Depuis 22 ans que j’exerce le métier de journaliste, et particulièrement depuis quelques années que je m’essaie à celui d’éditorialiste, c’est mon privilège que de recevoir du courrier des lecteurs et – maintenant, aussi – d’auditeurs.
Retrouvez "En toute subjectivité" sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/anne-rosencher-en-toute-subjectivite
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00:00 Oui, depuis 22 ans que j'exerce le métier de journaliste et particulièrement depuis
00:04 quelques années que je m'assieds à celui d'éditorialiste, c'est mon privilège
00:09 que de recevoir du courrier des lecteurs et maintenant aussi d'auditeurs.
00:13 Ainsi, la semaine dernière, j'ai par exemple reçu une missive de Nicolas, cafetier et
00:18 pizzaiolo dans le Doubs.
00:20 Ce monsieur, voyez-vous, est impassionné de citations.
00:23 Il les collectionne dans un petit cahier, comme d'autres épinglent les papillons.
00:28 C'est pourquoi depuis quelques années, il demande aux gens qui l'inspirent de lui
00:31 envoyer trois de leurs phrases préférées.
00:34 Dans son courrier, ce collectionneur m'avait sélectionné six pépites.
00:38 « Je ne résiste pas à l'envie de vous en citer une que je ne connaissais pas.
00:42 Elle est de Léopold Cédar-Sangor.
00:45 Ne jamais oublier, lorsqu'on est dans l'orgueil d'être différent, le bonheur d'être
00:50 ensemble.
00:51 » Oui, je soupçonne fortement le pizzaiolo d'avoir choisi des phrases qui me toucheraient
00:55 au cœur.
00:56 La semaine dernière, donc, outre la lettre de Nicolas, j'ai reçu un courrier émouvant
01:00 de Jean-Paul, ancien professeur d'histoire-géo qui réagissait à ma chronique, ici même,
01:06 sur l'assassin de Dominique Bernard.
01:07 Un mail d'Emma sur les nouvelles règles de la cérémonie des Césars.
01:11 Et un autre de Daniel, ouvrier à la retraite à qui Jacques Julliard manque autant qu'à
01:16 moi.
01:17 Si je vous ouvre ma correspondance, ça n'est pas par manque de pudeur, ni pour me vanter
01:21 et hontément.
01:22 Non, voilà, ces quatre messages arrivés la semaine dernière m'ont donné l'envie
01:27 de partager une réflexion sur la relation parfois abstraite mais essentielle que nous
01:32 entretenons avec vous, chers auditeurs et chers lecteurs.
01:36 Nous faisons un métier parfois complexe, nous, les journalistes.
01:40 Nous ne sommes pas élus.
01:41 Et pourtant, nous avons tout de même, parmi nos différentes fonctions, la charge de représenter.
01:47 C'est-à-dire de faire entendre les voix diverses qui constituent la société pour
01:51 qu'elle soit prise en compte dans le débat public et en premier lieu par les pouvoirs
01:55 politiques, économiques ou culturels.
01:57 C'est une charge compliquée, un peu tout azimut et souvent abstraite.
02:02 C'est pourquoi finalement ce courrier des lecteurs et des auditeurs est si précieux.
02:06 Il éclaire le temps d'un échange, le contre-champ essentiel de notre métier.
02:12 Il matérialise ce lien organique qui lie la société au média.
02:16 Et je ne dis pas que tout va bien en la matière.
02:19 J'aurai l'occasion de revenir sur ce lien, sur ces défaillances qui participent aujourd'hui
02:24 à notre malaise démocratique.
02:26 Mais en attendant, oui, et quitte à faire un peu gnangnan, je voulais adresser ici
02:31 un merci aussi sincère qu'officiel à tous ceux qui depuis des années m'ont écrit.