Invité de France Inter lundi, Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, annonce que des actions seront menées "toute la semaine et aussi longtemps qu'il sera nécessaire" pour faire entendre la colère des agriculteurs. Ils dénoncent des charges financières et des normes environnementales trop lourdes. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-lundi-22-janvier-2024-2088751
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00:00 Et avec Léa Salamé, nous recevons ce matin dans le Grand Entretien le Président de
00:04 la FNSEA, Premier Syndicat Agricole Français.
00:08 Vos questions et réactions au 01 45 24 7000 et sur l'application de France Inter.
00:15 Arnaud Rousseau, bonjour.
00:16 Bonjour.
00:17 Et bienvenue à ce micro.
00:18 En plus de la Présidence de la FNSEA, vous êtes producteur de Colza, Tournesol, Bétrave
00:23 et bien d'autres choses.
00:25 Et Sennemarne est Président non-exécutif du Conseil d'administration du groupe agro-industriel
00:32 Avril.
00:33 On va essayer de comprendre avec vous ce qui se passe vraiment dans le monde agricole,
00:38 à la fois en France et puis un peu partout en Europe.
00:40 Mais commençons par chez nous, par la France.
00:43 Ici, un mois de l'ouverture du Salon de l'agriculture, les actions des agriculteurs mécontents
00:49 se multiplient.
00:50 En Occitanie, des agriculteurs bloquent depuis jeudi l'autoroute A64 entre Toulouse et Tarbes.
00:57 D'autres blocages routiers ont lieu ou sont annoncés un peu partout dans le pays.
01:01 D'abord, pour commencer, quels mots mettez-vous sur la situation aujourd'hui en France ?
01:06 Ralbole, colère, révolte, jacquerie ? Qu'est-ce qui se passe exactement ? Et quelle est la
01:12 température ?
01:13 Eh bien écoutez, d'abord, effectivement c'est de la colère.
01:16 C'est de la colère qui s'exprime, qui n'est pas nouvelle puisque ça fait déjà quelques
01:21 semaines, quelques mois qu'on décrit la situation de ce que vit l'agriculture française
01:25 dans ce cas-là de diverses, de pluriels, des territoires.
01:28 Et ce qui se passe aujourd'hui, c'est le trop-plein avec des mesures françaises, franco-françaises,
01:34 qui sont attendues, mais aussi des mesures européennes.
01:36 En fait, ce que veulent les agriculteurs, c'est redonner une forme de dignité à leur métier,
01:41 c'est parler des questions du revenu, de la compétitivité parce que par définition,
01:45 il faut gagner sa vie en agriculture.
01:46 Et puis enfin, c'est tout le sujet de l'exercice du métier au quotidien.
01:50 Comment avec la suradministration, comment avec les déclinaisons européennes d'un
01:54 certain nombre de règles, on n'est plus en ligne avec ce qui se passe ?
01:56 On va reprendre les points, point par point.
01:59 On va vous interroger sur chacun de ces trois points que vous mettez en avant.
02:02 Mais d'abord, pour essayer de comprendre, des manifestations et de la colère, il y
02:05 en a un peu partout en Europe, en Roumanie, aux Pays-Bas, en Allemagne.
02:08 On a vu ce week-end avec 200 000 personnes qui se sont mobilisées, 200 000 agriculteurs.
02:11 Mais les motifs de mécontentement ne sont pas les mêmes.
02:14 Est-ce qu'il y a une convergence des luttes où chacun, chaque pays a une colère propre
02:21 à elle ?
02:22 Par exemple, on sait qu'en Allemagne, c'est principalement contre la taxe sur le diesel
02:24 agricole.
02:25 Aux Pays-Bas, c'est contre la réduction des cheptels.
02:27 Est-ce que vous diriez qu'il y a une union de tous les agriculteurs européens ou non
02:31 ? Il faut le prendre de manière nationale.
02:33 Chaque pays est différent.
02:35 Écoutez, cette colère européenne que vous décrivez, elle a comme l'agriculture des
02:41 typicités de terroir, si je puis dire, de pays, et puis elle a des fondements communs.
02:46 Le fondement commun, c'est l'incompréhension de ce qu'est le cadre européen aujourd'hui.
02:50 Et je le dis parce que l'agriculture est intimement liée au cadre européen.
02:54 Et ce sujet, c'est le Green Deal, c'est le pacte vert, dont la déclinaison agricole
02:58 s'appelle le "Farm to Fork", de la fourche à la fourchette, et dont la vision est clairement
03:02 décroissante puisque ça indique qu'il faut qu'on baisse notre production en Europe
03:05 à un moment où les importations explosent.
03:08 Donc ça, c'est commun à tous les pays.
03:09 Et puis vous avez raison, en fonction des pays, on peut avoir des sujets très spécifiques.
03:14 Par exemple, quand on est dans le sud de la France, vous parliez de l'Occitanie, il y
03:17 a le sujet d'une maladie sanitaire qui touche les vaches qui a été le déclencheur.
03:22 Mais quand vous êtes dans le Pas-de-Calais, ça peut être les inondations.
03:24 Quand vous êtes dans les Alpes, ça peut être la prédation.
03:27 Et donc effectivement, chaque territoire a ses particularités.
03:30 Le fondement, c'est malgré tout l'incompréhension de ce qui est demandé aux agriculteurs, le
03:34 constat qu'il faut produire pour nourrir, le constat que le consommateur européen demande
03:39 de la qualité, de la naturalité, de la proximité.
03:42 Et la réalité, c'est des exportations qui explosent de pays tiers.
03:47 On importe en Europe beaucoup plus.
03:49 Par exemple, l'année dernière, on a importé deux fois plus de céréales en France que
03:53 l'année d'avant.
03:54 Et au moment où on va nous demander de mettre 4% de noter en jachéa.
03:57 Et ça, ça questionne.
03:58 Même chose pour le consommateur.
04:00 Tout le monde nous dit finalement, on veut des prix abordables en termes de consommation.
04:04 Mais personne n'accepte de le payer.
04:06 La plupart des consommateurs, pour des raisons que nous comprenons, vont acheter plutôt
04:09 du premier prix, du low cost et du poulet ukrainien.
04:11 Et bien ça, à un moment, dans cette quadrature du cercle, les agriculteurs ne s'y retrouvent
04:16 plus et ne comprennent plus quel est le sens de l'action qui est demandée.
04:19 Arnaud Rousseau, vous allez être reçu par Gabriel Attal aujourd'hui.
04:24 Question simple, qu'allez-vous lui dire ? Qu'allez-vous lui demander ?
04:27 On va d'abord, puisque j'ai écouté Gabriel Attal faire sa déclaration, le Premier ministre
04:32 a dit "moi je veux des diagnostics clairs".
04:33 Moi je veux déjà être sûr qu'on partage le diagnostic.
04:35 Et je n'en sais rien au moment où je vous parle.
04:37 Le diagnostic, il se pose en termes d'avenir pour l'agriculture.
04:41 Vous savez qu'on va renouveler la moitié des agriculteurs dans les 10 prochaines années.
04:45 C'est la pyramide des âges.
04:46 Donc déjà, est-ce qu'on est d'accord pour dire que ce métier a du sens et qu'il
04:48 faut qu'on attire ? Ensuite, qu'est-ce qu'on fait du cadre de l'activité et du
04:52 revenu ? Parce qu'encore une fois, un agriculteur, c'est un chef d'entreprise.
04:56 Comme un commerçant, comme un artisan, il a besoin de vivre à la fin de l'année
05:00 pour pouvoir se payer, payer ses charges, pour pouvoir se projeter.
05:02 Ensuite, on a besoin d'être bien au clair sur qu'est-ce que ça veut dire que produire.
05:07 Parce que tout le monde ne met pas la même chose derrière.
05:08 Enfin, il faut qu'ils nous disent si oui ou non la souveraineté alimentaire veut
05:13 dire quelque chose dans ce pays.
05:14 Ce n'est pas des mots.
05:15 Tout le monde dit qu'on veut être souverain.
05:16 Mais la réalité de ce qu'on constate, ce n'est pas ça.
05:18 Donc on veut poser le diagnostic.
05:19 La deuxième chose, c'est qu'on a besoin que rapidement, ils nous disent ce qu'il
05:22 va faire au niveau national et comment ils vont s'y prendre au niveau européen.
05:26 Parce que le ministre de l'Agriculture, hier lui-même, a dit "moi j'essaye, je n'y
05:29 arrive pas".
05:30 Ah oui, donc vous attendez des actes.
05:31 C'est ça que vous dites.
05:32 Parce que Gabriel Attal vous a déjà dit qu'il faut que les agriculteurs puissent
05:35 vivre de leur travail.
05:36 C'était ce week-end, puisqu'à un moment c'est eux qui nourrissent le pays.
05:39 Il a promis de faciliter votre vie, la vie des agriculteurs qui subissent des paperas
05:42 frites, des formulaires à remplir.
05:44 Hier, Bruno Le Maire disait partager la douleur et la colère des agriculteurs.
05:48 Et il vous disait "mobilisez-vous, faites-nous des propositions".
05:51 Comment vous recevez les mots du ministre de l'Economie ?
05:54 Bon écoutez, moi j'ai écouté effectivement tous les propos tenus par un certain nombre
05:58 de membres du gouvernement tout le week-end.
05:59 J'avoue mon étonnement.
06:02 Je constate qu'on va pouvoir vendre un certain nombre de cartes d'adhésion à l'FNSA supplémentaire.
06:09 Soyons sérieux.
06:10 Le sujet c'est "qui fait le boulot ?" Le constat, il a l'air d'être partagé.
06:14 Maintenant, aux actes, vous savez, moi les mots, le monde agricole, c'est terminé.
06:17 Maintenant, ce que le monde agricole veut qu'on dise, c'est "qu'est-ce qu'on
06:21 fait, dans quel délai, avec quels moyens".
06:23 Et puis, une fois qu'on a ça sur la table…
06:25 Et sinon, Arnaud Rousseau ? Parce que c'est vrai qu'on a vu, on vous entend ce matin,
06:29 votre propos est très clair, mais on a vu aussi des actes et de la violence également
06:35 ces derniers jours.
06:36 On a vu la coordination rurale qui est le deuxième syndicat agricole qui a prévu de
06:40 se mobiliser le 25 janvier prochain un peu partout en France avec des opérations de
06:43 bâchage, des radars pour dénoncer la suradministration.
06:46 Ils promettent des opérations encore plus spectaculaires.
06:49 Est-ce que la FNSA pourrait se joindre aux actions du deuxième syndicat de la coordination
06:54 rurale qui est considérée comme plus à droite ?
06:57 Et pour le dire de manière un peu claire, est-ce que vous n'avez pas peur de vous
07:00 faire déborder aussi par ce syndicat-là ?
07:04 D'abord, je vais vous dire ce que fait la FNSA.
07:06 Les autres syndicats prennent leurs responsabilités.
07:09 Nous, par définition, ce qu'on veut, c'est faire preuve de responsabilité et obtenir
07:13 des résultats pour nos adhérents.
07:14 Ensuite, vous savez, il y a une partie des agriculteurs qui ne sont pas syndiqués, dans
07:17 aucun syndicat.
07:18 Le sujet aujourd'hui, ce n'est pas les querelles de boutique.
07:21 Le sujet aujourd'hui, c'est quels résultats on obtient pour les agriculteurs.
07:24 Moi, je ne crains pas de me faire déborder parce que, par définition, à la FNSA, c'est
07:28 le terrain qui commande et c'est le cœur du métier d'agriculteur.
07:31 C'est-à-dire qu'on peut valoir ce qu'on veut à Paris.
07:33 La vérité, c'est celle du terrain.
07:35 Et nous, ce sont nos fédérations départementales qui décident.
07:38 Et vous voulez faire des actions ? Vous allez faire des actions ? Parce que vous dites peut-être
07:41 qu'on fera des actions avant le salon de l'agriculture dans un mois, mais on est dans
07:44 le peut-être.
07:45 Je vais vous dire, le peut-être est levé depuis hier soir, puisque nous nous sommes
07:49 réunis et qu'un certain nombre de départements, d'abord, sont rentrés en action.
07:52 Je voudrais rappeler que depuis le mois de novembre, avec les panneaux retournés et
07:57 le "on marche sur la tête", on est en mouvement.
07:58 Vous retournez les panneaux des villages et des villes pour dire "on marche sur la tête".
08:02 Pour vous dire aussi qu'on avait bien conscience que la violence n'est pas une réponse à
08:06 la question du moment.
08:07 Et que, très clairement, on n'appelle pas la violence.
08:10 D'ailleurs, vous avez vu que le discours de ceux qui bloquent la 64 aujourd'hui est
08:13 très clair.
08:14 Nous, ce qui nous intéresse, c'est qu'on rentre en action.
08:16 Et je peux vous dire que, dès aujourd'hui et toute la semaine, et aussi longtemps qu'il
08:21 sera nécessaire, un certain nombre d'actions vont être menées.
08:23 Le peut-être est clairement levé.
08:26 Là, vous allez faire des actions.
08:29 La FNSA va faire des actions.
08:30 Je peux vous dire que, ce matin, le Tarn-et-Garonne a bloqué la centrale de Golfech pour dénoncer
08:37 aussi les sujets énergétiques qui concernent l'agriculture, au moment où on annonce
08:40 une augmentation de la facture électrique d'un peu moins de 10%, en tous les cas, c'est
08:44 ce que j'ai compris, que d'autres départements ont annoncé, notamment, dans la meuse des
08:49 actions dans les prochains jours.
08:50 Chaque département va rentrer.
08:52 Donc, le peut-être est levé.
08:53 Le sujet, maintenant, c'est que la colère s'exprime pour que chacun dise bien ce qui
08:57 l'attend.
08:58 L'engagement de la FNSA, c'est des revendications claires pour qu'on puisse avoir des réponses
09:01 claires.
09:02 Il y a eu des violences ces derniers jours, disait Léa à l'instant.
09:05 À Carcassonne, un bâtiment vide de la direction régionale de l'environnement a été visé
09:09 par une explosion dans la nuit de jeudi à vendredi.
09:12 Un tag du comité d'action Viticole a été retrouvé.
09:15 Une enquête a été ouverte pour dégradation par moyen dangereux d'un bien appartenant
09:20 à autrui en bande organisée.
09:22 C'est ce qui a fait savoir le parquet.
09:23 J'appelle tout le monde à ne pas entrer dans cette surenchère.
09:26 Voilà ce qu'a dit le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau, hier.
09:30 Est-ce que vous dites la même chose ? Attention à ne pas entrer dans la surenchère violente.
09:35 Écoutez, à la FNSA, on a toujours eu le même discours.
09:37 Et je le réaffirme ici.
09:38 On ne trie pas dans la violence.
09:40 Nous, on a dit qu'il n'y avait pas de violence et qu'on ne voulait pas de violence.
09:43 Voilà.
09:44 Moi, il y a 200 000 adhérents.
09:45 Je ne suis pas derrière tout le monde.
09:46 Mais je donne un message très clair.
09:47 Pour atteindre nos objectifs, la violence n'est pas une réponse.
09:51 Mais j'observe qu'effectivement, un certain nombre d'habitudeurs n'en peuvent plus.
09:53 Donc moi, je dénonce la violence très clairement.
09:56 Je dis que ce n'est pas comme ça qu'on atteindra les objectifs.
09:58 Mais j'observe qu'effectivement, la montée de la tension est forte.
10:00 D'où la nécessité d'apporter des réponses concrètes.
10:03 Et j'aimerais bien, je le dis aussi, que tout le monde soit aussi clair sur la dénonciation
10:08 de la violence que ce que je viens de faire.
10:09 Ça, c'est sa vise qui est…
10:11 Oui.
10:12 Le deuxième syndicat.
10:13 Non, non, pas du tout.
10:14 Ça vise notamment les propos que j'ai…
10:16 Les propos de la France Rural ?
10:17 Pas du tout.
10:18 Ça vise notamment tout ce que j'entends de l'écologie politique qui nous fait la
10:21 leçon toute la journée.
10:22 Je redis que sur notamment ce qui s'est passé à Sainte-Auline, puisque c'est à
10:25 ça dont je fais référence, que je ne fais pas le tri.
10:28 Nous, on n'appelle pas la violence.
10:30 On pense que ce n'est pas une réponse.
10:31 Et on ne fait pas le tri dans ce qui serait acceptable et pas acceptable.
10:34 On est très clair.
10:35 On va venir aux écolos et au pacte vert européen, puisque vous le dénoncez, vous
10:40 demandez un moratoire très clairement.
10:41 Mais juste sur les réponses concrètes, vous dites "j'attends pas que des mots
10:45 de Gabriel Attal".
10:46 Je veux juste avoir des réponses concrètes.
10:47 Mais il y en a quelques-unes quand même.
10:48 Par exemple sur cette maladie qui touche effectivement les éleveurs en Occitanie, la maladie hémorragique
10:52 épisodique.
10:53 Le gouvernement a promis le remboursement aux éleveurs de 80% des frais de soins vétérinaires
10:57 liés à la maladie et une indemnisation à hauteur de 80% en cas de mort de l'animal.
11:02 Ça, ce n'est pas une solution tangible, une réponse tangible ?
11:04 Vous savez, cette maladie, elle a frappé les élevages, notamment des Hautes-Pyrénées,
11:08 des Hautes-Garonnes, de ce secteur-là en tous les cas, depuis la fin de l'été.
11:12 Et donc, comme par hasard, au moment où le terrain est occupé, le ministre fait une
11:18 annonce.
11:19 Moi, je peux vous dire que le ministre, ça fait des semaines, des semaines, je parle
11:23 du ministre de l'Agriculture, des semaines que je lui demande de sortir sur ce sujet.
11:26 Et comme par hasard, au moment où la tension est forte, les choses se font.
11:29 Moi, je le regrette.
11:31 Encore une fois, il y a des réponses concrètes à apporter.
11:33 Je voudrais là aussi rentrer un peu dans les sujets parce que sinon on survole et moi
11:38 je veux être concret.
11:39 Quand par exemple sur le sujet européen, sur le Green Deal, on nous dit cette année
11:43 ce sera 4% de jachères obligatoires.
11:45 Pour nous, c'est pas entendable dans le contexte.
11:47 Quand on dit à un éleveur, notamment de Normandie ou des Pays de Loire, qu'il va
11:51 falloir qu'il réimplante des prairies, alors que bien souvent il a arrêté son activité
11:55 d'élevage parce qu'elle n'était plus rentable.
11:56 Ça n'est pas entendable.
11:58 Quand on dit sur la directive industrielle qu'on appelle IED, qui prévoit le cadre
12:03 de production d'élevage, qu'un élevage français de poules pondeuses qui fait 21500
12:07 poules sera reconnu comme étant industriel alors qu'on est en concurrence avec des
12:10 élevages ukrainiens dans lesquels on trouve 1 million de poules, ça n'est pas compréhensible.
12:15 Quand on explique que sur la décarbonation, auquel on est attaché dans l'agriculture,
12:18 il faudra...
12:19 Parce qu'on rappelle quand même que le secteur agricole est responsable d'un quart des émissions
12:22 de gaz à effet de serre.
12:24 C'est colossal.
12:25 C'est-à-dire qu'à l'origine c'est ça le problème.
12:27 Et le problème c'est que le réchauffement climatique, pourquoi il y a ce pacte vert ?
12:31 Parce qu'il y a un réchauffement climatique qui vous touche, qui touche les agriculteurs
12:34 en premier.
12:35 S'il n'y a pas de transition écologique, si le modèle ne change pas, Arnaud Rousseau,
12:40 est-ce qu'on va pouvoir lutter contre ce réchauffement climatique qui vous touche ?
12:43 C'est-à-dire ce que vous nous racontiez, les maladies, la sécheresse, tout ça.
12:46 Est-ce qu'il n'y a pas un moment où il va falloir quand même changer le modèle ?
12:49 Non seulement, vous voyez, je n'ai pas de problème pour parler d'environnement et
12:53 décarbonation, c'est moi qui amène le sujet.
12:55 Donc je suis très conscient, les agriculteurs observent le changement climatique.
12:59 Quand vous êtes producteur viticole dans les Rho, l'Aude ou les Pyrénées-Orientales
13:04 et que vous avez eu un peu moins de 150 mm sur une année, vous êtes très conscient.
13:08 Quand vous êtes agriculteur dans le Pas-de-Calais et que ça fait deux mois que vous avez les
13:11 pieds dans l'eau, vous voyez bien ce que ça veut dire le changement climatique.
13:13 Donc les agriculteurs, ils sont très conscients de ça.
13:15 Donc faire un pacte vert au niveau européen pour dire maintenant il faut changer les choses,
13:19 il faut réduire certains cheptels, il faut réduire l'usage des pesticides, le recours
13:24 aux engrais chimiques.
13:25 Je vais finir, Léa Salamé.
13:26 Oui mais ça a du sens.
13:27 Ça a du sens ou pas ? Transformer les surfaces en surfaces bio.
13:30 Ça a du sens, ça a du sens si on est cohérent.
13:33 Ça, je vous dis que le défi du climat, c'est un défi auquel l'agriculture est confrontée
13:39 et sur lequel en plus on pense qu'on a un certain nombre de réponses à apporter.
13:42 Mais le défi, c'est que pour mener cette transition, encore faut-il en avoir les moyens.
13:47 C'est-à-dire qu'on peut faire des grands mots, on peut parler de transition et décarbonation.
13:51 Le sujet de l'agriculture aujourd'hui, c'est comment on la met en œuvre et qui
13:54 paye.
13:55 Et ça ne peut pas être une vision de décroissance.
13:57 Je veux être très clair sur le sujet.
13:59 On ne peut pas dire à l'Europe "vous désarmez" alors que le président de la République
14:03 nous dit "il faut se réarmer".
14:04 On voit ce qu'il en coûte aux Européens et singulièrement aux Français sur la facture
14:07 d'électricité quand on a été dépendant de l'énergie.
14:10 Nous, demain, on ne veut pas être dépendant sur l'agriculture, on ne veut pas être dépendant
14:14 sur la souveraineté alimentaire.
14:15 Parce que le rôle profond, et j'en viens à la dignité, le rôle profond d'un agriculteur,
14:21 quelle que soit la taille de son exploitation, quelle que soit sa production et son territoire,
14:24 c'est d'abord de produire pour nourrir.
14:26 Et ça, en ce moment, c'est remis en cause.
14:27 Oui, c'est remis en cause, mais Thierry Breton vous répond, il a pris la parole il y a quelques
14:31 jours en disant, il rappelle que plus du tiers du budget de l'Union Européenne est dédié
14:35 à l'agriculture.
14:36 55 milliards en 2024 et que la France est la première bénéficiaire de cette aide européenne.
14:41 Donc la question que je vous pose c'est, vous dites "pour faire cette transition il
14:45 nous faut de l'argent".
14:46 L'Union Européenne répond "on met de l'argent, c'est le premier budget de l'agriculture".
14:51 Vous vous dites quoi ? C'est pas assez pour nous accompagner dans cette transition écologique
14:54 que vous nous demandez ?
14:55 À ce stade, c'est pas seulement une histoire de moyens.
14:57 D'abord, si l'agriculture est le premier budget européen, c'est tout simplement parce
15:01 qu'il n'y a plus de budget national.
15:02 On a un ministère de l'agriculture en France, mais dont l'essentiel des moyens sont des
15:06 moyens européens dans l'action.
15:07 Et donc ça, ça nous va bien.
15:09 Et c'est une des raisons pour lesquelles aussi on est attaché à cette Europe.
15:12 Mais pas à n'importe laquelle.
15:13 Pas cette Europe technocratique qui prend des décisions à Bruxelles ou qui nous impose
15:17 des dates d'action dans nos champs qui ne correspondent pas à la réalité.
15:20 Donc nous, on a besoin de remettre de la cohérence.
15:22 Et donc j'essaie d'être équilibré, voyez-vous.
15:24 Je ne dis pas que l'Europe, c'est tout mal, il faut mettre du protectionnisme.
15:29 Je dis qu'on a besoin pour commercer de choses qui soient loyales et qu'on ne peut pas avoir
15:33 d'un côté des accords commerciaux qui importent des produits sur ce continent avec des conditions
15:38 de production qui ne sont pas les nôtres et de l'autre exiger de l'agriculture française
15:41 qui est reconnue comme étant une des plus durables des conditions de production qui
15:44 ne sont pas tenables pour les producteurs.
15:45 Un mot avant d'aller au standard.
15:46 Arnaud Rousseau, on entend votre colère face aux décisions européennes.
15:50 Mais en réalité, vous avez aussi remporté ces derniers mois une série de victoires.
15:54 En novembre, la Commission européenne a renouvelé pour 10 ans l'autorisation du désherbant
15:58 le plus controversé, le glyphosate.
16:00 Le Parlement européen a rejeté une législation visant à réduire de moitié l'usage des
16:04 pesticides dans l'Union d'ici à 2030.
16:07 Vous aviez alors salué même une victoire.
16:10 Vous êtes plus écouté que vous ne le dites, en réalité.
16:14 Vous savez, encore une fois, ce n'est pas une victoire ou une défaite qui m'intéressent.
16:18 C'est les moyens de production qui sont donnés aux agriculteurs.
16:20 Parlons des pesticides, pour ne pas se dérober.
16:23 Le sujet pour l'agriculteur, ce n'est pas d'utiliser des pesticides.
16:26 Le sujet pour l'agriculteur, c'est d'utiliser des moyens de production qui lui permettent
16:29 d'avoir une production.
16:30 Et dans un certain nombre de cas, quand il y a des alternatives, je veux le dire très
16:34 clairement sur votre antenne, on est partant pour pouvoir les mettre en œuvre.
16:37 Mais dans un certain nombre de cas, il n'y a pas d'alternative.
16:40 Et quand il n'y a pas d'alternative, si on ne met pas en œuvre les moyens de production
16:43 tels que je dis, il n'y a pas de production.
16:45 Et donc nous, on a besoin de continuer à produire.
16:47 Sinon, on importe.
16:48 Je peux prendre l'exemple de la cerise.
16:49 Donc je le dis sur le glyphosate, si demain on peut trouver des alternatives, on sera
16:53 ravis pour les mettre en œuvre.
16:54 Ce qu'on dit, c'est qu'aujourd'hui, il faut mettre la recherche à l'œuvre pour
16:57 apporter des solutions.
16:58 Et il ne faut pas mettre les interdictions sans solution.
16:59 Stéphane, au Standard Inter, bonjour.
17:02 Oui, bonjour.
17:03 Vous nous appelez de Toulouse.
17:05 Oui, je vous appelle de Toulouse.
17:07 Voilà, donc je voulais vous dire que ce que vous faites périodiquement à la FNSEA à
17:13 Toulouse en déversant du fumier devant la cité administrative, les impôts, devant
17:18 Europe Ecologie Les Verts, est tout simplement intolérable.
17:21 Et que ce qui est en train d'être fait à la 64 avec le blocage de l'autoroute sous
17:28 protection policière carrément, puisque vous êtes escorté, est inqualifiable aussi.
17:33 Et que si, moi j'ai fait la grève contre les retraites, on attend toujours la FNSEA.
17:38 Mais si nous on faisait la moitié de ce que vous faites, on finit tous en tôle.
17:43 Merci.
17:44 Merci Stéphane.
17:45 Que répond Arnaud Rousseau, patron de la FNSEA, à cette colère de notre auditeur
17:51 sur les blocages et les actions ?
17:54 Je voudrais dire à votre auditeur que les agriculteurs se passeraient bien de ce qui
17:57 est en train de se passer et préféraient être avec leur famille et au chaud en ce
18:00 moment plutôt que de faire ce qu'ils font.
18:01 S'ils le font, c'est parce qu'ils sont arrivés à un tel point de désespérance
18:05 qu'ils ont envie de faire valoir leurs revendications.
18:07 Et j'ai compris que votre auditeur avait aussi lui porté ce sont ses convictions dans
18:12 le cadre de la réforme des retraites.
18:13 Deuxième sujet, puisqu'il parlait de la réforme des retraites, je voudrais répondre.
18:16 Aujourd'hui, les retraites agricoles sont les retraites les plus faibles de tous les
18:20 secteurs d'activité économique.
18:21 Il y a eu une réforme la dernière qui a permis de dire qu'on allait pouvoir calculer
18:25 les retraites agricoles sur les 25 millions d'années.
18:27 Un an après, on attend toujours un rapport gouvernemental sur ce sujet.
18:32 Vous voyez, ça c'est un exemple très concret.
18:33 Ça vous allez en parler à Gabriel Attal tout à l'heure, des retraites des agriculteurs,
18:36 parce qu'effectivement, ça c'est un sujet.
18:37 C'est la crédibilité de la parole du député.
18:38 La paupérisation des agriculteurs et la paupérisation de leurs retraites, c'est-à-dire que c'est
18:43 vrai que c'est un sujet.
18:44 C'est étonnant parce que vous dénoncez souvent le manque de connaissances qu'ont
18:48 les hommes politiques du monde agricole.
18:50 Mais en même temps, on en parle énormément, on en parle de plus en plus et on parle de
18:54 plus en plus de la douleur et des souffrances des agriculteurs.
18:57 Est-ce qu'il n'y a pas un paradoxe là-dedans ?
18:59 Comme vous, je constate qu'effectivement, il y a une attention.
19:02 Cet exemple des retraites, il est très éloquent.
19:05 Vous savez, pour la plupart des agriculteurs, ce sont des retraites de l'ordre de 2 000
19:09 euros.
19:10 Il y a eu des retraites, certaines fois, avec des pensions de reversion qui sont entre
19:12 700 et 800 euros.
19:13 C'est extrêmement faible.
19:15 Tout ça, ce sont des chiffres moyens.
19:16 Il peut y avoir moins.
19:17 Vous comprenez bien qu'après une vie de labeur, c'est quand même juste indigent.
19:20 Il y a eu une réforme des retraites qui a été votée à l'unanimité des parlementaires.
19:24 Ce n'est pas si courant pour être souligné.
19:26 Bien.
19:27 On a dit qu'on allait commencer par faire un rapport pour poser le diagnostic.
19:29 Il sera fait sous trois mois.
19:31 On est un an après.
19:32 Il n'y a rien.
19:33 Et donc, effectivement, j'entends les politiques dire qu'on s'intéresse à vos questions.
19:36 On en parle souvent.
19:37 La réalité, c'est qu'au moment où je vous parle sur les retraites, nous n'avançons
19:41 pas.
19:42 Jackie, au standard.
19:43 Bonjour, bienvenue.
19:44 Vous êtes agriculteur et éleveur.
19:45 On vous écoute.
19:46 Oui, bonjour.
19:47 Agriculteur et éleveur dans le charolais.
19:48 Je vous ai souvent à France Inter et souvent, j'ai l'impression de répéter la même chose.
19:53 Ce matin, je suis aussi à des renlèves des sages, je ne vais pas préciser.
19:57 Et ça tombe bien que quand j'écoutais que le président allait voir le premier ministre,
20:02 qu'il fasse bien passer ce message que j'ai écouté.
20:04 En effet, l'agriculture, elle a un coût.
20:06 Et ça, on le répète tout le temps.
20:07 On nous parle d'inflation des prix alimentaires depuis un ou deux ans.
20:10 Mais je pense que les prix alimentaires, je le répète assez souvent, n'ont jamais été
20:14 à leur niveau depuis 35 ou 40 ans.
20:16 Madame Salamé parlait des aides de l'Europe.
20:18 Les aides de l'Europe, elles ont été mises en place.
20:19 Moi, j'étais étudiant dans les années 95-96 parce qu'on nous expliquait qu'il
20:22 ne fallait pas que l'alimentation coûte trop cher.
20:23 Et du coup, en compensation, on nous donnait des aides.
20:26 Aujourd'hui, les aides, il faut les obtenir en appliquant des causes environnementales.
20:31 Mais ça, on le fait.
20:32 Et par contre, l'acte d'achat derrière, eh bien non, c'est pas.
20:36 En effet, on achète des produits au marché.
20:37 On discute avec la grande distribution.
20:39 Dès qu'ils mettent des produits en promotion, du poulet qui vient de je ne sais pas d'où,
20:41 c'est ce qui part en premier.
20:42 Mais on n'arrête pas de l'expliquer aux gens.
20:44 Mais on a l'impression que les gens ne comprennent rien.
20:46 Oui, mais c'est ça, vous avez raison.
20:47 C'est-à-dire que c'est aussi...
20:49 Merci, Jacquie.
20:50 Merci, vous demandez à l'État, vous demandez à Gabriel Attal.
20:53 Mais c'est aussi une responsabilité de tous les Français.
20:55 Est-ce qu'au fond, à la fin des fins, il faut accepter de payer un peu plus cher ce
21:01 qu'on achète ?
21:02 Comme ça, on fait travailler les agriculteurs français et européens.
21:06 La réponse est évidemment oui.
21:07 D'ailleurs, on n'attend pas tout l'État.
21:09 Moi, je redis que l'agriculteur, il a envie de vivre de son métier.
21:11 Il n'a pas envie de vivre toute la journée de subsides.
21:13 Et ce qu'ouvre votre auditeur, adhérent de l'AFDSEA que je salue, c'est l'idée
21:20 que dans les négociations commerciales qui ont lieu en ce moment, qui sont extrêmement
21:24 difficiles, on est juste la reconnaissance du travail de l'agriculteur.
21:27 C'est-à-dire la protection de la matière première agricole.
21:29 On ne peut pas vendre notre matière première agricole qui n'est pas un minerai, qui est
21:34 une production de valeur, en dessous de nos coûts de production.
21:37 Bruno, le maire dit que nous serons intraitables avec les distributeurs qui ne respecteront
21:42 pas les dispositions de la loi EGalim, qu'il multipliera dès cette semaine les contrôles.
21:47 Ça vous rassure ?
21:48 Il est temps.
21:49 Non, ça ne me rassure pas.
21:50 Parce que j'observe aussi qu'aujourd'hui, un certain nombre de négociations se passent
21:53 dans le cadre européen.
21:54 C'est-à-dire que les grandes centrales d'achat de la grande distribution ont finalement quitté
22:00 la négociation française pour une partie d'entre elles, pour aller dans des centrales
22:03 d'achat européennes qui contournent cette loi EGalim.
22:05 Et donc, moi, j'appelle là aussi Bruno Le Maire à colmater les brèches.
22:09 L'objectif, ce n'est pas de s'opposer entre l'industrie agroalimentaire et grande
22:13 distribution.
22:14 L'objectif, c'est que chacun puisse vivre et proposer à nos compatriotes des produits
22:16 de qualité qui ne sont pas des produits d'importation et le faire dans un cadre qui permet à l'agriculteur
22:22 de vivre.
22:23 Et oui, Léa Salamé, vous avez raison.
22:24 Demain, promouvoir notre modèle agricole européen et singulièrement français, qui
22:28 est un modèle de qualité, qui est un modèle familial, ça passe par l'acceptation du
22:32 juste prix du paiement de l'alimentation.
22:33 On dépasse totalement le temps, mais je vais quand même vous poser la question.
22:35 Le gouvernement devait présenter le 24 janvier prochain un projet de loi d'orientation
22:39 agricole, mais il a décidé de le reporter.
22:41 Marc Fesneau dit, le ministre, prenons notre temps, n'allons pas trop vite.
22:45 Qu'est-ce que vous lui dites ?
22:46 Que ça fait plus d'un an qu'on en parle.
22:48 Donc prenons notre temps.
22:49 Moi, je suis très bien.
22:50 Moi, ce qui m'intéresse, c'est qu'est-ce qu'il y a dedans et qu'est-ce qu'il apporte
22:53 comme solution concrète pour les agriculteurs.
22:54 Le plus tôt sera mieux.
22:56 Tout ce qui allait dans le cadre de l'installation et la transmission va dans le bon sens.
22:59 Nous, on a très envie de parler de compétitivité.
23:01 On a très envie de parler de souveraineté.
23:02 Et ça, c'est nécessaire et rapide.
23:04 Donc rendez-vous pour vous ce soir chez le Premier ministre Gabriel Attal.
23:08 Merci Arnaud Rousseau d'avoir été au micro d'Inter ce matin.