Mesdames et messieurs, nous sommes réunis aujourd'hui pour un moment solennel. Oui, car c'est avec une profonde et infinie tristesse que je vous annonce la mort du devoir conjugal.
Retrouvez « En toute subjectivité » avec Anne-Cécile Mailfert sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/anne-cecile-mailfert-en-toute-subjectivite
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00:007h21 et on en parlait donc hier, la CEDH Anne-Cécile se prononçait sur une affaire d'un autre âge.
00:13Un divorce pour faute prononcé par la Cour d'appel de Versailles.
00:17C'était en 2019 et c'est le sujet dont vous vous emparez ce matin.
00:22Mesdames et messieurs, nous sommes réunis aujourd'hui pour un moment solennel.
00:27C'est un éloge funèbre ?
00:28Oui, c'est avec une profonde et infinie tristesse que je vous annonce la mort du devoir conjugal.
00:34Il a pourtant bien tenu le coup ce vieux gaillard, il en a vu des vertes et des pas mûrs collés
00:39à nos fesses comme un vieux slip sale.
00:41Pendant des siècles, il a régné en maître, confortablement installé dans nos lois, nos
00:45institutions, nos lits et nos têtes.
00:47Légalement d'abord, rappelons-nous cette belle époque pas si lointaine où le viol
00:51conjugal n'existait tout simplement pas car on ne pouvait violer qu'une femme avec laquelle
00:55on n'était pas marié.
00:56Mais c'était logique, les femmes n'étant pas des sujets mais des objets, comment voler
01:00ce que l'on possède déjà ? Il a fallu attendre la loi de 1980 et la jurisprudence
01:05de 1992 pour qu'enfin, on voit une première condamnation pour viol conjugal.
01:10C'était il y a 33 ans seulement.
01:12Mais le devoir conjugal n'avait pas dit son dernier mot.
01:15Il existait toujours dans nos institutions.
01:17Exact.
01:18C'est que le mariage est une magnifique invention où l'on promet amour, fidélité mais surtout,
01:24des rapports réguliers.
01:26Le fameux « pour le meilleur et pour le pire », une formule qui dissimulait habilement
01:30un subtil contrat de soumission sexuelle à durée indéterminée, si l'on en croit
01:34l'interprétation bien patriarcale de l'article 215 du code civil.
01:38Pour les juges, les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie, était l'occasion
01:44d'accabler lors des divorces les conjoints qui se refusaient aux ébats.
01:47Mais hier, la Cour européenne des droits de l'homme a asséné le coup fatal.
01:51A partir d'aujourd'hui, communauté de vie ne pourra plus dire communauté de lit.
01:56C'est que culturellement, il faut bien l'avouer, nous étions formatés.
02:00On nous disait que pour maintenir ou sauver un couple, il fallait coucher.
02:03Qu'amour et sexe étaient forcément liés.
02:05Tu ne veux plus ? Alors tu m'aimes plus alors ? Le chantage affectif, quelle belle
02:11invention pour maintenir le devoir conjugal sous perfusion.
02:14Il n'y a pas si longtemps, un magazine titrait « La fellation, ciment du couple », une
02:19pratique qui apaise les tensions.
02:21Mais voilà, toutes les bonnes choses ont une fin et notre bon vieux devoir conjugal
02:25a fini par rendre l'âme.
02:26Un peu de mitou par-ci, quelques lois par-là et l'obstination des associations a eu raison
02:30du vieux cochon.
02:31Hier donc, grâce au collectif féministe contre le viol soutenu par la Fondation des
02:36femmes, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme.
02:39Elle n'aurait jamais dû accorder le divorce pour faute à ce monsieur qui reprochait à
02:43madame une absence de sexe.
02:45Mesdames et messieurs, vous pouvez dire non.
02:48Et que lui substituons-nous à ce devoir conjugal ?
02:51Rien de bien méchant, simplement du sexe libre.
02:53Du sexe désiré, choisi.
02:55Du sexe sans forcer, sans contrainte, sans menace, sans mauvaise surprise et surtout
03:00sans domination.
03:01Un concept révolutionnaire, n'est-ce pas ?
03:02Apparemment.
03:03Alors certes, il paraît que nous faisons moins l'amour qu'avant.
03:0643% des Français et des Françaises déclarent aujourd'hui avoir en moyenne un rapport
03:09sexuel par semaine, contre 58% en 2009.
03:13Moins souvent peut-être, mais mieux, assurément.
03:16Alors, vive le sexe ou pas, mais toujours libre, les amis.