Affaires des écoutes : Nicolas Sarkozy définitivement condamné à trois ans de prison, dont un an ferme sous bracelet électronique.
Regardez la réaction de Patrice Spinosi, son avocat devant la Cour de Cassation.
Regardez L'invité de RTL avec Thomas Sotto du 19 décembre 2024.
Regardez la réaction de Patrice Spinosi, son avocat devant la Cour de Cassation.
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00:00Et tout de suite l'invité de RTL Matin, Thomas, vous recevez aujourd'hui Maître Patrice Spinozzi,
00:09l'avocat de Nicolas Sarkozy.
00:10Bonjour et bienvenue sur RTL Maître Spinozzi.
00:12Bonjour.
00:13Son pourvoi en cassation a été rejeté, Nicolas Sarkozy a donc été définitivement condamné à trois ans de prison,
00:18dont un an de prison ferme sous brasse électronique pour corruption et trafic d'influence.
00:22Je ne suis pas décidé à accepter l'injustice profonde qui m'est faite, a réagi l'ancien président sur les réseaux sociaux.
00:28De quelle injustice parle-t-il ?
00:31Nicolas Sarkozy se sent injustement condamné parce qu'en réalité il faisait valoir un certain nombre de moyens de droit
00:38qui étaient fondés sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme,
00:41qui garantit les droits de la défense et en particulier le secret professionnel.
00:45Et il considère que ces droits n'ont pas été respectés,
00:48ou en tout cas que la Cour de cassation ne lui a pas permis de garantir ces droits.
00:52Ce qui n'a pas été donc l'avis de la Cour de cassation.
00:55C'est le premier président ancien président condamné de la prison ferme, Nicolas Sarkozy.
00:59Vous qui êtes son avocat, est-ce que vous diriez qu'il est victime d'une erreur judiciaire, Nicolas Sarkozy ?
01:04Je ne dirais pas qu'il est victime d'une erreur judiciaire.
01:07Il est victime d'une interprétation du droit par nos juridictions, dont la juridiction suprême.
01:14C'est le rôle de la Cour de cassation.
01:16Ce qui est totalement le rôle de la Cour de cassation, mais que nous contestons.
01:19C'est-à-dire qu'au-dessus de la Cour de cassation, il y a la Cour européenne des droits de l'homme.
01:23C'est elle qui est la Cour suprême en matière de contrôle des libertés fondamentales.
01:27Et nous ne sommes pas d'accord entre la solution de la Cour de cassation
01:31et notre lecture de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme.
01:34Et si vous voulez, c'est assez logique.
01:36C'est-à-dire qu'il n'y a de condamnation de la France, et il y a des centaines de condamnations de la France chaque année,
01:42qu'à partir du moment où la Cour de cassation, une Cour suprême,
01:48que ce soit la Cour de cassation ou le Conseil d'État en France,
01:50il faut considérer qu'il n'y avait pas de problème avec l'application de la Convention européenne des droits de l'homme.
01:54Donc il faut en passer par là, nécessairement, pour pouvoir saisir la Cour européenne,
01:59et le cas échéant, pour que la France soit condamnée.
02:01Est-ce qu'il va demander sa libération conditionnelle dès son premier rendez-vous avec le juge d'application des peines,
02:06ce qui pourrait lui éviter de porter ce fameux brassé électronique ?
02:09Écoutez, tout ça est un peu prématuré.
02:12C'est-à-dire que la décision, ça va venir vite.
02:15Déjà, il va y avoir un rendez-vous qui va être pris avec ce juge d'application des peines.
02:19Le juge d'application des peines a donc 30 jours officiellement pour que ce rendez-vous soit organisé.
02:24Puis, par la suite, il y a 4 mois officiellement, là encore une fois, pour que cette mesure soit mise en place.
02:29Donc on va voir.
02:31Rendez-vous va être pris, on va voir ce que va proposer le juge d'application des peines,
02:34on va voir la manière dont les choses ont vocation à être mises en oeuvre.
02:37Ce qui est certain, c'est que Nicolas Sarkozy, il fait un recours à la Cour européenne des droits de l'homme,
02:41parce qu'il considère que la condamnation qui lui a été imposée est injuste.
02:45Ce recours n'est pas suspensif.
02:47Ce recours n'est pas suspensif, donc il est certain que la peine sera exécutée.
02:51Et il est aussi certain qu'il s'y conformera.
02:54C'est-à-dire qu'il n'y a aucune volonté de critiquer...
02:57Il n'a pas le choix, c'est la justice.
02:59Il n'est pas en train de vous dire que la peine qui m'a été imposée est une peine injuste.
03:04Il dit que je suis condamné aujourd'hui à l'issue d'un procès dont j'estime qu'il n'a pas garanti mes droits fondamentaux.
03:11Et un point quand même important, parce que la décision de Nicolas Sarkozy, on en parle beaucoup parce que c'est Nicolas Sarkozy.
03:18C'est une décision de principe.
03:20C'est-à-dire que c'est une décision qui porte une atteinte assez grave en réalité aux libertés fondamentales,
03:26et en particulier aux droits au secret professionnels.
03:28C'est la première fois qu'un client d'un avocat est condamné sur le seul fondement des déclarations qu'il a pu avoir avec son avocat.
03:36Vous lui avez parlé ces dernières heures, Nicolas Sarkozy ?
03:39Qu'est-ce qu'il vous a dit ? Il est dans quel état d'esprit ? Il est atteint moralement ?
03:43Nicolas Sarkozy, depuis le début de cette affaire, en fait, il est dans le même état d'esprit.
03:48C'est-à-dire qu'il est absolument déterminé et convaincu du fait qu'il est dans son droit juridique.
03:55Et donc, c'est une conviction qu'il a chevillée au corps, ce qui l'amène d'ailleurs à saisir la Cour européenne droit de l'homme.
04:01Il a d'ailleurs toujours dit que s'il n'obtenait pas satisfaction des juridictions françaises, il saisirait la Cour européenne droit de l'homme.
04:07Et à côté de ça, il est extrêmement calme. C'est-à-dire qu'il n'y a pas de fébrilité chez Nicolas Sarkozy.
04:12C'est un homme qui est habitué aux vicissitudes de la vie.
04:17Et c'est quelqu'un qui est parfaitement, aujourd'hui, maître de lui-même et qui va se conformer à la décision qui a été rendue.
04:25Maître Spinozik, on comprenait bien ce matin. Vous dites quoi ? Vous dites la justice s'est trompée dans son interprétation du droit
04:31ou la justice fait de la politique au lieu de faire du droit ?
04:34Non. Moi, je ne dis pas la justice fait de la politique au lieu de faire du droit.
04:36Moi, je ne suis pas un politique. Moi, je suis un juriste. Moi, je fais du droit, en fait.
04:40Donc, aujourd'hui, la défense que nous avons eue devant la Cour de cassation était une défense juridique.
04:45Ce n'est pas une défense politique. La saisine, demain, de la Cour européenne droit de l'homme, elle sera juridique.
04:50Ce que nous mettons en avant sont des moyens de droit. Il y a un principe qui est le respect du secret professionnel.
04:56Ça n'a pas été un procès politique ?
04:58Non, ça n'a pas été un procès politique.
05:02Je vous pose la question parce que sur une autre affaire, en 2014 déjà, il disait il y a une volonté de m'humilier.
05:07Tout est fait pour donner de moi une image qui n'est pas conforme à la réalité. Il s'en est pris souvent au magistrat Nicolas Sarkozy.
05:12Mais Nicolas Sarkozy, il réagit. Lui, c'est un homme politique. Donc, il réagit en tant qu'homme politique qui est mis en cause.
05:22Et pardon, on peut quand même relever qu'il y a quand même une dérive, sans entrer dans une analyse qui est une analyse politique,
05:30une analyse sociologique, une dérive de la judiciarisation de la vie politique.
05:35On voit bien ces dernières années qu'on entre dans une situation où dès que vous êtes un homme politique,
05:40vous êtes susceptible d'avoir, du fait de votre action politique, une procédure judiciaire.
05:46Si on renverse les choses, on peut dire que tous les politiques condamnés ont les mêmes éléments de défense,
05:50c'est-à-dire que c'est de l'acharnement, c'est le cas de Marine Le Pen sur les réquisitions au procès des assistants parlementaires.
05:57Moi, je ne suis pas là, encore une fois, pour distribuer les bons points sur la manière dont s'opère la vie politique.
06:02Je constate juste, en tant que professionnel de la justice, qu'aujourd'hui, il y a beaucoup plus d'actions en responsabilité judiciaire
06:09contre des hommes politiques qu'auparavant. Et que les règles aujourd'hui qui sont développées autour de la notion du conflit d'intérêt
06:17sont de plus en plus difficiles à mettre en œuvre lorsqu'être un homme politique.
06:21Donc, pardon, mais Jacques Chirac a été condamné. Bon, certes, non pas de la prison ferme, mais il a été condamné.
06:27Aujourd'hui, Nicolas Sarkozy a été condamné définitivement.
06:30Ça n'est un secret pour personne que, de toutes les façons, le jour où Emmanuel Macron ne sera plus président de la République,
06:36les juges ont déjà dans leur tiroir des actions judiciaires.
06:39Il sera condamné un jour, Emmanuel Macron ?
06:40Je n'ai pas dit qu'il était condamné, j'ai dit que potentiellement, aujourd'hui, il y a des gens qui attendent qu'il ne soit plus président,
06:48et on pourra en reparler dans quelques années. Il y a un risque, à mon avis, significatif au regard...
06:53Vous pensez à quelles affaires ? Ce sont quand même des choses lourdes que vous dites là.
06:56Pourquoi ?
06:57Je ne sais pas.
06:58À date, il n'y a pas de procédure ouverte contre Emmanuel Macron ?
07:01Ah ben, ce n'est pas possible.
07:02Ah bon ?
07:03On ne peut pas ouvrir une procédure contre Emmanuel Macron.
07:04Vous parlez de quoi ? Desquelles alors ?
07:06Écoutez, regardez les affaires qui sont autour, aujourd'hui, d'Emmanuel Macron.
07:09Lesquelles ?
07:10Eh ben, l'affaire McKinsey, par exemple. Elle est susceptible, le cas échéant, de permettre,
07:15si on en a une vision qui est une vision négative, une mise en cause d'Emmanuel Macron.
07:20On verra ce qui se passera. Je dis juste qu'aujourd'hui, lorsque vous êtes un homme politique,
07:24et on peut parler des dérives qu'il y a pu y avoir de mise en cause à l'occasion du Covid,
07:28de la même manière, des perquisitions qui sont intervenues, j'ai défendu Éric Dupond-Moretti,
07:32de la même manière, la mise en cause qu'il y a eu...
07:34Je vais quand même vous poser une question de justiciable, que nous sommes tous, finalement.
07:38Je me dis, mais en fait, dans cette affaire, la justice est trompée à tous les étages, en première instance,
07:43en appel, en cassation. La question que je vous pose, vous, l'avocat,
07:46je peux avoir confiance dans la justice de mon pays ?
07:48J'imagine nos auditeurs qui se disent, mais alors, première instance, deuxième instance, cassation.
07:52Faux, faux, faux.
07:54Alors, je vais vous dire deux choses. La première, c'est que oui, il faut avoir confiance dans la justice de son pays,
07:57sinon, on ne peut pas vivre en France.
07:59Donc, heureusement, la justice, la plupart du temps, ne se trompe pas.
08:02Après, il arrive qu'elle se trompe.
08:04Et la saisine de la Cour européenne des droits de l'homme, que nous entreprenons,
08:09eh bien, il y a des condamnations de la France devant la CEDH.
08:12Moi, à titre personnel, j'ai fait condamner 33 fois la France.
08:15Dans ces 33 cas, on était dans la même situation.
08:18C'est-à-dire qu'en première instance, en appel, en cassation, on nous avait dit,
08:21ben non, vous avez tort. Et la Cour européenne des droits de l'homme nous a dit,
08:24ben non, c'est vous qui avez raison.
08:25À quoi va ressembler sa vie avec ce bracelet électorique ?
08:27Qu'est-ce qu'il aura le droit de faire, de ne pas faire ?
08:29Il est inéligible ?
08:31Il est inéligible.
08:32Il ne pourra pas voter à la prochaine présidentielle ?
08:34Il ne pourra pas voter à la prochaine présidentielle,
08:36sauf à ce qu'il demande le relèvement de son inéligibilité.
08:39Vous en a parlé de ça ou pas ?
08:40Parce que ça reste un animal politique, Nicolas Sarkozy.
08:42Oui, alors je pense que ça n'est pas non plus,
08:45aujourd'hui, dans la logique de Nicolas Sarkozy,
08:49il n'envisageait pas forcément de se présenter à la prochaine présidentielle.
08:53Sans se présenter, de voter ?
08:54De voter. Écoutez, on verra dans trois ans ce qui se passera.
08:57Ce qui est certain, c'est que pour le moment, il y a une inéligibilité.
09:00Ce qui est certain, c'est que cette inéligibilité,
09:02il pourra, le cas échéant, en demander à être relevé, c'est possible.
09:05En tout cas, c'est son droit, à compter d'un délai de six mois.
09:08On verra bien ce qu'il sera répondu, on verra bien s'il engage cette démarche.
09:11Et donc, il s'apprête, oui, à vivre avec un bracelet.
09:15Il faut bien comprendre quand on vit avec un bracelet,
09:17mais je pense qu'on en a largement parlé.
09:19En fait, vous avez le droit de travailler.
09:21Vous définissez avec le juge d'application des peines des horaires,
09:24qui sont des horaires que vous pouvez vous prendre à votre bureau.
09:26Mais il pourra continuer à donner ses conférences à l'étranger ?
09:29Ça fera très certainement l'objet d'une demande.
09:33Vous avez la possibilité de le faire.
09:34Mais il faut demander une autorisation spéciale
09:37au juge d'application des peines.
09:38Donc, le but, c'est que votre vie puisse continuer,
09:42en tout cas professionnelle,
09:43mais qu'évidemment, vous n'ayez plus la liberté de vos mouvements au quotidien,
09:47que ce soit le week-end ou pendant vos vacances.
09:49C'est une condamnation infamante ?
09:51Oui, je pense que c'est une condamnation infamante.
09:53Pardon, vous êtes président de la République française,
09:55vous avez été président de la République française,
09:57vous êtes condamné à porter un bracelet,
09:59évidemment, oui, c'est infamant.
10:01C'est infamant pour tout le monde, et a fortiori,
10:04lorsque vous avez été président de la République.
10:06C'est jamais, je vais vous dire une chose,
10:08enfin, objectivement, indifféremment à ce qu'on peut penser,
10:10Nicolas Sarkozy ou pas,
10:11mais c'est jamais une bonne chose
10:13quand un ancien président de la République se fait condamner
10:15par le pays au destiné duquel il a présidé.
10:18C'est en termes d'image et de démocratie,
10:20tout ça, c'est assez délétère.
10:22Merci beaucoup Maître Spinozzi.