Chaque jour, Céline Géraud et ses invités font un point complet sur l'actualité.
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00:00 - Europe 1/13h, la suite sur Europe 1 avec vos deux chroniqueurs. Céline, le débat se poursuit.
00:04 Charlotte Dornelas, journaliste au journal du dimanche chez Georges Fenech, ancien juge d'instruction.
00:09 - Et William Molligny, spécialiste police-justice à Europe 1.
00:11 On continue à parler de cette opération d'envergure, opération PlaceNet XXL à Marseille,
00:16 la visite surprise d'Emmanuel Macron, la déclaration du règle du pomoréti dans quelques instants.
00:21 Mais tout de suite, c'est Annie qui nous écoute dans l'Ain, qui nous appelle. Bonjour !
00:25 - Bonjour !
00:27 - Grand merci de nous appeler, Europe 1/13h. Je voulais réagir sur ce sujet de la drogue et des consommateurs aussi.
00:36 - Voilà, oui, moi, il me semble que tant qu'on ne va pas s'attaquer aux consommateurs,
00:43 s'il n'y avait pas de consommateurs, il n'y aurait pas de petits dealers.
00:46 Il me semble que, c'est vrai comme dit Dupont, M. Dupont de Moretti,
00:51 dans les grandes villes, il y a certains petits jeunes bien établis qui s'amusent à se droguer,
01:01 qui montrent de mauvais exemples et ils ne sont jamais attaqués.
01:06 Alors, ça peut durer comme ça pendant des siècles.
01:10 - Merci Annie, effectivement, vous avez raison, il faut s'attaquer sans doute aussi aux consommateurs
01:15 et c'est tout l'enjeu de la discussion que nous allons avoir maintenant,
01:18 puisque je reprends les propos d'Éric Dupont Moretti qui était invité ce matin chez nos confrères de RMC.
01:24 "Le petit pétard fumé par le Bobo du samedi soir a le goût du sang séché sur le trottoir."
01:29 Charlotte d'Ornellas ?
01:31 - Oui, c'est vrai pour le petit Bobo, j'ai pas l'habitude de prendre leur défense,
01:35 mais maintenant la consommation de cannabis dépasse largement les frontières de Boboland, si je puis me permettre.
01:39 - Je crois qu'on est le pays où on en consomme le plus en Europe 1 ?
01:41 - Oui, mais le cannabis c'est vraiment à peu près partout, même en territoire euro.
01:46 D'ailleurs on voit il y a un rattrapage total, et même sur la question de la coke.
01:49 Donc le cannabis, il y a eu non seulement une acceptation,
01:53 en fait ce qu'il faut voir c'est que même la justice et les magistrats l'expliquaient très bien la semaine dernière,
01:58 ils sont déjà dépassés dans la répression des trafiquants, des dealers et des têtes de raison,
02:03 comme expliquait William, c'est après un très long travail d'enquête que vous arrivez à taper une tête de réseau,
02:09 ce qui est d'ailleurs parfois rendu extrêmement compliqué par une présence massive et permanente sur le terrain,
02:15 et le pilonnage des points de l'île, ça complique le travail d'enquête,
02:18 donc vous voyez que c'est un dosage qui n'est pas évident.
02:20 Déjà ça c'est extrêmement compliqué pour la justice,
02:23 donc sur la question du consommateur on a mis en place ces fameuses amendes forfaitaires,
02:27 mais les amendes en fait certains s'arrangent plus en les réglant qu'autre chose,
02:34 et évidemment il a raison, mais simplement là c'est aussi un retournement dans notre manière de le concevoir.
02:39 C'est-à-dire que la question du cannabis, maintenant qu'énormément de personnes,
02:44 et je pèse mes mots, c'est vraiment une partie massive de la population partout sur le territoire qui consomme du cannabis,
02:51 après des années de relativisme cool sur la consommation...
02:54 - Alors il y a un côté festif, il y a plusieurs façons de le consommer...
02:56 - Déjà on nous a expliqué pendant des années que c'était une drogue douce,
02:59 il faut voir quand même dans les cabinets de médecins les effets du cannabis,
03:02 notamment sur le cerveau des plus jeunes, pour voir que je ne sais pas qui a trouvé que c'était doux,
03:06 peut-être par rapport à l'héroïne ou à la cocaïne,
03:09 mais déjà cette terminologie était déjà relativiste dans la manière de le présenter,
03:16 et puis il y a aussi en effet un côté cool et festif qui a été porté,
03:20 alors là je rejoins Eric Dupond-Moretti, par des milieux plutôt bobos,
03:23 et voire culturels même dans la manière de l'accepter.
03:27 - Ou il parle de petits bourgeois aussi...
03:29 - Oui c'est ça, mais tant mieux si on le fait,
03:32 maintenant si c'est juste du déclaratif à la télé, on tape sur le petit bourgeois pour expliquer que la drogue
03:37 ce n'est pas simplement une affaire de cité, il faut aller un peu plus loin que ça,
03:40 on va dire dans la volonté de frapper, mais moi je n'ai aucun problème en effet
03:44 à ce que le consommateur soit sanctionné, parce que là où il a raison,
03:47 c'est que tous ceux qui participent de ce trafic, on le sent de ces gamins de 13 ans,
03:51 les fameux petits jobbeurs qui sont sur les points de deal,
03:53 qui se font jambiser, qui se font parfois même tuer,
03:56 pour le compte de ceux qui consomment, ça c'est un discours de fait.
03:59 - La législation sur les drogues, c'est la loi du 31 décembre 1970,
04:04 donc plus de 50 ans, plus d'un demi-siècle,
04:06 et en réalité, elle se fonde sur deux piliers,
04:09 lutte contre la criminalité, le trafic, et le problème de santé publique, les usagers.
04:15 Il ne faut pas oublier cette dimension de santé publique.
04:18 Je vous parle d'expérience, moi pendant 10 ans,
04:20 donc j'ai été jeune instruction spécialisée dans la lutte contre les stupéfiants à Lyon,
04:23 Dieu sait c'était une place aussi concernée par le trafic.
04:26 Comment je procédais ? Je vous assure qu'en 10 ans,
04:29 je n'ai jamais incarcéré un seul usager de stupéfiants.
04:33 Jamais. - Ah bon ?
04:34 - Comment je procédais à l'époque ?
04:36 Je placais sous contrôle judiciaire,
04:38 avec injonction de soins, qui est prévue par la loi 1970.
04:41 Ordonnance, injonction de soins.
04:43 Il est obligé d'aller voir un médecin,
04:45 le médecin le prend en charge, voit quelle est son addiction,
04:48 s'il a besoin d'un traitement, et je le confie à une association.
04:51 Et régulièrement, je rencontrais les associations
04:55 qui me tenaient au courant de l'évolution du toxicomane.
04:58 Est-ce qu'il s'en sortait, est-ce qu'il avait un hébergement,
05:00 est-ce qu'il suivait bien son médecin, quelquefois un psychologue,
05:04 quelquefois ça relevait simplement d'un médecin psychologue,
05:07 ou d'un expert,
05:09 et on arrivait comme ça petit à petit,
05:11 avec un suivi en profondeur,
05:13 ça demande des moyens, et de l'investissement,
05:15 à éloigner le consommateur du produit stupéfiant.
05:19 Ce n'est pas en mettant une amende forfaitaire,
05:22 que vous allez sortir.
05:23 - Donc vous êtes plutôt sur la pédagogie plutôt que la répression financière.
05:25 - Mais parce que ce sont des malades.
05:27 Un dealer, il est à la fois usager, revendeur,
05:31 mais il est aussi malade, malade de sa toxicomanie,
05:34 il a des besoins,
05:36 et ça c'est un problème de santé publique.
05:38 Il faut le prendre dans cette dimension-là,
05:40 et pas avec une amende forfaitaire,
05:42 parce que les causes resteront les mêmes.
05:46 - Je voulais juste rappeler que l'AFD,
05:48 qui est l'amende forfaitaire,
05:50 qui a été présentée comme une réponse
05:54 au trafic de stupéfiants,
05:57 en fait pas du tout.
05:58 L'AFD c'est une réponse au...
06:00 - Manque d'ordres.
06:02 - Une réponse au travail de la police,
06:05 c'est-à-dire à l'encombrement des procédures,
06:07 et finalement plutôt que de faire une procédure qui serait longue,
06:10 on met une amende.
06:12 C'est uniquement une façon de traiter un contentieux de masse,
06:15 de masse et non pas du tout de répondre à une problématique de stupéfiants.