• il y a 9 mois
Avec Capucine Delattre.

Retrouvez "La question qui" sur France Inter et sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/burne-out

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😹
Amusant
Transcription
00:00 Et passion métro sur France Inter ! Introduite aujourd'hui par quelqu'un qui n'aime pas trop ça le métro.
00:04 *musique*
00:09 Non, non, j'ai pris le métro là, j'ai été obligée de prendre le métro, je me sens pas bien du tout.
00:13 C'est la grève des taxis.
00:15 C'est horrible le métro.
00:18 Vous l'avez déjà appris ? Il y a des gens horribles qu'on ne voit pas ailleurs.
00:22 Vous aurez reconnu peut-être la voix de Camille Cotin dans Connasse.
00:26 Bonjour Capucine Delattre.
00:27 Bonjour.
00:28 Vous êtes autrice, vous êtes éditrice et certains vous connaissent sur le réseau social X,
00:33 Twitter, sous le nom de Charly Medusa où vous vous présentez avec humour comme influenceuse RATP.
00:39 Vous avez donc une passion envahissante pour le métro, ça prend du temps dans votre vie
00:43 et on se rend compte qu'elle est partagée par beaucoup puisqu'une toute une communauté vous suit activement en ligne.
00:48 Est-ce que vous pouvez dater la naissance de cette passion contagieuse on dirait pour le métro ?
00:53 Alors je pense que j'ai toujours eu une espèce de fascination pour la chose déjà petite,
00:57 ça me travaillait vraiment beaucoup, le train sous la terre, il se passait quelque chose.
01:02 Mais je pense que là où tout a basculé c'est quand j'ai eu accès à un ordinateur et j'ai découvert Wikipédia.
01:07 Donc là il y a eu des sombres week-ends dont l'adolescence qui ont été complètement engloutis par le surf sur internet
01:13 pour comprendre toutes les informations sur le métro particulièrement.
01:16 Donc chaque article de chaque station.
01:19 Je suis quand même quelqu'un de très obsessionnelle de base.
01:21 Et ensuite je pense qu'il y a vraiment eu un dernier truc, c'était le fait d'avoir un passe Navigo
01:25 où là j'ai vraiment eu le sentiment que Paris m'appartenait.
01:28 J'étais la reine de la ville.
01:32 Ça veut dire qu'on peut vous poser n'importe quelle question sur le métro et vous connaissez, vous savez.
01:36 Franchement il y a des chances.
01:37 Chardon-Lagache ?
01:38 Ligne 10 ?
01:40 Je ne sais pas, je n'étais même pas sûre.
01:42 Elles ont essayé de me prendre en traite.
01:43 Mais vous n'avez pas grandi à Paris ?
01:45 Banlieue parisienne, après ailleurs, mais je me suis installée à Paris à 16 ans.
01:49 En tout cas cette passion n'est pas que théorique.
01:51 Par exemple l'année dernière, en 2023, vous avez passé une journée à arpenter toutes les lignes du métro parisien
01:56 pour tester toutes les moquettes de sièges.
01:58 Quels étaient les critères d'appréciation des moquettes sur ces sièges ?
02:02 Alors les critères étaient nombreux.
02:04 Mais vous avez pour point commun de n'être absolument en aucun cas objectif.
02:09 C'était du pur arbitraire et de l'affect.
02:13 Je lis un bout de ce périple que vous avez décrit sur X pour rendre compte du lyrisme que vous pouvez y mettre.
02:19 Ligne 11, certaines personnes de mauvaise foi feront remarquer que cette moquette est identique à celle de la ligne 7
02:25 si ce n'est qu'elle est davantage endommagée par le passage du temps.
02:28 C'est précisément ce qui fait sa beauté, la stabilité et la dignité.
02:32 Inspirant.
02:33 C'est aussi l'absurdité de votre quête qui vous anime quand même, soyons honnêtes.
02:37 Bien sûr.
02:38 En fait, il se trouve que dans mon cas, c'est tombé sur le métro.
02:41 Et c'est souvent un peu compliqué à justifier en soirée quand les gens me disent
02:44 "Pourquoi tu es zinzin au point de t'infliger des bouquins entiers sur l'histoire du métro de Boston ?"
02:49 Je ne sais pas.
02:50 Mais en fait, ce que je sais, c'est que je pense qu'on a beaucoup à gagner à s'intéresser à ces choses qu'on reçoit comme
02:57 des obligations du quotidien, des non-lieux, des non-moments, des non-endroits qui ne sont pas intéressants a priori.
03:05 Mais en fait, quand on commence à poser un regard curieux sur eux, sur ces éléments du paysage, de la ville, de la vie...
03:12 Sur l'infraordinaire, pourrait-on dire ?
03:14 Voilà, voilà.
03:16 Il se passe quelque chose qui rend quand même le quotidien vachement plus drôle.
03:20 Et qui rend les gens très heureux.
03:21 Parce que les gens qui vous ont suivi pendant ce périple, sur cette journée, étaient vraiment très à fond derrière vous.
03:27 Moi, je pensais globalement que ça allait intéresser deux personnes.
03:29 En fait, il y en avait 35 000.
03:30 Alors, beaucoup qui m'accusaient de ne rien avoir à faire de mon dimanche.
03:33 Ce qui n'était pas forcément un truc...
03:35 Tout à fait pourri.
03:36 Oui, j'ai passé un super dimanche.
03:38 Mais beaucoup aussi qui avaient plein, plein, plein de choses à dire et qui s'indignaient de certaines de mes remarques,
03:43 de certains de mes commentaires.
03:44 Et je trouve que ça dit quelque chose, notre rapport aussi au métro.
03:46 Juste en un mot, combien de temps ça vous a pris, de tout tester dans une même journée ?
03:51 4h30. Mais on n'a pas pu avoir accès à la ligne 9 qui était fermée pour travaux.
03:54 J'y pense souvent.
03:56 Quand même, on va parler un petit peu des sujets qui fâchent.
03:58 Je pense que c'est très important.
04:00 Je veux bien sûr parler des JO.
04:02 Est-ce qu'il y a une moquette en particulier qui vaut 4,99€ le trajet ?
04:05 Alors, j'en suis vraiment pas certaine.
04:07 Je pense que ce qui vaudrait un petit peu plus d'argent, c'est les lignes dont ont besoin pas mal de Franciliens.
04:13 Notamment inter-banlieueux.
04:15 Mais bon, c'est plus la priorité parce que maintenant il y a les JO.
04:17 La plus belle moquette quand même ?
04:19 C'est celle de la ligne 11 ?
04:21 Celle qui a vu passer le temps ? Celle qui est restée digne ?
04:23 La plus belle moquette, c'est celle du jour même.
04:27 C'est celle de l'instant présent.
04:29 C'est celle où on vit, où on respire, où on ressent.
04:31 Carpe diem de la moquette.
04:33 Alexandre Lacroix, il n'aime pas du tout le métro, votre voisin.
04:37 Comment est-ce que vous pouvez le convaincre de la beauté de cet endroit souterrain ?
04:39 Et vous l'avez dit, ce n'est pas que le métro parisien.
04:41 C'est le métro en général qui vous anime.
04:43 Oui, oui.
04:45 Je trouve qu'il y a plusieurs choses dans le métro qui sont assez belles quand on y pense.
04:49 C'est que, pour ma part, je n'ai jamais conduit un métro.
04:51 Et tout aussi passionnée que je suis, je ne suis pas non plus hyper calée sur la technicité de la chose.
04:57 Mais je fais confiance au métro pour m'emmener à l'endroit dont j'ai besoin.
05:01 Et au fond, on n'est jamais vraiment sûr.
05:03 Mais pourtant, on fait tous confiance.
05:05 On monte à telle station et on a confiance en le métro pour arriver à telle autre.
05:09 Pour venir ici, j'ai pris le métro.
05:11 C'était un trajet que je n'avais jamais fait.
05:13 Mais j'avais confiance en le métro pour m'emmener à tel endroit.
05:15 Et bien sûr, selon l'expérience vécue, on est à peu près certain que le métro va aller à l'endroit où il nous dit qu'il va aller.
05:21 Mais au fond, on n'en sait rien.
05:23 C'est un peu comme, est-ce que le jour va se lever demain ?
05:25 C'est le métro de Schrodinger en fait.
05:27 À chaque fois que vous montez dans un métro, vous ne savez pas.
05:29 Convaincu Alexandre Lacroix.
05:31 Est-ce que vous êtes convaincu Alexandre Lacroix ?
05:33 Non, mais comme je disais, après mes études,
05:35 je suis parti vivre à la campagne pendant 6 ans.
05:37 Et quand je suis revenu à Paris,
05:39 j'ai eu du mal à me réacclimater au milieu urbain.
05:43 Et ce qui m'a donné le plus de mal,
05:45 je suis revenu en 2005,
05:47 et l'interview de 2008,
05:49 je n'étais pas complètement guéri.
05:51 Ce qui m'a donné le plus de mal, c'est le métro.
05:53 Alors j'ai triché, je me suis mis à me déplacer en vélo.
05:55 Mais je suis attaché à cette idée qu'on peut trouver de la poésie dans le quotidien.
05:59 Moi, je donne deux pistes sur le métro.
06:01 Par exemple, avec mes enfants, on a le jeu des couleurs de siège.
06:03 De deviner quelle sera la couleur des sièges à la station suivante.
06:05 - Il y a une carte qui a été faite récemment,
06:07 qu'on peut trouver sur internet,
06:09 qui répertorie les couleurs de siège des stations de métro.
06:11 - Et un autre jeu un peu plus sioux,
06:13 mais ça c'est plutôt aux étudiants.
06:15 Alors oui, Capucine,
06:17 je l'ai eue en atelier d'écriture à Sciences Po, il y a longtemps.
06:19 - On ne le savait pas quand on a prévu cette rencontre.
06:21 - C'était un merveilleux genre de rencontre.
06:23 - Je ne pensais pas un jour me retrouver sur une radio nationale,
06:25 à convaincre mon ancien prof que le métro, c'est super.
06:27 - Mais quelle vie !
06:29 - Il faut croire en ses rêves, c'est tout ce que j'allais dire.
06:31 - Elle était très douée,
06:33 elle écrivait déjà,
06:35 et j'ai été très heureux de recevoir son premier roman un an plus tard.
06:37 Ce n'était pas dans cette année-là,
06:39 mais j'ai incité des étudiants,
06:41 dans certaines années,
06:43 à faire des poèmes métro.
06:45 Je ne suis pas si irréconciliable.
06:47 Un poème métro,
06:49 c'est entre deux stations, vous composez un verre.
06:51 Si vous êtes très très fort,
06:53 vous pouvez tenter l'Alexandrin,
06:55 sinon vous pouvez pratiquer le verre libre.
06:57 Et en fait, le titre du poème,
06:59 c'est la station de départ et la station d'arrivée.
07:01 Vous voyez, le jour.
07:03 Et comme ça, vous pouvez composer vos poèmes métro.
07:05 - Et ça se fait dans les tramways,
07:07 dans tout ce qui roule, et qui a des arrêts, bien sûr.
07:09 Et ne soyons pas trop RATP-centrés,
07:11 il y a des métros à Marseille,
07:13 à Rennes, à Lyon, il y a aussi des trains,
07:15 il y a des autocars, il y a des...
07:17 Votre quête de la moquette parfaite pour une assise,
07:19 va-t-elle se diversifier ?
07:21 Allez-vous voir ailleurs, Capucine Delap ?
07:23 - Absolument. A vrai dire, je suis un peu en plein dedans,
07:25 parce que je suis en train d'écrire un livre entier
07:27 sur la question du métro,
07:29 et pas que le métro parisien.
07:31 - Et pas que la moquette.
07:33 - Pas que la moquette, je confirme. J'ai un peu élargi mes horizons entre-temps.
07:35 - Tout ce qui est la barre du milieu, tout ça, c'est vraiment
07:37 une étude très concrète.
07:39 - Il y a le quai, le portillon,
07:41 beaucoup de choses à dire sur le tourniquet.
07:43 - Le ticket de métro.
07:45 - Mais c'est vrai que c'est très intéressant
07:47 ce côté où
07:49 toute ligne de métro, de transport,
07:51 quel qu'il soit, c'est quelque part une narration
07:53 de la ville, c'est une histoire.
07:55 Et puis, ça peut être à l'échelle d'une ville,
07:57 comment est-ce qu'elle a étendu son métro
07:59 de tel endroit à tel autre, mais aussi l'histoire
08:01 personnelle de nous qui prenons le métro.
08:03 Je pense que pour beaucoup, pour ceux
08:05 et celles qui vivent dans une ville où il y a un métro,
08:07 ils peuvent raconter l'histoire de leur vie
08:09 à travers certaines stations. Ça, c'est la station où je me suis fait larguer,
08:11 ça, c'est la station où j'ai croisé mon ami de l'université.
08:13 - C'est le début de l'auberge espagnole, un petit peu.
08:15 - Et c'est assez magique à explorer,
08:17 à toutes les échelles.
08:19 - Merci beaucoup, en tout cas, et au revoir, Capucine Delattre Poussel.
08:21 Et ceux qui veulent vous lire,
08:23 vous avez publié en 2023 un livre,
08:25 vous l'avez prédit, votre ancien professeur
08:27 Alexandre Lacroix, "Un monde plus sale que moi",
08:29 c'est aux éditions La Ville Brûle,
08:31 et vous ne parlez pas de métro dedans, mais de votre
08:33 entrée dans la vie amoureuse à l'ère de Me Too.
08:35 Et puis, vous nous avez confié
08:37 que vous travaillez sur un futur essai sur le métro,
08:39 ce sera aux éditions Alari. On a hâte,
08:41 et c'est comme vous, Alexandre Lacroix, qui êtes aussi chez Alari.
08:43 *Rires*
08:45 *Rire*

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