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Jeudi 28 novembre 2024, SMART PATRIMOINE reçoit Sylvain Grataloup (Président national, UNPI) et Charles-Edouard Bourget (Notaire associé à Paris)

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00:00Et nous enchaînons à présent avec enjeu patrimoine, nous allons revenir sur cette
00:08possible hausse des frais de notaire laissé à l'appréciation des départements annoncés
00:13par le Premier ministre à la mi-novembre.
00:16Pour en parler, pour décrypter l'impact qu'une telle mesure pourrait avoir sur le
00:19marché de l'immobilier, nous avons le plaisir d'accueillir dans l'émission deux experts
00:22du sujet.
00:23Nous avons le plaisir d'accueillir à distance tout d'abord Sylvain Grataloup.
00:27Bonjour Sylvain Grataloup.
00:29Oui, bonjour.
00:30Vous êtes président national de l'UNPI, Union Nationale des Propriétaires Immobiliers,
00:33vous allez pouvoir nous expliquer dans un instant quel incident cela peut avoir selon
00:37vous sur les propriétaires immobiliers et peut-être plus largement sur le marché de
00:41l'immobilier.
00:42Nous avons le plaisir d'accueillir également en plateau cette fois-ci Charles-Édouard
00:44Bourget.
00:45Bonjour Charles-Édouard Bourget.
00:46Bonjour Nicolas.
00:47Vous êtes notaire associé à Paris.
00:48Je reviens sur la mesure et sur l'annonce qui a été faite le 15 novembre dernier.
00:52Le Premier ministre a annoncé que les départements qui le souhaitent pourront augmenter en 2025
00:56de 0,5 point les droits de mutation à titre onéreux, une mesure temporaire qui devrait,
01:03pourrait durer trois ans, en tout cas c'est l'annonce qui est faite aujourd'hui.
01:06Ces droits de mutation à titre onéreux c'est également ce qu'on appelle des frais de
01:10notaire.
01:11Charles-Édouard Bourget, j'ai envie de vous poser une question un peu provocatrice pour
01:12commencer que tout le monde doit vous poser.
01:14Est-ce que vous allez gagner plus du coup ?
01:15Je l'attendais ! Non parce que vous appelez ça, on appelle ça couramment des frais de
01:22notaire mais vous le savez, la plupart des gens le savent, ce ne sont pas des frais
01:26de notaire.
01:27Ce que nous appelons ou ce que vous appelez les frais de notaire ça comprend majoritairement
01:30des taxes, donc les droits de mutation à titre onéreux qui sont une partie des taxes
01:35départementales, des taxes communales et puis des frais d'assiette, il y a la rémunération
01:39des études notariales et puis il y a quelques débours, quelques dépenses qui sont faites
01:43pour reconstituer vos dossiers.
01:45Ces taxes sur les 7 à 8% que représentent les frais d'acte ou les frais d'acquisition
01:51plutôt que frais de notaire lorsque vous achetez dans l'ancien, ces taxes elles représentent
01:54aujourd'hui 5,89% dont 4,50% pour les départements et la proposition c'est de passer sur les
02:027 ou 8% d'accord exactement et c'est 4,50% qui pourraient passer temporairement à 5%
02:09pour certains départements.
02:10Et alors là ça se passerait comment ? Ça veut dire que le département, un département
02:14pourrait décider qu'on augmente de 0,5 points les droits de mutation pour toutes les transactions
02:20immobilières dans le département et donc là vous êtes obligé de les appliquer et
02:23ça vient augmenter mécaniquement le coût global d'une acquisition.
02:27Exactement donc les frais d'acte comprennent donc une bonne partie des taxes, ces 4,50
02:32pourraient passer à 5 et ça s'appliquerait, alors aujourd'hui il y a eu un petit rétro-pédalage
02:37on nous dit que ça ne s'appliquerait pas dans le 9, là ces droits de mutation sont
02:42inférieurs à 4,50 aujourd'hui dans le 9 et ça ne s'appliquerait pas soi-disant nous
02:46expliquons au primo-accédant, alors moi je ne sais pas comment on détermine un primo-accédant
02:50je ne sais pas quel est l'acte qui permet de le déterminer, est-ce que ce sera une
02:53déclaration ou quelque chose mais en tout cas ça ne s'appliquerait pas au primo-accédant
02:56et oui ça augmenterait mécaniquement les frais que vous allez payer quand vous achetez
03:01un appartement, pour un appartement de 300 000 euros, 5% ça fait une augmentation de
03:061 500 euros à peu près, ce qui représente en fait une augmentation de ce que vous allez
03:12vous devoir apporter, mais monsieur pourra sans doute mieux l'expliquer que moi encore,
03:17les banques ne finançant pas l'apport personnel ou les frais d'acte, c'est votre effort personnel
03:23qui devra être augmenté.
03:24Sylvain Grattaloup, Président National de l'Union Nationale des Propriétaires Immobiliers,
03:29vous défendez les intérêts des propriétaires si je peux le résumer ainsi, une augmentation
03:34de 0,5 points donc des droits de mutation à titre onéreux, à la discrétion des départements
03:41précisons-le, ça n'est pas effectif sur l'ensemble du territoire aujourd'hui mais
03:44c'est à la discrétion des départements, ça vient mécaniquement augmenter l'assiette
03:47d'acquisition, donc Charles-Édouard Bourget nous l'a dit, d'à peu près 1 000 euros
03:51si on prend l'exemple de l'achat d'une résidence à 300 000 euros, ça veut dire qu'on fait
03:56peser encore un peu plus sur les propriétaires le financement de la vie locale ?
04:02Bien évidemment, je crois un peu plus, c'est encore, encore et encore.
04:08La propriété qui est une valeur que nous défendons, est une valeur qui offre une stabilité
04:15dans notre société.
04:16Or aujourd'hui, plutôt que d'être encouragé par les pouvoirs publics, on s'aperçoit très
04:20clairement que c'est tout l'inverse qui se produit, c'est-à-dire qu'en fait, les propriétaires
04:25subissent des entraves qui sont impressionnantes.
04:27Il y a l'encadrement des loyers, il y a le permis de louer, la rénovation énergétique,
04:32le déséquilibre entre les droits et obligations entre propriétaire et locataire, l'explosion
04:37des taxes foncières, une fiscalité décourageante qui est discriminatoire, l'IFI est très significatif.
04:43Donc sur le plan réglementaire, ça devient intenable, sur le plan financier, c'est paupérisant
04:48et sur le plan fiscal, c'est confiscatoire.
04:51Donc on s'aperçoit que cette augmentation des droits de mutation vient s'ajouter à
04:58l'ensemble des éléments que je viens de rappeler et que le propriétaire, c'est-à-dire
05:03le français moyen, la plupart des français, 35 millions de propriétaires, constitue la
05:07variable d'ajustement de la politique budgétaire de l'État qui n'a pas été en mesure de
05:10faire des économies quand il le fallait, dégager des recettes comme elles devraient
05:14être dégagées.
05:15Sylvain Grattaloup, le marché de l'immobilier et l'évolution du marché de l'immobilier
05:18est un sujet qu'on suit dans cette émission et que beaucoup suivent d'ailleurs depuis
05:22de nombreux mois, voire de nombreuses années, en lien avec l'accès au crédit, en lien
05:26avec le coût du crédit, en lien avec l'impact que cela peut avoir sur les variations de
05:30prix sur le marché immobilier.
05:33J'oublie évidemment ces moments où on a vu qu'on pouvait tout simplement, pour des
05:39raisons réglementaires, avoir des difficultés ne serait-ce qu'à obtenir un crédit pour
05:42rentrer dans les règles d'octroi de crédit.
05:47Cette nouvelle mesure, est-ce que cela va freiner une reprise timide du marché de l'immobilier
05:52qu'on voyait à l'heure actuelle ou alors est-ce qu'on peut se dire que sur un projet
05:56de 300 000 euros, ce n'est pas 1 000 euros supplémentaires qui vont radicalement changer
06:00une tendance ?
06:02Bien sûr que cela va freiner.
06:04Quand on sait que la taxe foncière et la taxe d'habitation à l'époque constituait
06:08le pack fiscal de rentrée dont les propriétaires s'acquittaient considérant que c'est parti
06:13après la rentrée scolaire des sommes à payer.
06:17Aujourd'hui la taxe foncière dont vous connaissez l'explosion, plus de 32,9% en 10 ans, plus
06:22de 80% à Paris sur la même période, cette taxe foncière aujourd'hui constitue un critère
06:27qui vient s'ajouter aux autres critères pour arbitrer sur l'opportunité ou non d'acquérir
06:33un bien immobilier.
06:34Une taxe foncière c'est 2,5 mois de loyer, c'est 2 000-3 000 euros.
06:41Vous pensez bien que ces 1 500 euros dont vous faites état sur le bien dont il est
06:46question, en tout cas dans l'exemple que vous donnez, cela vient se rajouter encore
06:51à des sommes qui sont à dégager pour le propriétaire, en tout cas pour celui qui
06:54voudrait être propriétaire.
06:56Sachant que c'est longtemps, le notaire l'a rappelé, ça ne se finance pas par un prêt
07:06immobilier.
07:07Donc est-ce qu'il faudra faire un prêt à la consommation ? On marche sur la tête,
07:11d'autant plus que les apports sont de plus en plus importants, puisqu'on a cette limite
07:14de 35% de taux d'endettement qui est toujours là, alors que le Parlement souhaitait par
07:20l'intermédiaire de l'Assemblée nationale et d'un député qui est Lionel Causses de
07:24passer vers le reste à vivre qui était beaucoup plus pertinent.
07:27En fait, toutes ces mesures, quelles qu'elles soient, sont des mesures qui ne permettent
07:31pas d'aboutir à une reprise du marché, bien au contraire.
07:34Et c'est absolument impensable que l'exécutif et que le Parlement, mais le Parlement avec
07:40ses 13 groupes parlementaires, c'est un peu compliqué de trouver un accord, mais que
07:43l'exécutif ne puisse pas à un moment donné se dire il faut relancer le marché, comment
07:47faire ? Eh bien, il faudrait peut-être même diminuer pour les primo-occidents les taux.
07:51Et là, c'est tout l'inverse qui se produit.
07:52Charles-Édouard Bourget, une réaction à ce que dit Sylvain Grattalot, vous partagez
07:55le constat effectivement sur le marché immobilier ou sur le...
07:57Oui, oui, je partage le constat, j'ajoute, sans entrer dans une polémique vis-à-vis
08:02soit du gouvernement, soit des parlementaires, mais j'ajoute que je crois que c'est en 2014
08:05où il y avait eu une augmentation déjà des droits de mutation, et il y avait eu entre
08:09la mise en place, enfin entre l'annonce et la mise en place, une augmentation un petit
08:12peu du marché, et puis après une baisse des acquisitions suite au caractère effectif
08:18de cette augmentation.
08:19Tout le monde s'était rué sur des biens immobiliers avant que ça ne finisse pas.
08:22Avant que ça ne devienne effectif, mais finalement après ça avait ralenti, et l'effet recherché
08:25qui était d'augmenter les recettes côté départemental finalement n'a pas été aussi
08:31bien atteint que ce qui était souhaité, et puis sur le plan...
08:34D'accord, parce qu'on augmentait en fait la valeur effectivement de la taxe en question,
08:38mais on perdit en volume.
08:39Oui, exactement, on diminue le nombre de transactions, donc on perd en volume, et puis
08:42du côté du particulier, ces 1500 euros qui vont venir payer des droits de mutation, eh
08:47bien ils ne seront pas mis soit dans du mobilier, soit dans des travaux qui sont faits dans
08:51la maison ou dans l'appartement, et ça grippe en fait l'ensemble de la chaîne qui découle
08:55après d'une acquisition.
08:57Quand vous achetez un nouvel appartement, vous achetez du mobilier, vous faites des
09:00travaux, et vous êtes au début d'une grande chaîne.
09:03Donc ça vient selon vous gripper un peu plus ce marché plutôt que de porter de la fluidité
09:08sur ce marché immobilier qui peinait à reprendre un petit peu des couleurs quand même ?
09:12Il est certain que ça ne vient pas aider, et ça ne vient pas mettre de la fluidité.
09:16L'objectif premier n'est pas de mettre de la fluidité, c'est de faire des ressources
09:19pour les départements.
09:20Ça, on verra après si c'est un objectif qu'il y a atteint.
09:24Sylvain Grattaloup, une chaîne de valeur grippée, c'est aussi ce à quoi il faut s'attendre ?
09:29Un petit peu plus grippée que ce qu'elle n'est actuellement ?
09:32Bien sûr, bien sûr, parce qu'aujourd'hui on prend des petites mesures qui ne s'inscrivent
09:37pas dans une politique du logement sur du long terme.
09:40Donc je crois que le temps de ces petites mesures et des discussions est révolu.
09:44Il faut véritablement savoir ce que l'on veut de l'État français et de notre société,
09:47vont-on la propriété privée ou pas ?
09:49Aujourd'hui, j'ai 35 millions de propriétaires qui ont constitué un patrimoine pour leur
09:56retraite, pour de l'épargne, pour plein de choses.
09:59On a 70% des locataires qui sont logés par le parc privé.
10:02Qu'est-ce que l'on veut ?
10:03Développer du logement social ?
10:04Certainement pas.
10:05En tout cas, ce n'est pas comme ça que je crois qu'on s'en sortira.
10:08Les objectifs aujourd'hui en matière de logement sont fixés par la loi de finances,
10:12et je trouve ça assez troublant quand même que ce soit les finances qui permettent d'établir
10:18une feuille de route concernant le logement.
10:20Il faut une vraie politique du logement à long terme en réunissant tous les acteurs.
10:25En premier lieu, les propriétaires qui sont ceux qui font le marché, qui achètent, qui
10:29vendent.
10:30Et puis après, naturellement, s'il n'y a pas de vente, s'il n'y a pas d'acquisition,
10:33c'est tous les secteurs professionnels qui sont impactés.
10:36Ça, c'est la première chose.
10:37La deuxième chose, et j'en terminerai là-dessus, c'est aussi faire un bon diagnostic.
10:41On veut qu'on soit du neuf, du neuf, du neuf.
10:43Pourquoi pas ?
10:44Mais commençons déjà à s'occuper de l'existant, de la rénovation énergétique,
10:47de la surréalisation, de la densification et puis, en résiduel, évidemment, construire
10:52du neuf.
10:53Je crois qu'on se trompe complètement du diagnostic et les mesures proposées ne vont
10:56pas dans le bon sens.
10:57Charles-Edouard Bourget, dernière question sur la mise en application de la mesure.
11:00Il y a plusieurs questions qui se posent.
11:01Déjà, vous avez dit effectivement qu'il y a eu l'annonce et puis après, il y a le
11:05post-annonce qui vient préciser un peu et rajouter peut-être un petit peu de flou sur
11:08l'application par les professionnels.
11:09Je rajouterai une autre question.
11:11On parle de discussion dans le cadre d'un projet de loi de finances plus global avec
11:16les questionnements politiques qu'on peut voir à l'heure actuelle.
11:18Les professionnels, qu'est-ce qu'ils font aujourd'hui ?
11:20Ils attendent, ils se préparent, ils attendent de voir si le projet passera, si le gouvernement
11:24restera ?
11:25Alors, au niveau des professionnels de l'immobilier, la mesure, elle aura sans doute aussi un impact.
11:30Encore qu'aujourd'hui, on nous semble nous dire qu'il s'agit de droits de mutation en
11:35matière d'acquisition des tenues, bien sûr, pas les achats-reventes pour lesquels il y
11:39aurait des droits de mutation réduits, comme dans le neuf d'ailleurs.
11:44Les mesures d'application, en fait, si la loi de finances est votée avec ces mesures-là,
11:48elle sera promulguée tout début janvier ou toute fin décembre.
11:51Et puis après, ce sera les départements qui devront prendre les mesures.
11:55Aujourd'hui, il n'y a que trois départements qui ne sont pas à 4,50, puisqu'ils ont une
11:58fourchette dans laquelle ils peuvent être.
11:59Ils se sont tous mis évidemment au maximum à 4,50.
12:02On peut supposer que la plupart des départements augmenteront de 0,5 points.
12:05Et ces mesures, dans ces cas-là, sont effectives à partir du 1er juin.
12:09Donc, on a une petite fenêtre entre janvier et juin où on resterait sur le taux actuel.
12:14Et puis, on verra ce qu'il en est après.
12:17Mais il est certain qu'il risque d'y avoir une petite accélération sur cette période-là.
12:21Et après, peut-être un ralentissement comme il y avait eu en 2014.

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