Les Vraies Voix avec Stéphane Rozès, politologue, président de Cap et enseignant à l’Institut Catholique de Paris.
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00:00...
00:05On va discuter avec le chef de l'État parce que la situation du pays le mérite.
00:10Et nous avons demandé à être reçu par le chef de l'État pour lui dire ce que nous avons, nous, en tête.
00:14Pas pour se plier à ses désidératins.
00:17Moi je ne suis pas dans une situation où je viens simplement plier un genou devant le chef de l'État.
00:24Et donc ce que je suis venu vous dire ce matin, c'est que moi je ne souhaite pas qu'on arrive en fait à une nomination ultra rapide parce qu'il faudrait se dépêcher, etc.
00:33Je souhaite qu'il y ait une négociation.
00:36Face à cette situation, ce qui est dangereuse, qui crée un vide, la droite ne doit pas fuir ses responsabilités, je le crois profondément.
00:44Nous devons continuer à travailler pour le bien des Français.
00:48Seul un Premier ministre de gauche est en mesure aujourd'hui de garantir cette orientation.
00:54Quel nouveau gouvernement pour la France se dirige-t-on vers une coalition LR-Centre-PS ?
00:58Le patron du parti socialiste Olivier Faure, vous venez de l'entendre, s'est dit prêt à ce matin à des concessions réciproques avec la Macronie et la droite.
01:06Pour un gouvernement, un contrat à durée déterminée.
01:09De son côté, Bruno Bretaillot affirme que la droite ne pourra faire aucun compromis avec la gauche.
01:14Alors parlons vrai. Est-ce que ce ne serait pas suicidaire pour LR ou ce qu'il en reste après la scission avec Éric Ciotti
01:20ce gouvernement d'union nationale ? Appelez-le comme vous voulez.
01:24Y a-t-il une cohérence chez Emmanuel Macron qui reçoit le PS aujourd'hui pour faire un gouvernement de front républicain
01:29alors qu'il accusait le PS hier soir d'avoir fait partie d'un front anti-républicain en votant la censure ?
01:35Et à cette question, une coalition gouvernementale allant de LR au PS est-elle possible ?
01:39Vous dites non à 86%. Vous voulez réagir ? Le 0826 300 300.
01:43Et notre invité pour nous accompagner dans ce débat, Stéphane Roses, qui est politologue, je vais y arriver,
01:49président de CAP et enseignant à l'Institut catholique de Paris. Merci d'avoir accepté notre invitation.
01:54Philippe Bilger.
01:55En effet, ma chère Cécile, mon cher Philippe, d'abord je suis très heureux de parler devant Stéphane Roses
02:04dont j'apprécie tellement les analyses.
02:06Absolument.
02:07Et c'est un bonheur de le voir à Sud Radio.
02:10Mais une fois cela dit, je crains que la situation parlementaire soit relativement insoluble.
02:20J'espérais, quand j'entendais Olivier Faure ce matin, qu'il avait enfin compris que le détachement de LFI était nécessaire.
02:31Et puis après, il a émis des réserves. Je suis frappé. Je termine là-dessus parce qu'il y a beaucoup de choses à dire.
02:38C'est le fait que la composition de l'Assemblée nationale oblige en quelque sorte à des manœuvres, à des stratagèmes,
02:49à des coalitions qui sont contraires à toute transparence politique. C'est ça, le drame.
02:57Et à chaque fois que quelque chose peut apparaître comme une coalition plausible,
03:03elle est immédiatement détruite par un camp opposé qui ne veut pas légitimement gouverner avec la gauche ou avec la droite.
03:12Et tout cela me fait penser que la demande de démission du Président n'est pas si absurde que cela, compte tenu du blocage actuel.
03:22On écoutera évidemment avec beaucoup d'intérêt ce que va nous dire et la façon dont va nous éclairer Stéphane Roses.
03:28Mais moi, je ne crois pas du tout à ce socle commun. Je veux dire pourquoi. Je ne vois pas comment et sur quelle base, par exemple,
03:35le PS ne renoncerait pas à broger la loi sur les retraites. Je ne vois pas comment les LR de leur côté accepteraient,
03:43puisque c'est une des oucases d'Olivier Faure qu'un Premier ministre de gauche vienne à Matignon.
03:50En réalité, ce qui va se passer s'ils arrivent à trouver un terrain d'entente, je veux dire, c'est que ça va libérer un espace politique considérable.
03:57Et pour Mélenchon et pour Marine Le Pen. Parce qu'en réalité, les électeurs de LR ne pardonneraient jamais une alliance avec le PS.
04:04Ceux du PS se retrouveraient bien seuls en cas de dissolution pour se faire réélire sans les voix de LFI.
04:10Donc, je ne crois pas que ça se fera. Mais si ça se fait, ça libère, à l'insu de leur plein gré, un espace politique pour Mélenchon et pour Le Pen.
04:17— Moi, je pense que, je le disais un peu tout à l'heure, la droite a eu sa chance, entre guillemets, alors que d'ailleurs, elle n'a pas gagné les élections.
04:22Donc c'était même un peu un miracle pour elle qu'elle arrive à avoir Barnier comme Premier ministre.
04:27Excusez-moi. Mais maintenant, il faut que la gauche ait sa propre chance. On verra ensuite ce que ça donne.
04:32Mais pour qu'il y ait une forme d'équité, tout simplement, le NFP existe encore. Il est effectivement en voie de dislocation.
04:37Mais c'est pas encore tout à fait le cas. On verra bien ce que ça donne. Et ensuite, peut-être que dans un troisième tour, si j'ose dire,
04:43là, il y aurait éventuellement un gouvernement d'union ou d'intérêt national – je sais pas trop comment on pourrait l'appeler – qui pourrait émerger.
04:48Mais en attendant, la rigueur du résultat des élections législatives encourage à nommer un Premier ministre de gauche qui représente
04:55de près ou de loin la tendance NFP.
04:58— Stéphane Roses, on le rappelle, vous êtes politologue, président de CAP et enseignant à l'Institut catholique de Paris.
05:04Vous avez entendu l'analyse notamment d'Éric Revelle, qui dit que ça ouvrirait un boulevard tant à Jean-Luc Mélenchon qu'à Marine Le Pen.
05:11Est-ce que vous partagez cette opinion ? J'espère.
05:15— Oui, je partage cette opinion dans la mesure où ayons en tête que pour ces députés, ils ont la perspective des municipales et de la présidentielle.
05:32Et donc les arguments de vos experts sont justes. À la fois, il faut trouver un gouvernement à la France, mais le mode de scrutin fait que les uns et les autres
05:52regardent d'abord leur électorat. L'électorat est reine. L'électorat est déchiré. Anti-Emmanuel Macron, c'est un électorat populaire.
06:08Il souffre de la situation actuelle et remonte aux uns et aux autres la difficulté pour les catégories populaires et les classes moyennes fragilisées de supporter des austérités supplémentaires.
06:31Et comme le mode de scrutin n'est pas proportionnel, chacun est relié à des alliances, d'où la pression de l'EFI sur l'EPS et les autres. Donc je suis d'accord au fond avec M. Bitger.
06:57Emmanuel Macron fait comme si c'était la solution institutionnelle. Et il dit « Je vais rester jusqu'au bout ». Mais c'est pas lui qui en décide. C'est le pays, ce sont les classes dirigeantes,
07:17c'est l'Union européenne, ce sont les marchés. Et donc depuis la renaissance des résultats des législatives, je partage l'idée que seule une présidentielle anticipée avec des législatives dans la foulée permettrait
07:41que la représentation nationale soit conforme à ce qu'est le pays. — Philippe Bilger. — Ça a l'air insoluble, quand même. — Stéphane Roses, est-ce qu'à votre avis, si le président avait procédé à la dissolution
08:03durant la discussion budgétaire, est-ce qu'elle aurait eu les mêmes conséquences calamiteuses que celles à laquelle il a procédé et qu'il continue à justifier de manière totalement aberrante ?
08:19— Je crois, pour vous répondre, que dans la dissolution, ce choix que le président a dit hier, regretter qu'il ait été incompris des Français, non pas regretter de l'avoir fait, mais qu'il n'ait pas été assez persuasif.
08:39Dans ce choix, il n'y avait pas seulement la volonté de redonner la parole aux Français en les mettant au pied du mur par rapport aux extrêmes. Il y avait l'anticipation du débat budgétaire où nous sommes.
09:01Le président ne pouvait pas ignorer la situation réelle des déficits. Et donc son pari était « Si je gagne, j'aurai la légitimité pour mener des politiques difficiles pour les Français.
09:20Si je perds, je refile le bébé de la crise budgétaire à des gouvernants d'opposants ». Il s'est passé ni l'un ni l'autre réellement. Donc la situation est la même en pire.
09:40Et au fond, pour répondre à votre question, je crois que la réaction des Français au vu de la gravité budgétaire aurait été au profit, plus clairement, du RN.
10:01— Éric Rebel. — Oui. Stéphane Onzès, vous avez dit dans votre précédente intervention quelque chose qui me semble important et qui est rarement, parce qu'on n'ose pas, abordé, c'est la situation et l'avis pesant des milieux d'affaires.
10:16Vous avez dit à la fin de votre phrase... Vous avez dit « Ah oui ». En fait, c'est... — Les classes dirigeantes. — Les classes dirigeantes. C'est, je pense, une question déterminante, parce que dès l'instant où le pays va s'enfoncer dans la crise politique,
10:28où le budget ne sera pas voté de suite, où ses chefs d'entreprise, qui étaient en soutien d'Emmanuel Macron, vont commencer à avoir leur propre business attaqué,
10:39est-ce qu'ils n'auront pas la tentation, parmi les plus importants de ces chefs d'entreprise, Stéphane, de lui dire « Écoutez, M. le Président, là, c'est plus possible », parce qu'en fait, c'est le cœur de notre business que vous mettez en danger ?
10:53— Je vous ai dit cela parce que, dans « Histoire secrète de la dissolution de Jacques Chirac », il dit que je travaillais confidentiellement pour Jacques Chirac, et que c'est Dominique de Villepin
11:14qui a balancé l'info, parce que dans le qualitatif que j'avais fait pour Jacques Chirac, j'avais préconisé que le président soit en première ligne. Il a fait l'inverse. Il a laissé Alain Choupler. Mais lors de cette dissolution,
11:33j'ai bien vu, puisque j'étais parmi la dizaine de personnes dans le secret, que le choix de la dissolution venait de ce qu'après le mouvement de novembre-décembre 95 qui avait bloqué le pays, les milieux d'affaires
11:58et fait pression sur Jacques Chirac et Jacques Pinault pour dissoudre, parce que l'analyse de trichet des milieux européens des marchés financiers était que la France n'irait pas à l'euro.
12:16Et donc le président Macron, on l'a vu, est assez insensible aux pressions du peuple, parce qu'il peut toujours envoyer les forces de l'ordre. On l'a vu lors de l'élection. Par contre, si les classes dirigeantes, si Bruxelles,
12:39si les marchés financiers disent qu'il est impossible que la France, au cœur du dispositif européen, continue à s'effondrer, alors Emmanuel Macron est encore jeune, et on va lui proposer un placard,
13:00mais on va lui expliquer que les vacances, c'est terminé et que les milieux d'affaires préféreront l'URL ou la droite dans la cohérence plutôt que cette situation incroyable où le pays s'effondre sans État, sans gouvernement, sans stabilité.
13:26— On part au 0826-300-300. Retrouvez Xavier de Bordeaux. Bonsoir, Xavier. Vous croyez à ce gouvernement LRPS, on va appeler ça comme ça, ou LRENPS ?
13:37— Oui. Alors je pense que ce serait pas une solution très cohérente politiquement. Ça enverrait un signal un peu de confusion généralisée aux électeurs.
13:45Je pense qu'il serait temps... En fait, je pense que comme Tom Conan, il serait temps de donner sa chance à un gouvernement NFP, sachant qu'on sait très bien qu'il y aura une dissolution dans 8-9 mois.
13:56Donc ce serait un gouvernement transitoire, un gouvernement en CDD. Ce serait la solution de court terme, parce qu'on est dans une situation quasiment insoluble.
14:04Mais il y a quand même deux solutions. La solution de court terme, c'est d'avoir un gouvernement NFP engagé sur des mesures qui feraient consensus au sein de l'Assemblée nationale,
14:13la réforme des retraites, par exemple, l'abongation, et des solutions de long terme, parce que cette crise-là, on va beau faire une présidentielle anticipée,
14:21comme disait Stéphane Rodège, je ne suis pas d'accord avec lui. Si on fait une présidentielle anticipée, qu'est-ce qui risque de se passer ?
14:27Il risque d'y avoir exactement la même chose, une tripartition de l'Assemblée nationale. Donc des solutions de long terme, pour terminer, ce serait d'aller vers
14:35une 6e République, c'est-à-dire une République plus équilibrée en termes de répartition des pouvoirs, et vers aller surtout une classe politique capable du compromis,
14:43comme c'est le cas partout en Europe, en Suède, en Allemagne, etc.
14:47— Et il y a un point aussi que je trouve important de mentionner, c'est que le coût du retard est supérieur au coût de l'erreur. Ça, c'est un point qui s'applique
14:55beaucoup en économie, et en l'occurrence là, sur le budget, c'est exactement ça. Le fait qu'on perde du temps... En fait, que ce soit une option de droite,
15:01une option de gauche, vous voyez, quelle que soit la coloration politique qu'on veuille donner à tout ça, prendre du retard, c'est bien pire que de faire une erreur
15:09sur telle ou telle mesure, tel ou tel dispositif. Ça, il faut bien que les Français aillent en tête. Après, il y a un effet boule de neige sur la dette.
15:15Et avec le spread, vous savez, l'écart entre l'Allemagne, donc le taux d'intérêt qui va augmenter, cet effet boule de neige va s'accélérer avec le temps.
15:21— Stéphane Roset, dernière question. Emmanuel Macron a dit qu'il resterait jusqu'à la dernière seconde de son mandat. Vous pensez qu'il tiendra jusqu'au printemps 2027 ?
15:30— Non, je ne pense pas. Le dysfonctionnement, et si nous nous en lisons, c'est parce que la représentation nationale n'est pas conforme au pays.
15:44Et votre auditeur ne doit pas m'estimer que des législatives dans la foulée de la présidentielle, logiquement, le président a une majorité.
15:58Pourquoi ça ne s'est pas passé en 2022 ? Parce que le président n'a pas mené un panneau législatif, parce qu'il n'avait pas de contrat à défendre avec le pays,
16:14parce que son élection s'était faite dans un climat de peur sur la phobie et la guerre en Ukraine. Et donc il n'a pas eu de majorité.
16:29Mais s'il y a une présidentielle, le président va dire, le futur, tous vont dire « Je demanderai des législatives » faites lises par l'article 5.
16:46C'est la position de l'ancien secrétaire général du Conseil constitutionnel. Il peut y avoir des législatives dans la foulée d'une nouvelle présidentielle, parce que ce n'est pas le même président.
17:05— Merci. — Voilà. Et là, il y aura cohérence.
17:11— Merci mille fois, Stéphane Rosest, d'avoir été avec nous, politologue, président de la CAP et enseignant à l'Institut catholique de Paris.
17:18Merci mille fois d'avoir été avec nous dans un instant. Le « Qui c'est qui ? », qu'il a dit, c'est beaucoup plus détendu. Vous allez voir.
17:23— Sud Radio, votre attention est notre plus belle récompense. — C'est vraiment agréable d'entendre une radio aussi joyeuse, même que ce soit le 7h du matin et le soir. C'est excellent.
17:33— Sud Radio, parlons vrai.