Budget, surpopulation carcérale, justice des mineurs...
Didier Migaud, Ministre de le Justice, est l'invité de Thomas Sotto.
Regardez L'invité de RTL avec Thomas Sotto du 14 octobre 2024.
Didier Migaud, Ministre de le Justice, est l'invité de Thomas Sotto.
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00:00Et tout de suite, c'est l'invité d'RTL Matin, Thomas, vous recevez le ministre de la justice, garde des Sceaux, le ministre aussi venu de la gauche dans ce gouvernement, c'est Didier Migaud.
00:11Bonjour et bienvenue sur RTL, Didier Migaud. Bonjour.
00:13Êtes-vous, serez-vous, Didier Migaud, le garde des Sceaux d'une justice au rabais ?
00:17Non.
00:18Vous savez pourquoi je vous pose la question ? Le budget, 500 millions de moins pour l'année prochaine.
00:23Oui, j'en suis conscient et je suis mobilisé pour que des ajustements à la hausse puissent être proposés.
00:31Le premier ministre l'a dit, d'ailleurs, qu'un amendement serait déposé par le gouvernement dans le cadre de la discussion parlementaire pour rehausser un certain nombre de budgets, dont celui de la justice.
00:46Donc vous allez récupérer ces 500 millions, vous avez la garantie aujourd'hui ?
00:49Je ne sais pas, peut-être pas la totalité. Ce que je souhaite, c'est que les engagements qui ont été pris en termes d'effectifs vis-à-vis des magistrats, vis-à-vis des greffiers, vis-à-vis des personnels de justice, des personnels pénitentiaires soient tenus.
01:05Ça ne va pas être facile s'il y a moins d'argent, s'il y a moins de moyens. Les syndicats disent déjà qu'il y a des embouteillages dans les tribunaux, dans les cours d'assises, on n'arrive plus à gérer les crimes, ça va créer des délais rallongés pour rendre justice. C'est un problème quand même, non ?
01:16Oui, les états généraux de la justice ont fait le constat d'une justice sinistrée.
01:24Vous le partagez ce constat aujourd'hui ?
01:26Oui.
01:27La justice est sinistrée ?
01:29La justice n'est pas réparée. Il y a eu un programme des crédits supplémentaires obtenus par mon prédécesseur avec le soutien du Président de la République, il faut poursuivre cet effort.
01:44En plus, il y a d'énormes attentes vis-à-vis de la justice. Il faut que la justice ait les moyens, justement, et je suis préoccupé par l'engorgement.
01:54Vous avez un engorgement considérable au niveau de la police, au niveau de la justice, vous avez un certain nombre d'affaires criminelles qui ont des difficultés d'audiencement dans les tribunaux.
02:05Il faut récupérer combien Didier ? De combien vous avez besoin là pour le budget de 2020 ?
02:09Je ne peux pas vous donner un chiffre, ça fait l'objet des négociations que je peux avoir avec Madignon.
02:16J'ai posé comme principe d'obtenir les crédits nécessaires pour que les engagements soient respectés en termes notamment d'effectifs.
02:28Bon, ça me paraît essentiel, je vous le disais.
02:32C'est une ligne rouge pour vous. Est-ce que vous pourriez quitter le gouvernement si demain on vous disait que ce sera ça et pas plus ?
02:36Si on en reste à la lettre au plafond, oui, je ne vois pas ce que je ferais encore au gouvernement.
02:41Mais j'ai eu des assurances du Premier ministre et je lui fais totale confiance. Il est tout à fait conscient de cette situation.
02:49Il y a toujours un décalage entre certaines déclarations politiques et la réalité et les moyens dont on dispose.
02:54Est-ce qu'on peut créer aujourd'hui des peines courtes immédiatement exécutées, comme le souhaite Bruno Retailleau, avec moins d'argent ?
03:00Est-ce qu'on peut obtenir plus de fermeté de la justice, comme le répète encore Bruno Retailleau, en lui donnant moins de moyens ?
03:06Est-ce que là, ce n'est pas la quadrature du cercle, quand même ?
03:08Oui, c'est pour ça qu'il faut que les moyens promis à la justice soient confortés.
03:14Donc, sur les peines courtes, le Premier ministre les a proposées, nous sommes en train d'y travailler.
03:24Mais effectivement, on se pose la question, où on accueille ces jeunes ?
03:27Bon, donc, avec une surpopulation carcérale. Donc, il y a un certain nombre de...
03:31Des records, 79 000...
03:33Oui, avec aussi un nombre record de lits par terre, donc près de 3 900.
03:43Donc voilà, il faut poursuivre, bien sûr, le programme de construction des prisons.
03:50Il faut réfléchir à des lieux d'enfermement qui soient diversifiés pour, justement, accueillir les différents publics en fonction de la peine prononcée
03:59et en fonction du profil, bien évidemment, de la personne.
04:02Et ça vous paraît réalisable pour quand, ça, les peines courtes immédiatement réalisées ? C'est quoi le calendrier, en tenue de la situation que vous décrivez ?
04:09Nous sommes en train d'y travailler. Il faut vraisemblablement réadapter un certain nombre de lieux pour pouvoir accueillir.
04:15Il faut modifier la loi. Donc, ça demande un tout petit peu de temps.
04:21C'est quoi ? On parle de semaines, de mois, d'années ? C'est quoi ?
04:23Ça peut être de mois. Oui, oui. Pas d'années, je l'espère. Parce qu'il peut y avoir des situations, des solutions provisoires.
04:29Mais, en tout cas, ça nécessite des moyens.
04:33Donc, vous avez, je suis aussi très mobilisé là-dessus, la criminalité organisée.
04:40C'est un sujet qui s'amplifie, qui est d'une gravité extraordinaire.
04:46La criminalité gérée depuis les cellules de prison de plus en plus. Et que la prison est surnommée maintenant le télétravail.
04:52Oui, c'est aussi une de mes préoccupations. Faire en sorte que tous ces objets interdits en prison ne puissent pas arriver dans les prisons.
05:03Donc, là aussi, c'est tout un programme de couverture des cours intérieurs, de brouillage des téléphones en prison.
05:12Donc, il y a un certain nombre, bien sûr, de décisions.
05:14Là, je vous écoute et je me dis, ce n'est pas quelques centaines de millions d'euros en plus qu'il faudrait.
05:18C'est doubler le budget de la justice, quasiment, non ? Avec tout ce qu'il y a à faire.
05:21Il y a quand même 10 milliards.
05:22Oui, certes.
05:23Donc, vous raisonnez en termes différentiels.
05:26Mais oui, le budget de la justice, c'est 2% des dépenses de l'État.
05:30C'est un budget de l'ordre de 10 milliards, un petit peu plus, je l'espère, par rapport à, disons, 500 milliards de dépenses de l'État.
05:38Quand vous regardez la place de la France et la considération de la France pour sa justice,
05:43nous sommes très en retard par rapport à beaucoup d'autres pays qui nous sont comparables.
05:47Et je pense qu'on peut maîtriser les finances publiques.
05:51C'est l'ancien premier président de la Cour des comptes qui vous parle.
05:55On peut maîtriser les finances publiques tout en conservant un certain nombre de priorités.
06:00Et les économies sur le régalien ne sont pas toujours les économies les plus intelligentes et les plus pertinentes.
06:04Ce ne sont pas de bonnes économies. Il ne faut pas faire celles-là. Ce n'est pas celles-là qu'il faut faire.
06:07En tout cas, sur le budget de la justice, ça doit rester une priorité.
06:12Aujourd'hui, dans tous les collèges et tous les lycées de France, on va se souvenir de Samuel Paty et de Dominique Bernard,
06:17professeurs exécutés dans l'exercice de leurs fonctions.
06:20Aujourd'hui, à l'âge où on devrait être sagement assis en classe,
06:23certains jeunes, voire très jeunes, deviennent des criminels. On l'a vu il y a quelques jours.
06:26Des meurtres qui peuvent impliquer des tueurs à gage de 14 ans.
06:30J'ai une question très concrète. L'excuse de minorité qui fait qu'aujourd'hui un mineur
06:34n'est pas condamné comme un majeur, peut-elle devenir non plus la règle mais l'exception ?
06:39Autrement dit, aujourd'hui, quand un mineur commet un crime, l'excuse de minorité est de principe, la base.
06:45Et le juge peut décider d'y déroger. Est-ce que vous souhaitez inverser ça ?
06:48Il y a des exceptions. Et d'ailleurs, une cour d'assises vient de prendre une décision en rejetant l'excuse de minorité.
06:56Je suis prêt à y travailler. Le Premier ministre a fait des propositions dans ce sens.
07:01Je pense qu'en certaines situations, notamment d'ultra-violence, de crimes, il faut ajuster l'excuse de minorité.
07:11Vous n'êtes pas hostile à l'inversion de la norme, on est d'accord pour bien comprendre.
07:14Sans la remettre en cause, à partir du moment où ce sont des principes constitutionnels,
07:20ce sont des conventions internationales qui font que la justice des mineurs ne peut pas être la justice des majeurs.
07:25Donc il faut pouvoir travailler dans ce cadre-là.
07:28Je pense que des ajustements sont possibles, tout en respectant l'état de droit et l'état des conventions internationales qui lie la France.
07:35Donc ajuster, ça veut dire quoi pour vous ?
07:38Il faut regarder. L'excuse de minorité doit pouvoir être remise en cause dans un certain nombre de situations.
07:48Je pense que nous avons quelques marges de manœuvre par rapport à la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
07:53Et qu'il faut prendre en compte cette situation d'ultra-violence réalisée par des mineurs.
08:00Il y aura une nouvelle loi immigration en janvier. Didier Migaud annonce de la porte-parole du gouvernement, Maude Bréjon hier.
08:06Il s'agira notamment de faire passer la durée maximale de rétention administrative de 90 à 210 jours.
08:11On en a besoin de cette loi ou pas, aujourd'hui ?
08:13Écoutez, ça va dépendre beaucoup du contenu.
08:17L'immigration doit pouvoir être maîtrisée. L'immigration est utile dans nos pays.
08:25D'ailleurs, on voit bien qu'y compris les pays qui ont des gouvernements qui s'efforcent ou qui tiennent un discours de limitation très très forte de l'immigration...
08:34Mais pour vous, on en a besoin, a priori, ou on fait du PORN ?
08:39Il ne s'agit pas, je pense, de faire du PORN. Il faut voir si un gouvernement dispose de tous les outils nécessaires pour maîtriser ce phénomène.
08:51Sur la durée de rétention administrative, c'est se rapprocher, je dirais, des taxes européens, ce qui se fait dans d'autres matières.
09:03Donc, pourquoi pas ?
09:05Vous n'êtes pas hostile par principe à une nouvelle loi sur l'immigration ?
09:07Je ne suis pas hostile par principe à une loi sur l'immigration. Tout dépend du contenu.
09:12Dernière question. La politique, c'est aussi des symboles. On a beaucoup parlé d'argent. Les budgets du Parlement et de l'Elysée vont augmenter de 1,7% et de 2,5% respectivement l'an prochain.
09:21Elle est où, la République exemplaire ? S'étrangle Valéry Pécresse, qui pourtant soutient Michel Barnier. Est-ce qu'il faut revenir symboliquement sur ces hausses de budget-là ?
09:28Oui. Est-ce qu'on peut arrêter la démagogie ?
09:34À qui vous parlez là ?
09:36Sur un certain nombre de sujets, ou à tout le monde.
09:38C'est le budget de l'Elysée. Il peut être variable d'une année sur l'autre. Ça dépend des déplacements du Président de la République, des responsabilités qui sont peut-être les siennes.
09:48Bon, c'est à 1, 2, 3 millions près. Honnêtement, le budget de l'Elysée est le budget le plus contrôlé aujourd'hui.
09:56Il fait l'objet d'un contrôle chaque année par la Cour des Comptes. Bon, c'est une garantie, je pense, pour les citoyens.
10:02Donc c'est un faux sujet. Dans le contexte, l'exemplarité doit s'appliquer à tous. C'est ce que disait votre collègue du gouvernement pourtant.
10:08Bien sûr, elle doit s'appliquer à tous, mais en fonction de priorité, en fonction de besoin.
10:13Bien sûr, c'est à l'ancien Président de l'Autorité pour la transparence de la vie publique que vous vous adressez.
10:20Donc la probité, l'exemplarité, je pense qu'effectivement, ça doit être constamment une règle.