Le photographe publie "Mes nuits blanches" aux éditions Calmann-Lévy.
Regardez Le débat du 15 décembre 2023 avec Yves Calvi.
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00:02 9h
00:05 RTL matin. Bonjour Jean-Marie Perrier. Bonjour. Merci de nous rejoindre ce matin sur RTL pour évoquer vos "Nuits Blanches".
00:10 C'est le titre de ce que vous prétendez être votre dernier livre du genre aux éditions Calman Levy.
00:14 Dutronc, Johnny, François Zardier et bien entendu votre père adoré François Perrier. Ils sont tous là avec des photos
00:20 exceptionnelles et vos textes qui ne le sont pas moins. Un ami nous parle à l'oreille,
00:24 il a croisé le monde entier, c'est vous. En fait ce film de votre vie est aussi le nôtre.
00:28 Des années 60 à aujourd'hui. Vous êtes nostalgique Jean-Marie Perrier ?
00:31 Oui bien sûr je suis nostalgique mais par contre j'ai jamais dit c'était mieux avant. Je disais c'était mieux avant pour moi.
00:39 Je vois bien l'annotation. Je préfère être jeune que vieux. Voilà.
00:42 Alors faut que je vous parle, puisqu'on est dans l'insouciance, de celui qui est comme un guide dans ce livre,
00:46 votre camarade Jacques Dutronc. Vous dites de lui "mon attachement
00:50 excessif à Dutronc m'a séparé de beaucoup de monde".
00:54 Expliquez-nous parce que c'est extraordinaire cette confession.
00:56 Oui mais il ne comprenait pas parce que j'avais quand même mon cheptel déjà avec Johnny, Sylvie, Françoise, il y avait beaucoup de monde.
01:01 Mais
01:03 c'était quoi un an et demi je crois après qu'on soit séparés gentiment avec Françoise puisque finalement c'est toujours mon ami.
01:08 Nous parlons de François Zardy.
01:11 Et elle me présente,
01:12 me dit "j'ai rencontré quelqu'un donc moi je vais le rencontrer, je ne vois pas comment je ne peux pas aimer la personne qu'elle aime".
01:17 Bon donc je tombe sur lui et là mais alors je suis absolument sidéré de voir un type tellement différent des autres,
01:24 tellement rare parce que tous ils étaient américanisés.
01:27 Ils avaient des noms différents, Dick Rivers, tout ça.
01:32 Lui il arrive, il s'appelle Dutronc, il est en cravate, il est le plus insolent de tous.
01:36 J'étais fou de ce mec là.
01:38 Alors Dutronc qui est fin psychologue car vous le citez parlant d'Eddie Mitchell, moi j'ai adoré ça, c'est extraordinaire.
01:43 Eddie, même quand c'est lui qui t'appelle, tu as l'impression de le déranger.
01:46 Ça c'est vraiment typiquement Dutronc.
01:48 C'est lui Dutronc.
01:49 Ah oui, formidable.
01:50 C'est quand même très vrai sur Eddie Mitchell.
01:52 En plus oui.
01:53 Entre autres anecdotes savoureuses, vous avez rencontré Mère Marguerite,
01:57 alors c'est la mer supérieure de Montaigne dans l'Aveyron,
01:59 et vous vous êtes rendu compte un peu par hasard qu'elle était la tente de Jacques Dutronc.
02:03 Racontez-nous ça.
02:04 Oui parce qu'ils ne me l'avaient pas dit moi.
02:06 Donc j'étais dans l'Aveyron chez moi, ça fait 25 ans que je suis là-bas,
02:10 et on me dit "ah oui mais vous savez à 17 km il y a la mer supérieure de Montaigne
02:15 et c'est la tente de Jacques Dutronc".
02:17 Je l'appelle, je lui dis "mais tu te fous de moi ou quoi ?"
02:19 "Ah oui oui, tu verras, tu la reconnaîtras parce qu'elle ressemble beaucoup à mon père".
02:24 Effectivement c'était la même tronche, mais en dame supérieure.
02:29 Et alors c'était merveilleux parce que d'abord elle avait été assez difficile à rencontrer,
02:35 c'est comme dans la famille, ils n'aiment pas beaucoup le truc.
02:37 Bon finalement je l'ai réussi à avoir le rendez-vous,
02:40 et je lui ai apporté une photo de Dutronc.
02:42 Mais alors encadré, c'était carrément tous les attributs du diable,
02:46 c'est-à-dire blouson de cuir, cigare, lunettes noires, tout.
02:49 Et là c'est la sainte et le diable, c'est formidable.
02:53 Alors on parle de ceux que vous aimez,
02:55 et je voudrais qu'on parle de quelqu'un qui vous a déçu et que j'adore,
02:58 Steve McQueen, c'est page 78.
03:00 Racontez-nous cette séance de photo, parce que vous avez dû être tellement déçu.
03:03 Oui, parce que j'étais un acteur que j'aimais beaucoup.
03:05 On l'adore, ben oui.
03:07 Et puis à l'époque déjà, c'était assez rare,
03:10 j'avais un rendez-vous d'un quart d'heure.
03:12 Je vais en Espagne avec ma sœur qui était toute jeune,
03:15 on attend le rendez-vous, et ça dure trois jours.
03:17 Au bout du troisième jour, il nous reçoit sur sa terrasse,
03:19 il est en train de prendre un petit déjeuner somptueux,
03:22 il nous adresse pas la parole, il nous offre pas un café,
03:24 et à un moment donné il se lève et il me dit "bon, je vous donne trois minutes".
03:29 "Ah bon, ben d'accord, alors mettez-vous là près de l'arbre,
03:31 clic-clac, merci Kodak, au revoir monsieur, on s'est tiré".
03:34 C'est la seule fois de ma vie que ça m'est arrivé.
03:36 Une déception de ce type ?
03:37 Oui, que ça se passe mal avec quelqu'un.
03:40 Il y a des personnalités qui reviennent plusieurs fois dans ce livre,
03:42 Célia Barton qui est la plus représentée,
03:44 19 photos d'elle, j'ai fait le calcul,
03:46 juste devant Johnny, à qui vous consacrez 17 pages.
03:48 Parlez-nous d'eux.
03:49 Eux, c'était des rapports extraordinaires,
03:51 il faut dire que tous ces moums-là, quand je les ai rencontrés,
03:53 moi j'avais 22 ans et je revenais de l'armée,
03:55 je rencontre une ribambelle de moums qui ont entre 17 et 20 ans,
03:59 qui ne partent de rien, et qui ont eu des vies très difficiles par rapport à la mienne.
04:02 Alors elle, il faut voir quand même qu'elle arrive de Bulgarie à 5 ans
04:06 avec la valise en carton.
04:08 Donc tout ça, moi ça me touche énormément.
04:11 Dans vos textes, vous racontez des souvenirs que vous avez avec votre père, François Perrier,
04:14 par exemple quand il vous emmenait au théâtre de la Michaudière,
04:16 où vous avez vu Yvonne Printemps au bar,
04:18 et il ne buvait pas que de l'eau.
04:19 Ah bah c'était extraordinaire, elle aimait beaucoup la limonade de Reims.
04:23 Moi j'avais quoi, 12 ans ?
04:25 Je n'aimais pas aller au théâtre,
04:27 même parce que je trouvais que dans la salle,
04:29 je trouvais qu'il y avait que des vieux, que ça sentait le vieux,
04:31 enfin je ne sais pas, j'aimais pas.
04:32 Par contre j'allais toujours au bar,
04:34 parce qu'il y avait Yvonne Printemps et Pierre Frenet,
04:36 qui étaient eux les patrons de ce théâtre,
04:39 qui tous les soirs venaient voir comment les choses se passaient.
04:41 Et le problème pour Pierre Frenet,
04:43 c'était de faire sortir Yvonne Printemps du bar,
04:45 avant l'entracte.
04:46 Parce que les mecs arrivaient, ils avaient payé leur place,
04:48 et si jamais elle les voyait, vous ne comprenez rien au théâtre.
04:52 Il fallait la tirer jusqu'à dans les coulisses.
04:56 C'était merveilleux.
04:57 Quelle est la personnalité que vous auriez aimé photographier,
04:59 et que vous n'avez pas pu faire ?
05:01 Je me suis posé la question...
05:02 Il y en a deux, il y a Elvis Presley,
05:04 parce que son manager a refusé,
05:07 parce qu'il ne voulait pas, parce que j'étais français.
05:09 Et Frank Sinatra, évidemment, qui était mon dieu absolu.
05:12 Alors, en ouvrant votre livre, on lit cette phrase,
05:14 "Ceci n'est pas un livre de photos",
05:16 ce qui est une forme de provocation.
05:17 C'est notamment pour cela qu'il n'y a pas la fameuse photo du siècle,
05:20 regroupant toutes les stars du début des années 60 ?
05:22 Oui, bien sûr, de toute façon, ce n'est pas un livre de photos,
05:25 puisque je fais ça, ce sont des chroniques que je fais,
05:28 c'est les textes qui m'intéressent, les photos, ça va,
05:29 je les ai racontées 100 fois en plus.
05:31 Moi, ce qui m'intéresse, c'est la nuit, justement,
05:34 très souvent, la nuit, j'ai des insomnies magnifiques,
05:38 et j'écris tout ce qui me passe par la tête.
05:41 Il y a des surprises, on trouve des personnalités comme Anne Sylvestre,
05:45 il y a de très belles photos de Michel Serrault,
05:46 il se trouve que je l'ai bien connue.
05:47 Ah oui, mais lui, quel personnage !
05:49 Magnifique !
05:50 Lui, je le connaissais depuis "L'Amiral",
05:52 qui était un cabaret des années 50,
05:55 où mon père m'emmenait la nuit après le théâtre.
05:57 Lui, ce qui est formidable, c'est que...
06:01 Valérie Lemercier, peut-être que c'est les deux qui m'ont le plus touché
06:05 parmi les gens que j'ai connus dans les années 90.
06:07 Parce que c'est des gens exceptionnels,
06:09 qui ne ressemblaient à personne.
06:11 Elle, c'est une merveille sur deux pattes,
06:13 en plus, elle a un humour incroyable,
06:16 et mettre les deux ensemble...
06:17 J'avais une séance un jour formidable,
06:19 où ils étaient là tous les deux,
06:20 je les avais demandé de venir poser ensemble.
06:24 Mais en fait, quand tu as deux personnes comme ça devant toi,
06:26 et que c'est tellement géniaux,
06:28 je ne sais pas, moi je vais leur dire ce qu'il faut faire,
06:31 je n'en sais rien !
06:31 Bon, alors donc, ils sont sur un fond blanc, et on attend...
06:34 Et à ce moment-là, Valérie fait juste un geste des mains vers lui,
06:38 en lui disant "Viens !"
06:39 Et hop, il lui saute dans les bras,
06:41 et elle fait cette photo formidable, où elle est là comme un bébé !
06:44 C'est des gens merveilleux, ça !
06:45 - Je ne vous demande pas de choisir la photo que vous préférez ?
06:47 - Ah ben, j'y dis toujours la même, c'est toujours la même,
06:49 c'est celle de Jacques Dutronc, avec un casque,
06:51 dont le fil est retenu à la bouche d'un poisson.
06:57 Ça ne veut rien dire du tout.
06:58 Alors les mecs ont cherché des tas d'explications,
07:00 alors que la vérité, c'est qu'on était un peu bourrés au resto d'à côté,
07:03 et on a fait ça, mais en deux minutes !
07:05 Et c'est celle qui me fait le plus marrer !
07:07 - Merci d'avoir partagé avec nous ce matin vos Nuits Blanches,
07:10 mes Nuits Blanches parées aux éditions Keldman-Lévy.
07:12 C'est l'histoire d'une vie, et presque d'une civilisation en tout cas,
07:16 qui paraît très douce a posteriori.
07:17 Merci beaucoup Jean-Marie Perrin.
07:18 - Oui, c'est moi.
07:19 - Bonne journée.
07:20 * Extrait de « C'était un petit jardin » de Jean-Marie Perrin *
07:34 - 8h28 sur RTL.
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