Retrouvez la chronique de Maxime Lledo tous les mercredis à 8h10
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00:00— Le Grand Matin Sud Radio, 7h-9h, Jean-Jacques Bourdin. — Est-ce la fin du mythe ? L'économie se porte bien. Avec vous, Maxime Liédo.
00:08Bon, elle ne se porte pas toujours non plus si mal que ça. Il faut arrêter d'être... En revanche, en revanche, il y a à l'horizon
00:18effectivement des nuages qui se profilent. Par exemple, tiens, les fermetures de sites industriels. Les fermetures de sites industriels,
00:27on a beaucoup parlé de Michelin, on a parlé d'Auchan, qui n'est pas un site industriel, mais c'est un site important.
00:34Et on a appris hier la possible fermeture de certains sites industriels du géant ArcelorMittal. Reims et Denain. Denain dans le nord.
00:45— Absolument. Et c'est une annonce qui est passée un tout petit peu inaperçue quand même dans le brouhaha ambiant
00:49qu'est l'actualité en ce moment. Après, vous l'avez rappelé, Jean-Jacques, Michelin, Auchan, mais il y a eu également Valeo,
00:54Exxon, et c'est au tour du géant de l'acier de menacer l'existence de plus de 130 emplois. Et si j'évoque ArcelorMittal, c'est pas pour le plaisir.
01:01C'est que c'est un symbole. Leader européen de l'acier, non important dans notre histoire industrielle, né de la fusion du français Usinor,
01:08de l'espagnol Acerralia et du luxembourgeois Arbed. Et en 2006, rappelez-vous, c'est l'OPA de Mittal qui bouffe totalement notre géant européen.
01:16Et on rappellera d'ailleurs que depuis cette OPA, la scierie de Gandrange a été fermée, comme tous les hauts fourneaux de Florange,
01:22et accessoirement, plusieurs milliers d'emplois dans la sidérurgie européenne ont été supprimés pour être relocalisés ailleurs dans le monde.
01:29ArcelorMittal, c'est le nom qu'on aurait préféré oublier, mais qui se rappelle à vous comme une borde battante que vous prenez en pleine poire,
01:35parce que c'est l'exemple qui illustre le poids écrasant de la désindustrialisation. Dans les années 1970, l'industrie, ça représentait 41% du PIB français.
01:44A la fin du siècle dernier seulement, c'était 17%. Et aujourd'hui, à peine 10%. Et j'aime à remarquer que l'objectif de remonter à 15%,
01:53fièrement annoncé par Barcy il y a quelques années, a été discrètement abandonné.
01:57– Alors, vous pensez que cette annonce signe la fin du mythe selon lequel l'économie française est robuste ?
02:03– Oui, absolument. Et cela devrait aussi signer la fin des déclarations franchement grotesques que l'on entend depuis des années,
02:08à chaque dégradation notamment de notre note économique qui se répète en boucle, quelques déclarations, quelques florilèges.
02:14« Je note que l'agence souligne la force de notre économie », disait Antoine Armand suite à notre dernière note Fitch.
02:20Je rappelle que le même ministre de l'économie qui est ce matin dans le Parisien n'a pas un seul mot par rapport aux plans sociaux en cours.
02:27« Notre économie est robuste », nous signalait encore Macferaty dimanche dans la tribune, ou encore rappelez-vous de la fameuse phrase de Bruno Le Maire,
02:33« J'ai sauvé l'économie française ». Le problème, vous savez, avec la méthode Coué, c'est que ça ne s'applique pas à tous les secteurs et encore moins à la politique.
02:41– Combien d'emplois industriels supprimés depuis… ou non, créés ou supprimés depuis 2017 ?
02:48– Ah ben c'est très simple, depuis 2017, c'est 130 000 emplois industriels qui ont été créés.
02:52Alors certes, c'est un signal encourageant, mais c'est quand même bien loin, vous savez, du fameux refrain qu'on nous servait à toutes les sauces
02:58et qui nous disait « Regardez à quel point nous, la France, on réindustrialise »,
03:02surtout que quand on compare, dans les prochains mois, c'est un risque de 300 000 emplois qui risquent de disparaître.
03:07Il faut quand même ajouter à cela… – Le solde est négatif.
03:09– Exactement, et ajouter à cela que depuis avril, le solde net entre les ouvertures et les fermetures est redevenu négatif,
03:16c'est-à-dire qu'il y a beaucoup plus d'usines qui ferment que d'usines qui ouvrent.
03:20Et j'aime rappeler que la Cour des comptes, qui va publier un rapport le 21 novembre et qui est ce matin dévoilée en exclusivité par Challenge,
03:28nous rappelle que sur le domaine de la réindustrialisation, on a eu des plans peu efficaces, qu'on a surtout fait du saupoudrage
03:35et qui a un impact très limité dans les investissements et que, objectivement, si on regarde tout ce qui s'est fait depuis dix ans,
03:41les résultats sont encore fragiles. Si on avait encore un doute sur l'état de déliquescence dans lequel se trouve notre pays,
03:46d'un point de vue de l'emploi, il suffisait hier d'ouvrir les échos avec une carte qui affichait les fermetures vertigineuses
03:53que nous allons subir dans tous les domaines. Les abattoirs, la plomberie, le papier, la métallurgie, je ne parle même pas du domaine automobile.
04:01Et depuis des années plus précisément, depuis sept ans, suivez mon regard, on nous vend l'image d'une France qui se réindustrialise,
04:06d'une économie qui se porte bien, mais les faits sont là, ils sont têtus. Prenez les investissements étrangers.
04:1150% estiment désormais que l'attractivité de la France a décliné et 49% d'entre eux ont réduit ou suspendu leur projet d'investissement.
04:19Donc une fois n'est pas coutume, il n'y a que les politiques pour ne pas s'en rendre compte.
04:21Alors vous pensez que le taux de chômage qui est à 7,4 va considérablement augmenter ?
04:25La Banque de France, de toute façon, prévoit d'ici la fin de l'année une nouvelle augmentation de ce chiffre absolument.
04:30Bien, Françoise, même s'il a baissé le taux de chômage.
04:34Oui, il a baissé dans un mouvement, le chômage a baissé dans un mouvement général européen et il est en train de remonter dans un mouvement général européen aussi.
04:42Je ne dédouane absolument pas les mausards de la finance, non, mais là où je rejoins complètement Maxime, en réalité sur ces chiffres qui sont accablants,
04:49comme vous, j'ai regardé la carte des échos, c'est vertigineux, on est déjà sur 7500 emplois potentiellement déjà dans un premier temps supprimés.
04:58Donc là-dessus, ArcelorMittal, ArcelorMittal, et c'est très bien que Maxime ait pris cet exemple, pourquoi ?
05:04Parce que ArcelorMittal, pour moi, c'est le symbole de l'impuissance des politiques.
05:09J'ai le souvenir d'Edouard Martin, le leader qui devient d'ailleurs député européen.
05:13J'ai le souvenir de François Hollande sur une camionnette perchée pendant la campagne de 2012 qui dit « vous ne fermerez pas, nous nous battrons ».
05:22J'ai le souvenir, parce que moi j'étais dans ce gouvernement, dans mon autre vie, j'ai le souvenir d'Arnaud Montebourg sur Gendron.
05:29Je me souviens d'Arnaud Montebourg qui disait « il est en train de pleuver, il pleut des plans sociaux ».
05:36Là, on retouche encore à ce qu'on appelle la première transformation dans l'agroalimentaire, ce qui est terrible, les abattoirs,
05:42parce que la réalité, c'est que quand un abattoir ferme, c'est toute une région qui est dévastée,
05:46parce que généralement, c'est cette entreprise-là qui fait bosser tous les gens aux alentours.
05:52Donc oui, je pense, ceci dit, je ne suis pas catastrophique comme Maxime,
05:57et je vous rejoins Jean-Jacques sur le fait que la France reste quand même encore une signature tout à fait viable.
06:03Pourquoi ? Pas parce qu'elle a une économie extraordinaire, mais parce qu'elle a des actions,
06:08elle a une richesse extraordinaire, elle a un patrimoine extraordinaire.
06:11Encore faut-il ne pas la détruire.
06:13Une épargne extraordinaire.
06:15Une épargne extraordinaire, donc c'est pour ça que je croyais bien, Maxime, que si nous étions dans une situation apocalyptique,
06:20il n'y a personne qui se précipiterait pour acheter de la dette française.
06:23Ça n'est pas le cas, tout le monde se précipite.
06:25Donc beaucoup d'investisseurs, dont beaucoup d'investisseurs étrangers, à plus de 52%,
06:29ce qui fait peser un risque.
06:31Non, mais tout le monde se fait très attention à ça.
06:33Écoutez Maxime, moi je suis comme vous extrêmement critique avec ce gouvernement,
06:37les Mozart, j'en ai marre, c'est plutôt les Salieri ou les Richard Kledermann de la finance.
06:40Ok, on est d'accord là-dessus.
06:41C'est de la musique de supermarché leur truc.
06:43Mais quand même, chaque fois que quelqu'un achète de la dette française sur les marchés,
06:50il ne faut pas laisser croire aux gens qu'on ne vérifie pas.
06:52Tout est vérifié, nous ne sommes pas, comment dirais-je, dans les mains de puissances étrangères.
06:57Et en plus on n'est pas dans les mains de puissances étrangères,
07:03parce que c'est ce que suggère Maxime.
07:0552% détenus par des fonds étrangers,
07:07et je ne le dis pas, il n'y a pas que moi,
07:09mais des gens comme le patron du Medef ou des grands patrons industriels français
07:13vous expliquent à quel point c'est un problème.
07:15Ils ne sont pas exemplaires non plus.
07:17Non, mais d'accord qu'ils ne sont pas exemplaires,
07:19mais quand même plus.
07:21Vous avez 30, 40 ou 50 milliards de défiscalisation qui pourraient revenir,
07:26on n'en aurait pas besoin.
07:28Bien sûr que si, mais est-ce qu'on ne peut pas leur donner un peu raison sur certains points si vous voulez.
07:31Non, moi je ne peux pas donner raison à Total qui optimise,
07:34je ne peux pas donner raison à Bernard Arnault, pardonnez-moi.
07:36À un moment donné, quand on se dit patriote,
07:38on va jusqu'au bout. On ne donne pas simplement 100 millions
07:40pour refaire Notre-Dame.
07:42Et on réfléchit aux hôpitaux qui ont besoin de cet argent,
07:44on réfléchit aux écoles.
07:46Merci à tous les deux, 8h22,
07:48vous êtes sur Sud Radio, merci.
07:50A tout de suite.