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Dans son émission média, Thomas Isle et sa bande reçoivent chaque jour un invité. Aujourd'hui, Maryse Burgot, journaliste, pour son livre "Loin de chez moi – Grand reporter et fille de paysans" publié le 16 octobre aux éditions Fayard et dans lequel elle raconte son parcours.

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Transcription
00:00Merci beaucoup d'être avec nous pour la suite de Culture Média, dans un instant nous
00:08recevrons Philippe Labraud pour son nouveau roman de Gimlet sur la 5ème avenue mais on
00:13est toujours avec la reportère et correspondante Maryse Burgot qui se raconte dans son livre
00:18« Loin de chez moi ». Vous avez couvert, Maryse, la guerre au Kosovo, en Afghanistan
00:23ou en Ukraine en ce moment avec évidemment des images qui sont parfois terribles mais
00:28vous faites un devoir, vous le racontez dans le livre, en rentrant chez vous de retrouver
00:32la vie la plus simple possible, de faire du jardinage, du ménage, de la cuisine pour
00:38essayer d'éloigner les troubles de stress post-traumatique qui vous guettent. Vous avez
00:44senti parfois que vous étiez à la limite, que vous aviez vu trop de choses difficiles ?
00:47Non, j'ai été à la limite à Jolo quand j'étais otage mais ensuite je n'ai pas l'impression
00:55d'avoir été proche de quelque chose de grave. Il nous arrive d'être sous les bombardements
01:01mais comme les milliers de civils qui sont autour de nous dans les pays dans lesquels
01:05je vais, en Ukraine particulièrement, l'Ukraine c'est vraiment dangereux pour les civils
01:10comme pour les journalistes du coup, mais non, je n'ai pas l'impression d'être, de
01:17frôler la mort et tout ça, je ne dis pas ça, non.
01:20Est-ce que vous avez parfois ce sentiment de culpabilité que décrivent certains reporters
01:23de guerre, de partir et de laisser les gens sur place ?
01:26Oui et non, c'est-à-dire que je pense que pour pouvoir revenir, ce que moi je fais toujours,
01:34il faut savoir rentrer et retrouver une forme de normalité dans sa propre vie, en tout cas
01:42moi j'ai besoin de faire ça. J'ai des confrères qui sont capables de rester 6, 7 mois d'affilée
01:47dans des endroits, moi je ne peux pas parce que j'ai une vie ailleurs, que je souhaite
01:51essayer d'avoir le plus harmonieuse possible, donc j'atterris assez bien.
01:57Et vous cherchez vraiment à protéger vos deux fils de tout ça, vous dites ils ont
02:00dû déjà accepter mes absences fréquentes, je ne peux pas en plus leur imposer un début
02:05de soupçon de déprime et visiblement vous avez réussi à transmettre l'amour de ce métier
02:09puisque votre plus jeune fils, il veut devenir reporter de guerre, vous l'encouragez ?
02:13Oui, bien sûr, ça ne vous angoisse pas ?
02:17Ce qui m'angoisse c'est quand il roule en scooter dans les rues de Paris, ça m'angoisse
02:22beaucoup, mais non parce que moi j'aime tellement ce métier, donc au contraire je l'encourage,
02:29il va vivre une vie extraordinaire, et puis en plus je le vois animé d'une passion,
02:33ça y est, il a trouvé sa voie, et donc il va réussir, parce qu'il a tellement envie,
02:38non je l'encourage.
02:39Et puis évidemment il vous a suivi aussi, enfin ils vous ont suivi, vos enfants, parce
02:43que vous avez été aussi correspondante, notamment à Londres, puis à Washington,
02:47donc là forcément ils sont venus avec vous, vous étiez à Washington notamment au moment
02:51de l'arrestation de Dominique Strauss-Kahn, vous racontez ça, vous apprenez cette arrestation
02:55au cours d'un dîner entre amis, c'est comme ça que ça s'est passé, et puis après
02:59vous vous êtes rappelé à Paris pour suivre l'Elysée de manière permanente au moment
03:03où François Hollande est président, mais alors ça vous n'en gardez pas un très bon
03:06souvenir, vous dites que c'est un exercice avec trop de contraintes, trop de conventions.
03:12Alors, je suis sortie de ma zone de confort quand j'ai accepté d'être rechargée du
03:16suivi de l'Elysée, c'était pas quelque chose que je connaissais très très bien,
03:21la politique intérieure française, je venais de passer 9 ans à l'étranger, donc les
03:25députés, tous ces gens je ne les connaissais pas tous très très bien, donc c'est toujours
03:29bien de sortir de sa zone de confort, j'ai aimé faire ça en plus, c'était François
03:33Hollande qui, comme vous savez tous, est quand même assez ouvert avec les journalistes,
03:39on avait un accès assez souvent à l'Elysée, on le voyait assez régulièrement, donc c'était
03:45quand même riche et intéressant.
03:46Ce que je n'ai pas tellement aimé, ce sont les VO, les voyages officiels, ces voyages
03:50très encadrés où on emmène la presse à l'étranger, par exemple suivre le président,
03:55alors ça je ne supportais plus, parce que vous avez quelqu'un qui vous dit vous vous
03:59mettez là, vous mettez votre caméra là, vous ne pouvez pas bouger d'un iota, je ne
04:05supporte pas parce que moi quand on me dit qu'il faut se mettre là, forcément je veux
04:08aller là-bas et j'ai envie de faire le contraire de ce qu'on me demande de faire.
04:11C'est le principe de votre métier en même temps, c'est aussi une curiosité.
04:13Voilà, donc très difficile les VO pour moi, mais bon, c'était un exercice.
04:17Et puis l'Ukraine aussi, vous racontez l'Ukraine où vous avez réalisé 12 missions de 3 à
04:224 semaines depuis le début de l'invasion russe et vous racontez la difficulté pour
04:25tous les journalistes sur place de continuer à intéresser leur pays à ce conflit, à
04:30chercher de nouveaux angles de reportage, pour continuer à passer dans les JT, c'est
04:36un vrai problème.
04:37On dit souvent d'ailleurs que c'est le parent pauvre des JT, l'international, alors ça
04:41change peut-être maintenant que votre JT dure une heure sur France 2.
04:44Ça change chez nous, on a des longs formats maintenant de 7 minutes dans lesquels on fait
04:49de la politique étrangère, donc ça change et pour nous c'est formidable.
04:51Mais c'est toujours compliqué de convaincre vos rédacteurs en chef qu'il faut continuer
04:55notamment à parler de l'Ukraine.
04:57Alors à France Télé, pas compliqué parce qu'il y a eu cette volonté de ne pas laisser
05:01tomber l'Ukraine et de continuer à suivre ce qui se passait dans ce pays.
05:05Et c'est vrai que la difficulté elle est pour nous les reporters.
05:08J'ai l'impression d'avoir tout fait en fait, et donc comment aller chercher un sujet
05:13nouveau, aller sur la ligne de front et voir que les soldats sont par exemple sous les
05:19obus de mortiers, sous les missiles, sous les drones, etc.
05:23Les gens l'ont vu plein de fois, donc il faut aller chercher un peu les histoires
05:26avec les dents d'une certaine manière.
05:28Et c'est difficile, mais moi j'admire ça parce que je vois tous ces jeunes journalistes
05:33qui cherchent désespérément des angles.
05:36C'est un métier de passion et c'est formidable de voir qu'il y a une génération qui est
05:41prête là.
05:42Et parfois les images, vous êtes obligé, Maryse Burgo, d'aller les chercher sur les
05:45réseaux sociaux.
05:46Ça a été le cas pour l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.
05:49Vos premiers sujets pour France 2, ils sont réalisés entièrement à partir d'images
05:54à Paris que vous floutez évidemment en grande partie, mais vous vous êtes obligé de les
05:58visionner.
05:59C'est ça aussi votre métier aujourd'hui ?
06:00Oui, je suis abonnée sur mon portable, je me réveille tous les matins avec des images
06:06plus violentes les unes que les autres, qui viennent soit d'Ukraine, soit de Gaza,
06:13soit de Cisjordanie, d'Israël.
06:15Et je suis obligée de les voir parce que c'est ça la réalité de cette guerre.
06:19Alors évidemment on ne les diffuse pas parce que nous on est regardé à une heure de
06:22grande écoute.
06:23Il ne faut pas que les gens voient ces choses là, mais il faut que nous nous les regardions
06:28pour pouvoir en parler et traiter de la réalité de ce que sont ces guerres.
06:31Et vous, il faut que vous arriviez à les enlever un petit peu de votre tête le soir,
06:35à rentrer chez vous.
06:36C'est pour ça que vous faites des bons rôtis à votre famille, pour essayer d'éloigner
06:40toutes ces images terribles.
06:42C'est la vie incroyable de Maryse Burgo.
06:44Elle se raconte dans ce livre « Loin de chez moi » qui vient de paraître aux éditions
06:49Fayard.
06:50Merci beaucoup Maryse Burgo.
06:51Merci de m'avoir invitée et de parler du grand reportage et de ce métier extraordinaire.

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