Face à l'Info Été (Émission du 17/07/2023)

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Tous les soirs et pendant tout l'été, les chroniqueurs de #FacealinfoEte débattent de l'actualité du jour de 19h à 20h

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00:00 Bonsoir à tous, bienvenue dans Face à l'Info, je suis ravie de vous retrouver cette semaine pour votre rendez-vous et avec moi aujourd'hui pour m'accompagner Céline Pina, bonsoir.
00:09 Bonsoir.
00:10 Et Céïs, je l'attends six sous, bonsoir.
00:11 Bonsoir Élodie.
00:12 Journaliste à Causeur et Raphaël Stainville, bonsoir.
00:14 Bonsoir.
00:15 Rédacteur en chef de Valeurs Actuelles et Jean-Sébastien Ferjou qui va nous rejoindre dans un instant.
00:19 Tout de suite c'est le point sur l'actualité avec Félicité Kindoki.
00:26 Suspension du permis rendu automatique et obligatoire en cas de conduite sous emprise de stupéfiants, c'est ce qu'a annoncé Elisabeth Borne cet après-midi lors d'un comité interministériel.
00:36 Le gouvernement sera intraitable.
00:38 Désormais, huit points de permis seront supprimés contre six actuellement, a précisé le ministre de l'Intérieur.
00:44 Par ailleurs, la qualification d'homicide routier remplacera dans certains cas l'homicide volontaire.
00:51 Monique Olivier, l'ex-épouse du tueur en série Michel Fourniret, sera jugée devant la cour d'assises des Hauts-de-Seine à partir du 27 novembre pour complicité dans l'enlèvement d'Estelle Mouzin, il y a vingt ans.
01:01 L'accusée comparaîtra également pour son rôle dans l'enlèvement, le meurtre et le viol de Marie-Angèle Domesse en 1988 et de Joanna Parish en 1990.
01:10 Le procès devrait durer au moins trois semaines.
01:13 En Grèce, un homme suspecté d'être à l'origine de l'incendie de forêt de Kouvaras, à l'est d'Athènes, vient d'être arrêté par la police.
01:21 Cet après-midi, 1 200 enfants, alors en colonie de vacances, ainsi qu'un centre équestre près de la station Balnéaire de l'Outraki, ont dû être évacués de toute urgence.
01:30 Au sommaire de Face à l'Info ce lundi.
01:35 D'abord, le président du CRIF a accusé ce dimanche Jean-Luc Mélenchon de se compromettre loin du pacte républicain et d'être l'allié du Rassemblement National.
01:44 Retour Jean-Luc Mélenchon l'accuse lui-même d'être d'extrême droite.
01:47 On en parlera avec Jean-Sébastien Ferjou comment comprendre cette sortie du leader de la France insoumise.
01:54 Autre sujet, le 14 juillet était-il si calme que ça ?
01:58 En tout cas, c'est ce qu'inventait le gouvernement.
02:00 On va mettre en perspective avec Raphaël Stainville les chiffres de la délinquance en France et on va la comparer avec celles de nos voisins européens.
02:07 Avec Céline Pina ensuite on reviendra sur une nomination qui fait déjà polémique, celle de l'américaine Fiona Scott-Morton.
02:14 En septembre prochain, elle va entrer en fonction au sein de la Commission européenne en tant que chef économiste de la Direction Générale de la Concurrence.
02:21 Même la ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, a demandé à Bruxelles de reconsidérer son choix.
02:26 Autre sujet, il n'y aura pas de nouveau rapatriement de femmes djihadistes de Syrie.
02:31 Le dernier vol a eu lieu début juillet mais la raison n'est pas politique.
02:34 C'est parce qu'en fait il n'y a plus de volontaires pour rentrer en France.
02:38 On en parlera avec Jonathan Cixous et puis on terminera par la stratégie de Sandrine Rousseau, la reine de la petite phrase qui crée la polémique.
02:46 Est-ce qu'elle est prête à tout pour créer une prise de conscience ?
02:49 Est-ce que c'est la bonne stratégie ? On en parlera avec Jean-Sébastien Ferjou.
02:53 [Générique]
03:05 Jean-Sébastien, on commence avec vous dans un tweet publié ce dimanche.
03:08 Jean-Luc Mélenchon a suscité une polémique en supposant que le Conseil représentatif des institutions juives de France
03:14 pourrait s'inscrire dans un schéma de pensée d'extrême droite.
03:17 D'abord, pour ceux qui n'ont pas suivi le détail des échanges, est-ce que vous pouvez nous rappeler le déroulé des faits, Jean-Sébastien ?
03:22 Oui, exactement. Il y avait Jonathan Harfi, qui est le président du Conseil représentatif des institutions juives de France,
03:30 qui faisait un discours ce dimanche à l'occasion de la journée de mémoire au juste,
03:35 la journée nationale à la mémoire des victimes de crimes racistes et antisémites.
03:40 On sait aussi que c'est le 16 et 17 juillet, la commémoration de la tristement célèbre rafle du Veldiv.
03:47 Et donc, qu'a-t-il dit Jonathan Harfi ?
03:50 Il a considéré que Jean-Luc Mélenchon se compromettait loin du pacte républicain.
03:57 Et au-delà de la personne de Jean-Luc Mélenchon, il a pointé du doigt les responsabilités de la France insoumise dans une certaine dérive idéologique.
04:05 Et donc, pourquoi a-t-il dit ça, finalement ?
04:10 Parce que Jean-Luc Mélenchon ne cesse de pointer lui-même du doigt une espèce de jonction de faits entre la droite,
04:18 le centre d'ailleurs, ou la majorité présidentielle, et l'extrême droite.
04:23 Et c'est à ça que réagissait Jonathan Harfi. En réalité, ça ne lui est pas venu comme ça, comme une illimination.
04:29 Samedi soir, Jean-Luc Mélenchon avait publié un énième papier qualifiant justement cette jonction de faits,
04:35 et finalement, en voyant tout ce qui n'est pas les insoumis, ou tout ce qui n'est pas la nups a minima, à l'extrême droite.
04:41 Forcément, cette vision-là a pu heurter le président Ducriff,
04:46 parce que c'est une forme de relativisme absolu, de ne pas savoir distinguer, y compris dans les histoires idéologiques des uns et des autres.
04:54 Et donc, qu'est-ce que Jean-Luc Mélenchon, lui, a répondu ?
04:57 Il a fait un premier tweet, dans lequel il disait
04:59 "Le président Ducriff utilise la cérémonie à la mémoire des victimes de la rafle des Juifs par la police française pour me prendre à partie.
05:06 Abject. L'extrême droite n'a plus de limites."
05:09 Et donc, qu'a-t-il fait là ? Il a renvoyé Lecriff à l'extrême droite,
05:14 ce qui est totalement absurde quand on connaît évidemment l'histoire Ducriff,
05:18 qui a été créée justement en 1943 dans la Résistance.
05:21 Le discours que prononçait Jonathan Harfi justement rendait hommage à tous ces Français
05:25 qui avaient eu le courage de s'opposer à la fois au régime de Vichy, à la police française,
05:30 comme à l'occupant allemand.
05:33 Et donc, renvoyer Lecriff à l'extrême droite, ça n'a strictement aucun sens,
05:37 ni en termes d'histoire, ni en termes d'engagement idéologique,
05:39 puisque Lecriff a toujours été très actif dans la dénonciation de l'antisémitisme en France,
05:45 y compris dans la dénonciation de l'antisémitisme d'extrême droite,
05:48 même si ces dernières années, il y a pu y avoir une évolution de ce point de vue-là,
05:52 avec l'ancien président Ducriff, pour le coup, constatant malgré tout une évolution,
05:56 notamment de Marine Le Pen sur ces sujets.
05:59 Ce qui a généré un deuxième tweet de Jean-Luc Mélenchon,
06:01 qui en substance a dit la même chose, il a quand même retiré le qualificatif "extrême droite".
06:06 Et au-delà Ducriff, qui a réagi d'abord à ce tweet de Jean-Luc Mélenchon
06:10 et quelles lignes de fracture politique on peut y voir ?
06:13 Un peu tout le monde, finalement.
06:15 Alors, si on regarde la majorité présidentielle, la condamnée,
06:18 la condamnée très fermement, Aurore Berger, par exemple,
06:22 en soulignant à quel point ça n'avait aucun sens de traiter le crif d'extrême droite
06:27 pour toutes les raisons que je vous exposais plus tôt.
06:30 Globalement, toutes les voix de droite l'ont fait.
06:33 Le Rassemblement national l'a fait.
06:34 Laure Lavalette, vous savez, la députée Laure Lavalette, l'a fait.
06:37 Caroline Parmentier aussi.
06:39 Éric Zemmour, lui, a également mis en cause ce tweet de Jean-Luc Mélenchon
06:44 en disant qu'il ne s'agissait pas d'un dérapage, mais bien d'une stratégie.
06:47 À savoir, devenir le candidat des musulmans coûte que coûte,
06:50 quitte à flatter sans cesse l'antisémitisme des banlieues,
06:53 quitte à justifier sans réserve les émeutes,
06:55 quitte à qualifier d'extrême droite tout ce qui n'est pas d'extrême gauche.
06:59 Donc là, il parle, lui, vraiment d'une stratégie.
07:01 Et c'est vrai qu'on peut se poser la question des raisons
07:03 pour lesquelles Jean-Luc Mélenchon revient aussi souvent sur des allusions antisémites.
07:09 À gauche, il y a des gens qui ont condamné très clairement.
07:11 Par exemple, Valérie Rabault, la députée socialiste Valérie Rabault,
07:16 Carole Delga, la présidente socialiste de la région Occitanie,
07:20 qui a des ambitions présidentielles pour 2027, parce que ça n'est pas neutre.
07:24 On voit bien que dans la nups, il y a eu des attitudes différentes.
07:28 Olivier Faure, lui, était plus mesuré en considérant qu'il était absurde
07:31 de traiter le crif d'extrême droite, mais finalement, en essayant de ménager
07:36 la chèvre et le chou, ce qui n'est pas un grand signe de courage politique,
07:40 me semble-t-il, en la matière.
07:42 Et on voit bien là que, de fait, il y a des questions de stratégie électorale
07:46 qui s'affichent chez les uns et chez les autres.
07:48 Et puis, bien sûr, chez les insoumis, on a soutenu, en tout cas,
07:51 ceux qui se sont exprimés, on soutenu sans réserve le leader maximo,
07:55 Jean-Luc Mélenchon.
07:56 Et en quoi on peut considérer que cette réaction de Jean-Luc Mélenchon
07:59 s'inscrit dans une tradition idéologique de l'extrême gauche ?
08:02 Déjà, Jean-Luc Mélenchon lui-même, il n'en est pas à son coup d'essai.
08:05 Souvenez-vous, quand Jérémie Corbine, qui était le dirigeant du Parti travailliste,
08:08 l'équivalent du Parti socialiste finalement, au Royaume-Uni,
08:12 qu'il a perdu la direction du parti à cause de son antisémitisme,
08:17 ou parce que, plus exactement, il n'avait pas été suffisamment vigilant
08:20 sur l'infiltration de personnalités clairement antisémites au sein des travaillistes,
08:25 à ce moment-là, Jean-Luc Mélenchon avait dénoncé l'influence des Juifs,
08:28 avait mis en cause l'équivalent du cris britannique,
08:31 avait parlé des réseaux du Likoud,
08:33 donc le Likoud, c'est le parti de droite israélien,
08:36 avait mis en cause le grand rabbin du Royaume-Uni,
08:41 et puis il avait eu des déclarations quand même assez étonnantes.
08:44 Je vous les lis pour ne pas commettre d'erreur,
08:46 parce que ce ne serait pas très naturel de dire des choses pareilles.
08:48 "Retraite à point, Europe allemande et néolibéralisme,
08:51 "capitalisme vert, génuflexion devant les oukazes arrogants
08:55 "des militants communitaristes du CRIF,
08:58 "non et non signifie non."
09:01 Donc là encore, on voit un Jean-Luc Mélenchon qui suggère que le CRIF,
09:04 en quelque sorte, tirerait les ficelles de la vie politique française,
09:10 comme il suggérait que les institutions juives britanniques le faisaient.
09:14 Au Royaume-Uni, c'est un grand classique de l'antisémitisme,
09:18 il est impossible de le soutenir autrement.
09:20 La France insoumise peut revendiquer le monopole des discours antiracistes
09:23 et de la lutte contre l'antisémitisme, ça ne changera rien.
09:26 Et d'ailleurs, la France insoumise, bien souvent,
09:28 comme quand je disais que ça s'inscrit quand même à la fois
09:30 dans une tradition récente et ancienne,
09:32 et je vais y venir dans un instant, parce que le président du CRIF
09:34 avait mis en cause aussi une déclaration de la députée Ersilia Soudé,
09:38 qui à l'Assemblée nationale préside le groupe de lutte
09:41 notamment contre l'antisémitisme, et qu'avait-elle dit
09:45 en parlant de l'avocat franco-palestinien Salah Amouri ?
09:48 Elle avait parlé de "déportation vers Israël".
09:51 On peut éventuellement contester le fait que cet homme
09:56 soit ce que les Israéliens en considèrent.
09:59 Il a été condamné, il faut le rappeler, pour tentative d'assassinat
10:02 du grand rabbin d'Israël, condamné à sept ans de prison en Israël.
10:06 On peut contester éventuellement, bref, mais employer le mot de "déportation"
10:10 est quand même tout sauf neutre.
10:12 Je pense que Mme Soudé, ça ne peut pas lui échapper.
10:15 Ça s'inscrit justement, comme je vous le disais,
10:17 dans une tradition historique, mais qui remonte à il y a très longtemps.
10:20 Souvent, les premiers socialistes étaient justement
10:23 s'inscrivés dans une filiation antisémite.
10:27 Il y a eu Bruno Bauer, qui était par ailleurs plutôt critiqué par Marx,
10:31 mais un philosophe qui disait que les Juifs ne pourraient s'émanciper
10:34 sur le plan politique qu'à compter du jour où ils s'émanciperaient
10:37 eux-mêmes de leur religion.
10:39 Et là, ça me fait penser à autre chose.
10:41 Un propos de Jean-Luc Mélenchon sur Éric Zemmour,
10:43 où il avait considéré que c'était le fait qu'Éric Zemmour soit juif
10:46 qui le menait à avoir le positionnement politique qu'il avait,
10:49 puisque les Juifs voulaient à tout prix préserver leur identité.
10:54 Ce qui n'est pas une proposition neutre, là encore,
10:57 parce qu'il y a différentes manières d'imaginer l'influence
10:59 que peuvent avoir les trajectoires des uns et des autres.
11:02 Mais la manière dont Jean-Luc Mélenchon l'avait mis en avant
11:04 était tout sauf neutre, me semble-t-il.
11:06 Il y a eu après cette fameuse phrase, vous savez,
11:08 qui dit que l'antisémitisme est le socialisme des imbéciles.
11:10 Alors on l'a parfois attribué à un homme politique allemand
11:12 qui s'appelle Auguste Bebel, d'autres l'ont attribué à Karl Marx.
11:16 Mais qu'est-ce qu'il y a derrière cette phrase-là ?
11:18 Il y a l'idée que justement, finalement, si on s'adresse à des gens
11:22 qui ont peu d'éducation, on peut jouer sur la corde de l'antisémitisme
11:26 parce que l'idée que les Juifs, c'est l'argent,
11:28 l'idée que les Juifs, c'est le pouvoir, l'idée que les Juifs,
11:30 c'est le complot, l'idée que les Juifs, c'est la domination,
11:32 c'est finalement toutes ces puissances qui s'opposeraient au peuple,
11:36 c'est un levier sur lequel on peut jouer.
11:38 Et c'est exactement ce qu'a fait Staline en se souvenant,
11:41 justement, de cette fameuse phrase sur, et c'était en tout cas
11:44 la thèse développée par l'historien Léo Strauss.
11:48 Et puis après, il y a eu une évolution, mais cela dit,
11:51 c'était aussi Proudhon ou Fourier, qui, parmi les premiers hommes de gauche
11:57 radicaux, comme on dirait, qui aussi s'inscrivaient dans cet antisémitisme.
12:01 Fourier, par exemple, proposait, préconisait de revenir sur l'émancipation
12:04 des Juifs qui avait été décidée par la Révolution.
12:08 Jules Gued avait appelé à enfermer les Rothschild dans la prison Mazas à Paris.
12:14 Et la gauche, ce n'est finalement qu'au moment de l'affaire Dreyfus
12:16 qu'elle a basculé. Dans un temps, au moment de l'affaire Dreyfus,
12:18 la gauche avait considéré que c'était des déchirements entre élites,
12:21 qu'il ne fallait pas trop s'en occuper. Et puis, il y a eu,
12:24 chacun s'en souvient, le fameux J'accuse. Et à ce moment-là,
12:27 la gauche, effectivement, s'est mise à lutter contre l'antisémitisme,
12:30 laissant l'antisémitisme en quelque sorte comme terrain de jeu néfaste
12:35 à l'extrême droite, ce qui a caractérisé l'essentiel de l'histoire du XXe siècle.
12:39 Mais finalement, avec l'existant d'Israël, l'extrême gauche y est revenue.
12:43 Et c'est exactement sur cette corde-là que joue Jean-Luc Mélenchon,
12:46 puisqu'on voit bien que l'existant d'Israël, l'importation du conflit israélo-palestinien
12:50 en France est faite à la fois dans des visées électoralistes,
12:53 et tout simplement aussi parce que ça correspond à une vision du monde
12:57 comme s'il s'agissait d'un classique, en quelque sorte, problème colonial.
13:02 Et donc, toutes ces choses-là, elles sont loin d'être neutres,
13:04 parce qu'encore une fois, la France insoumise donne des leçons de morale
13:07 au reste du monde. Moi, il me semble que la chose à en retenir,
13:10 c'est que le relativisme absolu considérait que tout est extrême droite,
13:13 sans être capable de distinguer justement les trajectoires,
13:16 les idéologies des uns et des autres.
13:18 C'est exactement ce qui contribue à faire le jeu de ceux
13:22 qui cherchent à renoncer à la démocratie ou qui voudraient imposer une idéologie
13:26 au détriment de tous les autres, ce qui est évidemment l'inverse de la démocratie libérale.
13:29 Une petite réaction rapide, chacun, Céline Pina, sur justement cette passe d'arme
13:34 et ses propos de Jean-Luc Mélenchon.
13:36 Ce qui est très intéressant, c'est que normalement, les marqueurs de l'extrême droite,
13:40 c'est l'antisémitisme, c'est la violence politique.
13:44 On estime que prendre le pouvoir ne passe pas forcément par les urnes.
13:47 C'est effectivement le racisme.
13:51 Et quand vous regardez ce que portent aujourd'hui Jean-Luc Mélenchon et la LFI,
13:55 il y a une dérive antisémite, il y a l'acceptation de la violence politique,
13:59 voire même la revendication.
14:01 Et il y a un faux antiracisme qui enferme tout le monde dans sa couleur de peau.
14:06 Un véritable racisme anti-blanc, des dénonciations, une déformation de l'histoire
14:12 pour servir un discours idéologique.
14:14 Bref, quand vous alignez tous ces items les uns derrière les autres,
14:18 c'est la définition de l'extrême droite.
14:20 Donc c'est très troublant ce qui est en train de se passer sous nos yeux.
14:24 Et de voir que la gauche républicaine se tait, c'est carrément scandaleux.
14:29 J'ai l'impression que vous voyez réagir.
14:31 Oui, c'était exactement ce que j'allais ajouter.
14:34 C'est le silence de la gauche, alors même qu'ils sont des alliés objectifs à l'Assemblée dans la NUPES.
14:39 C'est de voir à quel point tout le monde se couche devant Jean-Luc Mélenchon,
14:42 devant ses outrances, devant la dangerosité de ses propos.
14:45 C'est exactement tous les avatars de l'extrême droite qu'on retrouve à travers la France insoumise.
14:50 Ce n'est pas l'indifférence, mais avec la complicité, avec le silence complice de toute la gauche.
14:55 Et la complicité active de beaucoup d'écolos aussi.
14:58 On va maintenant parler chiffres avec vous Raphaël Stainville,
15:01 notamment avec les chiffres officiels d'Eurostad et du Conseil de l'Europe
15:04 qui couvrent tous les pays de l'Union Européenne.
15:06 La délinquance et la criminalité sont plus élevés en France que dans les autres pays de l'Union Européenne.
15:11 Vous me direz que c'est une surprise pour personne,
15:13 quoique certains, je les entends déjà, pourraient les remettre en cause.
15:18 Il y a toujours cette fâcheuse inclinaison française à vouloir minimiser le désastre de l'ensauvagement,
15:26 à rester dans une sorte de déni comme les yeux à demi ouvert ou à demi fermé, c'est selon.
15:32 Alors un exemple si vous voulez bien Elodie, pour justement revenir sur les signes de cette violence
15:39 et la manière dont le pouvoir aujourd'hui a tendance trop souvent à les minimiser,
15:44 à euphémiser cette réalité statistique d'abord.
15:48 Alors c'est pour ça que je voulais revenir sur les événements de la nuit du 13 au 14 juillet,
15:52 du 14 au 15 juillet et la manière dont le pouvoir, l'exécutif a pu communiquer.
15:57 Alors Emmanuel Macron, tout le monde s'en souvient, a félicité la première ministre, son gouvernement
16:01 et plus particulièrement le ministre de l'Intérieur.
16:04 Le calme a régné a-t-il dit, les 13 et 14 juillet ont été plus calmes que l'an passé.
16:10 Alors c'est factuellement vrai.
16:12 Mais peut-on parler de calme comme le chef de l'État,
16:15 quand il y a eu 96 personnes interpellées dans la nuit du 13 au 14,
16:18 255 véhicules incendiés contre 423 l'an dernier,
16:23 alors soit certes une baisse de 40%, mais il y a encore 7 policiers et sapeurs-pompiers blessés
16:29 contre 21 en 2022.
16:32 Ce calme, en vérité, il est tout relatif.
16:36 Il faut d'abord consentir à le regarder ce calme.
16:39 Il est pour beaucoup, et notamment pour les premières victimes,
16:42 ceux qui ont eu leurs véhicules incendiés, qui ont pu être agressés,
16:46 il est d'abord insupportable que l'on puisse parler de calme
16:50 pour tous ceux qui ont dû subir ces violences et ces dégradations.
16:53 Ce que je veux dire par là, c'est que les chiffres ne suffisent pas à traduire la réalité.
16:59 Il existe des biais.
17:00 On peut se réjouir que les violences aient été moindres cette année que l'an passé,
17:05 mais c'est sans compter sur le fait que les émeutes urbaines ont précédé la fête nationale,
17:10 c'est sans compter encore sur le fait que 130 000 policiers et gendarmes avaient été mobilisés.
17:14 J'ajouterais aussi, c'est sans compter sur le fait qu'un certain nombre de municipalités,
17:18 parmi les plus touchées par les émeutes, avaient pris les devants
17:21 et avaient finalement préféré annuler ces feux d'artifice que de fêter la fête nationale.
17:28 Et donc, tout cela nous dit une chose, c'est qu'il faut pouvoir mettre ces chiffres en perspective.
17:34 Et qu'en est-il justement des chiffres de la délinquance et de la criminalité en France ?
17:38 Est-ce que la France est plus affectée par les violences que ses voisins européens ?
17:42 Vous le savez peut-être, depuis 2014, le ministère de l'Intérieur s'est doté d'un outil statistique,
17:47 d'un service statistique, le SSMSI, dirigé par une inspectrice de l'INSEE,
17:54 et composé de gendarmes et de policiers qui font remonter absolument tous les chiffres de la délinquance
17:59 pour dresser une cartographie très précise des différents faits de délinquance.
18:05 Et alors, tous les ans, en janvier, est publié ce tableau qui est révisé généralement à l'automne, en septembre,
18:13 avec un certain nombre de chiffres qui sont consolidés.
18:17 Alors en janvier 2023, selon ce service, la quasi-totalité des indicateurs de la délinquance enregistrée
18:24 était en hausse en 2022 par rapport à l'année précédente.
18:27 Quelques chiffres, 8% de micides en plus en 2022 par rapport à 2021,
18:32 15% en plus pour les coups et blessures volontaires sur les personnes de 15 ans ou plus,
18:38 ce qui représente quand même 353 000 victimes au bas mot.
18:43 Mais à ce tableau déjà sinistre s'ajoute une donnée plus inquiétante encore.
18:47 Lorsque l'on compare la France aux autres pays européens,
18:51 les chiffres montrent que la France s'illustre par son taux de criminalité et de délinquance.
18:55 Et là, je tiens à souligner tout le mérite du travail de Pierre Buig,
18:59 professeur à l'université de Toulouse et ancien conseiller économique à la Commission européenne,
19:06 qui est allé extraire toutes les données d'Eurostat et du Conseil de l'Europe
19:10 pour les mettre en perspective avec les autres chiffres des pays européens.
19:15 Justement, que disent ces chiffres ? Qu'est-ce qu'ils montrent ?
19:18 Selon les données d'Eurostat, la France est le pays où il y a le plus en nombre absolu d'homicides en 2020.
19:25 Alors, un chiffre, 879 homicides en France en 2020 contre 719 en Allemagne,
19:32 298 en Espagne et 285 en Italie.
19:36 Mais si on ramène ces chiffres absolus à la population totale de ces pays,
19:42 la France apparaît encore davantage comme plus violente que ses voisins européens.
19:48 À titre de comparaison, ça fait 12,9 homicides par million d'habitants en France
19:55 contre 8,7 homicides par million d'habitants en Allemagne et 6,3 en Espagne.
20:00 Et quant à l'Italie, vous savez, ce pays bien connu pour sa mafia,
20:04 c'est 4,9 homicides par million d'habitants en Italie.
20:09 Donc, tout ce travail, il a été publié en fin de semaine dernière dans le FIARO,
20:14 dans une tribune que j'invite tout le monde à lire.
20:17 Et encore une fois, notons que si les homicides sont définis
20:20 par le fait de tuer intentionnellement une personne,
20:23 ce taux d'homicide en France est sous-évalué,
20:26 car les agressions menant à la mort ne sont pas comptabilisées comme homicides,
20:31 contrairement à l'Allemagne ou à l'Espagne.
20:34 Si on s'affranchit de ces homicides et qu'on regarde l'ITEM
20:41 concernant la sécurité des biens et des personnes, c'est la même chose.
20:44 On a vu que l'Italie était le pays le plus mal placé en matière de vols de voitures
20:49 en l'éventualité de la pandémie de Covid-19,
20:52 en l'occurrence en 2016-2018, avant la crise du Covid.
20:56 La France était le deuxième pays le plus mal placé des 27 pays de l'Union européenne
21:01 en matière de vols qualifiés, le troisième pays le plus mal classé
21:05 en matière de vols de voitures.
21:07 Les crises successives, des gilets jaunes, des retraites
21:10 pillées en cinq jours, devraient contribuer à dégrader encore le classement de la France.
21:15 À la vue de ce sinistre bilan, et alors qu'il reste des politiques
21:19 pour contester la décivilisation, pour reprendre les mots du chef de l'État,
21:23 plusieurs conclusions devraient s'imposer à elles-mêmes.
21:26 Bien sûr, il faut une réponse sécuritaire.
21:29 Et encore une fois, si on s'en réfère aux statistiques européennes,
21:34 la France est moins bien dotée qu'un certain nombre de pays européens.
21:41 Il faut une augmentation des moyens humains pour la police.
21:46 Il faut une réponse pénale, bien sûr, d'autant que la France a un taux d'incarcération
21:53 en dessous de la moyenne européenne.
21:55 Mais à toutes ces réponses pénales et sécuritaires,
22:00 elles seraient absolument vaines, ça ne serait que mettre un pansement sur une jambe de bois,
22:05 si on ne se penche pas, encore une fois, sur la cause qui a précipité
22:10 ou aggravé une situation déjà préoccupante en France.
22:12 Et notamment, c'est pour ça que je voulais le souligner, sur le facteur lié à l'immigration.
22:19 Là encore, les chiffres bruts sont souvent instrumentalisés.
22:24 Souvenez-vous, pendant les émeutes, c'était Gérald Darmanin qui nous disait
22:27 qu'il n'y avait que 10% des interpellés qui étaient étrangers.
22:31 C'était encore François Hollande qui se refusait à faire le lien entre l'immigration et ses émeutes,
22:38 quand, il y a encore quelques années, dans le secret de son palais présidentiel,
22:43 il confiait à nos confrères du Monde, Gérard Davé et David Lhomme,
22:46 qu'il y avait un risque de partition en France.
22:48 Donc moi, j'ai une solution toute simple pour nos politiques,
22:51 qui voudraient s'affranchir et qui voudraient regarder vraiment l'arriété en France,
22:55 c'est de se demander si un jour, on osait avoir des statistiques ethniques
23:01 pour prendre peut-être les vraies mesures qui s'imposent.
23:04 Justement sur ces chiffres, Jonathan Cixous, sur la manière de les interpréter,
23:08 évidemment, on a d'un côté le gouvernement qui nous a dit que tout est très calme,
23:11 et quand on compare avec les chiffres notamment pour la soirée du 13 ou 14 juillet,
23:14 ce n'est pas non plus une nuit calme pour les forces de l'ordre qui sont sur le terrain.
23:17 Pour le moins, effectivement, les chiffres, on sait bien qu'on peut leur faire dire ce qu'on veut.
23:21 Le gouvernement nous a montré les chiffres de l'année précédente pour nous montrer
23:25 qu'il y avait eu moins de voitures brûlées, moins d'agressions de policiers et autres,
23:29 mais ça ne sert strictement à rien, puisqu'on sait que sur le terrain,
23:33 il y a de toute façon une violence qui, lorsqu'elle ne s'exprime pas,
23:36 est latente et n'attend qu'une n'importe quel prétexte pour exploser.
23:42 Ensuite, on a aussi affaire à des responsables politiques,
23:45 je pense à Gérald Darmanin en disant cela,
23:47 qui peut être capable de vous affirmer le contraire de ce que vous voyez.
23:51 Souvenez-vous du Stade de France.
23:52 Du Stade de France et les supporters anglais.
23:54 Céline Pina, effectivement, sur ces chiffres,
23:56 est-ce que les Français croient encore à ces chiffres, Raphaël ?
23:59 Effectivement, vous nous montrez bien comment, quand on les compare par exemple,
24:02 on voit bien quand même que ces chiffres ne sont pas glorieux pour nous, malheureusement.
24:05 En fait, ils y croient de moins en moins, mais c'est un vrai problème,
24:08 parce que ça signifie aussi que derrière, vous croyez de moins en moins à la parole politique.
24:13 Or, le chef, c'est celui dont la principale mission est d'amener un groupe d'hommes d'un point à un autre.
24:19 Il n'est pas là pour penser, ce n'est pas forcément le plus grand intellectuel du monde,
24:23 mais ce qu'il doit faire, c'est inspirer confiance pour qu'on le suive et qu'on agisse ensemble.
24:27 Si cette parole est complètement démonétisée,
24:30 si au lieu de transcrire le réel en action, elle donne l'impression de nier la réalité,
24:38 alors à ce moment-là, vous rendez les gens fous, vous leur faites peur,
24:42 et surtout, ils ne se sentent absolument plus protégés et surtout incapables d'agir sur ce qui est devant eux.
24:48 Donc, à tous les points de vue, vous tirez une balle dans le pied et vous tirez une balle dans le pied de votre pays.
24:54 C'est encore un pays à un pied.
24:56 Mais ce qui est en train de se passer, c'est qu'on abîme de cette manière-là la démocratie
25:03 quand on casse le lien entre le représentant et le citoyen, et c'est exactement ce à quoi on assiste.
25:09 On marque une pause dans Face à l'Info et on se retrouve dans quelques minutes.
25:13 On parlera notamment avec vous, Céline Pina, d'une nomination à la Commission européenne qui fait polémique.
25:18 A tout de suite.
25:19 De retour pour la deuxième partie de Face à l'Info et cette fois avec vous, Céline Pina.
25:27 Vous avez relevé un bel humanisme de la part de la classe politique française
25:31 contre l'annonce d'une nomination au sein de la Commission européenne.
25:34 Qu'est-ce qui a tant agacé nos élus, Céline ?
25:36 Oui, alors l'unanimité en France, il faut quand même reconnaître que c'est relativement rare.
25:40 Donc quand vous avez de Jordane Bardella à Manon Aubry, en passant par Raphaël Glucksmann
25:46 et en faisant un petit détour par Nathalie Loiseau,
25:48 tous les élus européens qui tiennent à peu près le même discours vous tendez l'oreille
25:53 parce que visiblement il se passe quelque chose.
25:55 Alors pourquoi ils sont si énervés ? Ils sont énervés à cause de Fiona Scott-Morton.
26:00 Qui est Fiona Scott-Morton ?
26:02 C'est la future chef économiste de la Direction générale de la concurrence
26:07 au sein de la Commission européenne.
26:09 Un poste dont vous vous doutez bien prestigieux, un poste de pouvoir.
26:14 Et pourtant, ça ne passe pas.
26:18 Mais pourquoi ? Elle n'est pas compétente ?
26:20 Alors ce n'est pas du tout sa compétence qui est en cause.
26:22 Au contraire, la dame a un CV dont nous rêverions tous.
26:26 Elle a fait ses études au MIT.
26:28 Elle est enseignante depuis 24 ans à Yale.
26:31 Elle connaît tout le gratin des États-Unis.
26:34 Elle en fait d'ailleurs partie.
26:36 Elle a été chief economiste.
26:38 Alors là, vous allez vous régaler si vous voulez voir quelqu'un qui massacre de l'anglais.
26:41 C'est maintenant.
26:42 Tous vos complexes vont disparaître.
26:44 Chief economiste de la division antitrust du Department of Justice.
26:49 Très bien. 20 sur 20.
26:51 Et où elle était chargée notamment de faire appliquer la loi de la concurrence
26:56 et où des gens perfides ont remarqué que les GAFAM qu'elle conseillait,
27:01 elle ne les a pas tellement attaquées.
27:03 Les autres, si.
27:04 Donc c'est une dame qui sait faire la part des choses
27:06 et qui sait respecter ses vrais amis.
27:09 Ce qui pose question, en fait, ce n'est pas du tout sa compétence.
27:12 En revanche, c'est sa nationalité car Fiona Scott Morton,
27:16 comme vous l'avez compris, est américaine.
27:18 Et donc, en quoi est-ce dérangeant ?
27:20 C'est dérangeant parce que, je ne sais pas si vous avez remarqué,
27:23 mais les États-Unis sont quand même moins crétins que l'Union européenne.
27:27 Et quand il s'agit de mettre en scène leur puissance politique,
27:32 ils ont tout à fait compris que cette puissance politique
27:34 passait aussi par la puissance économique.
27:36 Que vient d'annoncer l'administration Biden ?
27:39 Elle vient d'annoncer en fait 430 milliards mis à disposition de l'économie américaine
27:44 sur un plan d'investissement et de subvention des industries.
27:48 Et ce qu'essaie de faire l'Amérique, c'est aussi de capter les industries européennes
27:53 en leur disant "Viens des chez nous, non seulement nous allons vous aider,
27:56 mais en plus on va vous aider ensuite à l'exportation".
27:59 Et que se passe-t-il en Europe ?
28:01 Ah ben en Europe, on n'a pas du tout compris ça.
28:03 En Europe, on organise en interne notre propre concurrence,
28:06 on tue les champions nationaux et on évite qu'il naisse des champions internationaux,
28:12 ce qui nous met complètement sous sujétion américaine.
28:16 Et vous comprenez bien que mettre finalement entre les mains d'une américaine
28:21 la politique qui nous affaiblit en termes de puissance
28:25 et qui nuit à l'indépendance de l'Europe, ne pouvait pas passer.
28:30 Donc au lieu de favoriser nos entreprises, nous nous installons une américaine
28:34 pour qu'elle vieille bien à ceux que l'on continue à se tirer des balles dans le pied.
28:38 C'est miraculeux quand même.
28:40 Et quels sont les reproches qui lui sont adressés,
28:42 qui sont adressés à la Commission européenne ?
28:44 Alors, il y a des gros et des petits reproches.
28:46 On va commencer par les petits, le diable est, paraît-il, dans les détails.
28:49 Donc pour commencer, la nomination est un peu passée en force
28:53 et on avait omis d'indiquer que Mme Fiona Scott-Morton était américaine,
28:59 ce qui fait que certains ont pensé que c'était une irlandaise.
29:01 Il paraît que toutes les irlandaises s'appellent Fiona, je n'ai pas vérifié.
29:05 Peut-être toutes.
29:07 Toutes, sans exception.
29:09 C'était une justification que j'ai trouvée assez amusante
29:11 d'une des personnes qui a participé à la commission de recrutement
29:14 en disant "Oh, Fiona, c'est pas irlandais ? Non, c'est américain."
29:18 En l'occurrence, pour cette Fiona-là.
29:20 Il y a aussi un petit problème, c'est que le deuxième discours,
29:23 c'est d'expliquer qu'en Europe, on est tellement crétins
29:25 qu'on n'a pas de bons économistes, en tout cas pas d'assez bons
29:27 pour les placer à ce poste-là.
29:29 C'est quand même un petit peu gênant.
29:31 Enfin, dernière chose, cette nomination indique quand même
29:35 une certaine vassalisation vis-à-vis des États-Unis.
29:37 Pourquoi ?
29:39 Parce qu'aujourd'hui, les nouveaux enjeux en économie,
29:42 c'est bien Internet et le marché numérique,
29:44 et surtout le contrôle économique des données.
29:48 Or, non seulement Saddam a un petit conflit d'intérêt,
29:52 puisqu'ayant travaillé pour Apple et Amazon,
29:54 elle devra se déporter quand ces questions,
29:57 qui sont des questions cruciales aujourd'hui pour l'économie européenne,
30:00 vont arriver.
30:01 Elle devra se déporter pendant deux ans, elle est nommée pour trois.
30:04 C'est d'autres idées de l'intérêt du recrutement.
30:06 Mais surtout, cela montre à quel point le sujet régalien
30:10 en termes de numérique est un impensé de l'Europe,
30:13 et surtout à quel point l'Europe peut confondre
30:17 consommateurs et acteurs.
30:20 Ce qui est intéressant, je vais vous le lire,
30:22 parce que pour le coup, ça a été déclaré tel quel,
30:25 c'est en fait la façon dont Fiona Scott Morton a été défendue.
30:30 On a dit qu'elle était la meilleure techniquement.
30:32 On a dit aussi qu'elle pourrait contrôler un marché
30:36 qui était défavorable aux consommateurs.
30:38 Ce qui est intéressant, c'est de voir l'Union européenne
30:41 ne jamais se poser la question de sa place,
30:44 elle en tant qu'acteur sur ce marché,
30:46 de défendre simplement des consommateurs
30:49 et d'évacuer complètement la notion de citoyen,
30:52 et derrière, la notion finalement d'État
30:55 et de souveraineté et d'indépendance.
30:57 Mais après tout, l'ancien Bagnard Vidocq n'a-t-il pas été un excellent policier ?
31:01 Est-ce qu'elle est, Fiona Scott Morton,
31:03 la maladie ou le symptôme de ce que vous démontrez ?
31:05 Alors c'est vrai que si on change un petit peu la donne,
31:08 et qu'à la place de Vidocq, on dit "Imaginez donc le renard pour regarder le poulailler",
31:12 là on commence à tendre un petit peu plus l'oreille.
31:14 Et en fait, votre deuxième question met le doigt sur le nœud du problème.
31:18 La vraie question finalement, ce n'est pas Mme Scott Morton,
31:23 la vraie question c'est comment est-ce que nous, Européens,
31:27 on peut être aveugle aux tensions qu'il y a aujourd'hui à l'international
31:32 pour la domination économique,
31:35 au point finalement de remettre la connaissance du marché
31:39 et du fonctionnement de l'Union Européenne entre les mains d'une Américaine.
31:43 Le principal problème, ça n'est pas elle, c'est la bêtise de nos représentants
31:48 qui n'ont absolument pas l'idée de défendre ce que pourrait être la puissance européenne,
31:54 et c'est d'autant plus aberrant qu'on est dans un monde qui est en train de changer,
31:58 dans lequel on voit la violence monter.
32:01 Et si vous avez tenu l'oreille, je ne sais pas si vous avez entendu le dernier petit discours de Trump,
32:05 Trump nous dit "Vous savez, si jamais je suis élue, on arrêtera la guerre en Ukraine".
32:10 Ce qu'on comprend très bien c'est "On laissera la Russie, ça y est l'Ukraine en petits bois".
32:15 Et bien quand vous confiez une partie de votre économie et votre défense à ce genre d'alliés
32:21 et que vous entendez ce genre de discours, il faudrait peut-être se mettre à réfléchir en termes de puissance
32:26 et se dire "L'autonomie et l'indépendance, ça peut aussi avoir ses avantages".
32:30 Mais la France n'est pas la seule à soulever ce type de questions.
32:33 Non, en fait, pour le coup, on n'est pas aussi isolé que d'habitude.
32:38 En fait, il y a quatre parties qui ont pris le parti de la France
32:42 et qui ont envoyé une lettre à la Commission pour dire qu'ils trouvaient cette nomination absolument scandaleuse.
32:47 C'est Renew, le parti de droite, le PPE, S&D et Les Verts.
32:53 Les Verts nous ont un peu trahi puisque le vice-président Vert est celui qui a expliqué
32:59 à quel point il était important pour les consommateurs que l'on nomme Mme Scott-Morton.
33:04 Mais ça n'est pas très étonnant dans la mesure où finalement l'Europe n'a jamais voulu se penser en termes politiques.
33:13 Elle s'est toujours vue, et les gens qui la représentent se sont toujours vues, comme des techniciens.
33:18 Ce n'est pas étonnant, quand vous êtes technicien, vous générez de la norme et de la réglementation
33:23 et vous le faites dans un milieu extrêmement stable.
33:25 Quand vous êtes politique, vous avancez dans la brume, dans un milieu instable,
33:30 vous prenez votre risque et surtout vous vous méfiez y compris de vos alliés.
33:36 Là, ce qu'on voit, c'est que malheureusement, à la tête de l'Union européenne,
33:40 au lieu d'avoir des gens capables de construire une véritable politique de puissance
33:44 qui ferait que tous les États à l'intérieur se réunissent et protègent,
33:50 ne serait-ce que par les liens qu'ils ont tissés entre eux,
33:53 à la place de ça, on a des gens qui organisent leur propre affaiblissement
33:59 au nom d'une idéologie dogmatique de marché, auquel même les États-Unis ont renoncé,
34:05 car eux ne se gênent pas pour soutenir de toutes leurs puissances politiques et militaires,
34:11 leurs intérêts économiques.
34:13 Il faudrait vraiment que l'Europe apprenne à le faire également.
34:15 Mais donc cette nomination, cette polémique parle plus finalement de l'Europe
34:19 que de sa propre personne, à Fiona Scott-Morton.
34:21 Exactement. En fait, cette nomination montre à quel point,
34:25 à l'inverse des Américains qui sont résilients, qui sont capables de saisir l'opportunité,
34:31 qui voient le moment présent et qui jouent avec la réalité,
34:35 l'Europe, elle, est dogmatique au point d'organiser son propre affaiblissement
34:39 et derrière, sa propre suggestion.
34:41 Jean-Sébastien Ferjou, justement, sur cette nomination,
34:44 on voit qu'elle en dit long, ce n'est pas juste une nomination,
34:47 on peut comprendre la polémique qu'il y a derrière, comme le disait Céline,
34:49 sur l'affaiblissement de l'Union Européenne et sur le fait de laisser penser
34:52 qu'il n'y a pas assez de personnes bonnes chez nous pour aller les chercher aux États-Unis.
34:55 Moi, je crois qu'il est très bon que cette question-là soit mise sur la table
34:58 et qu'on se préoccupe de cette nomination-là.
35:01 En revanche, sans préoccuper et la questionner, ça ne veut pas forcément dire considérer
35:05 qu'elle est mauvaise par nature.
35:07 Elle n'a pas été nommée directrice générale de la concurrence,
35:09 elle n'a pas été nommée, a fortiori, commissaire à la concurrence.
35:12 Ça, on sait que c'est Margrethe Vestaguen qui est, depuis déjà, pas mal d'années.
35:17 Parce qu'il y a des Français qui sont présents aux États-Unis,
35:19 Esther Duflo, qui a eu même le prix Nobel, me semble bien,
35:24 a été conseillère de Barack Obama.
35:26 Toutes les équipes d'intelligence artificielle aux États-Unis,
35:29 malheureusement, les cerveaux français partent aux États-Unis.
35:31 Donc, le fait de recruter une économiste américaine, ça ne me pose pas de problème en soi,
35:35 même s'il y a la question des conflits d'intérêt que posait Céline.
35:37 Mais là où je rejoins totalement Céline, c'est dans ce qu'elle disait
35:40 sur le fait que c'est une question, en réalité, politique.
35:43 Le sujet, ça n'est pas en soi, Madame, je ne sais plus quel est son nom,
35:47 - Jona, donc. - Il a un prénom irlandais.
35:50 - Pardon, j'ai oublié le prénom d'origine, ou qui sonne irlandais.
35:54 Ce n'est pas cette nomination-là, en particulier,
35:57 c'est le fait qu'on puisse raisonnablement imaginer qu'au-dessus d'elle,
36:01 parce qu'elle soit économiste, elle peut toujours donner des conseils,
36:03 ce n'est pas le sujet, tant qu'il y a une autorité politique
36:05 qui prend une décision dessus.
36:07 La vraie question, c'est effectivement la vision que l'Europe a de la concurrence,
36:10 la vision que l'Europe a de sa souveraineté, et les renoncements qu'il y a eu.
36:13 Et dernier point, je voyais aujourd'hui, ce qui montre qu'il y a certainement
36:16 bien des raisons de se poser la question, Jean-Marie Cavada,
36:19 vous vous souvenez, Jean-Marie Cavada, qui a été député européen,
36:22 modem, pendant pas mal d'années, et qui disait,
36:26 il faut poser très clairement cette question-là sous la table,
36:29 il suggérait même, il ne le dit pas, mais il dit,
36:32 il faut que les journalistes travaillent sur cette question-là,
36:34 parce qu'on peut se demander si ça n'est pas autre chose que de la naïveté,
36:39 potentiellement quelque chose qui aurait pu s'avoir avec...
36:43 - Une forme de trahison ? - Non, de corruption, je crois.
36:46 Il n'affirme rien, il n'affirme strictement rien,
36:49 et donc oui, cette question-là, il est très important
36:52 qu'elle soit dans le débat public, et qu'on regarde effectivement
36:55 qui est cette personne, et surtout, pourquoi ceux qui l'ont nommée
36:58 l'ont nommée, et qu'est-ce qui compte, qu'est-ce qu'ils en attendent vraiment, eux ?
37:01 Parce qu'en soi, quand on recrute une Américaine, c'est pas un problème,
37:04 des talents étrangers peuvent venir en Europe, de la même manière
37:07 que beaucoup de talents d'ailleurs européens finissent aux Etats-Unis.
37:11 - Raphaël Saint-Viche, tu pourrais-tu pour terminer ?
37:13 - Oui, Jean-Sébastien a évoqué la corruption, on avait découvert
37:16 il y a peu de temps que l'Europe était sous influence du Qatar, du Maroc,
37:21 alors je pense qu'effectivement, on est en droit de se poser la question,
37:25 soit de la vassalisation, soit de manière plus concrète,
37:29 avec une influence qui irait au-delà de la simple vassalisation
37:33 de l'Europe par les Etats-Unis, avec cette nomination.
37:36 Parce que ce qui est assez dérangeant, c'est que pour le Maroc et le Qatar,
37:41 c'était des sous de table, là le pire, c'est que c'est assumé au grand jour
37:46 par la présidente de la Commission européenne elle-même,
37:49 qui est toute contente de cette nomination et d'en appeler aux Etats-Unis.
37:53 Donc moi je trouve que cette question de la corruption,
37:55 elle est essentielle et on devrait s'y intéresser de près.
37:58 - Il y a même un paradoxe qui est intéressant, c'est qu'en fait,
38:00 cette dame n'aura pas à trahir sa fonction, il suffira qu'elle applique
38:04 strictement les directives stupides de la Commission européenne
38:08 pour qu'elle réussisse à affaiblir l'Europe, elle n'aura même pas besoin de la trahir.
38:12 - Mais cela dit, juste un mot. - C'est intéressant, mais rarement.
38:15 - Sur la concurrence, ne sous-estimons pas d'un des bénéfices de la concurrence,
38:18 c'est Thomas Philippon, l'économiste, qui montrait que justement
38:20 la concurrence a apporté beaucoup de pouvoir d'achat aux Européens,
38:23 par exemple un abonnement à un smartphone, un abonnement Internet
38:26 coûte beaucoup moins cher en Europe, grâce au droit de la concurrence
38:29 que ça ne coûte aux Etats-Unis, et c'est une vraie réussite européenne.
38:33 Le droit international de la concurrence se construit sur le droit européen
38:36 et quand vous êtes celui qui édicte la norme, vous avez l'influence intellectuelle.
38:40 Donc il ne faut pas confondre les enjeux de souveraineté et le fait que l'Europe
38:44 soit parfois naïve, parfois peut-être dans une forme de corruption,
38:48 en tout cas que certains responsables aient pu l'être, avec le principe
38:52 de la concurrence lui-même, qui, rappelons-le, nous a apporté beaucoup de biens,
38:56 parce que les Européens de ce point de vue-là sont ceux qui en ont retiré le plus de bénéfices.
38:59 - On va changer de sujet avec vous, Jonathan Sixou.
39:02 Il n'y aura donc pas de nouveau rapatriement de femmes djihadistes de Syrie.
39:05 Le dernier vol a eu lieu début juillet, mais contrairement à ce qu'on peut penser,
39:09 la raison n'est pas politique, c'est qu'en fait, il n'y a plus de volontaires pour rentrer en France.
39:13 - Il n'y a plus de candidates, on ignore leur nombre exact.
39:16 On estime qu'elles sont environ 80 femmes qui sont tellement radicalisées
39:21 qu'elles préfèrent rester dans les campements en Syrie,
39:24 des campements qu'on nous décrit comme épouvantables,
39:27 où selon de nombreuses associations même, les conditions de vie sont incompatibles
39:31 avec le respect de la dignité humaine.
39:34 C'est dire si ces femmes-là sont déterminées, motivées et pleines d'extrémisme.
39:39 Au quai d'Orsay, on s'inquiète moyennement.
39:42 On dit que la France ne peut pas rapatrier de toute façon des personnes
39:45 qui résident à l'étranger et encore moins leurs enfants sans leur consentement.
39:50 Mais d'autres sources diplomatiques n'excluent pas néanmoins qu'à l'avenir,
39:54 on pourrait ramener sur le territoire national quelques femmes
39:58 sur des bases individuelles et de façon ciblée, dit-on.
40:02 A titre personnel, j'ai du mal à comprendre cette obstination absolue
40:06 à vouloir ramener ces personnes.
40:09 Début juillet, vous l'avez dit, le 4, c'était la quatrième opération de ce type,
40:15 opération de rapatriement.
40:17 D'ailleurs, je pense que pour être précis, il ne faudrait pas parler de rapatriement.
40:21 Je me souviens que c'était Sonia Mabrouk qui, la première,
40:23 avait fait ce distinguo sur l'antenne il y a un an à peu près,
40:28 en disant qu'on ne pouvait pas rapatrier quelqu'un dans sa patrie
40:33 dès lors qu'il ne reconnaît plus cette patrie.
40:35 On sait que ces femmes, en arrivant en Syrie,
40:38 elles ont brûlé leur pièce d'identité française, leur passeport, leur carte d'identité,
40:42 ne se considérant plus comme françaises.
40:45 Elles sont allées d'elles-mêmes volontairement en Syrie
40:49 pour faire le djihad, la guerre sainte, la guerre contre nous,
40:53 contre ce que nous sommes et ce que nous représentons.
40:55 Disons plutôt qu'on les ramène en France.
40:58 Cette ultime opération, début juillet,
41:01 a fait revenir 10 femmes et 25 enfants.
41:03 Et comme pour les précédentes opérations,
41:06 les mineurs ont été confiés aux services sociaux à l'enfance
41:09 et les adultes ont été remis aux autorités judiciaires.
41:13 Depuis que ces opérations existent,
41:15 il y aura eu 169 enfants et 57 femmes rapatriées.
41:20 Ce nombre important d'enfants, il peut s'expliquer par le fait que,
41:23 jusqu'à l'été dernier, la France avait opté pour le rapatriement
41:26 ciblé d'enfants, mais des enfants orphelins ou des mineurs,
41:30 pour lesquels les mères avaient accepté de renoncer à leur autorité parentale,
41:33 à leurs droits parentaux, mais face, vous vous en souvenez peut-être,
41:36 au concert de condamnations et d'indignation des associations
41:40 et des instances internationales, comme européennes d'ailleurs,
41:43 les autorités françaises avaient commencé à procéder,
41:46 c'était il y a tout juste un an, en juillet dernier,
41:49 à la première opération collective de genre.
41:51 - Et justement, cette politique du cas par cas, est-ce qu'elle était justifiée ?
41:55 - Et comment ? Et comment ? Parce qu'en faisant revenir collectivement
41:58 tant d'individus, on ne fait pas trop dans le détail, si vous me permettez,
42:03 on ne fait pas revenir que des personnes motivées à reprendre une vie normale,
42:07 puisque de toute façon, aucun de ces individus ne peut reprendre une vie normale.
42:11 Ces femmes sont parties en zone de guerre irako-syrienne
42:14 pour appuyer leur mari, des terroristes, des soldats de l'État islamique,
42:19 un bon nombre d'entre elles se sont d'ailleurs elles-mêmes livrées à des exactions.
42:23 Les témoignages sont nombreux pour parler de femmes qui ont tué,
42:27 qui ont torturé, qui ont décapité.
42:29 Il y a de très nombreux témoignages de cela, de toutes ces atrocités.
42:33 Et puis, il y en a eu d'autres aussi, de femmes,
42:35 toutes n'ont pas pris véritablement part au combat.
42:38 Elles sont parties pour servir de ventre, pardon, il n'y a pas d'autre mot pour cela,
42:43 parce qu'elles partaient pour enfanter et pour accoucher de futurs petits djihadistes.
42:49 C'était le programme complet, si je puis dire, de l'État islamique.
42:54 C'est donc ce type de femmes que l'on fait revenir en France, parce qu'elles sont françaises.
42:58 Et on les appelle d'ailleurs des revenantes.
43:02 Certaines d'entre elles ont déjà été jugées aux assises,
43:05 mais instruire un tel procès est de toute façon terriblement difficile,
43:08 parce qu'on a besoin de preuves, de preuves tangibles.
43:11 Or, la scène de crime, là, elle est à quelques milliers de kilomètres de la salle d'audience.
43:16 Donc, il est très dur, et en plus dans un pays en guerre, qui a été en guerre,
43:20 donc difficile de pouvoir récolter quelques preuves réelles que ce soit.
43:25 Et puis, il y a une autre question aussi qui se pose, que ces femmes ultra radicales,
43:29 certes, quand elles vont passer devant la justice,
43:31 il n'y a aucun doute qu'elles vont être jugées et condamnées.
43:35 Mais elles sont jeunes, voire très jeunes.
43:37 Pour certaines, quand elles sortiront de prison, elles seront toujours jeunes.
43:40 Mais elles auront payé leur dette envers la société.
43:44 Le résultat, donc, ce sera quoi ?
43:46 Et on sait qu'en plus, la déradicalisation n'existe pas.
43:49 C'est un mythe, c'est un leurre total.
43:52 La conséquence, c'est quoi ?
43:54 C'est donc que quand elles sortiront, encore jeunes, elles seront en liberté.
43:58 Notre pays laissera en liberté des terroristes.
44:01 Et puis, la question des enfants, aussi.
44:03 Le cas des enfants, c'est peut-être ce qui est le plus préoccupant.
44:06 Un mineur qui est deux ans ou dix-sept ans, ce n'est pas la même chose.
44:09 Ces adolescents, pour la plupart d'entre eux, sont nés là-bas.
44:12 Ils ont donc tous grandi dans un pays en guerre, parmi les morts.
44:16 Ils ont assisté à des exécutions.
44:18 Quand ils n'en ont pas eux-mêmes perpétrées,
44:20 on sait qu'ils ont parfois, pour certains d'entre eux,
44:23 dû tuer de leurs mains sous les ordres de leurs parents ou d'autres adultes.
44:28 Autant dire qu'ils ont fait et vu des choses
44:31 que la plupart des autres petits Français n'ont ni vu ni fait.
44:35 On peut imaginer la difficulté que ça suscite,
44:39 qu'on peut avoir à oublier, s'il tentait qu'on pouvait oublier de telles choses.
44:44 Comment se construit la personnalité d'un enfant qui a vécu de telles choses ?
44:49 C'est un vrai défi, parce que c'est totalement inédit
44:51 pour les psy de notre pays qu'il les encadre.
44:54 Une difficulté aussi pour les familles d'accueil,
44:56 parce que certains sont dans des centres,
44:58 mais d'autres sont dans des familles d'accueil.
45:00 On voit d'ores et déjà que beaucoup de ces enfants,
45:02 il ne s'agit même pas de s'intégrer,
45:04 ils ne peuvent même pas s'adapter à la vie occidentale qu'on leur offre.
45:09 Nos structures d'accueil, elles,
45:11 elles sont comme notre doctrine d'encadrement.
45:14 Elles ne sont pas faites, elles ne sont pas pensées
45:17 pour encadrer de telles situations.
45:19 C'est peut-être ce qui explique d'ailleurs le silence de l'État.
45:22 Depuis quelques années que ces rapatriements ont lieu,
45:25 on n'entend rien, on ne nous parle pas de satisfaction ou quoi que ce soit.
45:29 C'est le silence total.
45:31 Et pour les plus jeunes de ces enfants,
45:34 c'est donc qu'ils sont placés aussi,
45:36 mais là aussi, l'inconnu pour eux est absolu.
45:38 En tout cas, votre tableau est plutôt pessimiste,
45:41 si je peux me permettre.
45:42 Il y a de quoi de l'être, Elodie.
45:44 Désolé de casser l'ambiance,
45:46 mais comment pourra-t-on faire de ces enfants de bons citoyens ?
45:50 La question, elle se pose, pourquoi ?
45:53 Parce que lorsqu'ils sauront,
45:55 ou lorsqu'ils, pour certains, pour les plus âgés,
45:57 ils le savent déjà,
45:58 que le pays dans lequel ils vivent, leur pays,
46:01 est celui qui a tué leur père et qui a mis leur mère en prison,
46:04 vous croyez qu'on se construit comment dans ces cas-là ?
46:07 Peut-on croire qu'ils feront allégeance aux lois et aux mœurs de ce pays ?
46:13 C'est difficile à croire.
46:14 Le plus probable, vraisemblablement, malheureusement,
46:17 c'est le risque de les voir grandir,
46:19 de voir grandir sous nos yeux une nouvelle génération radicalisée.
46:23 Il y en a une précédente qui est morte en Syrie
46:25 ou bien qui s'est exilée dans des pays amis.
46:28 Et la situation peut dégénérer.
46:30 Quand on voit, par exemple, dans quel état est l'enseignement scolaire,
46:33 quand on voit que la transmission des valeurs républicaines
46:35 est impossible dans de plus en plus de quartiers en France,
46:39 on se demande qui pourrait les sauver.
46:42 Ils vont se retrouver dans une nouvelle situation.
46:44 Ils vont être apatrides dans leur propre pays,
46:46 puisque de français, ils le sont de papier,
46:49 mais dans leur tête et dans leur cœur, c'est évidemment autre chose.
46:53 Un dernier point pour conclure.
46:55 Les récentes émeutes ont mis en avant que toute une jeunesse française
46:58 était en rupture totale, se construisait en rupture totale
47:02 avec l'État, une réelle sécession.
47:05 Une jeunesse qui se construit contre l'État,
47:07 contre ce que nous sommes,
47:08 comme dit Alain Finkielkraut dans Causeur ce mois-ci.
47:11 On a vu tant de bâtiments publics vandalisés,
47:13 tant de représentations de l'État,
47:15 des mairies, des écoles, des administrations.
47:17 Je ne parle même pas du personnel,
47:19 ces hommes et ces femmes, pompiers, policiers, gendarmes et autres
47:22 qui ont été pris pour cible,
47:23 tous ont été attaqués par des jeunes qui sont nés en France,
47:27 quasiment tous, qui ont grandi en France
47:30 et qui sont, pour la plupart d'entre eux,
47:32 qui ne sont pas dans le caniveau.
47:34 La question qui est légitime de se poser, c'est celle-ci.
47:39 De quoi seraient capables ces jeunes français,
47:42 eux nés en Syrie, sous la bannière de l'État islamique,
47:46 le jour où, à leur tour, ils voudraient se révolter contre la France ?
47:49 Raphaël Stainville, rapidement, c'est vrai que la question
47:52 du rapatriement de la justice est une chose,
47:54 mais comme le disait justement Joanne Trenc,
47:56 soit pour les enfants ou ces femmes qui sortiront,
47:58 on a l'impression que c'est un peu le déni total.
48:01 On ne s'occupe pas encore de cette question,
48:02 on ne se demande pas ce qu'on va faire de ces jeunes enfants
48:04 qui seront sur notre territoire.
48:06 Oui, mais il y a une raison à ça,
48:08 c'est que d'abord, pendant très longtemps,
48:09 la France s'est refusée à les faire revenir.
48:11 C'était même la doctrine,
48:13 et c'est sous la pression des familles,
48:14 de collectifs d'avocats
48:16 avec l'immense complicité de la CEDH,
48:19 que l'État français a été contraint
48:22 de revoir ses plans et les accueillir.
48:24 Et effectivement, vous avez raison,
48:26 aujourd'hui, c'est très compliqué pour les familles d'accueil
48:29 et les centres qui reçoivent ces jeunes.
48:32 C'est compliqué aussi pour ces femmes
48:34 qui terminent bien souvent en prison.
48:37 Et rien n'est prévu à ce jour
48:40 pour cette éventuelle sortie,
48:42 ce retour à la vie normale,
48:44 et ça a été très bien décrit par Jonathan.
48:47 Effectivement, ces Lyonceaux et ces femmes
48:50 qui ont été radicalisées et qui sont parties en Syrie
48:53 sont dans un état d'enfermement psychologique
48:56 et spirituel qui leur interdit
48:59 tout basculement à un retour à la vie normale.
49:02 On va parler d'un dernier thème avec vous,
49:04 Jean-Sébastien Ferjou, de Sandrine Rousseau,
49:06 qui dans un tweet publié le 13 juillet,
49:08 a affirmé qu'il faisait 60 degrés en Espagne.
49:11 Pourtant, selon les données météorologiques officielles,
49:13 il ne faisait que 45 degrés.
49:16 De quoi parlait-on avec la députée écologiste ?
49:19 Oui, donc Sandrine Rousseau, vous voyez,
49:22 a fait ce tweet-là à 60 degrés.
49:25 C'est effectivement particulièrement perturbant,
49:28 ça capte l'attention, sachant que la température
49:31 la plus haute jamais enregistrée sur Terre,
49:34 jusqu'au tweet de Sandrine Rousseau en tout cas,
49:37 c'était 56,7 degrés le 10 juillet 1913.
49:40 Autrement, il y a quelques années, en Californie,
49:43 il a fait 54,4, ou là, très récemment,
49:47 aujourd'hui, hier, en Chine, 52,2.
49:50 On voit que 60 degrés, c'est quand même vraiment extrême.
49:54 Elle ne l'a pas sortie de nulle part non plus, évidemment,
49:57 Madame Rousseau, elle a sorti des données
49:59 de l'Institut Copernicus, l'Observatoire européen Copernicus.
50:02 Les données officielles météorologiques, c'est 45 degrés.
50:05 C'était quoi ces 60 degrés ?
50:07 C'est la température au sol.
50:09 La température au sol, ce n'est pas la même chose
50:11 que la température de l'air.
50:13 Chacun peut concevoir que, par exemple,
50:15 un sol qui est en plein soleil, qui réfléchit la lumière,
50:19 va être beaucoup plus chaud qu'un sol qui, par exemple,
50:22 l'absorberait.
50:24 C'était de ça dont elle parlait.
50:26 Le problème, c'est qu'elle ne l'a pas précisé.
50:28 Elle ne l'a pas précisé dans son premier tweet.
50:30 Elle ne l'a pas véritablement précisé ensuite.
50:32 Elle s'est obstinée, parce qu'il y a évidemment
50:34 des gens qui l'ont questionnée ou qui l'ont mise en cause,
50:37 notamment des activistes du climat eux-mêmes,
50:39 un notamment qui s'appelait Bonpote et qui lui a fait remarquer.
50:42 Elle a assumé sa stratégie, renvoyant justement
50:45 un rendez-vous médiatique qui a fini par avoir lieu aujourd'hui.
50:48 D'autres l'ont fait aussi. Valérie Masson-Delmode,
50:51 la scientifique française qui fait partie du GIEC,
50:54 qui est physicienne, physicienne spécialiste du climat au CEA,
50:57 a expliqué de manière extrêmement posée
50:59 pourquoi ça n'était pas comparable,
51:02 même si vous imaginez bien que la physicienne en question
51:05 n'est évidemment pas du tout en cause,
51:07 ni le réchauffement climatique,
51:09 ni le fait qu'il se soit accéléré récemment,
51:11 puisqu'elle a même souligné que dans les latitudes moyennes,
51:14 c'est-à-dire en gros en France,
51:16 Bordeaux c'est 45°, donc à mi-chemin 45°,
51:19 donc à mi-chemin entre l'Équateur et le Pôle Nord,
51:22 la température moyenne a eu tendance ces dernières années
51:25 à augmenter deux fois plus vite que la moyenne
51:28 de l'augmentation des températures sur Terre.
51:31 Vous parliez justement du rendez-vous médiatique.
51:33 C'était ce matin, elle a expliqué avoir voulu ouvrir le débage,
51:36 la site, et assumer sa volonté de provoquer un effet "wake up"
51:40 pour que les gens se réveillent sur le réchauffement climatique,
51:43 malgré les critiques adressées par les scientifiques.
51:46 Est-ce que ce type de stratégie très alarmiste
51:48 peut fonctionner, Jean-Sébastien ?
51:50 Oui, "wake up", c'est réveiller,
51:53 c'est ce que souhaite faire Sandrine Ousso en choquant.
51:57 Elle considère par ailleurs qu'il est important de rappeler
52:00 que de telles températures sont dangereuses,
52:02 mais personne ne doute véritablement.
52:04 On le voit bien, il y a une canicule avec des températures
52:06 jusqu'à 48 degrés qui sont annoncées sur le sud de l'Europe.
52:09 Je ne suis pas certain que Sandrine Ousso ait besoin d'en rajouter
52:12 pour que ça change la perception qu'en monde est français,
52:15 d'autant qu'il y a quelque chose de dangereux,
52:17 je trouve, dans cette stratégie-là.
52:18 Quand vous commencez à jouer avec le réel,
52:20 si le réel n'existe plus, c'est ce qu'on a beaucoup répété,
52:23 reproché à Donald Trump.
52:25 Si vous considérez que seul compte l'idée
52:28 que les gens vont en retenir plus que la réalité elle-même,
52:31 là aussi, on est en train de s'éloigner du cadre de la démocratie
52:34 dont le débat est censé se faire sur des faits établis.
52:37 On ne peut pas être d'accord sur l'interprétation des faits.
52:40 On ne peut pas défendre l'idée de faits alternatifs
52:43 au motif que psychologiquement,
52:45 ils présenteraient un bénéfice politique.
52:47 Mais indépendamment de cette question de principe,
52:49 est-ce que ces faits alternatifs présentent un bénéfice politique
52:53 ou psychologique ?
52:55 Parce que c'est ça que cherche Sandrine Ousso,
52:57 c'est à intéresser les gens à la question du climat.
53:00 Malheureusement, beaucoup d'études montrent que non.
53:03 Il y a eu des études qui ont été faites
53:05 en matière de psychologie comportementale,
53:07 des études qui ont été faites en matière de communication,
53:09 des études en sciences politiques qui ont été faites
53:11 dans différents pays du monde, aux Etats-Unis, en Europe.
53:13 Eh bien, ça ne marche pas.
53:15 Ce registre de la peur, il existe à vrai dire,
53:17 souvenez-vous, enfin, souvenez-vous, non, pas vous, Elodie,
53:19 mais nous, vous en avez entendu parler,
53:21 l'horloge de l'apocalypse, l'horloge de la fin du monde
53:23 qui existe depuis 1947.
53:25 Cette horloge-là, on l'avait créée principalement
53:27 par risque d'apocalypse nucléaire.
53:29 On a intégré à cette horloge-là le risque climatique
53:32 au début du 21e siècle et effectivement,
53:35 l'horloge est plus proche de minuit qu'elle ne l'a jamais été.
53:38 On est au-dessus encore du niveau de 1953
53:41 qui avait été le summum du risque nucléaire en Europe.
53:44 Le problème, c'est que qu'est-ce que nous disent
53:46 les chercheurs, justement ?
53:47 Ils nous disent que la peur, le registre de la peur,
53:49 ça a tendance à générer le sentiment de la culpabilité
53:52 et que le sentiment de la culpabilité lui-même
53:54 n'est pas un sentiment qui amène à l'action.
53:56 C'est plutôt un sentiment qui va amener
53:58 à ce qu'on a appelé la fatigue,
54:01 la fatigue psychologique d'entendre toujours parler
54:05 de quelque chose.
54:07 C'est un enjeu tellement énorme que ça le dépersonnalise.
54:10 C'est ça qui a été enregistré dans différentes études
54:13 dont je vous parlais.
54:14 Derrière cette fatigue, ça a même généré
54:17 chez certains un sentiment qu'on a appelé d'éco-anxiété,
54:20 voire de dépression.
54:21 Le ministère britannique de la Santé
54:23 a demandé aux établissements scolaires du pays
54:25 de ne plus employer de discours apocalyptiques
54:28 vis-à-vis des enfants,
54:29 tant l'impact sur la santé mentale des enfants
54:32 et adolescents britanniques devenait inquiétant.
54:35 On voit bien que ce n'est pas juste le fait
54:38 de ne pas être d'accord comme ça,
54:39 en passant avec la stratégie de Sandrine Rousseau.
54:42 Non seulement elle n'est pas efficace,
54:44 mais elle affecte la santé même des gens.
54:46 Autre effet qui a été constaté,
54:48 quand vous tenez des discours apocalyptiques,
54:50 ça fait que les gens s'en retirent
54:52 parce qu'ils ont l'impression qu'il n'y a rien à faire.
54:54 Ça génère plutôt un sentiment d'impuissance
54:56 et en plus ça génère l'idée d'un risque
54:58 qui est totalement physique
54:59 et qui exclut finalement l'activité humaine,
55:03 y compris ce qu'on peut en faire.
55:04 Donc ça n'est même pas utile
55:06 pour aller dans le sens de l'adaptation.
55:08 L'adaptation ne veut pas du tout dire
55:10 qu'il faille renoncer à la lutte
55:11 contre les causes du réchauffement climatique lui-même
55:15 et à la lutte pour réduire les émissions.
55:17 Mais il ne faut pas non plus ne pas s'adapter
55:19 parce qu'à l'arrivée, il y aura plus de morts.
55:21 Si nous renonçons à nous adapter,
55:22 on le voit très vite.
55:23 Regardez la vitesse à laquelle c'est en train d'arriver.
55:25 Si on n'adapte pas les villes européennes,
55:27 si on n'adapte pas un certain nombre de comportements,
55:29 mais que ce soit vis-à-vis de la chaleur
55:31 ou vis-à-vis de risque de catastrophes naturelles,
55:33 là, ce sera grave.
55:35 Et c'est là où c'est dommageable la stratégie de Sandrine Rousseau.
55:38 Un autre psychologue, professeur de psychologie
55:41 spécialisé sur le développement du rame,
55:42 qui s'appelle Tobias Broch,
55:44 lui parle d'équilibre nécessaire
55:46 entre les émotions négatives et les émotions positives.
55:49 Il faut savoir aussi donner de l'espoir,
55:51 jouer uniquement sur les émotions négatives.
55:53 Ça ne marche pas.
55:54 François Gemmene, vous savez, l'activiste du climat,
55:57 dit exactement la même chose.
56:00 Et le problème, c'est que quand on regarde Extinction Rebellion,
56:03 vous savez qu'il justement tient un discours,
56:04 Extinction Rebellion, à sa création,
56:06 disait quasiment que le monde allait disparaître,
56:08 ou l'humanité, en tout cas, allait disparaître
56:10 d'ici l'année 2030.
56:11 Il y a des gens qui étaient présents au moment de la fondation
56:13 et qui disaient non, mais c'était juste une stratégie,
56:15 parce que scientifiquement, ça n'est pas du tout vrai.
56:17 Mais ce que veut Extinction Rebellion, vraiment,
56:19 c'est la fin du capitalisme.
56:20 C'était donc pour choquer les gens,
56:21 pour les faire renoncer à ce système-là.
56:24 On voit bien que ça n'a pas marché avec Extinction Rebellion,
56:26 qui a d'ailleurs choisi pour un certain nombre de membres
56:28 de s'autodissoudre.
56:29 Mais on peut se poser la question
56:30 si ça n'est pas la stratégie réelle de Sandrine Rousseau.
56:33 Pas tellement qu'elle se préoccupe de savoir
56:34 s'il fait 60 ou 45 degrés en Espagne,
56:37 mais qu'elle se préoccupe en réalité de vouloir mettre à bas
56:39 un système politique et économique qui lui déplaît.
56:42 Merci beaucoup à tous les quatre.
56:43 Merci à vous de nous avoir suivis tout de suite.
56:45 La suite des débats sur CNews,
56:46 vous retrouvez l'heure des pro 2
56:47 avec Eliott Deval et ses invités.
56:50 merci à bientôt !

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