau".
01:09:42 Je crois à la spécialisation, je crois au métier, moi,
01:09:45 et je crois qu'il faut, effectivement,
01:09:47 utiliser des unités spécialisées
01:09:49 et que l'usage du drone peut, effectivement,
01:09:52 rationaliser de manière considérable les effectifs
01:09:54 et privilégier l'emploi des forces spécialisées
01:09:56 sur les forces non spécialisées.
01:09:58 Dernier petit détail, sans prendre trop de temps,
01:10:01 je crois aussi qu'il ne faut pas se focaliser sur le moyen,
01:10:03 mais bien sur l'usage qui en est fait.
01:10:05 Alors, je ferai un parallèle avec
01:10:07 les lanceurs à balles de défense,
01:10:09 de type flashball, qui ont été très discutés
01:10:12 pendant la crise des Gilets jaunes,
01:10:14 et tout le monde a focalisé sur le moyen.
01:10:16 Mais, en fait, le moyen, c'est pas ça, le problème.
01:10:19 Le problème, c'est que le flashball aille être utilisé
01:10:22 par des gens qui n'étaient pas formés,
01:10:24 en contradication des distances prévues par le fabricant,
01:10:28 et de façon extrêmement limite,
01:10:32 au regard du cadre légal.
01:10:34 C'est ça le problème, c'est pas le moyen en soi,
01:10:36 c'est bien l'usage qui en est fait,
01:10:38 l'encadrement juridique, la discipline de tir,
01:10:40 c'est tout ça qui est derrière.
01:10:42 Donc, je crois qu'on peut voir aussi,
01:10:44 dans l'avènement des drones,
01:10:46 quelque chose de positif qui permet, finalement,
01:10:48 d'avoir une plus grande professionnalisation.
01:10:52 - Justement, on n'a pas autorisé la police municipale
01:10:58 à les utiliser, les drones. Pourquoi ?
01:11:01 - Alors, effectivement, c'est une des censures
01:11:05 du Conseil constitutionnel, en tout cas, dans cette loi-là,
01:11:10 mais pas celle sur les JO,
01:11:12 pour pas non plus que peut-être le grand public confonde.
01:11:15 On est vraiment sur une loi qui s'appelle
01:11:17 la loi responsabilité pénale et sécurité intérieure,
01:11:20 et qui est sur l'usage des drones
01:11:22 par les forces de police, les forces de l'ordre,
01:11:26 d'ailleurs, ça peut être la police, la gendarmerie nationale,
01:11:28 - Les douanes. - Mais aussi les douanes,
01:11:30 et les armées, dans des circonstances particulières
01:11:34 sur lesquelles la police municipale,
01:11:36 a priori, n'avait pas compétence.
01:11:39 Mais je voulais rappeler quelque chose
01:11:41 au niveau des garanties appropriées,
01:11:43 pour que l'on rassure quand même nos téléspectateurs,
01:11:46 parce que ces outils, ces technologies,
01:11:50 elles sont avant tout faites aussi pour protéger les victimes,
01:11:54 et notamment les enregistrements et les transmissions
01:11:58 des images en temps réel au centre de commandement,
01:12:03 et leur durée de conservation, certes limitée,
01:12:06 compte tenu de nos règles de droit,
01:12:09 permet aussi aux victimes de récupérer les enregistrements
01:12:12 et de se défendre et de faire valoir leurs droits.
01:12:15 Mais au niveau des garanties appropriées,
01:12:17 le son n'est pas capté,
01:12:19 ce qui est quand même important à préciser
01:12:22 pour nos téléspectateurs.
01:12:24 On ne peut pas, ces drones-là,
01:12:27 n'embarquent pas, en tout cas dans cette réglementation,
01:12:29 n'embarquent pas de technologies de reconnaissance faciale
01:12:33 et donc des données biométriques,
01:12:35 et non plus, il est interdit aux forces de l'ordre,
01:12:40 qui récupèrent les images captées par les drones,
01:12:43 de faire des rapprochements,
01:12:45 des mises en relation automatisées avec d'autres fichiers.
01:12:49 Donc moi, j'insiste, les garanties appropriées, elles existent,
01:12:53 il n'y a pas d'atteinte à la vie privée,
01:12:55 et il n'y a pas d'atteinte disproportionnée
01:12:58 aux droits et libertés individuelles et collectives,
01:13:01 telles que la réglementation, elle existe.
01:13:03 Derrière, s'il y a des débordements,
01:13:05 s'il y a des déviances, un non-respect de la réglementation,
01:13:07 alors oui, ça sera le rôle du juge,
01:13:09 et probablement de la CNIL,
01:13:11 qui pourra, si elle le souhaite,
01:13:13 diligenter des contrôles au sein du ministère de l'Intérieur,
01:13:17 de regarder les fameux cas d'usage.
01:13:20 Dans le cas de l'atteinte à la vie privée,
01:13:22 qui inquiétait beaucoup les associations aussi,
01:13:25 il n'y a pas le droit de filmer à l'intérieur des domiciles,
01:13:28 ni l'entrée des immeubles,
01:13:31 de façon à ne pas pouvoir savoir si les gens rentrent ou sortent,
01:13:33 comme on le faisait au moment du confinement.
01:13:35 Mais Frédéric Taddeï, ce sont des garanties de papier,
01:13:37 c'est ça la difficulté qu'on a aujourd'hui.
01:13:39 Ça s'appelle la loi.
01:13:41 Oui, mais c'est une loi que les forces de l'ordre et les préfectures,
01:13:44 et surtout le gouvernement, ne souhaitent pas respecter.
01:13:46 Et c'est très inquiétant,
01:13:48 c'est que tout ça s'inscrit dans un contexte,
01:13:50 depuis plusieurs mois, si vous voulez,
01:13:52 où régulièrement le gouvernement prend des mesures,
01:13:54 dont il sait qu'elles sont illicites,
01:13:56 en attendant une éventuelle censure des tribunaux.
01:13:58 On n'a jamais vu ça.
01:14:00 C'est exactement, si vous voulez, comme l'interdiction des sifflets,
01:14:02 l'interdiction des cartons rouges, ce genre de choses.
01:14:04 Dans ces conditions, on peut bien mettre des réserves,
01:14:07 par exemple, quand on vous dit que ça n'enregistre pas,
01:14:09 trop longtemps, et qu'après on va effacer.
01:14:11 C'est vrai, sauf si,
01:14:13 ces images sont ensuite transférées dans le cadre d'une procédure judiciaire,
01:14:16 parce que dans votre domicile,
01:14:18 on a repéré peut-être quelque chose.
01:14:20 Alors à ce moment-là, 48 heures pour le décider.
01:14:22 Si c'est décidé dans les 48 heures,
01:14:24 ça sort, ça rentre dans un autre système,
01:14:26 et à partir de là, vous n'avez plus de garantie.
01:14:28 Et pour réussir à obtenir des images,
01:14:30 pour savoir ce qui s'est passé, bon courage à vous.
01:14:32 Et surtout, vous ne savez pas comment ça sera traité,
01:14:35 et de quelle façon.
01:14:37 Il y a dans cette histoire de drones,
01:14:39 depuis longtemps, et c'était le sujet des débats initiaux,
01:14:42 une finalité, un objectif,
01:14:45 qui est recherché par les forces de l'ordre avec ces drones.
01:14:47 C'est de pouvoir enregistrer des stocks d'images,
01:14:49 pour ensuite faire des recherches de preuves,
01:14:51 a posteriori. Ils ont repéré un incident,
01:14:53 il y a quelque chose qui les embête,
01:14:55 ils ont vu un truc, et donc ils veulent pouvoir se les repasser,
01:14:57 les revisionner, etc.
01:14:59 Et ensuite, reconstruire une chaîne de preuves,
01:15:01 pour pouvoir ensuite démontrer un incident.
01:15:03 Or ça, ce n'est pas une finalité qui fait partie
01:15:05 de celles qui ont été autorisées,
01:15:07 ni par la directive de la police de justice,
01:15:09 ni par le décret. Et pourtant, on voit bien
01:15:11 que c'est vers ce genre d'usage,
01:15:13 c'est-à-dire vers une espèce de police de la reconstitution
01:15:15 a posteriori, à partir de choses qu'on a enregistrées.
01:15:17 Et ça, c'est quelque chose qui normalement devrait inquiéter.
01:15:20 Surtout quand, surtout quand, en fait,
01:15:22 bien sûr, vous pouvez saisir un triple administratif.
01:15:24 Sauf que prenez l'exemple, ce matin,
01:15:26 vous avez une manifestation organisée encore au Festival de Cannes,
01:15:28 à 10h, de 10h à midi.
01:15:30 Eh bien, l'arrêté interdisant la manifestation
01:15:32 est tombé à 10h. Comment vous faites
01:15:34 pour saisir le tribunal administratif
01:15:36 à 10h, quand vous êtes déjà en train de manifester ?
01:15:38 Vous faites quoi ? Eh bien, vous ne faites rien
01:15:40 et vous ne pouvez pas le saisir. Et même si vous arrivez
01:15:42 à le saisir, il vous répondra qu'il ne peut pas se prononcer
01:15:44 en temps utile. C'est ça, la réalité
01:15:46 de l'effectivité de la garantie des droits aujourd'hui en France.
01:15:48 Et on est obligé d'interpréter
01:15:50 le Code, les règles,
01:15:52 qui s'appliquent aux forces de l'ordre, comme à tout le monde,
01:15:54 dans ce contexte. Et ce qui est
01:15:56 en train de se passer, c'est que cette pratique,
01:15:58 qui est inadmissible, personne ne conteste
01:16:00 que les forces de l'ordre aient besoin de drones
01:16:02 en 2023. Enfin, c'est comme si on leur disait
01:16:04 qu'il ne faut pas qu'elles aient
01:16:06 de téléphone portable ou qu'il faut revenir
01:16:08 au calèche et aux chevaux. On n'en est
01:16:10 pas là. Mais ce qu'on souhaiterait,
01:16:12 c'est avoir une confiance
01:16:14 qui se construise. Et cette espèce de pratique,
01:16:16 comme ça, de coup de boutoir
01:16:18 contre, simplement, des garanties
01:16:20 très simples, des choses toutes bêtes,
01:16:22 le droit de manifester en France,
01:16:24 le droit d'exprimer une opinion politique
01:16:26 contraire, eh bien, ces choses-là, en fait,
01:16:28 le fait de les attaquer de cette façon,
01:16:30 et aussi frontalement, et d'aussi mauvaise foi,
01:16:32 pardonnez-moi, eh bien, je pense que
01:16:34 ça développe une méthode qui relève de l'arbitraire
01:16:36 et qui commence à émousser
01:16:38 la confiance qu'on peut nous-mêmes avoir
01:16:40 dans le dispositif. Et on a besoin d'avoir confiance.
01:16:42 Quand je vois un policier avec une arme à feu,
01:16:44 je ne m'imagine pas qu'il va me tirer dessus. Pourquoi ?
01:16:46 Parce que cette arme, elle est réglementée, parce qu'il y a une habitude,
01:16:48 parce que j'ai confiance. Vous voyez ce que
01:16:50 je veux dire ? Il faut que quand des
01:16:52 policiers viennent filmer avec des drones,
01:16:54 ce qui est peut-être légitime, c'est pas le sujet.
01:16:56 De toute façon, aujourd'hui, ils existent.
01:16:58 Mais il faut qu'on leur fasse confiance.
01:17:00 Cette confiance, aujourd'hui, eh bien,
01:17:02 les arrêtés tels qu'ils sont pris, et ils sont en décalage
01:17:04 avec le décret, ils sont illicites,
01:17:06 ces arrêtés, eh bien, ne permettent pas
01:17:08 de créer la confiance.
01:17:10 Alors, je précise que ces drones,
01:17:12 cette loi ne s'exerce pas seulement
01:17:14 dans le cadre des manifestations,
01:17:16 bien entendu. Ça en fait partie.
01:17:18 La sécurité des manifestations
01:17:20 fait partie des occasions
01:17:22 où la police, où les forces de l'ordre
01:17:24 peuvent demander l'usage du drone,
01:17:26 l'autorisation de les utiliser,
01:17:28 et pour un temps limité, sur une surface
01:17:30 limitée également. Mais il y a aussi la prévention
01:17:32 des atteintes à la sécurité des personnes et des biens
01:17:34 dans des lieux exposés.
01:17:36 Il y a la prévention des installations publiques
01:17:38 et de leurs abords immédiats
01:17:40 lorsqu'ils sont particulièrement exposés à des risques
01:17:42 d'intrusion ou de dégradation. On se souvient que c'était
01:17:44 arrivé pendant les Gilets jaunes.
01:17:46 Il y a la prévention du terrorisme,
01:17:48 il y a la régulation des transports lorsqu'il y a
01:17:50 un enjeu de sécurité. Là, c'est quoi ?
01:17:52 Oui, là juste,
01:17:54 si vous me permettez deux secondes, je pense que
01:17:56 les associations dont
01:17:58 on parle aujourd'hui, Adélico, Le Quadrature
01:18:00 du Net, elles sont très focalisées sur
01:18:02 le droit de manifester qui serait
01:18:04 un des droits
01:18:06 fondamentaux qui serait...
01:18:08 À sort d'État. Oui, mais qui serait
01:18:10 systématiquement
01:18:12 combattu. Je précise,
01:18:14 juste, et pardon de vous interrompre, dans l'opinion,
01:18:16 il y a eu le sondage
01:18:18 sur les Français, le libéralisme, comme chaque année,
01:18:20 et plus de la moitié des Français trouvent que
01:18:22 le droit de manifester est
01:18:24 réduit, est de plus en plus réduit.
01:18:26 On va revenir finalement à une de nos principales
01:18:28 libertés qui est la liberté d'aller et venir
01:18:30 de manière anonyme. C'est celle-ci
01:18:32 notre principale liberté
01:18:34 aux côtés de la dignité numérique
01:18:36 dont on parlera certainement un peu
01:18:38 plus tard dans votre émission. Prenons la liberté
01:18:40 d'aller et venir de manière anonyme. Quand je sors de
01:18:42 chez moi, en tout cas pour
01:18:44 les personnes privées,
01:18:46 pour les personnalités publiques, les choses sont un petit peu différentes,
01:18:48 je me déplace de manière
01:18:50 anonyme, je suis dans un cadre privé,
01:18:52 même si je suis sur la voie publique.
01:18:54 Et pourtant j'ai de la vidéoprotection.
01:18:56 Et là, pour vos téléspectateurs, je souhaiterais préciser que
01:18:58 auparavant on parlait de vidéosurveillance.
01:19:00 Le français ne veut pas être surveillé, le français veut être
01:19:02 protégé. D'où les réglementations
01:19:04 qui ont changé le terme pour passer de vidéosurveillance,
01:19:06 qui est toujours le cas dans l'entreprise,
01:19:08 mais sur la voie publique ou dans les lieux
01:19:10 ouverts au public, on est sur de la vidéoprotection.
01:19:12 - Donc c'est bien, il suffit de changer le mot et hop !
01:19:14 - Non, mais c'est pour montrer que finalement
01:19:16 ce qu'on a accepté pour la vidéoprotection,
01:19:18 aujourd'hui il y a une acceptabilité sociale
01:19:20 très importante, c'est qu'on a vu aussi
01:19:22 le bénéfice pour les victimes
01:19:24 de pouvoir bénéficier de ces enregistrements
01:19:26 qui eux peuvent être conservés jusqu'à 30 jours.
01:19:28 Donc beaucoup plus longtemps
01:19:30 que dans le cadre des images
01:19:32 captées par les drones.
01:19:34 Et en réalité, il faudrait qu'on ait une position médiane
01:19:36 en fait, même si je comprends que
01:19:38 peut-être ce soir avec ces associations,
01:19:40 comme elles sont en contention,
01:19:42 on n'y arrivera pas, mais essayons d'avoir une position
01:19:44 médiane en se disant que la technologie
01:19:46 est neutre, on a d'un côté
01:19:48 les libertés fondamentales,
01:19:50 la sécurité,
01:19:52 en rappelant que le Conseil constitutionnel
01:19:54 le 17 mai, donc il y a à peine
01:19:56 quelques jours, a rappelé
01:19:58 que la prévention
01:20:00 de l'atteinte à l'ordre public
01:20:02 constitue un objectif
01:20:04 à valeur constitutionnelle
01:20:06 et en ça a validé
01:20:08 la loi
01:20:10 la G7.
01:20:12 La Géos olympique
01:20:14 paralympique 2024
01:20:16 et que donc il faudrait
01:20:18 qu'on trouve finalement
01:20:20 une triangularité, qu'on rajoute la
01:20:22 dignité, parce que ça c'est notre
01:20:24 principal droit à nous, Européens,
01:20:26 dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne,
01:20:28 l'article premier, c'est
01:20:30 le respect de la dignité, de la dignité humaine.
01:20:32 Et bien essayons,
01:20:34 tous ensemble, avec
01:20:36 le législateur, avec la CNIL,
01:20:38 qui a un rôle extrêmement important à jouer,
01:20:40 avec les juristes, avec les associations,
01:20:42 parce qu'on a néanmoins besoin
01:20:44 d'elles, elles font bouser les choses,
01:20:46 de mettre au centre des libertés
01:20:48 et de la sécurité, le principe
01:20:50 de dignité numérique, où chacun
01:20:52 pourra faire respecter ses droits, en pensant
01:20:54 quand même toujours que
01:20:56 il y a la victime aujourd'hui
01:20:58 et qu'elle va pouvoir bénéficier
01:21:00 de ces images, dans le cadre notamment
01:21:02 de procédures judiciaires, et elle aura
01:21:04 enfin la preuve
01:21:06 dont elle a généralement besoin
01:21:08 parce que sinon c'est parole contre parole.
01:21:10 Je vous donne la parole,
01:21:12 je rajoute juste pour finir,
01:21:14 les forces de l'ordre pourront utiliser
01:21:16 des drones également pour la surveillance des frontières
01:21:18 et le secours au père de Sam, très vite,
01:21:20 parce qu'il nous reste 3 minutes.
01:21:22 Je pense que le point qui est important aussi,
01:21:24 c'est celui de la sécurité juridique en fait.
01:21:26 Les gens ont passé un temps long
01:21:28 à débattre de la réglementation de ces drones,
01:21:30 à la fois pour eux en être protégés
01:21:32 et pour permettre aux forces de l'ordre de les utiliser.
01:21:34 Or, ce qui se passe, c'est qu'on est avec
01:21:36 un gouvernement qui aujourd'hui ne respecte pas
01:21:38 la propre loi qu'il a faite passer.
01:21:40 C'est ça la difficulté. C'est ça qui est
01:21:42 difficile, si vous voulez, à comprendre.
01:21:44 Et c'est pour ça que les règles
01:21:46 disent "il faut compter sur ceci", mais quelqu'un
01:21:48 qui serait filmé par erreur dans une manifestation,
01:21:50 qu'est-ce qu'il va faire ? Il va aller voir la Ligue des Droits de l'Homme ?
01:21:52 Il va aller voir le Syndicat des Avocats de France ?
01:21:54 Il va se retourner tout seul ?
01:21:56 On en est à quasiment une condamnation
01:21:58 de l'État par semaine, depuis plusieurs mois
01:22:00 sur ces sujets.
01:22:02 Les personnes qui apparaîtraient dans les images
01:22:04 n'ont pas le droit d'accès, de rectification
01:22:06 et d'effacement. C'est prévu ?
01:22:08 Non, pas sur les vidéos de drones.
01:22:10 Et de la même façon, sur les vidéos de drones,
01:22:12 ils ne peuvent pas non plus les consulter
01:22:14 pour savoir ce qui s'est passé, comme ce serait le cas
01:22:16 sur une image de vidéoprotection.
01:22:18 Précisément, on est vraiment sur quelque chose
01:22:20 qui change tellement la manière
01:22:22 de surveiller les manifestations,
01:22:24 mais aussi les rodéos urbains, par exemple.
01:22:26 Si vous prenez les rodéos urbains,
01:22:28 qui va dire
01:22:30 que les drones ne sont pas un outil efficace
01:22:32 contre les rodéos urbains.
01:22:34 Pas moi, mais à ce moment-là,
01:22:36 de 19h à 23h, quand le rodéo urbain
01:22:38 a lieu, pas pendant 3 mois,
01:22:40 toute la journée, au moment
01:22:42 où des gens viennent faire leurs courses,
01:22:44 passent, emmènent leurs enfants à l'école, etc.
01:22:46 Or, c'est ça qui est dans les arrêtés
01:22:48 aujourd'hui, si vous voulez.
01:22:50 Mais au contraire à la loi, puisque la loi
01:22:52 dit que ça doit se faire
01:22:54 en un temps donné et sur une surface donnée.
01:22:56 Tout ce que demande la Ligue des droits de l'homme,
01:22:58 on est quand même nombreux, plus des requérants
01:23:00 personnes physiques, plus maintenant
01:23:02 des tribunaux administratifs qui nous donnent raison.
01:23:04 Tout ce qui est demandé, c'est juste
01:23:06 que les forces de l'ordre respectent la loi,
01:23:08 comme elles le font régulièrement avec des grenades
01:23:10 acrymogènes, etc. En plus, il faut
01:23:12 le dire, les gens qui s'occupent des drones sont des policiers
01:23:14 qui sont en général très bien formés et
01:23:16 qui ne demandent qu'une chose, justement, c'est que l'ordre donne des consignes
01:23:18 claires. Alors, Philippe Cholous, dernier mot,
01:23:20 il ne nous reste qu'une minute.
01:23:22 Non, simplement une minute, je crois que
01:23:24 je comprends bien le souci
01:23:26 de Maître Soiron, mais je crois que
01:23:28 il ne faut pas mésestimer le fait
01:23:30 que, bien évidemment, il y a une pratique qui va
01:23:32 nécessiter d'être mise en place, il y aura évidemment
01:23:34 des plaintes,
01:23:36 il y aura des arbitrages, bien évidemment, il y aura une jurisprudence,
01:23:38 mais je crois quand même que c'est des choses
01:23:40 qui sont commandées et contrôlées.
01:23:42 Je crois que la majorité des policiers
01:23:44 et des gendarmes sont des gens légalistes.
01:23:46 Alors, évidemment, il y a le problème du C2, ce qu'on appelle
01:23:48 nous le C2, le commandement et le contrôle, effectivement,
01:23:50 qui demande sans aucun doute
01:23:52 à être affilé, mais je ne crois pas
01:23:54 que l'institution policière
01:23:56 ait vocation
01:23:58 ni envie de surveiller
01:24:00 ses compatriotes, je ne crois pas.
01:24:02 Ce n'est vraiment pas l'idée.
01:24:04 Je crois que là-dessus, on a différentes appréciations,
01:24:06 mais j'ai servi pendant 36 ans en gendarmerie,
01:24:08 je n'ai jamais vu ce type de comportement,
01:24:10 bien au contraire.
01:24:12 – Merci Philippe Chelous,
01:24:16 je vous libère par l'occasion.
01:24:18 C'est le rappel des titres Isabelle Piboulot.
01:24:20 Et on s'intéresse ensuite
01:24:22 à cette contre-histoire
01:24:24 de la colonisation française
01:24:26 signée par Dries Ghali.
01:24:28 [Générique]
01:24:30 À l'issue du sommet du G7 au Japon,
01:24:32 Emmanuel Macron s'est rendu en Mongolie
01:24:34 où il a promu un partenariat
01:24:36 axé sur l'énergie.
01:24:38 Une première pour un président français,
01:24:40 une visite symbolique dans ce pays
01:24:42 enclavé entre la Chine et la Russie.
01:24:44 Emmanuel Macron a partagé
01:24:46 à son homologue mongol sa détermination
01:24:48 à soutenir l'Ukraine.
01:24:50 La France multiplie les efforts pour parler
01:24:52 aux pays qui n'ont pas clairement condamné
01:24:54 l'invasion russe.
01:24:56 Elisabeth Borne présidera demain
01:24:58 une réunion de travail du Conseil national
01:25:00 de la transition écologique.
01:25:02 La première ministre dévoilera son plan d'action
01:25:04 secteur par secteur
01:25:06 pour accélérer la réduction des émissions
01:25:08 de gaz à effet de serre de la France.
01:25:10 Les efforts seront demandés tant aux particuliers
01:25:12 qu'aux gros pollueurs.
01:25:14 L'Hexagone entend atteindre
01:25:16 270 millions de tonnes équivalent CO2
01:25:18 en 2030.
01:25:20 Joe Biden et le chef républicain
01:25:22 Kevin McCarthy se rencontreront
01:25:24 demain afin de poursuivre leurs
01:25:26 négociations sur le plafond de la
01:25:28 dette américaine. Washington ne peut
01:25:30 pas continuer à dépenser l'argent
01:25:32 que nous n'avons pas, a déclaré Kevin McCarthy.
01:25:34 Il ne reste que 10 jours
01:25:36 aux deux parties pour trouver
01:25:38 un accord et permettre à l'Amérique
01:25:40 de continuer à payer ses factures.
01:25:42 Dries Gallie, vous venez de publier une
01:25:48 autre histoire de la colonisation française,
01:25:50 un livre politique, salué
01:25:52 en tant que tel par l'historien Marcel Gaucher
01:25:54 qui vise, je cite
01:25:56 Marcel Gaucher, à permettre aux citoyens
01:25:58 de se former un jugement éclairé
01:26:00 sur une question contentieuse
01:26:02 entre toutes et embrouillée
01:26:04 à souhait par des partis pris passionnels.
01:26:06 Alors face à vous, il y a un autre
01:26:08 historien, c'est Gilles Manseron, à qui
01:26:10 l'on doit de nombreux livres sur la colonisation
01:26:12 dont Marianne et les colonies,
01:26:14 une introduction à l'histoire
01:26:16 coloniale en France.
01:26:18 Alors en quoi votre livre, à vous, est-il
01:26:20 une contre-histoire de la colonisation ?
01:26:22 Parce que tout en n'éludant aucune question,
01:26:24 il montre une ambivalence
01:26:26 de la...
01:26:28 Non, tout n'était pas noir.
01:26:30 Et quand on compare
01:26:34 avec ce qui se passait avant
01:26:36 l'arrivée des Français, en plus, vous dites
01:26:38 que c'est presque quand même un progrès.
01:26:40 Disons que mon livre
01:26:42 apporte une
01:26:44 vision qui n'est pas du tout
01:26:46 dans le jugement. Je ne me mets pas
01:26:48 à la plus haut que Lyotté,
01:26:50 que la Troisième République, ni plus bas.
01:26:52 Je ne veux pas juger les gens du FLN
01:26:54 qui ont massacré des Français pour
01:26:56 libérer leur pays. J'essaie de comprendre
01:26:58 les passions des hommes qui ont
01:27:00 expliqué cette histoire,
01:27:02 cette idée complètement tordue
01:27:04 qu'était la colonisation.
01:27:06 Oui, pour vous, c'est une idée tordue au départ,
01:27:08 la colonisation, et d'ailleurs l'invasion
01:27:10 de l'Algérie en 1930
01:27:12 n'obéissait à aucun plan,
01:27:14 aucune doctrine.
01:27:16 On a répondu, dites-vous, à une tentation.
01:27:18 C'était facile,
01:27:20 on l'a fait,
01:27:22 ce n'était pas réfléchi. C'est seulement après
01:27:24 la perte de l'Alsace-Lorraine, en fait,
01:27:26 que là, tout à coup, sous la Troisième République,
01:27:28 on va
01:27:30 en faire une doctrine. Et d'ailleurs,
01:27:32 l'Empire colonial français va considérablement
01:27:34 s'agrandir à ce moment-là
01:27:36 au Maghreb,
01:27:38 en Afrique et en Indochine.
01:27:40 Mais pour vous,
01:27:42 on n'en avait pas les moyens,
01:27:44 ni humains, ni financiers.
01:27:46 D'où l'idée tordue.
01:27:48 L'idée tordue, bien sûr, parce que la France
01:27:50 a, en quelques années, englouti
01:27:52 des millions de kilomètres carrés, 50 millions d'habitants,
01:27:54 elle n'avait aucune doctrine,
01:27:56 elle ne savait pas quoi faire. Comment les gérer ?
01:27:58 Est-ce qu'il fallait les gérer selon la loi française,
01:28:00 selon la charia, selon
01:28:02 les lois indochinoises, anamites,
01:28:04 comme on disait à l'époque ? Est-ce qu'il fallait leur enseigner le français ?
01:28:06 Est-ce qu'il fallait les soigner ou pas ?
01:28:08 Est-ce qu'il fallait leur donner des papiers français ou pas ?
01:28:10 Comment leur emmener l'eau,
01:28:12 l'électricité ? Est-ce qu'il faut les vacciner ?
01:28:14 Tout ça, ces questions n'ont même pas été posées.
01:28:16 On a répondu à une pulsion,
01:28:18 à plusieurs pulsions,
01:28:20 deux principales.
01:28:22 La douleur de la perte de l'Azaz lorraine a fait que
01:28:24 la Troisième République devait faire quelque chose,
01:28:26 parce qu'elle est née de la perte de l'Azaz lorraine,
01:28:28 c'est un régime qui est né d'un avortement,
01:28:30 c'est terrible, c'est un crime originel.
01:28:32 Et donc, traumatisés par les Prussiens,
01:28:34 nous sommes partis traumatiser les Africains,
01:28:36 les Maghrébins, les Indochinois,
01:28:38 et pour montrer le génie français.
01:28:40 Parce que le français était réduit,
01:28:42 humilié aux yeux des seuls
01:28:44 êtres humains qui comptaient à l'époque.
01:28:46 On est au XIXe siècle, les seuls êtres humains
01:28:48 qui comptaient à l'époque, ils étaient entre Moscou et San Francisco.
01:28:50 Le reste du monde,
01:28:52 c'était des arriérés. Et donc la France
01:28:54 était humiliée auprès des Anglais,
01:28:56 des Prussiens, des Américains, des Russes.
01:28:58 Donc elle a montré, en refaisant
01:29:00 Marrakech, en conquérant
01:29:02 Bamako, Madagascar,
01:29:04 elle a montré son génie. Et la deuxième
01:29:06 pulsion à laquelle la Troisième République a répondu brillamment,
01:29:08 d'un point de vue tactique, réconcilier
01:29:10 les Français. Parce que la France était au bord de la guerre civile,
01:29:12 vous aviez les monarchistes, qui étaient très nombreux,
01:29:14 peut-être la majorité, vous aviez les républicains,
01:29:16 ils ne s'aimaient pas, vous aviez les problèmes
01:29:18 religieux, on est en avant 1905,
01:29:20 et on a dit à tout le monde,
01:29:22 allez aux colonies, et vous allez oublier
01:29:24 les querelles françaises.
01:29:26 Très peu y sont allés.
01:29:28 Mais juste, important, parce que c'est important
01:29:30 dans votre livre, et je donnerai la parole
01:29:32 à Agile Monseron,
01:29:34 vous dites qu'en fait, on oublie toujours
01:29:36 ce qu'il y avait avant,
01:29:38 que la France colonise, aussi bien
01:29:40 au Maghreb, en Afrique, ou en Indochine,
01:29:42 et avant, c'était vraiment
01:29:44 pas jojo. Et donc,
01:29:46 en ce sens, à vos yeux, ça a consisté,
01:29:48 ça a constitué
01:29:50 une forme de progrès.
01:29:52 De toute façon, on ne peut pas...
01:29:54 Il est évident
01:29:56 que la France n'a nulle part interrompu
01:29:58 un jardin de l'Éden, ou un paradis,
01:30:00 ou une grande civilisation dans sa floraison.
01:30:02 Tous les pays étaient
01:30:04 des pays problématiques. D'ailleurs, s'ils ont été
01:30:06 conquis, c'est parce qu'ils étaient faibles
01:30:08 et divisés, très divisés. L'Algérie,
01:30:10 très divisée entre les Berbères et les Arabes,
01:30:12 les tribus arabes. Le Maroc, c'était
01:30:14 extrêmement divisé. L'Indochine,
01:30:16 entre les Combojiens, les Khmers, qui n'aimaient pas
01:30:18 les Vietnamiens, les Anamites, comme on disait à l'époque,
01:30:20 et vous aviez une insécurité
01:30:22 incroyable dans toute l'Afrique.
01:30:24 Au Maroc, c'était un coup de gorge,
01:30:26 toute l'Afrique du Nord. L'Indochine, c'était pas joli.
01:30:28 Vous aviez les pirates chinois
01:30:30 qui rasiaient les paysans
01:30:32 indochinois. Et le droit
01:30:34 des femmes. Il n'y avait pas de droit des femmes.
01:30:36 La colonisation,
01:30:38 avec tout, moi je dis dans le livre que c'est un crime,
01:30:40 avec tout son aspect négatif,
01:30:42 a libéré les femmes.
01:30:44 Les femmes musulmanes, les femmes...
01:30:46 - Vous dites plus que ça a apporté la sécurité,
01:30:48 que ça a apporté... - Les troupes n'étaient pas sûres.
01:30:50 Je vous donne un exemple. Le sultan
01:30:52 du Maroc, on parle pas de n'importe qui,
01:30:54 en 1912, durant une grande
01:30:56 bataille du 19e siècle, ne pouvait pas aller,
01:30:58 le sultan, de Marrakech à Fès.
01:31:00 Il pouvait pas. Il devait acheter le chemin.
01:31:02 Payer un péage aux pirates.
01:31:04 Ou faire un grand détour.
01:31:06 Imaginez le commerçant, petit paysan marocain.
01:31:08 Est-ce que nous étions dans des
01:31:10 régimes effondrés ?
01:31:12 Il y a des exceptions. Il y a des endroits
01:31:14 où la France a dérangé des processus qui étaient
01:31:16 de consolidation nationale, à Madagascar.
01:31:18 Un peu au Vietnam.
01:31:20 Mais partout, elle est rentrée dans des
01:31:22 terres malheureusement désolées. Et de toute façon,
01:31:24 si la...
01:31:26 Colonisation ou pas, tous ces
01:31:28 pays-là auraient eu un rendez-vous avec la
01:31:30 Révolution industrielle, avec la modernité.
01:31:32 Qui est un traumatisme. On n'a pas fait
01:31:34 le... - Mais qui serait arrivé plus tard.
01:31:36 - Qui serait arrivé plus tard. - Alors, quel est
01:31:38 votre avis à vous,
01:31:40 Gilles Manseron ? Est-ce que la France a donné
01:31:42 une unité territoriale et des frontières
01:31:44 claires à des peuples qui
01:31:46 n'en avaient pas et qui étaient en proie
01:31:48 aux guerres intestines,
01:31:50 aux sous-développements, à la misère ?
01:31:52 - Il est vrai qu'il ne faut pas
01:31:54 décrire dans la situation pré-coloniale
01:31:56 comme une sorte de jardin
01:31:58 d'Éden où tout se passait bien
01:32:00 avant d'être troublé par
01:32:02 l'entrée des colonisateurs.
01:32:04 Il y avait un certain nombre de problèmes
01:32:06 dans ces pays. Le livre
01:32:08 d'Eudrice Galli me semble intéressant
01:32:10 par ses réflexions sur
01:32:12 tel ou tel point de l'histoire
01:32:14 coloniale française.
01:32:16 Et il y a des remarques, des
01:32:18 réflexions intéressantes.
01:32:20 Je suis un peu
01:32:22 intrigué par
01:32:24 l'idée de contre-histoire.
01:32:26 Parce que
01:32:28 votre livre serait
01:32:30 dirigé contre quelle forme
01:32:32 d'histoire officielle ?
01:32:34 À certains moments
01:32:36 du livre, on dit "c'est l'éloge
01:32:38 des bienfaits de la colonisation
01:32:40 que vous voulez combattre",
01:32:42 en montrant qu'elle a été criminelle
01:32:44 dans bien des cas. Donc,
01:32:46 je ne sais pas contre quoi
01:32:48 il a dirigé. Est-ce que vous avez vraiment
01:32:50 l'impression qu'il y a une histoire officielle
01:32:52 aujourd'hui ? Ce que dit aussi Marcel Gaucher.
01:32:54 Je le citais parce que
01:32:56 c'est lui qui m'a donné envie de lire votre livre.
01:32:58 Et c'est vrai que lui a l'air
01:33:00 de dire qu'il y a des partis pris
01:33:02 professionnels pour et contre
01:33:04 d'ailleurs la colonisation.
01:33:06 Moi, je fais une contre-histoire contre deux histoires.
01:33:08 Une hégémonique qui est l'histoire écrite
01:33:10 par la gauche. La gauche récente, parce que la gauche
01:33:12 a été coloniale jusqu'aux années
01:33:14 56, 57, 58, 59.
01:33:16 Mitterrand était mis de l'intérieur
01:33:18 en Algérie pendant qu'on torturait. - Et Guy Melet,
01:33:20 le président du conseil, était socialiste.
01:33:22 - Voilà. Donc, l'histoire de la...
01:33:24 Moi, j'ai écrit une contre-histoire
01:33:26 contre cette histoire-là, de cette gauche-là
01:33:28 qui vise...
01:33:30 qui finit par
01:33:32 dégoûter les Français d'eux-mêmes.
01:33:34 De dire "nous sommes tous des descendants de génocidaires,
01:33:36 d'esclavagistes, nous avons fait ceci, cela,
01:33:38 la torture en Algérie, tout ça".
01:33:40 Et cette histoire-là empoisonne les relations entre les communautés
01:33:42 en France. Ce qu'on ne peut pas faire, le vivre ensemble,
01:33:44 comme moi j'appelle de mes voeux, si ton
01:33:46 grand-père a tué ma grand-mère
01:33:48 ou m'a volé mon truc. Non. On est
01:33:50 entre frères, de toutes les races, de toutes les
01:33:52 confessions. La France est déjà un pays multi...
01:33:54 confessionnel,
01:33:56 multiracial. On a intérêt à ne pas
01:33:58 mettre de l'huile sur le feu.
01:34:00 Et je fais aussi,
01:34:02 j'ai fait une contre-histoire,
01:34:04 contre les illusions lyriques de la droite, qui nous
01:34:06 dit "10 000 km de chemin
01:34:08 de fer en Algérie, 5 000 hôpitaux".
01:34:10 Mais ça, je dis, ça n'a pas été
01:34:12 suffisant. C'est bien, il ne faut pas cracher,
01:34:14 il ne faut pas être ingrat. Oui, ça c'est important parce que vous dites
01:34:16 "la colonisation n'a
01:34:18 pas enrichi la France". Non. Mais
01:34:20 on a délapidé
01:34:22 les données publiques, les ressources
01:34:24 humaines, ça a été un gouffre économique,
01:34:26 des entreprises et des individus,
01:34:28 aussi bien français qu'indigènes,
01:34:30 en ont profité, mais pas la France.
01:34:32 On n'y a rien gagné sur le plan collectif.
01:34:34 Mais en même temps,
01:34:36 ça n'a absolument pas profité,
01:34:38 enfin, sur le plan économique,
01:34:40 ça n'a pas profité à la plupart
01:34:42 des habitants de
01:34:44 ces colonies. Tout à fait. Nous avons
01:34:46 livré des pays au tiers-monde en 1960,
01:34:48 1962, à la Libération, nous avons livré des économies
01:34:50 extrêmement sous-développées.
01:34:52 Nous avons livré
01:34:54 des habitants, des civils qui étaient
01:34:56 largement largués par la
01:34:58 France, par les dispensaires. Le taux
01:35:00 de scolarité était très bas. Même en Algérie,
01:35:02 on a mis le paquet, à cause ou grâce
01:35:04 à la guerre civile. Vous aviez
01:35:06 des taux de vaccination qui étaient très bas.
01:35:08 Et puis... - Mais pourtant,
01:35:10 vous dites aussi que c'est aussi la France
01:35:12 qui a apporté les vaccins,
01:35:14 qui a permis de guérir, en partie, du
01:35:16 paludisme, de la lèpre, de
01:35:18 la peste, de... - Tout à fait.
01:35:20 Et c'est là aussi que je fais une contre-histoire.
01:35:22 Parce que je fais une contre-histoire des dogmatismes
01:35:24 et des idées abstraites.
01:35:26 Parce que c'est très facile de dire "la France
01:35:28 n'a pas assez investi dans ses colonies". C'est vrai.
01:35:30 Mais la France, c'est Paris, c'est
01:35:32 les ministères. Mais ce ne sont
01:35:34 pas les Français. Vous avez des médecins
01:35:36 comme Dumas, comme Girard-Aerobic,
01:35:38 comme Marchoux, qui ont
01:35:40 sacrifié leur carrière pour soigner les Africains.
01:35:42 Ils voulaient faire les colonnes mobiles
01:35:44 pour aller chercher les Africains
01:35:46 dans la brousse pour les soigner.
01:35:48 Et là, la hiérarchie a dit "mais attendez,
01:35:50 attendez qu'ils viennent nous dispenser". Ils l'ont dit,
01:35:52 ils vont mourir. Ces gens-là ont sacrifié leur carrière.
01:35:54 Ils ont soigné des millions de gens, finalement.
01:35:56 Et ça, c'est aussi la colonisation.
01:35:58 Vous avez des enseignants,
01:36:00 laïcs ou protestants ou catholiques,
01:36:02 qui ont été égorgés.
01:36:04 Qui ont été égorgés par le
01:36:06 FLN ou par le
01:36:08 Vietmine et tout ça.
01:36:10 Et qui n'étaient pas obligés d'aller soigner
01:36:12 moi, ma propre famille. Que ce soit mon
01:36:14 père ou ma mère, ont été éduqués.
01:36:16 Soit par des sœurs catholiques
01:36:18 à Théza au Maroc ou par des aviateurs français
01:36:20 qui n'étaient pas du tout obligés de faire ça.
01:36:22 Ils faisaient ça par bénévolat,
01:36:24 on va dire. Donc,
01:36:26 une contre-histoire, c'est aussi ça.
01:36:28 Ne soyons pas... Parce que nous sommes dans une génération
01:36:30 du confort. Nous aimons le blanc et le noir.
01:36:32 La vie n'est pas ça. Il ne faut pas trancher
01:36:34 comme ça et dire "tout le monde était..."
01:36:36 - Il faut faire la vérité quand même.
01:36:38 Il faut dire les choses.
01:36:40 Et dans certains chapitres de votre livre, vous parlez
01:36:42 des crimes. Vous parlez
01:36:44 de cette idée tordue, où la
01:36:46 République s'est fourvoyée.
01:36:48 La France, c'est d'abord la
01:36:50 France monarchique, puisque c'est elle
01:36:52 qui a conquis
01:36:54 l'Algérie en 1830.
01:36:56 Et qui, pendant les siècles
01:37:00 précédents, avait pratiqué
01:37:02 l'esclavage sur une grande échelle
01:37:04 dans l'océan Atlantique,
01:37:06 notamment.
01:37:08 Mais
01:37:10 ce fait, et il est contradictoire
01:37:12 avec les idées de la République,
01:37:14 avec l'égalité des hommes,
01:37:16 puisque définir que
01:37:18 dans un tel ou tel
01:37:20 territoire, il y ait deux catégories
01:37:22 de personnes, les citoyens
01:37:24 et ceux qui sont des sous-citoyens,
01:37:26 les indigènes,
01:37:28 c'est contradictoire avec les idées
01:37:30 des droits de l'homme et de la République.
01:37:32 Et ça, il faut...
01:37:34 Il me semble que le travail à faire
01:37:36 de la part de nos sociétés,
01:37:38 c'est pas pour se battre la coulpe
01:37:40 ad vitam aeternam, il y a plein
01:37:42 d'autres pages glorieuses dans l'histoire
01:37:44 française, dont on peut être
01:37:46 légitimement fier. Mais il y a des pages
01:37:48 qui sont sombres. Et
01:37:50 la page coloniale, me semble,
01:37:52 devoir être examinée,
01:37:54 voire, on doit
01:37:56 constater la contradiction avec les idées
01:37:58 de la République. - Attention, nous faisons
01:38:00 un zoom
01:38:02 sur la colonisation. La colonisation
01:38:04 n'était pas censée durer 70 ans ou
01:38:06 100 ans. A part l'Algérie, la colonisation
01:38:08 a duré 50 ans, à peu près, dans les pays.
01:38:10 Maroc, 44 ans. Et encore, dedans, il y avait deux
01:38:12 guerres mondiales. Il y a eu
01:38:14 une phase... - Elle espérait d'y aller plus longtemps que ça.
01:38:16 - Bien sûr, bien sûr.
01:38:18 Et la colonisation a complètement changé
01:38:20 après 1945. Moi, je ne défends pas la colonisation, je dis que
01:38:22 c'est un crime. Mais je dis que la phase
01:38:24 sombre, horrible de la colonisation,
01:38:26 c'est, grosso modo, pour aller très vite,
01:38:28 1900-1945.
01:38:30 Là, il y avait un apartheid colonial, je le dis dans le livre.
01:38:32 On séparait les gens par la...
01:38:34 - La France, pardon de vous interrompre,
01:38:36 en Indochine, par rapport
01:38:38 à la proclamation du Vietnam par
01:38:40 Ho Chi Minh, et en Algérie,
01:38:42 par rapport aux différentes tentatives
01:38:44 de négociation et de
01:38:46 recherche d'une solution politique,
01:38:48 certains, comme Ferhat Abbas, par
01:38:50 exemple, étaient désireux
01:38:52 de trouver des solutions politiques. Eh bien,
01:38:54 on n'a pas vu qu'il y avait ce
01:38:56 processus mondial d'émancipation
01:38:58 après 1945.
01:39:00 - Il a commencé avant 1945,
01:39:02 mais de 1939 à 1945,
01:39:04 l'homme blanc a été tellement
01:39:06 dévalorisé par le nazisme,
01:39:08 tellement humilié que les indigènes,
01:39:10 ils ont dit "c'est notre
01:39:12 tour maintenant de nous libérer, ils ne méritent pas
01:39:14 de nous gouverner". Après 1945, je voudrais
01:39:16 dire deux choses. Après 1945, la France a changé
01:39:18 complètement de fusil d'épaule et elle a commencé à
01:39:20 occuper des colonies. Il y a eu des
01:39:22 gros investissements d'éducation. Tout ce qu'elle n'a pas fait
01:39:24 avant, elle a essayé de le faire après 1945.
01:39:26 Manque de bol pour les colonies et la population
01:39:28 avait beaucoup augmenté, parce que malgré
01:39:30 l'apartheid, la population a été quand même
01:39:32 soignée. Il y a quand même des évolutions.
01:39:34 Sinon, la population aurait baissé.
01:39:36 Et donc, c'est devenu vite un trou
01:39:38 financier, un gouffre financier. - Comme l'éducation,
01:39:40 d'ailleurs. Vous expliquez aussi que
01:39:42 si la France avait voulu éduquer
01:39:44 tous les enfants des
01:39:46 peuples colonisés,
01:39:48 c'était un joie, mais il n'y aurait même pas eu assez de profs.
01:39:50 - C'est là que je voudrais
01:39:52 vraiment... C'est l'aspect contre-histoire.
01:39:54 Malgré l'apartheid, je dis bien,
01:39:56 j'assume le mot "apartheid". Mon père ne pouvait pas
01:39:58 aller au cinéma à Rabat, parce qu'il était musulman.
01:40:00 C'est un apartheid. Il y a eu
01:40:02 quand même des
01:40:04 millions d'indigènes qui ont voulu
01:40:06 que la colonisation se poursuive. Pas
01:40:08 avec l'apartheid, mais ils ont vu dans
01:40:10 les FN, même dans les indépendantistes marocains,
01:40:12 même dans le parti des Circles, une menace.
01:40:14 - Mais vous dites aussi que la France
01:40:16 n'a pas su utiliser justement les amis
01:40:18 de la France. - Tout à fait.
01:40:20 La colonisation, elle s'est
01:40:22 bureaucratisée. On a eu des petits fonctionnaires.
01:40:24 On a eu Lyothé au début, c'était un demi-dieu,
01:40:26 un vice-roi.
01:40:28 Lui, il savait gérer. À un moment donné, on a
01:40:30 bureaucratisé. C'est des gens qui ont peur pour leur carrière.
01:40:32 Donc, dès qu'il voit un monsieur
01:40:34 intelligent comme Fahad Abbas, ou même
01:40:36 certains vietnamiens qui voulaient juste... Ou même
01:40:38 au Fouette-Boigny. Fouette-Boigny, ce n'était pas du tout un révolutionnaire.
01:40:40 Qui voulait juste l'égalité.
01:40:42 On les a mis en taule.
01:40:44 Résultat, on a sorti les Fous.
01:40:46 Les Fous, le FLN. Les tueurs.
01:40:48 Et ils avaient raison, entre guillemets,
01:40:50 parce qu'ils avaient... - Je ne les qualifierais pas
01:40:52 ainsi. C'est eux qui ont
01:40:54 su rassembler
01:40:56 la nation algérienne.
01:40:58 - Par la terreur. - Et voir...
01:41:00 Et voir la
01:41:02 constituer même. Puisqu'elle
01:41:04 n'était pas véritablement
01:41:06 consciente d'elle-même en
01:41:08 1954. C'est une petite acoprie. - C'est l'émirat de Kader qui a fait
01:41:10 d'Algérie. On n'est pas d'accord.
01:41:12 - Je trouve que... - Juste,
01:41:14 dernier point.
01:41:16 Vous soulignez le fait qu'au fond, la décolonisation
01:41:18 s'est passée beaucoup moins
01:41:20 douloureusement qu'on ne le croit aujourd'hui.
01:41:22 Parce que, évidemment, on a
01:41:24 le souvenir aujourd'hui de l'Indochine, de la guerre
01:41:26 et de l'Algérie. Une autre guerre.
01:41:28 Mais au fond, il y a toutes les autres
01:41:30 colonies qui se sont détachées
01:41:32 de la France de façon paisible
01:41:34 et sans ressentiment.
01:41:36 - Relativement paisible. Il y a
01:41:38 deux grosses catastrophes qui sont
01:41:40 réelles et qui nous obscurcient.
01:41:42 C'est l'Indochine, catastrophe réelle, une guerre civile
01:41:44 terrible. Avec ses harkis,
01:41:46 nous avons abandonné les Indochinois qui ont travaillé avec la France.
01:41:48 Plus tard, en Algérie, catastrophe terrible.
01:41:50 Le Cameroun, c'était également très difficile.
01:41:52 Mais ailleurs, on est presque dans l'ordre
01:41:54 de la formalité. L'Afrique du Nord... - Il y a eu des combats en Tunisie.
01:41:56 - C'est sûr. - Il y en a eu au Maroc.
01:41:58 - Et très peu. - Entre 1953
01:42:00 et 1956. Une situation
01:42:02 très tendue au Maroc. - Très tendue.
01:42:04 Mais c'est la France qui s'est plus retirée. Parce que le
01:42:06 Glawis du Maroc... - Oui. Qui a fabriqué une indépendance
01:42:08 qui a posé problème
01:42:10 dans la manière dont les
01:42:12 États ont émergé
01:42:14 postérieurement à l'indépendance.
01:42:16 - Mais nous avons, la France a laissé
01:42:18 Hassan II, à Mohamed V Hassan II,
01:42:20 un Maroc gouvernable. Les grands-parents
01:42:22 de Hassan II, ils étaient en train...
01:42:24 Ils allaient être exilés. Si Lyoté...
01:42:26 Enfin, c'était pas Lyoté, c'était un autre...
01:42:28 n'avait pas sauvé le Sultan en 1912,
01:42:30 il n'y aurait plus de monarchie au Maroc.
01:42:32 Il n'y aurait plus de monarchie au Maroc. La Tunisie,
01:42:34 c'était en faillite. - La France s'est
01:42:36 opposée à l'indépendance du
01:42:38 Maroc jusqu'en 1956.
01:42:40 - En fait, elle a... - Elle s'est ralliée
01:42:42 à cette idée-là au dernier moment
01:42:44 pour garder l'Algérie
01:42:46 et en accordant à la Tunisie et au Maroc
01:42:48 leur indépendance en mars 1956.
01:42:50 - Oui, mais ce que la France
01:42:52 a fait contrairement aux Turcs, on va pas faire
01:42:54 ici du Turc bashing, mais contrairement à d'autres...
01:42:56 Aux Anglais, en Inde et au Pakistan,
01:42:58 l'indépendance a coûté un million de morts parce que
01:43:00 les Anglais sont partis comme ça. Ciao, au revoir,
01:43:02 goodbye. La France,
01:43:04 elle est restée... Elle a transmis
01:43:06 le flambeau au Maroc. Elle a laissé les coopérants.
01:43:08 Elle a dit "OK, je ne fais pas
01:43:10 partir les professeurs". Ça, c'est la générosité.
01:43:12 "Je ne fais pas partir les infirmiers
01:43:14 parce que vous n'avez personne." - Parce qu'elle a voulu garder
01:43:16 une certaine forme de contrôle sur ce pays.
01:43:18 - Heureusement qu'à l'époque,
01:43:20 les dirigeants de la France aimaient encore ce pays,
01:43:22 défendaient ses intérêts. Pas comme aujourd'hui.
01:43:24 Tant mieux. Tant mieux, mais
01:43:26 c'est un cadeau qui a été fait.
01:43:28 Même l'Algérie où les pieds noirs ont été jetés
01:43:30 à la mer quasiment, même en Algérie,
01:43:32 il y a eu les pieds rouges. Il y a eu des Français
01:43:34 de gauche qui sont partis enseigner en Algérie.
01:43:36 Moi, je les applaudis. C'est ça, la fraternité entre les peuples.
01:43:38 Bien sûr qu'il y a des intérêts. Tant mieux.
01:43:40 On nous dit la France-Afrique.
01:43:42 Mais il n'y aurait pas eu la France-Afrique. Qu'est-ce qu'il y aurait eu ?
01:43:44 Il n'y avait rien. La France n'avait pas
01:43:46 préparé les médecins, les infirmiers.
01:43:48 Il y avait peut-être quelques médecins
01:43:50 sur des territoires comme l'Aproprie-Écoeur.
01:43:52 - C'est là le problème fondamental. - Bien sûr. Mais je suis d'accord
01:43:54 et je le dénonce. Tout à fait.
01:43:56 Aujourd'hui, parce que ça, c'est quelque chose
01:43:58 qui vous importe beaucoup, je l'ai dit, c'est un livre politique.
01:44:00 Vous n'êtes pas historien,
01:44:02 c'est un livre politique, même si vous faites
01:44:04 un travail d'historien là-dedans.
01:44:06 Aujourd'hui, la repentance
01:44:08 d'un côté, le ressentiment
01:44:10 de l'autre, vous,
01:44:12 vous voyez ça comme un problème ?
01:44:14 Bien sûr, c'est un problème
01:44:16 à plusieurs titres, parce que moi,
01:44:18 je ne crois pas à la culpabilité
01:44:20 héréditaire. Donc moi, je ne vois
01:44:22 pas en vous un coupable
01:44:24 de m'avoir colonisé. Je ne crois
01:44:26 pas à la punition collective, donc je ne vois pas ici
01:44:28 des coupables collectivement d'un crime
01:44:30 qui a eu lieu. Le crime a eu lieu. Et puis, je crois
01:44:32 aussi à
01:44:34 la responsabilité de l'individu.
01:44:36 Nous vivons dans le présent.
01:44:38 Les gens qui veulent nous faire de la repentance,
01:44:40 ils veulent nous enfermer dans le passé.
01:44:42 - Est-ce que vous ne croyez pas que le concept
01:44:44 et le terme de repentance
01:44:46 est un mot inventé pour dénigrer
01:44:48 un travail de vérité
01:44:50 sur la colonisation ? - Il faut le faire, mais il faut...
01:44:52 - Parce que moi, je ne demande
01:44:54 absolument pas la repentance.
01:44:56 Et parmi les historiens qui travaillent
01:44:58 sur la colonisation et qui établissent
01:45:00 les choses par rapport aux crimes
01:45:02 qui ont été commis, aux phénomènes discriminatoires,
01:45:04 de domination,
01:45:06 aux injustices,
01:45:08 ils ne revendiquent pas du tout la repentance.
01:45:10 C'est un mot repoussoir
01:45:12 inventé par des gens qui ne veulent pas ce travail
01:45:14 de vérité, à mon avis.
01:45:16 - Il y a aujourd'hui des forces poétiques en France
01:45:18 qui font carrière sur la repentance
01:45:20 en rabaissant le français
01:45:22 et en disant aux français d'origine immigrée
01:45:24 "de toute façon, tu ne peux pas être l'ami
01:45:26 de Jacques ou Jean-Pierre parce que son grand-père
01:45:28 a appris l'algérien". - Moi, je n'en ai pas
01:45:30 véritablement rencontré.
01:45:32 Je pense que la repentance...
01:45:34 - Vous avez tout le spectre de l'extrême gauche.
01:45:36 Monsieur Macron, le président
01:45:38 des Français, il se rend en Afrique, il dit
01:45:40 "on a fait un crime contre l'humanité".
01:45:42 - C'est ce que vous écrivez dans votre livre
01:45:44 que la colonisation était criminelle.
01:45:46 Là, vous êtes dans le paradoxe et dans la...
01:45:48 - Non, je ne suis pas dans le paradoxe.
01:45:50 Moi, je dis qu'elle a été criminelle, mais elle a eu
01:45:52 des bienfaits et des acquis.
01:45:54 - Elle a eu des conséquences diverses.
01:45:56 - Certains sont positifs. C'est un phénomène humain.
01:45:58 Monsieur Macron ne le dit pas.
01:46:00 Monsieur Macron, il doit le dire.
01:46:02 - Le fait que les Français ont aboli l'esclavage...
01:46:04 - Notamment, ils ont libéré les Juifs d'Algérie.
01:46:06 Les Juifs du Maroc, dans quoi ils vivaient ?
01:46:08 Ils vivaient au ghetto. Heureusement que la France est venue
01:46:10 pour les sortir. Les Juifs de Tunisie,
01:46:12 les esclaves africains, noirs,
01:46:14 esclaves des noirs, qui les a libérés à la France ?
01:46:16 Ça a donné les goumiers. Pourquoi les gens se font...
01:46:18 - Il ne faut pas reprendre tous les clichés
01:46:20 de la propagande coloniale.
01:46:22 - C'est une réalité.
01:46:24 - Non, mais la colonisation, moi,
01:46:26 ce qu'a dit Macron avant d'être élu,
01:46:28 après, il a un peu oublié
01:46:30 que c'était un criminel, la colonisation.
01:46:32 - C'était un crime contre l'humanité.
01:46:34 - C'est pas la même chose.
01:46:36 - C'est plus grave.
01:46:38 - L'appellation est fondée...
01:46:40 - Et le crime pratiqué sur les harkis, les pieds noirs,
01:46:42 c'est pas un crime ? Pourquoi ne pas le reconnaître ?
01:46:44 - On a tué des bébés en Algérie.
01:46:46 - Les pieds noirs, c'est une population européenne d'Algérie.
01:46:48 - Des êtres humains.
01:46:50 - C'est une particularité.
01:46:52 Et ce qui s'est produit en Algérie
01:46:54 avait la particularité
01:46:56 de ne pas connaître
01:46:58 au sein de la communauté européenne
01:47:00 un phénomène comparable
01:47:02 à ce qui se passera ensuite en Afrique du Sud,
01:47:04 par exemple, avec Édouard Leclerc,
01:47:06 qui va dire
01:47:08 "Allons-y, faisons..."
01:47:10 - C'est Frédéric Leclerc, pas Édouard.
01:47:12 - C'est... Pardon.
01:47:14 Oui, pardon. Frédéric Leclerc.
01:47:16 - Oui.
01:47:18 En l'occurrence, c'est Nelson Mandela.
01:47:20 Vous parlez de la réconciliation.
01:47:22 - Alors que parmi les pieds noirs,
01:47:24 il y a eu une espèce d'aveuglement...
01:47:26 - Bien sûr.
01:47:28 - Est-ce qu'il méritait d'être torturé ?
01:47:30 - Je suis obligé de vous interrompre
01:47:32 parce que l'émission est terminée.
01:47:34 Mais on voit bien que c'est toujours un sujet passionnant.
01:47:36 Et c'est ce qui rend
01:47:38 votre livre très intéressant.
01:47:40 Merci à tous les quatre d'avoir participé à cette émission.
01:47:42 Merci de nous avoir suivis.
01:47:44 Rendez-vous la semaine prochaine
01:47:46 pour un nouveau numéro
01:47:48 "David Histore du soir",
01:47:50 samedi prochain, 22h. Bonne nuit.
01:47:52 Merci.