Mercredi 9 octobre 2024, LEX INSIDE reçoit Joseph Vogel (Associé Fondateur, Vogel & Vogel) , Diane Reboursier (Counsel, August Debouzy) et Anne-Marie Pecoraro (Associée, UGGC Acocats)
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00:00Bonjour, je suis ravi de vous retrouver pour un nouveau numéro de Lexy Inside, votre rendez-vous
00:27consacré à l'actualité juridique. Au programme de ce numéro, on va parler de l'avenir de la
00:33politique européenne, de la concurrence avec mon invité Joseph Vogel, associé au syndicat Binet,
00:39Vogel et Vogel, ce sera dans quelques instants. On parlera ensuite des règles d'insertion des
00:44personnes en situation de handicap dans le monde de l'entreprise avec mon invité Diane Reboursier,
00:51console chez Auguste Dubouzy. Et enfin, on parlera blocage des sites web liés à la
00:56contrefaçon et au piratage avec Anne-Marie Pecoraro, associée chez UGGC Avocat. Voilà
01:03pour les titres, c'est parti pour Lexy Inside. On commence tout de suite ce Lexy Inside et on
01:19va parler politique européenne de la concurrence avec mon invité Joseph Vogel, associé fondateur
01:25au syndicat Binet, Vogel et Vogel. Joseph Vogel, bonjour. Bonjour Arnaud. Avant de rentrer dans le
01:31vif du sujet, un mot sur le regard que vous portez sur cette politique européenne de la concurrence.
01:38Écoutez, la politique européenne de concurrence est très importante puisque c'est une des
01:43principales politiques de l'Union européenne. Et face aux défis économiques et stratégiques et
01:50géoéconomiques auxquels l'Europe doit faire face, c'est une politique fondamentale. Et il est bon
01:56de s'y intéresser maintenant parce qu'il y a beaucoup de débats stratégiques sur la politique
02:00de concurrence. On a le rapport l'État, le rapport Draghi, qui d'ailleurs n'ont pas la même conception.
02:05Rapport Draghi dans le sens de la commission traditionnelle, rapport l'État un peu plus
02:11disruptif. Donc il y a beaucoup de réformes également en cours. C'est la raison pour
02:15laquelle il faut s'y intéresser aujourd'hui dans votre émission Tombe à pique. Vous évoquez
02:20justement l'avenir de la politique de la concurrence européenne avec ces deux rapports, des visions
02:26assez différentes. Quelle vision privilégiée ? Alors je pense qu'il y a des bonnes idées dans
02:32les deux rapports, des bonnes idées à prendre. Le rapport Draghi peut-être est peut-être moins
02:40pragmatique que le rapport l'État. Mais il faut s'inspirer des deux rapports. Le rapport l'État,
02:46par exemple, a des solutions peut-être en termes de droit à des concentrations qui sont plus
02:51libérales, plus novatrices. Je donne un exemple. Le rapport l'État considère que ce n'est pas
02:56normal qu'en Europe il y ait 100 opérateurs de téléphonie pour l'Europe, alors qu'il n'y en a
03:01que 3 en Chine et 4 gros aux États-Unis. Donc ça, ça veut dire qu'il admet peut-être une
03:05consolidation nationale. Donc il y a un peu plus de pragmatisme. Quelles solutions concrètes on peut
03:10envisager en dehors de cette solution ? Est-ce qu'il y en a d'autres qui peuvent émerger de ces rapports ?
03:14Alors ces rapports, naturellement, ils posent un constat du décrochage de l'Europe. Ils posent des
03:19objectifs, des plans d'action généraux. Il y a peu de mesures concrètes immédiates. Il y en a
03:25quelques-unes d'un point de vue juridique. Par exemple, le rapport l'État, il propose un code
03:32européen des affaires. Ça, c'est une très bonne idée parce qu'actuellement, une entreprise, il faut
03:36qu'elle se renseigne sur 27 droits en Europe. Donc là, l'idée, c'est d'harmoniser les droits...
03:42Oui, le droit des affaires par un seul code européen. Ça, ça serait une très bonne idée. Même s'il est
03:46optionnel, les partis pourraient choisir un droit unique pour l'ensemble de l'Europe. Donc ça, c'est
03:51très intéressant. Donc c'est une proposition concrète parmi d'autres. Mais sinon, c'est vrai
03:58que ça mériterait encore d'être complété par des feuilles de route plus concrètes.
04:01Est-ce que la sécurité juridique n'a pas été oubliée au sein de ces rapports, par exemple ?
04:05Alors oui. C'est peut-être un oubli parce que c'est des rapports qui sont tous les deux fondés
04:11sur l'efficience économique. D'ailleurs, ils ont une formation économique. Et peut-être ont-ils un
04:16peu omis le fait que la sécurité juridique et la prévisibilité sont également des outils
04:21d'efficience économique pour les entreprises, par le biais des incitations. Donc ça, peut-être,
04:27ça mérite d'être corrigé. Mais nous, juristes, nous sommes là pour justement veiller au grain.
04:31Alors, ça fait 20 ans d'application du règlement 1-2003 relatif à la mise en
04:37oeuvre des règles de concurrence. Que pensez-vous de cette réforme ?
04:41Alors, la commission a publié un staff working document récemment sur le règlement 1-2003. Les
04:49gens sont en général contents, satisfaits, les observateurs, les entreprises, de ce nouveau
04:54règlement. C'est vrai que le précédent système était arrivé à bout de souffle. On n'arrivait plus
04:58à gérer les notifications. Donc, ce règlement est une bonne chose. Mais il a 20 ans. Et 20 ans,
05:06pour un règlement, ce n'est pas un âge de jeunesse. Alors, qu'est-ce qu'on pourrait faire pour
05:11l'améliorer ? En fait, la commission considère que... Et d'ailleurs, Olivier Gersan, lors d'une
05:18conférence qu'il avait faite au Cercle Montesquieu, à notre cabinet, la semaine dernière, a dit que le
05:23principal problème du règlement 1-2003, c'est qu'il a été conçu dans un univers de papier. Certes,
05:29l'Internet existait déjà, mais on était encore dans un univers papier. Aujourd'hui, on est dans
05:34un univers digital. Quand on fait une enquête, c'est des millions de documents qu'il faut
05:38regarder. Donc, il faut adapter les procédures. Bien sûr. Je compléterais encore par un point,
05:42c'est que le droit de la concurrence est un droit de compliance maintenant. Donc, il faut intérioriser
05:46le droit. Il faut s'y préparer. Il faut faire des programmes de conformité. Et ça, ça mériterait que
05:51la confidentialité des habits des juristes d'entreprise soit reconnue. Donc, ça, c'est un
05:57élément important, mais la commission n'en est pas encore totalement convaincue. Alors, un mot sur
06:02la nouvelle communication de la Commission européenne sur la définition du marché pertinent. Est-ce
06:08qu'elle s'adapte aux nouvelles réalités économiques, selon vous ? Alors oui, ils ont fait beaucoup de
06:13progrès. Alors, la communication est beaucoup plus importante en volume. Bien sûr. Ils tiennent
06:17compte du numérique, du poids des géants des numériques. Tout ça, c'est très bien. Je trouve
06:21qu'ils laissent quand même encore un peu beaucoup de marge d'appréciation à la Commission. Donc,
06:26c'est la Commission elle-même qui se donne des marges d'appréciation parce que ça lui permet
06:30peut-être de définir des marchés trop étroits, alors que l'Europe a besoin aujourd'hui, pour nos
06:35entreprises, de définitions plus larges de marché. Un autre aspect important, ce sont les nouvelles
06:41lignes directrices sur les abus d'exclusion. Est-ce qu'elles sont en phase avec la nouvelle
06:46jurisprudence européenne ? Alors, excellente question. C'est-à-dire que ces nouvelles lignes
06:52directrices, elles posent des présomptions. Donc, la Commission dit, si je constate ces faits-là,
06:59il y aura une présomption d'abus d'exclusion. Donc, ça fait encore un obstacle pour les
07:03entreprises puisqu'elles vont devoir prouver le contraire. Je trouve que ce n'est pas tout à
07:06fait conforme à la jurisprudence de la Cour de justice parce que, par exemple, en matière d'accords
07:11d'exclusivité, dès lors qu'une entreprise a apporté des éléments pour montrer que son accord
07:15d'exclusivité était bon, c'est la Commission qui est la charge de la preuve. Donc, là, il y a un
07:20certain renversement de la charge de la preuve et ce n'est pas conforme non plus à l'arrêt récent du
07:25tribunal, mais qui est tombé après, Google Adsense, fin septembre 2024. Donc, là, je pense que la
07:33copie de la Commission est à revoir. Mais, justement, le mécanisme de consultation va
07:38permettre, je pense, de corriger ce problème. Alors, un autre point important, le droit des
07:43ententes. On sait que c'est fondamental. Que pensez-vous de l'évolution du droit des ententes ?
07:47Alors, sur le droit des ententes, les textes sont récents, donc il n'y a pas de réforme à venir. Là,
07:53c'est plutôt la pratique décisionnelle qui mériterait peut-être d'être un peu corrigée.
07:57Pourquoi ? Je trouve qu'en matière d'Internet, par exemple, on protège encore trop les ventes
08:02par Internet alors que l'Internet a gagné la bataille. Donc, ce n'est pas la peine de dire
08:06que la moindre petite restriction aux ventes par Internet est insupportable. Donc, il faudrait
08:11revoir ça. Et en matière de prix imposé, je trouve que le standard de prix imposé est beaucoup
08:17trop strict, à la fois en termes de preuves, en termes d'indices. Il faudrait, déjà, et on ne
08:23sait pas très bien ce que c'est un prix imposé, donc là, il faudrait être plus précis, je pense.
08:26Alors, on va parler maintenant du contrôle des concentrations, notamment la lumière de
08:31la jurisprudence Illumina Grae. Qu'est-ce que ça change, justement, dans le contrôle de la
08:37concentration, cette jurisprudence ? Alors, c'est une petite révolution juridique, puisque la Cour
08:44de justice a finalement cassé la possibilité que s'était donnée la commission d'être saisie de
08:52concentrations en dessous des seuils qui lui étaient transférées par les autorités nationales. Donc,
08:57concentrations en dessous, à la fois des seuils communautaires et des seuils nationaux.
09:02C'est le nouvel article 22, c'est ça ? Voilà, c'était la nouvelle interprétation par la
09:05commission de l'article 22, sur le renvoi. Donc, je trouve que l'arrêt de la Cour de justice est
09:10parfait pour la sécurité juridique, parce que si on a des seuils de contrôle, on ne va pas
09:14contrôler en dessous des seuils. C'est le bon sens, et c'est la sécurité juridique. Donc, c'est normal
09:19que la commission se soit fait taper sur les doigts par la Cour de justice, et la Cour de justice a
09:24joué son rôle. Qu'est-ce qu'on doit en retenir pour l'évolution, pour la suite ? Alors, c'est un
09:29bon signal pour la sécurité juridique. On a un juge, et un juge qui intervient quand il pense
09:34que la sécurité juridique n'est pas assurée. Alors, après, le problème, c'est que la commission va
09:39peut-être réagir en voulant à nouveau contrôler sous les seuils, en changeant le règlement.
09:44Elle va essayer de reprendre le contrôle. Voilà. Donc, alors, je trouve qu'elle devrait... Moi, je n'ai
09:50rien contre le fait qu'on contrôle les killer acquisitions, mais par des seuils connus à
09:54l'avance, pas par en dessous des seuils, parce que ça, ça fait une insécurité juridique totale.
10:00On va finir là-dessus. Merci d'être venu sur notre plateau.
10:04Merci, Arnaud.
10:13On poursuit ce LexInside, et on va parler des règles en vigueur concernant l'insertion des
10:21personnes en situation de handicap, avec mon invité, Diane Reboursier,
10:26console chez Auguste Debouzy. Diane, bonjour.
10:29Bonjour, Arnaud.
10:30Alors, avant de rentrer dans le vif du sujet et de parler des aspects juridiques concernant
10:35l'insertion des personnes en situation de handicap, un mot sur les chiffres actuels
10:40de l'emploi et du chômage des personnes en situation de handicap en France.
10:44Alors, aujourd'hui, en 2024, 38 % des personnes en situation de handicap sont en emploi. Alors,
10:51ça paraît important, mais en réalité, c'est deux fois moins que la population générale,
10:54et elles sont 12 % à être au chômage, ce qui est encore bien plus que les chiffres des
10:59moyennes nationales. Et ce sont des publics qui sont souvent plus touchés par d'autres types
11:04d'absence d'emploi, ou le temps partiel, ou le chômage de longue durée. J'ajoute,
11:08c'est très important pour la suite de notre intervention, que ce sont des chiffres en
11:12trompe-l'œil, parce que les personnes qui sont RQTH, ou qui pourraient y prétendre,
11:16souvent sous-déclarent RQTH, parce que soit risque de discrimination, soit on ne voit pas
11:22à quoi ça sert, soit encore qu'elles ne se vivent pas, comme en situation de handicap par
11:27exemple pour toutes les personnes qui ont des maladies invalidantes. On va évoquer maintenant
11:30les aspects juridiques. Quelles sont les principales obligations légales des entreprises,
11:35s'agissant des personnes en situation de handicap, et quelles sont les obligations
11:41concernant l'insertion de ces personnes ? Alors, l'obligation que tous les employeurs connaissent
11:44quand on parle de personnes en situation de handicap, c'est l'obligation d'emploi des
11:48travailleurs handicapés, qui existe depuis 1987 en France, qui vous oblige, en tant qu'entreprise
11:53privée ou publique depuis 2005, à employer 6% de personnes en situation de handicap. Alors,
12:00les chiffres actuels, on n'y est toujours pas. Pour les entreprises privées, on peine à être à
12:063,5%, donc bien loin des 6%, alors que les personnes en situation de handicap représentent
12:127% de la population active. Donc, on n'est pas du tout encore à l'objectif. Peut-être des
12:17freins psychologiques encore ? Beaucoup de freins psychologiques et beaucoup de mauvaise
12:21représentation des situations de handicap. Donc, au-delà de cette obligation des 6%, on a plein
12:26d'obligations sur les bâtiments, les bâtiments neufs, des places de parking. Donc, ça, c'est
12:30vraiment la partie émergée de l'iceberg, parce qu'une obligation que peu de gens connaissent,
12:34c'est l'obligation d'aménagement raisonnable du poste de travail, quelque soit la situation.
12:39Alors, ça peut être non pas que des rampes d'accès, ça peut être de trouver des solutions
12:43pratiques à des gens qui ont, par exemple, une maladie invalidante qui fait qu'ils sont en
12:47situation de handicap. Par exemple, vous avez du mal à rester debout assez longtemps, installez
12:52le poste de manière à pouvoir rester, s'asseoir ou s'asseoir pour partie pendant une partie de
12:57votre temps de travail. Alors, peut-être un mot aussi également sur les dispositions légales
13:02qui concernent les discriminations à l'embauche des personnes en situation de handicap. Quelles
13:06sont-elles ? Alors, il n'y a pas de texte spécial dans le Code du travail. On est sur l'article
13:11L1132-1 du Code du travail qui prohibit tout type de discrimination et qui vise en particulier la
13:17perte d'autonomie et le handicap. Donc, il n'y a pas de sanction spécifique. C'est vraiment le
13:21texte général qui s'applique, mais qui s'applique beaucoup, car les discriminations liées à
13:25handicap sont le premier motif de saisine du défenseur des droits, par exemple. Alors,
13:30un mot maintenant sur les sanctions. Quelles sont les sanctions encourues par les entreprises qui
13:34ne respecteraient pas les obligations dont vous avez parlé ? Alors, ce n'est pas une sanction,
13:39mais c'est une contribution financière. Pour la règle des 6 %, si vous n'atteignez pas les 6 %,
13:43vous payez une contribution financière à la GIFIP. Quelle hauteur cette contribution ? Alors,
13:48c'est un nombre de SMIC et ça dépend aussi de la taille de l'entreprise. Donc, ça peut vraiment
13:53varier d'une entreprise à l'autre. Il y a des possibilités de réduction de la contribution en
13:58finançant des aménagements pour l'emploi des personnes en situation de handicap. Pour les
14:03bâtiments, il y a des sanctions pénales si le maître d'oeuvre ou le maître d'ouvrage ne réalise
14:07pas les bonnes réalisations dans les locaux. Et enfin, pour tout ce qui est discrimination,
14:13donc là encore, c'est du pénal. Donc, 45 000 euros d'amende pour les personnes physiques 3 ans
14:17d'emprisonnement, 225 000 euros pour les personnes morales. Et surtout, vous avez tout le volet civil
14:23pour les discriminations. Donc, une mesure discriminatoire est nulle. Donc, typiquement,
14:30pour un licenciement discriminatoire, le salarié peut demander l'annulation du licenciement,
14:34la nullité et sa réintégration dans l'entreprise. Donc, ce n'est pas neutre, ce sont des vraies
14:39sanctions. Alors, passons maintenant aux droits de ces personnes en situation de handicap. Quels
14:44droits ont-ils ? Alors, il faut vraiment se mettre dans une représentation que les mêmes droits que
14:49toutes les personnes, c'est le même code du travail qui s'applique. Donc, comme pour tous
14:52salariés, vous avez une obligation de non-discrimination et vous avez un principe
14:56d'égalité de traitement. Et l'obligation d'aménagement raisonnable, c'est pour tendre
15:01vers l'égalité de traitement. Il y a quelques petites spécificités, mais c'est vraiment à la
15:05marge. C'est sûr des suivis médicaux renforcés, c'est sûr un doublement du préaliment et du
15:10licenciement, mais tout le code du travail s'applique pleinement. Alors, un mot peut-être
15:15pour conclure. Vous l'avez dit au début de cette émission, il y a beaucoup encore à faire pour
15:21intégrer ces personnes en situation de handicap. Comment sensibiliser les entreprises pour remédier
15:29à ce problème ? Je pense que la principale chose à faire avant tout, c'est de sensibiliser tout le
15:35monde et se former et comprendre le handicap en France. Par exemple, 80% des handicaps sont
15:41invisibles. On pense tous que c'est plutôt l'inverse en termes de chiffres. Donc, on a une
15:46mauvaise compréhension du handicap et on perçoit aussi mal que 85% des handicaps ne sont pas de
15:52naissance. Donc, ça veut dire que souvent, des personnes vont se retrouver en situation de
15:55handicap au cours, par exemple, de leur vie professionnelle. Donc, au-delà de l'intégration
15:59dans l'entreprise, il y a aussi le maintien dans l'emploi. Le mieux à faire pour une entreprise,
16:03c'est de contacter l'AGFI pour faire déjà un bilan, de voir un peu où on en est et d'avoir
16:07des attentes raisonnables pour aménager des postes de travail. Si on veut embaucher des
16:11salariés en situation de handicap, contacter Cap Emploi qui propose un certain nombre
16:16d'intégrations. Et pour la formation des salariés, il y a beaucoup d'outils sur le site de l'AGFI pour
16:21se mettre en situation. Je vais donner un exemple très pratique. Par exemple, si vous avez un
16:25déficit auditif, placer les personnes dans une salle ou en réunion pour qu'elles puissent, par
16:30exemple, lire sur les lèvres. Bien sûr. Voilà, c'est plein de petits aspects auxquels on ne pense
16:34pas parce que quand on regarde les sondages, les salariés qui côtoient des personnes en situation
16:38de handicap voient que l'intégration est moins difficile que l'on ne croit. Et parfois, on pense
16:43que c'est impossible, ça va coûter très cher alors qu'il y a beaucoup, beaucoup de mesures à
16:46faire pour améliorer la situation en France. Donc, sensibiliser, former. Mais est-ce que le
16:51droit peut également être un outil ? Le droit peut être un outil, par exemple, en poussant,
16:57en tout cas en essayant que les personnes se déclarent en RQTH. Ça peut aussi aider pour
17:04mieux prendre en compte leur situation. Par exemple, si vous avez un salarié qui a une maladie
17:07invalidante qui est souvent absent ou qui doit avoir des aménagements, de pouvoir les prendre
17:12en compte pour améliorer la situation de tous. Est-ce que la jurisprudence vient compléter les
17:16règles légales régulièrement ? Toujours, mais au-delà de la jurisprudence, il y a vraiment
17:20beaucoup de décisions du défenseur des droits. Donc, ce n'est pas une juridiction, mais beaucoup
17:24d'exemples pratiques, beaucoup aussi de guides pour donner des exemples de ce qui pourraient
17:28être des mesures utiles. Par exemple, vous avez des exemples en jurisprudence de personnes qui ne
17:34peuvent difficilement lever les bras. Donc, aménager le poste à hauteur raisonnable pour
17:38ces personnes. Pour des personnes qui ont un déficit visuel, repeindre, changer la couleur
17:44parfois d'une armoire, c'est-à-dire qu'elle était bleue et la peinte grise aide les personnes.
17:48Ça peut être des choses très simples. Il n'y a pas. On voit toujours l'aspect, les rampes d'accès,
17:52les sanitaires dans un certain nombre ou les portes d'ascenseur. Mais il y a vraiment une multitude de
17:58mesures qui doivent être mises en place dans les entreprises pour inclure tout le monde et trans
18:02handicap ou les alertes sonores en cas d'incendie pour les gens qui n'entendent pas avoir une alerte
18:07visuelle, par exemple, sur le poste de travail. On va conclure là-dessus. Merci d'être venu sur
18:12notre plateau. On va parler blocage des sites Internet liés au piratage et à la contrefaçon
18:28avec mon invité Anne-Marie Pecoraro, associée au sein du cabinet UGGC Avocats. Anne-Marie,
18:35bonjour. Bonjour Arnaud. Alors, il y a profusion de sites Internet pirates qui sont aussi
18:42en matière de contrefaçon, qui rediffusent des contenus protégés par les droits d'auteur. On
18:47pense notamment aux sites d'événements sportifs qui diffusent des événements via le streaming.
18:53Quelles sont les bases juridiques qui permettent aux autorités, aux ayants droit de demander le
18:58blocage de ces sites Internet liés à la contrefaçon ou au piratage ? La loi a organisé progressivement
19:05dans le temps une série de textes sur lesquels il est intéressant de revoir l'historique. Tout
19:14d'abord, on a eu deux directives qui étaient relatives aux droits d'auteur qui ont permis le
19:21principe du blocage. On a eu en France la loi qu'on appelait LCEN qui a posé un texte général qui
19:29permet au juge de donner des injonctions pour des diffusions en ligne qui sont de nature à créer
19:39des dommages. Mais au-delà de ce texte général qui peut être invoqué de la LCEN pour toutes les
19:45matières, y compris, on va voir si on rentre peut-être en détail sur ce point, pour le droit
19:50des marques, il y a un historique beaucoup plus précis et efficace concernant le droit d'auteur.
19:56On a eu tout d'abord un article qui s'appelle L336-1 sur lequel il y a eu beaucoup de jurisprudence,
20:03ça s'est affiné, les durées ont été élaborées, modifiées, etc. pour rentrer dans le détail de tout
20:09ça. Donc le droit s'est construit petit à petit ? Voilà, le droit s'est construit de manière vraiment
20:14structurée et de plus en plus efficace malgré les obstacles et les difficultés techniques sur
20:20la base de ce L336-1. Ensuite, une loi est venue renforcer le dispositif et pallier à quelques-unes
20:28des difficultés en créant des sanctions contre les sites miroirs et en mettant en place notamment
20:34une liste noire. Et enfin, nous sommes arrivés à ce texte du code du sport que vous mentionnez. Donc
20:41ce texte, c'est dans le code du sport qu'on trouve la possibilité pour les ayants droit, c'est à dire
20:47pour les organismes de télédiffusion et les ligues et fédérations sportives, de demander
20:54aux juges de bloquer selon un processus qui est plus adapté. Parce que dans le cas de L336-1,
21:02même avec une certaine efficacité, les procédures prenaient un délai qui était peu adapté finalement
21:09au calendrier sportif. Voilà. Concrètement, comment les tribunaux décident-ils du blocage des sites
21:16pirates ? Est-ce qu'il y a des critères, par exemple, spécifiques qui doivent être remplis ?
21:20Oui. Tout d'abord, on a une liste de critères dans la loi elle-même, donc dans ce fameux L336-1,
21:28et on doit assurer et consolider la base légale et le contenu contrefaisant. Donc la première chose,
21:34c'est tout d'abord de démontrer qu'on est ayant droit, donc on a bien des droits sur le contenu
21:40dont il s'agit, et que ce contenu est bien contrefait. Alors, « ayant droit », ça peut
21:46être directement le titulaire des droits d'auteur ou des droits voisins, ça peut être aussi une
21:53société de gestion collective, et puis on l'a vu, ça peut être étendu, et puis ça peut être le CNC
22:00également pour le cinéma. Donc, démontrer qu'on est ayant droit, que le contenu est contrefaisant,
22:06mais aussi démontrer que le site est massivement contrefaisant. Ça, on peut le démontrer avec des
22:12analyses statistiques, démontrer que le contenu est accessible en France. Ça, ça peut être
22:17constat du CIE ou panachage entre constat du CIE et rapport d'expertise privé, avec un contenu bien
22:23identifié. Voilà à peu près pour l'essentiel les conditions que le juge va vérifier, enfin
22:31évidemment toujours avec des adaptations concernant les contenus sportifs.
22:35Évoquons maintenant le rôle des fournisseurs d'accès Internet et des hébergeurs dans la lutte
22:40contre le piratage et la contrefaçon. Sont-ils généralement tenus responsables des contenus
22:46illicites qu'ils hébergent ou qu'ils permettent d'accéder directement ?
22:49Alors, une règle que l'on connaît et qui s'est confirmée, tout d'abord concernant les hébergeurs,
22:57qui ne sont sur le principe pas responsables, en particulier, ne sont pas responsables tant qu'on
23:04n'a pas démontré qu'ils auraient eu connaissance du contenu contrefaisant ou alors qu'une fois
23:11notifié, ils n'auraient pas agi promptement. La règle va être à peu près la même pour les
23:19fournisseurs d'accès, mais à qui on demande quand même un peu plus de vigilance. Il n'y a pas
23:23d'obligation générale de surveillance. Globalement, en tout cas, il importe que les opérateurs
23:27économiques agissent promptement une fois qu'ils sont notifiés. Ça va être un peu le point de
23:32bascule. Alors, revenons sur le rôle aussi des grosses plateformes. Maintenant, les contenus
23:36sont diffusés aussi sur les réseaux. Quelles sont les obligations des plateformes de streaming ou de
23:42partage de contenu face aux demandes des ayants droit ou des autorités d'ailleurs ? Oui. Alors,
23:48encore une fois, elles n'ont pas d'obligation générale de surveillance. Néanmoins, elles ont
23:53une obligation de coopération qui s'est renforcée au fil des textes et en particulier à l'époque du
23:58DSA et dans leurs relations actuelles avec l'ARCOM. Alors, le premier point, c'est que désormais,
24:03ces plateformes sont responsables d'un acte de diffusion. Donc, elles doivent obtenir une
24:11autorisation, une licence au final. Et quelquefois, elles ne l'ont pas. Donc, tant qu'elles n'ont pas
24:16la licence, elles doivent avoir fait leurs meilleurs efforts pour obtenir une licence des
24:21ayants droit. Par exemple, une plateforme qui n'aurait pas les droits musicaux devrait démontrer
24:25qu'elle est en train de négocier de bonne foi avec la SACEM et les producteurs de phonogrammes. Et
24:30puis, elle doit aussi utiliser de manière diligente des mesures techniques d'identification. Donc ça,
24:38les mesures techniques, c'est quelque chose avec lesquelles les juristes travaillent depuis de
24:43nombreuses années, mais elles ont dû s'affiner. Et on a des plateformes comme YouTube, par exemple,
24:48qui a des mesures techniques d'identification sur la base des informations que donnent les
24:54ayants droit. En deux mots, dans la mesure, les ayants droit de fournir des éléments d'information
25:01qui permettent à la mesure technique de reconnaître. Si on prend le blocage d'un site web, est-ce que
25:07c'est vraiment une mesure efficace pour lutter contre la contrefaçon ou le piratage ? Est-ce
25:12qu'aujourd'hui, on a des chiffres là-dessus ? Est-ce qu'on sait le dire si c'est efficace ? Oui,
25:16oui. Les chiffres de l'ALPA démontrent une baisse du piratage que moi, j'implique effectivement
25:21directement aux campagnes de blocage. Mais effectivement, il y a des moyens techniques
25:27de contourner et aussi des moyens qui sont opposés au contournement. Vous évoquez justement la
25:36possibilité de contourner des sanctions de blocage, par exemple. Quelles sont les possibilités
25:43justement de sanctionner une nouvelle fois ces sites qui réapparaissent, des sites miroirs,
25:48alors qu'ils ont été bloqués en voient réapparaître d'autres sites pirates ? Est-ce
25:52qu'on peut vraiment arriver à bloquer les sites miroirs ensuite qui sont créés ? Concernant les
25:58sites miroirs, oui, oui. C'est désormais facilité. Il est permis désormais, sur la base d'une
26:03décision, d'aller voir l'ARCOM et de solliciter de l'ARCOM que le blocage soit étendu à une liste
26:12de sites identiques. Ça, c'est déjà une première chose qui peut être faite. Je vais citer deux
26:17jurisprudences qui ont été très utiles. Une jurisprudence récente, les DNS en deux mots,
26:25c'est une sorte d'annuaire d'adresse IP. Par exemple, l'Orange va avoir le sien et si on bloque
26:32un site dans l'annuaire d'Orange, il va bloquer sur ses DNS. Néanmoins, ça n'empêchera pas,
26:38comme c'est par défaut, ça n'empêchera pas un internaute d'avoir recours à des DNS alternatifs,
26:42par exemple de Google. Donc, une décision a ordonné à Google également de bloquer. C'est
26:48un peu technique, mais c'est important parce que c'est une jurisprudence qui ne permettrait plus,
26:54quand elle est appliquée aux internautes, de passer des VPN qui ont été bloqués,
26:58par exemple chez un des fournisseurs d'accès français, pour passer chez les Google ou les
27:05alternatifs. Ça, ça peut être un des exemples d'extension. Deuxième jurisprudence, rapidement.
27:09L'autre, c'est concernant l'IPTV. Les sites ont connu des fermetures de systèmes IPTV,
27:15ce qui est quelque chose aussi qui va certainement affecter le marché compte
27:19tenu de la popularité de cette méthode. On va conclure là-dessus. Merci d'être
27:23venu sur notre plateau. Merci Arnaud.
27:25Merci à toutes et à tous de nous avoir suivis, restés curieux et informés.
27:31À très bientôt pour un nouveau numéro de Lex Inside.