Marc de Garidel (Abivax) : Patrons en questions (Émission du 16/09/2024)

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Dans ses interviews, Sophie de Menthon, présidente du mouvement patronal Ethic, se met dans la peau des patrons...

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00:00Marc de Garibald, bienvenue dans Patron en Question.
00:04Vous avez une société, on voit tout de suite ce que c'est,
00:07parce qu'elle s'appelle Abivax.
00:09Après une grande carrière dans les labos, vous nous direz peut-être un petit mot.
00:12Mais Abivax est une société vraiment dont on rêve,
00:16puisque ce sont les sociétés qui découvrent les nouveaux médicaments,
00:19qui s'attaquent aux maladies difficiles, inflammatoires en particulier de l'intestin,
00:24comme c'est le cas.
00:25Abivax, il y a le mot vax comme vaccin, et pourquoi ?
00:30A l'origine, c'est une boîte qui a été créée en collaboration avec le CNRS,
00:36dans les laboratoires à Montpellier.
00:38Deux chercheurs ont trouvé dans une librairie de molécules,
00:46une molécule qui pourrait être utile pour prévenir la réplication du virus du sida.
00:54Des premières expériences ont été commencées en 2013.
00:59En 2015, malheureusement, ces expériences n'ont pas été significatives.
01:08Il s'est trouvé qu'en faisant certains essais dans les modèles murins,
01:14on s'est rendu compte que cette molécule pouvait être utile
01:18dans les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin.
01:22Je trouve ça extraordinaire, parce que c'est toujours magique.
01:25On découvre par hasard, et là, c'est extraordinaire.
01:30Donc tout de suite, vous vous êtes rendu compte que ça pouvait servir à autre chose.
01:32Voilà.
01:33Et ça a été vite ?
01:34Ah, vite, ça ne va jamais.
01:35Heureusement, assez vite pour nous.
01:37Mais oui, il y a des essais cliniques qui ont été commencés, toute une série.
01:42Et aujourd'hui, on est une des rares sociétés françaises de biotechnologie
01:47qui a un produit en phase 3.
01:49On y est presque.
01:51On doit faire une étude de 1200 patients dans le monde entier.
01:54Le phase 3, donc, ça va être pour ?
01:56C'est la dernière étude, la plus grosse étude,
01:59qui doit rassurer les autorités de santé avant leur enregistrement
02:03que le médicament est à la fois efficace...
02:05Et celui-là, c'est pour l'intestin ?
02:07Celui-là, c'est pour la rectocolite hémorragique.
02:10Voilà, absolument.
02:11Donc la rectocolite hémorragique, elle se détecte parce que...
02:14Inflammatoire.
02:15Oui, c'est une maladie inflammatoire de l'intestin
02:17qui touche les parois intestinales, les petits ulcères,
02:20et les patients, en fait, sont des gens qui sont malheureusement,
02:24entre l'âge de 20 et 40 ans, qui sont diagnostiqués,
02:27et ils vont très souvent aux toilettes,
02:29ils perdent du sang dans leurs selles,
02:31et donc ils sont très fatigués.
02:32Parfois, leur vie, je dirais, professionnelle ou familiale,
02:35est réduite au néant à cause de ça.
02:38Et alors, ce qui est fabuleux, c'est que vous avez été
02:40un grand patron de laboratoire aux Etats-Unis,
02:42Ibsen, formidable, bon, très bien.
02:44Donc vous avez une carrière qui évolue.
02:46Mais moi, ce qui m'intéresse beaucoup, c'est que...
02:48Quelle est la différence entre les Etats-Unis et la France ?
02:51On nous dit, et je le crois très volontiers,
02:54que nous avons des gens de grands talents.
02:55On nous dit que nos chercheurs,
02:57qui sont à peine payés partout aux Etats-Unis...
02:59Là où la France...
03:01Pêche ?
03:02Pêche et a beaucoup de mal, c'est une fois qu'on a commencé
03:06à développer l'idée, et notamment le médicament,
03:09à la fois, je pense, les entrepreneurs dans le domaine,
03:13ainsi que le financement, manquent.
03:16Quand vous faites des essais cliniques,
03:18par exemple, chez la souris,
03:20ça va vous coûter entre 1 et 5 millions d'euros,
03:22pour exemple.
03:23Quand vous rentrez chez l'homme, les premières études,
03:25c'est à peu près entre 5 et 10 millions.
03:27Et dès que vous commencez les phases 2,
03:29c'est de l'ordre de 50, voire plus.
03:31Il faut des puissances privées,
03:33donc ce sont des investisseurs...
03:34Ah oui, des puissances privées.
03:35Qui vont, justement, prendre le relais.
03:37Donc l'Etat peut être utile dans la phase précoce,
03:39mais après, c'est pas vrai.
03:41À l'Etat de financer toutes ces études.
03:43Mais on en revient à cette idée
03:45que les Américains préfèrent, eux,
03:48une capacité, si vous voulez, à accepter le risque,
03:51en tant qu'investisseurs.
03:53En Europe, on a un peu tendance
03:55à ne pas vouloir faire la même chose.
03:58Mais est-ce que ça va pas aussi avec les États-Unis,
04:01qui sont heureux du succès ?
04:03D'ailleurs, quand on arrive au Nasdaq,
04:05tout le monde vous fête, etc.
04:07Est-ce que c'est pas la capacité aussi des Américains
04:10de valoriser le fait de gagner de l'argent,
04:12de valoriser le succès ?
04:14Oui, la culture du succès,
04:16elle joue un rôle important.
04:18Mais c'est la culture du risque,
04:20c'est la culture aussi d'accepter
04:22qu'on va se tromper parfois,
04:24qu'on va se planter, excusez-moi l'expression.
04:26Au contraire, les Américains valorisent énormément
04:28les gens qui ont fait des erreurs.
04:30Dans ce 4-40, dont on est fiers,
04:32qui a des résultats extraordinaires,
04:34et là, il n'y a pas d'investisseurs dans votre secteur ?
04:36Il y en a quelques-uns, mais pas suffisamment
04:38pour financer des études comme les nôtres.
04:40Vous voyez, notre étude de phase 3
04:42dans la règle de qualité énergique
04:44va nous coûter 350 millions d'euros.
04:46Est-ce que vous pensez qu'il y a une perte
04:48de compétitivité par rapport
04:50à l'industrie pharmaceutique de la France
04:52dans le monde ?
04:54Est-ce que vous pensez qu'on est en déclin
04:56ou une perte de compétitivité par rapport au reste du monde ?
04:58La réponse est oui.
05:00Bon, c'est le mot de la face qui est embêtant.
05:02Dites-moi un petit mais quand même.
05:04Mais...
05:06Non, je crois que c'est les chiffres qui le prouvent.
05:08Si vous regardez le nombre de boîtes françaises
05:10qui sont dans votre secteur...
05:12En 30 secondes, même pas,
05:14qu'est-ce qu'il faudrait faire pour que ça s'arrête ?
05:16Une partie, c'est le financement.
05:18Après, c'est que les autorités qui remboursent
05:20les médicaments acceptent de mieux les rembourser.
05:22Ah oui ?
05:24Oui, parce qu'aujourd'hui, il y a une dégradation
05:26dans le temps historique
05:28à la fois du degré de remboursement...
05:30Alors qu'il y a une gratuité totale
05:32pour les boîtes
05:34de votre couleur...
05:36Pour ceux qui prennent le risque
05:38de développer les médicaments,
05:40il y a des différences de prix
05:42qui s'accélèrent par exemple
05:44entre les US et l'Europe.
05:46Merci à vous et formidable d'avoir
05:48votre cheval sur les deux continents.
05:50Merci beaucoup.

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