• il y a 6 mois
Comment l’intelligence artificielle (IA) peut-elle optimiser le fonctionnement des centres de tri des déchets ? La réponse avec Franck Lafontaine, président de Wasoria. Il explique dans SMART IMPACT comment sa solution prévient les incidents, tels que les bourrages et surtout les incendies qui peuvent entraîner des dégâts coûteux et des mises à l’arrêt. Il revient sur le rôle des batteries lithium-ion dans le déclenchement de ces incendies, ou encore sur l’enjeu d’assurabilité des centres de tri.

Category

🗞
News
Transcription
00:00L'invité de Smart Impact, c'est Franck Lafontaine, bonjour.
00:10Bonjour.
00:10Bienvenue, vous êtes le président de Wazoria, entreprise créée en 2020 basée au Creusot.
00:15Quel est votre métier ? Que propose Wazoria ?
00:18Alors, mon métier, c'est d'accompagner les collectivités, les centres de tri de déchets pour améliorer leur performance,
00:25protéger les centres de tri, les investissements et le personnel.
00:29Dans Wazoria, il y a IA, donc votre solution, elle passe par l'intelligence artificielle, c'est ça ?
00:33Exactement. Donc Wazoria, ça veut dire Waste Sorting IA.
00:37Donc, on utilise le machine learning, l'apprentissage pour reconnaître les déchets.
00:43Et avec cette reconnaissance, en fait, on génère de la donnée qui va nous permettre de donner des indicateurs clés
00:50pour tous les acteurs, en fait, de la filière, que ce soit le client final, la collectivité.
00:55Ça peut être aussi l'exploitant, les constructeurs. On touche l'ensemble de la filière du recyclage.
01:00Qu'est-ce qu'ils ont entre les mains ? Ils ont une plateforme ? Ils ont une application ? Comment ça fonctionne, en fait ?
01:04Exactement. Donc, en fait, on installe différents portiques un peu de partout dans les centres de tri.
01:09Donc, un centre de tri, qu'est-ce que c'est ? C'est un process, on a des déchets, le bac jaune qui arrive,
01:14vos papiers, vos journaux, tout ce qui est flux plastique.
01:18Voilà. Et en fait, on va les trier, on va les passer à travers des machines avec des convoyeurs.
01:22Et nous, on va installer nos portiques au-dessus des convoyeurs.
01:25Avec des détecteurs, en fait. Voilà, c'est ça. Donc, c'est des caméras, en fait, intelligentes.
01:30On reconnaît les déchets. Et avec les différentes informations qu'on retire de ces flux,
01:36on va conclure, on va donner des conclusions qui vont permettre d'accompagner la gestion du centre.
01:41Vous avez été choisi notamment par Citeo pour détecter des objets dangereux
01:47qui peuvent aboutir par erreur dans les centres de tri.
01:52Qu'est-ce que ça a comme conséquence ? De quoi on parle ? De quels risques on parle ?
01:56Alors, c'est un risque qui se développe de plus en plus, en fait.
02:01Il y a des bouteilles de protoxyde d'azote qu'on retrouve, des bouteilles de gaz.
02:06Et là, le plus gros fléau, c'est les batteries lithium-ion.
02:11En fait, c'est des objets qui arrivent dans la collette, qui ne devraient pas y être,
02:15et qui, lorsqu'ils s'inflamment, en fait, on ne peut plus faire grand-chose.
02:21C'est-à-dire qu'une batterie qui commence à s'inflammer, elle explose,
02:25en fait, elle crée plusieurs lieux d'incendie.
02:28Et derrière, pour l'éteindre, il faut être très, très réactif.
02:30Donc, l'idée, c'est de gagner du temps.
02:32Donc, concrètement, un centre de tri, ça vaut à peu près 30 millions d'euros.
02:36Et il y en a, en France, à peu près au moins un qui brûle par an, malgré tout ce qu'on peut mettre en œuvre.
02:42Parce que l'incendie, il peut se déclarer autant en amont que dans les lignes de tri, qu'en aval.
02:48Donc, voilà, notre objectif, en fait, c'est d'amener des yeux de partout dans le centre de tri
02:53pour être au plus près de la détection.
02:55Un par an, c'est quand même impressionnant ce que vous nous dites.
02:58Et beaucoup plus qu'avant, c'est-à-dire qu'il y a un effet batterie.
03:01Exactement.
03:02C'est-à-dire qu'il y a plus d'incendies dans les centres de tri aujourd'hui qu'il n'y en avait il y a 10 ans.
03:07Exactement. En fait, c'est un vrai phénomène aujourd'hui qui arrive.
03:12Et à tel point que des centres de tri ont du mal, en fait, à trouver des assureurs.
03:17On peut imaginer, vu qu'il y a beaucoup de centres de tri qui brûlent,
03:21les coûts d'assurance sont très élevés, voire même, il va falloir aller s'assurer dans des pays lointains,
03:27États-Unis ou autres. Donc, c'est très compliqué.
03:29Mais, alors, ça veut dire, pour bien comprendre, vous détectez, vous scannez, caméra intelligente,
03:33tous les objets qui passent.
03:36Elles passaient inaperçues, ces batteries, avant ? C'est ça que j'ai du mal à comprendre.
03:39C'est-à-dire que c'était un œil humain ? Comment c'était ? Qu'est-ce que vous remplacez ?
03:44Vous voyez ce que je veux dire.
03:45Alors, aujourd'hui, en fait, on n'a rien.
03:47C'est-à-dire qu'on a des systèmes qui regardent les déchets en amont, avec des caméras thermiques.
03:52Si on voit un départ de feu, on agit.
03:54Pareil sur l'aval, on peut mettre des systèmes de sprinklage qui vont traiter, on va dire,
03:59globalement la problématique.
04:01C'est quoi ces systèmes de sprinklage, pardon ?
04:03C'est des petites buses, en fait, qui soufflent de l'eau.
04:06D'accord. Donc, si on détecte un début d'incendie, on envoie de l'eau.
04:10On envoie de l'eau, mais bon, on crée une inondation dans le centre de tri.
04:13Il y a des jours d'arrêt.
04:14Donc, l'idée, c'est de gagner du temps et de protéger l'équipement, dans sa globalité.
04:18D'accord. Et de sortir, tout simplement, les déchets dangereux qui ne devraient pas être là.
04:23Mais ça veut dire que, pour l'instant, les filières de...
04:26Je reste sur les batteries.
04:27Les filières de recyclage n'existent pas tellement, ou alors ne sont pas assez connues de nous, du grand public.
04:34Alors, il y en a.
04:35Il y a la filière qui récupère les piles et l'accumulateur.
04:39Mais comme beaucoup de déchets, ils ne vont pas forcément aux bons endroits.
04:43Alors, qu'est-ce qui amène ce raisonnement ?
04:45Ce n'est pas évident, mais on retrouve beaucoup d'objets dans la collecte sélective qui ne devraient pas y figurer.
04:50Est-ce que le réchauffement climatique a aussi un effet ?
04:54C'est-à-dire que, notamment l'été, avec des températures souvent caniculaires,
04:59est-ce que ça peut provoquer plus d'incendies dans ces centres de tri ?
05:02En effet. En effet, on a plus de risques en été.
05:06Ce qui va faire que la batterie va prendre feu, c'est à la fois l'humidité et la chaleur.
05:13Et comme on est sur des déchets, on a des tas de déchets,
05:17on peut avoir cet espèce de phénomène de compostage, de montée en température à l'intérieur du gisement.
05:24L'idée, c'est de bien le suivre.
05:27Il y a des caméras thermiques, comme je l'expliquais en amont.
05:30Mais une fois que le déchet passe sur la ligne, on ne peut plus faire grand-chose.
05:33Oui, et de fortes pluies, ça peut aussi avoir un effet sur le lithium, c'est ça ?
05:39Ça peut avoir un effet sur le lithium, dans la mesure où on va avoir à la fois une élévation de température
05:45et une hygrométrie qui vont l'aider.
05:48L'aider, ce n'est peut-être pas le bon terme, mais le faire qu'il va prendre feu.
05:52Après, il y a les chocs aussi. Les chocs des batteries.
05:55Le fait, par exemple, sur une ligne, qu'il va y avoir des chocs dans les convoyeurs, dans les machines de tri,
06:00ça va aussi altérer potentiellement cette batterie et provoquer le mal.
06:05Vous détectez, vous retirez. Il y a d'autres risques liés au travail des centres de tri que vous permettez d'éviter ?
06:17Un centre de tri, si on prend dans sa globalité, c'est un espace qui n'est pas évident.
06:25Il y a des odeurs, de la poussière.
06:29C'est un environnement qui est assez stressant pour le personnel.
06:32Notre idée, c'est qu'en installant nos portiques, comme on a des yeux en permanence sur tous les convoyeurs,
06:38on va pouvoir accompagner l'exploitant pour qu'il puisse mieux exploiter, avoir des indicateurs et des alertes très rapidement.
06:46Notamment sur la pénibilité des tâches ?
06:48On peut agir sur la pénibilité des tâches.
06:50Par exemple, il y a des machines et puis après, il y a un contrôle qualité en cabine.
06:54Le fait de comprendre les gestes qui vont être réalisés par le personnel,
06:57c'est quelque chose qu'on peut analyser et on va pouvoir aller sur de la formation pour les aider,
07:02pour les protéger des troubles musculo-squelettiques.
07:05Et puis aussi la pénibilité, mais ça va être le stress.
07:08Imaginez, vous êtes dans le centre de tri.
07:10Si vous vous dites qu'à chaque instant, il y a un feu qui peut se déclencher,
07:13il y a un stress ou un bourrage ou d'autres choses.
07:17Nos yeux vont aider à alerter pour gagner du temps.
07:20Qu'est-ce qui cause un bourrage ?
07:22Un bourrage, ça va être un encombrant.
07:24Par exemple, un objet qui n'a rien à faire dans la collecte,
07:27qui va venir bloquer un convoyeur.
07:29Si on s'en rend compte tout de suite, c'est assez facile.
07:33Si on s'en rend compte au bout de dix minutes,
07:35on a une montagne de déchets qui s'est accumulée et qu'il faut sortir.
07:38C'est beaucoup de perte de temps et un gros impact sur la disponibilité du centre.
07:42C'est quoi le modèle économique de Wazoria ?
07:45C'est un forfait, c'est un abonnement, c'est un accompagnement au long cours ?
07:50On a d'abord l'installation de nos portiques,
07:54qui constitue un investissement.
07:56Ensuite, on accompagne avec un abonnement la performance
08:00puisqu'on améliore nos portiques.
08:02Vu que c'est de l'apprentissage, on les améliore en permanence.
08:04On va améliorer la performance.
08:06Aujourd'hui, sur tous les centres de tri français dont vous parliez,
08:09il y en a beaucoup qui sont équipés d'un système de détection d'intelligence artificielle ?
08:13On commence tout juste.
08:15On est vraiment au début.
08:17Ça demande beaucoup de développement.
08:19On est sur du domaine où il y a de la recherche.
08:21Je travaille avec des laboratoires de recherche, avec des thèses.
08:25L'objectif est d'obtenir la meilleure performance.
08:30On a déjà des algorithmes qui existent.
08:33On est dans un milieu qui est très hétérogène.
08:37Vous avez une bonne couche de déchets.
08:39Vous ne voyez que ce que vous voyez dessus.
08:41Ça demande un peu d'ingénierie et de compréhension du déchet
08:45pour obtenir le meilleur résultat.
08:49Dernière question.
08:51Je vous écoute depuis tout à l'heure.
08:53Je me dis qu'il y a vraiment une éducation au tri à faire.
08:57On a beaucoup progressé.
08:59On n'est pas là pour s'autoflageler.
09:01Il y a encore beaucoup de travail d'information à faire auprès des Français,
09:05auprès du public ?
09:07Effectivement.
09:09Ce domaine d'information, on va pouvoir l'accompagner.
09:11En janvier 2023, le tri a été simplifié.
09:13Vous avez pu mettre dans votre bac jaune
09:15tous les emballages pour que ce soit plus facile pour votre chaise de tri.
09:19Nous, dans les centres de tri,
09:21l'implication, c'est qu'on a beaucoup plus de déchets.
09:23C'est beaucoup plus hétérogène.
09:25Avec tous les indicateurs qu'on va pouvoir ressortir,
09:29avec les vues qu'on a sur la vision,
09:31on va pouvoir prendre des images, des photos,
09:33et pouvoir sensibiliser les personnes au tri citoyen,
09:36à l'amélioration du tri,
09:38et donner toutes les informations, notamment aux collectivités,
09:40pour qu'elles puissent mesurer leur performance
09:42et le conseil qu'elles apportent aux citoyens.
09:44Merci beaucoup, Franck Lafontaine,
09:46et à bientôt sur Bismarck.
09:48On passe à notre débat tout de suite,
09:50le financement des associations en danger.

Recommandations