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Clique, c'est présenté par Mouloud Achour, tous les jours à 19h45 en clair sur CANAL+ !
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00:00 ...
00:06 -Je voulais être artiste, je voulais pas être actrice.
00:09 Je voulais raconter des histoires.
00:11 -Elle crèche Chité-Lénine, une banlieue ordinaire.
00:14 -Comme une étape pour moi de me dire que c'est mon métier.
00:17 Alors ça, déjà, il y a quelque chose qui s'est relâché.
00:21 -Ca ferait mieux.
00:22 Sur les cartes de visite qu'elle n'utilise jamais,
00:25 ça mettrait du ciel bleu...
00:27 -Pour moi, les mots sont insuffisants.
00:29 J'ai besoin d'incarnation.
00:31 -C'est aussi le plaisir de pouvoir interpréter des gens différents,
00:34 qui ont des métiers différents.
00:36 Je suis très heureuse de ça et de travailler avec des metteurs
00:40 qui ont pas la même façon de voir les choses.
00:42 ...
00:46 -Toutes celles qui, un jour, ont donné l'espoir
00:49 à une petite fille d'atteindre les étoiles.
00:51 ...
00:55 -Je me disais qu'il me manquait un beau coup de pelle
00:58 pour finir la journée.
00:59 ...
01:04 Je sais même pas si c'est ce que vous voulez,
01:06 j'ai fait ce que mon coeur m'a soufflé.
01:09 ...
01:12 -Bonsoir, Alice Paul ! -Bonsoir.
01:15 -Je suis ravie de vous recevoir dans "Clic".
01:18 Bienvenue sur le plateau.
01:19 Merci beaucoup d'être avec moi sur le plateau de "Clic".
01:22 -C'est moi qui vous remercie.
01:24 -On m'a dit qu'il fallait dire "bonsoir, Alice Paul".
01:27 Qu'est-ce que c'est que cette petite manie ?
01:30 -C'est plus complexe.
01:31 Si vous dites "bonsoir", tout va bien, on est sur un classique.
01:34 Si vous dites "bonsoir", il en faut trois,
01:37 parce que c'est pas deux, c'est un ou trois.
01:39 -Sinon, ça va pas. -C'est un talk, je crois.
01:42 C'est les rues de conjuratoire.
01:44 Ca rend la vie très simple.
01:46 -J'imagine.
01:48 Vous êtes rentrée sur la musique de Renaud,
01:50 "Borlieu rouge". C'était votre chanson préférée.
01:53 -Vous êtes bien enseignée.
01:55 Toutes les chansons de Renaud sont mes préférées,
01:57 me suivent depuis que j'ai 4 ans, même quand je ne comprenais pas.
02:01 Et celle-là est une chanson qui...
02:03 Voilà, c'est un film en trois minutes,
02:05 c'est une histoire, c'est un livre.
02:08 Voilà, j'adore cette chanson.
02:09 -Vous dites, et on l'a entendu, que vous êtes artiste plutôt qu'actrice.
02:13 Pourquoi cette nuance importante ?
02:15 -J'ai l'impression que oui, qu'artiste,
02:19 il y a quelque chose, peut-être, de plus global,
02:22 il y a un état d'être.
02:23 Il n'y a pas juste de faire, d'être choisie, d'être pas choisie,
02:27 de prouver, de faire une performance.
02:29 Il y a un état de vie qui est permanent.
02:32 Voilà.
02:33 -Alice, vous avez joué dans 27 films,
02:35 mais vous êtes autrice, c'est pour ça que vous êtes là.
02:39 Vous avez sorti votre premier roman, "Coup de pelle",
02:42 vous étiez venue en parler sur le Pateau de clic.
02:44 C'est la suite au presque, "En Au Vive",
02:47 encore aux éditions Robert Laffont.
02:49 Et en Au Vive, on retrouve Charlie, votre commissaire,
02:52 qui vous ressemble beaucoup, votre style,
02:54 votre espièglerie, on retrouve beaucoup de choses.
02:57 Et là, cette fois, Alice...
02:59 Pardon, Charlie part sur les pas d'une disparue.
03:03 C'est ça, l'histoire, le pitch ? -Tout à fait.
03:05 On repart avec la même héroïne,
03:07 les lectrices me demandaient des nouvelles,
03:10 donc j'en donne. Elle est toujours avec son chien, Clint.
03:13 C'est une disparition,
03:15 tout le monde a l'air de prendre ça un peu à la légère,
03:18 mais il n'y a rien de très inquiétant au début.
03:21 Elle est persuadée que c'est inquiétant,
03:23 parce que Charlie pense tout le monde au pire.
03:25 Tout est dangereux, tout risque de nous péter à la gueule.
03:29 Donc, comme elle est à l'affût, elle s'imagine que c'est grave.
03:32 Et évidemment, elle va rentrer encore une fois
03:35 dans des méandres, dans des psychologies extrêmement complexes.
03:39 -Et on retrouve ce qui, pour moi, avait fait la magie du premier,
03:42 c'est-à-dire, évidemment, ce ton, ces images qui vous sont propres,
03:46 qui sont singulières, c'est du Alice Paul tout craché,
03:49 que vous avez trouvé à chaque ligne,
03:51 mais il y a aussi une vraie énergie et surtout du travail.
03:54 J'ai trouvé que, vraiment, dans le tissage de la narration,
03:58 il y avait un vrai travail d'autrice, de polar.
04:00 Pourquoi le polar, c'est votre genre de prédilection ?
04:03 -Déjà, je vous remercie. Et deuxièmement, je ne sais pas.
04:06 Très honnêtement, je ne sais pas, c'est mon genre de prédilection.
04:10 Je me mets toujours à la place du lecteur, des lectrices,
04:13 et j'imagine toujours que ça doit être agréable à lire
04:17 et qu'on doit avoir envie d'avancer avec le personnage.
04:19 C'est ça qui me plaît, dans le fait d'écrire du polar,
04:22 de semer, voilà, avec les apparences,
04:25 avec toutes sortes de contre-vérités.
04:28 Et ça m'amuse, c'est comme une énigme.
04:30 Je m'amuse à le faire et à imaginer les gens
04:33 qui vont penser à telle chose et qui vont délier tel fil.
04:37 -Avec beaucoup de psychologie, d'empathie,
04:39 c'est ça qui fait la différence.
04:41 C'est pas toujours le cas dans l'écriture polar.
04:44 Vous avez eu plein d'immersion avec Charlie.
04:46 L'écriture a toujours fait partie de votre vie.
04:49 Vous aviez commencé très tôt, à 13-14 ans,
04:52 vous écriviez de la poésie.
04:53 -Oui. Alors, c'était vraiment pas d'un très haut niveau.
04:56 Je préfère être honnête.
04:58 -Vous êtes un peu dure avec vous ?
05:00 -Je crois que je suis honnête.
05:02 J'en ai écrit un qui s'appelle "L'école à ma façon".
05:05 -Ca peut faire un peu un titre de chanson de Renaud.
05:08 -Oui, mais je crois que le niveau n'est pas encore là.
05:11 Mais oui, j'ai toujours écrit, j'ai toujours aimé les mots.
05:14 J'aimais pas l'école, mais j'aimais que le mot soit précis.
05:19 La langue française est d'une richesse
05:21 comme chacun sait, extraordinaire.
05:24 Et cette précision-là me plaît, car j'aime les choses précises.
05:27 Et malaxer les mots,
05:29 et écrire et partir dans son imaginaire,
05:31 on peut être n'importe où, dans n'importe quelle vie,
05:34 c'est sans limite, notamment dans le roman.
05:37 C'est ça qui me plaît, qui me donne des ailes,
05:40 même les moments plus difficiles.
05:42 -Vous avez écrit du théâtre à 19 ans,
05:44 vous avez même monté une pièce,
05:46 est-ce que vous avez des auteurs qui accompagnent
05:49 vos plages d'écriture ?
05:50 -Euh... Alors, j'ai des tas d'auteurs
05:53 que j'aime énormément, et à la fois...
05:56 Ces derniers temps, je me suis beaucoup remise
05:58 à lire des grands classiques,
06:00 j'avais envie de retrouver ça.
06:02 J'ai relu des Flaubert, des Balzac,
06:04 c'est quand même extraordinaire.
06:06 Et après, je lis des choses très contemporaines.
06:09 -C'est gentil. -Voilà, je vous l'ai dit.
06:12 J'ai aussi besoin de lire des choses
06:16 qui sont radicalement opposées
06:18 aux univers dans lesquels je pourrais moi m'immerger.
06:21 C'est important, même de la littérature étrangère,
06:24 des choses pas forcément attendues.
06:26 -Alice, vous êtes née à La Réunion,
06:29 mais vous avez grandi à Marseille, bébé.
06:31 C'est là que vous avez passé la plus grande partie
06:34 de votre enfance, et il y a quelques semaines,
06:37 la ville a accueilli la flamme olympique.
06:39 Il y a eu pas mal de polémiques.
06:41 Je voulais qu'on regarde ensemble les images.
06:44 C'est Jul qui a allumé le chaudron de la flamme olympique.
06:47 Comment ça vous a fait de voir votre ville de coeur animée
06:50 et accueillir la flamme ?
06:52 -Alors, j'ai regardé. -Qu'avez-vous pensé ?
06:54 -Je me suis dit que cette ville est extraordinaire.
06:57 Il faut être honnête qu'elle n'a pas été souvent mise en valeur.
07:01 J'étais franchement très heureuse pour les gens
07:03 interrogés pour les artistes, pour les sportifs,
07:06 pour qui j'ai beaucoup d'admiration,
07:08 mais aussi pour cette ferveur marseillaise.
07:11 Les gens étaient tous "Pour une fois, on vient nous demander,
07:14 "on nous calcule", comme on dit à Marseille.
07:17 -Belle imitation. -C'est vrai qu'à Marseille,
07:19 c'est pas assez, et je trouvais ça...
07:21 C'était bien de faire ça.
07:23 -Alice, vous êtes fan de Marseille,
07:25 mais vous êtes surtout fan de l'OM.
07:27 -Oui, ma olympique de Marseille.
07:29 -Il y a tout un tas de rumeurs qui courent autour de ça,
07:32 comme quoi vous dormiriez avec un maillot de l'OM.
07:35 Vous êtes fan de Papin, de Basile Boli ?
07:37 -Oui, j'avais les albums Panini,
07:39 vous savez, quand j'étais petite.
07:41 Et en fait, Papin, quand je tournais avec Dani,
07:44 il a eu la gentillesse de demander,
07:46 c'est vrai que j'étais fan de Dani Boon,
07:49 que Papin fasse un autographe, parce qu'il est copain avec lui.
07:52 Donc il m'a donné le maillot.
07:54 Dès que j'ai quelque chose qui me fait très peur,
07:57 le lendemain, je dors avec le maillot
07:59 pour que ça me porte bonheur.
08:01 -Il y a encore une petite superstition.
08:04 -Je ne vais pas vous les donner.
08:05 -Ca ne vous gâche pas trop la vie.
08:08 -Ca prend beaucoup de temps.
08:09 -Ca nous déconcentre.
08:11 -Toujours, depuis que je suis enfant.
08:13 Je ne me concentre pas sur une idée à la fois,
08:16 c'est très complexe.
08:17 -La révélation, Alice,
08:19 elle arrive avec les cours de théâtre quand vous avez 14-15 ans.
08:23 Vous vous rendez compte que l'école,
08:25 ce n'est pas forcément votre truc,
08:27 mais que vous vous évadez par le théâtre.
08:29 Vous passez des castings dans le dos de vos parents.
08:33 Vous avez fait des pubs, de séries.
08:35 J'ai découvert un truc improbable.
08:37 Vous avez failli être Miss Météo
08:39 avec une rencontre assez inattendue.
08:41 Comment ça se passe, cette période où vous débarquez à Paris ?
08:45 -Ca se passe mal.
08:46 C'est la caricature de la provinciale qui arrive à Paris.
08:50 Je suis un peu serveuse, un peu vendeuse,
08:52 je fais tout mal,
08:54 je n'ai aucune vie sociale, j'ai un agenda qui est vide.
08:57 Il n'y a rien dedans.
08:59 Il y a six refaire-permis.
09:00 J'avais perdu mon permis.
09:02 Je l'ai reperdu, il faut que je m'en occupe.
09:05 Donc, non, c'est difficile.
09:08 C'est désert, désertique.
09:10 -Et comment vous gardez la volonté ?
09:13 -Je ne comprends pas.
09:14 Je ne me l'explique pas.
09:16 Je n'aurai pas la force de refaire ça,
09:18 même en sachant tout le bonheur que j'ai eu après.
09:21 Je n'avais pas d'ego.
09:23 Je pouvais prendre des coups.
09:25 Ca ne me...
09:26 Je me relevais très vite, comme un enfant de 4-5 ans.
09:30 C'était très grave, mais 3 secondes.
09:32 Je suis toujours comme ça.
09:33 Et je ne sais pas, j'étais...
09:35 Et pourtant, je ne me disais pas que je suis ça.
09:39 Je peux...
09:40 -Il fallait continuer.
09:42 -Oui. C'est comme ça que j'ai créé ma première pièce de théâtre.
09:45 Je ne voyais pas grand monde.
09:47 Il y avait un vide social, et je le remplissais avec des mots.
09:51 -Vous avez bien fait d'attendre et de faire autre chose.
09:55 Ca nourrit votre vie de comédienne et d'autrice.
09:58 Il y a eu ensuite le grand succès, "Supercondriac",
10:00 "Redding", énorme succès populaire, 4,5 millions d'entrées.
10:04 C'est colossal.
10:05 Vous devenez une des figures préférées des Français.
10:08 Au total, Alice Paul, c'est 27 films.
10:11 Pourtant, Alice, ça m'a beaucoup touchée.
10:13 Vous dites que vous n'avez pas la carte d'un certain cinéma.
10:17 C'est quoi, cette carte ?
10:18 -C'est la carte du cinéma plus...
10:22 dit plus intellectuel,
10:24 plus de niche, plus...
10:27 Oui, j'ai pas la carte, mais alors, je n'en ai...
10:30 Je n'ai aucune souffrance de ça.
10:33 Je considère que c'est "non pas ma faute",
10:35 mais c'est de mon fait.
10:37 J'ai toujours adoré les acteurs, les actrices populaires, drôles.
10:41 J'ai toujours trouvé que c'était une grâce de faire rire les gens.
10:45 Quand j'ai eu la chance de rentrer dans cet univers-là,
10:48 je m'y suis jetée.
10:50 Je n'ai pas essayé de faire autre chose.
10:52 Peut-être que si j'avais été plus...
10:55 Offensive, je ne sais pas si c'est le terme,
10:57 mais si j'avais plus voulu, ça aurait marché.
11:00 Donc oui, j'ai pas la carte, mais peut-être que je n'ai rien fait pour.
11:04 -Aujourd'hui, c'est l'inverse.
11:05 On s'intéresse aux films qui font des entrées au cinéma.
11:09 -Oui, c'est vrai.
11:10 -Vous et Danny Boon, c'est marrant, on se dit que c'est un coup de foudre.
11:14 C'est quoi, la relation ? Ca a été assez fulgurant.
11:17 -Pour moi, on s'est rencontrés sur un plan parfait,
11:20 qui c'est le film de Pascal Chaumet, qui a fait "L'arnaqueur".
11:24 C'est la première personne qui m'a fait...
11:26 C'est la première fois que je me suis sentie devenir actrice.
11:30 Dans ses yeux à lui, j'étais drôle, chouette, originale, et voilà.
11:35 On tournait dans un plan parfait, mais on n'avait pas de scène ensemble.
11:39 J'avais beaucoup de scènes avec Diane Kruger, qui a été adorable.
11:43 Quand Danny a vu le film, il a dit qu'il faudrait la voir en essai.
11:46 Pascal m'a dit qu'il fallait la prendre,
11:49 mais Danny trouvait que j'étais trop jeune pour le rôle.
11:52 Après, ils sont venus me voir au théâtre,
11:55 et j'avais beaucoup d'admiration pour lui.
11:57 Je faisais ses sketchs quand j'étais petite,
12:00 donc j'étais quand même très... -Impressionnée ?
12:03 -Oui, je disais pas grand-chose.
12:05 Au début, quand on présentait un plan parfait
12:07 dans "Plein de villes" avec Pascal,
12:09 j'avais pas compris qu'il pensait à moi.
12:12 On a passé des essais, mais il y avait d'autres rôles.
12:15 Je lui ai dit qu'il devait prendre une telle.
12:17 -La meuf ne se vend pas du tout. -Il a eu l'élégance
12:20 de me mettre dans cette petite liste
12:22 pour pas que ça me change ni que je sois...
12:25 Quand il est venu me voir au théâtre,
12:27 je jouais ma pièce.
12:28 C'est pas pareil de voir quelqu'un 1h30 sur scène.
12:31 C'était réglé.
12:32 C'est un rapport, évidemment,
12:34 ça m'arrive de lui demander beaucoup de conseils,
12:37 évidemment, je lui ai envoyé mes livres,
12:40 de respect, d'amitié profonde et de...
12:44 -Très belle rencontre. -Oui, d'admiration.
12:46 Et de partage, ce qui est une belle chose dans la vie.
12:49 -Louise Paul, vous êtes la comédienne qu'on connaît.
12:52 Un autre sujet anime la société.
12:54 La parole se libère dans le cinéma, les femmes parlent.
12:58 Sur notre plateau, on a reçu Juliette Binoche.
13:00 Elle nous a parlé de son expérience,
13:02 souvent malheureuse.
13:04 Je voulais qu'on l'écoute ensemble et qu'on en reparle après.
13:07 -À partir du moment où on est entendue, écoutée...
13:11 D'abord, on existe autrement.
13:15 Et que la douleur, si elle est entendue,
13:18 ça fait moins mal, déjà.
13:20 Ca fait un peu moins mal.
13:22 -Vous avez reçu des soutiens de comédiennes,
13:25 de gens du cinéma, d'hommes, de femmes ?
13:27 -Après avoir parlé ? -Oui.
13:29 -Christophe Honoré m'a...
13:31 m'a dit quelque chose de simple,
13:34 mais qui m'a vraiment...
13:35 qui m'a vraiment fait du bien.
13:37 Il a dit "t'aurais pas dû vivre ça".
13:39 -C'est ce qu'on pense tous.
13:43 C'est pour ça que je dis que c'était très dur à lire.
13:46 Comment elle a pu vivre ça et pourquoi elle a vécu ça ?
13:49 -A la fois, je pense que ça m'a rendue plus forte.
13:53 Donc...
13:55 Parce que ça rend plus courageux,
13:57 parce que ça rend plus... plus humain.
14:00 On sait ce que c'est souffrir, on comprend mieux l'autre.
14:04 Du coup, on est plus à même d'avoir une sorte de...
14:07 de porosité, de compassion,
14:10 ça permet d'être plus humain.
14:12 -Alice, ce que dit Juliette Binoche,
14:15 est-ce que ça vous est arrivé de vous le dire,
14:17 que vous n'auriez pas dû traverser certaines expériences
14:21 dans la vie, dans le cinéma ? -Bien sûr.
14:23 Dans la vie, alors évidemment, oui, dans la vie,
14:26 avant même le cinéma.
14:27 Et au cinéma aussi, je suis...
14:29 Non, non, je trouve ça très beau, parce que...
14:32 Non, c'est très intéressant, c'est le tout début,
14:35 mais de dire que le fait que la parole soit reconnue,
14:38 ça console déjà.
14:40 Et ça, c'est vrai que le non-dit...
14:42 Et c'est vrai que nous sommes dans une société, dans un monde,
14:45 et aussi dans un milieu
14:47 où certaines choses ne sont pas bonnes à dire,
14:49 et où c'est un peu marche ou crève,
14:52 il y a quand même ça, le monde entier est comme ça.
14:55 Après, j'ai toujours ce truc-là, je me dis,
14:57 mais parfois, j'ai vu des choses très dures dans mon métier,
15:01 et voilà. Et à la fois, évidemment,
15:03 quand tu élargis le prisme et que tu vois le monde fonctionner,
15:06 c'est ça qui me décourage un peu,
15:09 c'est par quel morceau on attrape les choses.
15:11 -Par quel boule prendre. -Voilà.
15:13 Après, je trouve ça formidable que nous nous mettions à parler,
15:17 parce que nous avons cette possibilité d'être médiatisées
15:20 d'une manière ou d'une autre,
15:22 et que maintenant, on se sent mal à l'aise de ne pas l'ouvrir.
15:25 On a l'impression de manquer de courage.
15:28 -Ça, vous l'aviez déjà dit, Alice Paul.
15:30 Vous aviez dit "après le mouvement #MeToo,
15:32 "je me suis refait le film de ma vie,
15:35 "et il y a bien une ou deux fois où j'aurais pu déposer
15:38 "et je n'ai pas osé parler".
15:39 Il faut du courage pour dénoncer.
15:41 -Du courage et de l'acceptation.
15:43 C'était même pas ça, c'est le déni.
15:46 C'est-à-dire qu'on vit quelque chose qui est grave
15:49 d'une manière ou d'une autre.
15:50 Il y a évidemment tout ce qui est de l'ordre sexuel, etc.,
15:55 mais il y a l'abus de pouvoir.
15:58 C'est quelque chose de terrible, et qui est là aussi dans tous les milieux.
16:02 Et je trouve que parfois, quand on est face au mal
16:05 ou à quelqu'un de dangereux,
16:07 que ce soit moralement ou physiquement,
16:09 on met du temps parfois...
16:11 Il y a des choses très évidentes qui sont atroces,
16:14 et il y a des choses un peu plus entre deux.
16:16 Tout le problème est de l'admettre déjà avec soi-même.
16:19 Parfois, pour s'en sortir, on préfère dire "c'était pas si grave".
16:23 -C'était pas si grave.
16:24 -Ce qui me console, c'est de me dire que les gamines de maintenant,
16:28 qui arrivent à Paris à 18 ans,
16:30 elles savent que ça existe,
16:32 et elles connaîtront mieux les limites
16:34 que ce que nous, on connaissait, je pense.
16:37 -Autre image forte de la semaine dernière,
16:39 c'est celle de Judith Gaudrech
16:41 qui monte les marges du festival pour son court-métrage,
16:44 pour lequel elle a reçu des milliers de témoignages.
16:47 Ce geste de mettre les mains devant la bouche,
16:50 il y a tout un tas de gestes, de signaux
16:52 qu'on voit apparaître, qu'on n'avait encore jamais vus.
16:55 Est-ce que ces images-là, aussi, pour vous,
16:57 qu'est-ce que ça veut dire ?
16:59 -J'aime beaucoup la simplicité de juste ce geste,
17:02 parce que finalement, on commence tous à s'exprimer là-dessus,
17:06 dans un sujet où...
17:07 Il y a blanc et noir, à un moment donné, de toute façon,
17:10 mais le seul geste comme ça, je trouvais, d'une efficacité,
17:13 on peut le faire dans n'importe quel milieu,
17:16 dans le monde entier, et ça, je trouve ça bien de sortir,
17:19 pas juste notre microcosme, mais partout,
17:22 et ça a une chance de se répandre.
17:24 -Ca recoupe ce que vous venez de dire,
17:26 de s'auto-censurer, aussi ? -C'est nous.
17:28 C'est nous, aussi.
17:30 C'est-à-dire qu'on adoube, si on ne dit pas,
17:32 ce qui est fait.
17:33 -Qu'est-ce qui a été le plus difficile pour vous,
17:36 dans tout ce chemin parcouru ?
17:38 -Dans ce parcours, le mépris.
17:40 Je pense que ça, c'est la chose...
17:43 Quand on se sent... Le mépris, c'est que c'est...
17:45 Le fait d'être ignoré.
17:47 Il n'y a rien de pire que quelqu'un dans une soirée
17:50 qui fait semblant de ne pas... Voilà.
17:53 Alors, dans une soirée, et ça se rapporte à la vie entière,
17:56 il ne faut jamais, jamais,
17:58 même quand on est de mauvaise humeur,
18:01 ne pas se donner, mépriser, ignorer quelqu'un.
18:03 C'est le truc le plus laid du monde.
18:05 -C'est ce qui vous a fait le plus souffrir ?
18:08 -Oui. C'est même quelque chose qui peut me faire souffrir,
18:11 même si je vois à quelqu'un cette situation,
18:13 alors que moi, c'est mieux socialement,
18:16 ça me rend malade.
18:17 Je crois que c'est le truc le plus...
18:19 S'il n'y avait pas ça dans le monde,
18:21 il y aurait beaucoup moins de conflits divers et variés.
18:24 -Alice Paul, on voulait vous parler des coordinateurs d'intimité.
18:28 C'est un pays anglo-saxon, et ça se démocratise doucement.
18:31 On a un sujet à vous soumettre.
18:33 -Depuis "Me Too", on en voit de plus en plus
18:36 sur les plateaux de tournage, les coordinateurs d'intimité.
18:39 Ils accompagnent la mise en scène et s'assurent du consentement
18:43 des acteurs pendant les scènes d'intimité ou de nudité.
18:46 -Créer un environnement de travail qui soit sécure,
18:49 collaboratif, éthique, pour les comédiens,
18:51 mais aussi pour l'équipe de tournage.
18:53 -Un environnement sain rendu possible par un travail
18:56 et un travail sur la mise en scène,
18:58 une présence sur le plateau,
19:00 mais aussi en contrôlant l'accès aux images tournées.
19:03 -Si le métier reçoit un accueil favorable
19:22 et s'exporte à d'autres formats,
19:24 d'autres y voient une forme d'entrave à la liberté des cinéastes,
19:28 une police de la vertu qui nuirait à la spontanéité
19:31 et à la beauté du cinéma.
19:32 -Un point de vue souvent biaisé par des idées préconçues,
19:49 car s'assurer que les acteurs se sentent en sécurité
19:52 et que la limite ne devrait pas troubler un processus créatif.
19:55 -Alice Polch, vous voyez faire des yeux comme ça
20:10 pendant le magnéto ? Vous êtes outré.
20:12 -C'est-à-dire que c'est indigné,
20:15 parce qu'il y a des gens qui viennent parler de ça
20:18 pour me mettre à l'aise, les acteurs, les actrices.
20:21 Le problème, c'est ne pas reconnaître que c'est un travail.
20:24 On est rémunérés, on a des fiches de paie,
20:26 c'est un métier.
20:28 -C'était une nécessité ?
20:30 -Je trouve ça terrible que ce soit une nécessité.
20:33 On aurait dû arriver à gérer ça humainement
20:36 sans avoir besoin, peut-être, de personne en plus, comme ça.
20:41 -Vous avez déjà, vous, eu à tourner des scènes d'intimité,
20:44 des situations dans lesquelles vous ne vous sentiez pas...
20:47 -Pas beaucoup. J'ai quand même fait pas mal de comédies.
20:51 Après, non, dans "Ces années", "Moi", "Embrasse-moi",
20:54 j'avais beaucoup de scènes.
20:55 Quand t'es très à l'aise avec ton metteur en scène,
20:58 ça n'a rien à voir.
21:00 C'est surtout ça.
21:01 Il y a des gens avec qui, d'instinct, tu te dis
21:04 que ça va être compliqué,
21:06 parce que quelque chose me déstabilise.
21:09 Mais quelqu'un qui est bien dans sa vie,
21:11 qui est heureux de faire son film,
21:13 il veut que son actrice, son acteur, soit bien.
21:16 Mais après, il faut aussi que tout le monde admette
21:19 qu'il y a des scènes évidentes
21:21 et que c'est pas classique de passer une journée à jouer ça.
21:24 Donc il faut parfois un peu d'aide, quoi.
21:27 Voilà, psychologique.
21:28 En tout cas, il faut de la douceur, je pense,
21:31 de la compréhension.
21:32 -Alice, on a fait quelque chose, on a cliqué sur vos réseaux.
21:36 -Ouh là ! -On regarde.
21:38 Musique électronique
21:40 ...
21:43 -On a cliqué sur vous, Alice Paul !
21:45 Aidez Alice dans le cinéma français,
21:47 parce qu'il y a de Parisiens au but chaumont.
21:49 -OK, ciao, ciao, ciao !
21:52 -Sur vos réseaux, on a pu suivre votre passion pour l'OM.
21:55 -C'est Marseille, bébé !
21:56 -Une passion décoiffante.
21:58 -Oh my God, what is that ?
21:59 -Mais aussi votre culte pour Renaud, le chanteur.
22:02 -Une poésie accessible, pas prétentieuse,
22:04 très riche et très pure.
22:05 Il y a de la révolte, de la douceur, de l'humour.
22:08 -Et dans un autre genre pour Beyoncé,
22:10 avec qui vous auriez eu un eye contact.
22:12 -C'est vrai, tout le monde va me prendre pour une mytho.
22:15 Elle s'est mis comme ça, elle est repartie.
22:17 C'est bon.
22:18 -Les nouvelles.
22:19 -On a découvert que tout le monde vous aimait.
22:22 Les cadreurs, lors de vos interviews.
22:24 -Ca se passe très bien. Après, il est venu me voir au théâtre.
22:27 -On a joué.
22:28 Musique jazz
22:30 ...
22:31 -Vos partenaires de jeu, qui vous nourrissent
22:33 pendant les interviews.
22:35 -Les ch'tis, même si c'était la 1re fois qu'on travaillait ensemble,
22:38 on a eu le temps de comprendre.
22:40 -Un côté bonne copine qui assure la promo de ses films,
22:43 même quand c'est bien laborieux.
22:45 -C'est bon ? -Oui.
22:46 -Alors, expliquez.
22:47 Donc, Camille...
22:48 -Allez, Vincent !
22:49 -Mais désormais, c'est Alice Paul, la romancière,
22:52 que l'on reçoit. Une autrice dont le style est apprécié de tous,
22:55 avec des commentaires originaux.
22:57 -Fonctionnel, pratique à utiliser, très simple.
23:00 -Forcément, ça va nous donner envie de dévorer en eau vive, cet été.
23:03 Les pouces dans un hamac.
23:05 -C'est quoi, cette rencontre avec Beyoncé ?
23:07 Ca sort d'où ?
23:08 -Comme vous l'avez dit, j'ai failli être Miss Météo,
23:11 figurez-vous, sur Canal.
23:13 On était plus que deux. -On en a adoré.
23:15 -Alors bah...
23:16 C'était...
23:17 J'étais en état de stress, je peux même pas vous dire.
23:20 Je récupère une robe trop serrée.
23:22 Rien ne va, je sens que c'est compliqué.
23:25 J'ai mon sketch, j'ai tout.
23:26 Je suis dans la loge, porte ouverte.
23:28 On a fini de me maquiller, j'attends un peu,
23:31 je suis pas très à l'aise.
23:32 J'étais tellement dans ma... Je sais pas, dans ma bulle.
23:36 J'avais même pas Internet,
23:37 je faisais imprimer mes textes en bas.
23:39 J'ai pas d'ordinateur.
23:41 "Il y a Beyoncé !"
23:42 Je ne voyais pas qui était Beyoncé.
23:44 J'ai un petit moment, je suis un peu assisée.
23:47 Et donc, Beyoncé, Beyoncé.
23:48 Et je vois plein de jeunes femmes passer,
23:51 des hommes super beaux, tous, voilà,
23:53 très athlétiques, et ils passent, machin.
23:55 Tout est en effervescence.
23:57 Et à un moment, moins de bruit, et là, j'entends...
24:00 -Ah ! -Tac !
24:01 Je vous jure, c'est vrai.
24:02 -Je sais pas, c'est une mytho.
24:04 -Je suis toujours dans ma petite loge,
24:06 et là, je vois une fille sublime,
24:09 avec des cheveux, un corps de rêve.
24:11 Je tourne la tête, elle me fait...
24:13 Et elle avance !
24:14 Et elle sort de mon cadre.
24:16 -Et vous, vous lui dites bonsoir.
24:18 -Moi, je lui dis rien.
24:19 "Elle est bien."
24:20 -Ah oui !
24:22 -Et puis voilà.
24:23 Si elle se souvient, faudrait lui demander.
24:25 -Faut lui faire une piqure de rappel.
24:28 Les réseaux sociaux, c'est pas votre truc ?
24:30 -Ah non, non. Et puis, je suis nulle.
24:32 Je sais pas comment... -Il y a un petit effort.
24:35 -Je vous remercie. Vous avez noté.
24:37 Merci.
24:38 Merci d'avoir regardé cette vidéo !