Face à l'Info Été (Émission du 17/08/2023)

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Tous les soirs et pendant tout l'été, les chroniqueurs de #FacealinfoEte débattent de l'actualité du jour de 19h à 20h

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00:00 Bonsoir à toutes et à tous, soyez les bienvenus dans "Face à l'info été".
00:04 Il est 19h, l'heure de faire le point sur les principales informations avec notre journaliste
00:08 Mickaël Dos Santos.
00:09 Bonsoir Mickaël.
00:10 Bonsoir Célia, bonsoir à tous.
00:12 Manifestation en cours à Ajaccio.
00:14 Habitants, associations et mouvements nationalistes sont réunis pour s'opposer aux dealers et
00:19 aux zones de non-droit.
00:20 Ce week-end, deux d'entre eux ont menacé de mort deux agents de propreté de la ville
00:24 qui effectuaient leur tournée dans le quartier des Cannes.
00:28 À Nice, cette fois-ci, des habitants sont également désespérés face aux dealers.
00:33 Insultes, menaces, dégradations, fouilles.
00:35 Des résidents d'un immeuble HLM vivent un calvaire depuis maintenant plusieurs années.
00:39 Aujourd'hui, ils dénoncent ces agissements à travers un collectif et réclament de l'aide
00:43 pour pouvoir vivre sereinement.
00:44 Pour le moment, le bailleur social n'a pas donné de réponse.
00:48 Enfin, dans moins de trois semaines a lieu la rentrée scolaire.
00:52 Premier constat, le prix des fournitures s'envole d'après la Confédération nationale des
00:57 familles.
00:58 Il faudra débourser jusqu'à 427 euros pour un lycéen, soit une hausse de 11,3 % par
01:03 rapport à 2022.
01:04 Les élèves de primaire sont principalement touchés par cette augmentation due à l'inflation.
01:09 Voilà pour ce journal.
01:12 Je vous laisse en compagnie de Célia Barotte et ses invités pour Face à l'info.
01:16 Merci beaucoup Michael et on se retrouve tout à l'heure pour d'autres informations.
01:20 À ma table pour ce Face à l'info été, Nathan Devers, écrivain.
01:25 Bonsoir.
01:26 Olivier Dartigolle, bonsoir.
01:27 Vous êtes chroniqueur politique.
01:29 Bonsoir.
01:30 Alexandre Devecchio, journaliste au Figaro.
01:33 Bonsoir.
01:34 Et Régis Le Saumier, directeur de la rédaction Omerta.
01:37 Messieurs, bonsoir.
01:38 Au sommaire de cette émission, la tribune publiée ce matin par Luc Ferry dans les
01:43 colonnes du Figaro.
01:44 Son titre est explicite.
01:46 La gauche c'est bien, la droite c'est mal.
01:48 Pour nous, Régis Le Saumier s'est penché dessus et nous donnera son analyse.
01:52 Il reviendra notamment sur le cas Edwy Plenel et ses déclarations.
01:55 Direction le 7ème art avec Alexandre Devecchio.
01:58 Nous reviendrons ensemble sur le phénomène Barbie et les différentes polémiques que
02:02 le film a suscité.
02:03 Dernière en date, son interdiction dans divers pays musulmans et notamment l'Algérie.
02:07 Nathan Devers, lui, s'est intéressé au rôle de la Chine sur la scène internationale.
02:12 Est-ce le nouveau pays médiateur de l'échiquier géopolitique mondial ? L'expertise de notre
02:16 écrivain à suivre.
02:17 Enfin, c'est en musique que nous terminerons cette émission.
02:20 Olivier Dartigolle va décrypter le phénomène Jean-Jacques Goldman que représente le chanteur
02:24 dans la société française.
02:25 Doit-il faire son grand retour ? Nous poserons la question à nos éditorialistes.
02:29 Un programme varié qui pourrait être interrompu par le discours du président de la République
02:33 Emmanuel Macron.
02:34 A borne les mimosas, mais on est ensemble jusque 20h face à l'Info-été.
02:38 C'est parti.
02:39 Avant de commencer cette émission, je tenais à exprimer toutes mes condoléances à la
02:58 famille de Gérard Leclerc.
02:59 Mes éditorialistes se joignent à moi pour ce message et notamment Nathan Devers avec
03:03 qui vous avez pu partager le plateau de L'Ordre des pros avec Gérard Leclerc plusieurs fois.
03:09 Oui, je voulais vraiment lui rendre hommage.
03:13 Malheureusement, je n'étais pas là ces derniers jours, mais en effet, j'ai eu la chance de
03:16 débattre avec lui tous les lundis dans L'Ordre des pros pendant près d'un an.
03:19 Et vraiment, ce que j'en retiens, c'est premièrement une forme de rareté.
03:23 C'est qu'il avait le courage absolu de la nuance.
03:26 Il y avait une chose qui l'émet par-dessus tout, c'était de naviguer entre les certitudes,
03:31 de ne pas être enfermé dans aucun dogmatisme, quel qu'il soit, de ne pas être dans une
03:34 chapelle.
03:35 Il avait une forme de liberté presque aristocratique, en tout cas de l'âme, qui le caractérisait.
03:40 Et la deuxième chose, aussi, je trouve très rare, même dans ces milieux-là, c'est une
03:44 bienveillance totale.
03:45 Totale en loge, totale en plateau, mais surtout même totale en loge, avec tout le monde,
03:50 une vraie curiosité, un vrai goût des autres.
03:52 Et j'ai été vraiment, comme tout le monde, je crois, extrêmement choqué et peiné d'apprendre
03:56 sa disparition.
03:57 Merci pour ce message.
03:58 Toutes nos pensées vont à sa famille.
03:59 Alors, la gauche, c'est bien, la droite, c'est mal.
04:02 Vous revenez, Régis Le Saumier, sur cette tribune, publiée ce matin par Luc Ferry,
04:07 dans les colonnes du Figaro.
04:08 Son titre est explicite, la gauche, c'est bien, la droite, c'est mal.
04:12 Qu'en pensez-vous ?
04:13 Alors oui, effectivement, il revient en fait, le contexte, il revient sur la polémique
04:16 qui a suivi la nomination de Geoffroy Lejeune à la tête du JDD.
04:20 Et il parle de deux poids, deux mesures, selon qu'on soit de gauche ou de droite en France,
04:25 vis-à-vis de l'intelligence.
04:26 Il dit qu'il y a un problème en fonction d'où on est de droite, où on est de gauche.
04:30 Et il y a une différence de traitement.
04:33 Alors, pour illustrer son propos, il prend l'exemple du passé d'Edwi Plenel.
04:38 Il rappelle que Edwi Plenel a été nommé à la tête du monde en 1996 et que ce passé
04:43 n'avait provoqué aucune mise en grève du journal et que la gauche bien pensante de
04:47 l'époque n'avait trouvé rien à y redire.
04:50 Mais d'où vient Edwi Plenel ?
04:51 Est-ce que vous venez rappeler un petit peu le contexte, les origines de ce personnage ?
04:55 Justement, ce passé en particulier.
04:56 Il nous livre une anecdote étonnante, oubliée de toute, mais quand même éloquente.
05:01 Chacun se souvient qu'en 1972, le groupe palestinien Septembre Noir avait pris en
05:06 otage des athlètes israéliens pendant les JO de Munich.
05:09 Une prise d'otage qui se soldera par la mort de 17 personnes, dont 11 athlètes.
05:14 Edwi Plenel, à l'époque, travaillait pour un journal qui s'appelait l'hebdomadaire
05:20 de la Ligue communiste révolutionnaire.
05:21 Il avait un pseudo qui était Joseph Krasny, Joseph le Rouge, dont précisément un hebdomadaire
05:27 qui s'appelait Rouge.
05:28 Le cadre étant posé, Edwi Plenel a déclaré que la fin tragique des athlètes a été
05:37 voulue et provoquée par les puissances impérialistes et tout particulièrement Israël.
05:42 Il écrivait à l'époque "Aucun révolutionnaire ne peut se désolidariser de Septembre Noir.
05:49 Nous devons défendre inconditionnellement les militants de cette organisation face à
05:55 la répression".
05:56 Alors évidemment, le temps a passé, il a reconnu lui-même que c'était l'opinion
06:00 générale de l'extrême gauche à l'époque.
06:02 Il s'est désolidarisé de ses propos, mais toujours Trotskis, il a continué à poursuivre
06:11 de sa vindique ses opposants, et on se souvient en particulier de l'atroce affaire Bodice.
06:16 En fait, tous ceux qui ne partagent pas ses opinions, ça c'est le typique du Trotskisme.
06:21 Mais qu'est-ce que ça veut dire ?
06:23 Ça veut dire qu'Edwi Plenel n'a pas eu de traitement accablant quand il est arrivé
06:30 à la tête du monde.
06:31 Personne n'a dit "Vous vous rendez compte de ce que vous avez dit à l'époque à propos
06:35 de ces athlètes, leur mort atroce etc."
06:37 Tout ça s'est passé aux oubliettes.
06:40 Et puis Luc Ferry rappelle qu'Edwi Plenel a qualifié récemment notre chaîne CNews
06:45 comme une chaîne de guerre civile.
06:47 Oui, voilà, encore une fois.
06:48 Parce que ça, un passé comme le sien devrait l'amener à davantage de modestie dans ses
06:53 jugements.
06:54 Or, il n'en est rien, parce que justement, Plenel est de gauche et le fond de la pensée
06:59 de gauche, c'est le bien.
07:00 Et là, Ferry nous rappelle la querelle entre deux intellectuels très intéressants qui
07:04 sont Raymond Haron et Alain Besançon au sujet des morts du nazisme et du stalinisme.
07:09 Alors, il nous explique que dans "Démocratie et totalitarisme", Haron fait en effet observer
07:14 que le communisme a pu séduire des braves gens par son projet d'émancipation, tandis
07:19 que le nazisme était d'entrée de jeu une ignominie.
07:22 Besançon lui répond que ce qui compte n'est pas tant la profession de foi affichée, mais
07:27 le fait qu'on a affaire dans les deux cas à des idéologies dévastatrices autant l'une
07:31 que l'autre, l'expérience communiste s'est ensoldée par encore plus de morts que le
07:35 nazisme.
07:36 Alors, on pourrait compléter, j'ai trouvé très intéressant ces réflexions, parce
07:41 que je me suis dit qu'on pourrait la compléter sur le fond également et sur la production
07:46 journalistique qui a pu être faite ces dernières années.
07:49 Et cette réflexion m'a rappelé par exemple la couverture, pour revenir à l'affaire
07:56 Geoffroy Lejeune, la couverture du journal Libération qui, il y a peu, mettait Geoffroy
08:01 Lejeune en couverture avec ce titre "Le jour du seigneur", S-A-I-G-N-E-U-R.
08:07 Il faudrait quand même rappeler à ce journal que son traitement, par exemple, de l'arrivée
08:13 des Khmers rouges à Phnom Penh le 17 avril 1975, avec un titre sur Libération, "Le
08:20 drapeau de la résistance flotte sur Plot Phnom Penh", et le jour suivant "7 jours
08:25 de fête pour une libération".
08:26 Alors, je précise quand même que les Khmers rouges sont responsables d'entre environ
08:31 1,7 et 2,5 millions de personnes sur une population du Cambodge qui à l'époque comptait 8 millions
08:37 d'individus.
08:38 Aucun, mais à coup de pas, officiel de Libé.
08:40 Simplement, l'auteur du papier, Patrick Sabatier, s'est repenti dix ans plus tard
08:46 à l'occasion du film "La Déchirure".
08:48 En fait, il parle surtout de sa déchirure.
08:51 Et le 13 février 1985, il explique "à trop avoir voulu, avoir raison de cette guerre,
08:58 on s'est laissé aveugler, on n'a rien vu, rien compris ou presque".
09:02 Alors, le monde n'était pas en reste à l'époque, avec son correspondant Patrice
09:06 Debir saluant l'enthousiasme populaire qui accompagne l'entrée des Khmers rouges à
09:11 Phnom Penh.
09:12 On pourrait aussi rappeler le passé maoïste du fondateur de Libération, Serge Julli,
09:17 qui ne semble pas poser de problème, ni lui être rappelé à chaque fois qu'il passe
09:21 à la télévision.
09:22 Pourtant, rappelons aussi les millions de morts causées par l'idéologie maoïste
09:26 appliquée à la Chine, notamment à l'occasion de la révolution industrielle.
09:29 Là aussi, dire qu'on a changé suffit à être exonéré et on n'en parle plus.
09:33 Et Geoffroy Lejeune dans tout ça ? Geoffroy Lejeune, en revanche, c'est le patron d'un
09:38 quotidien qui n'a jamais soutenu aucune idée ayant conduit à des exécutions de
09:43 masse.
09:44 Il ne s'est jamais reconnu dans le concept d'extrême droite qui pourtant est apposé
09:48 à son nom dès qu'on parle de lui, en particulier sur les médias du service public.
09:52 Il est désigné coupable et dans cette désignation, il n'y a aucun pardon possible.
09:56 On dirait, si pardon, il devait y avoir, encore aurait-il fallu qu'il eût fait quelque
10:01 chose.
10:02 Mais alors que nous dit finalement Luc Ferry dans cette tribune ?
10:05 Luc Ferry nous dit qu'il vaut mieux, selon lui, qu'on sache les opinions d'un directeur
10:09 de rédaction.
10:10 Il pense qu'il est sain que les directeurs des journaux affichent sans phare leurs engagements,
10:15 ce qui ne doit nullement les empêcher de donner la parole à ceux qui ne pensent pas
10:19 comme eux.
10:20 Mais qu'en revanche, il pense, et ça c'est sa conclusion, que la social-démocratie,
10:24 en fait, tout ça c'est l'objet du fait que la social-démocratie s'est couché devant
10:29 Mélenchon et a vendu son âme à la nupe, c'est qu'il serait temps que les grandes
10:33 consciences du camp du bien prennent leur plume pour dénoncer ce qu'il appelle le
10:37 sectarisme de gauche.
10:38 Merci beaucoup Régis Le Sommier.
10:40 Un mot rapide peut-être Olivier Dartigolle sur cette tribune et sur cette analyse de
10:45 Régis Le Sommier ?
10:47 Régis peigne différentes périodes.
10:50 Il semble tomber dans les dangers de l'anachronisme.
10:56 C'est ça qu'il ne faut pas faire, prendre les lunettes d'aujourd'hui pour réinterpréter
10:59 une période historique où la bataille idéologique et politique était plus ou moins dense.
11:05 Moi je préfère, je tiens à le dire, des lignes idéologiques et politiques.
11:10 Je préfère ça.
11:11 J'aime bien qu'elles soient assumées, défendues et qu'on puisse à partir de là
11:15 discuter, s'opposer, converger s'il y a besoin sur des sujets ou pas.
11:20 Après, pour être un peu morpion, imaginez, vous allez me dire que c'est l'argument
11:28 de l'absurde, mais si en plein été, un scénario que je vous demande d'imaginer,
11:36 Edouard Pleynel avait été débarqué de Mediapart.
11:40 Je tiens à dire d'ailleurs que l'équipe de Mediapart sort des articles et des enquêtes
11:44 qui ont pu toucher juste et mettre la plume dans la plaie sur de véritables sujets.
11:50 Mais si Edouard Pleynel était débarqué de Mediapart pour prendre la tête de Valeurs
11:55 Actuelles, peut-être que ça aurait fait un peu de foin dans l'équipe actuelle de
12:00 Valeurs Actuelles.
12:01 Je crois que chacun maintenant va pouvoir regarder tout ça de près.
12:06 Le JDD tel qu'on l'a connu, et que je lisais tous les dimanches par, j'ai envie de dire,
12:12 discipline, mais qui pouvait aussi me tomber des mains sur certains moments, puisque c'était
12:17 le canal d'expression de la Macronie et des ministres qui avaient quelque chose à dire,
12:22 plus ou moins, on verra comment le JDD évolue.
12:26 En tout cas, ce ne sera plus l'ancien JDD, on a déjà une petite idée.
12:31 On est libre de l'acheter ou pas.
12:34 On est libre de s'y référer ou pas.
12:37 Et moi, j'aime bien cette liberté-là.
12:40 Après, j'ai des désaccords avec Edwi Plenel, mais je souhaite aussi qu'Edwi Plenel puisse
12:45 continuer à travailler tel qu'il le fait, parce que véritablement, ils ont pu, sur un
12:50 certain nombre de sujets dans la vie politique et sociale, sortir des choses qui ne sont
12:53 pas sorties ailleurs.
12:54 Je crois que personne n'a demandé la tête d'Edwi Plenel sur ce plateau.
12:57 C'est toute la différence.
12:58 Ce qu'on explique, c'est qu'il n'y a pas de guillotine pour Edwi Plenel.
13:03 Il n'y a pas de guillotine pour Edwi Plenel quand il arrive au Monde.
13:06 Je sentais quand même une charge un peu...
13:08 Il y a beaucoup d'ironie, mais il n'y a pas eu d'exécution d'Edwi Plenel par les
13:14 classiques de la droite au moment où il arrive au Monde.
13:16 Et puis après, juste une autre petite idée.
13:18 Pourtant, ce qu'il dit est ignoble.
13:20 La une sur Geoffroy, avec qui on a plaisir de discuter, n'est peut-être pas très agréable
13:25 pour lui et pour ceux qui le soutiennent dans l'IB.
13:27 On peut contester la une ou pas.
13:29 Il y a eu des unes de valeur actuelle qui étaient aussi très contestables.
13:32 Et c'est pour ça que nous sommes ici.
13:33 Et qu'on donne lieu, y compris à des condamnations en justice.
13:36 Notamment celle de Daniel Roudon.
13:37 On va aller sur un sujet beaucoup plus doux et beaucoup plus rose avec Alexandre Démécule.
13:43 Quoique exactement.
13:44 Parce qu'en moins d'un mois, Barbie a déjà dépassé les 4 millions d'entrées en France
13:48 et le milliard de dollars dans le monde.
13:50 Comment expliquer ce succès fulgurant ? Peut-on parler d'un véritable phénomène de société ?
13:56 Est-ce que vous êtes dans la Barbie vibes ?
13:58 Je vais être honnête.
13:59 Je reviens de vacances et je n'ai pas encore vu Barbie.
14:02 Moi non plus.
14:03 Je vais essayer de me rattraper mon retard.
14:06 Mais malgré tout, je pense que même sans l'avoir vue, on peut essayer d'analyser ce
14:10 succès.
14:11 Un succès qu'on pouvait attendre.
14:12 Mais sans doute pas à ce niveau-là.
14:15 On ne pouvait pas vraiment imaginer que Barbie ferait un score plus de deux fois supérieur
14:20 à Tom Cruise dans Mission Impossible.
14:22 Et même plus de trois fois supérieur à ce bon vieux Indiana Jones qui commence malheureusement
14:27 pour lui à sucrer les fraises.
14:30 C'est une incroyable revanche par rapport au héros masculin Barbie qui va devenir sans
14:36 doute le plus gros succès de l'année devant Super Mario Bros.
14:38 L'un des premiers éléments d'explication, tout simplement, c'est la puissance de la
14:43 marque.
14:44 En fait, Barbie, c'est comme McDo.
14:45 Tout le monde connaît et on a grandi avec en quelque sorte.
14:49 Je vais vous donner quelques chiffres étourdissants.
14:52 La marque existe depuis 1959 et un milliard de Barbie ont été vendues depuis sa création.
14:58 Ça s'écoule à 80 millions d'unités chaque année.
15:00 150 de poupées Barbie sont vendues chaque minute dans le monde.
15:04 Ceci dit, je pense que la puissance de la marque n'explique pas tout et que quand on
15:08 atteint ce type de chiffre au cinéma, c'est que ça fait écho à ce qui se passe dans
15:14 la société.
15:15 C'est pour ça que je vous posais la question.
15:17 Est-ce que c'est un phénomène de société?
15:18 Je pense que oui, on l'a vu en France avec de grands succès populaires.
15:23 Je pense par exemple à Bienvenue chez les Ch'tis.
15:25 C'était juste après le nom au référendum de 2005.
15:29 Je crois que ça faisait écho à une volonté des Français de se réenraciner, d'être
15:33 fiers de leur région.
15:34 Par exemple, on pourrait citer un autre film, Intouchables, qui est sorti après les émeutes
15:40 de banlieue.
15:41 Il y avait peut-être derrière une volonté de réconciliation.
15:43 Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu?
15:44 Les gens en avaient marre, je crois, du politiquement correct et d'une certaine forme de communautarisme.
15:48 Si on prend à l'échelle mondiale, un film comme Titanic sort au tournant du siècle
15:54 et je pense qu'il traduit une angoisse par rapport au progrès technique, technologique.
15:58 Avatar fait écho à la crise écologique liée au réchauffement climatique et plus
16:03 récemment le retour de Top Gun qui était un immense succès aussi.
16:08 Je crois que c'est un peu la revanche du mal blanc occidental.
16:11 Et donc là, je pense que justement, Barbie, ça interroge dans une société où finalement
16:19 les relations hommes-femmes sont plus compliquées qu'on le croyait et où les hommes et les
16:26 femmes ne savent pas forcément se situer.
16:28 Mais c'est aussi un film qui divise, notamment sur la question du féminisme.
16:32 Oui, tout à fait.
16:33 C'est pour ça que je disais que ça interrogeait les relations hommes-femmes.
16:37 Et c'est vrai qu'au Figaro, au Figaro Vox, on a reçu différentes tribunes sur Barbie
16:43 qui, ce qui est amusant, c'est qu'elles disent un peu tout et son contraire.
16:48 Certains y voient un film de propagande néo-féministe et misandre.
16:52 C'est le cas de Dan De Guerry qui nous a fait une belle tribune.
16:54 C'est une norme aléenne.
16:56 Elle regrette que les Ken soient montrés comme des personnes stupides et superficielles,
17:01 tout juste bons à se pavaner sur la plage et que dans le vrai monde, les hommes soient
17:06 montrés tous comme des machos et des grossiers.
17:09 Bien loin d'une histoire d'amour, écrit-elle, la relation entre Barbie et Ken s'achève
17:13 par un Ken en pleurs qui regrette le patriarcat et qui accepte finalement le pouvoir des Barbies.
17:17 Ça, c'est une vision des choses, mais on a reçu exactement l'inverse.
17:21 C'est une tribune de la philosophe Eliette Abekassis qui nous dit au contraire que Barbie
17:27 est une satire et justement une satire du néo-féminisme à l'ami tout, de la théorie
17:32 du genre et que c'est loin d'être justement pour le féminisme revanchard qu'on voit
17:38 notamment chez Sandrine Rousseau.
17:40 Je vais justement vous couper pour juste annoncer l'arrivée d'Emmanuel Macron accompagné
17:46 de Brigitte Macron à borne les mimosas.
17:48 Le président de la République ne devrait pas tarder à prendre la parole après son
17:54 arrivée, mais vous avez peut-être encore quelques minutes pour terminer votre...
17:57 Il aurait pu attendre la fin.
17:58 Il aurait pu attendre la fin.
17:59 Mais il choisit le meilleur moment, mais écoutez, il choisit son meilleur moment.
18:04 Il a été interrompu par Barbie et Ken.
18:06 Il va falloir choisir, soit la parole du président, soit Barbie.
18:10 Bref, de plaisanterie, elle y voit même un élange de la différence des sexes, Elietta
18:16 Beccassis, et elle nous dit que la clé du film est dans la fin.
18:19 Elle nous dit Barbie va chez le gynécologue.
18:21 Pourquoi cette chute ? Peut-être parce que la meilleure réponse à la théorie du genre,
18:25 c'est l'existence des gynécologues.
18:26 Si les femmes vont chez le gynécologue, c'est bien que la théorie du genre est fausse et
18:31 qu'il existe bien un sexe féminin et un sexe masculin.
18:34 En tout cas, pour un film qui devait être un film de placement de produits, une gigantesque
18:38 opération marketing, on voit qu'il a le mérite sans doute de faire réfléchir et
18:43 que c'est peut-être un film plus politique qu'on ne le croirait.
18:46 Et il a été interdit dans les pays arabes, notamment en Algérie.
18:50 Donc, c'est vraiment un film plus politique qu'on ne le pense.
18:53 Oui, d'ailleurs, le grand écrivain algérien Kamel Daoud a résumé ça d'une formule que
19:00 je trouve très amusante.
19:01 Il dit ce sont les barbus contre Barbie.
19:04 On a une tribune également dans le Figaro.
19:09 Décidément, c'est la journée du Figaro, de l'ancien ambassadeur.
19:12 Nous ne faisons pas de placement de produits.
19:15 On va avoir une vente explosée comme les barbus.
19:21 Et donc, l'ancien ambassadeur en Algérie, Xavier de Yancourt, nous a fait une tribune
19:26 et il dit que finalement, cette interdiction, c'est quand même, hélas, la preuve que
19:32 l'islamisme progresse en Algérie.
19:34 C'est un gouvernement militaire, mais la société est de plus en plus islamisée.
19:39 Ça a été également interdit dans beaucoup de pays arabes, le Pakistan, le Koweït, le Qatar.
19:45 Bien sûr, je crois que Kamel Daoud était pessimiste, il disait ce sont les barbus contre Barbie.
19:52 À la fin, ce sont les barbus qui gagnent.
19:54 C'est vrai, sans doute dans ces pays-là, mais ils gagnent grâce à des méthodes totalitaires,
19:59 grâce à la censure.
20:00 Donc, ça nous montre aussi que leur modèle islamiste est un modèle bien fragile.
20:04 C'est un modèle qui a peur de simples caricatures et c'est un modèle qui a peur d'une simple Barbie.
20:10 Et il n'y a pas que Barbie qui est censurée.
20:12 La censure, ça bat aussi sur les cinéastes iraniens.
20:15 Oui, je voulais en profiter pour parler du cinéaste Saïd Roustani, qui est vraiment
20:23 un nom compliqué à donner, mais qu'il faut bien retenir parce que c'est un grand cinéaste.
20:28 Il a fait déjà deux films, La loi de Teheran, qui sont sortis en France, et Leïla et ses
20:34 frères, qui étaient à Cannes.
20:36 Et là, il est condamné à six mois de prison, justement parce qu'il a été à Cannes,
20:41 présenter son film et interdit pendant cinq ans, finalement, de filmer.
20:46 Leïla et ses frères, c'est un film magnifique sur la société iranienne, pas du tout manichéen
20:50 en réalité, parce qu'il montre aussi, c'est une histoire de famille, il montre les bons
20:54 côtés de la société iranienne, une société traditionnelle où finalement, les familles
20:58 sont proches, sont aimantes, mais il montre aussi la difficulté de s'émanciper, et notamment
21:04 pour les femmes.
21:06 Et donc, c'est l'occasion aussi de dire que cette révolution iranienne qui a été
21:10 commencée par les femmes continue et qu'on voit toujours le féminisme à travers les
21:14 tweets idiots de Sandrine Rousseau, mais qui a des causes encore importantes pour les femmes
21:19 et qu'il faut s'en souvenir.
21:20 Merci Alexandre Devecchio.
21:21 Je vous coupe malheureusement pour lancer une page de publicité pour notre cher président
21:26 de la République qui doit s'exprimer dans quelques instants.
21:28 Restez avec nous, restez sur CNews pour la prise de parole d'Emmanuel Macron.
21:32 19h25 sur CNews, vous êtes toujours d'en face à l'info été et nous allons prendre
21:40 la direction de la Chine avec Nathan Devers.
21:42 Vous vouliez nous parler du rôle de la Chine et que la Chine veut jouer sur la scène internationale.
21:48 Oui, alors direction de la Chine, mais via l'Afghanistan.
21:50 Vous vous souvenez que ça fait maintenant deux ans que les Américains se sont retirés
21:54 de l'Afghanistan et que Kaboul est aux mains des talibans, des islamistes.
22:00 Or, il y a deux ans, à cette époque-là, quand tous les pays évidemment et toutes
22:05 les grandes puissances prenaient leur distance avec le régime des talibans et surtout voulaient
22:09 créer une sorte de délai de décence avant d'avoir la moindre relation officielle ou
22:12 officieuse avec eux, il y a eu un pays qui les a reconnus officiellement, qui a été
22:16 parmi les premiers ou le premier à les reconnaître officiellement, qui a maintenu l'ambassade,
22:20 qui a dit que les liens avec l'Afghanistan allaient être encore plus forts qu'avant.
22:23 Et ce pays-là est la Chine.
22:26 Et en effet, la Chine, ça reflète sa position, si vous voulez, dans la géopolitique du monde,
22:32 sa nouvelle position.
22:33 C'est que d'un côté de la frontière, ça veut dire côté chinois, elle n'avait
22:36 aucun problème et elle n'a toujours aucun problème à persécuter les musulmans, pas
22:40 les islamistes, les musulmans, les simples musulmans, ceux qui lisent le Coran, qui
22:43 ne mangent pas de porc, etc.
22:44 À les persécuter, à les mettre dans des camps de concentration, à les stériliser,
22:47 etc.
22:48 Et de l'autre côté de sa frontière, par contre, l'islamiste est un ami politique
22:52 pour la Chine.
22:53 Ce paradoxe-là dessine bien la place que la Chine entend avoir dans le monde sur fond
22:58 d'un échec constant des États-Unis, c'est-à-dire de la position géopolitique des États-Unis
23:02 à la fois extérieure et aussi intérieure.
23:05 Ça veut dire d'une renonciation de la part même du pouvoir américain à mener une lutte,
23:10 si vous voulez, d'influence impériale, entre guillemets.
23:12 Depuis cet épisode d'il y a deux ans, ce n'est pas un épisode, depuis cette tragédie
23:15 d'il y a deux ans, il y a eu au moins deux grands moments qui montrent le rôle d'influence
23:20 que la Chine entend jouer.
23:21 Premier moment, il y a quelques mois, qui nous a tous saisi, c'est quand on a annoncé
23:25 qu'il y avait une normalisation des rapports entre l'Arabie saoudite et l'Iran.
23:29 Arabie saoudite et l'Iran qui sont des ennemis, en tout cas, pas forcément d'une guerre
23:34 armée, mais des ennemis politiques historiques.
23:36 Arabie saoudite et l'Iran qui aujourd'hui étaient donnés pour avoir des relations
23:40 de plus en plus dégradées, tant et si bien d'ailleurs qu'on disait que l'Arabie saoudite
23:44 était sur le point de normaliser ses relations avec Israël, de créer des ambassades, etc.
23:49 et que tout cela était contre l'Iran.
23:50 Et donc, quand la nouvelle est tombée que le Riyadh décidait de faire des accords,
23:56 de signer des accords avec l'Iran, ça a évidemment créé une onde de choc.
24:01 Et tout cela a été fait sous la médiation chinoise.
24:04 Chinoise, c'est très intéressant, sachant qu'au même moment, il y avait une médiation
24:07 américaine pour que l'Arabie saoudite se rapproche notamment d'Israël.
24:11 Alors pourquoi la Chine a réussi, ça c'est incontestablement quoi qu'on en pense,
24:15 c'est un coup majeur, c'est un retournement de situation.
24:17 Pourquoi la Chine a réussi à faire ça ?
24:20 Parce qu'elle a compris stratégiquement que les intérêts de Mohamed Ben Salmane
24:25 sont premièrement de moderniser l'économie et la vie et la société saoudiennes
24:31 et que cette modernisation supposait, si vous voulez, d'avoir tellement d'investissements
24:36 importants, dangereux, je pense notamment à la ville complètement futuriste de Néom
24:39 qu'il construit au nord-ouest de l'Arabie saoudite, qu'à un moment, pour MBS,
24:45 même si pour des raisons à la fois théologiques, religieuses, économiques, politiques,
24:49 même si l'Iran est un adversaire profond, il s'est dit qu'il ne fallait pas tout miser
24:53 sur la menace iranienne.
24:54 Et la deuxième raison, c'est que ça permettait aussi, encore une fois dans la stratégie de MBS,
24:58 pour le coup par la médiation iranienne, de faire en sorte de sortir de la tragédie
25:05 du Yémen aussi.
25:07 Donc ça, c'était un premier événement qui montre bien la place que la Chine entend jouer.
25:11 Deuxième événement, le 24 février dernier, concernant la guerre en Ukraine,
25:17 on se souvient que la position de la Chine a été plus que trouble depuis le début de cette guerre,
25:21 et donc la Chine a émis un document en 12 points qui est une proposition, si vous voulez,
25:26 de médiation chinoise pour régler le conflit russo-ukrainien, avec des propositions,
25:31 une dizaine de propositions qui ménagent un peu la chèvre et le chou.
25:34 Donc par exemple, la première proposition, c'est de nous dire
25:37 "la souveraineté territoriale doit être respectée et il est gravissime de l'enfreindre".
25:42 Mais évidemment, quand vous écrivez juste ça en diplomatie,
25:44 mais que quand vous ne dites pas qui a enfreint quoi,
25:47 ça revient, si vous voulez, à se moquer du monde ou en tout cas à faire de l'eau tiède,
25:51 parce que chaque parti prétend précisément agir au nom d'une certaine conception
25:57 de la souveraineté nationale.
25:58 Et toute la suite est comme ça.
25:59 Donc elle appelle à éviter la menace nucléaire, bon ça c'est évident,
26:03 c'est une banalité, tous les pays le disent, le Japon l'a répété il n'y a pas longtemps, etc.
26:07 Elle appelle à l'arrêt des combats, etc.
26:08 et à dire qu'il faut se mettre autour de la table pour discuter avec la Chine comme grand médiateur.
26:13 Et là, on en vient aussi au paradoxe de la position chinoise,
26:16 qui est très intéressante, c'est qu'elle se place comme médiateur,
26:19 alors qu'évidemment, elle-même, dans la guerre en Ukraine,
26:22 est un peu jugée partie, même plus que ça, parce qu'elle est dans une position vis-à-vis de Taïwan
26:27 exactement identique à celle de la Chine vis-à-vis de l'Ukraine.
26:31 Alors dans un instant, restez avec nous sur ces news.
26:34 Emmanuel Macron donnera, prononcera un discours depuis Bornemimosa
26:40 à l'occasion du 79e anniversaire de la libération de la ville.
26:43 On va continuer avec vous, Nathan Devers, en attendant la prise de parole du président de la République.
26:49 Et concernant la Chine, pourquoi la Chine a-t-elle réussi à s'implanter autant sur la scène internationale ?
26:55 Évidemment que si elle s'est implantée autant, c'est parce qu'il y a des gens qui ont échoué et qui ont reculé.
27:00 La Pax Sinica n'a été possible que sur fond d'un échec de la Pax Americana.
27:06 La politique internationale des États-Unis a connu deux types d'échecs
27:13 qui sont en fait, malheureusement pour elle, contradictoires.
27:15 Premièrement, on lui a reproché, et on lui a reproché à juste titre,
27:19 des interventions qui ont parfois été illégitimes, qui ont été brutales, qui ont été violentes
27:23 et qui sont parfois sorties du cadre des droits humains.
27:26 Alors le moment historique auquel nous pensons tous, c'est ce qui s'est passé en Irak en 2003,
27:31 les mensonges de George Bush, de Colin Powell à l'ONU avec la fiole,
27:35 une guerre d'agression absolue sur l'armée, sur Saddam Hussein, mais surtout sur les populations civiles,
27:41 une destruction de l'État, les tortures de Abu Ghraib qui avaient été révélées, etc.
27:46 Et le chaos irakien qu'on connaît.
27:47 On pourrait aussi en citer d'autres, mais si vous voulez, c'est l'idée qu'on a reproché aux États-Unis
27:53 d'être trop intervenus sur la scène du monde et de manière trop violente.
27:56 Mais paradoxalement, et c'est là que ça devient que la situation des États-Unis est vraiment dans une sorte d'aporie,
28:01 c'est qu'on a aussi reproché, et à juste titre aussi, aux États-Unis,
28:05 une forme d'isolationnisme et de refus de l'intervention.
28:08 Pour rester sur l'exemple irakien, quand Barack Obama arrive au pouvoir,
28:12 lui évidemment qui s'était opposé, qui avait été un des seuls à s'opposer à la guerre en Irak de 2003,
28:17 il arrive au pouvoir avec une obsession, c'est ne surtout pas recommencer les erreurs de son prédécesseur.
28:22 Et donc, ce qui fait que quand il commence à y avoir des manifestations à l'époque de démocrates
28:26 contre le Premier ministre Maliki, Maliki est à Washington pour une visite d'État chez Barack Obama,
28:33 à la Maison Blanche, et Maliki lui fait savoir très clairement qu'il entend réprimer cela très très violemment.
28:38 Et Barack Obama lui dit en substance "je n'approuve pas personnellement,
28:42 mais vous savez très bien que je ne reproduirai pas les erreurs interventionnistes de George Bush,
28:47 et en gros, vous avez carte blanche".
28:49 Ce qui s'est passé, c'est qu'il y a eu des répressions aveugles de Maliki,
28:52 répression qui ont engendré la croissance de Daesh en Irak.
28:56 Donc si vous voulez, le paradoxe aussi, et on pourrait dire la même chose de ce qui se passe aujourd'hui en Afghanistan
29:01 avec le retrait voulu par Trump et mal acté par Biden.
29:05 Donc ce qu'on pourrait dire, c'est que là où les États-Unis ont été pris, si vous voulez,
29:08 dans une sorte de cercle logique infernal, c'est que qu'ils interviennent ou qu'ils n'interviennent pas,
29:14 ça a pu mener objectivement à des erreurs, à des fautes et à des tragédies,
29:18 et puis surtout, on leur a reproché.
29:20 Il y a eu un très bon article, puisque vous avez fait un peu de placement de produit pour le Figaro,
29:24 je vais en faire, mais j'en fais pour une revue qui n'est pas la mienne, vous voyez,
29:26 j'en fais pour le site "The Conversation",
29:29 un site formidable où n'écrivent que des universitaires spécialistes de leur sujet.
29:32 Donc il y a eu un très bon article il y a quelques jours de Lina Kenouche,
29:35 docteur à l'université de Lorraine, sur ce sujet-là, sur la manière dont la stratégie chinoise
29:39 s'est faite en analysant très très bien toutes les erreurs stratégiques des États-Unis.
29:44 Et alors dans ce contexte, il y a un élément très intéressant,
29:47 c'est que donc, après s'être positionnés sur la question afghane,
29:51 après s'être positionnés sur la question majeure de l'Arabie Saoudite,
29:53 et avoir essayé de se positionner sur la question ukrainienne,
29:56 les Chinois essayent de se positionner sur le règlement du conflit israélo-palestinien.
30:02 Ils ont proposé récemment de devenir les nouveaux médiateurs du conflit,
30:05 sachant que depuis 1948 et même avant, le grand médiateur historique,
30:09 enfin ça a été les Anglais, mais surtout ce sont les États-Unis.
30:11 Or ce qu'on reproche évidemment aux États-Unis,
30:14 ce que, en tout cas, notamment les Palestiniens reprochent aux États-Unis,
30:17 c'est deux choses.
30:18 Premièrement, c'est d'avoir été dans un soutien très clair,
30:21 beaucoup plus à Israël qu'aux Palestiniens,
30:23 donc si vous voulez de ne pas être neutre.
30:25 Et deuxièmement, plus grave encore,
30:27 d'avoir créé toute leur médiation autour d'une grande fiction,
30:30 fiction qui a été à l'origine des accords d'Oslo,
30:31 fiction qui a été encore dans tous les discours de Barack Obama, etc.,
30:35 qui était la fiction d'un État palestinien et d'un État israélien,
30:38 de la paix par les deux États.
30:40 Mais en entretenant cette fiction,
30:43 tout en continuant, si vous voulez, à laisser Israël
30:47 s'implanter de plus en plus en Cisjordanie
30:49 pour rendre de facto impossible l'existence d'un État palestinien.
30:52 Parce que si vous voulez, à partir du moment où la Cisjordanie
30:55 est devenue une sorte de grand système
30:58 avec plein d'enclaves superposées les unes dans les autres,
31:00 eh bien vous ne pouvez pas construire un État sur du gruyère,
31:02 avec une absence totale de continuité territoriale.
31:06 Donc, si vous voulez, les Palestiniens ont bien compris
31:10 que la médiation américaine n'avait pas été vraiment pour eux une médiation.
31:13 Et donc, intéressant, 80% des Palestiniens
31:15 veulent que la Chine soit le nouveau médiateur du conflit.
31:18 Donc ça, c'est un exemple, me semble-t-il, majeur
31:20 du fait que sur les quatre grands conflits
31:22 qui ont animé le monde ces dernières années,
31:25 sur les quatre, la Chine en a réussi deux,
31:28 donc c'est-à-dire a réussi à s'implanter dans les deux,
31:31 l'Afghanistan et les Saoudiens,
31:34 et a essayé sur Israël et a échoué sur l'Ukraine.
31:39 Mais en tout cas, il y en a deux sur quatre
31:40 où elle s'est imposée comme le médiateur sinon premier,
31:43 du moins très important.
31:44 Quelle conclusion peut-on en tirer
31:46 quant à la réorganisation du monde ?
31:48 Alors, une conclusion, premièrement, qui est évidente,
31:51 je ne vais même pas m'étendre trop longuement,
31:53 c'est qu'évidemment, nous vivons une époque qui sonne le glas
31:56 du monopole, si vous voulez, de la suprématie américaine,
32:00 qui est le monopole qui s'est imposé à la fin de la guerre froide.
32:04 Cette, si vous voulez, ce n'est pas forcément ce crépuscule,
32:08 mais en tout cas, ce qui est certain,
32:10 c'est que les Américains n'ont plus ce monopole-là.
32:12 C'est confirmé par le sommet des BRICS,
32:14 qui va avoir lieu du 22 au 24 août,
32:17 où donc les pays émergents, dont la Chine, vont se réunir
32:21 et autour de la table, ils vont envisager,
32:22 notamment à Johannesburg,
32:24 ils vont envisager notamment une chose,
32:26 c'est éventuellement de créer une monnaie commune
32:28 pour s'affranchir du dollar.
32:29 Donc ça, évidemment, ça pourrait avoir un impact absolu
32:32 avec la refonte quasiment, non pas d'une nouvelle guerre froide,
32:35 parce qu'il n'y aurait pas deux blocs qui s'opposent
32:36 sur le fond d'une idéologie, mais en tout cas,
32:38 d'une situation où nous étions dans un monde "multipolaire",
32:42 mais que là, le multipolaire va être remplacé par une binarité.
32:45 Ça va être les pays émergents contre les États-Unis.
32:47 Et alors, dans la guerre entre cela,
32:49 moi, c'est une hypothèse que je ferai souvent,
32:51 mais on pourrait avoir une forme de jalousie
32:53 pour la notion d'émergence.
32:55 Il n'y a rien de plus beau pour un pays que d'être émergent.
32:57 Vous savez, c'est la phrase du général de Gaulle,
32:58 quand Peyrefitte lui disait "Qu'est-ce que la grandeur ?"
33:00 Mon général, pourquoi vous parlez tout le temps de ce mot ?
33:01 Il disait "La grandeur, c'est de pouvoir se dépasser tout le temps."
33:04 C'est le propre d'un pays émergent.
33:05 Ce que la France "était dans une logique d'émergence"
33:08 au début de la Ve République, elle ne l'est plus aujourd'hui,
33:10 parce que pour des raisons évidentes.
33:11 La deuxième hypothèse qui est plus intéressante, à mon avis,
33:14 c'est que ce n'est pas seulement, si vous voulez,
33:16 une translation d'un impérialisme à un autre,
33:18 sinon ce ne serait pas d'ailleurs très intéressant.
33:20 C'est qu'avant tout, c'est un changement de paradigme
33:22 de ce qu'on entend par la paix.
33:24 Ce qui explique l'efficacité de la notion chinoise de paix,
33:28 c'est que c'est une paix qui n'a plus rien à voir
33:31 avec les droits de l'homme,
33:32 qui n'a plus rien à voir avec la Concorde,
33:33 et qui n'a plus rien à voir avec le moindre critère,
33:35 si vous voulez, on pourrait dire transcendant.
33:37 C'est une paix qui suppose de discuter avec tout le monde,
33:40 de trouver un équilibre entre des rapports de force,
33:43 et de, si vous voulez, ne pas projeter sur une situation
33:46 de conflictuel, la moindre valeur universelle,
33:49 métapolitique, morale, transnationale, etc.
33:53 Donc, je reprends le modèle de cette paix,
33:55 c'est une paix où l'islamiste afghan peut être un ami politique,
33:58 tandis que le musulman ouigour est un ennemi absolu.
34:01 Cette définition minimale de la paix,
34:04 c'est celle, naturellement, de la réale politique,
34:06 et face à cela, je pense que l'enjeu intellectuel
34:09 des prochaines années, ça va être de réfléchir
34:11 à cette question du relativisme.
34:13 Fondamentalement, le modèle géopolitique que propose la Chine,
34:16 et d'ailleurs la Chine n'est pas le seul pays
34:18 à proposer ce modèle-là,
34:19 on peut dire que la Russie est aussi dans cette logique,
34:22 c'est un modèle totalement relativiste,
34:24 où ne comptent que des harmonies provisoires
34:27 entre des rapports de force.
34:28 Et à mon avis, l'enjeu intellectuel des dernières années,
34:30 et j'aimerais finir là-dessus,
34:31 c'est d'essayer de trouver une troisième voie
34:33 entre un modèle qu'on pourrait qualifier,
34:35 sinon de néo-colonialiste,
34:37 qui est en tout cas celui des néo-conservateurs américains,
34:39 qui est, si vous voulez, celui consistant à estimer
34:41 que nous avons un stock, non pas de valeurs,
34:43 non pas de principes, mais de valeurs,
34:44 de valeurs culturelles, qui sont les nôtres,
34:46 et qui doivent, si vous voulez, s'imposer absolument
34:50 en tout endroit de la planète,
34:51 quitte à faire des interventions en Irak.
34:54 En face, vous avez un modèle relativiste
34:56 qui est d'un cynisme absolu,
34:58 et je pense que tout l'enjeu, encore une fois,
34:59 c'est de trouver une troisième voie
35:01 avec un travail intellectuel
35:02 qui est d'essayer de faire la part des choses
35:04 entre l'universel et les valeurs culturelles de l'Occident.
35:07 Ça veut dire que peut-être que dans notre représentation,
35:09 toute l'erreur d'ailleurs des néo-conservateurs américains,
35:11 c'est que quand ils parlent, eux,
35:13 de ce qu'ils appellent les valeurs universelles,
35:14 c'est un universel qui est hybride,
35:16 qui contient tout à la fois des principes transcendants,
35:18 des principes qui devraient s'imposer,
35:21 ou en tout cas travailler n'importe quelle société,
35:24 quelle que soit sa culture,
35:25 et en même temps, naturellement,
35:26 un universel qui est un universel
35:28 qui est travaillé par des valeurs qui sont relatives
35:30 des valeurs américaines.
35:31 Vous savez, quand George Bush disait
35:32 qu'il menait une croisade,
35:33 c'était précisément cela.
35:34 Et donc, je pense qu'il faut réinventer
35:36 l'universel face à la Chine
35:38 et non pas rester dans une conception statique
35:40 de la manière dont nous pensions
35:41 jusqu'alors notre universalité.
35:43 Merci beaucoup, Nathan Devers.
35:44 Alexandre de Vécu, je vous voyais réagir.
35:46 Non, c'était simplement pour dire,
35:48 les régimes chinois et russes
35:50 n'ont évidemment pas ma sympathie,
35:52 mais en matière de politique étrangère,
35:54 je ne suis pas sûr que ce soit les seuls
35:55 à être dans une forme de relativisme.
35:57 Si on prend, par exemple,
35:58 pas les États-Unis, enfin, si, les États-Unis,
36:00 mais l'OTAN, on voit aujourd'hui que la Turquie,
36:04 qui a un rôle quand même important
36:07 dans la guerre en Arménie,
36:08 est dans l'OTAN.
36:09 Donc, le phénomène que vous décriviez,
36:12 à mon avis, n'est pas propre,
36:14 hélas, à ces grands régimes
36:17 dictatoriaux, voire totalitaires que sont la Chine.
36:19 Olivier Dardié-Golles.
36:20 Deux observations très rapides.
36:23 Les Chinois, pour écrire le mot "crise",
36:25 ils utilisent deux signes.
36:27 Le premier, c'est "danger",
36:28 c'est un homme au bord d'un précipice.
36:30 Et le second, c'est "opportunité",
36:32 c'est-à-dire qu'il y a dans toutes les crises
36:34 une opportunité à saisir.
36:37 Merci pour tous ces éléments.
36:38 Je suis toujours étonné, moi,
36:39 dans les débats politiques français
36:41 ou même occidentaux,
36:43 la faible connaissance,
36:45 en tout cas, de la Chine.
36:48 Parce qu'il y a un moyen très précis
36:50 de s'informer sur la Chine,
36:51 c'est de lire la traduction du discours
36:55 de Xi Jinping, en l'occurrence,
36:57 lors du congrès du Parti communiste chinois.
37:02 C'est des discours qui ne durent pas vraiment 10 minutes,
37:04 qui sont assez construits
37:06 et où vous avez l'ensemble de la réflexion,
37:10 de la stratégie,
37:12 des options privilégiées par le régime chinois.
37:15 Quand Xi Jinping veut développer les routes de la soie,
37:19 il fait une présentation très précise
37:23 et les années qui suivent, c'est la mise en œuvre
37:26 de ce qu'il avait proposé.
37:28 Et je trouve qu'il y a un faible intérêt,
37:31 au final, concernant la réalité chinoise,
37:35 dans sa complexité aussi,
37:36 et que systématiquement,
37:38 on se prend la tête dans le mur
37:41 face à l'événement qui tombe,
37:42 mais qui est annoncé et préparé
37:44 depuis parfois des décennies.
37:45 Parce qu'ils n'ont pas besoin d'un commissariat au plan.
37:47 Je peux vous dire qu'en termes de projection,
37:51 il y a une culture politique là-dessus.
37:55 On va passer à votre édito, Olivier Dertigold,
38:00 puisque le président de la République
38:02 n'est pas encore présent.
38:04 Il regarde encore l'émission.
38:05 Oui, il regarde l'émission.
38:07 Il n'est pas au pupitre.
38:08 Je vais bien dire que mes trois camarades
38:10 rient de concert,
38:12 parce qu'ils savent que ça va tomber sur moi.
38:13 Mais non, le président s'est dit
38:15 "je veux écouter Olivier Dertigold".
38:18 Le président est peut-être un fan.
38:20 Comme le dirait Goldman, il suffira d'un signe.
38:23 Voilà.
38:24 Le président est peut-être fan de Jean-Jacques Goldman.
38:27 Il est souvent très en retard,
38:28 donc je pense que...
38:29 C'est jouable.
38:30 C'est jouable.
38:31 Explique-moi pourquoi aujourd'hui
38:33 vous avez décidé de nous parler de Jean-Jacques Goldman.
38:35 Parce que vous m'avez demandé de le faire.
38:36 C'était une proposition de votre part.
38:40 Je plaisante, je l'ai proposée.
38:42 Pourquoi ? D'abord parce que si vous faites
38:43 votre revue de presse aujourd'hui,
38:45 vous avez hebdo et journaux des "unes"
38:47 consacrés à Jean-Jacques Goldman.
38:49 Je vais dire pourquoi.
38:51 Alors qu'il a quitté la vie artistique,
38:52 publique et médiatique depuis plus de 20 ans,
38:55 il reste en tête des classements
38:59 qui sont régulièrement publiés,
39:01 des personnalités préférées des Français,
39:03 devant l'abbé Pierre.
39:05 Il est toujours aussi populaire.
39:08 Alors qu'on vit dans une époque
39:10 très, trop bavarde.
39:12 Je ne fais aucune référence à ce qui va suivre.
39:14 Moi, c'est tout.
39:17 Goldman reste donc, malgré son silence,
39:21 sans réseaux sociaux, sans plan de com',
39:24 il continue à parler à ceux qui l'ont aimé
39:27 dans les années 80-90 et à ceux qui le découvrent.
39:30 Parce que la jeune génération peut avoir
39:32 sur ses playlists du Goldman.
39:35 Il s'agit d'un phénomène unique.
39:37 C'est une légende vivante,
39:39 quasiment une institution nationale.
39:41 Vous ne le verrez pas dans la prochaine
39:43 tournée des stars des années 80.
39:44 J'avais envie de vous questionner sur votre connaissance
39:46 de la tournée des stars des années 80.
39:48 Si vous pouviez me sortir deux, trois chanteurs,
39:49 ça ferait plaisir.
39:50 - Emile et Images ?
39:50 - Oui, bien.
39:53 Voilà.
39:54 Donc, tout ce qui est Patrick Hernandez,
39:55 Julie Piétri, Louis Hough,
39:57 Coquille Dengler, Jean-Pierre Madère,
39:59 François Feynman, Phil Barney, Jean Scholtes.
40:02 Goldman n'y est pas, pourtant,
40:04 il continue à vendre.
40:05 - Mais il vit en ermite à Londres.
40:07 - Oui, mais je pense qu'il va y rester.
40:11 Mais vous avez donc très certainement écouté du Goldman
40:13 ou des chansons écrites par lui.
40:16 "J'irai où tu iras, encore un soir de Dion",
40:19 c'est Goldman.
40:22 "L'envie, et je te promets de donner à l'idée",
40:25 c'est du Goldman.
40:26 Il accompagne Novia, donc, avec des mélodies,
40:28 des paroles depuis plus de 40 ans.
40:30 Alors, l'actualité Goldman, c'est en cette fin août,
40:32 la publication de l'essai d'un historien,
40:35 Ivan Jablonka.
40:36 On le connaît pour un ouvrage, notamment "Histoire des grands-parents",
40:39 que je n'ai pas eu, qui est un ouvrage bouleversant
40:42 sur l'histoire de ces grands-parents d'immigration juive polonaise.
40:45 Et il vient de consacrer à Jean-Jacques Goldman
40:50 un essai qui va donc être publié d'ici la fin du mois,
40:53 qui est bien évidemment une présentation de l'itinéraire humain,
40:59 artistique de Goldman.
41:01 Il ne l'a pas rencontré.
41:04 Il ne travaille que sur les archives,
41:06 disant que Goldman est un fait historique,
41:09 qu'il est rentré dans l'histoire.
41:10 Il a suffisamment de matière pour traiter de son itinéraire.
41:14 Mais surtout, l'auteur veut, à travers Goldman,
41:18 nous parler des années 80 et 90,
41:22 parler de la sociologie française,
41:26 de l'histoire politique de cette période-là,
41:28 mais aussi de la manière dont ça dit de notre propre période aujourd'hui.
41:33 Mais est-ce que vous pouvez nous rappeler ce qu'a représenté
41:36 Jean-Jacques Goldman, peut-être déjà à votre échelle personnelle,
41:39 et puis pour les Français ?
41:41 D'abord, chère Célia, on n'avait pas connu cette période-là,
41:42 mais nous avions tous des Walkman vissés sur les oreilles.
41:45 J'étais en train de naître.
41:46 Ça nous arrivait d'embobiner les cassettes avec le stylo.
41:50 Je ne sais pas si tu te souviens de cette technique.
41:52 Oui, tout à fait.
41:53 Des ASF.
41:54 Voilà.
41:55 Oui, très bien.
41:56 Ça ne nous empêche pas avec Nathan de danser dessus.
41:59 On connaît, on connaît.
42:00 Oui, l'époque était au top 50.
42:02 On se souvient du générique du top 50.
42:05 Elle était à la boum de Sophie Marceau,
42:06 et non pas, désolé, à Barbie.
42:09 Goldman a écrasé la concurrence.
42:11 Il a composé 300 chansons et vendu 30 millions de disques.
42:15 Il a été une immense star sans jamais se prendre pour une star.
42:19 On a souvenir de lui sur ces années-là d'une certaine humilité,
42:23 d'une discrétion médiatique.
42:25 Il y a donc les mélodies et les textes qui résonnent toujours dans notre actualité.
42:28 La vie par procuration, l'isolement des personnes âgées dans un milieu urbain.
42:34 Elle a fait un bébé toute seule avant le débat sur la PMA.
42:37 Comme toi, sur l'enjeu mémoriel.
42:40 Elle s'appelait Sarah et elle n'avait pas 8 ans.
42:43 Là-bas, un texte sur les migrants.
42:46 "Je te donne" et le partage de la différence.
42:49 Un simple professeur et le cordonnier, vous vous en souvenez,
42:52 sur l'amour de faire son métier.
42:54 C'est l'une des belles phrases de Jaurès dans son discours à la jeunesse.
42:57 Faire son métier et bien le faire.
43:00 Olivier Dertiegole, on va laisser la parole à Emmanuel Macron.
43:05 On lui donne la parole et on se retrouve.
43:08 Merci, messieurs.
43:11 Cher Christian, cher Hubert, monsieur le député, monsieur le préfet,
43:17 monsieur le maire de Bormes-les-Mimosas, cher François,
43:21 mesdames et messieurs les maires, mesdames et messieurs les élus,
43:25 mesdames et messieurs les anciens combattants,
43:27 mesdames et messieurs les directeurs d'associations,
43:30 mesdames et messieurs venus de Bormes et d'ailleurs.
43:33 Chers amis, je veux vous dire d'abord combien, une fois encore,
43:40 je suis heureux d'être parmi vous.
43:43 Vous l'avez rappelé, monsieur le maire, depuis 2018,
43:47 au fil de ces retrouvailles annuelles où se tissent et se renforcent les liens,
43:51 les visages sont maintenant connus, les regards se recroisent.
43:54 Mais je retrouve ici tout à la fois l'amitié, le souvenir,
44:00 quand les vivants relèvent les morts, et au fond,
44:04 ce lien inoxydable qui fait la nation.
44:08 Et je suis heureux, avec mon épouse, de revenir chaque année
44:12 en ce lieu de mémoire et de vie, ici parmi vous.
44:16 Cette manière de pèlerinage annuel, sur un haut lieu de combat
44:21 pour la liberté de la France, a une vertu d'ancrage salvatrice.
44:25 Des hauteurs de borne, on peut voir ce qui va, vient et surtout ne bouge pas.
44:31 Chacune, en effet, des commémorations auxquelles j'ai eu le privilège
44:37 de participer à vos côtés, fut différentée.
44:41 Je me souviens de chacune d'entre elles marquée par des moments
44:45 de notre histoire collective, différents.
44:48 Nous avons connu les incendies, la pandémie, les drames internationaux
44:52 en Afghanistan, le retour de la guerre sur le continent européen, en Ukraine.
44:58 Et la période est encore marquée par les troubles à notre voisinage du Sud,
45:03 cette fois-ci en Afrique.
45:06 Mais cette année, avec le décès de notre cher Pierre Welch,
45:10 je crois que nos retrouvailles se tiennent à un tournant.
45:14 Et vous l'avez évoqué, Monsieur le Maire.
45:17 Nos villes, en effet, sont un peu orphelines de celui qui les avait adoptées
45:24 depuis 20 ans qu'ils vivaient au Lavandou.
45:27 L'enfant de Kouba, qui avait traversé la Méditerranée pour débarquer
45:31 sur nos côtes, dans cette nuit sans lune du 14 au 15 août 1944,
45:37 cette date du 15 août qui était autrefois la fête de la France
45:41 et qui est devenue cette nuit-là une fête de la liberté.
45:45 Nous ne le verrons plus, en effet, assister aux cérémonies
45:50 sous son béret bleu marine de commando d'Afrique,
45:53 toujours aussi modeste, toujours aussi droit à 96 ans passés.
45:58 Les collégiens de Bormes, les lycéens de Hyères, n'entendront plus sa voix chaude
46:02 leur faire vivre l'épopée du débarquement de Provence,
46:05 avec ce chapelet de victoire qu'ils savaient égrener,
46:08 Rayol-Canadel, Lavandou, Bormes-les-Mimosas, l'Allon de les Morts,
46:11 puis la prise des batteries allemandes des blocos de Mauvins à Hyères,
46:15 la reconquête du fort de Coudon sous la Mitraille,
46:17 puis pas à pas, détonation par détonation, la libération des communes
46:22 de la Vallette du Var et de Toulon,
46:24 rejoint par les forces de résistance intérieure,
46:27 avant ensuite de remonter vers Belfort, le Rhin,
46:31 la campagne d'Allemagne où il avait traqué les derniers noyaux
46:34 de résistance nazie.
46:36 Nous gardons tous en mémoire, à l'esprit présent son regard,
46:44 ses intonations, sa manière d'entrebâiller les coulisses de l'histoire
46:49 avec son alliage unique d'humour et de confidence.
46:54 Ces moments de camaraderie et de panache,
46:57 où ce débarquement erroné sur la mauvaise plage
47:00 qui s'est avérée providentielle, la plage de départ étant finalement minée.
47:05 Face à ce type d'hommes, on ne sait jamais ce qui est témérité
47:10 et ce qui est courage, ce qui est folie et ce qui est vision,
47:13 ce qui est hasard et ce qui est destin, ils l'ont fait.
47:17 Le voilà parti rejoindre tous ses frères de combat disparus,
47:22 son colonel bouvé, Leca, Chiazzo, Torrel, Ducorneau,
47:27 Planque, Bonnet, Texier, Deleuze et tant d'autres
47:31 qui ont partagé avec lui l'angoisse, le courage, la joie,
47:36 l'héroïsme et l'effet d'arme des libérations dans toute la région.
47:42 Il y a un mois, leur bande de bérets bleu marine s'est ouverte
47:46 au béret vert de Léon Gauthier, le dernier membre du commando Kieffer
47:50 à qui nous avons dit adieu sur la plage de Wisterham.
47:54 Et puis il y a deux semaines, le caporal Henri Fabre,
47:57 un des amis d'adolescence de Pierre Velsch, de la bande de Kouba,
48:01 les a rejoints à son tour.
48:04 Ils ne sont plus que quelques-uns parmi nous,
48:07 les derniers des premiers, car nous nous situons
48:10 à la lisière d'une génération.
48:13 Et la mort de l'ultime témoin visuel du dernier acteur direct
48:17 avec Pierre Velsch est un point de bascule,
48:20 ce moment précis où le souvenir, la mémoire deviennent notre histoire.
48:26 Et c'est ce lieu où la responsabilité des associations,
48:30 des élus, de nos portes-drapeaux, de nos historiens,
48:34 de nos enseignants est encore plus grande.
48:38 Quand les gardiens naturels des événements s'éteignent,
48:41 d'autres doivent se lever pour reprendre le flambeau.
48:44 Ce n'est pas un chapitre qui se ferme, c'est une nouvelle page qui s'ouvre.
48:49 Et c'est à nous tous, il revient de l'écrire.
48:53 Et je pense tout particulièrement à nos enfants,
48:57 nos adolescents, à peine moins âgés parfois que ces soldats d'août 44.
49:04 La bande de Kouba, celle de Pierre Velsch, d'Henri Fabre,
49:10 c'était 11 adolescents nés dans la même commune d'Algérie.
49:16 Onze amis inséparables qui brûlaient tout simplement de s'engager.
49:22 Pierre Velsch n'avait pas 18 ans.
49:25 Il avait falsifié ses papiers d'identité faute d'obtenir l'autorisation de son père.
49:32 Mais ces jeunes-là avaient l'amour de la patrie,
49:36 une soif de dépassement, une volonté de donner un sens à leur vie
49:41 et d'inscrire leur destin au cœur de la nation française.
49:46 Et je ne crois pas que cette soif-là, ce sens-là,
49:51 y compris du sacrifice ultime, se soit perdu au fil des générations.
49:56 Il y a dans nos jeunes un appétit de liberté, un idéalisme,
50:00 qui se cherche parfois et auquel nous devons répondre.
50:07 Sans quoi parfois cette aspiration noble se retourne contre elle-même
50:10 et sape les fondations de cette nation de liberté, d'égalité, de fraternité
50:15 initiée en 1789, cette somme de destins emmêlés
50:19 qui accroît la jeunesse française, génération après génération,
50:24 fidèle à l'esprit des Lumières.
50:26 Car hors de ce champ commun prospère la désunion,
50:29 la division qui pave la voie du chaos et de l'injustice.
50:34 En cet été 1944, les libérateurs nous ont fait toucher du doigt
50:40 une certaine idée de la liberté individuelle et collective.
50:47 Parce qu'ils l'ont exercée personnellement à son plus haut titre,
50:51 ils nous ont montré que la liberté individuelle s'accroît de ce qu'elle donne.
50:59 Parce qu'ils étaient prêts à mourir pour la liberté collective,
51:04 ils nous ont rappelé combien elle était vitale,
51:08 humblement, héroïquement.
51:12 Sans phrase et sans écume, ils nous ont montré que c'était là
51:16 et que c'était cela, exercer sa liberté.
51:21 Ce n'est pas une frénésie de transgression,
51:24 ce n'est pas une fièvre de renverser les interdits,
51:28 c'est d'abord et avant tout une volonté maîtrisée et forte,
51:33 capable d'assumer les contraintes qu'elle se choisit.
51:40 Et cette liberté-là, qui n'existe que parce qu'elle est toujours et d'abord collective,
51:45 les droits qui s'en suivent, qui ne sont là que parce qu'il y avait d'abord des devoirs,
51:53 c'est ce dont nous devons nourrir nos jeunes générations.
51:59 Car c'est bien avec ce sens de l'idéal,
52:02 ancré au fondement de notre nation et de notre République,
52:06 que nous savons faire les plus grandes choses.
52:09 Cette opération Dragoon, à laquelle Churchill lui-même ne croyait pas,
52:12 était un acte de courage insensé.
52:14 50 000 alliés face à 80 000 allemands,
52:17 c'était plus qu'un risque, plus qu'une audace.
52:22 Et pourtant, pourtant ils l'ont fait.
52:26 Et pourtant nous sommes là, 79 ans plus tard,
52:31 réunis en leur nom pour honorer leur mémoire
52:34 avec celle de Moulin, de Manouchian, de Gauthier et de tant d'autres,
52:37 tournés vers notre histoire qu'ils nous ont léguées
52:40 et vers notre avenir qu'ils nous ont frayés.
52:45 Écrasant la barbarie nazie sous chacun de leurs pas,
52:48 réveillant la République à chacun de leurs cris,
52:51 rappelant la France à elle-même par toutes leurs actions.
52:56 C'est là la grande leçon de ce débarquement de Provence, l'espérance.
53:03 Au milieu des sirènes de l'étrange défaite,
53:06 des milliers d'hommes et de femmes se sont levés,
53:09 refusés ce qu'on leur présentait comme irrémédiable et comme perdu d'avance.
53:14 Les désespérés, les cassandres, les prophètes de division
53:17 ont vu leur inaction balayée par cette vague irrésistible de 1944
53:22 qui tirait sa force de l'Union si disparate que soient ses éléments
53:25 et qui nous porte encore presque huit décennies plus tard.
53:30 Cette résistance de l'intérieur, ces Français de Londres,
53:33 nos alliés et ces Français venus du bout du Pacifique
53:36 et du continent africain qui sont venus mourir sur notre sol,
53:40 sur une terre qu'ils n'avaient jamais croisée,
53:43 pour notre liberté et nos valeurs.
53:47 L'année prochaine sonnera les 80 ans de l'anniversaire du débarquement
53:52 et les commémorations seront plus belles que jamais,
53:55 à Bormes, je le sais, grâce à tous les projets que vous avez en réserve.
54:00 Mais nous aurons à bâtir un temps solennel, essentiel,
54:10 car la France toute entière vibrera au rythme des commémorations internationales.
54:14 Et vous le savez, vous pouvez compter sur moi
54:17 pour que ce débarquement de Provence, ô combien important,
54:21 ait toute sa place sur l'intégralité,
54:26 évidemment, de notre beau département du Var,
54:29 mais sur toute la côte.
54:31 La France toute entière vibrera et la mission
54:35 qui permet justement de préparer ces commémorations,
54:39 présidée par l'ambassadeur Philippe Etienne,
54:41 associera pleinement les collectivités comme la vôtre,
54:44 ainsi que l'ensemble des associations qui, depuis tant d'années,
54:48 se mobilisent avec courage, ardeur et dévouement.
54:53 Et là aussi, vous saurez toujours m'avoir à vos côtés.
54:57 Alors je voudrais vous remercier, tous autant que vous êtes
55:00 membres d'associations mémorielles ou patriotiques,
55:03 borméennes et borméens, de ce chemin de mémoire
55:06 que vous défrichez chaque année,
55:08 et où nous allons entraîner toute la France
55:10 jusqu'à l'été 2024 et au printemps 2025.
55:15 Nous aurons, et ceci commencera dès la libération de la Corse
55:19 dans quelques semaines, un chemin
55:23 qui scandera les prochains mois notre vie nationale
55:27 et qui permettra pleinement de rendre hommage
55:30 à nos libérateurs, à ces héros que nous n'oublions pas
55:35 et dont vous avez rappelé, M. le maire,
55:37 à juste titre chacun des noms.
55:39 Mais n'oublions jamais, au-delà de ces jours,
55:42 la leçon de courage, d'engagement et de sens
55:45 qu'ils nous ont légués, car celle-ci nous oblige
55:49 et doit chaque jour nous inspirer.
55:52 Nous nous y retrouverons.
55:55 Vive la République et vive la France.
55:58 (Applaudissements)
56:16 J'ai envie d'entendre le discours du président de la République
56:19 qui va célébrer la libération de Bormes-les-Mimosas,
56:22 un exercice auquel il se prête chaque année.
56:25 On commence l'heure des pros avec mes invités
56:27 qui vont m'accompagner pendant une heure.
56:29 Geoffroy Lejeune, bonsoir.
56:30 - Bonsoir, Elodie.
56:31 - Directeur de la rédaction du JDD, Georges Fenech,
56:33 bonsoir. Consultant CNews et William Thay, bonsoir.
56:35 - Bonsoir.
56:36 - Politologue, on va juste débriefer rapidement
56:38 ce qu'a dit le chef de l'État.
56:40 Il a parlé de cette soif de liberté, d'idéalisme
56:43 qui se cherche parfois chez les jeunes,
56:45 en rappelant quand même que la liberté
56:47 est en mesure de renverser les interdits.
56:49 Une fois de plus, Geoffroy Lejeune,
56:51 on voit qu'il profite de ces commémorations
56:53 pour faire passer quelques messages.
56:54 Ça a toujours été le cas dans ses discours,
56:56 justement, de faire passer quelques petits messages
56:58 un peu subliminaux.
56:59 - Oui, il y a un petit message pour les manifestants
57:01 de Sainte-Soline et pour les soulèvements de la terre.
57:03 Moi, il y a une autre phrase qui m'a marquée
57:05 dans ce discours, c'est quand il fait écho,