Retrouvez toutes les chroniques de Maïa Mazaurette dans « Jusqu'ici tout va bien » sur France Inter et sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/
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00:00 Dans cette chronique, Maïa, tu vas nous parler de l'impact du revenu sur la sexualité.
00:08 A quoi ça ressemble la sexualité des pauvres, pour le dire simplement ?
00:11 Souvent, le sexe est décrit comme un loisir gratuit.
00:14 Et bien, c'est quand même pas complètement vrai.
00:16 Ça commence dès la recherche de partenaires sexuels.
00:19 Pour les femmes, il faut calculer tout ce qu'on appelle la charge sexuelle, frais
00:22 esthétiques, lingerie, épilation, contraception, bref, tout ce qui se passe avant la rencontre.
00:26 De leur côté, les hommes vont plutôt prendre en charge les dépenses qui se font pendant
00:30 la rencontre.
00:31 Encore aujourd'hui, pour les deux tiers des Français, c'est l'homme qui doit sortir
00:35 sa carte bleue au restaurant.
00:36 Et ça aussi, ça coûte cher.
00:37 Il y a quelques années, un site avait calculé le coût moyen d'une sortie au restaurant
00:41 amoureux.
00:42 90 euros.
00:43 Alors, manifestement, il ne s'était pas allé au flunch.
00:44 Mais quand même, avec l'inflation, c'est sûr qu'aujourd'hui, c'est un vrai poids
00:47 de faire des rencontres.
00:48 Le résultat, on peut le lire dans les enquêtes de sociologie, plus on appartient aux catégories
00:52 aisées, plus les gens sont en couple.
00:54 C'est quand même l'occasion de rappeler qu'il y a des choses romantiques et gratuites,
00:58 comme les parcs, certains musées et l'écoute de la radio de service public.
01:01 - Bon d'accord, mais là, tu nous parles de séduction.
01:03 Mais moi, je veux savoir ce qui se passe dans le lit des gens.
01:04 Est-ce que la pauvreté a un impact sur l'organisme ?
01:07 - Sur l'organisme aussi, j'imagine.
01:10 - Oui, ça a un impact.
01:13 Mais seulement pour les femmes.
01:14 Car peut-être, nous sommes vénérables, je ne sais pas.
01:16 Chez les femmes, l'argent fait jouir.
01:18 Et il y a un seuil précis à partir duquel ça se joue.
01:21 C'est quand leur salaire personnel atteint 3000 euros de revenus mensuels.
01:25 - C'est vrai ?
01:26 - Oui.
01:27 A partir de cette tranche de revenus, l'insatisfaction sexuelle est réduite de moitié.
01:30 - C'est hyper précis.
01:31 - Et ce n'est pas juste une question d'éducation.
01:32 Le niveau des diplômes ne joue pas.
01:33 C'est vraiment seulement les sous qu'on gagne.
01:35 Soit dit en passant, c'est pareil pour la vie amoureuse.
01:37 Quand une femme gagne plus de 3000 euros par mois, son couple se porte mieux.
01:41 - Je sens qu'une projette complètement d'arrivée, je suis d'accord avec vous.
01:45 - Sans doute parce qu'à partir de cette somme, on est moins dépendant de son conjoint.
01:49 Et donc une femme est plus en mesure d'imposer ses choix, négocier ses préférences.
01:52 Et au pire, si le conjoint est vraiment relou ou vraiment pas motivé, une femme riche peut
01:56 toujours s'acheter des sex toys.
01:58 Les canards vibrants ne sont pas plus performants quand ils sont plus chers, mais quand même,
02:01 il faut un minimum de budget.
02:02 - Est-ce que ça ne veut pas dire qu'il faut absolument être riche pour jouir ?
02:06 - Alors non, il ne faut pas forcément être riche pour jouir.
02:08 Déjà, il y a un petit biais.
02:09 Les plus riches, c'est souvent les plus âgés.
02:10 Donc les gens qui sont les plus expérimentés.
02:12 Et c'est plus facile d'avoir des orgasmes quand on connaît son corps.
02:15 Donc attention aux conclusions trop rapides.
02:17 Ensuite, toujours chez les femmes, les classes populaires tiennent une jolie petite revanche
02:21 du côté du désir.
02:23 Selon les grosses enquêtes officielles menées en France, les femmes cadres ont plus de soucis
02:27 de libido que les femmes employées.
02:29 Et il y a une sociologue, Rebecca Levy-Guilin, qui a enquêté là-dessus.
02:32 - Et quelle est la théorie ?
02:33 - En fait, ce qu'elle a découvert sur le terrain, c'est que les femmes des catégories
02:37 supérieures ont tendance à être coupées de leurs désirs.
02:39 Et c'est assez facile de comprendre pourquoi.
02:41 Depuis toutes petites, on les contrôle, on leur dit de faire attention à ce qu'elles
02:45 mangent, à comment elles tiennent, on leur dit de ne pas trop bouger, pas trop transpirer.
02:47 Elles sont encouragées à tout intellectualiser, mais pas forcément à tout ressentir.
02:51 Et forcément, après, elles prennent le pli.
02:53 Elles apprennent à refouler leurs envies, à mettre leur corps en mode avion pour ne
02:56 pas être trop dérangées.
02:57 Alors attention, je ne suis pas en train de dire que pour les femmes riches, toutes
02:59 est flinguée pour toujours.
03:00 Ce qui se passe, c'est que plus tard, dans leur trajectoire sexuelle, si elles ont envie,
03:05 elles vont passer par le féminisme ou par le développement personnel pour se reconnecter
03:09 à leur corps.
03:10 Et c'est en fait par ce mot que je voudrais terminer cette chronique.
03:12 Trajectoire.
03:13 Bien sûr qu'en sexualité, l'argent est important, comme l'origine sociale, l'orientation
03:18 sexuelle, l'apparence physique, tout ça.
03:19 Mais ce qui compte, c'est la trajectoire, qui va être influencée par plein de trucs
03:23 imprévisibles.
03:24 La chance, les rencontres, les surprises, et puis aussi les décisions personnelles.
03:27 Le sexe échappe encore un peu à l'économie.
03:30 Profitons-en.
03:31 - Merci Maya, on retrouve ta chronique en podcast sur le site de France Inter.