• il y a 7 mois
Jacques Pessis reçoit Nicoletta : elle fête ses 80 printemps c’est-à-dire ses 20 ans et quatre fois plutôt qu’une. Une intégrale réunit 308 chansons parmi lesquelles des couplets inédits.

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##LES_CLEFS_D_UNE_VIE-2024-04-22##

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News
Transcription
00:00 Sud Radio, les clés d'une vie. Jacques Pessis.
00:03 Les clés d'une vie, celles de mon invité.
00:05 Votre voix vous a ouvert un chemin qui s'est transformé en une longue route enchantée.
00:10 Elle se poursuit aujourd'hui.
00:12 Pour l'État civil, vous fêtez vos 80 printemps.
00:15 Pour le public, vous avez toujours 20 ans et 4 fois plus aucune.
00:19 Bonjour Nicoletta.
00:20 Bonjour.
00:21 Quel est le secret de votre jeunesse éternelle ?
00:23 C'est incroyable, vous n'avez pas changé.
00:24 Je suis souvent de bonne humeur.
00:26 Voilà.
00:26 Je calcule la gaieté, la joie de vivre surtout.
00:30 Parce que je trouve que dans ce bas monde, il y a des millions de gens.
00:34 Et je ne suis pas la plus malheureuse.
00:37 J'ai beaucoup de chance.
00:38 Et j'apprécie ce que le sort m'offre.
00:41 Chaque matin, je me dis, ah, à nous deux, quelle journée je vais bien passer.
00:45 Eh bien, ce soir, on va passer un moment ensemble avec la joie de vous écouter.
00:48 Parce qu'il y a une intégrale de vos chansons qui sort.
00:52 On va en parler tout à l'heure. C'est un événement.
00:54 Et puis, bien sûr, les clés d'une vie, c'est votre parcours.
00:57 Vous êtes déjà venue, mais j'ai déjà trouvé d'autres choses sur vous
01:00 pour évoquer ce parcours et des dates.
01:03 4 mars 1991, c'est une semaine sur le thème de l'école à la télévision
01:07 où vous êtes pendant une semaine avec Vincent Perrault
01:10 pour évoquer l'école qui a quand même été un moment important de votre vie.
01:14 Oui, j'en ai vu beaucoup.
01:15 Vous vous souvenez de cette émission pendant une semaine ?
01:18 Exactement.
01:19 C'était "C'est pas juste".
01:20 Et vous étiez le témoin pour évoquer l'école et votre parcours.
01:26 Vos jeunes années à l'école, ça n'a pas été évident.
01:28 J'ai été rigolo.
01:30 L'école primaire, c'était parfait.
01:32 J'étais première jusqu'à ce que j'aille en quatrième.
01:37 Ça s'est gâté.
01:38 Oui, c'était dans un village et vous avez appris très vite à lire et à écrire.
01:42 Oui.
01:43 Et ensuite, il y avait une institutrice, Mme Hartig,
01:45 qui était vraiment la copine du village.
01:48 Elle était formidable, cette femme.
01:49 Elle disait toujours que ma copie était le dessert.
01:54 C'est gentil.
01:56 D'ailleurs, vous la rencontrez à la boulangerie régulièrement.
01:58 Chez ma marraine.
01:59 C'était la boulangère.
02:01 Parce que quand j'étais toute petite, ma grand-mère travaillant,
02:05 elle était matutrice, ma maman ne pouvait pas vraiment s'occuper de moi,
02:09 elle croyait que j'étais sa poupée.
02:10 Elle me mettait dans le landau, chez la boulangère.
02:14 Mais c'est vrai, on n'imagine pas la vie d'un village.
02:16 C'était Vongy, près de Tonon.
02:19 On dit Vongy, près de Tonon, tellement c'est près.
02:21 Et c'est une vie de village qu'on ne peut plus imaginer aujourd'hui, Nicoletta ?
02:24 Non, le village n'a pas changé au point de structure.
02:29 Il est même très fleuri parce que des tas de jeunes couples
02:32 rachètent les maisons, les vues disparaissent.
02:34 On n'est plus que 2-3 personnes, initiativement, du village.
02:38 Alors, ce sont des nouvelles gens, mais c'est sympa.
02:41 Il y a un tatoueur, c'est plein de gens étonnants.
02:47 Ils aiment beaucoup le village, ils l'entretiennent très bien.
02:51 Les maisons sont très fleuries et c'est un bonheur d'y retourner.
02:54 Vous y allez de temps en temps ?
02:55 J'y vais très souvent parce que j'ai deux maisons.
02:58 J'ai racheté la part indivisible de ma demi-sœur,
03:02 qui vient de ma grand-mère et j'ai hérité de l'autre partie.
03:05 Je vais me reposer au village.
03:08 Je vais y aller dans 15 jours.
03:10 Il y a des promenades en voilier qui m'attendent sur le Léman.
03:15 Ça, j'adore.
03:16 Ce qui est étonnant, c'est que c'est l'un des derniers villages de la région
03:19 à avoir encore une boucherie, une pharmacie, une friperie.
03:22 C'est assez étonnant parce qu'il est resté dans le jus.
03:25 Et quand on voit des images de l'époque,
03:27 on n'imagine pas ce qu'était un village à l'époque.
03:29 Vous savez, en Savoie et en Haute-Savoie,
03:31 il y a énormément de villages qui sont restés dans leur jus.
03:34 Vous quittez la côte du Léman, vous montez tout de suite,
03:38 vous allez dans l'arrière-pays.
03:40 Il y a vraiment quelques boutiques qui sont là depuis très longtemps.
03:44 Moi, je vais acheter tous mes fromages.
03:46 En montagne.
03:47 Parce que déjà, c'est moins cher que dans la plaine,
03:49 qu'en boutique, qu'en ville.
03:51 Et on est reçus merveilleusement bien.
03:53 Et les fromages de montagne sont magnifiques.
03:55 - Et en même temps, il y avait à l'époque une laiterie.
03:58 On ne peut pas imaginer une laiterie aujourd'hui.
04:00 - Oh là là, c'était terrible la laiterie.
04:03 On se rejoignait là.
04:05 À 12, 13 ans, on faisait des glissades.
04:07 Il y avait un chemin en pente devant la laiterie.
04:10 Et les fermiers ramenaient leur lait pour la peser.
04:13 Et nous, les enfants, on partait avec nos potes à lait
04:17 et on ramenait le lait frais à la maison.
04:19 Mais on faisait la queue.
04:20 Pendant qu'on faisait la queue, on faisait des glissades.
04:22 Et on glissait dessus.
04:25 On était contents.
04:26 Mais la laitière n'était pas contente du tout
04:29 parce que les grands-mères tombaient.
04:30 Ce n'était pas très intelligent.
04:32 Alors, elle mettait du sel rouge.
04:33 Ça avait du gros sel dessus.
04:35 On recommençait à côté.
04:37 Un bon souvenir.
04:38 - Voilà.
04:38 Alors, c'est l'époque où justement, votre grand-mère vous élevez
04:41 et vos grands-parents avaient des revenus modestes.
04:43 Je crois qu'ils travaillaient dans une usine de papier à cigarette.
04:46 - Oui, je vais dire carrément où.
04:48 Chez le père de M. Bolloré.
04:49 - C'est fou, hein ?
04:50 - Voilà.
04:51 - Et c'est vrai que c'était un métier à l'époque
04:53 où on faisait la pâte à cigarette à partir de pâte de bois, de fibre.
04:58 C'était un métier très difficile.
05:00 - Oui, je connais bien, Zine, parce que je portais les paniers.
05:04 Je portais la petite dinette de ma grand-mère quand elle travaillait.
05:07 Elle faisait 3,8.
05:08 Et je l'ai traversée.
05:09 Ce qui était fascinant, c'était ces gros lessiveurs
05:12 qui faisaient 1000 degrés et ils faisaient cuire le papier de bois
05:18 et le bois, parce qu'on faisait du papier avec, et les tissus.
05:23 - C'est extraordinaire.
05:24 - Et je voyais partir au bout d'un moment, la pâte passait en du chlore
05:29 et tout d'un coup, il y avait une turbine, tout, tout, tout,
05:32 le papier existait.
05:33 C'était fascinant.
05:33 - C'est extraordinaire.
05:34 Il y avait aussi à cette époque des moments fabuleux,
05:37 des moments plus difficiles.
05:38 Je crois que votre grand-mère a caché Django Reinhardt
05:42 pendant la guerre, Nicoletta.
05:43 - Oui, c'est très connu.
05:44 Elle avait des terres puisque ses parents étaient fermiers.
05:48 Elle prêtait ses terres à ses copains fermiers
05:50 parce qu'elle n'avait pas eu de frères.
05:52 Ils sont morts en bas âge, ses frères et ses parents sont morts en 40.
05:55 Alors elle louait ses terres.
05:57 Et elle a vu Django près du pont, en plein courant d'air,
06:00 avec ses roulottes.
06:01 Elle a dit "écoutez, c'est en 43,
06:04 vous ne pouvez pas rester là, venez, je vais vous montrer un endroit".
06:07 Elle l'a mis dans un chaussé-pommiers et ils sont restés un an.
06:11 Et malheureusement, elle a eu un très gros chagrin.
06:14 Il y a un médicien qui a tué un de ses fils, mon tonton.
06:17 C'était mon jeune parrain.
06:19 J'étais déjà née, j'avais cinq mois quand c'est arrivé.
06:21 C'était en août 44.
06:22 Un médicien a tué la nièce de Django et de mon oncle.
06:27 Ils avaient tous les deux 17 ans.
06:28 Et ça, ça a été terrible pour ma grand-mère
06:30 parce qu'elle avait déjà perdu un premier fils 15 jours avant
06:33 d'un éclat d'obus au Vercors.
06:34 Et ça, elle a eu son tourment au mois d'août toute sa vie.
06:39 - Il faut savoir pour votre culte ou il est personnel
06:41 qu'en fait, Django Reinhardt était à Paris,
06:43 il était sur la côte d'Azur, il cherchait à passer en Suisse.
06:45 Il est passé autonome et c'est comme ça qu'il s'est retrouvé chez votre grand-mère.
06:48 - Absolument.
06:49 - Alors, la chanson, je crois que ça a commencé à la chorale de l'église de Nicoleta.
06:53 - Oui, à huit ans.
06:54 J'étais très pieuse quand j'étais petite fille.
06:56 Il faut dire que je suis née juste à la fin de la guerre
06:59 et dans un village comme ça, tout le monde se connaissait,
07:04 tout le monde se respectait.
07:05 Il y avait un élan de fraternité, d'amitié extraordinaire.
07:09 Tous les enfants pouvaient rentrer dans n'importe quelle cuisine.
07:12 J'ai des souvenirs magnifiques.
07:13 On allait goûter chez n'importe qui, qu'on soit avec un des copains.
07:17 Et on nous donnait à manger.
07:18 Et j'allais au catéchisme et tous les enfants allaient au catéchisme.
07:23 Alors, le bon Dieu, c'était notre père, notre père, qu'est-ce que c'est que Dieu ?
07:28 Comme je n'avais pas de père, pour moi, Dieu le Père, c'était important.
07:32 Et j'ai eu une enfance très catholique, vraiment.
07:35 Alors j'allais évidemment à la chorale dès que j'ai pu y aller.
07:38 - Et ensuite, ça a été plus difficile quand vous êtes descendue, comme l'on dit, à la ville ?
07:42 Ou là, vous êtes allée de lycée en pension, de pension en école ?
07:45 - Ben la ville, oui.
07:48 C'est pas pareil.
07:50 C'est pas pareil que la vie d'un village.
07:52 Il y a moins de cohésion, il y a moins d'entente.
07:55 J'ai commencé à avoir des problèmes.
07:57 Alors je me suis intéressée des études dès la quatrième.
08:00 Je fichais rien.
08:02 J'étais déjà en vacances au mois de mai.
08:04 J'allais d'Issines au bord du lac.
08:06 Je prenais mes quartiers.
08:09 Mais je n'aimais pas trop la ville.
08:11 Je n'aimais pas trop.
08:12 - Et il y a une chanson d'ailleurs qui résume exactement ce parcours dans votre répertoire.
08:16 - Car ma vie, c'est un manège qui ne cessera jamais de tourner.
08:24 - Notre vie a été un manège depuis le jour où vous avez été déclarée majeure à 18 ans.
08:28 Parce qu'à l'époque, c'était 21 ans depuis Napoléon.
08:31 - Il y a 21 ans pour les femmes et 25 ans pour les hommes.
08:34 Et ensuite, en 1907, vous êtes devenue majeure et là, ça a commencé.
08:38 - J'ai été émancipée.
08:39 J'avais un juge de tutelle depuis ma naissance.
08:41 Tous les enfants qui sont sous tuteur ont un juge de tutelle.
08:45 Ils ont décidé avec ma grand-mère de me rendre ma liberté, de me donner ma liberté plutôt.
08:49 Et je voulais aller à la ville pour travailler.
08:52 Je ne trouvais pas un travail intéressant dans ma région.
08:53 Alors je suis montée à Paris, comme on dit.
08:57 Mais je ne suis pas venue à Paris.
08:59 Je suis venue à Saint-Germain-des-Prés.
09:01 Pour moi, je vais à Saint-Germain-des-Prés.
09:03 C'était pour moi le pays, le village légende où il y avait le jazz, les artistes, les peintres.
09:10 Je voulais connaître Saint-Germain.
09:11 Et c'est ce que j'ai fait.
09:12 - En vivant la nuit à Saint-Germain et en trouvant une chambre d'hôtel où vous dormiez de temps en temps ?
09:17 - Non, je travaillais quand même.
09:20 J'étais vestiaire dans une discothèque.
09:21 Ensuite, j'étais DJ.
09:23 Je gagnais 30 francs par nuit.
09:24 Mais à l'époque, 30 francs, c'était de l'argent.
09:27 Je mangeais avec 5 francs.
09:29 - C'est fou, hein ? - Oui.
09:30 - Et la discothèque, la musique vous intéressait par-dessus tout déjà ?
09:33 - Non, c'était un hasard.
09:35 J'aimais beaucoup danser et j'aimais beaucoup la musique.
09:37 Mais le fait de remplacer le DJ à la boîte où j'ai travaillé, où j'étais vestiaire, ça a été une découverte.
09:47 Je chantais sur les disques que je passais.
09:49 Je mettais de l'ambiance pour les dancefloors.
09:51 C'était extra.
09:53 Et déjà, à l'époque, les chanteurs venaient et demandaient que je passe sur le disque.
09:57 Il y avait Danel, il y avait Christophe, il y avait Hervé Villard, il y avait tous les chanteurs de l'époque.
10:02 Et voilà.
10:03 Et il y a aussi des orchestres qui étaient invités à jouer.
10:06 Et j'allais voir répéter les musiciens.
10:08 Et évidemment, j'attrapais les micros et je chantais avec eux jusqu'au jour où il y avait les musiciens de Nino Ferrer.
10:15 Ils m'ont fait avoir un rendez-vous avec le directeur de Nino.
10:19 Et c'est comme ça que j'ai été engagée chez Barclay.
10:21 - On va en parler justement.
10:23 Mais vous faisiez aussi tous les métiers.
10:24 Vous avez été femme de chambre, serveuse de pizzerie.
10:27 Il fallait gagner sa vie.
10:29 - Non, c'est-à-dire qu'on faisait mille petits métiers.
10:33 À l'époque, c'était facile parce que les gens nous engagaient, ils nous déclaraient pas.
10:38 On n'était même pas déclarés dans la boîte où je travaillais.
10:41 On nous donnait notre argent le matin avant qu'on rentre à l'hôtel.
10:44 Mais maintenant, il y a le concurrent qui observe.
10:47 Et si tu déclares pas le mot que tu engages, on te dénonce.
10:52 C'est pas la même période.
10:54 - Voilà.
10:55 Et à cette période aussi, il y a eu d'autres événements qui vous ont apporté beaucoup.
10:59 On va évoquer une autre date, le 11 avril 1967.
11:03 A tout de suite sur Sud Radio avec Nicoletta.
11:05 - Sud Radio, les clés d'une vie. Jacques Pessis.
11:08 - Sud Radio, les clés d'une vie.
11:10 Mon invité Nicoletta, 20 ans et 4 fois plutôt qu'une depuis quelques jours.
11:14 Une forme olympique, si j'ose dire.
11:17 Une intégrale qui sort avec 308 chansons, dont des inédits qu'on écoutera tout à l'heure.
11:22 Et puis des dates.
11:23 Et le 11 avril 1967, c'est la première fois que vous passez au cinéma.
11:26 Je sais pas si vous vous souvenez.
11:27 - Ah oui, c'était ce qu'on appelait les actualités.
11:30 - Les actualités avec cette chanson.
11:32 - Jamais il ne se coiffait, jamais il ne se lavait.
11:35 Les ongles pleins de cambouis, mais sur le bisex il avait un tatouage avec un capuchon.
11:40 - Alors, ce qui est étonnant, dans les salles de cinéma à l'époque,
11:43 il y avait les actualités, ce qui n'y a plus aujourd'hui.
11:45 Et il y a un reportage sur une jeune chanteuse d'avenir.
11:47 Et c'est une sorte de clip avant la lettre, puisque vous êtes avec des 4 motards.
11:51 - Mais c'était des motards du club Harley-Davidson de Paris.
11:56 Ils avaient bien voulu faire la mise en scène.
11:59 Et ça m'appelle une histoire, quand j'ai fait le limpia la première fois en vedette en 1975,
12:05 il y a la fille, l'actrice qui arrive, elle était toute blême et pâle.
12:09 C'est horrible, on a 40 motards comme Martin.
12:12 Mais qu'est-ce qu'on va en faire ? Ils vont semer la pagaille, c'est épouvantable.
12:16 Ils avaient sorti les tenues de cérémonie.
12:18 Alors c'est tout en cuir et c'est des gros foulards de parachute blanc.
12:22 Ils étaient impeccables.
12:24 Et sous la commande de Momo, leur chef, ils sont venus m'écouter.
12:29 Elle a eu très, très peur.
12:30 J'en rigole encore.
12:31 Ils sont très bien tenus.
12:33 - Oui, mais en plus, "L'homme à la moto", c'était une chanson que Jean Dreyjac avait adaptée
12:37 d'une chanson américaine des Cherth, quand il a été l'amant d'Édith Piaf aux États-Unis pendant quelques mois.
12:42 - Ah bon ? - Ah oui, il était l'amant.
12:44 Il a fait cette chanson, après il a été viré.
12:46 Enfin, il a quand même bien gagné sa vie avec cette chanson.
12:50 Et c'est vrai que votre parcours n'a pas été aussi rapide qu'en tour en moto,
12:54 parce que vous avez, avant de réussir, connu les boîtes de nuit, les vestiaires
13:01 et surtout, il y a effectivement ces premières scènes.
13:04 La première scène, je crois que c'était à la locomotive, à côté des bois d'arbre.
13:07 - J'étais inconnue.
13:09 Comment vous avez ça ?
13:10 - Ah ben, j'ai retrouvé des documents là-dessus.
13:11 - J'ai chanté à la loco.
13:13 Et il faisait une soirée par semaine.
13:16 Et il y avait le coin pour les chanteurs, les VIP, les gens connus.
13:19 Et je suis une des rares filles à être passée à la locomotive,
13:22 parce qu'il faisait que du rock'n'roll.
13:23 - Oui, et la locomotive, en fait, c'était au départ l'annexe du Moulin Rouge pendant la guerre.
13:29 Il y avait le cinéma et ça s'appelait le Robinson,
13:32 parce que le maître des claquettes, l'inventeur des claquettes s'appelait Robinson.
13:36 C'est fou, hein ?
13:37 Alors, c'est là d'ailleurs, je crois, à la locomotive que Bob Ascoff vous a surnommé Nicoletta.
13:42 - Ah, j'adorais le Bob.
13:43 Oh, c'est dommage, il était homosexuel.
13:46 Oh, mais il était mignon.
13:47 - Il chantait en anglais, en allemand.
13:49 - Il était acteur aussi.
13:51 Il est décédé maintenant.
13:53 - Oui, il avait enregistré la chanson du film "Bombés et de Russie".
13:56 - Tout à fait.
13:56 - Et c'est lui qui vous a appelé Nicoletta.
13:58 Comment c'est né ?
13:59 - Je ne sais pas, parce que je suis petite et que d'origine j'ai un nom italien, un nom de famille italien.
14:04 Et il aimait dire "la Nicoletta", avec son accent suédois.
14:09 Et du coup, tous les copains m'appelaient Nicoletta.
14:12 - Exactement.
14:13 - Alors quand je suis rentrée chez Barclay, M. Bissire, qui était mon directeur artistique,
14:17 "Oh, mais comment on va l'appeler ? Comment tu vas t'appeler ?"
14:20 Je dis "Bah, je ne sais pas, moi, j'ai pas d'idée".
14:22 "Or, si un jour tu fais l'Olympia, il faut qu'on te voie un nom quand même."
14:26 - Ce que dit comme Grisonni, c'est le...
14:28 - Il dit "Oh, bah, il y a bien une Délida, il y a bien une Schella, pourquoi pas Nicoletta ?"
14:32 Et on a gardé Nicoletta.
14:34 - Alors, effectivement, vous l'avez dit, c'est au bus Palladium que ça a commencé.
14:37 Le bus Palladium, ça s'appelait comme ça parce que, au départ,
14:41 on ramenait les gens de la banlieue au Palladium en bus.
14:49 - C'est possible.
14:50 Moi, j'y allais en fin de nuit.
14:51 - Voilà.
14:51 - Quand je formais la boîte où je travaillais, à 4-5 heures du matin,
14:55 je montais au bus avec les copains et je faisais les chœurs des chanteurs qui y passaient.
15:01 Et je me rappelle d'Arthur Bryan, c'était un artiste anglais,
15:04 il avait un chapeau avec des flammes qui sortaient de son chapeau,
15:07 une espèce de casque, et on était deux ou trois gamines à faire les chœurs,
15:12 yé-yé, ouah-ouah, qu'est-ce qu'on a pu s'amuser.
15:15 Et là, j'ai retrouvé M. Messire, qui me prend par la main, il me tire,
15:19 il me dit "Oh, ça fait 20 ans que je cherche une fille comme vous."
15:22 Et moi, je vous connais, j'ai votre nom sur mon contrat.
15:25 J'avais signé avec Richard Bennett, qui était son assistant.
15:29 "Eh, c'est vous, on vous cherche partout."
15:32 - Enfin, vous étiez pas loin, parce que vous avez signé un contrat
15:35 et pendant des mois et des mois, il n'a pas été honoré,
15:37 ce qui est inimaginable, Nicoletta.
15:39 - Ben oui, enfin, à l'époque, il y avait la grève des musiciens.
15:44 Ah oui, on préparait déjà mes 68.
15:47 Alors personne n'était pressé de me joindre, il y avait d'autres soucis.
15:50 D'ailleurs, mon premier disque, je l'ai fait en Belgique.
15:53 - Oui, parce qu'il y avait la grève des musiciens.
15:55 Et ce premier disque, c'est celui-ci.
15:57 * Extrait de "Oublier" de Nino Ferrer *
16:11 - Ça, c'est la version de Nino Ferrer.
16:12 Parce que c'est grâce à lui que vous avez fait cette chanson.
16:15 - C'était un type formidable, Nino.
16:17 Il avait beaucoup de classe.
16:19 C'était un dandy.
16:20 Il était toujours élégant.
16:22 Il était antisystème.
16:23 Il avait une façon de penser ce métier qui lui était très personnel.
16:27 C'est le premier artiste vraiment indépendant que j'ai rencontré.
16:30 On s'estimait beaucoup.
16:33 Et il m'a donné cette chanson.
16:34 Et c'était formidable, j'ai adoré.
16:37 - Oui, il se trouve qu'il avait débuté aussi dans les discothèques de Saint-Germain-des-Prés,
16:41 où il avait été repéré par Eddie Barclay,
16:43 qui lui a fait un répertoire avec Mirza et Le Téléphone, qui lui convenait pas du tout.
16:48 - Ben, c'est-à-dire que c'est à la même époque qu'il a fait Mirza, tout ça.
16:52 - Mais il fallait bien vendre du disque, à l'époque.
16:54 Il voulait qu'on ramasse de l'argent.
16:57 C'était pas rigolo.
16:58 Il fallait aller travailler.
17:00 Et Nino était contre-inforcé, mais il a su très vite sortir de cet impasse.
17:05 Il a fait après La Maison près de la Fontaine.
17:07 Il a fait de très, très belles chansons.
17:09 On dirait le Sud.
17:11 Et il avait cette particularité d'enregistrer chez lui.
17:14 - Exactement.
17:15 - Il prenait ses musiciens et faisait lui-même les séances.
17:18 Et c'était formidable.
17:19 - Vos premiers disques ont un succès d'estime, finalement.
17:22 - Non, le premier, c'était un succès d'estime.
17:25 Et le deuxième, c'était un tube.
17:26 C'était la musique.
17:27 Six mois après, quand même.
17:28 - Six mois après.
17:29 - Non, non, j'ai pas à me plaindre.
17:30 - Non, non, mais le premier était un succès d'estime parce qu'il fallait passer à la
17:34 télévision.
17:35 Et puis, c'était dur d'obtenir des émissions de télévision au départ.
17:36 Personne ne croyait vraiment en votre succès, Nicoletta, dans La Maison de disques.
17:40 - Je sais pas du tout.
17:41 - Ah, s'ils vous ont dit "ouais, on n'est pas sûr de l'envoyer".
17:44 - Non, non, non, non, non, non.
17:46 Non, il s'est passé une chose.
17:47 Il y avait une attachée de presse qui était maigre comme un coucou.
17:50 - Oui.
17:51 - Vraiment, on dit plumée.
17:52 Maigre, maigre, maigre.
17:53 Elle disait "elle a mon trame, elle est grosse".
17:55 En parlant de moi, j'étais pas grosse et j'étais pas à mon trame.
17:58 J'étais normale.
17:59 Mais je crois qu'elle devait être anorexique.
18:02 - C'est pour ça.
18:03 - Elle devait avoir des problèmes.
18:04 Alors, elle travaillait très mal sur moi.
18:06 Mais le jour où on l'a changé, le deuxième disque, elle s'en est pas occupée.
18:10 Tout d'un coup, ça a marché.
18:11 Je prenais des cours de passage de télé chez la maman de...
18:15 Comment elle s'appelle, cette spikrine ?
18:17 La patronne de Dorothée.
18:19 - De Jacqueline Joubert.
18:20 - Jacqueline Joubert.
18:21 Alors, on allait chez elle.
18:22 Elle avait une caméra dans le salon.
18:24 Elle envoyait le playback.
18:26 Et on essayait de faire le playback et de se comporter devant une caméra.
18:29 J'ai pris mes leçons chez Jacqueline Joubert.
18:32 - Qui avait été la première spikrine de la télévision.
18:34 - Absolument.
18:35 - Elle était venue à un concours par hasard.
18:37 Elle repart dans la rue, certaine de ne pas être choisie.
18:40 On court après en disant "c'est vous".
18:41 Et c'est comme ça qu'elle a lancé les spikrines à la télévision.
18:44 Et à l'époque d'ailleurs, première émission de télévision, c'est "Main dans la main".
18:48 Dans la tête d'affiche, Guy Marchand.
18:50 Et Guy Marchand justement, vous avez signé des photos pour lui et répondu à son courrier.
18:55 - Oh mais bien pas que lui.
18:56 J'avais tous les artistes de la Maison Disque.
18:59 On m'amenait les sacs.
19:00 J'habitais l'hôtel en face de la Maison Disque.
19:02 J'avais les ménagers.
19:03 On m'a de plus près du problème.
19:05 Je me disais "mais en face de la maison".
19:07 Et ils m'amenaient leurs sacs.
19:09 Et je gagnais 150 francs par sac.
19:12 Et bien il y avait des lettres à répondre.
19:14 Alors je faisais "Guy Marchand, Nino Ferrer, Franck Alamaud, Amitié, Franck Alamaud, Gros
19:21 Baiser, Guy Marchand".
19:23 Et après, il y a eu des sacs qui étaient pour moi.
19:26 Je faisais plus le courrier des artistes bien sûr.
19:30 Mais ça permettait de gagner ma vie parce que j'avais arrêté de travailler la nuit.
19:33 J'enregistrais et j'avais arrêté.
19:35 - Vous attendiez que Eddie Barclay sorte votre disque et origine votre disque.
19:40 Il fallait bien gagner sa vie.
19:41 - Absolument.
19:42 Mais il n'y a pas de saut métier.
19:43 Je faisais même les vitrines.
19:44 Je faisais pendre 33 tours des gens qui sortaient leurs disques.
19:49 C'était très intéressant.
19:51 Et Guy Chat, qui est entré en même temps que moi, lui il faisait les stocks.
19:55 Il mettait des disques en pochette.
19:57 Il travaillait aussi à la maison de disques.
19:59 - Et Eddie Barclay, vous vous avez repéré à cette époque-là ?
20:01 - Non, Eddie Barclay, je ne le connaissais pas du tout.
20:05 Je l'ai vu au King Club où je travaillais.
20:08 Je lui ai même dit un soir "Vous savez, j'ai un contrat chez vous".
20:12 C'est très bien qu'il m'a dit.
20:14 "Comment vous vous appelez ?" Il a quand même écrit mon nom sur un bout de papier.
20:17 Et il s'est très bien souvenu de qui j'étais quelques mois plus tard.
20:21 - Mais c'est décourageant d'avoir un contrat comme ça et de ne pas l'honorer pendant des
20:25 mois et des mois.
20:26 - Non.
20:27 Ce qui me faisait suer, c'est que je disais aux copains que j'avais signé un contrat
20:29 et ils disaient que j'étais mythomane.
20:30 Bah oui.
20:31 Ils voyaient rien venir.
20:33 - Et l'ambiance des maisons de disques à l'époque, c'était une ambiance familiale ?
20:36 - Je pense.
20:37 Je pense qu'on s'occupait, dès qu'un artiste avait décidé de s'occuper de lui, ça l'occupait
20:43 très bien.
20:44 Parce que Barclay, quand il s'occupait de la carrière de quelqu'un, quand il avait
20:49 décidé de créer l'événement, ça y allait.
20:53 On était promus.
20:55 On était vraiment promus.
20:56 - Ça a été le cas avec la musique ?
20:58 - Oui.
20:59 - Du jour au lendemain, ça a changé votre vie ?
21:01 - Parce qu'ils y ont cru.
21:02 Ils ont aimé la chanson et ils ont eu raison.
21:04 Puisque des années plus tard, elle a servi de guillotin de motifs pour une émission
21:08 de télévision, ça va académique quand même.
21:11 - Et ce qui est étonnant, c'est que vous n'avez jamais travaillé votre voix.
21:14 Elle a toujours été naturelle, elle n'a pas changé au fil des décennies, Nicoleta.
21:18 - Je pense que c'est un don.
21:21 Il faut y faire attention.
21:23 Et quand on travaille vocal, je n'ai jamais aimé les profs de chant.
21:27 Je travaille avec des musiciens.
21:29 Ce sont les musiciens qui m'ont appris tout ce que je sais.
21:32 Moi, je répète avec mon pianiste, mon chef d'orchestre, mes musiciens.
21:36 J'ai même fait du gospel, rappelez-vous.
21:39 - On va en parler.
21:40 - Vous m'avez aidé d'ailleurs.
21:41 Eh bien, j'ai été faire un atelier de gospel, 8 heures par jour avec Coral.
21:44 J'ai travaillé parce que ce n'est pas ma culture.
21:47 Et quand j'ai dessiné, j'ai dessiné, je vais au travail.
21:50 - Et aujourd'hui, vous travaillez encore votre voix régulièrement ?
21:52 - Je ne travaille pas régulièrement ma voix, mais je répète avant chaque concert, rendez-vous,
21:59 17 heures répétitions en lieu et en place.
22:02 - Et des concerts, il y en a eu, on va en évoquer un à la date du 5 avril 1997.
22:08 A tout de suite sur Sud Radio avec Nicoletta.
22:10 Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
22:13 - Sud Radio, les clés d'une vie, mon invité Nicoletta, un anniversaire, 20 ans, 4 fois
22:19 plutôt qu'une.
22:20 Je ne dirai jamais 80 ans.
22:21 - Vous avez raison.
22:22 - Vous non plus, vous ne le pensez pas.
22:23 - Non, non.
22:24 - C'est impossible.
22:25 Alors, on a évoqué vos débuts et vous avez parlé du gospel tout à l'heure.
22:29 Il y a une date importante, j'ai retrouvé à la télévision le premier reportage où
22:34 vous évoquez le gospel, c'est avec les Gospel Voice au Fontanil près de Grenoble, au pied
22:40 des Alpes, le 5 avril 1997.
22:43 - Oh, j'en souviens.
22:44 - Et vous chantez ceci.
22:46 - Vous vous souvenez de ce concert, Nicoletta ?
23:00 - Oui, on a même…
23:01 Bon, oui, c'était sympa.
23:02 On était près d'un IPAD et le directeur est venu nous voir, on est en train de répéter,
23:09 c'était un plénaire dans la banlieue de Grenoble.
23:12 Et ils me disent "Oh, vous savez, nos pensionniers sont extrêmement ravis de voir que vous venez
23:17 leur chanter Mamie Bleu".
23:18 J'y suis allée, c'était 18h-19h après la répétition, et avec quatre, cinq choristes
23:24 et le chef de chœur, on leur a chanté Mamie Bleu.
23:26 On était arrivés comme ça dans le IPAD, c'était adorable, vraiment.
23:30 Je m'en souviens.
23:31 - Le mot gospel, ça vient de l'anglais "gospel", ce qui signifie "évangile",
23:37 et ça rappelle que le gospel fait référence au Nouveau Testament, et c'est une résurrection
23:43 de la grâce qui libère en lien avec l'émancipation des esclaves sur le continent américain.
23:47 - Absolument.
23:48 - Comment c'est arrivé pour vous le gospel ?
23:50 - Oh là là, moi j'ai connu le gospel à mon adolescence parce que je suis fontalière
23:55 suisse, et tout le monde sait que Genève c'est la ville de Calvin, et évidemment,
24:01 le gospel c'est protestant d'origine.
24:03 Alors j'entendais le gospel quand j'allais le samedi après-midi avec mes copines en
24:07 autocar à Genève, c'était notre ville lumière.
24:10 J'entendais plein de musique, dont beaucoup de gospel, et j'ai écouté Malia Jackson,
24:17 qui est merveilleuse, c'est la plus grande dame qui chante le gospel, elle est morte
24:20 maintenant, il y a trente ans.
24:21 Et j'étais folle d'Elvis, et Elvis, qu'est-ce qu'il ne nous fait pas ? Un disque de gospel.
24:28 Quelques années plus tard, parce que Elvis est devenu chanteur, parce que sa maman, qui
24:33 était baptiste, c'est donc l'obédience au gospel, l'emmenait à l'office le dimanche,
24:41 donc il a vu les Noirs chanter comme ça, cette musique extraordinaire, très vivante
24:45 et fervente, et puis qui s'inspire du Nouveau Testament, et cette façon qu'il avait de
24:50 bouger et de chanter, c'est bien de là.
24:53 - C'est fou, hein ? Et d'ailleurs, vous parlez d'Elvis, il y a quelqu'un qui a travaillé
24:57 avec Elvis sans le rencontrer, mais qui a été votre parrain du gospel, c'est Mort
25:01 Schumann.
25:02 - Mais bien sûr, il m'a composé pour sa comédie musicale "Ma ville", un gospel sur
25:07 lequel...
25:08 Enfin, je devais travailler dans ce show, et puis finalement il a été annulé, puisque
25:12 Mort était malade, elle a eu son cancer, on a dû arrêter.
25:16 Et il m'a composé un gospel d'enfer avec un texte rageur, puisqu'il s'agit de la liberté
25:23 clamée par Louise Michel.
25:24 - Alors, il se trouve que le gospel, c'est votre enfance, mais comment un jour avez-vous
25:28 décidé de chanter, de créer ces gospels ?
25:30 - C'est-à-dire qu'à un moment donné, je me suis sentie lâchée par le métier.
25:34 M.
25:35 Barclay a vendu sa compagnie, et j'avais encore 18 mois de contraint, et évidemment, j'avais
25:44 aucune nouvelle de la maison d'Isk avait racheté son catalogue, dont je faisais partie.
25:49 En plus, Barclay, il était gonflé, il a vendu ça, ce navour qu'il m'a dit, qu'il
25:53 a vendu, il n'a rien dit à personne.
25:56 - Rien ?
25:57 - Rien.
25:58 C'est Aznavour le premier qui est là-dessus, et j'habite à Genève, et Charles habite
26:01 à Genève aussi, j'étais avec mon ex-époux.
26:03 Je me suis retrouvée à la rue, comme on dit bêtement.
26:06 J'ai commencé à être en déclin, et on ne m'appelait plus, le téléphone a commencé
26:13 à devenir muet, c'est sympa.
26:14 Je me souviens, je réfléchissais, mais ils m'ont dit "Mais qu'est-ce que je peux faire
26:20 ?" J'ai fait des discothèques, j'ai chanté
26:22 sur bande d'orchestre, comme une débutante, c'était horrible.
26:25 Les discothèques qui te faisaient attendre dans le couloir avec les bouteilles, tu passais
26:31 à une heure du matin, il fallait attendre.
26:33 Je suis vieux du foie, je ne devais pas faire ça longtemps.
26:35 Effectivement, un jour, je me suis rappelée, j'ai eu une résonance, une rémélicence,
26:42 la voix de ma grand-mère qui me disait "J'avais fait une messe gospel sur une radio périphérique,
26:48 dans l'émission Les routiers sont sympas".
26:50 - De Max Pénier.
26:51 - Oui, à Calbertson, la messe de minuit, il y avait 20 000 personnes, et le prêtre
26:56 m'a fait travailler 2-3 gospels en anglais.
26:58 C'est la première fois que j'ai chanté du gospel.
27:00 J'ai fait "Shallow way to Jesus", des gospels pas très connus d'ailleurs.
27:04 Et je chantais, rappelez-vous, "Glory, Alléluia".
27:06 - Tout à fait.
27:07 - Voilà, qui est un peu des prémices.
27:09 Et ma grand-mère me dit "Oh, il est bien, c'est bien, tes disques, mais tu vois, c'est
27:14 tellement joli quand tu chantes le gospel".
27:16 Elle a raison, la bébé.
27:18 C'est un signe, je me suis dit.
27:20 J'ai cherché une choré, j'avais une copine américaine à Paris, j'ai dit "Tu connais
27:25 un chef de chœur, je puisse travailler, voilà, tel adresse, tel monsieur, Max Zitta,
27:31 et tu vas aller de ma part".
27:33 Et j'ai travaillé pendant 3 semaines, tous les jours, 8 heures par jour, en répété.
27:38 J'ai monté un tour de chant et je suis partie à l'aventure.
27:41 - Et ça a commencé, je crois, à l'église Saint-Roch, et ça a été un miracle parce
27:44 que personne n'y croyait.
27:45 - À l'époque, c'était pas du tout la mode.
27:48 J'ai reçu en plus un trophée de la part de la Fédération Française du Gospel pour
27:55 me remercier de tout ce que j'ai fait en promotion sur le gospel.
27:59 C'est une musique qui n'était pas d'actualité.
28:02 C'était encore minime, c'était il y a 25 ans.
28:07 Les radios ne passent pas du gospel, ils m'ont dit "On fait pas de promotion, bon
28:11 Dieu".
28:12 - Oui mais résultat, vous avez ouvert la voie et il y a aujourd'hui partout en France,
28:15 Nicole Letta, des troupes de gospel.
28:17 - Dans chaque département, il y a même des endroits où j'invite des chorales.
28:21 Ils sont très heureux de chanter avec nous.
28:23 Ils viennent à la répétition, on travaille deux gospels ensemble et je les fais rassembler
28:27 autour de nous et ça me fait plaisir.
28:29 C'est un échange, c'est une musique d'échange.
28:32 - Oui et ce qui est étonnant, c'est que dans le public, je crois que vous avez fait plus
28:34 d'un million de spectateurs avec la première tournée, il y a des anciens et des jeunes.
28:38 - Il y a tous les âges parce que le gospel est une musique, c'est les racines quand même
28:43 de la musique noire américaine.
28:46 - Richard vient du gospel.
28:48 - Il a dit de vous, vous étiez la seule chanteuse blanche capable de chanter comme une noire.
28:54 - C'est ce qu'il a dit, je crois.
28:58 - Il l'a dit et il n'a pas fait que le dire, il a chanté.
29:03 - De Sandy, de vous fermer les yeux de bonheur, Nicoletta.
29:22 - C'est tellement beau quand il chante, c'est tellement beau.
29:25 En plus, j'allais dans les sur-boum comme on disait à mon époque, j'avais 15-16 ans,
29:31 on faisait des boums le jeudi et le dimanche après-midi parce qu'on faisait croire que
29:36 c'était la nuit, on fermait les volets et j'avais mes petits 40 cintures, mes petits
29:40 disques que j'ai achetés à Genève parce qu'il n'y avait pas les imports en France.
29:43 Et j'avais Ray Charles, j'adorais, j'ai dépensé les 20 centimes dans le jukebox de la plage
29:50 toute la journée, on m'était dit "Daisy, c'était vraiment une voix merveilleuse".
29:55 - Et "Il est mort le soleil" c'est né parce que vous avez un jour donné, on ne sait pas
29:59 pourquoi, un disque à Ray Charles au Canada ?
30:01 - J'ai été faire de la promotion au Canada, la première fois que je traversais l'Atlantique,
30:06 on avait les mêmes agents et à un moment donné j'en avais marre d'aller faire des
30:10 télés, des radios et je voyais que Ray Charles était en ville, il était affiché et qu'il
30:14 passait 15 jours que je voulais le voir sur scène, je ne l'avais jamais vu.
30:17 Je me disais "Il ne faut pas avoir un petit congé pour voir Ray Charles un soir ?"
30:21 "Oui mon petit" et je lui ai dit "On y va".
30:23 Et évidemment nous sommes allés dans la loge, enfin il nous a reçus parce que Barkley
30:28 est un sésame, il a été distribué par Barkley, il a été tout content de rencontrer
30:32 des gens de chez Barkley, j'étais avec mon producteur etc.
30:35 Et il nous a invités à dîner, on a mangé au Réseau Chinois, au quartier chinois de
30:40 Montréal et quand même il était bien élevé, il m'a dit "Et à propos, est-ce que je peux
30:43 avoir un disque ?" et il a écrit mon adresse, mon téléphone sur son carnet de braille,
30:48 c'était un beau moment d'ailleurs, c'était très touchant.
30:51 Et je suis partie, puis trois semaines plus tard, le téléphone a sonné dans la nuit
30:57 avec le décalage horaire et c'était l'Inter à l'époque.
30:59 Je croyais que c'était des fans, enfin pas les fans, faut me laisser dormir, vous
31:03 exagérez !
31:04 Et c'était Ray Charles.
31:05 C'était Ray Charles, il était dans la Hoyo en tournée.
31:09 Et puis voilà, il rigolait, j'ai reconnu son rire et il m'a dit "Voilà, il y a une
31:13 chanson qui est vraiment belle sur l'album, je savais plus quoi faire".
31:18 Je me suis dit "Mon Dieu, mais il est non voyant, qu'est-ce que je vais lui dire, qu'est-ce
31:22 qu'il dit, les textes, les lyrics ?"
31:25 J'étais vraiment mal, pendant une minute, une minute de solitude, qu'est-ce que je
31:30 lui dis à ce monsieur, il est aveugle, j'étais mal !
31:33 Il est mort le soleil !
31:34 Oui, j'étais mal !
31:35 Et tout de suite je me suis repris, je lui ai expliqué c'était une chanson d'amour,
31:40 je parle l'anglais vraiment comme Maurice Chevalier, avec l'accent et tout.
31:44 Et il a dit une phrase "I really like this song and I'm going to translate it in English".
31:51 Et il l'a fait.
31:52 Et il l'a fait.
31:53 Mais c'est un homme qui avait des succès et qui joue aux échecs, je sais pas si vous
31:56 le savez, il a gagné des parcs d'échecs contre des champions.
31:59 Il jouait avec Robert, son chauffeur, mais vous savez les échecs, mon fils est un champion.
32:04 Vous êtes à mille lieues, vous téléphonez à votre position, vous n'êtes pas obligé
32:08 de voir le jeu.
32:09 Si vous connaissez bien les positions des jetons, ça fonctionne.
32:14 Et ça fonctionne, mais il est très fort, très très fort.
32:17 Grâce à Red Charles, votre chanson a fait le tour du monde et il y a une autre de vos
32:21 chansons qui a eu aussi un succès international.
32:23 Cette chanson, je crois qu'en Chine, elle est très connue.
32:37 Je suis allée chanter en Chine.
32:39 C'est incroyable.
32:40 Oui, je suis allée en 86, j'ai représenté la France.
32:43 C'est le Quai d'Orsay qui est bien envoyé.
32:45 Et par le biais de FR3, je suis partie représenter la France avec cette chanson.
32:52 Au premier festival mondial de Pékin, Beijing.
32:58 C'était fabuleux, j'y suis passée 15 jours et c'était extraordinaire.
33:02 Et en même temps, cette chanson, contrairement à ce qu'on pense, n'était pas liée à
33:05 votre mamie, mais à votre maman.
33:07 Oui, mais je le dis dans la chanson, j'ai eu ma mère, mais les gens ont tout sauté
33:11 sur Mamie Blue.
33:12 Je connais des petits garçons, dès qu'ils ont eu 15 ans, 20 ans, qui me disent "Oh,
33:17 je suis content de vous rencontrer, vous me rendez pas compte, vous êtes ma première
33:21 chanson, j'ai appris par coeur à 3 ans pour la chanter à ma mamie".
33:25 C'est extraordinaire.
33:26 C'est très mignon.
33:27 Et une chanson de film aussi qui fait partie de votre répertoire et qui est dans cette
33:31 intégrale.
33:32 "Fermons la fenêtre, laissons les volets clos, tant pis pour le pas pros, mes yeux
33:38 dans tes yeux, si bleus, si beaux, passons la journée à la maison".
33:42 Une chanson de Paul Misrachi, une des dernières chansons de Paul Misrachi, qui a écrit plus
33:45 de 500 chansons et 300 musiques de films, très célèbres.
33:49 Et c'est vrai que cette chanson, ça a été aussi un tournant pour vous, Nicoletta.
33:53 Non, c'est une chanson qui a plu aux filles.
33:56 Et quand on est chanteuse, on ne paie pas toujours aux femmes.
34:00 Et j'ai fait un mouvement d'amour avec les filles.
34:05 "Oh là là, les volets clos".
34:07 Mais évidemment, ça parle d'un beau programme quand même.
34:09 Le texte est charmant.
34:10 C'est Raymond Forlani qui l'a fait.
34:12 Et c'est un film de Brialy.
34:14 Et Jean-Claude, c'est le premier film de Jean-Claude.
34:16 Il me faisait la tête Jean-Claude.
34:19 Parce que la chanson est devenue un succès et son film a fait 30 000 entrées.
34:23 Alors il me faisait un peu la gueule.
34:24 En même temps, c'était un personnage de la vie parisienne.
34:27 Et c'est vrai que vous avez continué à vivre ces nuits parisiennes et une vie parisienne
34:31 des années 70 qui a marqué une époque qu'on ne peut plus imaginer aujourd'hui, Nicoletta.
34:35 À l'époque, on pouvait aller dans les discothèques, on risquait rien du tout.
34:39 Il n'y avait pas "me too".
34:41 Et on n'était pas attaqué.
34:42 On fréquentait les clubs qu'il fallait.
34:45 Moi j'allais chez Castel très souvent.
34:46 M. Castel, on était ses copines.
34:49 On payait jamais d'ailleurs.
34:50 On était invité permanent chez Castel.
34:52 Mais c'était une époque de rire et de bonheur.
34:56 Oui, mais c'était une époque surtout de grandes rencontres.
34:59 Moi chez Castel, j'ai rencontré des gens extraordinaires.
35:01 Des écrivains, des dessinateurs, des gens de l'international.
35:06 Peter O'Toole qui était beurré, qui était assis dans du bar.
35:09 On voyait des gens fantastiques.
35:11 J'ai passé des soirées avec les Rolling Stones.
35:13 C'était un mélange de gens internationaux.
35:17 On rencontrait des gens.
35:18 En tout cas, on vous rencontre aujourd'hui avec cette intégrale qui sort le 12 avril 2024.
35:24 Connecté avec vous, Nicoletta, dans quelques instants sur Sud Radio.
35:28 Sud Radio, les clés d'une vie. Jacques Pessy.
35:31 Sud Radio, les clés d'une vie.
35:33 Mon invité Nicoletta.
35:35 12 avril 2024, une intégrale, 16 CD, 308 chansons.
35:41 C'est étonnant quand on voit ce nombre de chansons.
35:43 Je suis sûr que vous êtes vous-même surprise, Nicoletta.
35:46 Je n'avais pas compris que j'avais fait autant de chansons.
35:51 Voilà, c'est bon.
35:53 Vous savez, on avance.
35:54 Oui.
35:55 On y va.
35:57 Chaque disque est une aventure.
35:59 En même temps, c'est toujours une aventure différente car vous avez toujours évolué, changé style.
36:04 J'ai toujours... Il faut essayer des choses.
36:05 Quand on est un artiste, qu'on a tempérament artistique, il faut essayer des choses.
36:11 Il ne faut pas refaire la même chose.
36:13 Moi, si on suit ma discographie, je n'ai jamais fait la même chose.
36:17 Non, parce que quand vous faites Fio...
36:18 J'ai refusé, parlez-moi de lui.
36:20 J'ai dit à Hubert Giraud, qui m'a composé "Il est mort le soleil" et "Mamie Blue".
36:24 Non, non, non, encore des chœurs, encore...
36:28 Non, ça m'énerve.
36:29 Donne-la à Nicole Croizet.
36:31 J'aime beaucoup Nicole.
36:32 Donne-la à Nicole, elle va te faire une réussite.
36:33 Et c'est ce qui s'est passé.
36:35 J'ai refusé, "Viens, viens".
36:36 Alors là, j'ai éclaté de colère.
36:39 "Viens, viens, reviens pour ma mère".
36:41 J'ai encore quoi ? Toutes les histoires familiales, je vais faire.
36:44 Je suis née d'un père inconnu, je l'appelle.
36:47 Mais ça ne va pas, non.
36:48 Ils vont me changer le texte, je garde la musique.
36:51 Ils n'ont pas voulu changer le texte.
36:52 C'est Marie qui l'a fait, Marie Laforêt.
36:54 Exactement. Mais vous avez fait vos premiers succès.
36:56 Moi, je me souviens de Fio Maravilla, qui a été un événement parce que...
37:00 C'était la première chanson brésilienne, à l'époque brésilienne.
37:03 On n'en parlait pas.
37:04 Je l'ai ramenée de Rio.
37:06 J'ai été chanter au festival de Rio.
37:09 On m'expédiait un peu partout, chanter pour présenter la France.
37:12 Tant mieux, parce que j'adore voyager.
37:14 Et j'ai rencontré le compositeur, Georges Ben, qui est un homme délicieux.
37:18 Et on va l'écouter un soir avec un musicien dans un club.
37:21 Et il me dit, "Oh, siéntate, siéntate, cafendino, niculieta".
37:26 Il m'appelle Niculieta.
37:28 Alors, je m'assoie.
37:29 Et il me dit, "J'ai composé une chanson, regarde".
37:31 Et il me joue Fio Maravilla.
37:33 Mais Fio Maravilla, au Brésil, il est connu.
37:36 C'est un footballeur qui est décédé maintenant.
37:38 Et c'était toute l'histoire de ce garçon qui avait sauvé un match
37:43 pour l'équipe Flamingo, dont Georges Ben était le fervent supporter.
37:49 Alors voilà, j'ai dit, "Mais elle est belle ta musique, ça me plaît cette chanson.
37:52 J'aimerais bien la ramener en France".
37:53 "Moi, je la donne".
37:54 "Mais oui, il n'y a pas de problème".
37:55 Il m'a fait venir son éditeur le jour d'après, Copacabana Palace.
38:01 Et voilà, j'ai emmené la chanson.
38:04 Elle figure dans ses intégrales.
38:05 Alors, faire une intégrale, c'est un travail immense.
38:08 Il fallait tout retrouver, Niculieta.
38:10 Ce n'était pas simple parce que...
38:12 On a travaillé, mais il y a une très bonne équipe.
38:14 Chez Universal, ils savent travailler.
38:15 Et puis, je suis quelqu'un, malgré...
38:18 Je suis bordélique, mais j'avais gardé des bandes importantes
38:22 parce que j'ai produit des albums moi-même.
38:26 Et je les avais à la cave.
38:28 Et vous vous souvienez de toutes les chansons ?
38:29 Non.
38:31 Non, on se souvient surtout de celles qu'on a mises en scène.
38:34 Mais les autres, on a tendance...
38:37 Voilà.
38:38 Et c'est passé très vite, finalement, cette carrière ?
38:41 La vie passe trop vite.
38:44 Vous avez vu ?
38:45 Plus on vieillit, plus on n'a jamais assez de temps.
38:48 Ça passe trop vite.
38:50 C'est pour ça qu'il faut bien en profiter et être heureux.
38:54 C'est d'avoir le goût du bonheur.
38:55 C'est terrible.
38:56 Je trouve qu'il y a plein de gens qui n'ont pas le goût du bonheur.
38:58 Je le comprends.
38:59 Il y a parfois les malheurs, c'est une petite chape énorme.
39:03 Mais c'est important d'espérer.
39:06 C'est important.
39:07 Moi, j'ai toujours le sens de l'espoir.
39:09 Et quoi qu'il m'arrive, je marche dessus.
39:12 Et vous avez bien raison d'avancer comme ça.
39:14 Alors, ce qui est étonnant aussi dans cet album, dans cette intégrale,
39:17 c'est qu'il y a des inédits.
39:18 On a retrouvé des inédits.
39:19 Exemple, c'est la vie.
39:20 Oui, c'est la vie, la vie, c'est la vie.
39:28 Oui, comme c'est bon de l'aimer.
39:33 Justement, on aime la vie.
39:35 Ça vous fait rire, Nicoletta.
39:37 Pourquoi ?
39:38 J'oubliais de s'enregistrer ça.
39:41 Je ne me souviens même pas.
39:42 Vous vous souvenez ?
39:44 C'était quand on l'a retrouvé.
39:45 La bande existait, elle n'a jamais sorti.
39:47 Oui, j'ai sûrement enregistré ça.
39:50 Vous ne savez même pas du tout d'où ça vient ?
39:52 Attendez, on m'a demandé les noms des compositeurs, mais je ne sais pas.
39:57 Je ne sais pas du tout qui c'est qui l'a écrit.
39:59 Et comment ça se fait que des chansons que vous avez enregistrées ne soient jamais sorties ?
40:03 Ça arrive chez tous les chanteurs.
40:05 Parce qu'au dernier moment, on ne la prend pas, on ne la trouve pas assez forte.
40:12 Mais cette chanson, ça ne vous rappelle rien ?
40:15 Ça ne me rappelle rien du tout.
40:16 C'est étonnant.
40:17 C'est incroyable.
40:19 Il y en a une autre qu'on va écouter, peut-être qu'elle vous rapportera plus de souvenirs.
40:22 Arrêterai de t'écouter
40:29 Le temps qui court sur mes rosettes
40:33 Saurais-tu me raconter ?
40:35 Je crois que ça vient de Jésus Christ Superstar.
40:37 De quoi ?
40:38 Cette chanson, "Saurais-tu me raconter ?"
40:40 Ça me rappelle des musiques de Jésus Christ Superstar.
40:43 J'étais dans le disque de Jésus Christ Superstar.
40:47 Et cette chanson n'est jamais sortie ?
40:50 Oui.
40:51 C'est étonnant.
40:52 Je n'en sais rien, pourquoi elle n'est pas sortie ?
40:55 Jésus Christ Superstar, c'est une aventure où vous auriez pu être dans la comédie musicale ?
40:58 Oui, mais je n'ai pas envie de faire des comédies musicales.
41:00 J'en ai fait qu'une, grâce à Nino, qui a conseillé au metteur en scène de me prendre.
41:05 J'ai fait quasi modo.
41:06 On a fait quand même des 156 000 spectateurs.
41:09 C'est pas mal.
41:09 Et je chantais sur des musiques de William Scheler, sur l'Orchestre Philharmonique de Paris,
41:15 les textes de Victor Hugo.
41:16 Alors là, c'était intéressant.
41:18 William Scheler, ça fait partie de votre bande aussi.
41:21 Vous êtes filés en amitié.
41:22 Il y a des amis.
41:23 Voilà.
41:24 Et Scheler, vous avez toujours été traîné avec lui.
41:27 Je le vois demain.
41:28 Il vient m'écouter à la cathédrale d'Orléans.
41:30 Et il y a aussi Hervé Villard.
41:32 C'est mon petit frère.
41:34 Hervé, je suis sa famille.
41:36 On s'est connus quand j'étais à Saint-Germain.
41:39 Et on n'avait pas d'argent, pas beaucoup, juste de quoi vivre.
41:43 Et lui, il avait déjà fait Caprice et Fini.
41:45 Mais il ne pouvait pas toucher son argent parce qu'il n'avait pas 21 ans.
41:49 Alors on était des copains de galère.
41:51 Voilà.
41:52 Et on n'oubliera jamais.
41:53 Et on s'est surveillés mutuellement sur nos carrières.
41:57 On s'est donné des conseils.
41:58 Alors lui, maintenant, c'est un garçon rigolo.
42:03 Écoutez, il a fait un gala à Lille où je suis allé il y a quelques jours, au Sébastopol.
42:08 Il a fait un malheur.
42:09 Ah mais c'était un concert pop.
42:11 Parce qu'il est malin.
42:12 Oui.
42:13 Il aime ce métier.
42:14 Il a une espèce de révulsion sur tout ce qu'il a fait.
42:17 Il veut se régénérer.
42:18 Il est en pleine période de régénérescence.
42:22 Il est dans un état.
42:23 Il est extasié.
42:24 Il croit qu'il a 20 ans.
42:25 Ah mais c'est extraordinaire.
42:26 Il a repris toutes ses anciennes chansons.
42:27 Mais le public, on était dans un concert de Madonna.
42:30 Oui.
42:31 Mais il a, c'est un concept intéressant.
42:33 Il fait monter des jeunes sur scène avec lesquels il travaille.
42:35 Alors il chante les nouvelles chansons des Mohms.
42:39 Le Mohm chante aussi une chanson d'Hervé.
42:41 Et puis quand même, j'ai appris qu'il a fait aussi ses anciennes chansons.
42:46 Parce que de temps en temps, il boude.
42:47 Il boude.
42:48 Mais là, il les a faites, je peux vous garantir.
42:49 On lui a bien dit qu'il fallait qu'il les fasse.
42:52 Oui, surtout que le public les reprend en chœur.
42:53 Bien sûr.
42:54 Il a une chose extraordinaire.
42:56 Sa voix n'a pas changé.
42:57 Exactement.
42:58 Elle est incroyable.
42:59 Alors, ce qui est étonnant, c'est aussi votre carrière.
43:02 Est-ce que vous pensiez que ça durerait aussi longtemps, Nicoletta ?
43:04 Non.
43:05 Je dis bon, on va faire un disque.
43:06 Après, j'ai dit on va en faire deux.
43:08 Et puis c'est bien.
43:10 Ça permet de voyager beaucoup.
43:11 J'ai fait tout de suite de la scène.
43:13 Et ça, la scène, c'est primordial pour un artiste.
43:17 Les artistes qui ne font pas de scène, ils doivent être malheureux quand même.
43:23 Ils doivent être malheureux.
43:24 Parce que c'est une expérience extraordinaire.
43:27 C'est la rencontre avec le public, évidemment.
43:29 C'est une joie.
43:32 C'est plein d'émotions.
43:34 Pour tout le monde.
43:35 Pour les gens et pour l'artiste.
43:37 C'est important.
43:38 Et ceux qui vous aiment, ils auront aussi l'émotion d'écouter dans cette intégrale
43:41 d'autres inédits comme "Messieurs les jurés".
43:43 Alors on va voir si ça vous rassure.
43:45 C'est une chanson qui est un jugement sur l'amour.
44:00 Vous n'en avez même pas quand vous l'avez enregistrée ?
44:02 Non.
44:03 Mais vous gardez la mémoire comme ça de certains titres et pas d'autres.
44:06 C'est-à-dire que ce sont des chansons qu'on a dû me soumettre.
44:11 Je les ai enregistrées mais je ne les ai pas assez usitées.
44:16 Je ne les ai pas beaucoup chantées.
44:18 Donc elles sont parties.
44:19 Parce que j'ai des tiroirs dans ma tête où il y a toutes mes chansons.
44:23 Mais celle-là, je la savais occulter.
44:26 Mais c'est extraordinaire.
44:27 En plus, c'est fort bien.
44:29 Votre voix est parfaite, intacte.
44:31 Et ce sont de très belles chansons.
44:32 Je ne sais pas.
44:33 Les bandes étaient conservées chez vous ?
44:35 Non, au studio Barclay.
44:38 Non, non, non.
44:39 Ça appartient à Universal.
44:41 Exactement.
44:42 Il y a aussi une chose étonnante dans votre vie.
44:44 Au départ, il y a eu une légende.
44:47 Vous auriez été, comme Albertine Sarrazin, dans une prison.
44:50 Je n'ai jamais été en prison.
44:52 Ça vient d'un journal à l'époque.
44:55 C'était des journaux à scandales.
44:56 "Franche Démence".
44:57 "Franche Démence" et "Ici Pourri".
45:02 Ils ont mis en prison, en gros titre, en tout petit, chez les religieuses.
45:10 Parce que quand j'étais chez les soeurs, j'étais la meneuse de rigolomanie.
45:15 Je chantais quand il ne fallait pas chanter.
45:18 En anglais, j'étais punie.
45:19 J'étais très agitée.
45:21 Beaucoup de santé.
45:22 Alors, évidemment, on nous disait, "On aura abîmé le tortoir.
45:26 Prenez-vous de matin et allez dormir au 44, au 43".
45:29 Parce qu'il y avait 43 petits trous dans la porte.
45:32 Alors, évidemment, on dormait dans une espèce de cellule.
45:36 On était punis pour nous sortir le matin.
45:38 J'ai raconté cette anecdote à "Salut des Copains".
45:42 "Le Mithard", on appelait ça.
45:44 "Descendez au Mithard".
45:45 "Oui, d'accord."
45:46 "Le Mithard, puni, la fille."
45:47 Et après, au petit-déjeuner, on nous sortait.
45:51 Ils ont mis, j'avais fait, en prison, mais c'était le titre.
45:54 C'est toujours des accroches.
45:56 Et ça fait partie de ma légende, mais c'est pas grave.
45:59 Ça me dérange pas du tout.
46:01 Vous avez fait chanter en anglais, mais aussi en italien.
46:04 Ça fait partie des inédits.
46:05 Forestier fermi dolce, dolce, dolce, disposta a perdonarti quando tu
46:11 L'alentia liam ne ci mirei, ne buti dius.
46:19 San Remo.
46:20 Alors là, encore...
46:21 Mais j'ai chanté à San Remo.
46:22 Voilà, la chanson s'appelle San Remo.
46:23 Hein ?
46:24 La chanson s'appelle San Remo.
46:25 Vous vous souvenez pas d'avoir chanté en italien avec Lolita ?
46:31 Non, j'ai essayé de chanter en italien.
46:33 Il m'aimait beaucoup au départ, les italiens.
46:35 Mais j'avais une concurrente qui était terrible.
46:37 Puis c'était une star, quand même.
46:39 C'était Dalida.
46:40 Dès que je faisais un tube, elle le faisait avant moi en italien.
46:43 C'est fou, hein ?
46:44 Alors, il y a une histoire rigolote.
46:47 Je vais vous la raconter.
46:49 Mamie Blu.
46:50 Je fais le Bidem, je représente la France.
46:52 On distribue les scores à tout le grand orchestre qui était au théâtre.
46:56 Et c'était pas ma tonalité, c'était en Do.
47:00 J'étais normalement en Ré mineur.
47:01 C'était pas beau en Do.
47:03 Enfin, moi, ça me plaisait pas.
47:04 C'était plus bas.
47:05 Et...
47:06 Chir, il gratte les cheveux, il dit que c'est pas normal.
47:10 Mais comme elle était aussi chez Barclay, dans le placard au score, c'est-à-dire tous
47:16 les trucs musicaux pour un grand orchestre, il s'était trompé.
47:20 Ma fille avait donné mes scores à Dalida et elle chantait le même jour à Guélux.
47:26 Et elle, elle courait après sa tonalité.
47:28 C'était trop beau pour elle.
47:30 Moi, je trouve ça très rigolo.
47:33 Ça s'est terminé comment ?
47:34 Moi, il a envoyé quelqu'un acheter un 45 tours dans la rue d'Antibes, il a recopié,
47:39 le pianiste a refait les scores et j'ai pu chanter dans ma tonalité.
47:43 Elle, je sais pas.
47:44 Voilà.
47:45 Vous ne savez pas non plus quelle est l'origine de vos inédits.
47:48 Tiens, un dernier.
47:49 Rien n'a changé.
47:50 Où es-tu si loin ?
47:51 Mon amour, pour moi, es-tu si loin ?
48:00 Je suis content de vous faire redécouvrir vos chansons, Nicoletta.
48:04 Vous chantez pas mal quand même.
48:06 C'est il y a longtemps ça.
48:07 Il y a longtemps ça, je sais pas.
48:08 C'est le début ça.
48:09 Voilà.
48:10 Et ça sort, ça fait partie des inédits de cette intégrale.
48:13 C'est sympa pour le public.
48:15 Exactement.
48:16 Et effectivement, cette intégrale, bon, ça permet à celles et ceux qui vous connaissent...
48:19 Il y en a en anglais aussi.
48:20 Il y en a en anglais, il y en a partout.
48:21 Mais surtout, c'est une étape parce que vous allez continuer à chanter.
48:27 Vous allez pas vous arrêter comme ça.
48:28 Bah non, je suis toujours là.
48:29 Voilà.
48:30 Et l'avenir maintenant, parce que, effectivement, les années passent, mais votre voix est intacte,
48:35 le public est là, il y a cette intégrale qui sort.
48:38 Et maintenant et demain ?
48:40 Moi, je pense pas trop à demain.
48:43 Je sais ce que je fais dans une... sur trois, quatre jours.
48:47 Oui.
48:48 Sinon, je me demande qu'est-ce que je fais la semaine prochaine ?
48:52 Je suis où ?
48:53 Ah, on a du radio.
48:54 Ah oui, qu'est-ce ?
48:55 Après, je fais PC.
48:56 C'est tout.
48:57 Voilà.
48:58 Je veux pas trop...
48:59 Je vis au jour le jour.
49:00 Je vous assure que je suis sérieuse.
49:02 Mais avec beaucoup d'idées pour l'avenir ?
49:05 J'ai pas vraiment d'idées.
49:07 Mon avenir est très restreint, n'est-ce pas ?
49:09 Alors mes idées...
49:11 J'ai pas d'idées préconçues.
49:13 Je vis vraiment le moment présent, avec beaucoup d'électations.
49:16 Je suis ravie de vous avoir retrouvés, par exemple.
49:19 Et tout doit devenir une joie, même si c'est des petites joies.
49:23 C'est important d'avoir le goût du bonheur.
49:25 On ne fait que traverser cette vie qui est pleine de tempêtes et pleine de...
49:30 d'heures, quand même.
49:31 Et quand on peut en profiter, le monde va être très mal.
49:35 Et on doit se sentir privilégié tous les jours.
49:38 Oui.
49:39 Et le peu de temps qui m'en reste...
49:41 Oh, William m'a dit ça l'autre jour.
49:43 Qu'est-ce qu'il nous reste à vivre, ma chère Nicole ?
49:47 Le montant de la vie d'un chien.
49:50 Écoutez...
49:51 Il n'a pas tort.
49:52 Non, mais vous n'êtes pas...
49:54 Il est de l'humour, vous y avez même en aussi.
49:56 Exactement. Et vous n'êtes pas qu'à vous, on le sait justement.
49:58 Et donc, je suis sûr que cette intégrale rappellera plein de souvenirs à celles et ceux qui vous aiment.
50:04 Et vous fera découvrir à celles et ceux qui vous aiment depuis moins longtemps que les premiers.
50:09 Et puis, continuez à garder cette bonne humeur et à chanter pour notre bonheur.
50:12 J'espère, j'espère.
50:14 Merci et à bientôt.
50:15 Mais je vous remercie de m'avoir reçu.
50:17 Les Clés d'une Vie, c'est terminé pour aujourd'hui. On se retrouve bientôt. Restez fidèles à l'écoute de Surradio.

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