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Le maître de conférences à Sciences-Po, docteur en géopolitique, était l'invité du "8h30 franceinfo" du lundi 4 décembre 2023.

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00:00 Bonjour Frédéric Ancel. La France a une fois de plus été frappée par le djihadisme.
00:05 Samedi soir, un homme connu pour radicalisation a pris un couteau, un marteau.
00:09 Il est passé à l'acte tuant un touriste allemand dans le 15e arrondissement.
00:11 Il a évoqué, c'est important, l'actualité, la Palestine.
00:15 Il dit qu'il en a marre de voir des musulmans mourir.
00:17 Ça signifie que l'actualité, en ce moment, peut être le déclencheur d'un passage à l'acte en France.
00:23 Oui et non, parce qu'à l'époque de l'éviction d'un million de Rohingyas musulmans
00:29 de Birmanie vers le Bangladesh dans des conditions que Human Rights Watch à l'époque a qualifiées de génocidaires,
00:34 je ne sache pas qu'il y ait eu ce genre d'acte.
00:37 Et je pourrais vous multiplier les occurrences où des musulmans dans le monde
00:41 vivent un sort extrêmement difficile, jusque-ci y compris d'ailleurs dans la Chine des Ouïgours,
00:46 au Xinjiang, sans qu'il y ait nécessairement instrumentalisation de ces thématiques par des terroristes.
00:52 Donc c'est le conflit israélo-palestinien qui est en l'occurrence le déclencheur.
00:56 Le déclencheur prétexte l'instrumental en quelque sorte pour un certain nombre de gens qui souhaitent,
01:02 alors pour des raisons différentes, parfois peut-être psychiques, parfois politiques, parfois idéologiques,
01:06 parfois biographiques, que sais-je encore, passer à l'acte violent.
01:10 Donc encore une fois, j'insiste sur l'instrumentalisation de ce conflit
01:14 et sur malheureusement, parfois chez certains complaisants, une volonté d'importer quelque part le conflit en France.
01:22 Ce qui est très grave et ce qui est très anti-républicain.
01:24 C'est un cas typique de ce qu'on appelle le djihadisme low-cost.
01:28 Impossible à prévoir, un homme qui un matin prend un couteau, un marteau et va assassiner.
01:34 Oui, non seulement c'est une façon, alors c'est un modus operandi très imprévisible,
01:39 donc ça c'est extrêmement compliqué, même si par ailleurs ces personnes ont des antécédents.
01:43 Mais vous savez, on est dans un état de droit, dans une véritable démocratie.
01:45 Donc ce n'est pas parce que vous avez des antécédents ou que vous avez exprimé, y compris de manière violente,
01:50 en l'occurrence, une proximité avec le djihadisme, qu'on va vous enfermer jusqu'à ce que mort s'ensuive.
01:56 Ce n'est pas ça une démocratie. Donc ça c'est extrêmement difficile.
01:59 Et c'est aussi ce que Gilles Kepel, ô combien grand connaisseur de l'islamisme, appelle le djihad d'atmosphère, en quelque sorte.
02:06 Donc on est effectivement, malheureusement, depuis pas mal d'années en France et en Europe, dans ce type de schéma.
02:12 - Si compliqué, pardon, encore plus les choses, parfois c'est la dissimulation, ce qu'on appelle la taqiyya.
02:17 Ce terroriste, il avait déjà été condamné. Et une fois qu'il a purgé sa peine, il s'était présenté de lui-même au commissariat,
02:24 après l'assassinat de Samuel Paty, pour signaler qu'il avait échangé avec l'assaillant de Samuel Paty sur les réseaux sociaux.
02:30 Mais il avait expliqué aux policiers qu'il était devenu anti-islamiste.
02:35 Il avait même dénoncé le fait de crier à l'islamophobie pour se positionner en victime.
02:40 C'est ça la taqiyya, la dissimulation ? Ou c'est autre chose ?
02:44 - Non, la taqiyya c'est la dissimulation au service de l'islam. Je précise bien que c'est selon des exégètes ou des terroristes
02:52 qui considèrent qu'ils doivent faire le bien de l'islam. C'est bien leur propre interprétation. Je ne dis pas que c'est la bonne.
02:58 Et là, effectivement, on a affaire à une véritable dissimulation au sens tactique et stratégique du terme.
03:03 Autrement dit, le mensonge, en principe, n'est jamais autorisé. C'est vrai d'ailleurs dans les autres monothéismes.
03:08 Sauf, en l'occurrence, chez les islamistes, lorsqu'il s'agit, encore une fois, de faire le bien de l'islam et de faire progresser la cause de l'islam.
03:16 Maintenant, là, en l'occurrence, c'est une hypothèse. Je ne sais pas dans quelle mesure. Il n'a pas changé d'avis ou il n'a pas, comme on dit chez les jeunes, vrillé.
03:23 Mais ça, ce sera à l'enquête de le dire.
03:25 - Est-ce que le mot "dissimulation" est le bon nom ? Est-ce qu'en l'occurrence, le mot, ce n'est pas "manipulation" ?
03:28 Puisque même les psychiatres se sont fait avoir, en l'occurrence.
03:31 - Oui, vous savez, quand vous essayez de dissimuler, de vous manipuler, à partir du moment où, pour des raisons politiques ou religieuses,
03:37 lorsque vous tentez d'atteindre un but, un objectif, quel que soit le coup, vous utilisez par définition une tactique ou une stratégie qui doit vous permettre de fourvoyer l'adversaire.
03:50 Sinon, vous ne parvenez pas à votre objectif.
03:53 - C'est ce qui explique d'ailleurs qu'à l'instant, le ministre de l'Intérieur dit qu'il y a eu un ratage psychiatrique.
03:58 C'est-à-dire qu'au passage, d'ailleurs, il met en cause plutôt les médecins plutôt que le renseignement policier.
04:03 - Alors là, on aboutit à quelque chose qui est extrêmement difficile pour quelqu'un qui, comme moi, n'est pas du tout spécialiste de ces questions psychiatriques ou psychologiques.
04:10 Cela dit, dans mon procès, on retrouve effectivement ce type de questionnement.
04:14 - Encore beaucoup de questions à vous poser, Frédéric Ancel.
04:16 On va vous retrouver juste après le Fil info, puisqu'il est 8h41.
04:20 Et le Fil info, c'est avec Maureen Swignard.
04:23 Éric Dupond-Moretti définitivement relaxé.
04:25 Le Parc-à-Général ne va pas faire appel de la décision de la Cour de justice de la République.
04:30 Pas de pourvoi en cassation.
04:32 L'annonce a été faite ce matin sur France Info.
04:35 À 8 mois des Jeux olympiques de Paris 2024, les autorités assurent que tout est fait pour réduire la menace terroriste en France.
04:42 Un homme a tué un touriste près de la Tour Eiffel samedi.
04:45 Il était suivi par les renseignements et connu pour des troubles psychiatriques.
04:50 Il y a eu un ratage psychiatrique, affirme ce matin le ministre de l'Intérieur.
04:54 Après une baisse notable le mois dernier, les prix du panier France Info se stabilisent en novembre.
04:59 Reçus avec le cabinet Nielsen IQ, les tarifs d'une quarantaine de produits du quotidien.
05:05 Pas de baisse ce mois-ci, mais une stabilisation donc.
05:08 Mais les négociations en janvier entre industriels et distributeurs pourraient conduire à de nouvelles hausses de prix.
05:13 2-0 pour les Marseillais face à Rennes.
05:16 L'OM remonte à la 9e place du classement de Ligue 1.
05:19 Paris est toujours en tête.
05:20 Toujours avec Frédéric Encel, docteur en géopolitique,
05:31 auteur des Voix de la Puissance aux éditions Odile Jacob.
05:34 On parlait à l'instant des tensions entre État de droit et besoin de protection.
05:39 C'est une question à laquelle sont confrontées toutes les démocraties.
05:43 Aujourd'hui, il y a un débat en France.
05:44 Faut-il durcir les règles ?
05:46 Les règles ne sont pas suffisantes.
05:48 Elles ne sont pas assez efficaces.
05:49 Je pense qu'il faut aller au maximum de ce que la loi permet
05:53 et renforcer éventuellement la loi s'il n'est pas suffisamment efficace.
05:59 Je pense que le dispositif légal, il est déjà en France très efficace,
06:03 notamment par rapport à d'autres États de l'Union européenne ou hors Union européenne.
06:07 Nous avons déjà réussi à éviter un nombre très important d'attentats grâce à nos lois,
06:13 grâce à la police, à la justice, à nos militaires aussi d'ailleurs,
06:16 hors des frontières ou au sein des frontières.
06:19 Il y a 20 ans de ça, un peu plus de 20 ans,
06:21 j'écrivais un modeste ouvrage qui s'intitulait
06:24 "La démocratie à l'épreuve de l'islamisme".
06:29 Et je disais que la République doit absolument tout faire
06:32 pour lutter contre la complaisance et a fortiori la complicité vis-à-vis de ce fléau.
06:37 L'islamisme est un véritable fléau.
06:38 C'est ce qu'Abdel Wahab Medeb appelait déjà en 2003 la maladie de l'islam,
06:43 c'est-à-dire le fanatisme.
06:44 Sauf que le fanatisme, il touche toutes les religions
06:46 et beaucoup de collectifs humains dans l'histoire.
06:48 Juste d'un mot, j'ai toujours considéré qu'il fallait
06:51 éviter absolument les deux écueils suivants,
06:54 l'amalgame et la complaisance.
06:56 Ni complaisance, ni amalgame.
06:58 J'ai envie de dire en ce moment, surtout pas de complaisance.
06:59 - C'est important parce que ce que vous dites, en fait,
07:01 c'est qu'il y a une asymétrie dans ce combat entre d'un côté des démocraties
07:04 qui sont attachées à des principes aussi importants que la liberté
07:08 et puis le terrorisme qui, lui, évidemment, n'a absolument pas ses scrupules.
07:13 - Oui, et je pense qu'un régime authentiquement démocratique
07:16 comme l'est la République française, doit absolument tout faire
07:19 pour se défendre contre ceux qui l'instrumentalisent,
07:22 contre ceux qui utilisent la liberté qu'elle confère aux extrémistes.
07:28 Je vais tout de suite aller au point Godwin, 1933.
07:30 La démocratie allemande permet, malheureusement,
07:33 elle a finalement été faible, elle a autorisé ceux qui ont joué
07:36 sur ces règles démocratiques à l'abattre.
07:39 Et moi, je pense que la République française ne doit jamais être abattue.
07:42 - Quels sont les différents types de menaces aujourd'hui
07:44 auxquelles est confrontée la France extérieure, intérieure, inattendue ?
07:48 - Oh là ! Alors, je pense que pour l'instant,
07:50 la menace principale, c'est vraiment celle de l'islamisme radical.
07:54 C'est vrai au sein de nos frontières, on l'a vu d'ailleurs pendant
07:57 cette dernière décennie ou cette décennie et demie.
07:59 Donc c'est le terrorisme à caractère islamiste.
08:02 À l'extérieur, la France fait face à un certain nombre de tensions,
08:06 davantage que de menaces, je vous dirais.
08:08 Alors, on pourrait évoquer nos 10 ou 11 millions de kilomètres carrés
08:12 de zones économiques exclusives, nos mers et océans,
08:15 qui s'ils ne sont pas suffisamment défendus dans les prochaines années,
08:18 pourraient être l'objet de convoitises de grandes puissances asiatiques.
08:20 - Mais sur l'islamisme, la menace, c'est plus celle d'un individu isolé
08:24 qui surgit sur le territoire français qui était déjà présent
08:27 ou celle d'une attaque projetée ?
08:29 Est-ce que la menace d'une attaque projetée est encore forte et à prendre au sérieux ?
08:33 - Non seulement elle est forte et à prendre au sérieux,
08:35 mais lorsque vous discutez, ce qui est mon cas très régulièrement
08:38 avec les hommes du Raid, ils vous disent qu'on a déjà évité
08:42 ces dernières années beaucoup d'attentats.
08:43 Alors, on n'en parle pas systématiquement. Pourquoi ?
08:45 Parce que par définition, ils ont été vus.
08:46 - Une quarantaine ces derniers mois encore, disait Gérald Darmanin.
08:48 - Exactement. Et donc, ça fait beaucoup.
08:50 Donc, vous voyez, c'est bouteille à moitié pleine ou à moitié vide.
08:52 C'est-à-dire que la France se défend avec une véritable efficacité
08:56 ces dernières années contre le fléau islamiste.
08:58 - Est-ce qu'il y a une distinction, en fait, entre ces différentes menaces ?
09:00 La menace, on va dire organisée, et puis cette menace d'un individu
09:03 complètement isolé. Je précise ma question.
09:05 Est-ce que les organisations terroristes, en fait,
09:06 elles ne cherchent pas activement à s'appuyer sur des profils fragiles,
09:11 comme celui de samedi soir, repérés sur la toile,
09:14 qui sont faciles à endoctriner ?
09:16 - Si, c'est même le cas depuis Al-Qaïda, les années 90,
09:20 et surtout depuis le début des années 2000,
09:23 avec ce qu'on a appelé le système de franchise.
09:24 C'est-à-dire que parfois, Al-Qaïda découvrait,
09:27 je vais lire dans la presse, que quelqu'un s'était revendiqué
09:30 de l'islamisme radical, et plus précisément d'Al-Qaïda
09:33 et plus tard de Daesh, alors qu'il n'en était absolument pas membre.
09:35 Et du coup, ces organisations terroristes avaient un intérêt à assumer,
09:39 à revendiquer ce qui s'était produit, de façon à maintenir une tension,
09:43 une pression, voire un véritable prestige chez des ultra-conservateurs
09:47 au sein de différentes jeunesses dans le monde arabo-musulman.
09:50 - C'est le sens d'ailleurs, c'est toute la question du sens du mot
09:52 "allégeance" qui a été employé encore hier soir par le procureur antiterroriste.
09:56 - Oui, et c'est vrai de l'autre côté, là je vous parlais de l'amont,
09:59 mais en aval. C'est-à-dire chez le jeune qui prend un couteau
10:02 et qui décide d'agir comme ce qu'on appelle parfois un loup solitaire,
10:05 lui, celui-là, a besoin de faire de la publicité.
10:08 Dans le terrorisme, fondamentalement, il y a la notion de terroriser.
10:13 Et si vous le faites sans raison spectaculaire, on ne parlera pas beaucoup de vous.
10:18 Si votre acte, il est effectivement lié à l'islamisme radical, là on va en parler.
10:22 - On parlait à l'instant de la guerre au Proche-Orient
10:24 qui agit comme un déclencheur en France.
10:27 On va faire le point sur ce qu'il se passe là-bas.
10:30 Les négociateurs israéliens qui discutaient au Qatar
10:34 d'une nouvelle trêve avec le Hamas sont rentrés en Israël
10:37 car le dialogue était dans l'impasse.
10:39 Qu'est-ce qui bloque aujourd'hui ?
10:41 - Aujourd'hui, pour l'essentiel, ce qui bloque, c'est à la fois les listes d'otages
10:46 contre les prisonniers, le ratio, pardon le mot n'est pas beau, mais il faut l'employer,
10:50 le ratio de 1 à 3, un otage pour 3 prisonniers ne plaît plus du tout au Hamas.
10:55 - Parce qu'on est rentré dans le dur.
10:57 - On est rentré dans le dur et sous la pression militaire israélienne,
10:59 évidemment le Hamas a été obligé d'accepter ce ratio.
11:02 Je rappelle qu'il y a 15 ans de cela, le ratio était de 1 à 1000.
11:05 - Mais pour un soldat franco-israélien, aujourd'hui ce sont des femmes, des enfants,
11:09 des personnes âgées qui ont été échangées contre 3 prisonniers.
11:11 Si là, le rapport de force change, c'est parce que le Hamas détient aussi des hommes et des militaires.
11:17 - Oui, vous avez raison, mais c'est aussi parce qu'il s'est encore plus radicalisé qu'il y a 15-20 ans.
11:22 En réalité, la nature de l'attaque est une nature pogromiste.
11:25 De l'attaque du 7 octobre dernier a démontré une daechisation d'une partie au moins du Hamas
11:32 dans sa manière de massacrer pratiquement 1000 civils.
11:36 Et de ce point de vue là, on a affaire, me semble-t-il, à une direction qui est quasiment apocalyptique aujourd'hui,
11:42 qui est beaucoup plus violente, moins pragmatique, en quelque sorte,
11:45 que ce qu'on avait pu connaître du Hamas dans les années 90-2000.
11:48 - Direction de la branche militaire du Hamas ?
11:50 - Alors, le problème est de savoir s'il n'y a pas une porosité très importante entre branche politique et militaire.
11:56 Tout à l'heure, vous me posiez à juste titre la question de la taquilla, la dissimulation.
11:59 Vous savez, moi, je ne suis pas dans les manes du Hamas.
12:02 Je me demande dans quelle mesure on n'a pas là une tactique vis-à-vis des Occidentaux
12:07 et des régimes arabes modérés pour essayer de brouiller les pistes.
12:10 - Il y a une question qu'on est obligé de se poser depuis la reprise des hostilités ce week-end.
12:12 Est-ce qu'Israël est prêt à renoncer à son objectif de ramener ses otages ?
12:17 Est-ce que ça n'est plus une priorité ?
12:19 - Alors, question centrale. Depuis le 7 octobre, d'après tout ce que j'ai pu lire, entendre
12:23 de la société, du gouvernement et de l'armée, bien sûr, en Israël,
12:26 je considère que pour la première fois depuis 1948, depuis la création de l'État d'Israël,
12:30 cet objectif est devenu ex aequo en quelque sorte.
12:33 C'est-à-dire qu'aujourd'hui, il reste prioritaire la libération des otages, comme toujours en Israël.
12:38 Et en même temps, dans le même temps et dans le même espace, par ailleurs,
12:42 l'objectif fondamental d'Israël, c'est réellement de désarmer le Hamas.
12:47 Alors, est-ce que ces deux objectifs sont compatibles ? Je ne sais pas, on verra bien.
12:49 - Justement, on allait vous poser la question. Impossible, évidemment, de concilier
12:53 le but d'éradication du Hamas avec la libération des otages.
12:57 - C'est extrêmement difficile. Et de l'autre côté, si vous n'exercez pas une pression militaire,
13:01 le Hamas ne libère pas les otages.
13:03 - Emmanuel Macron, à son avis, lui, sur l'éradication du Hamas,
13:06 cet objectif d'une destruction totale pourrait engendrer 10 ans de guerre.
13:10 Cet objectif doit être précisé, a-t-il dit ce week-end.
13:14 Ça a du poids vis-à-vis de Tel Aviv, ces avertissements français ?
13:17 - Non. Non, d'abord parce que la France et l'Europe ont un poids très amoindri ces dernières années,
13:22 déjà faible à l'époque des accords d'Ocelot de 1993, mais aujourd'hui, il est extrêmement faible d'une part.
13:27 D'autre part, la France est minoritaire au sein de l'Union européenne.
13:30 Donc, la plupart des États de l'Union européenne ne demandent pas, pour l'instant,
13:32 un cessez-le-feu à Israël. Ils ne parlent pas en ces termes-là.
13:35 Donc non, non, ça n'a pas beaucoup de poids. Par ailleurs, je constate une contradiction
13:39 avec l'un des premiers discours d'Emmanuel Macron à Tel Aviv, d'ailleurs, à l'époque,
13:44 aux côtés de Netanyahou, lorsqu'il disait qu'il fallait créer une grande coalition militaire contre le Hamas.
13:50 Donc c'est l'un ou c'est l'autre. Dernier point, les Israéliens, là, pour le coup,
13:54 je rejoins le président de la République, n'ont pas raison de ne pas préciser leur but de guerre.
13:59 Alors évidemment, lorsqu'on est en pleine phase d'opération, c'est toujours très compliqué de dire exactement ce qu'on veut faire.
14:03 Je pense, pour ma part, que le Hamas peut être détruit, mais d'un point de vue strictement militaire.
14:08 On ne casse pas, on ne détruit pas une idéologie avec des armes. C'est pas possible.
14:11 Le Hamas, c'est porteur, on l'a vu depuis tout à l'heure, d'une idéologie.
14:14 En revanche, sur le plan strictement militaire, je pense que c'est faisable et je ne pense pas que ça mènera à 10 ans de guerre supplémentaire,
14:20 à condition que l'autorité palestinienne reprenne évidemment en charge la bande de Gaza.
14:25 Frédéric Ancel et l'invité de France Info, jusqu'à 9h, vous restez avec nous.
14:28 On vous retrouve juste après le Fil Info 8h50. Maureen Suynard.
14:32 Il y a eu manifestement un ratage psychiatrique, affirme ce matin le ministre de l'Intérieur.
14:37 Affirmation après l'attaque samedi à Paris, près de la tour Eiffel.
14:40 L'homme était suivi par les services de renseignement.
14:43 Le ministre de l'Intérieur met en cause l'analyse des médecins qui le suivaient.
14:48 L'armée israélienne dit avoir mené environ 10 000 frappes aériennes sur Gaza depuis le début de la guerre contre le Hamas.
14:53 Israël, qui depuis ce week-end, étend ses opérations dans le sud du territoire palestinien.
14:59 L'ambassadrice d'Israël en France dit croire ce matin que la reprise de la guerre avec le Hamas
15:04 est compatible avec la libération de tous les otages.
15:07 5 Français restent portés disparus.
15:09 C'est un produit largement utilisé par les plus jeunes.
15:12 Les PEUF, les cigarettes électroniques jetables, vont-elles être interdites ?
15:16 Une proposition de loi en ce sens est examinée à partir d'aujourd'hui à l'Assemblée nationale.
15:20 Mesure soutenue par le gouvernement.
15:22 Et puis, 27 à 12, le stade français Batoulou, hier à Paris, en clôture de la 9e journée du Top 14.
15:29 Le stade français 5e désormais revient à deux points du leader, le Racing 92.
15:34 Toujours avec Frédéric Ancel, docteur en géopolitique,
15:44 auteur des Voix de la Puissance aux éditions Odile Jacob.
15:47 Que veut vraiment Benyamin Netanyahou ?
15:49 Au début de son offensive, Israël avait demandé aux habitants de Gaza de quitter le nord pour le sud.
15:53 Près d'un million de personnes ont été déplacées.
15:55 Mais aujourd'hui, le sud aussi est frappé.
15:58 Quel est l'objectif ?
15:59 Oui, fondamentalement, l'objectif, c'est d'empêcher le Hamas de se maintenir dans la bande de Gaza.
16:06 Le problème est le suivant.
16:07 Si Netanyahou croit comme son prédécesseur, Ehud Olmert, en 2006, contre le Hezbollah au Liban.
16:12 S'il croit simplement avec les armes pouvoir détruire totalement le Hamas, y compris l'idéologie qui le soutend,
16:19 alors il se trompe. Alors ce sera un échec.
16:21 Ça, c'est le premier point.
16:22 Le deuxième point, qui me semble-t-il est extrêmement problématique à la tête du gouvernement israélien aujourd'hui,
16:27 c'est la volonté de ne pas voir l'autorité palestinienne revenir dans la bande de Gaza.
16:31 Parce que si ce n'est pas l'autorité palestinienne qui légalement et légitimement doit pouvoir,
16:36 et qui était dans la bande de Gaza avant de se faire chasser par un putsch du Hamas en 2017...
16:39 Ça, c'est la question de l'après Gaza.
16:40 C'est l'après, c'est le jour d'après.
16:41 Les Américains plaident pour une autorité palestinienne revitalisée.
16:44 Et Benyamin Netanyahou dit, moi vivant, jamais l'autorité palestinienne ne reviendra dans Gaza.
16:48 Très bien, sauf que du coup, qu'est-ce qu'on fait de Gaza ?
16:51 Les Israéliens ne veulent pas occuper Gaza.
16:53 Ils sont, pardonnez-moi l'expression, vaccinés depuis leur retrait de 2005.
16:57 Aucun État arabe, je peux vous le garantir, aucun État arabe,
17:00 ne prendra l'écrasante responsabilité d'envoyer des soldats
17:04 perçus rapidement par les Palestiniens comme des occupants à Gaza.
17:08 Et des casques bleus fidjiens et indiens, je crois qu'il faut oublier aussi.
17:11 Mais pardon, mais est-ce qu'il y a une doctrine israélienne aujourd'hui pour Gaza ?
17:15 Eh bien, au jour d'aujourd'hui, là, vous me posez la question.
17:18 Moi, je ne l'entends pas, je ne la vois pas, je ne la lis pas.
17:20 On vous pose la question parce que selon un quotidien israélien,
17:22 le Premier ministre a demandé à l'un de ses ministres,
17:24 le Premier ministre Benyamin Netanyahou,
17:26 a demandé à l'un de ses ministres de travailler un plan visant à encourager
17:31 les civils gazaouis à émigrer en Égypte,
17:34 mais aussi à prendre le chemin de la Méditerranée
17:36 pour atteindre les pays africains ou européens.
17:39 Oui, non, mais alors ça, c'est pas possible parce que je crois que le maréchal Sisi,
17:43 qui préside au destiné de l'Égypte sans aucun humour, ne va pas l'accepter.
17:46 Voyez-vous donc ça, c'est on est dans la pensée magique.
17:49 Ce n'est pas possible.
17:50 Il faut absolument que les seuls qui puissent gérer la bande de Gaza
17:54 qui est peuplée exclusivement de Palestiniens,
17:56 soient d'autres Palestiniens et qui, autrement qu'eux et autres
18:00 que l'autorité palestinienne, auraient à la fois, je le répète,
18:03 la légalité internationale et la légitimité pour le faire.
18:06 Qui d'autre ?
18:07 Mais si c'est vraiment le plan de Benyamin Netanyahou
18:09 de vider Gaza de la majorité de ses habitants, qui pourra l'en empêcher ?
18:15 Je pense que les Américains ne l'accepteront pas.
18:16 Ça, c'est une certitude.
18:18 Et ça, elle écoute les Américains ?
18:19 Oui, la pression de Joe Biden ne peut pas ne pas être entendue
18:24 d'une façon ou d'une autre par Benyamin Netanyahou
18:26 et d'ailleurs par aucun Premier ministre israélien.
18:28 Mais encore une fois, j'insiste.
18:30 Aujourd'hui, vous avez un État souverain dont l'armée est relativement puissante,
18:33 d'ailleurs, qui partage 14 kilomètres de frontières avec Gaza,
18:37 dont les frontières resteront fermées et qui a déployé ses chars.
18:40 Ce pays, c'est l'Égypte.
18:41 Et vous ne pouvez pas imposer à l'Égypte de laisser rentrer
18:43 plusieurs centaines de milliers de personnes.
18:45 Je retiens de ce que vous venez de dire à l'instant.
18:47 La pression de Joe Biden ne peut pas ne pas être entendue.
18:50 Mais est-ce qu'au fond, le pari des Israéliens, c'est de dire que dans quelques mois,
18:55 Joe Biden ne sera peut-être plus le président américain ?
18:57 Alors, c'est un pari risqué parce que d'abord,
19:00 Joe Biden peut très bien rester au pouvoir et s'irriter du fait de ne pas avoir été entendu.
19:05 Ensuite, si ce n'est pas Joe Biden, c'est peut-être, on n'en sait trop rien aujourd'hui,
19:09 mais ce serait peut-être, alors, Nikki Haley, ce serait l'excellente nouvelle pour les Israéliens.
19:13 Donald Trump paraît plus...
19:15 Alors aujourd'hui, oui, évidemment, l'hypothèse Trump est plus probable,
19:18 mais Trump est tellement imprévisible que si j'étais Israélien,
19:21 même si par ailleurs, il avait effectivement favorisé le gouvernement Netanyahou
19:25 il y a quelques années de cela, lorsqu'il était au pouvoir,
19:27 si j'étais Israélien aujourd'hui, je me méfierais parce que Trump, en réalité, est extrêmement...
19:31 Et en fait, il est beaucoup plus imprévisible que pro-Israélien.
19:34 Il y a un sujet, en tout cas, aujourd'hui sur lequel on a l'impression qu'Israël n'écoute pas les États-Unis,
19:38 c'est celui de la Cisjordanie et des colons.
19:42 Les États-Unis ont condamné la multiplication des violences par les colons.
19:45 Aujourd'hui, Washington s'apprête à opposer des restrictions de visas.
19:49 Est-ce que ça, ça peut avoir un impact concrètement ?
19:51 Oui, ça peut avoir un impact, notamment sur un État de droit qui doit absolument faire appliquer la loi.
19:56 C'est-à-dire qu'un certain nombre de colons israéliens se livrent à des exactions
20:00 qui, d'abord, évidemment, sont contre le droit international, mais sont contre le droit israélien.
20:04 Donc, si aujourd'hui, un gouvernement israélien n'est pas capable
20:06 de faire appliquer la loi sur son propre territoire, ça pose problème.
20:10 Mais attendez, avant que ça pose problème à M. Biden ou à M. Macron ou à qui sais-je encore,
20:14 ça pose problème à la majorité des citoyens israéliens qui,
20:18 selon toutes les enquêtes d'opinion depuis le massacre du 7 octobre,
20:21 reprochent énormément de choses au gouvernement israélien, y compris celle-là d'ailleurs,
20:25 mais lui reprochent de maintenir en son sein des extrémistes
20:29 et surtout d'être fondamentalement incompétents.
20:31 Et si aujourd'hui, il y avait des élections, le gouvernement Netanyahou serait balayé.
20:36 Benyamin Netanyahou reste aujourd'hui un Premier ministre en sursis ?
20:40 Oui, il est en sursis.
20:40 Une commission d'enquête se mettra en place sur la tuerie du 7 octobre
20:44 et ce qui a pu permettre d'arriver à cette catastrophe.
20:47 Et vous savez, je dis souvent qu'il y a 50 ans, jour pour jour, là, ces jours-ci,
20:51 c'était 50 ans, juste après la guerre du Kippour, la quatrième guerre israélo-arabe,
20:57 dont les premiers jours avaient été catastrophiques.
20:59 Une commission d'enquête, en l'occurrence à Granade à l'époque, s'était mise sur pied.
21:03 Les conclusions avaient été terribles et avaient poussé finalement des gens
21:07 bien plus prestigieux que M. Netanyahou, à savoir Golda Meir et Moshe Dayan, à démissionner.
21:12 Et je le dis d'un mot, en 1983, un autre Premier ministre très prestigieux, Menachem Begin,
21:16 lui avait été obligé aussi finalement de démissionner.
21:19 Et Ariel Sharon, son ministre de la Défense, lui avait été contraint de démissionner tout de suite
21:24 pour des... C'était à l'époque de la guerre du Liban et ses ratages,
21:29 pour des conséquences qui finalement avaient été moindres que celles du 7 octobre
21:34 et des gouvernements plus prestigieux.
21:36 Donc je pense que le gouvernement étant sursis, c'est vrai,
21:38 pas nécessairement la TNESET, mais la coalition en tout cas, elle changera.
21:42 Et aujourd'hui, encore une fois, si on s'en tient aux sondages et aux enquêtes d'opinion,
21:46 une coalition a priori de centre-gauche devrait se mettre en place.
21:50 – La sanction sera, oui, la sanction électorale ne fait aucun doute.
21:54 – Oui, mais alors ça c'est après, c'est le feu définitif.
21:57 – Et surtout quand le New York Times révèle que le renseignement militaire
22:00 avait un plan détaillé de l'attaque du Hamas et qu'il ne l'a pas pris au sérieux,
22:03 ça c'est de nature à faire tomber un gouvernement ?
22:05 – Bien sûr, parce que quand vous dites les renseignements militaires, vous avez raison,
22:08 mais ce n'est pas lui l'échelon politique dans une démocratie comme Israël
22:10 qui prend les décisions surtout, et a fortiori, en termes d'affaires étrangères et de défense.
22:16 C'est évidemment l'échelon politique qui est au pouvoir depuis 2009,
22:19 pratiquement sans discontinuer, c'est Netanyahou.
22:21 – Merci beaucoup Frédéric Ancel, docteur en géopolitique,
22:23 maître de conférences à Sciences Po Paris.
22:24 Merci d'avoir été l'invité de "Ces Infos" ce matin.

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