Emmanuelle Pierre-Marie, maire EELV du 12e arrondissement
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00:00 C'est la maire du 12ème arrondissement, maire E.L.V. qui est avec nous, Emmanuelle Pierre-Marie, bonjour.
00:05 Bonjour.
00:06 Vous avez été, vous, victime d'une très violente agression à vélo en juin dernier.
00:11 L'audience s'est tenue hier, face à face avec l'agresseur, ça a été un moment évidemment très éprouvant.
00:18 Comment vous vous sentez ce matin ?
00:20 Un peu vidé, un peu traumatisé effectivement de revivre par l'audience cette épreuve
00:28 qui m'a mis en état de sidération.
00:32 Donc c'est pour vous dire à quel point effectivement le traumatisme est réel.
00:35 Toujours sous le choc après dix mois ?
00:37 Toujours sous le choc après dix mois, effectivement.
00:40 Cette violence a été crescendo pour ma part.
00:42 D'abord symbolique, ensuite verbale et puis l'agression physique avec l'intention de nuire.
00:51 On va raconter ce qui s'est passé.
00:53 C'était ce 17 juillet 2023, vous êtes à vélo, rue de Charenton, sur une piste cyclable.
01:00 Et là il y a un scooter qui arrive, il manque de vous renverser.
01:02 Vous dites avoir été prise pour cible ?
01:06 Tout à fait, c'est pas tout à fait, je vais raconter exactement.
01:09 Effectivement, samedi, comme tout maire, j'allais d'événement en événement.
01:14 Et il faut savoir qu'effectivement mon principal mode de déplacement est le vélo pour ma part.
01:19 Et je rentrais rue de Charenton, qui est désormais une vélo rue sur cette partie-là,
01:24 et j'étais en contresens cyclable.
01:26 Et le motard est arrivé derrière moi, donc lui était aussi en contresens cyclable et donc en infraction.
01:32 Me double et me frôle.
01:34 Donc je lui signifie qu'il est en infraction, en sens interdit, et qu'il n'a pas à me frôler.
01:41 D'où une altercation verbale, qu'il n'a pas appréciée et que je lui rappelle.
01:47 Donc tout de suite je décline mon identité en lui rappelant que je suis la mère du deuxième.
01:52 Je lui ai dit plusieurs fois d'ailleurs.
01:54 Et là, ces propos que je ne voudrais pas répéter sur cette radio,
02:02 ont été extrêmement agressifs, puisque c'était quand même des insultes de viol.
02:11 Il faut rappeler un chat, plus plusieurs doigts d'honneur.
02:16 D'ailleurs j'en ai pris un en photo, ce qui a été versé au dossier du tribunal.
02:23 Et puis ensuite, voyons ça, il a fait cet arrêté pour faire demi-tour et m'a foncé dessus.
02:31 Donc effectivement je ne m'attendais absolument pas à cette violence routière.
02:35 - Il vous a foncé dessus ?
02:36 - Il m'a foncé dessus la première fois.
02:38 C'est mon vélo qui m'a sauvée.
02:41 Et là, d'où mon état de sidération, il s'est reculé.
02:44 Et là, moi j'étais tombée, enfin je n'étais plus sur mon vélo.
02:49 - A terre ?
02:50 - Non, je n'étais pas à terre, j'étais debout.
02:51 Je suis tombée du vélo, mais j'ai réussi par je sais pas quel miracle, peu importe.
02:56 J'étais pas à terre, j'étais debout.
02:58 Et là, effectivement, il recule pour de nouveau me foncer dessus.
03:01 Mais là, il n'y avait plus de barrière entre lui et moi.
03:04 Et c'est les passants qui se sont interposés.
03:08 Donc c'est vrai que la deuxième fois, c'est les passants qui m'ont sauvée.
03:13 Et la troisième fois, puisqu'il y a une troisième étape,
03:16 moi étant là, pour le coup, en état de sidération,
03:19 je n'ai pas pris conscience de ce que je vivais sur le moment.
03:23 En revanche, j'ai eu la chance que dans ces passants, il y ait un policier en civil.
03:28 Et qui lui a eu le réflexe, puisque moi je reprenais mon vélo pour repartir.
03:34 Et là, il m'a dit "non, madame la maire, il a dit qu'il reviendrait".
03:37 Et donc, on s'est arrêtés.
03:40 J'ai appelé le commissaire, puisque le commissariat était juste derrière le lieu de l'incident.
03:47 Et le commissaire et ses équipes sont arrivées immédiatement.
03:50 Et effectivement, le policier en civil a revu le motard revenir.
03:56 - Donc il voulait potentiellement vous foncer dessus une troisième fois ?
03:59 - Tout à fait. En tout cas, il voulait en découdre, c'est sûr.
04:03 - Vous avez encore les larmes aux yeux ce matin. On sent que l'émotion est toujours vive.
04:08 - C'est une violence, vous comprenez, compliquée à vivre.
04:13 - Vous dites "je ne comprends pas cette violence, cette haine". Vous ne la comprenez toujours pas aujourd'hui ?
04:18 - Je ne la comprends toujours pas.
04:21 D'une part parce qu'elle est quotidienne. Je pense sur les personnes les plus fragiles.
04:28 Moi, j'ai subi une triple violence en fait.
04:31 Parce que femme, parce que cycliste et parce qu'élu.
04:35 Et élu, mère, écolo.
04:38 Donc je pense qu'effectivement, c'est de porter aussi cette cible.
04:44 Et d'ailleurs, j'apprends à être une cible vivante désormais.
04:49 Puisque l'agression, elle a été poussée à son paroxysme.
04:54 Mais je vais dire, elle est continue.
04:57 D'abord, elle est continue sur le cyberharcèlement que je peux vivre.
05:01 Mais elle est aussi continue dans la façon dont, de manière un peu exacerbée,
05:06 on peut avoir une violence symbolique sur les femmes et des démonstrations de force en permanence.
05:12 Notamment quand on est élu en politique.
05:15 Plus quand on est mère, femme et écolo.
05:19 Mais elle est aussi verbale. Elle est rarement physique.
05:22 Et heureusement ! Ce qui me permet encore de me déplacer, comme je le fais tous les jours,
05:27 à vélo ou à pied, sans difficulté.
05:29 - Mais vous pensez que vous avez été prise pour cible parce que vous êtes élu et femme ?
05:37 - J'allais dire l'inverse. Femme d'abord, parce qu'il n'était pas conscient de mon statut.
05:43 - Mais ça c'est d'un argument, vraiment ? - Oui.
05:45 - C'est pas juste de la violence routière ?
05:47 - Alors, elle a été exacerbée par mon statut.
05:50 La violence routière, elle est là.
05:52 Et si je témoigne ce matin,
05:56 si j'ai rendu publique aussi cette agression,
06:00 ça a été mûrement réfléchi et difficile...
06:04 Pardon. Une décision difficile à prendre.
06:07 Mais je le fais pour toutes ces femmes,
06:10 ou tous ces cyclistes, ou tous ces piétons et piétonnes,
06:13 qui ne peuvent pas le faire, contrairement à moi.
06:17 Mais effectivement, je pense que là, la violence a été exacerbée du fait d'être élue.
06:21 - Et on va les entendre, ces piétons, ces cyclistes, ces automobilistes aussi,
06:25 juste avant de prendre les auditeurs libres au standard.
06:28 Hier s'est tenue cette audience au tribunal de grande instance de Paris.
06:32 Vous l'avez dit, ça a ravivé des souvenirs douloureux.
06:35 Est-ce que ça fait du bien quand même ?
06:37 Est-ce que les explications apportées par l'agresseur vous ont convaincues ?
06:41 - Ce qui m'a fait du bien, c'est la présence de la maire de Paris
06:44 qui se déportait de partie civile, et l'ensemble des élus.
06:46 Il y avait beaucoup de maires d'arrondissement,
06:48 et donc des maires d'opposition, le maire du 16ème notamment,
06:51 et des élus de tous bords.
06:53 C'était aussi, je pense, une manifestation importante
06:57 de montrer une solidarité d'élus.
07:00 En revanche, non, je n'ai pas été convaincue,
07:05 parce que je pense que la prise de conscience,
07:08 et c'est pour ça que j'aimerais aussi que ce témoignage serve,
07:11 aussi dans ce sens, c'est vraiment de comprendre
07:15 que les situations d'impunité, ce n'est plus possible,
07:17 et surtout que cette violence n'est plus acceptable.
07:20 - 20 mois de prison, dont 12 à 14 mois avec sursis,
07:23 c'est de l'impunité pour vous ?
07:25 - C'est les réquisitions.
07:27 - Attention, le jugement c'est le 7 mai.
07:29 - Là, vous m'interrogez par rapport à ses propos.
07:31 Et effectivement, les témoignages, même s'il reconnaît les faits,
07:36 il les minimise, c'est-à-dire que, parce qu'il était,
07:40 ce qu'il justifie, par une agressivité, une fatigue,
07:44 il avait bu trop de café, bon, peu importe.
07:47 Le fond même de sa violence routière,
07:51 je ne suis pas sûre qu'il l'a mesurée en entière,
07:54 et le fait même de cette agression,
07:56 agression par les propos et les gestes qu'il a tenus,
08:00 et agression par l'intention de me nuire physiquement.
08:05 - Emmanuel, Pierre-Marie, vous restez avec nous,
08:07 et on va direction Le Standard,
08:09 avec tous les auditeurs qui nous appellent, 01423010.
08:12 - Oui, on parle de cette violence sur la route,
08:14 violence verbale, violence physique aussi.
08:16 - Thierry Sarius. - Bonjour.
08:18 - Vous êtes à Garges-Légonnais, vous, vous constatez tous les jours
08:20 que la cohabitation sur la route, c'est difficile,
08:22 notamment avec certains vélos.
08:25 - Exactement. Déjà, moi, je suis taxi parisien,
08:28 et je ne veux pas du tout minimiser l'agression
08:31 que Mme Lamère a subie, ce n'est pas du tout normal.
08:35 Mais non, nous, on subit ça tous les jours.
08:37 C'est tous les jours, c'est régulièrement,
08:40 tous les jours sur Paris, c'est devenu l'insécurité totale,
08:44 que ce soit en voiture, déjà les vélos,
08:46 ils sont en insécurité toute la journée,
08:49 ils prennent les sens interdits, ils sont en contre-sens,
08:52 il faut s'arrêter quand il y a un vélo qui arrive,
08:54 c'est lui qui a la priorité, il ne fait plus attention,
08:57 les gens, ils grillent les cheveux en vélo,
08:59 ils passent sur les passages bietons,
09:01 ils prennent des clients toute la journée,
09:03 toute la journée, qui se disent en insécurité
09:05 sur les trottoirs à cause des vélos,
09:07 de l'incivilité des vélos.
09:10 Les gens, ils prennent les trottoirs partout,
09:12 ils n'arrivent plus à attendre derrière un courrouge,
09:15 c'est l'insécurité totale,
09:17 totale l'incivilité toute la journée, toute la journée.
09:20 – Merci Darius pour votre appel 01 42 30 10 10,
09:24 on l'évoquait ce matin, compliqué avec ce scooter et ce vélo,
09:27 et compliqué aussi entre les chauffeurs de taxi et les cyclistes.
09:30 Nadia est avec nous dans le 15e arrondissement, bonjour Nadia.
09:33 – Bonjour.
09:34 – Vous avez été victime de violences, vous, vous étiez à vélo ?
09:37 – Bah écoutez, oui, c'est à vélo,
09:39 en fait c'est surtout dans les rues,
09:42 où il y a le vélo à contre-sens par rapport aux voitures,
09:46 et moi souvent je fais un petit signe de loin pour bien qu'on me voie,
09:51 et il y a carrément des estafettes,
09:54 ou je ne sais pas comment ça s'appelle, des utilitaires,
09:56 j'en ai eu trois qui m'ont foncé dessus,
09:59 c'est incroyable, il y en a un où vraiment il m'a fait tomber,
10:02 j'étais coincée entre les voitures en stationnement,
10:05 et voilà, je suis tombée dessus,
10:09 et les passants, ils ont regardé, ils n'ont rien fait,
10:12 c'est un truc de fou quoi,
10:14 et puis alors il y a une autre incivilité,
10:17 j'entendais le taxi qui témoignait, je suis d'accord,
10:19 qu'il y a beaucoup de vélos qui font n'importe quoi,
10:21 néanmoins, moi j'ai été souvent aussi à l'intérieur des taxis,
10:26 et les taxis ne sont pas très sympas à l'égard des vélos,
10:29 ils envoient des gaz d'échappement, ils font des choses,
10:32 ils leur font des queues de poissons, enfin bon...
10:35 - C'est chacun pour soi, on l'entend sur la haute ce matin,
10:38 Nadia, merci beaucoup, dans le 15ème arrondissement,
10:40 on a un chauffeur de bus RATP qui est avec nous, c'est Carole,
10:43 bonjour Carole !
10:45 Carole, vous êtes là ?
10:47 - Oui, oui, je suis là, je suis là.
10:49 - Vous, la violence rotière, elle se traduit comment ?
10:51 Parce que là, vous, vous êtes dans votre bus,
10:53 vous êtes confrontée à ça au quotidien.
10:55 - Donc moi je dirais que les vélos, les taxis, les piétons,
10:59 tout ça, il faut que tout le monde s'entende,
11:02 et les vélos, je vous assure, franchement,
11:04 ils font beaucoup de choses qu'ils ne devraient pas faire,
11:06 et surtout il y a une impunité,
11:08 il faudrait que tout le monde s'entende,
11:13 mais c'est impossible,
11:15 parce que les vélos, je vous assure, ils sont dangereux aussi,
11:18 les piétons aussi, mais moi ce que je vois,
11:21 c'est que personne ne s'entend sur toute cette route,
11:24 et qu'est-ce qui manque ?
11:26 Il faut une tierce de personnes pour nous aider à gérer toute cette folie,
11:30 parce que c'est une grande folie,
11:32 il faut être un warrior pour marcher dans Paris.
11:37 - Et vous restez zen, vous, au volant, dans votre bus ?
11:40 - Ah, moi c'est obligé, c'est mon métier.
11:42 - Je sais bien, je sais bien.
11:44 - Je suis juste spectatrice.
11:46 - On salue les chauffeurs de bus qui nous écoutent ce matin.
11:48 0142 30 10 10, merci pour votre appel.
11:50 - Emmanuel, Pierre-Marie, vous entendez tous ces témoignages ?
11:53 Incivilité, insécurité totale, impunité, une grande folie,
11:57 on entend bien les vélos qui s'en prennent aux taxis,
12:00 les taxis qui s'en prennent aux vélos, chacun a son mot à dire.
12:03 Il y a un climat, il y a un climat de tension,
12:05 il y a un climat d'agressivité,
12:07 est-ce que ça vous inquiète ?
12:08 Et surtout, vous, en tant qu'élu, comment vous pouvez faire
12:11 pour faire redescendre cette pression ?
12:13 - Alors moi j'ai fait de la violence routière ma priorité.
12:17 Nous avons déployé avec la maire de Paris la police municipale,
12:20 et les consignes sont claires dans le 12ème,
12:23 c'est parce que là tout le monde en fait compose avec le code de la route.
12:28 On focalise sur les vélos, mais personne ne respecte ce code de la route en fait.
12:35 Les feux sont grillés par les voleos, et encore ça dépend,
12:38 parce qu'il y a des moments où les vélos, vous savez, avec ce fameux M12,
12:42 peuvent passer tout droit ou tourner à droite.
12:44 Mais peu importe, personne ne respecte le code de la route.
12:48 Et effectivement, j'ai de mauvaises habitudes.
12:51 D'abord, on rappelle, moi, si je me suis permise, puisque je rappelle,
12:56 ce motard était en infraction.
12:59 Moi j'étais dans mon droit, lui ne l'était pas.
13:01 Et en tant qu'élu, c'était aussi mon droit et mon devoir de rappeler ce code de la route.
13:08 La police municipale est là pour ça.
13:10 - Est-ce qu'on verbalise les vélos aussi ?
13:12 - Oui, alors dans le 12ème en tout cas on verbalise tout le monde,
13:14 tous ceux qui ne respectent pas.
13:16 - Y compris les vélos qui passent au rouge ?
13:17 - Y compris les vélos qui passent au rouge,
13:19 y compris les vélos qui sont sur les trottoirs,
13:21 mais les vélos, effectivement, on les attrape, on les voit.
13:25 Les autres, c'est plus compliqué, parce qu'aucun cycliste n'a tué à Paris.
13:28 En revanche, effectivement, il y a des accidents mortels,
13:31 et ils ne viennent pas des cyclistes.
13:33 Donc ça participe à ce sentiment d'insécurité,
13:36 ça participe à ce sentiment d'impunité.
13:39 En revanche, effectivement, vous voyez,
13:43 le témoignage de cette cycliste, à contresens, moi je le vis tous les jours,
13:46 c'est-à-dire qu'un automobiliste, une estafette ou peu importe,
13:50 qui fonce volontairement, comme moi j'ai eu,
13:53 sur cette dame qui est tombée de son vélo quand même,
13:55 là c'est une agression.
13:57 Et là, l'automobiliste, lui, au pire,
14:01 il a une bosse sur sa carrosserie.
14:03 - Et il faut pouvoir...
14:04 - Ce qui n'est pas le cas de la cycliste.
14:05 - Les interpeller et les sanctionner, évidemment.
14:07 - Tout à fait.
14:08 - Merci beaucoup Emmanuel, Pierre-Marie, d'être venu témoigner ce matin.
14:10 - Et je voulais juste rajouter quand même qu'on a mis en place aussi le Code de la rue
14:14 pour venir renforcer justement le respect.
14:18 Parce qu'on est tous piétons et piétonnes dans un moment de la journée.
14:21 Donc il faut vraiment savoir respecter les plus fragiles.
14:25 - Essayer de retrouver aussi un petit peu de raison, d'affaisement et de sérénité.
14:29 Merci beaucoup, on rappelle que le jugement dans le cas de votre agression
14:32 sera rendu le 7 mai prochain.
14:35 Bonne journée à vous.
14:36 - Merci Marie-Christine dont on n'a pas pu prendre l'appel dans le 19ème arrondissement
14:39 qui nous disait que le rythme de circulation ne va pas à Paris
14:41 entre les couloirs à vélo et les sens uniques.
14:43 Et merci à Mouloud, chauffeur de taxi lui aussi,
14:45 qui nous dit que c'est violent sur les routes quotidiennement.
14:48 Belle journée avec France Bleu Paris.