Mardi 11 juin 2024, SMART BOURSE reçoit Clémence de Rothiacob (Gérante, Richelieu Gestion)
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00:00Le dernier quart d'heure de Smartboard, chaque soir, c'est le quart d'heure thématique.
00:13Le thème ce soir, c'est celui du marché des small et mid-cap en Europe, avec notamment
00:18le prisme de l'actionnariat familial.
00:20Nous en parlons avec Clémence Dorothy Jacob, qui est gérante chez Richelieu Gestion.
00:24Bonsoir Clémence.
00:25Bonsoir Yacob.
00:26Vous gérez le fonds Richelieu Family chez Richelieu Gestion, mais de manière un peu
00:31globale, comment vous regardez jusqu'à aujourd'hui ce regain d'intérêt qu'on a vu à travers
00:38les performances des marchés des small et mid-cap, notamment en Europe, depuis une paire
00:43de mois, j'ai envie de dire, avec un retour de surperformance même de ces petites et
00:48moyennes valeurs par rapport aux indices de grande capitalisation.
00:51Quels ont été les drivers de ce mouvement et qu'est-ce qui a caractérisé ce regain
00:55d'intérêt Clémence ?
00:56C'est vrai, on a un regain d'intérêt qu'on n'avait pas vu depuis longtemps, puisqu'on
00:59a eu trois mois consécutifs de surperformance des petites capitalisations, mars, avril,
01:03mai.
01:04Ça n'a pas permis de rattraper le retard, puisqu'en début d'année, elles avaient quand
01:07même sous-performé.
01:08Et encore, quand on regarde encore plus dans le rétroviseur, encore plus loin, on a 20%
01:12de sous-performance depuis deux ans, 30% depuis trois ans, les indices stocks.
01:16Donc effectivement, le chemin sera encore long.
01:19Néanmoins, on voit vraiment un regain d'intérêt qui va de pair avec une détente des taux
01:26longs.
01:27C'est assez impressionnant de voir que la surperformance des small caps s'est arrêtée
01:32le jour où les taux ont commencé à monter.
01:34La corrélation est immédiate et forte.
01:37On a des tableaux, on a des graphes, c'est assez impressionnant.
01:40Et d'ailleurs, en décembre dernier, on a commencé à avoir une détente du moins des
01:43banquiers centraux, moins aux quiches, avec quand même une volonté d'accepter dès 2024
01:51des baisses de taux, ce qui n'était pas gagné en début 2023.
01:53Là, on a vu un début de regain d'intérêt sur les small caps et c'est assez intéressant.
01:59Après, d'un point de vue sectoriel, on a vu dernièrement aussi une accélération des
02:05OPA dans des secteurs qui étaient sous-valorisés, alors du moins qui avaient sous-performé.
02:10L'énergie renouvelable, c'est un bon exemple.
02:13On a à la fois NEOEN en France, NKVIS en Allemagne, deux OPA.
02:17Ce qui est intéressant ou frustrant, c'est que si vous gardez le prix après prime d'OPA,
02:23on est encore bien en dessous des niveaux de septembre 2022.
02:25Donc, en fait, c'est très attractif pour un acquéreur parce que les niveaux sont à la casse.
02:30Pour des investisseurs long terme, pour nous, c'est un peu frustrant parce qu'on se dit
02:33qu'on n'a pas trop envie d'apporter dans ces conditions-là.
02:35Mais ce qui est intéressant, c'est que ça dynamise tout le secteur, tous les secteurs.
02:39Le marché prend vraiment acte et que là, les fonds de travail d'équité sont revenus.
02:43Ou alors, les familles sortent de bourses adossées à des fonds.
02:47Donc, il y a vraiment un niveau de valorisation qui interpelle et surtout dans un contexte.
02:51Alors, depuis quelques jours, on a un peu plus de difficultés.
02:56Il y a un peu plus de bruit.
02:56C'est ça, la prime de risque du marché action européen est repartie à la hausse.
03:01Néanmoins, on a quand même des éléments macroéconomiques, en plus de la hausse des taux,
03:05de la baisse attendue plutôt des taux, qui ont aidé.
03:08Et c'est sous-jacent à la fois l'idée quand même que quelques baisses de taux vont venir aider,
03:14ou en tout cas mettre un peu d'huile dans les rouages de la macroéconomie européenne.
03:19Ça, ça reste un facteur justement qui permet de regarder au-delà du bruit politique
03:24qui va nous accompagner au moins jusqu'au 7 juillet, pour dire les choses clairement.
03:28En tant qu'investisseurs de long terme, comme vous dites Clémence,
03:31c'est des fondamentaux qui normalement doivent permettre de rester constructifs sur ces marchés-là.
03:35Exactement, et il y a un bon proxy de marché si vous regardez le segment des micro-cap,
03:39donc vraiment des plus petites capitalisations, à faire à 500 millions d'euros de capitalisation.
03:43Depuis le début de l'année, on a une performance qui est à peu près en ligne avec les mid-cap.
03:47Donc ça veut dire qu'en fait, elles ont arrêté de sous-performer.
03:51Alors elles ont encore un retard qui est très fort, ne serait-ce que face aux small-cap depuis deux ans.
03:55Les small-cap, elles aussi, sont encore très sous-valorisées par rapport aux large-cap.
03:59Mais les micro-cap, c'est vraiment le segment qui était encore plus à la traîne.
04:02On voit qu'elles arrêtent, en tout cas, le marché commence à revenir à s'y intéresser.
04:08En revanche, à notre sens, il faudra qu'elles aient davantage le vent dans le dos
04:11pour que là, on ait l'incrémental de performance,
04:17puisqu'il va falloir une confirmation de l'amélioration des indicateurs européens.
04:23Les PMI, c'est vraiment ce qu'on regarde en premier, les PMI européens.
04:26On voyait que ça allait un peu mieux, on est encore en contraction.
04:28Il y a certains pays qui peuvent inquiéter, l'Allemagne.
04:31Au-delà du prix politique qu'on a ces derniers temps,
04:33mais c'est vraiment des indicateurs d'economic surprise aussi en Europe.
04:37Ça allait mieux, on était à chaque fois au-dessus des attentes.
04:40Ça, c'est vraiment des indicateurs qu'on va regarder en plus des taux et du niveau de l'inflation.
04:44Et c'est des indicateurs avec lesquels ces marchés de mid, small, micro sont fortement corrélés.
04:51Il n'y a pas de doute là-dessus.
04:53Sur un historique long, c'est des corrélations qui marchent, qui sont très fortes.
04:58Alors PMI, les graphiques sont assez éloquents.
05:02La corrélation positive entre l'évolution des PMI et la performance des small cap, elle est importante.
05:07Et même avec l'évolution du prix du cuivre, qui est un bon indicateur.
05:10Le Dr.Copper, c'est ça, la bonne santé de l'économie mondiale.
05:14L'évolution des PIB, etc.
05:18Donc il y a ça.
05:19Maintenant, c'est vrai que sur ces niveaux boursiers, on a quand même une décote.
05:26Moi, je n'ai pas vu ça depuis 10 ans qu'on gère le fonds Family Small Cap.
05:30On n'a pas vu de décote.
05:31Il y avait toujours une prime.
05:32Parfois même une prime sur la prime, comme en 2018, ce qu'on a expliqué après l'éclatement de la bulle.
05:38Oui, la dernière année de vraies primes pour les smalls françaises notamment.
05:42Exactement.
05:43Donc là, c'est assez interpellant.
05:45Et puis, la croissance des bénéfices par action est dans ce secteur-là.
05:48C'est dans les smalls et mi-cap que vous allez avoir de la croissance des bénéfices par action cette année.
05:53Et pas dans les large cap.
05:54Dans cette phase de reprise, ces quelques mois de surperformance qu'on peut observer, Clémence,
06:00est-ce que vous observez quand même que la qualité est valorisée par les investisseurs ?
06:06Est-ce que le facteur qualité est pris en compte ?
06:08Ou est-ce que c'est quelque chose de plus général sans grande discrimination à ce stade ?
06:12Alors, il y a deux choses.
06:14On voit quand même un regard d'intérêt général.
06:17Les flux sont un peu plus importants sur la classe d'actifs small cap en général.
06:22Et on le voit, d'ailleurs, la collecte nous-mêmes.
06:24Les intérêts des institutionnels, etc. reviennent.
06:27Oui, on appelle.
06:28Enfin !
06:29Ça veut pas.
06:30Ça veut dire qu'en face, nous, gérants, nous achetons.
06:33Donc, il y a un mécanisme.
06:35Il y a quand même plus d'intérêts qui viennent.
06:36En revanche, il n'y a pas de flux qui viennent en dehors de l'Europe.
06:39On n'a pas du tout...
06:40Mais c'est le problème de toute la classe d'actifs equity européenne.
06:44Même pour les grandes capitalisations, c'est plus difficile.
06:46Donc, on a ça qui est intéressant.
06:47En revanche, ce qu'on peut voir aussi, c'est que comme à chaque fois que la version au risque baisse,
06:51on a quand même des investisseurs qui sont plus enclins à prendre un peu plus de risques.
06:55Et c'est vrai que les small caps, les petites capisations, sont quand même vues comme des titres plus volatiles,
07:00donc plus risqués.
07:01Et on voit certains titres...
07:02Mais ça, c'est plus corrélé finalement à l'anticipation attendue des taux.
07:07Certains titres un peu plus endettés qui retrouvent les faveurs des investisseurs
07:10parce que le marché se dit, après tout...
07:12Ça crée des effets de soulagement un peu parfois violents, brutaux.
07:16C'est ça.
07:17Il y a des titres qui étaient extrêmement vendus à découvert.
07:20Et on voit que quand on a des journées un peu plus euphoriques, on va dire,
07:25c'est ces titres-là qui sont achetés en premier parce qu'ils se couvrent.
07:28Et puis, on voit que le marché est capable d'avoir un peu plus d'appétit sur ce qui est plus risqué.
07:33Mais en revanche, ce n'est pas forcément notre philosophie.
07:35Nous, on reste vraiment toujours acheté le même titre de société.
07:38Mais c'est intéressant de voir quand même cette partie-là.
07:41Ça régénère quand même de l'appétit au risque, effectivement, même sur ces petites valeurs dans ces compartiments.
07:47Qu'apporte le facteur famille ?
07:48Justement, Clémence, 10 ans de TRAC sur richelieu famille.
07:52C'est un thème de long terme, l'actionnariat familial, l'actionnariat de contrôle, etc.
07:56Beaucoup d'investisseurs y voient beaucoup d'avantages.
08:00Il y a peut-être aussi des choses à surveiller.
08:04Quand on est à côté d'un actionnaire de contrôle, est-ce que le minoritaire est forcément bien traité ?
08:10Ça, c'est toujours une question.
08:11Mais qu'est-ce que ça apporte comme avantages ?
08:13C'est un vrai sujet.
08:14Oui, c'est un vrai sujet.
08:15Je veux bien qu'on en dise un mot.
08:16Bien sûr.
08:17Il y a des caractéristiques communes, des atouts communs qui sont indéniables.
08:21Des entreprises familiales.
08:22Chez Richelieu, depuis 10 ans, on a recensé une base d'entreprises familiales.
08:27On a un peu moins de 500 sociétés identifiées.
08:29On compare à une base d'entreprises non familiales, qui est à peu près du même accueil.
08:33Qui sont les pères.
08:34C'est ça, vraiment du même nombre de sociétés.
08:36Et les statistiques sont vraiment intéressantes.
08:39Dans notre base de données, on a plus de 40% des CIO, des patrons d'entreprises familiales,
08:44qui sont là depuis plus de 10 ans.
08:46Alors qu'à côté, vous avez 15% des entreprises non familiales, qui sont plus de 10 ans.
08:51Donc vous avez vraiment une stabilité à la fois actionnariale, stabilité managériale.
08:56Et ça, c'est vraiment intéressant parce que ça se matérialise dans les indicateurs financiers.
09:00Nos indicateurs financiers des entreprises familiales sont moins volatiles.
09:03Vous regardez les retours sur capitaux employés, les investissements en immobilisation.
09:08C'est moins volatile.
09:09Vous avez quand même une pérennité dans la stratégie qui est vraiment intéressante.
09:12Et puis une discipline dans l'allocation du capital.
09:15Ça, c'est évidemment le premier atout.
09:18Beaucoup moins d'endettements.
09:19On a près de 30% de notre base qui est en trésorerie net positive.
09:23Ça veut dire qu'elles autofinancent leur innovation, leur recherche et développement,
09:27investissement de long terme s'il en est.
09:29Elles autofinancent parfois des acquisitions.
09:32Elles n'ont pas besoin de faire appel au marché.
09:34Ce qui était très intéressant avec des taux aussi élevés.
09:37Pas besoin de faire appel au marché de la dette.
09:40Oui, bien sûr, capitaux tout court.
09:43Ça quitte l'urée de la famille en plus.
09:45C'est moins intéressant pour elles.
09:46Il y a toutes ces caractéristiques-là.
09:48Et après, c'est intéressant de voir comment le marché valorise tout ça.
09:51Il y a deux points de vue.
09:53Déjà, très souvent, elles se traitent avec une prime,
09:56comme tout ce qui est vu comme qualité, avec une discipline, allocation du capital, etc.
10:03Il y a une légère prime en valorisation
10:05que nous sommes ravis de payer finalement quand vous avez une stabilité.
10:09Surtout sur le long terme.
10:10C'est assez intéressant.
10:11On voit qu'il y a une surperformance boursière qui est très intéressante.
10:15Et nous, ce qui nous importait, c'était vraiment de regarder les phases de baisse de marché
10:19et de voir comment elles se comportaient.
10:20Et en fait, elles résistent mieux en phase de baisse.
10:24On a une seule exception qui était lors de la guerre commerciale sino-américaine sous l'ère Trump.
10:30Là, on avait une amplification de la performance à la baisse familiale
10:36qui est due, à notre sens, à un biais sectoriel.
10:38Dans notre base, on a un peu plus d'industries, un peu plus de techs,
10:41et de techs plus vulnérables.
10:43Plus sensibles aux frictions et aux tensions.
10:45C'est ça.
10:46Dans quel cas, mis à part ce phénomène spécifique,
10:50j'imagine que les échecs ou les mauvaises expériences d'actionnaires familiales,
10:55ça doit être intéressant à observer, à analyser en tout cas.
10:58Dans quel cas est-ce que ça peut être un vent contraire pour l'investisseur minoritaire ?
11:05Il y a plusieurs choses.
11:06Il faut qu'il y ait une convergence d'intérêts entre nous minoritaires et la famille
11:10pour une création de valeur boursière.
11:12C'est-à-dire qu'il y a des sociétés...
11:13Donc bien comprendre la stratégie de la famille, où elle veut aller,
11:16ses enjeux familiaux, peut-être même de succession, de transmission.
11:19Alors ça, c'est encore autre chose.
11:20Oui, mais est-ce que la famille est claire avec sa stratégie, ses enjeux,
11:23est-ce qu'elle est transparente avec ses objectifs ?
11:25Exactement, et est-ce que vraiment, pour elle, la progression de son cours de bourse est importante
11:29ou on a quand même une dictature du court terme en bourse
11:32et on a une valorisation dans notre fonds qui est quotidienne.
11:35Donc évidemment, on a quand même des besoins de performance.
11:39Oui, on ne peut pas attendre 10 ans.
11:41C'est difficile.
11:42Non mais il faut, le temps long bien sûr.
11:44Tout l'intérêt d'avoir une gestion agile et active
11:47et de pouvoir égrener ou augmenter nos positions en fonction de ça.
11:52Donc vraiment essayer d'avoir ça.
11:54Et puis la gouvernance en fait, c'est le nerf de la guerre.
11:57Pour nous, c'est un critère très important de sélection des entreprises.
12:01C'est-à-dire qu'on a sous-pondéré dans nos critères ESG la gouvernance
12:06parce qu'en fait, elles sont mal notées en ESG
12:09parce que l'indépendance du conseil d'administration est moins forte.
12:14Donc évidemment, elles se font plutôt saquer par les agences de notation.
12:18Mais pour nous, c'est plutôt bien que la famille soit au board.
12:21En revanche, la gestion, la succession, c'est éminemment très important.
12:26Le fait que la famille dirige ou pas, pour nous, ce n'est pas un critère.
12:30Parce qu'on a des exemples où la succession s'est très mal passée.
12:34On va citer personne.
12:36On a des exemples où finalement, on a des sociétés qui,
12:39depuis le départ de leur fondateur, sont les plus belles réussies d'entreprises familiales.
12:44Publicis, L'Oréal ont été gérées par la famille que les quelques années...
12:48Ce n'est pas un facteur discriminant.
12:49Non, ça ne l'est pas.
12:50Parce que justement, la façon pour nous de juger une société,
12:55son management ne va pas dépendre de ce critère familial.
12:59On va regarder plutôt ce qu'on appelle le track record.
13:02Quand le management a fait des acquisitions, est-ce qu'il y a eu des créations de valeur ?
13:06On va regarder la façon de communiquer au marché.
13:08Ça, c'est vraiment le point le plus important.
13:10La transparence.
13:12Et parfois, ça peut manquer dans certaines entreprises familiales.
13:15Qui se sentent moins obligées peut-être que d'autres types d'entreprises
13:19d'être transparentes et d'avoir une communication financière appropriée.
13:23Après, quand on est coté, on accepte les règles du marché coté.
13:27Merci beaucoup Clémence.
13:28Merci.
13:29Clémence de Rautiacop qui était avec nous pour évoquer les enjeux des marchés de Small & Mid-Cap
13:33en France et en Europe gérantes chez Richelieu Gestion.