• l’année dernière
Une Europe otanisée et hostile à l'égard de la Russie, le projet macroniste prend forme ! Les déclarations bellicistes d'Emmanuel Macron vont-elles achever le patient français ? En tout cas, notre pays va mal et avance vers plus de nihilisme. Comme nous étions montés haut, la chute est longue. Si "Jusque-là, ça va", l’atterrissage se devine brutal. Nous commençons à être éparpillés façon puzzle passant d’un tout à un tas. Ayant abandonné toute confiance en nous comme corps social et historique, nous singeons les dérives américaines : "wokisme" ou "cancel culture". Nous nous sommes vautrés dans une société sans éthique et sans esthétique. Il faut faire ce constat avant de réfléchir aux remèdes. Il faut redonner le pouvoir au peuple. Faire une révolution démocratique. Mais cela suppose la vertu civique et une rupture radicale avec la domination capitaliste sur le peuple de France.

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00 [Générique]
00:06 Bonjour à tous, bienvenue dans notre Zoom aujourd'hui en compagnie de Pierre Le Vigan.
00:10 Bonjour monsieur.
00:11 Bonjour.
00:12 Pierre Le Vigan, vous êtes urbaniste de formation, vous êtes aussi diplômé en histoire et philosophie.
00:17 Pierre Le Vigan publie cet ouvrage, "Le coma français aux éditions de Perspective Libre",
00:23 à retrouver comme d'habitude sur la boutique de TV Liberté.
00:26 Alors Pierre Le Vigan, notre président Macron a récemment déclaré que l'envoi de troupes françaises en Ukraine
00:32 pour combattre la Russie n'était pas à exclure.
00:36 Comment expliquez-vous l'engagement jusqueboutiste de notre chef d'État
00:42 alors même que les États-Unis, les Républicains au Congrès
00:45 ont bloqué une enveloppe de 60 milliards de dollars d'aide à l'Ukraine ?
00:52 Oui, alors on va commencer par l'explication la plus mineure mais qui existe
00:58 et on va aller à l'explication la plus essentielle.
01:02 Alors l'explication mineure, c'est un dérivatif en politique intérieure
01:06 face à l'impopularité de Macron, y compris de son nouveau Premier ministre,
01:13 Gabriel Attal, dont la popularité a été construite par quelques médias
01:17 mais n'a pas duré plus de quelques semaines.
01:19 Donc effectivement, on sait que Macron a été très mal accueilli au Salon de l'Agriculture.
01:23 Bon, évidemment, cette dramatisation par l'hypothèse d'envoi de troupes françaises,
01:29 plus généralement d'ailleurs, de troupes de l'UE au sol en Ukraine,
01:34 est une façon de cacher cette situation qui n'est pas bonne au plan intérieur.
01:39 Mais ça c'est un aspect qui existe,
01:43 mais l'aspect essentiel doit être pris en quelque sorte au premier degré.
01:49 Macron, effectivement, semble ne pas exclure cette stratégie
01:55 consistant à engager des troupes au sol.
02:00 Pourquoi ? Alors pour prendre le leadership au sein de l'Union Européenne,
02:04 bon, a priori, ça ne fonctionne pas, mais en tout cas, il a essayé,
02:08 mais aussi à plus long terme, pour en fait, créer une sorte d'OTAN européanisé.
02:15 Bon, il est assez clair que les États-Unis d'Amérique sont, comment dire, fatigués
02:24 de "défendre" l'Europe, c'est-à-dire de dépenser pas mal de moyens
02:32 pour leur protectora sur l'Europe.
02:34 Ils se protectora de toute façon, maintenant,
02:37 fonctionnent sur des bases essentiellement économiques,
02:39 puisqu'ils nous ont coupé de la Russie, et que nous achetons donc leur gaz de schiste
02:44 six fois plus cher que le prix auquel les Russes nous vendaient leur gaz.
02:51 – Moi j'avais entendu entre 3 et 4, mais bon, on va pas se battre sur les chiffres.
02:54 – Alors, ça dépend de l'origine précise, enfin, ça va entre 4 et 6.
03:01 Et donc, en l'occurrence, ils souhaitent que les Européens prennent le relais,
03:06 mais sur quelle base ? Pas du tout sur la base d'une Europe indépendante,
03:11 mais sur la base d'une Europe qui se charge d'être anti-russe,
03:16 mais en quelque sorte, à la place des Américains, et à ses frais,
03:22 c'est-à-dire aux frais de l'Europe, au lieu que ça soit systématiquement
03:26 aux frais des États-Unis d'Amérique.
03:29 Donc, en ce sens, il y a un projet macroniste de Néo-OTAN européanisé
03:35 et bel liciste. Donc, c'est assez clair, et effectivement,
03:41 quand les députés renaissants du parti de Macron nous disent
03:47 que la Russie menace l'Europe, et même la France,
03:51 ça fait partie de cette stratégie de la peur.
03:53 – Oui, le Président a déclaré lors du salon de l'agriculture
03:57 que la Russie a déclaré, a décidé de nous attaquer.
04:01 – Oui, c'est une contre-vérité évidente, mais tout ça fait partie
04:08 d'une stratégie de la peur qui a à la fois des objectifs
04:12 en politique intérieure, tétaniser les gens, les mettre dans un état
04:16 de sidération et de coma, d'où le titre de mon ouvrage,
04:21 mais aussi de préparer les esprits à une économie, un effort de guerre
04:30 visant à faire face à une soi-disant menace russe,
04:34 comme si nous étions à l'époque de l'Union soviétique,
04:37 sachant que même à l'époque de l'Union soviétique,
04:40 les Russes n'avaient pas l'intention, étant relativement réalistes,
04:45 bien que soviétiques n'avaient pas l'intention de dépasser l'Elbe
04:50 parce que leur protecteurat sur l'Europe orientale
04:52 était déjà quand même relativement lourd à gérer.
04:55 – Et je lisais les propos du journaliste Laurent-Arthur Duplessis
04:58 qui déclare que si les armées des pays membres de l'Union européenne
05:05 s'engageaient dans un conflit contre la Russie,
05:08 elles n'auraient pas plus de trois jours de munitions.
05:11 – Oui, l'armée française a environ 80 000 hommes,
05:15 nous avons, semble-t-il, quelques 200 chars,
05:20 et encore, sont-ils opérationnels tout de suite, ça reste à voir,
05:23 et effectivement, tout le monde sait, enfin tous les experts savent
05:26 que nous avons deux ou trois jours de munitions.
05:29 Enfin, ce n'est pas sérieux, le problème,
05:34 c'est que la parole d'un chef d'État n'est pas totalement anodine.
05:39 Ce que pourraient dire tel ou tel journaliste irresponsable
05:43 de telle ou telle chaîne des médias de grand chemin
05:48 n'engageraient que ces médias,
05:49 mais là, c'est tout de même une provocation anti-russe
05:55 qui va avec la diabolisation de Poutine.
05:58 Donc, d'ailleurs, on peut observer qu'on parle toujours,
06:02 pour les gens qui refusent la guerre,
06:03 on les accuse toujours d'être alliés à Poutine,
06:09 on ne dit pas tout simplement qu'ils refusent
06:12 d'être dans une hostilité systématique à la Russie,
06:15 parce que le problème n'est pas celui tant de Poutine que de la Russie,
06:19 et par contre, quand on soutient l'Ukraine,
06:20 on ne dit pas qu'on soutient Zelensky, parce que tout le monde…
06:23 – On soutient la démocratie.
06:24 – Tout le monde sait que Zelensky n'est quand même pas un personnage
06:27 extraordinairement respectable et inspirant,
06:31 mais on dit qu'on soutient l'Ukraine,
06:32 et même tout simplement qu'on soutient la démocratie en avant.
06:36 Le concept de bataille de l'avant, il faut le savoir,
06:38 date de Giscard qui a été un des premiers atlantistes.
06:41 – Vous résumez un petit peu le projet macronien ainsi,
06:45 moins d'Europe libre et plus d'occidentalisation.
06:47 En fait, Emmanuel Macron, il se voit un petit peu comme…
06:51 il se veut comme plus gros que le bœuf américain, quoi.
06:55 – En tout cas, un néo-OTAN, un néo-OTAN européanisé,
06:58 qui fasse le sale boulot que les Américains n'ont plus tout à fait envie de faire,
07:05 d'autant que dans l'hypothèse où Trump se fait élire à nouveau,
07:11 il est possible que l'Amérique aille vers un certain isolationnisme.
07:17 Donc, effectivement, il s'agit de reprendre,
07:20 qui est fondamentalement la stratégie euro-américaine,
07:23 la stratégie atlantiste, d'hostilité systématique vis-à-vis de la Russie,
07:30 voire vis-à-vis de la Chine, mais en en faisant supporter le coup à l'Europe,
07:36 sachant déjà que l'Europe en est la principale victime,
07:39 puisque les sanctions contre la Russie
07:42 ont été avant tout des auto-sanctions contre l'économie européenne.
07:45 Elles n'ont pas mis l'économie russe à genoux,
07:47 elles l'ont affaiblie un petit peu en 2022,
07:49 elles s'en sortent très bien depuis 2023,
07:51 et par contre, ont mis l'économie française encore plus à genoux qu'elle ne l'était,
07:57 avec à peine 9% du PIB qui vient de l'industrie en France,
08:01 et surtout, ont réussi à commencer à casser la seule économie européenne
08:08 qui avait une certaine force, à savoir l'économie allemande.
08:12 Donc, très belle réussite du point de vue des Américains,
08:18 et Macron, il faut le savoir, c'est Macron SFIC,
08:22 Section Française de l'International du Capital,
08:25 donc il est le délégué France du capitalisme mondial,
08:29 et donc il a fait le boulot, on lui demandait,
08:32 de détruire l'industrie européenne pour sauver le noyau dur du capitalisme mondial,
08:37 qui est le capitalisme américain,
08:39 et donc il a sa feuille de route, et il exécute sa feuille de route.
08:43 – Alors, vous vous en prenez au libéralisme,
08:46 dans votre ouvrage "Le coma français", Pierre Le Vigan,
08:49 pourquoi vous dites que cette idéologie est de plus en plus le contraire de la démocratie ?
08:54 – Oui, parce que d'ores et déjà, le libéralisme, ça a toujours été,
09:00 à partir de 1989, finalement, la démocratie représentative.
09:05 La démocratie représentative n'est pas équivalente à la démocratie.
09:10 Ça ne veut pas dire que la démocratie ne passe pas
09:13 par un certain nombre de représentations,
09:16 d'élections de conseillers généraux, etc., de députés,
09:20 bien entendu, c'est une des modalités de la démocratie,
09:23 mais la démocratie ne se réduit pas à la représentation,
09:26 d'autant qu'au début de la révolution française,
09:29 les libéraux s'accommodaient parfaitement d'une représentation
09:32 limitée aux gens bénéficiant d'un niveau de fortune minimum.
09:38 Donc, c'était en fait une démocratie pour les très riches,
09:43 ou en tout cas pour les riches, même si le sens a ensuite été abaissé,
09:46 sous Louis-Philippe, etc.
09:49 Et surtout, la démocratie est devenue le contraire du libéralisme.
09:53 En fait, le libéralisme repose avant tout sur l'individualisme.
09:56 Donc, le libéralisme ne prend pas en compte l'existence des peuples,
10:00 il ne prend pas en compte l'ethnos,
10:04 il ne prend pas en compte le peuple dans sa diversité de métiers.
10:10 On sait que l'une des premières mesures de la révolution française,
10:14 ça a été les lois Dallard, les lois Le Chapelier,
10:16 de supprimer tout ce qui était intermédiaire entre l'individu et l'État,
10:20 de façon à ce qu'il ne puisse pas y avoir d'égroupement,
10:24 d'intérêt et de solidarité défendant précisément leur intérêt et leur vision,
10:31 pas seulement leur intérêt, mais leur éthique, leur ethos,
10:34 leur vision du travail bien fait.
10:36 Donc, la logique libérale, c'est l'individualisme.
10:39 Et je distingue...
10:41 – Vous avez cette formule, "une aristocratie financière déracinée
10:45 a désarmé le politique pour protéger le gros argent par l'économique
10:50 et l'État de droit contre les dérives du politique".
10:53 – Tout à fait.
10:54 C'est-à-dire que le marché et la juridicisation de la société,
11:00 en fait, empêchent le politique de jouer pleinement.
11:04 C'est-à-dire que, finalement, ça nous renvoie à la question
11:07 de la disparition de la souveraineté nationale et de la souveraineté populaire.
11:10 C'est-à-dire qu'il est impossible, par exemple, d'avoir des mesures
11:13 contre le libre-échange ou des mesures contre l'immigration,
11:17 parce que c'est interdit d'une part par le haut, par l'Union européenne,
11:22 par la technocratie bruxelloise toute puissante,
11:26 mais aussi par les juges, aussi bien européens que français.
11:30 Il ne faut pas oublier le rôle des juges français.
11:33 Et donc, en ce sens, toute politique qui limiterait
11:38 la libre circulation des hommes et des marchandises
11:41 est, en fait, interdite par le système actuel.
11:44 C'est-à-dire que le politique en France, je distingue le politique de la politique,
11:49 le politique, c'est-à-dire, en fait, la puissance populaire,
11:53 est rendue dans une situation, en fait, d'incapacité.
11:59 Elle s'est liée les mains par l'entrée dans l'Union européenne,
12:04 mais aussi par la construction de tout un système juridique
12:08 avec le Conseil constitutionnel et le Conseil d'État
12:11 qui empêche la volonté populaire, quand bien même ses délégués,
12:15 les députés, auraient telle volonté de s'exercer.
12:20 Puisque finalement, même s'il y avait une majorité de députés
12:24 contre le libre-échange et contre l'immigration,
12:26 ça serait rendu impossible, ne serait-ce que par les juges français
12:30 et aussi par les juges européens.
12:32 – Alors, vous dénoncez aussi la multiplication des mesures de contrôle
12:35 et de contraintes des populations en matière sanitaire, climatique.
12:40 Quel est l'objectif, selon vous, de ces contraintes ?
12:43 – Alors, l'objectif, c'est de tétaniser les gens, c'est de leur faire peur.
12:47 – Effet de sidération.
12:48 – Voilà, effet de sidération. La pandémie que nous avons connue,
12:51 dont on sait, on me rend qu'elle est essentiellement d'origine humaine,
12:54 elle est sortie d'un laboratoire, sans doute accidentellement,
12:57 ça c'est le débat, peut rester ouvert, certainement accidentellement,
13:01 mais nous n'en savons rien, mais en tout état de cause,
13:06 elle a surtout été très bien utilisée, très bien instrumentalisée
13:11 et peut-être même, si est-on jamais, programmée, pour tétaniser les gens
13:15 et c'est un exercice extraordinaire de contrôle social,
13:19 vraiment extraordinaire et on va ajouter à ça maintenant,
13:23 le très hypothétique changement climatique,
13:27 qui est en fait peut-être le seul problème écologique qui n'existe pas,
13:30 c'est-à-dire qu'il y a beaucoup de problèmes écologiques réels,
13:33 mais on ne parle que du sol qui est très hypothétique, très contestable,
13:37 qui est le changement climatique, le climat a toujours changé,
13:41 mais qui est le soi-disant réchauffement climatique anthropique,
13:46 qui n'est pas prouvé et qui par ailleurs n'a pas que des inconvénients.
13:51 – Vous évoquiez à l'instant le libéralisme économique,
13:54 que l'on ajoute à ce que vous appelez totalitarisme sociétal.
13:58 – Absolument, totalitarisme sociétal, on le voit dans les dernières lois
14:02 qui criminalisent les propos, non seulement dans la sphère publique,
14:07 mais les propos privés, politiquement incorrects.
14:11 Alors ça peut être tout, ça peut être ce qu'on appelle racisme,
14:15 dont la définition est de plus en plus illimitée si je puis dire,
14:19 ça peut être l'homophobie, ça peut être le complotisme antiréchauffiste,
14:26 c'est-à-dire l'approbation ou l'intérêt, le simple intérêt
14:30 manifesté à des théories qui contesteraient la thèse du réchauffement climatique
14:36 anthropique, voilà, donc c'est en fait l'interdiction de tout débat d'idées
14:42 au nom d'une situation de guerre, puisque Macron nous dit
14:46 que nous sommes dans une économie de guerre, donc l'économie de guerre,
14:50 c'est en fait une situation de guerre, plus largement,
14:52 c'est pas que l'économie, et donc c'est aussi une situation
14:55 de guerre idéologique qui justifie l'interdiction
14:58 de toutes les opinions dissidentes.
15:01 – Vous dites que d'énormes efforts d'endoctrinement sont déployés
15:06 en permanence pour empêcher les Européens de croire à la réalité
15:10 de leur propre existence, ça se manifeste comment, ça concrètement ?
15:14 – Alors ça se manifeste par la culpabilisation permanente
15:18 de l'histoire des Européens, alors qu'elle est ni plus ni moins sombre
15:25 que l'histoire de n'importe quel peuple, enfin de même que l'histoire
15:29 de la Turquie ne peut se résumer au génocide arménien,
15:34 l'histoire de l'Europe ou de la France ne se résume pas
15:38 à des exactions pendant la guerre d'Algérie, qu'il faudrait au nombre
15:42 grand mettre en regard, des exactions du FLN.
15:45 – Oui, c'est la haine de soi quoi.
15:47 – C'est la haine de soi, c'est le contraire de la sérénité,
15:50 c'est le contraire du regard lucide sur notre histoire,
15:56 et nous sommes les seuls à faire ça, est-ce que l'Algérie fait la même chose ?
16:02 Est-ce que la Turquie passe son temps à expliquer qu'ils ont eu
16:08 des esclaves chrétiens dont certains hauts de morance
16:11 sont devenus conseillers du sultan, c'est vraiment une proportion sociale
16:16 pas inintéressante, mais enfin en passant par le fait de devenir eunuque,
16:21 c'est quand même une étape plus difficile.
16:25 – Vous expliquez bien que nos dirigeants nationaux européens
16:28 souhaitent une humanité indifférenciée, homogène,
16:32 où les hommes sont substituables les uns aux autres, ça va dans quel sens ?
16:36 – C'est certainement l'élément central de mon ouvrage,
16:40 en fait à partir des années 70 on a parlé de néolibéralisme,
16:44 et on a expliqué que le néolibéralisme en fait voulait revenir
16:48 sur ce qu'on a appelé le compromis fordiste,
16:50 en économie on a appelé ça le keynesianisme,
16:52 c'est-à-dire un compromis entre le capital et le travail
16:55 dans lequel les travailleurs avaient quelques fruits
16:58 de la production dont ils étaient à l'origine.
17:03 Ce néolibéralisme a détruit les services publics, etc.
17:06 C'est toute l'époque Thatcher, Reagan, etc.
17:09 Mais, moi j'emploierais plutôt l'expression
17:13 libéralisme de type 1, libéralisme de type 2,
17:15 et je pense qu'il faut aller bien au-delà de cet aspect
17:18 qui est important, le remboursement des services publics.
17:21 Le libéralisme de type 1, en gros celui qui fait suite
17:25 à la révolution française,
17:27 – La loi de propriété, la libre entreprise.
17:30 – Voilà, c'est surtout, il part d'un postulat,
17:32 c'est que l'homme n'est mu que par ses intérêts,
17:35 que c'est globalement positif pour la société,
17:38 et que donc il faut valoriser l'individu,
17:41 guidé par ses intérêts, et ce qu'expliquait Adam Smith,
17:44 c'est que c'est en suivant ses intérêts
17:46 que le boucher vous propose de la bonne viande.
17:48 Et donc finalement, la recherche de son propre intérêt
17:52 sert le bien commun, et ça ne sert à rien de vouloir
17:56 le bien commun, ça arrive automatiquement.
17:58 Donc ça c'est le libéralisme de type 1.
18:00 En fait, ce libéralisme de type 1 s'est rendu compte
18:02 que finalement, les gens avaient tendance
18:04 à reconstituer des solidarités.
18:06 Droits de coalition sous Napoléon III en 1864,
18:10 enfin, droits de grève en 1864,
18:13 droits de créer des syndicats en 1884,
18:16 ou à Valdez-Crousseau, et finalement,
18:18 ensuite, compromis fordistes, avancées sociales
18:22 arrachées par le monde du travail,
18:25 programmes sociaux aussi bien de Vichy,
18:27 avec la retraite des vieux travailleurs,
18:29 que dans le programme du CNR,
18:31 Conseil National de Résistance.
18:32 Et le libéralisme de type 2 se dit,
18:34 non mais ça ne va pas.
18:36 Alors finalement, notre hypothèse,
18:37 comme quoi l'homme ne pensait qu'à ses intérêts,
18:39 ça ne marche pas comme ça.
18:42 Donc, il va falloir que ça passe en force maintenant.
18:45 On s'est trompé, on a pensé tout naturellement,
18:48 en favorisant l'individu,
18:50 l'individualisme triompherait naturellement.
18:52 Non, ça ne marche pas.
18:53 Donc, il va falloir qu'il triomphe de force.
18:55 En ce sens, le libéralisme de type 2 est totalitaire,
18:59 parce qu'il constate que l'individualisme
19:02 ne va pas de soi, donc il faut l'imposer.
19:05 Les gens, finalement, ne sont pas aussi interchangeables
19:08 qu'on le pensait en 1789,
19:10 donc il faut qu'ils le deviennent de force.
19:13 C'est en ce sens que le libéralisme
19:15 est devenu le pire des totalitarismes.
19:17 Et donc, pour que les hommes deviennent interchangeables de force,
19:20 il faut une immigration de masse,
19:23 il faut développer la haine de soi,
19:25 il faut, comment dire,
19:28 ne proposer aucune assimilation aux immigrés,
19:30 puisque finalement, on ne peut pas sérieusement dire
19:35 qu'on leur propose une assimilation,
19:37 puisque en même temps, nous expliquons que nous sommes un pays
19:39 qui a fait essentiellement des choses épouvantables
19:41 dans son histoire, donc à moins d'être complètement fou,
19:44 n'importe quel étranger n'a pas envie de s'assimiler
19:47 à quelqu'un qui ne cesse de dire...
19:50 – Qu'elle n'a pas d'identité, qu'elle n'est que le réceptacle des autres.
19:53 – Absolument, et que par ailleurs,
19:55 l'essentiel des choses que nous avons faites
19:57 sont des saloperies, pour faire court.
20:00 – L'Europe n'accueille pas, en fait,
20:02 elle laisse entrer tout le monde comme dans un moulin.
20:04 – Absolument, absolument, comme dans un moulin.
20:06 – Vous citez Hervé Juvin, qui est eurodéputé, je crois,
20:11 pour le Front National, si je ne dis pas de bêtises.
20:15 – Oui, oui, c'est exact.
20:17 – Il dit ceci, "l'écologisme a deux ennemis,
20:19 le globalisme et l'individualisme".
20:22 Comment se conçoit l'écologie, d'après vous ?
20:25 – Alors, l'écologie, c'est la prise en compte
20:28 d'un équilibre entre l'homme et la nature.
20:31 Il est évident qu'on ne peut pas laisser partout
20:36 la nature vierge de toute marque humaine.
20:40 Simplement, les marques de l'homme,
20:42 les marques de la présence de l'homme,
20:44 les aménagements du territoire,
20:46 peuvent se faire dans un certain respect.
20:48 Par exemple, on n'est pas obligé d'avoir
20:51 d'immenses zones commerciales, avec des parkings
20:54 qui imperméabilisent le sol sur des kilomètres carrés.
20:58 Donc voilà, construire des villes,
21:01 c'est une humanisation du territoire.
21:03 Et pourtant, quand vous allez à Bruges,
21:06 vous avez des beautés de paysages
21:08 qui vous ravissent l'esprit et l'âme.
21:12 Donc, la question n'est pas de transformer la nature.
21:15 À partir du moment où il y a de l'homme,
21:17 il y a transformation de la nature.
21:19 Même chez les Grecs, au 5ème siècle avant notre ère,
21:21 il y avait déjà transformation de la nature.
21:23 La question est de le faire dans le respect
21:25 d'une certaine esthétique.
21:27 Alors, cette esthétique, elle est subjective,
21:29 elle est en fonction de chaque peuple,
21:31 en quelque sorte.
21:33 L'esthétique des peuples de la forêt
21:35 n'est pas la même esthétique que les peuples du désert, etc.
21:39 Mais, dans tous les cas,
21:41 il y a la recherche d'une certaine beauté.
21:43 Et l'un des éléments de cela,
21:46 c'est de construire en fonction des matériaux locaux aussi.
21:50 C'est en ce sens que l'écologie passe obligatoirement
21:54 par la relocalisation des économies,
21:57 des matériaux utilisés et des esthétiques.
22:01 Chaque peuple a son esthétique.
22:03 Et quand on voyage, ce qui est intéressant,
22:05 c'est de voir que l'esthétique d'un village de Jordanie,
22:08 d'un village traditionnel, j'entends bien,
22:10 je ne parle pas d'une tour de bureau internationale,
22:12 ce n'est pas la même que l'esthétique d'un vieux village
22:15 du côté d'Orcival en Auvergne.
22:18 Et c'est l'intérêt de voyager.
22:20 Et effectivement, si vous ne voyagez que dans des hôtels d'aéroports,
22:23 ça ne sert à rien de voyager parce qu'ils sont tous les mêmes.
22:26 Donc la beauté du monde, c'est sa diversité.
22:30 Et c'est ce que le libéralisme de type 2,
22:33 c'est-à-dire le libéralisme totalitaire,
22:35 veut anéantir.
22:36 Interchangeabilité des hommes.
22:39 L'uniformisation.
22:40 Interchangeabilité des paysages.
22:42 Beaucoup d'observateurs constatent encore aujourd'hui
22:46 des différences entre les 27 États membres de l'Union européenne.
22:50 Vous persistez à penser qu'il existe des convergences.
22:53 Alors, sur quoi on se retrouve ?
22:56 Alors, on a beaucoup souligné depuis au moins 10 ans,
22:59 par exemple, que l'économie allemande,
23:01 avant la crise ukraine-russie,
23:04 s'en sortait bien.
23:06 Bon, d'une part grâce à une stratégie économique
23:10 des Allemands plus performante que la nôtre,
23:13 mais aussi parce que l'Eurofort favorisait l'économie allemande,
23:17 encore que le marque aurait été encore plus fort
23:20 que le niveau actuel de l'euro.
23:22 Donc, si l'Allemagne avait gardé sa monnaie,
23:25 elle s'en serait peut-être encore mieux sortie.
23:27 Bon, certes, mais ce que je dis,
23:29 c'est qu'à long terme,
23:31 les intérêts de tout, au moins de toute l'Europe occidentale,
23:34 sont convergents.
23:35 C'est-à-dire que la question n'est pas
23:38 de savoir si l'industrie française
23:42 va se faire manger par l'industrie allemande.
23:44 La question actuelle,
23:45 c'est que les industries aussi bien françaises qu'allemandes
23:48 se font manger par l'industrie américaine
23:50 qui a réussi à nous couper des approvisionnements
23:54 venant de la Russie.
23:56 Donc, c'est ça la vraie question.
23:58 Je pense qu'il y a une convergence.
23:59 La convergence, elle est géographique, alors ?
24:01 Elle n'est pas seulement géographique,
24:02 elle est aussi civilisationnelle.
24:04 La civilisation allemande est une grande civilisation,
24:07 qui a été souvent en conflit avec la nôtre,
24:09 mais disons que nous sommes contre les Allemands,
24:12 mais tout contre,
24:13 pour reprendre la formule de Sacha Guitry,
24:15 je dirais la même chose,
24:16 entre nous et les Italiens,
24:18 et entre nous et les Espagnols.
24:19 Est-ce que vous citez le parti de l'étranger ?
24:21 Est-ce qu'il y a une volonté de l'extérieur
24:23 de diviser les Européens entre eux ?
24:26 Est-ce que les Français n'ont pas intérêt
24:28 à se réconcilier avec les Allemands
24:30 et cet ensemble-là avec les Russes ?
24:33 On a surtout intérêt à être plus fort, déjà.
24:35 Parce que, dans le coup franco-allemand,
24:38 il n'y a que la France qui tient ce discours.
24:41 L'Allemagne ne la tient pas.
24:43 Et en fait, la France ne cesse de se voir en couple
24:47 avec une Allemagne qui, elle,
24:49 ne se voit pas du tout en couple avec la France.
24:51 Les Allemands n'ont pas ouvert leur bouche
24:54 quand il s'est agi de dénoncer l'explosion de Nord Stream.
24:58 Oui, oui, tout à fait.
24:59 Il y a une espèce de soumission totale.
25:01 Parce que l'Allemagne est sous le protectorat américain,
25:04 peut-être plus encore que la France,
25:06 mais encore que Macron a une stratégie plus subtile.
25:10 C'est plutôt qu'il veut refaire le boulot
25:13 que ne veulent plus faire les Américains.
25:15 C'est une stratégie de néo-OTAN.
25:18 Donc ça va au-delà d'être sous protectorat américain.
25:21 C'est plus ambitieux, mais toujours comme valait des Américains.
25:25 Je terminerai cet entretien avec vous, Pierre Le Vigan,
25:28 avec cette citation dans votre ouvrage.
25:31 "Plus personne ne croit que la politique puisse changer la vie.
25:34 Et pourtant, la politique libérale a changé la vie.
25:37 Quel genre de politique pourrait inverser
25:40 les résultats de cette politique libérale alors ?"
25:43 Alors, une politique réellement démocratique,
25:46 fondée avant tout sur le droit de référendum d'initiative populaire.
25:51 Je crois que c'est vraiment un élément fondamental
25:55 qu'il faut défendre.
25:57 Et l'usage aussi du référendum par le président de la République,
26:04 mais avec des questions à la fois simples, sérieuses,
26:09 et qui soient respectées.
26:11 Parce que si c'est pour en arriver de nouveau au référendum de 2005,
26:15 où les Français disent non, et le résultat qu'ils ont,
26:18 c'est finalement le contraire de ce qu'ils souhaitaient,
26:21 ça n'a pas de sens.
26:23 Il faut que le référendum s'impose ensuite aux législateurs.
26:28 Donc voilà, quand je parle de fondamentalement révolution démocratique,
26:32 ça veut dire...
26:34 – Rupture avec le progressisme, le droit de l'omisme,
26:37 – Absolument.
26:38 – Qui a fait reculer le niveau de vie des classes moyennes.
26:41 – Des classes populaires, enfin, disons que le culte du progrès
26:45 est contredit par la réalité, puisque les classes populaires
26:49 et les classes moyennes sont beaucoup plus en difficulté qu'il y a 30 ans.
26:53 Et puis ce n'est pas un mythe suffisamment mobilisateur.
26:58 En fait, le mythe mobilisateur, ça doit être l'indépendance des nations d'Europe,
27:03 si possible en association entre elles, pour résister aux colosses américains,
27:10 et même aussi aux colosses chinois,
27:13 association des nations d'Europe,
27:15 mais il faut d'abord que chaque pays se prenne en main,
27:17 il faut d'abord que la France soit plus forte,
27:19 y compris industriellement, ce qui est vraiment la base de tout,
27:22 parce que sans industrie forte, on ne peut pas avoir une armée solide.
27:26 Donc là, on a une armée qui a des qualités,
27:29 mais qui est un pigmal et qui est minuscule,
27:32 qui est en fait, c'est un, comment appelle-t-on ça,
27:36 bonsai, c'est une armée bonsai, c'est-à-dire,
27:38 – Échantillonnaire.
27:39 – Elle est jolie, mais elle est de taille réduite,
27:42 c'est pour amuser, en quelque sorte.
27:45 – Donc renouer avec la puissance, donc avec le politique,
27:48 et donc avec la souveraineté.
27:50 – Voilà, mais en sachant au service de quoi,
27:52 c'est-à-dire non pas au service d'un potentat ukrainien,
27:57 alors que nos intérêts vitaux de Français et d'Européens
28:00 ne sont pas menacés,
28:02 mais au service de l'indépendance de notre peuple avant tout
28:06 et des peuples européens en général,
28:09 et en ne se laissant pas entraîner par l'obsession antirusse,
28:14 il faut bien le dire, de certains pays de l'Est.
28:18 Ce n'est pas notre problème
28:22 si les Polonais sont obsédés par le danger russe.
28:26 – Qui était le danger soviétique d'autrefois.
28:29 – Qui était le danger soviétique d'autrefois,
28:31 alors qu'il est quand même assez clair que la Russie
28:33 n'a aucune intention d'établir son protectorat sur la Pologne.
28:37 Enfin, je pense que Poutine n'est ni bon ni mauvais,
28:41 c'est tout simplement un homme réaliste.
28:43 Son pays a 140 millions d'habitants,
28:46 il a été dans une situation catastrophique
28:48 pendant 10 ans, de 1991 à 2001 en gros,
28:51 il commence à peine à se relever.
28:53 – Il n'était pas au pouvoir, il est arrivé, oui.
28:55 – Voilà, tout à fait, ceci pour dire que je pense
28:57 que l'objectif de Poutine, il est en gros
29:00 de ne pas avoir un ennemi otanesque, à savoir l'Ukraine, à ses portes.
29:04 – La Russie en premier en fait, c'est ce que je voulais dire.
29:07 – Voilà, ce n'est pas de rétablir un quelconque protectorat
29:10 sur la Roumanie, sur la Hongrie, sur la Pologne,
29:13 c'est "soyons sérieux", enfin Poutine, je pense,
29:15 c'est un homme sérieux.
29:17 – "Le coma français", c'est le titre de votre ouvrage,
29:20 Pierre Le Vigan, à retrouver sur la boutique de TVL,
29:23 je le répète, merci à vous monsieur.
29:25 – Merci Pierre.
29:26 [Générique]

Recommandations