SMART BOURSE - Pétrole, taux, dollars... le trio infernal !

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Jeudi 28 septembre 2023, SMART BOURSE reçoit Bastien Drut (Responsable de la stratégie et de la recherche économique, CPR AM) , Valérie Gastaldy (Stratégiste, DaybyDay) et Axel Botte (Directeur de la stratégie marchés, Ostrum AM)

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Transcription
00:00 *Musique*
00:10 Trois invités avec nous chaque soir pour décrypter les mouvements de la planète marché.
00:13 Valérie Gasteldi est avec nous ce soir, stratégiste de Debaidé.
00:16 Bonsoir Valérie.
00:17 Merci d'être là. Merci à Axel Bode d'être à nos côtés également.
00:20 Bonsoir Axel.
00:21 Vous êtes directeur de la stratégie de marché d'Ostrom Asset Management.
00:24 Et Bastien Dru avec nous également au plateau.
00:26 Bonsoir Bastien.
00:27 Ravi de vous avoir ce soir. Vous êtes responsable de la stratégie de la recherche économique de CPR Asset Management.
00:32 Le mois de septembre tient ses promesses sur les marchés.
00:35 On sait que c'est toujours un mois un peu particulier avec des effets de saisonnalité peut-être qui jouent d'ailleurs en ce moment.
00:40 Il faut qu'on parle des taux et notamment des taux longs.
00:43 Bastien, autant 2022, l'histoire de la courbe des taux en 2022 était marquée par l'envolée des taux courts
00:51 sous l'effet de l'agressivité des banques centrales et des hausses de taux directeurs continues, violentes, intenses tout au long de 2022.
00:59 Autant l'histoire de la courbe des taux notamment aux Etats-Unis en cette fin de trimestre 2023
01:03 est marquée par la poursuite de l'envolée des taux longs réels, 10 ans, 30 ans,
01:10 alors même que les taux courts restent plutôt stables aujourd'hui.
01:14 Oui, donc 2022 c'est vraiment l'inversion de la courbe des taux.
01:17 Et là on a ce qu'on appelle un "bear steepening" avec des taux longs qui remontent.
01:21 Juste pour expliquer parce que le marché obligataire corrige et on corrige beaucoup plus sur la partie longue, c'est ça ?
01:29 Qui donne un effet de repentification de cette partie longue ?
01:32 On a une courbe des taux qui est toujours inversée mais qui est de moins en moins inversée, en tout cas moins que ce qu'on avait en 2022.
01:37 Alors les raisons de ça, il y en a plein.
01:40 On ne va pas forcément revenir sur la Fed ou avec le dernier OFOMC où l'idée c'était un peu le "hire for longer"
01:46 qui avait été un peu présenté par Jerome Powell.
01:49 Mais après, il y a tout un tas de facteurs, il y a des facteurs structurels, conjoncturels.
01:53 Dans les facteurs structurels, il y a quand même la dégradation des finances publiques américaines.
01:59 Parce que si la croissance américaine s'est aussi bien tenue ces deux ou trois dernières années,
02:03 c'est quand même largement grâce à la politique budgétaire.
02:06 Et aujourd'hui, en fin de cycle, alors que normalement en fin de cycle,
02:09 quand on a un taux de chômage qui est bas, on a un déficit qui est plutôt bas aussi.
02:13 Or là, on a un déficit public qui est aux alentours de 8 à 9% du PIB,
02:17 avant même une éventuelle récession.
02:19 Donc on n'a même pas imaginé ce que ça donnerait dans une récession.
02:22 Et ça, ça s'ajoute au quantitative tightening de la Fed,
02:27 le fait que la Fed a réduit son bilan, c'est-à-dire remet sur le marché un certain nombre de titres de maturité longue.
02:32 Et tout ça fait que le Trésor américain, lui, doit émettre de plus en plus
02:36 des quantités très importantes de titres de maturité longue.
02:39 Et là, on voit que c'est en train de remonter avant même une récession,
02:43 ce qui n'est pas du tout quelque chose qui est habituel.
02:46 Donc ça, ça participe un petit peu à ce mouvement de hausse des taux longs.
02:50 Après, il y a des facteurs peut-être plus conjoncturels,
02:53 où le conjoncturel se mélange avec le structurel,
02:55 comme par exemple le shutdown, l'éventuel shutdown, qui est quand même très probable.
03:00 Et là, il y a quand même des menaces des agences de notations,
03:03 notamment de Modi, qui a indiqué qu'il pourrait dégrader la note des États-Unis.
03:07 Et on a vu que, quand ça avait été le cas pour Fitch,
03:10 ça avait quand même provoqué un peu un mouvement de hausse des taux longs américain.
03:14 Et ça, ça vient aussi participer à ce mouvement-là.
03:17 Et après, on peut encore ajouter d'autres arguments,
03:20 comme par exemple ce qui se passe au niveau de la Chine,
03:24 les sorties de capitaux de la Chine,
03:26 le fait que les autorités aient peut-être un peu de mal à contrôler les sorties de capitaux,
03:30 et donc ça devise, et ça peut induire...
03:33 On n'a pas vraiment de chiffres très clairs, très durs là-dessus,
03:36 mais ça peut induire les autorités chinoises à peut-être vendre un peu de titres de maturité longue,
03:41 en tout cas ne plus en acheter.
03:43 Et ça fait un gros acheteur de moins pour les titres du Trésor.
03:46 Et tout ça fait qu'on a des taux longs qui montent aujourd'hui beaucoup.
03:49 Après, la question, c'est jusqu'où ça va.
03:51 Là, c'est quand même très difficile de répondre.
03:53 On a un peu l'impression que le marché est en train d'aller frapper à la porte de Jérôme Pouel
03:57 pour lui demander quand est-ce qu'on s'arrête maintenant.
04:00 - Est-ce que le mouvement...
04:01 Alors après, c'est aussi des enjeux un peu techniques de marché, on pourra décrire ça.
04:04 Mais le mouvement, je ne parle pas d'affolement, mais il y a un peu de vitesse quand même dans la hausse des taux longs.
04:10 Et puis surtout, un mouvement continu, sans aucune pause, sans aucune respiration.
04:14 Ça fait cinq mois de continu que les taux longs américains montent.
04:18 Et le mois de septembre, on va voir 50, 60 points de base de hausse de taux longs aux États-Unis sur un mois.
04:24 - Alors ce n'est pas un krach obligataire, mais ça y ressemble un peu.
04:28 C'est une sorte de mini krach obligataire.
04:30 - Oui, et là, rien que le mois de septembre, le fait que les taux de 10 ans prennent maintenant plus de 50 points de base aujourd'hui,
04:36 ça montre quand même un mouvement qui est très violent, qui est tout à fait remarquable.
04:40 Et Jérôme Pouel avait dit en conférence de presse que c'était l'un des éléments qui pouvaient être un risque négatif pour la croissance.
04:50 Et ça va l'être encore plus, maintenant que les taux ont encore un peu monté.
04:54 Là, dans les chiffres du jour, il y avait les ventes de logements en attente aux États-Unis.
04:58 C'est le plus bas historique.
05:00 Donc ça veut dire que sur les mois qui arrivent, on aura des ventes de logements qui vont encore baisser.
05:04 On est déjà sur des niveaux qui étaient extrêmement bas vers les plus bas de ces 20 dernières années.
05:08 Et ça va continuer.
05:09 Donc dans un certain sens, même s'il n'y a pas eu de récession cette année, la Fed a quand même réussi à obtenir certaines des choses qu'elle voulait.
05:16 On a quand même un vrai ralentissement de l'inflation, du marché du travail, mais aussi le marché immobilier,
05:21 avec le fait que les transactions aujourd'hui sont extrêmement basses.
05:24 - Oui, personne ne veut vendre, personne ne veut se réengager sur un nouveau mortgage à plus de 7%.
05:27 - Oui, personne ne veut se réengager en tout cas.
05:29 - Oui, oui, donc tout est bloqué pour l'instant.
05:32 C'est la question, Axel, est-ce que ce qu'on voit là sur la partie longue de la courbe obligataire américaine,
05:37 avec des taux réels, long terme, à plus de 2%, on casse quand même des niveaux.
05:41 Alors rien de dramatique peut-être dans l'absolu d'un point de vue historique, mais quand même, on n'a pas vécu ça depuis longtemps.
05:46 Est-ce que ça fait encore partie de ce que veut voir la réserve fédérale américaine ?
05:50 - Oui, je pense que le début, peut-être que c'est insuffisant par rapport à ce qu'il voudrait pour réellement freiner le crédit,
05:58 parce que le biais par lequel la Fed affecte l'économie, ce n'est pas par les conditions de crédit.
06:06 Quand on regarde l'évolution des spreads à yield, des spreads de crédit depuis le début de l'année, ça ne va pas dans ce sens-là.
06:12 Quand on regarde les flux hebdomadaires de crédit qu'on a sur le crédit bancaire, hormis l'épisode SVB qui a duré quelques semaines,
06:21 en fait, il n'y a pas eu de rupture et c'est reparti même à la hausse.
06:25 On a un léger ralentissement du crédit conso, mais rien de vraiment convaincant.
06:31 Est-ce que la politique monétaire est suffisamment serrée pour ralentir l'économie ?
06:38 On a été quand même surpris par la vigueur de l'économie depuis le début de l'année.
06:43 Est-ce que le resserrement aussi violent puisse-t-il paraître en comparaisons des six crédits ?
06:48 Est-ce qu'il est suffisant dans la configuration actuelle ?
06:51 A mon avis, ce n'est pas évident et ça veut dire qu'il faut continuer de relever les taux réels.
06:57 Les taux réels à 10 ans sont au-delà de 2, les taux réels à 2 ans, en tant que marché de TIPS, sont au-delà de 3, 3 à 3,25.
07:03 Donc là, peut-être que ça va commencer à un moment à impacter l'économie.
07:10 Il va falloir essayer maintenant d'en faire deux temps, à combien de temps on reste à ces niveaux-là.
07:15 Mais là où je différerais de l'analyse de Bastien, c'est que sur l'immobilier, on a peut-être effectivement renchéré énormément le crédit.
07:25 Les mortgages sont au-delà de 7%.
07:27 Le problème, c'est qu'on l'a fait dans une situation où il n'y a pas de stock, où la construction est insuffisante,
07:32 où le déficit d'offres est tel depuis des années que finalement un tout petit peu de demande suffit à faire monter les prix.
07:42 On a vu les prix juillet à Senpikes-Schiller !
07:45 Schiller, mais aussi l'indicateur du prix du régulateur du secteur qui remonte depuis 6-8 mois maintenant.
07:54 Donc ça c'est une vraie question parce que c'est un des leviers essentiels sur lesquels la Fed peut agir.
08:00 La Fed n'agit pas sur tous les secteurs de la demande, mais uniquement sur ce qui est sensible au taux d'intérêt.
08:05 Et là on peut considérer qu'ils n'ont pas eu suffisamment d'impact, malgré le niveau des transactions qui est très faible, mais aussi parce qu'il n'y a pas de stock.
08:14 Donc c'est là peut-être un des manquements dans la politique de la Fed.
08:21 On est dans la stratégie du higher for longer, parce que higher for longer, moi j'entends l'idée d'un plateau.
08:26 Là on parle de taux réels qui n'arrêtent pas de progresser, c'est-à-dire qu'on est encore dans une phase d'augmentation de la restriction monétaire.
08:35 Quand bien même les taux directeurs de la Fed ne bougent plus, ce n'est pas un plateau encore.
08:39 Ce n'est pas un plateau et puis c'est amplifié par la dynamique de désinflation qu'on a connu depuis quelques mois.
08:46 Avec les risques sur le prix du pétrole, les conflits sociaux, les tensions résiduelles qu'on a sur le marché du travail.
08:54 On peut avoir aussi une reprise de l'inflation. C'est contre ça que Powell doit se prévenir aujourd'hui.
09:00 C'est des faits de stop and go des années 70. Il faudra être très vigilant là-dessus.
09:05 D'autant qu'il projette un scénario de croissance qu'on n'avait pas forcément en tête, que la Fed elle-même n'avait pas en tête encore il y a trois mois pour 2024.
09:13 C'est sûr.
09:14 Il n'y a plus de récession nulle part et c'est un soft landing assez solide.
09:18 C'est un soft landing. On projette une période de croissance d'à peu près 1% de croissance annualisée au Q4 T1 et puis ensuite une reprise.
09:27 C'est une année d'élections. La politique budgétaire a priori n'a pas de raison d'être forcément très restrictive l'année prochaine.
09:33 Donc on va être dans ce schéma-là.
09:36 Si ça tient, et d'ailleurs la coordination de la politique monétaire et budgétaire, si le budget reste aussi expansionniste,
09:43 c'est la porte ouverte à davantage de resserrement monétaire normalement pour préserver un petit peu l'équilibre et la cohérence des politiques publiques.
09:52 Donc c'est vraiment ce jeu qui est mal appréhendé par le marché.
09:58 Mais "higher for longer" pour ceux qui étaient là en 2006, c'est exactement le vocable qui était utilisé à l'époque.
10:10 À l'époque Greenspan avait maintenu l'étau jusqu'à 5,25 et puis l'a refilé le bébé à Berdyncki.
10:19 Mais la courbe était inversée, le 10 ans était autour des 4,5.
10:23 Le 2 ans était plus bas puisque le marché était plus... et l'étau était plus bas pour d'autres raisons.
10:28 Il y avait les recyclages d'excédents courants des émergents qui appuyaient à la baisse l'étau.
10:33 Mais la courbe était inversée et vous avez un moment, un sell-off qui nous ramène au niveau des "Fed Fun" sur le 10 ans.
10:39 Et c'est ce type de crack qui est un petit peu insidieux depuis le début de la décade,
10:45 qui peut toujours survenir et nous ramener le 10 ans au niveau des "Fed Fun" ce qui ferait 100 BP encore plus haut.
10:50 Il manque la vitesse pour que ce soit un crack mais c'est quand même le sens qu'on prend pour l'instant.
10:54 C'est le sens qu'on prend, la désinversion de la courbe je pense.
10:57 C'est peut-être l'événement, ce type de crack, qui modifiera l'économie sur 2024.
11:02 Il y a un moment où ça risque de lâcher.
11:06 - Le 10 ans 30 ans n'est plus inversé aux Etats-Unis.
11:09 Il y a une partie de courbe qui est plus inversée par rapport à la partie de la courbe.
11:13 - C'est la même question depuis le début de l'année. Comment vous battez le cash ?
11:16 - Bon, on va y revenir. C'est vrai, j'aurais dû poser cette question tous les jours.
11:22 Valéry, vos commentaires et puis d'un point de vue de marché, avec votre analyse du marché, comment vous regardez ce qui se passe ?
11:29 J'appelle ça le trio infernal désormais parce qu'on a l'impression que tout tourne un peu ensemble
11:34 entre le pétrole qui revient à 95 dollars, les taux américains, les taux longs réels qui continuent de s'envoler
11:42 et le dollar irrésistiblement haussier avec des phénomènes de mouvements assez linéaires.
11:48 Il n'y a pas de pause dans ces tendances. Ça met de la pression quand même, on le sent.
11:53 - Pour le moment, je dirais que la pression ne se fait pas trop de ressentir encore
11:57 parce que justement les mouvements restent assez ordonnés sur les taux.
12:00 Peut-être que sur la dernière semaine ou sur les 10 derniers jours, on a eu une toute petite accélération haussière.
12:06 Si on regarde toutes les mesures de volatilité historique, on est très bas.
12:13 Oui, on est remonté en taux, pas dans des proportions qui sont beaucoup plus importantes que les hausses précédentes qu'on a eues au cours de 2023.
12:22 Un peu plus maintenant, mais depuis peu de temps, depuis qu'on a renforcé les plus bas en haut.
12:27 Enfin, les plus hauts en taux, les plus bas en bonds.
12:31 Mais je pense que les gens ne sont pas encore franchement déstabilisés.
12:38 - Il n'y a pas de panique, il n'y a pas trop de stress au final dans ce marché ?
12:44 - Pour moi, ce qui m'étonne continuellement, c'est qu'en fait, comme vous le savez,
12:52 ce qui m'intéresse, c'est de voir comment les gens réagissent aux événements.
12:57 Ce ne sont pas les événements en eux-mêmes qui, pour moi, sont importants.
13:00 Et j'essaie toujours de trouver des mesures pour essayer d'évaluer le niveau d'inquiétude des investisseurs.
13:10 Une des mesures, bien entendu, de base qui est disponible sur tous les marchés à peu près, c'est les mesures de volatilité implicite.
13:18 Alors, sur les devises, les volatilités implicites sont en gros au plus bas depuis un bon moment.
13:28 - Le dollar n'arrête pas de monter, il n'y a qu'un sens ?
13:32 - Oui, mais on est particulièrement bas pour un mouvement de cette amplitude-là quand même.
13:42 - Il y a une divergence entre la volatilité...
13:44 - C'est ce qui s'est fait depuis le début du mois d'août parce que le dollar a fait un plus bas fin juillet.
13:50 - Oui, je crois que c'était fin juillet, début juillet, mais c'est à ce moment-là.
13:55 - C'est peut-être la clôture trimestrielle, effectivement.
13:59 Et après, il est parti à l'opposé en ligne droite tout le temps.
14:05 Et la volatilité, elle a baissé pendant tout ce temps-là.
14:09 - En fait, sur un marché de devises, la volatilité, c'est toujours compliqué
14:15 parce qu'il y a toujours une devise qui monte pour une devise qui baisse,
14:17 donc on ne peut pas dire que ça soit lié à une baisse d'une devise.
14:20 En revanche, c'est l'effet surprise qui doit se retranscrire dans la volatilité,
14:24 donc le changement de rythme, justement.
14:26 Est-ce que les gens trouvent qu'ils sont confortablement dans leur position
14:31 et ils ne redoutent pas un changement de rythme,
14:33 ou est-ce qu'au contraire, ils se préparent à un changement important ?
14:37 - En fait, une volatilité au plus bas, ça veut dire que les gens ne perçoivent pas
14:41 de changement de cadre important.
14:43 Donc, si on regarde ce qui s'est passé sur le dollar depuis une bonne année,
14:47 finalement, on est monté, on a baissé, on a monté, baissé, monté, baissé, monté, baissé.
14:51 Donc, les gens pensent qu'on reste dans ce cadre d'évolution,
14:53 hausse, baisse, hausse, baisse, hausse, baisse.
14:55 Sauf que là, le mouvement de hausse, il commence à être un petit peu au-delà
14:59 des bornes que l'on avait connues.
15:02 Et on a une situation qui est équivalente sur tous les marchés.
15:05 On est exactement dans la même situation partout.
15:08 Que ce soit les actions, où la volatilité a un petit peu moins baissé,
15:12 les obligations, où là aussi, la volatilité, alors, c'est pas facile,
15:18 là aussi, la volatilité sur les obligations, parce qu'il y a beaucoup d'effets
15:21 d'arbitrage entre les taux courts et les taux longs.
15:25 Mais néanmoins, l'indicateur synthétique qui s'appelle le "move",
15:29 calculé par Bank of America, il était au plus bas il y a une semaine.
15:33 Et là, il commence juste à remonter.
15:36 Alors que les taux ont déjà pris 50 dp.
15:39 Et qu'on vient à peine de faire des nouveaux plus bas.
15:42 En fait, pour que ces taux cessent de monter, je me suis encore trempée,
15:47 j'ai dit "taux, on fait des nouveaux plus bas".
15:49 Oui, les obligations.
15:51 C'est toujours le problème quand on parle "taux, oblig".
15:53 Si sur les obligations, on avait dû avoir un point bas à ce moment-là,
15:57 on aurait dû avoir un "move" qui aurait été déjà très haut.
16:01 On ne l'a pas.
16:03 Ça veut dire que le potentiel de vitesse est encore devant nous sur ces actifs-là.
16:07 Absolument.
16:09 Quand on voit les corrélations actuelles qui existent sur les marchés,
16:13 elles peuvent changer à tout moment, ça on ne sait jamais.
16:16 Mais en se projetant dans ce type de corrélation,
16:19 ça veut dire que le dollar poursuit sa hausse.
16:22 Et qu'a priori, les actions, ça ne va quand même pas être facile.
16:27 Le value va peut-être rester correct, mais tout ce qui est croissance, ça va avoir du mal.
16:32 Mais on voit que les gens n'ont pas encore vraiment pris ce problème à bras-le-corps,
16:43 et tout le monde reste confortablement dans le scénario qui a été celui de 2023,
16:48 donc un scénario très tranquille.
16:50 Enfin, tranquille, sur les grandeurs macro.
16:52 Ça ne bouscule pas encore assez les convictions.
16:55 Non, mais on a un risque.
16:57 Le pétrole est en train d'arriver sur des niveaux qui sont...
17:02 Si on va à 100, ça va faire un petit peu...
17:05 Oui, on le saura, ça je vous confirme.
17:07 Ça va.
17:08 Ça je vous confirme qu'on le saura.
17:10 Le dollarien, il est...
17:11 150 quasiment.
17:13 Il est super haut, le dollarien.
17:17 Donc tout ça, personne ne réagit trop.
17:20 Comment vous regardez, Bastien et puis Axel, ces nœuds de tension,
17:24 ces tendances qui se poursuivent,
17:26 ou qui atteignent peut-être des niveaux un peu extrêmes ?
17:30 Le pétrole, effectivement, dans le jeu des marchés,
17:33 dans le jeu macro pour 2024,
17:35 c'est un élément qu'on surveille, j'imagine.
17:37 Alors je commence ?
17:38 Oui, vas-y, Bastien, oui, bien sûr.
17:40 Il y a un des trucs qui est très originaux depuis deux ans,
17:44 c'est la corrélation entre le dollar et le pétrole.
17:47 Parce qu'on a eu pendant des décennies,
17:50 le dollar et le pétrole qui étaient anticorrélés.
17:52 Quand l'un montait, l'autre baissait, inversement.
17:54 La cause de la réalité pouvait aller dans les deux sens.
17:57 En gros, les études académiques montrent qu'il y en a un tiers
18:00 qui disent que ça va dans un sens,
18:01 un tiers qui disent que ça va dans l'autre sens,
18:03 puis un tiers qui dit que ça peut aller dans les deux sens.
18:05 Mais bon, bref, il y avait une corrélation négative
18:07 entre les deux, entre le pétrole et le dollar,
18:10 et là, on a complètement perdu ça depuis deux ans.
18:13 Et ce que vous disiez, c'est que le dollar a monté
18:17 quand même pas mal depuis deux mois, le pétrole aussi,
18:20 et en même temps, les deux ont monté en même temps.
18:22 Et on se retrouve avec un dollar qui est assez cher
18:25 et un pétrole qui est assez cher en même temps,
18:27 et ça, c'est assez inédit quand même,
18:30 si on va chercher même très loin dans la période historique.
18:33 Et ça, c'est un problème pour qui ?
18:34 C'est un problème pour l'Europe et pour le Japon, notamment,
18:36 et aussi un petit peu pour la Chine,
18:38 parce qu'eux voient leur devise en train de se déprécier
18:41 par rapport au dollar, et le pétrole qui est en train de monter,
18:45 le pétrole qui est en dollar qui est en train de monter.
18:46 Donc, ça fait une sorte de double peine pour eux.
18:48 Et quand on regarde, quand on calcule, par exemple,
18:51 le pétrole en euros ou le pétrole en yens,
18:54 on n'est pas au plus haut historique,
18:56 mais on est vraiment en train de revenir sur des niveaux
18:58 qui sont très élevés.
18:59 Et du coup, quand on regarde l'historique de prix à la pompe
19:03 en Europe ou en France, on voit qu'on n'est plus forcément
19:05 très très loin des plus hauts historiques.
19:07 Donc, c'est...
19:08 Même pour le pétrole consommé par les ménages,
19:10 la proportion par rapport au revenu disponible
19:13 pèse moins qu'il y a 10, 15 ou 20 ans.
19:16 Oui, c'est-à-dire que, bon, la...
19:18 Mais, effectivement, l'intensité énergétique,
19:20 finalement, de la consommation, elle est peut-être moins forte,
19:22 mais quand même, on a aujourd'hui des prix à la pompe
19:26 qui augmentent de toute façon sensible
19:28 pour l'Europe, pour le Japon encore plus.
19:32 Et ça, c'est pas encore complètement un problème
19:35 pour l'inflation, parce que, comme on le disait tout à l'heure,
19:37 il y a des effets de base qui sont un petit peu différents.
19:40 Pour l'Europe, le pic pour les prix énergétiques,
19:45 le CPI énergie de la zone euro, le pic, c'était en octobre 2022.
19:49 D'accord.
19:50 Et ça veut dire que les effets de base vont continuer
19:51 d'être encore un peu plus favorables jusqu'au chiffre d'octobre
19:54 qui sera publié, donc fin octobre.
19:56 Et après, les effets de base deviendront...
19:59 S'annuleront.
20:00 Bien sûr, moins favorables.
20:01 Nettement moins favorables.
20:02 En revanche, même si c'est pas forcément un problème direct
20:05 pour l'inflation...
20:06 Ça peut l'être pour la croissance.
20:07 Ça l'est pour le pouvoir d'achat.
20:08 Et on voit le gros problème de l'Europe,
20:10 c'est le pouvoir d'achat et la consommation
20:12 qui sont vraiment en berne actuellement.
20:14 Notamment en Allemagne, ou même en France.
20:17 Ça accroît le risque de récession, pour dire les choses de manière simple.
20:23 Oui, c'est complètement récessionniste.
20:27 Sur ses actifs, pétrole, taux, on en a parlé,
20:31 mais le dollar aussi, tout se tient.
20:35 Axel, encore une fois, qu'il ait la limite, effectivement,
20:39 de ses mouvements.
20:41 La limite sur le pétrole, je pense qu'elle est assez haute.
20:44 C'est-à-dire qu'on a été un petit peu aveuglés par la politique de Biden
20:48 de mettre un million de barils du jour sur le marché pendant tout 2022.
20:52 Et l'enjeu des mid-term,
20:55 et quand vous mettez pendant six mois un million de barils du jour,
20:58 c'est à peu près 1% de la production mondiale de pétrole,
21:01 vous changez l'équilibre du marché,
21:04 sauf que maintenant on est sur l'os.
21:06 C'est-à-dire que quand on regarde les stocks stratégiques,
21:08 on est à 370 millions de barils, je pense,
21:12 ce qui ne fait pas grand-chose.
21:14 - Ça a été vidé de 60%, c'est ça ?
21:16 - C'est ce que j'ai vu.
21:17 Donc on est sur l'os, ce qui veut dire que maintenant,
21:19 l'État fédéral va être acheteur à des milliers de barils de pétrole.
21:22 Il va falloir les réconstituer.
21:23 - 70, 80 dollars, c'était le prix qu'ils avaient indiqué, je crois.
21:26 - Ils espéraient 32, 69.
21:29 - C'est raté.
21:31 Et donc, non seulement ça aura sans doute un coût budgétaire
21:35 qu'il ne faut pas négliger,
21:37 mais en plus, on aura non pas juste une situation de stock tendu
21:41 qui fait monter les prix à bref échéance,
21:44 les prix courants,
21:45 mais probablement un nouvel équilibre sur le marché du pétrole.
21:48 Et ce, malgré la production américaine qui monte,
21:51 malgré la montée de quasiment 400 000 barils le jour en quelques semaines.
21:56 Là, on est passé de 12,4 millions à 12,8 millions,
21:58 quasiment les plus hauts historiques sur le pétrole, proprement dit.
22:02 Mais bon, on le sait depuis des années
22:05 que le marché du pétrole ne peut pas s'équilibrer
22:07 sans croissance forte du shale.
22:09 Et donc, là pour le coup,
22:11 ces producteurs ont été échaudés par 2020,
22:13 échaudés avant par 2015,
22:15 sont beaucoup plus prudents dans leur politique d'expansion.
22:18 - Les cash flow plutôt que les capex, c'est ce qu'ils disent depuis longtemps maintenant.
22:23 - Les cash flow plutôt que les capex,
22:24 et surtout des rémunérations pour le top management de ces boîtes
22:30 qui sont plus indexées sur la croissance,
22:32 mais plutôt sur la rentabilité.
22:33 - Il y a plus d'incitation à croître.
22:35 - Ça change beaucoup de choses.
22:37 Donc, on est sur un trend d'expansion beaucoup plus faible.
22:42 Je pense que ça joue énormément dans l'appréhension des enjeux ESG aux Etats-Unis
22:47 qui étaient déjà pas très importants,
22:51 mais qui sont clairement infléchis.
22:53 Donc, on a, je pense, cette prise de conscience
22:57 que ça va coincer sur le prix du pétrole.
22:59 La deuxième chose qui fait très peur sur le prix du pétrole,
23:01 c'est que pendant tout début de l'année,
23:03 beaucoup de hedge funds ont perdu beaucoup d'argent sur le pétrole.
23:06 En regardant cet équilibre, en étant long,
23:09 mais en voyant les positions longues spéculatives
23:12 être débouclées sur les CTA qui sortaient, certains de fonds.
23:16 Aujourd'hui, là aussi, la position nette longue spéculative
23:20 a peut-être été divisée par 4.
23:22 Donc, il y a un potentiel pour que cette thématique revienne.
23:25 - C'est un vrai pain trade, c'est ça.
23:27 Les 30% d'os du pétrole cet été,
23:29 c'est un pain trade pour beaucoup d'investisseurs.
23:31 - Pour beaucoup de gens.
23:33 Et maintenant, il y a beaucoup de gens qui vont courir derrière, je pense.
23:36 Et qui peuvent rajouter à cette...
23:40 à amplifier le mouvement sur le marché du pétrole.
23:43 - Est-ce que les Saoudiens peuvent tenir ?
23:45 Si c'est ça la clé.
23:46 Est-ce que les Saoudiens, avec les coupes de production
23:48 qu'ils ont prolongées de 3 mois d'un coup,
23:50 est-ce qu'ils peuvent tenir ?
23:51 Ou est-ce qu'à un moment, tout le monde le sait,
23:53 c'est qu'à un moment, le prix peut détruire la demande.
23:55 Alors, vous dites, ce prix qui détruira la demande
23:57 est peut-être éloigné aujourd'hui.
23:59 Est-ce que les Saoudiens peuvent tenir encore ?
24:03 Est-ce que l'équilibre leur convient aujourd'hui ?
24:05 - Alors, on peut détruire la demande
24:07 et avoir néanmoins envie de reconstituer un petit peu les stocks.
24:10 C'est un petit peu cet équilibre-là.
24:12 Ce qui est, je pense, ce qui va à l'encontre de cet argument,
24:15 c'est que cette remontée du pétrole
24:17 est faite avec une croissance chinoise extrêmement médiocre.
24:20 Et du 0,1% plus en Europe.
24:23 Donc, si jamais on a un petit peu de croissance dans ces deux zones...
24:28 - Ah, ben c'est ça ! Comme pour l'immobilier !
24:30 La moindre demande supplémentaire, ça va accroître...
24:33 - La demande supplémentaire va avoir un impact sur les prix
24:35 qui risque d'être très important.
24:37 Donc, moi, je...
24:39 Ce que je pense, je disais en préambule,
24:42 je pense que l'asymétrie des risques sur l'inflation
24:44 reste quand même toujours à la hausse,
24:46 pour des raisons de ce type.
24:48 Donc, est-ce qu'il faudra couper l'herbe sous le pied des Saoudiens
24:52 en provoquant une récession
24:54 et d'autoriser de faire baisser le prix du baril ?
24:57 Ou alors trouver un autre équilibre
25:00 sur le marché du prix du pétrole avec une pression plus forte ?
25:02 Mais ça n'a pas l'air d'en prendre le chemin.
25:04 - Oui, je reprends.
25:06 Tout ça peut-être pour l'idée qu'il n'y a pas encore assez de vitesse
25:08 peut-être dans ces mouvements de marché.
25:10 Enfin, en tout cas, que le gros de la vitesse est peut-être encore à venir.
25:13 Ce qui est marquant quand même,
25:15 c'est la résistance des marchés actions.
25:18 Je l'avais dit, ça tourne !
25:20 Mais quand même, on a baissé de quoi ?
25:22 3, 4% à peine sur les grands indices.
25:24 En Europe, on a résisté à 20% de baisse du luxe.
25:27 Aux Etats-Unis, on a résisté là aussi au derating
25:30 de quelques grosses valeurs du Nasdaq.
25:33 Les indices ne sont plus sur tout à fait leur sommet, mais quand même.
25:37 - Oui.
25:39 Alors, il y a un an,
25:41 ou un peu plus d'un an,
25:43 tout le monde était super négatif,
25:45 tout le monde s'attendait à une récession.
25:47 Donc, on a attaqué l'année 2023
25:50 avec une majorité des investisseurs
25:53 qui étaient sous-exposés aux marchés actions.
25:56 Et qui, finalement, après un premier trimestre
25:59 où on a eu des résultats qui étaient nettement meilleurs que redoutés,
26:04 des mesures, un chômage, une inflation,
26:08 plein de choses qui ne témoignaient pas de ce qui était attendu.
26:12 Les expositions sont remontées peu à peu, forcément.
26:15 Parce qu'on ne peut pas...
26:17 - Ah oui, le pain trade !
26:19 - Ce fameux débat qui est, finalement, la récession américaine,
26:22 elle ne va pas forcément avoir lieu.
26:24 La Fed remonte ses anticipations pour 2023, pour 2024, etc.
26:28 Bref.
26:30 Donc, on n'a plus un marché qui est sous-exposé, a priori.
26:34 Je ne pense pas que les gens soient surexposés en masse non plus.
26:38 Ce n'est pas ce que je constate non plus dans les données, a priori.
26:42 - Neutre. Maintenant, tout le monde dit "je suis neutre".
26:44 - C'est plutôt assez neutre, effectivement.
26:46 Mais c'est neutre, et les indices sont partout dans des consolidations,
26:52 parce qu'on n'a pas encore franchi aucun des sommets de 2021-2022
26:58 selon les secteurs, selon les valeurs.
27:00 Enfin, il y a quelques valeurs qui ont franchi leurs précédents sommets,
27:03 mais on les compte un petit peu sur...
27:05 Elles ne sont pas très nombreuses.
27:07 En secteur, en tout cas, ce n'est pas très nombreux.
27:10 On a beaucoup de gens qui sont entrés dans le marché forcés,
27:16 pour suivre, parce qu'ils ne peuvent pas se permettre d'être trop sous-exposés.
27:20 Et ça, c'est la pire des positions pour changer d'avis.
27:24 Parce qu'il n'y a aucune raison qu'ils vont vraiment vous donner tort,
27:32 vu qu'on fait quelque chose, on n'est pas vraiment d'accord avec ce qu'on fait.
27:36 En fait, les gens sont coincés dans la situation actuelle.
27:40 Et je pense que c'est ce que l'on voit sur ces marchés actions.
27:43 Ce sont des gens qui attendent.
27:45 Pendant l'année, il y a eu beaucoup de remarques comme quoi
27:48 la tech, c'est super, le luxe, c'est super, ça gagne tout le temps,
27:52 ils vendent tout le temps plus, ils peuvent tout le temps monter les prix, etc.
27:56 On a eu des discours qui étaient un petit peu très enthousiastes.
28:02 On a eu bien entendu l'intelligence artificielle aussi,
28:06 qui a bouleversé le monde de la technologie.
28:09 Donc peut-être des pics d'enthousiasme sur ces secteurs clés
28:14 des indices pour les Etats-Unis et pour l'Europe.
28:17 Il y a eu des poches d'euphorie quand même, comme ça, ici et là.
28:20 Il y a eu des poches d'euphorie sectorielles, comme on avait eu des poches d'euphorie l'année 2021, etc.
28:25 Tout ça, ça fait qu'on est condamné à baisser à un moment donné.
28:36 On peut rester sans rien faire, remonter un tout petit peu,
28:41 mais on va se prendre une claque.
28:43 Pour moi, il n'y a pas d'issue différente.
28:48 C'est l'issue la plus problème.
28:51 Il va vraiment falloir beaucoup de temps pour qu'on aille sectoriellement purger les portefeuilles.
28:58 - Mais votre expérience vous fait dire que c'est ça ?
29:01 Il y a quand même une chance que ça se fasse plus vite qu'un scénario de 6 mois de distribution ou de consolidation.
29:08 - Il faut acheter de la dette corporate, le high yield c'est super.
29:11 Je regarde l'évolution du high yield qui s'est prise quand même toute la hausse de taux.
29:16 Même si les spreads sont corrects.
29:18 - Les spreads sont serrés, oui.
29:20 - Je suis juste un tout petit peu sceptique.
29:24 - Et du coup, s'il faut aller dans un...
29:26 - C'est un peu comme le luxe, ça marche tout le temps.
29:28 Vous vous rendez compte que les taux sont montés et les spreads ne sont pas écartés.
29:31 - Quand 100% des gens pensent que ça marche tout le temps, oui.
29:34 - Normalement, quand les taux remontent, le high yield ne se passe pas écarté.
29:37 - S'il faut décrire un scénario de la claque, comme vous dites, Valérie, quel niveau il faut avoir ?
29:46 - Les bad range, c'est -10, -15.
29:48 - D'accord. Je pensais au niveau des points bas de 2022.
29:52 - Oui, c'est ça.
29:54 - Ah c'est ça ? - Bah oui.
29:56 - D'accord. Parce qu'ils sont quand même loin en dessous de nous les points bas de 2022.
29:59 - Oui. En fait, personne n'a tort et personne n'a raison actuellement.
30:06 Parce qu'on ne sait pas encore. Cette récession, elle n'existe pas.
30:11 Il n'y a pas franchement de croissance non plus. On est dans un truc qui est mou.
30:14 Donc sur les indices, là on est allé dans un extrait où tout le monde se dit
30:18 "finalement, il faut voir les côtés positifs".
30:20 On peut aller dans l'autre extrême qui est "il faut voir les côtés négatifs".
30:24 Et ça, ça va nous renvoyer sur le bas du range.
30:26 Enfin, pour moi, c'est mon cadre de travail.
30:31 - Oui, j'entends. - J'ajuste.
30:33 Parce qu'en fait, tout cela, ça va dépendre de la vitesse à laquelle le sentiment s'ajuste.
30:37 Mais pour le moment, le sentiment, il bouge super doucement.
30:41 Même en Europe, les gens ont acheté la récente baisse sur les indices européens.
30:45 - Bah oui. - Ah bah oui, bah...
30:48 - Non mais il n'y a pas d'émotion forte. Il n'y a pas encore d'émotion suffisamment forte.
30:51 - Non, les gens continuent à être contrariants. Donc c'est pas...
30:54 - Sur la résistance des actions, comment on explique ce phénomène aujourd'hui ?
31:00 - Ah bah, c'est quand même largement parce que c'est la même cause que le "hire for longer".
31:05 C'est le fait qu'il y a le narratif du soft lending qui s'est vraiment mis en place, que rien ne craque.
31:13 Mais après, la situation est complètement paradoxale.
31:15 Parce que c'est une sorte de stagflation, mais complètement adulcorée.
31:19 C'est-à-dire que stagflation, dans les années 70, c'était une inflation qui était très élevée,
31:23 avec un taux de chômage qui montait beaucoup,
31:26 puis une croissance qui, de temps en temps, était un peu vraiment négative.
31:29 Là, la flation est très élevée, mais on n'a pas la croissance qui passe vraiment au territoire négatif,
31:34 et puis on n'a pas le chômage qui monte vraiment.
31:37 Ça monte un petit peu, quand même, à droite, à gauche.
31:40 Si on regarde le Royaume-Uni, l'Australie, différents pays européens,
31:45 on voit quand même des petites évolutions,
31:47 mais c'est pas du tout le même degré de gravité que les années 70.
31:53 Donc il y a un peu ce scénario, finalement, de stagflation dure,
31:58 qui a été évacué par le marché, et qui explique un peu cette résistance.
32:04 Parce qu'il y avait quand même des scénarios qui étaient très négatifs, il y a quelque temps.
32:08 À propos du marché du travail, pour rajouter un peu de piment à la complexité de la situation,
32:13 les investisseurs vont bientôt vivre sans statistiques américaines.
32:18 C'est ça, pour PêcheMonsieur ?
32:20 C'est pas encore PêcheMessieur, mais disons qu'il y a une probabilité qu'il y ait un shutdown,
32:24 donc une fermeture du gouvernement américain.
32:26 La probabilité est quand même très élevée, parce que la situation politique est insoluble, quelque part.
32:33 Il faudra passer par un shutdown pour trouver une solution, quoi.
32:37 Oui, la situation est quand même très compliquée, on va pas forcément rentrer dans les ailles,
32:40 mais l'une des conséquences, c'est qu'il y a vraiment beaucoup de publications économiques qui ne vont pas sortir,
32:45 même si les différentes agences ont toutes les données pour publier, elles vont pas forcément le faire.
32:51 Et donc si le shutdown commence ce dimanche, ça voudrait dire que la semaine prochaine, par exemple,
32:56 on n'aurait pas le job report, le rapport sur l'emploi, on l'aurait pas.
32:59 Et il y a vraiment beaucoup de statistiques qu'on n'aurait pas, par exemple au bureau du recensement,
33:03 il y a les achats immobiliers, enfin, tout ce type.
33:08 Et ces bureaux-là, le BLS et les autres bureaux de statistiques,
33:11 normalement vont être concernés par le shutdown.
33:13 Toutes les administrations peuvent ne pas fermer non plus.
33:15 Toutes ces entreprises seraient concernées par le shutdown et donc il n'y aurait pas de publication de ces instituts.
33:22 Alors ce qui va y avoir, ce qui va continuer, c'est la publication de la Fed, qui a un financement qui est différent.
33:30 Mais les statistiques, elles sont intéressantes, mais elles vont pas forcément nous éclairer sur tout.
33:36 On peut avoir la production industrielle, le bilan de la Fed, le bilan des banques commerciales,
33:41 mais on va pas forcément aller très très loin, par exemple sur le marché du travail.
33:44 On va pas voir grand chose.
33:46 Et ça tombe quand même mal dans un moment où on sait pas forcément très bien où on en est,
33:52 parce que déjà la fiabilité des statistiques ces derniers temps est quand même relativement faible,
33:57 du fait de tous les problèmes de désaisonnalisation qu'il peut y avoir, notamment.
34:01 Et on va se retrouver dans une période encore plus floue, où on aura encore moins de statistiques auxquelles se fier.
34:07 - Bah c'est bien !
34:10 - Faudrait mettre les marchés en pause, est-ce qu'on peut pas décider de mettre Wall Street en pause pendant le government shutdown ?
34:16 - Bon après, on a eu l'habitude, le plus gros des dernières années c'était sous Trump, ça veut dire plus d'une trentaine de jours.
34:23 - On verra comment les choses évoluent sur le plan politique.
34:26 De toute façon la séquence politique va nous accompagner pendant plus d'un an maintenant aux Etats-Unis,
34:30 c'est parti jusqu'à l'élection présidentielle.
34:32 Axel, si vous avez des commentaires sur le shutdown, et ce que ça peut générer peut-être d'ailleurs sur le plan conjoncturel pour les Américains.
34:38 Mais je voulais bien, repartant de l'idée de la hausse des taux longs et des taux longs réels,
34:43 un risque qu'on n'a pas encore évoqué, c'est le risque de stabilité financière.
34:47 Enfin, on parlait que de ça il y a 6 mois au moment de SVB, parce que les taux longs étaient à 4%,
34:53 ben on est à plus de 4,60%, et j'ai pas l'impression que ce soit un sujet qui revienne là comme ça dans les débats ou dans les discussions de manière naturelle.
35:03 Alors je le mets sur la table, est-ce qu'il faut reparler de ce sujet là ?
35:06 Alors oui, d'instabilité financière ou simplement de dislocation du marché, c'est deux choses un petit peu différentes.
35:14 En ce moment, on s'inquiète beaucoup de l'ampleur de ce qu'on appelle les "basis trades",
35:21 c'est-à-dire des arbitrages entre futur et obligations cash sur le marché des treasuries.
35:27 C'est-à-dire que vous avez des écarts de prix qui sont, disons, la conséquence d'une régulation bancaire qui fait que les banques sont moins actives,
35:37 ce sont l'activité de "market making", et la liquidité du marché secondaire,
35:41 elle est assurée par des "edge funds", des arbitragistes, des gens qui cherchent des profits rapides et qui sont financés sur le marché du répos.
35:51 Donc c'est des marchés à court terme, en fait, ils achètent des obligations en empruntant le cash, en apportant ces titres en garantie,
36:01 et ils arbitrent avec le marché de futur.
36:03 Donc il y a des petits écarts à jouer, mais les pauses sont tellement énormes que potentiellement on peut avoir des épisodes de volatilité très fortes
36:12 qui peuvent nous ramener, par exemple, aux tensions qu'on avait eues sur le répos en septembre 2019.
36:18 Avec tous les aspects de risque moral qui vont avec, c'est-à-dire que la Fed sera forcément forcée d'intervenir au moment où ils ont plutôt envie de resserrer la politique monétaire,
36:27 être obligée de faire des opérations inverses, un peu comme pendant les années 80.
36:32 La plomberie, quoi !
36:33 La plomberie.
36:34 Et donc, voilà. Est-ce que ça enjambe de l'instabilité financière ? Je pense que pour avoir beaucoup d'instabilité financière,
36:40 il faut quand même un affaiblissement économique significatif qui ramène des défauts.
36:45 C'est-à-dire qu'aujourd'hui, ça reste peut-être le paradoxe.
36:49 On est dans une situation où, par exemple en Europe, la faiblesse de la croissance n'a pas du tout fait monter les taux de défauts.
37:00 Il y a évidemment toujours des sujets... Il n'y a jamais zéro défaut dans une économie qui va bien.
37:05 Mais les taux de défauts sont relativement réduits.
37:08 Il peut y avoir un emballement.
37:10 Il y a une part de ça, évidemment.
37:12 Je pense que l'une des raisons de la résilience des actions, c'est le "higher for longer" des marges dans beaucoup de secteurs.
37:19 Et dans les secteurs d'ailleurs qui ont subi des baisses de marge, c'est ceux qui aujourd'hui vont profiter de la remontée des prix des matières premières.
37:25 Donc ça va aussi être stabilisant pour ces secteurs-là.
37:29 Donc voilà, on a quand même un certain nombre de paradoxes qui, suivant la durée du recensement monétaire, peuvent s'inverser et engendrer des défauts.
37:40 On parlera un peu d'instabilité financière dans tous les produits dérivés ou de titrisation qui sont assis sur le risque de crédit.
37:48 Et là, on pourra peut-être parler d'instabilité parce que ça engendrera des besoins d'équité et des pertes évidemment dans les acteurs financiers.
37:56 Gardez la parole, Axel, sur la logique d'investissement.
38:00 Donc, qui peut battre le cash ?
38:02 Est-ce qu'il y a d'autres segments de marché où on est encore confortable, hormis le très court américain en plus qui rémunère le mieux aujourd'hui ?
38:13 Et pas forcément couvert, le dollar n'arrête pas de monter.
38:16 Le dollar n'arrête pas de monter.
38:17 Effectivement, le dollar, c'est peut-être aussi un paradoxe.
38:20 On a beaucoup parlé de la hausse du dollar.
38:21 Ça s'est fait aussi dans un contexte où tout le monde s'enthousiasmait sur l'extension des briques et la dé-dollarisation.
38:29 Donc c'est un contre-pied qui est assez intéressant.
38:31 J'ai vu que c'est plutôt l'euro qui baisse dans la part des échanges mondiaux.
38:35 Ce n'est pas le dollar.
38:36 Le dollar est au plus haut, mais l'euro en tant que monnaie de commerce a perdu beaucoup de parts de marché.
38:41 Effectivement.
38:43 Et peut-être qu'un jour les Saoudiens se lasseront de retenir des yuans en règlement de leur pétrole.
38:50 En tout cas, on verra.
38:52 Mais c'est effectivement le dollar qui est à la fois la monnaie de réserve mondiale, mais aussi un bon baromètre de la version polorise,
38:58 qui est une référence pour tout le monde, l'ancrage de tous les actifs.
39:02 Donc c'est dit, c'est incontournable.
39:04 Les taux américains sont à mon avis très difficiles à battre,
39:07 parce qu'avec la configuration d'une courbe encore inversée, même si vous allez prendre du risque de crédit,
39:12 finalement l'excès de rendement par rapport au cash est peut-être trop faible pour justifier d'aller de s'exploser.
39:19 Il y a une histoire de ce qu'on appelle "time value for money".
39:22 Quand vous investissez sur du 3 ans, 4 ans, 5 ans, vous bloquez à un certain taux, vous avez une duration supérieure,
39:29 c'est-à-dire que votre actif va performer plus longtemps.
39:31 Pour autant, la position d'attente aujourd'hui n'est peut-être pas forcément mauvaise.
39:36 Au sein du marché actions, on a une configuration où les secteurs de croissance,
39:41 je pense que c'est le dénominateur commun de l'IA, sur lequel on revient un petit peu, le luxe,
39:46 c'est quand même cette dimension croissance qui est la sensibilité au taux long,
39:49 qui est la duration. Et donc la pontification favorable à la value, ça se paie moins cher.
39:54 Modulo quand même, les conflits sociaux qu'on voit dans le manif américain par exemple,
39:58 qui tapent précisément sur ces secteurs value.
40:02 Mais ces rotations vont continuer.
40:05 Et puis après, on a effectivement l'inflation courte, des taux réels à 3,25,
40:11 il ne peut pas vous arriver grand-chose.
40:13 Avec en plus une 106 pétrole sur cette partie de la courbe qui peut être intéressante
40:17 et un bon edge pour le marché.
40:19 Valérie, j'ai compris, il faut être couvert.
40:23 Oui, sur les actions, même sur les obliques, il faut plutôt être couvert.
40:27 Donc là, tout de suite, à part des taux très courts du monétaire, des choses comme ça,
40:31 il n'y a pas grand-chose. Mais après, je pense que d'ici la fin de l'année,
40:36 il y aura certainement des opportunités à saisir.
40:40 Mais pour le moment, il vaut mieux être avec des valeurs pétrolières, valeurs bancaires,
40:47 et puis un peu de pharmacie.
40:50 D'accord, si on veut des actions, c'est plutôt ce genre de secteur, de thème qu'il faut avoir.
40:55 Oui, il y a des industriels qui sont toujours bien, parce qu'il y a de tout dans le secteur industriel.
40:59 Mais il n'y a pas grand-chose qui soit en situation de monter franchement.
41:07 Mais il y a des choses qui vont baisser moins que d'autres.
41:10 Donc s'il y en a ça et qu'on est couvert, ça va se passer.
41:13 On peut traverser. On navigue.
41:15 Bastien ?
41:16 Nous, c'est toujours un discours de prudence sur les actions,
41:19 et en attendant de revenir peut-être plus franchement sur les secteurs de croissance,
41:24 sur les mois qui arrivent. Mais bon, on attend.
41:28 Oui, je comprends. On m'emmerde à la question du timing.
41:31 On reviendra. Oui, le luxe, ça reste de la qualité, etc.
41:34 Bon, est-ce que c'est le bon timing pour y revenir ? Peut-être pas encore.
41:37 Donc là, on est plutôt dans une position d'attente de ce point de vue-là.
41:40 Merci à vous trois. Merci d'avoir été les invités de Planète Marché ce soir.
41:44 Bastien Dru, CPR Asset Management, Axel Bott, Ostrom AM et Valérie Gastaldi de Baydé.

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