Lundi 17 avril 2023, SMART BOURSE reçoit David Benamou (Associé Gérant - Directeur des Investissements, Axiom Alternative Investments)
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 [Musique]
00:10 Et parmi les résultats qui animeront cette semaine, la suite des résultats des grandes banques et des grands établissements financiers américains.
00:18 En l'occurrence, après une première série de publications vendredi dernier qui a vu les résultats de JP Morgan, de Citigroup ou encore de Wells Fargo,
00:27 publiés et livrés aux investisseurs, nous faisons le point sur ce secteur bancaire qui a fait beaucoup parler ces dernières semaines évidemment.
00:33 David Benhamou est avec nous en visioconférence, associé gérant et directeur des investissements d'Axiom Alternative Investment.
00:39 Bonjour et bienvenue David. Merci beaucoup d'être avec nous. L'idée étant de faire un peu le point sur les fondamentaux des banques américaines
00:47 avec les premières banques majeures aux Etats-Unis qui ont publié leurs résultats vendredi. En attendant les suivantes tout au long de la semaine,
00:54 quels sont peut-être les premiers enseignements qu'on peut retirer de ces publications David ?
00:58 Bonjour Édouard. C'est une surprise plutôt positive puisque les trois grandes banques qui ont publié ont délivré des résultats supérieurs aux attentes de plusieurs points de vue.
01:14 D'abord on a beaucoup parlé des dépôts et de la fuite des dépôts et ce dont on s'est rendu compte au cours de ce trimestre dans ces publications,
01:23 c'est que les dépôts ont été relativement stables, à positif pour certaines banques. Le point le plus important, c'est qu'on a noté une baisse très importante
01:34 de la migration des dépôts vers les fonds monétaires. Vous savez qu'aux Etats-Unis, le gros compétiteur des banques, c'est les fonds monétaires.
01:43 Grâce à une facilité offerte par la Fed qu'on appelle le reverse repo, qui permet aux fonds monétaires d'avoir le même accès à la Fed que les banques,
01:55 il se trouve qu'on est passé d'un inflow d'environ 90 milliards par semaine à 30 milliards par semaine. Donc une forte décélération des flux vers les fonds monétaires.
02:08 Ça c'est très important évidemment parce que ça veut dire qu'il y aura beaucoup moins de tensions sur les dépôts, beaucoup moins de tensions sur les dépôts bancaires.
02:16 Ça veut dire moins de pression sur ce qu'on appelle les "deposits de bêta", c'est-à-dire la partie de la rémunération qui n'est pas conservée par la banque.
02:26 Donc le deuxième point important, c'est les marges d'intérêt. Marges d'intérêt qui sont supérieures à ce qui était attendu, avec des indications pour la suite
02:38 qui sont stables pour Bank of America et pour Citi, qui ne modifient pas leurs expectations pour 2023. En revanche, JP Morgan qui revoit à la hausse ses marges d'intérêt de 10%.
02:54 Donc c'est considérable. Donc ça veut dire que JP s'attend pour 2023 à des marges d'intérêt beaucoup plus importantes que ce qui était prévu jusque-là.
03:06 Sinon, sur la partie crédit et qualité d'actifs, pas d'incident pour le moment. Donc je dirais que le volume d'activité est en ligne et puis pas d'incident majeur,
03:25 ou en tout cas pas de hausse du coût du risque significatif sur le trimestre.
03:30 Je disais vendredi, David, JP Morgan place la barre très haute entre effectivement des dépôts qui ont été collectés, net, positif pour JP Morgan,
03:40 plus la révision à la hausse de la marge nette d'intérêt pour l'ensemble de l'exercice. Ça semble être quand même effectivement la première banque américaine,
03:47 mais qui ancre encore un peu plus son statut de première banque américaine.
03:52 Oui, c'est clair. 10% de marge, c'est colossal. 10% de hausse des marges sur 2023, c'est absolument colossal.
04:03 Partant des banques américaines, on aura les résultats des banques européennes d'ici deux semaines ou un peu plus peut-être, David.
04:11 Est-ce qu'il y a des enseignements, est-ce qu'il y a une lecture croisée qu'on peut faire de la situation des banques américaines
04:16 et de la bonne situation de ce qu'on a pu voir au premier trimestre pour l'instant sur la situation des banques européennes,
04:23 avec des modèles qui peuvent être différents également ? Qu'est-ce qu'on attend des résultats des banques européennes ?
04:28 On attend des résultats très bons pour les banques européennes, aussi parce qu'elles sont beaucoup plus tôt dans le cycle de hausse des taux.
04:37 Ça veut dire qu'elles vont bénéficier de la hausse de rémunération des taux d'intérêt déposés à la Banque centrale plus longuement que les banques américaines.
04:51 Ce qu'on peut voir de ce point de vue, et notamment dans la stabilité des marges des deux grandes banques et de la hausse des marges de JP Morgan,
05:01 on peut voir un « riz de crosse » très positif pour les banques européennes.
05:08 Ça veut dire qu'elles ont encore quelques trimestres avec une contribution très forte des dépôts dans leurs marges d'intérêt.
05:20 La deuxième chose qu'on peut voir, c'est sur la partie banque d'investissement.
05:27 J'en ai pas parlé, mais la partie taux, change, revenu d'intérêt dans la banque d'investissement était plutôt très bonne.
05:36 Et ça, nos banques européennes ont dans leur banque d'investissement des composantes taux qui sont très importantes, par exemple Deutsche Bank ou Barclays.
05:48 Donc ça, c'est très positif pour elles.
05:50 La partie « fixed income » dans les BFI en Europe devrait être plutôt bonne sur le premier trimestre.
05:56 Si on en vient au stress de marché lié au secteur bancaire, qu'est-ce qu'on peut dire de l'évaluation qu'on peut faire du stress bancaire à ce stade ?
06:05 Un mois après les accidents SVB signature aux États-Unis, la résolution crédit fixe en Europe, ces événements ayant marqué un pic de stress dans les marchés,
06:16 sur les actions bancaires, sur la dette bancaire également, un mois après, où en est-on ?
06:20 Il y a d'un point de vue marché, et puis après c'est intéressant de voir les premières réactions des régulateurs.
06:27 D'un point de vue marché, clairement on a une normalisation, que ce soit côté actions ou côté crédit.
06:34 Donc côté actions, on est revenu à peu près à la moitié, un petit peu moins de la moitié de la hausse de la performance qu'on avait avant l'événement Crédit Suisse en Europe.
06:50 Donc on était à un peu plus de 20% de performance. Là, on doit être à peu près à 12% de performance au moment où on parle.
06:58 Donc on a une phase de normalisation qui devrait théoriquement se poursuivre, notamment avec les beaux résultats qu'on attend pour le premier trimestre.
07:09 Côté crédit, ce qui a beaucoup souffert, c'est le segment additional tiroil, avec la décision Crédit Suisse de réduire à zéro le nominal de ses titres.
07:21 Là, pareil, au moment de Crédit Suisse, on était à peu près à -15% de performance avec l'événement Crédit Suisse, et on est revenu à peu près à -5%.
07:33 Donc une phase de normalisation qui est en cours.
07:37 Et vous êtes convaincu, David, chez Axiom, que ce marché des 81 additional tier 1, hybrides, bancaires, cocos, subordonnés, ce marché-là est un marché qui va survivre justement à l'événement Crédit Suisse ?
07:51 Alors oui, on est convaincu pour deux raisons. D'abord, en fait, pour les régulateurs, les additional tier 1, c'est un pont important de l'accord de Baal post-2008 et du mécanisme de résolution bancaire.
08:06 Donc c'est un des éléments clés du mécanisme de résolution bancaire.
08:09 Les régulateurs n'ont absolument pas envie, aujourd'hui, qu'ils ne servent plus parce qu'ils devraient trouver un autre mécanisme, un autre outil pour servir dans la résolution bancaire.
08:19 Donc c'est un élément clé, ça représente aujourd'hui une vingtaine de pourcents du capital réglementaire des banques.
08:26 Deuxième élément, c'est pour les banques elles-mêmes, c'est une source de capital non dilutive,
08:30 et c'est aussi une source de capital qui réduit le coût moyen pondéré de leur capital parce que les coûts pour des additional tier 1 sont déductibles fiscalement dans la plupart des pays.
08:41 Donc c'est un instrument qui est utile pour les banques et utile pour les régulateurs.
08:46 Donc ils n'ont absolument pas l'intention que ce marché disparaisse.
08:52 Les banques sont d'accord avec ça, David ? Qu'en est-il ?
08:56 Est-ce qu'il y a des établissements bancaires qui ont pris des positions spécifiques par rapport à ces marchés de crédit bancaire spécifiques ?
09:06 On sait qu'il y a souvent des échéances de rappel, de refinancement liés à ces obligations hybrides bancaires.
09:13 David, est-ce qu'on a déjà des éléments un peu spécifiques sur l'animation de ce marché par les banques elles-mêmes ?
09:20 Alors, pas encore mais c'est assez normal. Je vais dire après une période de stress comme celle-là, on a des exemples dans le passé, après le stress Covid,
09:33 on a eu globalement tous les titres additional tier 1 qui traitaient à perpétuité.
09:39 C'est-à-dire que plus aucun investisseur ne s'attendait à ce que le titre soit rappelé à sa première date de call possible.
09:47 Donc au bout de quelques mois, ça se normalise et on a les titres qui se remettent à pricer à maturité.
09:54 Donc là, on est dans cette même situation, c'est-à-dire que les titres sont valorisés à perpétuité.
09:59 Cela dit, en passant, c'est du coup un très très bon point d'entrée pour les investisseurs parce que ça veut dire que vous avez l'option gratuite.
10:08 Mais généralement, c'est des phénomènes qui durent pas très très longtemps, donc quelques semaines à quelques mois quand le stress est sévère.
10:20 Et les titres se remettent à être valorisés à la prochaine date de rappel possible.
10:30 Donc là, le prochain test, entre guillemets, ça va être Unicredit en juin et puis ensuite BBVA et HSBC en septembre.
10:43 Et généralement, ces moments, grosso modo, coïncident avec la réouverture du marché primaire.
10:53 C'est-à-dire que dès que le marché primaire réouvre, on a une migration rapide des prix à nouveau vers la date de rappel, la date de call.
11:04 Très intéressant, David. Pour conclure, en une minute, sur la logique d'investissement en tant que spécialiste du secteur bancaire,
11:11 est-ce que la baisse du mois de mars, que ce soit sur les actions, sur les obligations bancaires, a été un point d'entrée ?
11:15 Et quelle est la logique qui guide l'investissement dans le secteur bancaire à ce stade ?
11:20 Oui, alors, ça a été très clairement un point d'entrée pour nous. On en a profité, que ce soit sur les fonds de crédit ou sur les fonds actions,
11:29 pour rajouter du risque. Alors, sur les fonds de crédit, c'est simple. Aujourd'hui, on entre sur un marché qui est pricé à perpétuité.
11:38 Donc, on a vraiment l'option vraiment en faveur des investisseurs.
11:43 Et aussi, quand on regarde en termes de spread, on est sur des niveaux de spread qui sont les niveaux de spread les plus élevés historiquement,
11:52 à plus de 550 points de base. Donc, on est à peu près à des niveaux Covid, pas au pic du Covid, mais on est à des niveaux Covid.
11:58 Donc, c'est une zone très intéressante avec des fondamentaux qui sont très bons, beaucoup de capital réglementaire,
12:04 et aussi une profitabilité des banques européennes qui est très élevée.
12:10 Côté equity, pareil, on a des niveaux de valorisation qui sont très bas depuis pas mal de temps maintenant,
12:19 avec des résultats du Q1 qu'on attend pour quelques semaines, qui devraient probablement réveiller les cours parce qu'ils sont très bons.
12:30 Donc, on est dans une phase pour les banques européennes de profitabilité élevée.
12:36 On a retrouvé les niveaux d'avant la crise de 2008, c'est-à-dire qu'on est en retour sur actifs aujourd'hui à plus de 50 points de base.
12:44 Donc, ce sont des très très bons niveaux.
12:47 La vérité des résultats, donc, en ce moment pour les banques américaines, avec d'autres publications à suivre tout au long de la semaine,
12:53 et puis d'ici une quinzaine de jours pour les grandes banques européennes.
12:57 Merci beaucoup David. David Benhamou avec cet éclairage toujours précieux sur le secteur bancaire.
13:01 David Benhamou qui est avec nous en visioconférence, associé gérant et directeur des investissements d'Axiom Alternative Investments.
13:07 Voilà pour cette demi-heure de Smart Bourse à la mi-journée. On se retrouve ce soir en direct à 17h sur Bsmart.
13:13 [Musique]