Gabriel Attal relance l'idée de l'impôt participatif !

  • le mois dernier
Avec Philippe Crevel, économiste, directeur du Cercle de l’Epargne



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Transcript
00:00Les débats de l'été sur Sud Radio, il est à 10h17, va-t-on pouvoir bientôt choisir comment sont utilisés nos impôts ?
00:13L'idée d'un impôt participatif est en tout cas relancée par Gabriel Attal, proposition faite ce mois-ci aux autres forces politiques.
00:20Mais comment peut-on mettre en place une telle mesure ? Est-ce seulement réalisable ?
00:24On en parle avec vous Philippe Crevel, bonjour !
00:26Bonjour !
00:27Et bienvenue sur Sud Radio, économiste, directeur du Cercle de l'Épargne.
00:31L'impôt participatif, Philippe Crevel, c'est quand même un vieux serpent de mer, pourquoi on ne l'a pas mis en place jusqu'à présent ?
00:37C'est trop difficile à instaurer ?
00:39Je dirais que l'impôt participatif, ça existe déjà, c'est un peu comme Monsieur Jourdain, on fait de la prose sans le savoir et on fait de l'impôt participatif sans le savoir.
00:49Une réduction d'impôt, quand vous décidez par exemple de favoriser une association, vous bénéficiez d'une diminution d'impôt.
00:57Et en fait vous avez indirectement affecté une somme liée à l'impôt à telle ou telle association.
01:05Donc on voit bien que ça existe, pareillement, vous voulez favoriser le logement, l'investissement locatif, vous bénéficiez d'un avantage fiscal.
01:12Et donc c'est lié au fait que vous voulez favoriser le logement, certes c'est pour vous, mais indirectement il y a une affectation de l'impôt.
01:18Là ce que propose Gabriel Attal, c'est d'aller plus loin, de dire qu'en fait je souhaite faire un effort supplémentaire pour l'éducation ou pour tel ou tel autre domaine du champ public.
01:30Ça peut être que marginal, parce que globalement si tout le monde décide de faire que l'éducation, il n'y aura rien pour la défense, il n'y aura rien pour...
01:38Donc c'est du symbole, on n'est pas sur une décision, c'est pas chaque citoyen qui va décider comment son impôt sera affecté, sinon évidemment on risque d'avoir quelques surprises.
01:50Donc c'est du symbole, on est à la limite de la démagogie.
01:54De la démagogie, c'est-à-dire quand on dit, parce que c'est un argument qui revient souvent, l'impôt participatif va permettre d'une certaine manière de réconcilier les Français avec leurs impôts, ça vous y croyez pas vraiment ?
02:06Imaginons que tout le monde décide que la défense, par exemple, c'est pas nécessaire, je ne veux rien pour la défense, on a besoin d'une sécurité extérieure.
02:18On sera forcé d'allouer par définition de l'argent à la défense, que les citoyens le veuillent ou non, c'est pour leur propre sécurité.
02:26Ce sera relativement marginal le côté participatif et ça ne changera pas forcément grand-chose.
02:35Ça pourrait peut-être contribuer à augmenter les impôts, et d'ailleurs ça a été souligné après la proposition de Gabriel Attal qu'en fait ce serait un moyen déguisé pour augmenter les impôts en disant vous avez le choix d'affecter l'impôt supplémentaire.
02:47Donc déjà qu'on a des prélèvements obligatoires extrêmement élevés, je ne suis pas sûr qu'on soit gagnant à travers cette mesure.
02:55C'est ce que disait Eric Ciotti, il disait justement à propos de la proposition de Gabriel Attal que ce serait une façon, ça aurait pour but caché, une augmentation déguisée des impôts.
03:06Il parle en l'occurrence, Gabriel Attal, qu'on puisse flécher une partie de son impôt sur le revenu ou une contribution additionnelle sur une mission du budget de l'État librement choisi.
03:16Vous comprenez quoi justement dans cette expression de contribution additionnelle ? C'est-à-dire qu'en gros on paye plus d'impôts, il faut dire les choses.
03:23Globalement on peut imaginer que cette contribution additionnelle soit une majoration de l'impôt sur le revenu mais un cadeau énorme, on vous dirait vous avez le droit de choisir l'affectation.
03:35Sachant que ça vient à l'encontre d'un grand principe budgétaire qui est la neutralité de l'impôt.
03:40Certes il y a déjà des affectations diverses et variées qui ont été mises en place mais justement c'est contraire au grand principe de l'impôt, c'est la neutralité.
03:49C'est-à-dire qu'on verse un impôt, il n'est pas affecté, c'est simplement la loi de finances qui permet l'affectation en fonction d'objectifs d'intérêts généraux.
03:56Ce n'est pas le citoyen qui décide de financer telle ou telle action parce que dans ces cas-là, comme je l'ai dit, ça peut être un peu anarchique et puis ce n'est pas certain qu'on soit dans l'intérêt général toujours.
04:07Donc globalement c'est peut-être une idée déguisée pour majorer les impôts, oui.
04:14Alors ce n'est pas forcément toujours le cas, on le voit notamment en Italie, ça existe déjà cet impôt participatif.
04:19Les Italiens qui peuvent flécher 0,8% de leurs impôts, ce n'est pas beaucoup.
04:24Il y a une députée socialiste en France qui, elle, avait proposé carrément l'an dernier de permettre aux Français de flécher 5% de leurs impôts.
04:31Ce sont des mesures qui sont réalisables ?
04:35En Italie, 0,8% donc on est sur quelque chose de relativement faible.
04:39C'est-à-dire en particulier pour affecter en faveur de telle ou telle religion.
04:45Il y a également ça en Allemagne où on peut mentionner dans la déclaration d'impôt sur le revenu si on soutient l'église catholique, l'église protestante, l'islam.
04:58C'est un choix qui peut être fait dans le cadre de la déclaration d'impôt sur le revenu en Allemagne.
05:02En Italie, pareil, on peut affecter son impôt pour soutenir telle ou telle religion.
05:07Mais c'est marginal et c'est très lié aux religions.
05:11Je dirais qu'en France, on a ce dispositif à travers les réductions d'impôts.
05:16On a déjà un montant qui est à peu près équivalent à ce qu'il y a en Italie à travers les réductions d'impôts.
05:22On pourrait décider qu'il n'y a pas de réduction d'impôt et simplement, on déciderait de flécher en faveur de telle ou telle association pour défendre les animaux, pour défendre la culture ou je ne sais quoi.
05:35Je dirais que le mécanisme, c'est ça.
05:38Après, tout le monde ne fait pas des dons ? On n'a pas forcément les moyens de faire des dons ?
05:42Tout le monde n'a pas les moyens de faire des dons.
05:45D'ailleurs, un Français sur deux ne paie pas un impôt sur le revenu, il faut le signaler.
05:50Évidemment que ce sont plutôt les ménages les plus aisés qui effectuent des dons, notamment pour diminuer leur impôt sur le revenu.
05:58Il y a des dispositifs où ce n'est pas une réduction d'impôt, c'est un crédit d'impôt.
06:07Dans ces cas-là, même ceux qui ne sont pas imposables vont bénéficier d'une ristourne de la part de Bercy.
06:17Donc il y a des mécanismes qui permettent de corriger ce côté un peu inégalitaire en cas de réduction d'impôt.
06:23Mais malgré tout, comme vous l'avez dit, c'est toujours évidemment une question de revenu et certains ne peuvent pas entrer dans ces dispositifs.
06:29Pour être tout à fait clair, je ne sais pas si je vous ai bien compris tout à l'heure,
06:32mais ce que vous dites, c'est que ce n'est pas forcément constitutionnel de mettre en place un tel impôt participatif ?
06:37C'est con. La question de la constitutionnalité, oui, peut se poser.
06:42Dans le sens où c'est une affectation et on admet les affectations en matière budgétaire,
06:48par exemple pour des missions qui sont quasi à la limite du commercial.
06:54Donc j'affecte un impôt pour une mission de l'État sur, par exemple, la réalisation d'une autoroute, d'une voie ferrée.
07:03Donc il y a un objectif derrière. L'affaire de l'affectation pour telle ou telle mission, la question peut se poser.
07:10Je ne serai pas certain de la réponse.
07:13Et c'est vrai qu'en revanche, l'idée de la neutralité en matière fiscale est un principe depuis le XIXe siècle et il a été largement ébréché.
07:22C'est vrai, mais néanmoins, l'idée que l'impôt sur le revenu sert à financer l'État, mais pas forcément telle ou telle action d'État,
07:31c'est au parlementaire de déterminer, dans le cadre de la loi de finances, ce qu'il faut faire de l'impôt.
07:38Ça ne peut passer que par le budget, finalement par une loi de finances.
07:44Oui. Logiquement, l'impôt sur le revenu, la TVA, tombe dans la caisse de l'État,
07:50et on ne détermine pas ce que va faire l'impôt sur le revenu, ce que va faire la TVA.
07:54C'est vrai qu'il y a eu des affectations d'une partie de la TVA sur les collectivités locales, une partie de la TVA sur les retraites.
07:59C'est assez récent, mais comme je le dis, c'est déjà contraire au principe d'universalité fiscale.
08:06Dans l'état actuel des forces politiques qu'on a au sein de l'Assemblée nationale,
08:10est-ce que vous pensez que ça a des chances d'aboutir, de passer une telle proposition de mise en place, d'instauration d'un impôt participatif ?
08:20Je ne suis pas certain que la proposition de Gabriel Attal recueille une majorité en l'état actuel.
08:26Premièrement parce que les divisions politiques remporteront sur la proposition en elle-même.
08:32En plus, elle émane de la majorité présidentielle.
08:37D'autre part, je pense que c'est un groupe qui trouve que c'est un peu gadget,
08:42et qu'au moment où la France est confrontée à un problème de finances publiques grave, majeur,
08:47un déficit de plus de 5 points de PIB, d'une dette de plus de 3 000 milliards d'euros,
08:52cette histoire d'affectation, sous couvert peut-être d'augmenter les prêts des membres obligatoires,
08:56je ne suis pas sûr que cela recueille une majorité au sein de l'Assemblée nationale.
09:01Le problème, ce n'est pas forcément l'impôt participatif, c'est de faire passer le plus de chèques, entre guillemets.
09:05Effectivement, ce sera le premier enjeu principal pour le prochain gouvernement.
09:10Merci Philippe Crevel de nous avoir apporté toute votre expertise.
09:13Je vous rappelle que vous êtes économiste, directeur du cercle de l'épargne.
09:17Très bonne journée à vous.

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