"On estime aujourd'hui qu'autour de 250 000 emplois sont menacés à travers des plans de sauvegarde ou de mise en redressement", alerte, mercredi 27 novembre, Jean-Eudes du Mesnil, secrétaire général de la CPME.
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00:00Bonsoir à toutes et à tous. Quel budget pour la France et quels efforts ? Et pour qui le débat continue au Parlement ?
00:05Bonsoir Jean-Hud du Ménil, vous êtes secrétaire général de la CPME, c'est la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises.
00:12Avant qu'on en parle de ce budget, vous venez de l'entendre dans le fil info de Sophie Echene, il y a eu ces dernières semaines plusieurs annonces de plans sociaux dans des grands groupes,
00:20notamment dans le secteur automobile. Le dernier en date ce soir c'est Valeo, on en parle beaucoup de ces grands groupes, mais chez vous, au sein des PME, des TPE, comment ça va ?
00:29On est également très inquiets parce que l'économie marque le pas aujourd'hui, la consommation ralentit, on voit bien que l'épargne des Français n'a jamais été aussi élevée,
00:38et surtout face à l'incertitude politique, les entrepreneurs lèvent le crayon, c'est-à-dire qu'ils arrêtent les investissements, les recrutements.
00:45Le résultat, c'est que j'entendais le chiffre donné par Sophie Binet tout à l'heure, malheureusement de notre côté, ce qu'on constate, c'est une explosion du nombre de défaillances d'entreprises
00:56et surtout une augmentation de la taille des entreprises concernées. Sur le segment des moyennes entreprises, plus 46% de défaillances en un an,
01:06et le résultat, c'est qu'on estime aujourd'hui qu'autour de 250 000 emplois sont menacés au travers des plans de sauvegarde ou de mise en redressement.
01:19Donc il y a une véritable inquiétude pour les entreprises, et puis vous savez, le plus grand plan social de France aujourd'hui, il est à bas bruit dans les PME, c'est comme ça malheureusement qu'on ressent les choses.
01:27Que nos auditeurs comprennent bien, quand vous dites une entreprise moyenne, on parle d'entreprise de quelle taille ?
01:31On parle d'entreprise de plus de 50 salariés, et c'est celles-là aujourd'hui qui sont malheureusement les plus concernées par l'augmentation des défaillances.
01:39Et c'est tous les secteurs ?
01:40Tous les secteurs, avec certains, on les connaît, la filière immobilière qui est particulièrement touchée, le transport, l'entreposage, enfin tous les gens dont on sait qu'ils ont des difficultés,
01:50et malheureusement on sait aussi que dans les mois qui viennent, certains secteurs comme l'automobile par exemple vont aussi connaître beaucoup de difficultés.
01:59Ça se traduira par des destructions d'emplois, malheureusement on peut déjà le prédire, ça en beaucoup se tromper.
02:04Vous nous dites, les dirigeants lèvent le crayon, c'est qu'il y a un problème de confiance, qu'est-ce qu'il vous faudrait ?
02:09Il n'y a pas de baguette magique, mais qu'est-ce qui aiderait déjà pour vous ?
02:12Trois mots, lisibilité, visibilité, c'est le point absolument clé.
02:18Stabilité, voilà, c'est les trois éléments qui nous manquent aujourd'hui.
02:21Personne ne sait à quelle sauce on va être mangé sur le plan fiscal.
02:24On nous annonce des augmentations du coût du travail, donc une diminution de la compétitivité des entreprises.
02:31On nous annonce par exemple une baisse des aides aux entreprises quand vous embauchez un apprenti.
02:36Alors vous savez, quand vous embauchez un apprenti, à peu près 20% du temps de la personne qui s'occupe de cet apprenti est consacré à cet apprenti.
02:44Donc c'est un coût, évidemment.
02:46La question des cotisations, des allègements de charges, de l'apprentissage, tout ça, ça fait partie du budget de la Sécu, le PLFSS, comme on dit, cette acronyme-là.
02:54Il y a une commission mixte paritaire, c'est-à-dire sept députés, sept sénateurs qui sont en train de se réunir pour essayer de se mettre d'accord sur ce texte-là.
03:02Il y avait au début, quand le texte a été présenté, un objectif qui était de réduire les allègements de cotisations.
03:08Il y en a pour 80 milliards, vous disait le gouvernement à l'heure actuelle, de les réduire de 4 milliards.
03:12Finalement, il est prêt à redescendre à moins que ça.
03:15Vous, et je sais que vous allez rencontrer Michel Barnier demain qui viendra discuter avec la CPME, qu'est-ce que vous avez envie de lui dire et qu'est-ce que vous avez envie de dire à ses parlementaires ?
03:25Je vous confirme que Michel Barnier sera un pacte PME demain à Station F, donc effectivement on aura l'occasion d'échanger avec lui.
03:31Et bien ce qu'on va lui dire sur cette question des allègements de charges, c'est qu'on met beaucoup en avant le mot allègements de charges et cadeaux aux entreprises.
03:38Mais la réalité, c'est augmentation du coût du travail.
03:41Et mécaniquement, quand vous augmentez le coût du travail, notamment sur les plus bas salaires, vous détruisez de l'emploi.
03:47Et on ne va faire qu'accroître l'écart de compétitivité entre la France et les pays avec lesquels nous sommes en concurrence.
03:55Vous savez, le rapport Draghi, dont on a beaucoup parlé ces derniers temps, mettait en avant le fait qu'entre l'Europe et les Etats-Unis, en 20 ans, l'écart de compétitivité est passé de 15% à 30%.
04:06Et bien ça, ça se traduit ensuite par des absences de création d'emplois, destruction d'emplois et diminution aussi du pouvoir d'achat de nos concitoyens.
04:15Donc ce n'est pas simplement un problème d'entreprise, ça concerne tous les Français.
04:19Et à côté de ça, il y a une question mathématique, une équation que doit résoudre Michel Barnier.
04:23C'est celle des finances publiques. Il dit qu'il faut qu'on trouve des milliards d'euros d'effort.
04:27Si c'était vous, que feriez-vous ? Qu'est-ce qu'il faut faire ?
04:30Alors évidemment, rien n'est simple. On n'a pas de baguette magique.
04:33En tout cas, on ne s'en prendrait certainement pas à l'augmentation du coût du travail.
04:37Ce qui est une erreur fondamentale parce qu'on va mettre l'économie en mode pause.
04:41Il y a un sujet qui est celui de la simplification administrative.
04:45C'est à peu près 4% du PIB. Donc là, il y a une source d'économie absolument formidable.
04:49Et puis quand même, il y a une chose dont on ne parle pas beaucoup ces derniers temps.
04:53C'est le nombre d'emplois dans la fonction publique qui est en augmentation constante ces dernières années.
04:59On pourrait au moins, je ne dis pas diminuer...
05:02Le dossier a été mis sur la table quand même récemment.
05:04Oui, il a été mis sur la table, mais on n'a pas beaucoup vu de conclusions sur ce dossier.
05:08Je vais vous donner juste un chiffre qui est quand même bien symptomatique.
05:11Vous savez que ces dernières années, le nombre d'agriculteurs, malheureusement, a été fortement diminué.
05:16Dans le même temps, on a eu une très forte augmentation du nombre de fonctionnaires du ministère de l'Agriculture qui suivent les agriculteurs.
05:23Est-ce que c'est normal ? Aujourd'hui, vous avez 11 fonctionnaires du ministère de l'Agriculture pour un agriculteur.
05:31Ça n'a pas de sens.
05:32Est-ce que vous croyez que les augmentations de ces dernières années dans les effectifs de la fonction publique ont permis d'améliorer, par exemple, le fonctionnement de l'hôpital ?
05:40La réponse est non.
05:41Est-ce que c'est plus simple quand vous allez dans une collectivité territoriale ?
05:44La réponse est non.
05:45Donc, on ne dit pas forcément de diminuer, mais au moins de réformer l'action publique.
05:50C'est ça qu'on attend et pour l'instant, malheureusement, on est un peu sur notre faim.
05:54Ça, ce sont vos arguments, mais est-ce que ce n'est pas aussi aux entreprises de prendre leur part ?
05:58Mais vous ne croyez pas que les entreprises, quand elles créent des emplois, quand elles créent de la richesse,
06:02quand elles sont les plus ponctionnées d'Europe, il faut le rappeler, est-ce qu'elles ne prennent pas déjà leur part très largement ?
06:08Quand les entreprises, l'année dernière, ont embauché un million d'apprentis, est-ce qu'elles ne prennent pas leur part ?
06:15Sans entreprises pour créer de la richesse, on ne pourrait pas la distribuer et on n'aurait pas de dispositif de protection sociale en France.
06:22Donc, surtout, il faut leur rendre la vie plus facile plutôt que de le rendre plus compliqué.
06:26Une autre question parce qu'on parlait d'incertitude, d'instabilité.
06:29Il y a aussi des incertitudes pour le Premier ministre.
06:31Il est aujourd'hui sous la menace d'une motion de censure.
06:33Quel est votre regard à vous sur cette question ?
06:36Je vais préciser quel impact ça aurait, selon vous, une censure pour vous, acteurs économiques ?
06:41Le débat et le sujet, ce n'est pas pour ou contre Michel Barnier.
06:45C'est la question de la motion de censure et de faire tomber le gouvernement.
06:48Nous, ce qu'on sait, ce qu'on a vécu, c'est la période de dissolution où, sur le plan économique, ça a été absolument catastrophique.
06:55Pourquoi ? Parce que personne ne savait à quelle sauce on allait être mangé.
06:58On entendait des propos plus fantaisistes les uns que les autres, avec une augmentation des prélèvements qui étaient lancés tous les jours à droite et à gauche.
07:06Je dis bien à droite et à gauche.
07:08Et c'est exactement ça que craignent les entreprises.
07:10À ce moment-là, comment voulez-vous investir quand vous n'avez plus confiance ?
07:14C'est bien un problème de confiance.
07:16Et surtout, vous n'avez aucune espèce de visibilité sur la manière dont les choses vont évoluer, notamment sur le plan fiscal.
07:22Ben, résultat, vous faites quoi ? Vous attendez.
07:25Et quand vous attendez, il y a d'autres entreprises qui attendent vos commandes, qui ne les ont pas.
07:29Il y a des salariés qui attendent d'être embauchés, qui ne le seront pas, et ainsi de suite.
07:33Et vous rentrez malheureusement dans une forme de cercle vicieux.
07:36Et c'est d'autant plus dommage que, quand vous regardez les fondamentaux de l'économie aujourd'hui, on n'est absolument pas, on ne devrait pas être dans une situation catastrophique.
07:45Les prix de l'énergie ont diminué.
07:47Les taux d'intérêt ont diminué.
07:49L'inflation est revenue sous contrôle.
07:52On a des investissements colossaux à réaliser dans l'intelligence artificielle, dans la transition écologique, dans la construction de logements.
07:59Il n'y en a pas assez.
08:00Donc, on devrait être en boom économique.
08:02Malheureusement, on va bien voir de quel côté tombe la pièce.
08:04Si c'est du bon ou du mauvais.
08:06Agent Duménil, vous êtes secrétaire générale de la CPME, Confédération des petites et moyennes entreprises.
08:10Vous étiez ce soir l'invité d'Eco de France Info.
08:12Merci à vous.