Yves Bourdillon x François Chauvancy : L’Ukraine peut-elle perdre la guerre ?

  • l’année dernière
Avec Yves Bourdillon, journaliste au service international du quotidien Les Echos, chargé du Proche-Orient et de l’ex URSS et François Chauvancy, Général, consultant en géopolitique sur LCI et rédacteur en chef de la revue Défense de l'Union-IHEDN

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##PARLONS_VRAI_CHEZ_BOURDIN-2023-12-15##
Transcript
00:00 Vérissure, le numéro 1 des alarmes en France.
00:02 Rendez-vous sur verissure.fr pour votre demande de vie gratuite.
00:06 Vérissure présente...
00:08 Sud Radio, parlons vrai chez Bourdin, 9h10, Jean-Jacques Bourdin.
00:13 Il est 9h35, parlons situation internationale.
00:17 Vous savez que j'adore ça, mais j'adore ça parce que les Français s'y intéressent de plus en plus.
00:22 Et je crois que les Français vont s'y intéresser de plus en plus. Pourquoi ?
00:24 Parce que le monde bouge autour de nous de plus en plus.
00:27 Et qu'il faut bien savoir ce qui se passe pour comprendre, pour essayer de comprendre notamment
00:32 la situation à l'Est, l'Ukraine, la Russie.
00:35 Nous avons deux invités ce matin.
00:37 Yves Bourdillon qui est journaliste au service international du quotidien Les Echos,
00:40 chargé du Proche-Orient et de l'ex-URSS. Bonjour.
00:43 - Bonjour. - Merci d'être avec nous.
00:44 Et François Chauvency qui est général consultant géopolitique,
00:47 rédacteur en chef de la revue Défense de l'IHEDN. Bonjour.
00:52 - Bonjour. - Merci d'être avec nous tous les deux.
00:54 Bien, regardons les derniers développements.
00:57 Moi je voudrais commencer avec ce rendez-vous donné comme chaque année,
01:01 sauf que l'année dernière il n'a pas eu lieu par Vladimir Poutine.
01:05 Rendez-vous aux journalistes étrangers, enfin ils s'adressent au monde entier, voilà.
01:09 Mais ils s'adressent aux Russes, mais ils s'adressent au monde entier.
01:12 Et qu'a-t-il dit hier à propos de la guerre avec l'Ukraine ?
01:15 La solution sera négociée ou obtenue par la force.
01:19 Il se sent fort aujourd'hui, messieurs.
01:22 - Oui, tout à fait. - Qui commence ?
01:24 - Voilà. - Allez, François Chauvency.
01:26 - Allez, il se sent fort. - Il se sent fort, mais il se sent fort depuis plusieurs mois.
01:30 Depuis que l'affaire Prigojin en juin 2023 a été résolue, où il a un peu vacillé,
01:35 à la date d'aujourd'hui, il a des succès sur le terrain, même relatifs, très relatifs,
01:38 mais l'armée russe, elle est toujours là.
01:40 Il est en train de préparer sa campagne électorale.
01:42 - Il sera réélu. - Il sera réélu.
01:45 Et puis finalement, personne n'est capable de le mettre à genoux à la date d'aujourd'hui,
01:49 donc il se sent fort.
01:50 - Donc il se sent fort. - Il vous en dit un.
01:52 À vrai dire, il aurait même tenu le même discours, même si l'armée russe reculait,
01:55 parce qu'il est quand même dans une logique où tout va bien,
01:57 et d'ailleurs il a présenté hier des résultats tellement brillants
02:01 que certaines des questions qui ont été mal interceptées par ses services
02:05 et qui s'affichaient à l'écran disaient "comment est-ce que je pourrais venir vivre en Russie,
02:08 ça a l'air très très bien".
02:09 Donc oui, il présente une situation qui est positive.
02:13 - 3,5%, mais vous avez vu, 3,5% de croissance.
02:19 - Oui, parce qu'ils arrivent à contourner les sanctions,
02:22 qui à vrai dire, pouvaient difficilement mettre à genoux un pays avec de telles ressources.
02:26 Le but du jeu c'était de compliquer l'effort militaire.
02:31 Mais c'est vrai que son discours d'hier, il a présenté une situation où à la fois
02:35 il est toujours dans sa vieille paranoïa que tout est de la faute des occidentaux,
02:39 que l'Occident veut détruire toutes les identités nationales en dehors,
02:44 et il a présenté une situation militaire un peu enjolivée quand même,
02:47 même si effectivement l'armée russe progresse sur 4 ou 5 points.
02:52 Voilà, il présente un programme pour sa présidentielle où le résultat est connu,
02:56 il est déjà déposé au coffre, 80%.
02:58 - Qu'est-ce qu'il nous dit ? Il nous dit "le vieux continent européen est soumis aux américains".
03:02 C'est le message, l'éternel message, toujours le même message.
03:06 Ce qui n'est pas d'ailleurs totalement faux.
03:08 Entre parenthèses.
03:09 Je voudrais faire une comparaison, réfléchissez avec moi.
03:13 Quand même, si l'on pense bien à la situation,
03:16 nous avons d'un côté un homme fort, un autocrate,
03:20 qui s'appelle Vladimir Poutine, et de l'autre côté de l'Atlantique,
03:24 nous avons quand même une démocratie où les deux candidats ont affaire à la justice.
03:31 Les deux candidats potentiels, qui sont Biden et Trump.
03:33 C'est quand même extraordinaire.
03:36 Alors il peut dire "regardez ce qui se passe ailleurs".
03:38 - Indirectement, Vladimir Poutine est aussi un peu soumis à la justice, certes internationale.
03:42 - Oui, c'est vrai.
03:44 - Il peut se faire avec des problèmes de justice, mais surtout différents.
03:47 - Globalement c'est vrai.
03:49 Mais les démocraties ont un avantage et un inconvénient.
03:52 C'est que oui, c'est le peuple en principe qui décide et qui élit.
03:55 Et de l'autre côté, quand il y a quelques affaires un peu troubles,
04:00 on les met sur la place publique et ça affaiblit le principe de décision.
04:03 Aujourd'hui, voilà le problème, c'est qu'aujourd'hui, pour décider,
04:05 et vous parlez des Etats-Unis, mais parlons d'Europe.
04:07 L'Europe a 27. Comment voulez-vous obtenir facilement une décision en 27 ?
04:10 Même à 1, ils ont du mal aux Etats-Unis.
04:12 - Ce n'est pas l'Europe, l'Union Européenne a 27.
04:14 - Alors j'allais y venir. L'Union Européenne a 27.
04:17 Vous voulez y ajouter quelque chose ?
04:19 - Non, juste pour que les Etats-Unis et la Russie...
04:21 - Ils ne risquent pas d'avoir des soucis avec la justice russe, c'est sûr.
04:23 - Non, ça c'est certain.
04:25 Bien, l'Union Européenne a 27.
04:27 Difficile, si difficile.
04:29 On a vu hier ce qui s'est passé,
04:31 ce qui se passe en ce moment au Conseil dans la Nuit,
04:35 dans ce sommet européen.
04:39 On a vu tout à coup l'ouverture, enfin le prolongement de négociations d'adhésion à l'Ukraine approuvée.
04:47 Orban a quitté la pièce discrètement au moment du vote, pour s'abstenir.
04:53 Il est allé dans une pièce à côté, puis il est revenu après.
04:55 Mais en revanche, lorsqu'il a fallu voter les 50 milliards d'aides,
04:59 il a posé son veto tout de suite.
05:01 C'est l'homme de Poutine, Orban.
05:05 - Est-ce que c'est l'homme de Poutine ? C'est là que tout peut se poser.
05:07 - C'est pas très clair aujourd'hui, il faut le reconnaître.
05:09 En revanche, qu'il se soit posé aux 50 milliards qui vont être donnés sur 4 ans, 12 milliards et demi par an,
05:13 à quoi doivent-ils servir ? En principe, à éviter que l'État ukrainien s'effondre.
05:15 N'oublions pas que ce ne sont pas des questions militaires qui sont abordées, à ma connaissance.
05:19 Ce n'est pas un budget militaire, c'est un budget pour éviter que l'État ukrainien s'effondre,
05:23 vu la situation dans laquelle cet État est.
05:25 Donc, la question est fraîche. On ne sait pas très bien si effectivement Poutine est derrière Orban.
05:29 C'est extrêmement difficile. Je pense quand même qu'Orban a des intérêts nationaux,
05:33 et qu'il les défend avec toutes les armes qu'il a à sa possession.
05:36 - Il a peut-être l'idée de reconquérir une partie du territoire ukrainien ?
05:40 Ou il y a des hongrois ?
05:42 - Non, non, non, c'est difficile.
05:44 En revanche, d'abord, il s'est abstenu, alors qu'il aurait pu bloquer.
05:49 - Il s'est abstenu parce qu'on lui a versé des milliards d'euros, parce que l'Union européenne lui a versé des milliards d'euros.
05:53 - Ah mais parce que c'est des deals. Donc effectivement, le résultat politique,
05:57 c'est quand même un gain pour l'Ukraine qui en avait besoin,
05:59 d'autant plus que l'aide américaine est elle aussi en suspens.
06:03 Mais on en reparlera en janvier.
06:05 Tant l'aide européenne que l'aide américaine, c'est en janvier qu'il y a un deuxième round.
06:09 Mais c'est vrai qu'Orban, qui aurait pu bloquer en échange de l'argent,
06:12 tout ça c'est des transactions, il a laissé passer.
06:16 Et puis il montre ensuite, en bloquant l'aide budgétaire,
06:19 qu'il a encore un petit pouvoir de nuisance et qu'il va falloir être gentil avec lui.
06:22 Est-ce que c'est au passage l'homme de Poutine ?
06:25 Il y a quand même un élément qui est troublant,
06:26 parce que même s'il défend légitimement les intérêts de son pays,
06:29 qui sont quand même, sur le plan de la politique étrangère,
06:32 antagonistes de celles des 26 autres,
06:34 par exemple il a été à Washington récemment pour faire du lobbying
06:37 auprès des grands dirigeants républicains,
06:40 pour qu'il n'y ait pas d'aide à l'Ukraine.
06:42 Et on a envie de lui dire "mais de quoi tu t'occupes ?
06:44 Si tu n'aimes pas ça, n'en dégoûte pas les autres !"
06:46 C'est-à-dire que là, il était quand même une mission
06:48 qui ressemblait un peu à un petit télégraphiste du Kremlin.
06:51 Donc sur certains aspects, il va au-delà de la défense de son pays.
06:55 - Mais est-ce que l'Union Européenne peut fonctionner comme ça ?
06:58 En son sein, un et deux peut-être avec le leader slovak.
07:03 Avec deux dirigeants qui sont opposés
07:08 à la ligne de conduite choisie par l'Union Européenne.
07:11 - L'Union Européenne étant un organisme avec des démocraties,
07:16 il faut accepter que dans chaque pays,
07:18 on vote en fonction de certains critères,
07:20 et que finalement, puisqu'on doit avoir l'unanimité pour les décisions,
07:23 on peut avoir des éléments de contradiction.
07:26 Mais pensons à l'OTAN.
07:27 On supporte bien la Turquie depuis des années,
07:29 qui s'oppose à une politique générale.
07:31 Le problème peut-être dans tous ces organismes,
07:33 c'est qu'on ne prévoit pas forcément clairement
07:35 comment exclure quelqu'un qui ne satisferait pas les règles.
07:38 Et c'est la vraie question.
07:39 Comment exclure un État qui ne marche pas dans le sens commun ?
07:42 - Vous pensez qu'une Union Européenne devrait exclure la Hongrie ?
07:44 - Je dirais que c'est une possibilité
07:46 qui n'aurait pas dû être exclue,
07:48 au moins dans les textes, d'une manière claire.
07:50 Et pas uniquement par le simple désir de quitter quand on le désire,
07:53 comme c'est fait pour la Grande-Bretagne.
07:55 - Je n'irais pas jusque-là, parce que ce serait punir un pays
07:57 à cause d'un régime qui n'est pas éternel.
07:59 Donc non, l'exclusion, c'est pas forcément...
08:01 Parce qu'après, tout le tricot s'en va.
08:03 On en exclut un, puis deux,
08:05 et pour des raisons de moins en moins importantes.
08:07 En revanche, ça pose la question du droit de veto.
08:09 C'est-à-dire qu'il est légitime qu'il y ait des veto,
08:11 qu'il y ait l'unanimité, pour des questions existentielles.
08:13 Par exemple, vous citiez l'OTAN.
08:15 Tout le monde, l'Islande a autant de voix
08:17 pour certains sujets que les États-Unis.
08:19 Parce que, mine de rien,
08:21 savoir si on va risquer la vie de vos soldats tous ensemble,
08:23 c'est existentiel.
08:25 Donc, dans l'Europe, il est normal qu'il y ait un veto
08:27 pour les questions existentielles.
08:29 Et là, l'aide de 50 milliards à l'Ukraine,
08:31 pour moi, je ne crois pas que ce soit existentiel.
08:33 Donc le veto de la Hongrie peut se discuter.
08:35 Il faudrait peut-être que le veto soit réservé
08:37 à moins de questions.
08:39 - Bien. On va continuer ce débat.
08:41 Une petite pause. À tout de suite.
08:43 - Vérissure, l'Ukraine,
08:45 à tout de suite.
08:47 - Vérissure, le numéro 1 des alarmes en France.
08:49 Rendez-vous sur verissure.fr pour votre demande de vie gratuite.
08:51 Vérissure présente...
08:53 - Sud Radio,
08:55 Parlons vrai chez Bourdin.
08:57 9h10, Jean-Jacques Bourdin.
08:59 - Bien, 9h47.
09:01 Ce matin, vous allez me dire ce que vous en pensez.
09:03 Je recevais Raphaël Glucksmann.
09:05 Il me disait que...
09:07 Moi, je me souviens de Thierry Breton promettant
09:09 que toute l'Europe allait fabriquer des munitions
09:11 pour les Ukrainiens.
09:13 Il paraît que 30% seulement de ces munitions
09:15 arrivent aux Ukrainiens, que le reste est vendu.
09:17 - Oui, mais c'est parce qu'il y a des marchés.
09:19 Il y a des contrats qui ont été passés avec d'autres Etats.
09:21 - Oui, mais il ne faut pas dire que toutes les munitions,
09:23 que l'Europe va investir tant pour les munitions pour les Ukrainiens.
09:27 - On ne pourrait pas empêcher la communication politique
09:29 de faire des effets d'annonce.
09:31 En revanche, ça veut dire aussi,
09:33 parce que je crois que c'est en cours, c'est de renforcer
09:35 la capacité industrielle de produire des munitions,
09:37 mais ça ne se fait pas du jour au lendemain.
09:39 Donc je dirais que là, les munitions qu'on attend,
09:41 elles ne seront pas là avant des mois et des mois.
09:43 C'est ça peut-être la vraie problématique de ce conflit.
09:45 On peut promettre, on peut amorcer quelque chose,
09:47 mais en fait, dans le temps long,
09:49 on va être un peu ennuyés.
09:51 - Est-ce que vous pensez que l'Ukraine peut perdre la guerre ?
09:53 - Alors maintenant, c'est effectivement devenu,
09:55 c'est une hypothèse qui semblait difficile à envisager,
09:57 mais c'est vrai que depuis quelques semaines,
09:59 comme l'armée russe avance et qu'il y a une pénurie
10:01 de munitions, notamment, moi j'avais des contacts
10:03 sur le front qui expliquaient qu'ils tiraient
10:05 deux obus de mortier par jour,
10:07 là où ils en tiraient 20 ou 30 auparavant.
10:09 Donc c'est une hypothèse crédible,
10:11 très différente de celle de l'été dernier,
10:13 à cause notamment sur les armements
10:15 que vous venez d'évoquer.
10:17 Le problème, c'est pas que les armements,
10:19 les munitions vont à tel client
10:21 plutôt qu'à l'Ukraine, c'est surtout
10:23 qu'il y a un goulot d'étranglement
10:25 dans les industries occidentales,
10:27 notamment sur les obus bêtes et méchants.
10:29 C'est-à-dire qu'effectivement, on peut fournir
10:31 des munitions et des armements sophistiqués,
10:33 on a vu les chars Abrams, les Léopards,
10:35 les Abrams ne sont d'ailleurs pas déployés
10:37 dans la ligne de front. - Pour tous les systèmes
10:39 patriotes ou autres, anti-missiles. J'ai vu que l'Allemagne
10:41 avait fourni à l'Ukraine un système patriote.
10:43 - Il y en a un nouveau qui vient d'être annoncé hier soir.
10:45 En revanche, l'obus de 155 mm
10:47 dotation autant, il en faut
10:49 des centaines de milliers, et là,
10:51 on n'arrive pas à suivre la cadence nécessaire
10:53 et c'est un des grands problèmes d'aujourd'hui.
10:55 - Alors pourquoi dites-vous que l'Ukraine peut perdre la guerre ?
10:57 - Moi je ne prends que le terrain
10:59 et ce qui remonte du terrain.
11:01 Dès lors qu'il y a un problème de munitions,
11:03 qu'il y a un problème de ressources humaines,
11:05 on peut quand même évacuer cette problématique.
11:07 Je ne crois pas qu'une guerre puisse être gagnée uniquement
11:09 avec des équipements militaires. Elle peut être gagnée aussi
11:11 avec les hommes qu'on met sur le terrain,
11:13 qui sont la matière première d'un conflit.
11:15 Or, aujourd'hui, même si on ne donne pas les chiffres,
11:17 on sait qu'il y a des dizaines de milliers de morts du côté ukrainien
11:19 et que sur 1000 km de front, face à la pression russe,
11:21 qui de ce côté-là,
11:23 les Russies sont capables de mettre des effectifs énormes
11:25 sur le terrain. Alors qu'est-ce qu'a dit Poutine hier ?
11:27 En gros, qu'il y avait 600 000 hommes, aujourd'hui, en Ukraine.
11:29 De l'autre côté, il n'y en a pas autant.
11:31 Donc, il y a une vraie difficulté.
11:33 Pour moi, l'Ukraine peut perdre la guerre,
11:35 simplement parce qu'elle ne va pas être capable de suivre
11:37 dans la durée, d'abord en effectifs,
11:39 et puis, bien sûr, ce qu'on vient d'évoquer en termes d'équipements.
11:41 Il faut que les deux aillent ensemble. Aujourd'hui, manifestement,
11:43 de ce qu'on sait aujourd'hui,
11:45 on voit mal comment l'Ukraine pourrait, finalement,
11:47 ne pas perdre cette guerre, à la condition de définir
11:49 ce que c'est que de perdre une guerre ou de la gagner.
11:51 Ne voyons pas que l'objectif politique, c'est ce qui conduit la guerre.
11:53 Et l'objectif politique ukrainien, c'est quoi ?
11:55 Les frontières de 1991.
11:57 On peut croire aujourd'hui que l'Ukraine soit en mesure
11:59 de récupérer ses frontières de 1991.
12:01 - Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que l'Ukraine pourrait négocier
12:03 sur les nouvelles frontières ?
12:05 - Alors, je ne me mettrais pas à la place des Ukrainiens,
12:07 vous allez me faire insulter,
12:09 mais normalement, c'est normal, c'est eux qui font la guerre,
12:11 c'est eux qui payent le prix du sang. Maintenant, effectivement,
12:13 c'est plutôt une décision politique plus que militaire,
12:15 mais le politique devra s'appuyer sur la situation militaire,
12:18 que d'ailleurs, le général Zaloujny a bien évoqué
12:20 il y a quelques semaines.
12:22 - D'ailleurs, il est très clair, Zaloujny,
12:24 il mécontente un peu Volodymyr Zelensky,
12:27 le chef d'état-major de l'armée ukrainienne,
12:29 mais il est très clair.
12:31 - Oui, il a besoin de munitions supplémentaires,
12:33 il l'a dit effectivement dans cette interview célèbre,
12:35 mais au passage, quand même,
12:37 il y a un double souci, c'est que d'abord,
12:39 l'idée que l'Ukraine puisse perdre la guerre,
12:41 il faut voir aussi que ça correspond au narratif
12:43 à la fois triomphaliste de Poutine,
12:45 mais aussi un peu, Zelensky,
12:47 à intérêt à dramatiser et à dire aux Etats-Unis,
12:50 "Attention, si vous ne m'aidez pas, on risque de perdre."
12:52 Et ça sera dramatique pour vous,
12:54 parce qu'il ne faut pas non plus se raconter d'histoire.
12:56 - Il faut dire le communication, bien sûr.
12:58 - On abandonne un peu des territoires,
13:00 et ensuite c'est la paix, et très illusoire,
13:02 Poutine lui-même l'a redit hier, lui,
13:04 en fait, ce qu'il veut, c'est toute l'Ukraine.
13:06 C'est une réédition totale, avec des conséquences majeures.
13:08 - Il veut une Ukraine neutre, dit-il.
13:10 - Oui, enfin, avec beaucoup...
13:12 - Dénazifier, toujours le même discours.
13:14 Dénazifier avec une Ukraine neutre.
13:16 - Avec des territoires annexés supplémentaires,
13:18 enfin, on n'arrête plus.
13:20 - Faire comprendre à ces alliés occidentaux
13:22 que ce qui est en jeu, c'est beaucoup plus que de savoir
13:24 s'il va abandonner la Crimée ou le Donbass.
13:26 Les enjeux sont plus importants,
13:28 et c'est là où ça se joue ou se perd,
13:30 dans les semaines qui viennent,
13:32 aux Etats-Unis, si Biden
13:34 passe un deal avec le Sénat,
13:36 avec les Républicains, pour débloquer cette aide
13:38 cruciale de 60 milliards.
13:40 - Est-ce que vous pensez que les Américains continueront leur soutien ?
13:42 Je vous dis ça parce que l'histoire nous a appris
13:44 que les Américains abandonnaient souvent le terrain.
13:46 Ils ont abandonné les Irakiens,
13:48 ils ont abandonné les Afghans,
13:50 ils ont abandonné les Kurdes, et d'autres.
13:52 - C'est un risque,
13:54 mais je ne crois pas que les Américains, aujourd'hui,
13:56 cesseront leur aide.
13:58 Ils vont trouver un arrangement, enfin, je le pense,
14:00 pour une raison très simple, c'est qu'il y a un principe
14:02 qu'ils défendent à tout prix,
14:04 c'est le respect des frontières, bien entendu,
14:06 et le principe de non-agression,
14:08 le refus de l'agression par un État.
14:10 Donc je crois qu'à partir des principes,
14:12 je ne vois pas comment ils pourraient se désengager.
14:14 Maintenant, à un moment donné, le problème se posera,
14:16 mais en termes financiers, 60 milliards, ce n'est pas rien,
14:18 sachant en plus être une enveloppe qui touche beaucoup d'autres choses,
14:20 et notamment le re-complètement de tous les équipements
14:22 de l'armée américaine qui ont été donnés aux Ukrainiens,
14:24 d'une valeur en gros de 18 milliards,
14:26 en plus qui s'ajoute aux 60 milliards.
14:28 Donc, il y a aussi la capacité de demain,
14:30 pour l'armée américaine, de soutenir un autre front,
14:32 notamment en Asie.
14:34 Donc tout ceci est quand même dans la balance.
14:36 - Oui, mais cela dit, alors les 60 milliards, c'est un chiffre énorme,
14:38 mais rapporté au budget de 840 milliards
14:40 du Pentagone, plus encore d'autres choses,
14:42 en fait, ça représente 5%
14:44 sur deux ans tout cela,
14:46 ça représente 5% du budget du Pentagone,
14:48 tout ça pour aider un pays à détruire
14:50 une grande partie de l'armée,
14:52 de l'ennemi, depuis le début de la
14:54 guerre froide. Donc, sur le plan
14:56 budgétaire, ce n'est pas si énorme que ça,
14:58 tout ça sans risquer la vie d'un seul Boyce.
15:00 Et puis ce qui est en jeu aussi, c'est la crédibilité
15:02 de l'OTAN, c'est-à-dire que si après
15:04 avoir aidé l'Ukraine, à la limite on aurait laissé tomber
15:06 l'Ukraine, ce serait un autre scénario,
15:08 mais l'OTAN s'est mis à fond
15:10 derrière l'Ukraine, sans risquer
15:12 la vie de ses soldats, et maintenant
15:14 s'il les laisse tomber, Poutine va se dire
15:16 "Eh bien finalement, l'article 5 de l'OTAN,
15:18 l'alliance de l'OTAN, ça se dégonfle
15:20 au moindre prétexte,
15:22 je vais peut-être pouvoir envahir un peu les Baltes
15:24 ou la Pologne, en face les Etats-Unis
15:26 ne feront pas grand-chose". Donc il y a cet enjeu-là
15:28 à Washington, une partie de
15:30 l'establishment militaire sécuritaire américain
15:32 en a conscience. - Oui, il n'y a pas que l'OTAN, puisque la première
15:34 question qui a été posée aujourd'hui, c'était l'Union Européenne.
15:36 Voyons par l'article 42.7,
15:38 qui est finalement l'article 5 de l'OTAN, qui permet
15:40 aux Européens de défendre un Etat membre.
15:42 Et les Etats-Baltes et la Pologne sont des Etats-membres.
15:44 Mais la question est, est-ce que nous,
15:46 nous serions capables d'aller nous battre pour défendre ces pays ?
15:48 Et ça, c'est une vraie question. - Envoyer des soldats
15:50 et mourir, nous battre et mourir. - Oui, tout à fait.
15:52 - Et risquer de mourir. Aujourd'hui,
15:54 j'en doute, je vous le dis tout de suite, j'en doute.
15:56 - Il faut quand même savoir que... - D'ailleurs, c'est la faiblesse des Occidentaux,
15:58 pardon, qui ne veulent plus perdre,
16:00 qui n'acceptent plus
16:02 de perdre un soldat. - C'est vrai, mais d'un autre
16:04 côté, je dirais entre guillemets, heureusement qu'on a
16:06 des armées professionnelles qui permettent d'éviter d'avoir des cas
16:08 de conscience dans une opinion publique, et ce qui nous
16:10 permet de déployer des forces en Roumanie,
16:12 françaises en particulier, mais pas uniquement, dans les Etats-Baltes,
16:14 pour protéger l'espace aérien. C'est-à-dire que
16:16 les forces françaises et européennes sont présentes,
16:18 il n'y a pas que les Américains. - Heureusement que nous avons une armée
16:20 professionnelle, vous voulez dire, par là.
16:22 - Oui, mais l'Ukraine nous apprend que
16:24 être capable de mobiliser des ressources supplémentaires
16:26 ne serait pas inutile. L'armée
16:28 professionnelle, on l'a vu en Ukraine, a été complètement
16:30 laminée après deux ans de guerre,
16:32 et qu'aujourd'hui, la mobilisation est une nécessité pour
16:34 remplacer les effectifs. Il y a un moment où l'armée professionnelle
16:36 n'est plus assez nombreuse pour tenir une
16:38 guerre longue, et cette problématique saura se soulever
16:40 un jour ou l'autre, parce que l'Ukraine, c'est ce qu'elle nous apprend
16:42 aujourd'hui. Quand je parlais tout à l'heure du problème
16:44 des ressources humaines pour l'armée ukrainienne,
16:46 elle a réussi à faire face des ressources humaines d'ailleurs
16:48 par la mobilisation, et sinon
16:50 aussi par une part de conscription,
16:52 et ce qu'on n'a plus. - Un mot pour boucler
16:54 la boucle. Orban, lui, se rêve
16:56 en négociateur.
16:58 Il rêve qu'on vienne
17:00 à Budapest, que les Russes
17:02 et les Ukrainiens se retrouvent à Budapest,
17:04 avec toutes les parties prenantes autour d'une table.
17:06 Il serait le faiseur de paix.
17:08 - Il peut rêver, mais ce sera difficile, parce que
17:10 pour être négociateur, il faut être accrédité
17:12 par les deux parties. Or, là,
17:14 les Ukrainiens ne vont pas le prendre comme un
17:16 médiateur neutre. Donc, en fait, le seul
17:18 qui a réussi à s'imposer, parce que d'autres ont essayé,
17:20 comme Israël, et qui maintenant a des relations
17:22 épouvantables avec Poutine, parce que
17:24 Poutine, dans son discours d'hier, il a quand même
17:26 dit deux ou trois choses sur Israël, sur l'Arménie,
17:28 etc., qui montrent que, d'ailleurs,
17:30 c'est assez troublant, parce que c'était des
17:32 alliés traditionnels. Mais le seul qui
17:34 finalement s'est imposé, c'est la Turquie d'Erdogan.
17:36 Parce que c'est eux qui ont
17:38 négocié des échanges de prisonniers,
17:40 des accords qui, d'ailleurs,
17:42 ont finalement échoué sur
17:44 les céréales. Donc, non, ça sera pas
17:46 Orban, le médiateur. - Bien, merci,
17:48 messieurs. Merci. Passionnante
17:50 réflexion autour de ce qui se passe, et
17:52 on va continuer à s'y intéresser,
17:54 évidemment. Merci beaucoup. Il est
17:56 9h56. Dans un instant,
17:58 Sud Radio Média, Valérie Rixperger, Gansman,
18:00 reçoivent l'animateur et producteur
18:02 Thierry Ardisson.
18:04 - Sud Radio, parlons
18:06 vrai chez Bourdin. 9h10,
18:08 Jean-Jacques Bourdin.
18:10 - Avec Vérissure, le numéro 1 des alarmes
18:12 en France. Rendez-vous sur verissure.fr
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