Le nombre de cancers du pancréas explose en France !

  • l’année dernière
Parlons Vrai chez Bourdin avec le Professeur Pascal Hammel, oncologue à l’Hôpital Paul-Brousse de Villejuif.

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##MIDI_ACTU-2023-03-21##
Transcript
00:00 - Sud Radio Parlons Vrai chez Bourdin, 10h30, midi 30, Jean-Jacques Bourdin.
00:06 - Forte augmentation du nombre de cancers du pancréas, pourquoi ?
00:10 Nous sommes avec le professeur Amel.
00:12 D'abord professeur, le pancréas c'est une glande qui est située à quel endroit exactement ?
00:17 Qui est peu visible ?
00:18 - Alors oui, c'est une glande un peu cachée puisqu'elle est située derrière l'estomac.
00:21 Elle est entourée par le duodenum qui fait un peu comme un pneu sur une jante de vélo.
00:25 Et cette petite glande comme un petit steak, si vous voulez, a deux fonctions.
00:30 Elle sert à fabriquer des enzymes qui vont se déverser dans l'intestin pour digérer les aliments.
00:34 Et elle fabrique également des hormones qui sont sécrétées dans des canaux sanguins
00:40 et qui vont comme l'insuline réguler le taux de sucre dans le sang par exemple.
00:43 - Donc forte augmentation et vous dites en 2030,
00:46 ce sera la deuxième cause de mortalité par cancer, le cancer du pancréas.
00:51 - Tout à fait, ce sera la deuxième cause de mortalité par cancer tout confondu,
00:55 en tête le cancer du poumon.
00:57 Mais en mortalité, ce cancer moins fréquent,
01:02 cinq fois moins fréquent qu'un cancer du sein, du côlon ou de la prostate,
01:05 sera plus mortel.
01:07 Alors évidemment on fait des progrès.
01:08 - Il est déjà plus mortel.
01:10 - Mais on fait des progrès et ça diminue effectivement la mortalité
01:14 des autres cancers dont je parlais avant fort heureusement.
01:16 Mais celui-là continue d'augmenter.
01:18 Et même si on recule la mortalité parce qu'on a des progrès thérapeutiques,
01:22 quand on se met à cinq ans de recul,
01:24 pour l'instant les progrès sont là.
01:25 - Ce qui veut dire qu'on recule la mortalité des cancers du sein,
01:28 des cancers de la prostate, des cancers du côlon,
01:31 mais on ne recule pas bien,
01:33 on ne recule pas la mortalité des cancers du pancréas.
01:35 - Pas suffisamment, on allonge la survie de mois ou d'années,
01:39 mais si on met la barre à cinq ans,
01:41 pour l'instant ça ne se voit pas très bien.
01:42 - Cinq ans, 12% la survie.
01:45 - Alors tout confondu c'est plutôt 9-10%.
01:48 - 9-10% vous imaginez ?
01:50 - Chez les malades opérés dans des très bonnes conditions,
01:53 on peut atteindre 25, 30, voire 40% dans les mêmes conditions.
01:55 - Oui, enfin bon, pas à côté d'un cancer du sein
01:59 ou d'un cancer de la prostate, c'est ridicule,
02:02 parce qu'un cancer du sein ou de la prostate,
02:03 on est à quoi ?
02:04 Comme à cinq ans de survie ?
02:06 - Ça dépend des stades,
02:06 mais on peut avoir des 100% dans les cancers d'hier temps,
02:09 et on peut avoir, même dans les cancers métastatiques,
02:11 des survies prolongées,
02:11 on le sait très bien pour le cancer de la prostate par exemple.
02:13 - Vous rendez compte la différence ?
02:15 Bon alors, cancer du pancréas.
02:19 Premier problème, il est difficile à dépister.
02:22 - Alors, je vais juste faire une précision sémiologique,
02:26 il est difficile à diagnostiquer.
02:27 - A diagnostiquer, d'accord.
02:28 - Parce que dépister c'est encore même un peu plus difficile.
02:30 Mais diagnostiquer, ça veut dire,
02:31 quels sont les signes qui nous amènent vers le diagnostic ?
02:33 - Oui, les symptômes.
02:34 - Et les symptômes ne sont pas très spécifiques.
02:36 Au début, il y a le plus souvent une fatigue,
02:38 un amégrissement,
02:41 parfois un diabète qui débute, on en reparlera,
02:43 mais la jaunisse, qui vraiment évoque
02:45 aux personnes qui l'ont et à l'entourage,
02:48 et aux médecins, facilement le diagnostic,
02:51 ou les vomissements sont des signes beaucoup plus tardifs,
02:53 et les douleurs également.
02:54 Les douleurs d'un cancer du pancréas,
02:56 ça veut dire que le cancer est déjà étendu.
02:58 Un cancer plus petit, c'est parfois difficile
02:59 à diagnostiquer de ce point de vue-là.
03:01 - Évidemment. Alors, comment faire ?
03:03 Comment faire pour le diagnostiquer ?
03:05 - Alors, je crois qu'il faut d'abord qu'on redise
03:08 dans les facultés à ceux qui apprennent la médecine,
03:11 qu'une personne qui a plus de 50 ans,
03:12 qui a des facteurs de risque, par exemple,
03:14 qui fume ou qui a des intestins familiaux
03:15 de ce type de cancer,
03:17 et qui tout d'un coup se met à maigrir,
03:18 ou une diarrhée qu'on ne comprend pas bien,
03:20 ou un diabète qui apparaît,
03:22 il faut évoquer ce diagnostic.
03:24 Alors, bien entendu, loin de moi l'idée
03:25 de dire que tous les diabétiques,
03:27 il faut leur faire un scanner.
03:28 - Oui. - C'est 0,3% des gens
03:29 qui ont un nouveau diabète qui font un cancer du pancréas.
03:31 Mais quand quelqu'un a un diabète récent,
03:33 avec une altération de l'état général,
03:35 il est... bon, il maigrit parce qu'il a un diabète,
03:37 mais s'il a mal au ventre,
03:39 s'il est moins bien à être servi,
03:40 il faut avoir le réflexe scanner assez facile.
03:43 - Bien. Il y a aussi, évidemment, un réflexe scanner,
03:46 mais même avec l'imagerie,
03:48 on arrive à bien diagnostiquer,
03:51 on arrive à le voir,
03:53 parce que ce n'est pas facile, non ?
03:54 Ce n'est pas un cancer facile.
03:56 - C'est effectivement pas facile,
03:57 mais encore faut-il y penser.
03:58 Quand quelqu'un vient vous voir pour des douleurs au ventre
04:01 et qu'on dit "on va vous faire une coloscopie",
04:03 une fibroscopie de l'estomac, des choses comme ça,
04:06 le scanner ne va pas forcément se focaliser sur le pancréas.
04:08 Mais je pense que c'est à nos collègues radiologues
04:10 d'y penser aussi,
04:11 et nous de dire "regardez bien le pancréas",
04:13 car des petites tumeurs se voient maintenant avec l'imagerie.
04:15 - Quelles sont les causes ?
04:17 - Alors, je dirais qu'il y a les causes
04:21 modifiables et non modifiables.
04:22 Les causes non modifiables, c'est l'âge.
04:24 Le cancer du pancréas se diagnostique en médiane
04:27 à l'âge de 70 ans,
04:28 mais on a des cancers parfois plus jeunes, bien entendu.
04:31 Les causes non modifiables, par exemple le groupe sanguin.
04:33 Bon, alors, je n'ose à peine dire lesquelles,
04:36 parce que sinon tous les gens qui ont les groupes en question
04:38 vont se paniquer.
04:39 - En fonction du groupe sanguin ?
04:40 - Oui, les gens qui ont un groupe sanguin haut
04:41 ont moins de cancer du pancréas.
04:43 - Quand on a un groupe sanguin haut, on a moins de risques ?
04:46 - On a un peu moins de risques.
04:47 On sait également que les personnes allergiques,
04:50 les grands allergiques qui font des rhumes, des foins, etc.,
04:52 ont moins de risques, 25% moins de risques.
04:54 - Ah bon ?
04:56 - Ah bon, comme vous dites,
04:57 la cause n'en est pas vraiment connue.
04:59 Peut-être qu'ils ont une immunité un petit peu plus stimulable,
05:02 mais en tout cas, c'est le cas.
05:03 Et les gros fumeurs qui ont une allergie
05:07 le font un peu moins vite et un peu moins tôt.
05:10 Donc, ça, c'est les facteurs un peu positifs.
05:13 Pour le reste, les facteurs modifiables, et il faut aussi arrêter,
05:16 c'est un peu ce qu'on rejoint dans la pathologie cardiovasculaire,
05:19 c'est-à-dire que l'accroissance exponentielle de l'obésité,
05:24 par exemple aux États-Unis,
05:25 s'accompagne d'un accroissement du risque de cancer du pancréas.
05:28 Le tabac est responsable de 25 à 30% des cancers du pancréas,
05:32 ce qui ne veut pas dire évidemment que tous les fumeurs feront un cancer.
05:35 Mais disons qu'on augmente le risque, surtout chez les gros fumeurs.
05:37 - Et le risque héréditaire ?
05:38 - Alors, le risque héréditaire...
05:39 - Il y a des familles à risque ?
05:40 - Oui, on estime que 5 à 10% des cancers s'inscrivent dans une famille à risque.
05:45 Et pour faire court, il y a une mutation du gène qu'on connaît très bien
05:48 grâce à Angelina Jolie, qui l'a, si je peux dire, médiatisé,
05:51 c'est le BRCA.
05:52 Les patientes et les patients, et aussi les hommes qui ont une mutation
05:55 et qui risquent des cancers du sein et de l'ovaire,
05:57 font un peu plus de cancers du pancréas.
05:58 - Aussi, oui.
05:59 - Alors, on ne va pas les dépister systématiquement,
06:01 on va prendre les familles dans lesquelles il y a ce gène malade
06:05 et dans lesquelles il y a eu un cancer du pancréas.
06:06 Et là, il y a un risque qui est un peu augmenté.
06:08 Et puis d'autres gènes, comme par exemple ceux qui donnent des mélanomes familiaux,
06:12 alors pas un mélanome dans une famille, sinon je vais affouler tout le monde,
06:15 mais des familles à mélanomes ont un peu plus de cancers du pancréas.
06:18 - Bien, les soins, chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie, thérapie ciblée ?
06:24 - Alors, dans l'ordre que vous avez pris, la chirurgie c'est évidemment le graal,
06:28 parce que si on veut guérir d'un cancer du pancréas,
06:30 généralement il faut passer par la chirurgie.
06:32 Mais on ne peut pas opérer plus de 10, 15 ou 20% des cancers du pancréas
06:37 selon le CIRIP, parce que dès que la tumeur a dépassé la glande,
06:41 le chirurgien sera moins ou pas efficace.
06:43 Et s'il y a des métastases, il le sera sans doute encore moins,
06:45 surtout au début.
06:47 Quelques cas rares de patients avec des métastases évoluant au long terme
06:50 peuvent être opérés, mais c'est vraiment à la marge.
06:52 Après, la chimiothérapie est un élément clé quand on ne peut pas opérer les malades.
06:57 Et même s'ils ont une petite tumeur, souvent maintenant de plus en plus,
07:00 on leur fait une chimio préparatoire, qu'on appelle néoadjuvante,
07:04 pour faire diminuer la tumeur d'une part si on peut,
07:06 et surtout vérifier qu'il n'y a pas une maladie qui circule,
07:09 parce qu'on voit une petite tumeur,
07:10 je dis aux patients "c'est comme le marron sur une pomme",
07:12 mais en fait il y a des petites cellules qui circulent dans les ganglions autour
07:15 et que le chirurgien ne peut pas voir, ni le radiologue.
07:17 Donc c'est pour ça qu'on fait de plus en plus souvent une chimiothérapie
07:20 avant d'opérer les malades,
07:21 et qu'on leur fait de plus en plus souvent une chimiothérapie
07:23 après qu'ils aient été opérés,
07:25 eu égard au risque de récidive.
07:27 Mais ça, ça représente aller à un malade sur 6,
07:29 et tous les autres, il leur faut de la chimiothérapie
07:31 quand ils sont en état de la recevoir.
07:34 Et chimiothérapie avec des traitements qui ont vraiment émergé
07:37 à partir des années 2010,
07:39 une trichimiothérapie française
07:40 et une bichimiotherapie internationale, je dirais,
07:43 ont permis d'améliorer le pronostic de cette maladie,
07:46 sensiblement,
07:47 avec une inégalité de sensibilité des patients au traitement.
07:50 Et enfin, et je crois que ça il faut vraiment insister là-dessus,
07:53 chimiothérapie ou chirurgie ne peuvent pas être faits correctement
07:55 s'il n'y a pas ce qu'on appelle les soins de support,
07:57 et c'est très simple, ce que j'appelle les 4 piliers pour les patients,
08:00 et j'insiste là-dessus.
08:01 1) Calmer toute douleur.
08:03 Il y a des patients encore qui disent
08:04 "j'ai pas trop envie de prendre des dérivés opiacés
08:07 parce que ça va me rendre dépendant"
08:09 ça c'est une grosse erreur.
08:10 Il faut calmer la douleur,
08:11 quitte à ce que si le traitement est efficace,
08:13 ils n'en aient plus besoin et on les supprime après.
08:15 Ensuite, il faut que ces gens aient une nutrition correcte.
08:17 Il y a beaucoup de choses qui circulent sur
08:20 "il faut jeûner", "il ne faut plus manger de sucre",
08:21 "il ne faut plus manger ci", "il ne faut plus manger ça".
08:24 Peut-être que ce sera démontré dans ce cancer plus tard,
08:26 mais ça ne l'est pas actuellement.
08:28 Peut-être que chez des femmes un peu obèses
08:30 qui ont un cancer du sein, ça peut se concevoir,
08:32 mais chez des patients qui sont déjà très amigrés,
08:34 qui n'ont déjà plus faim,
08:35 si vous leur dites "plus de sucre parce que vous avez un diabète débutant,
08:38 plus de viande parce que ça donne le cancer des pancréas",
08:41 ce n'est plus le problème.
08:42 Je veux dire, le cancer il est là,
08:43 il faut que les patients soient nourris correctement.
08:45 Donc moi je dis alimentation, plaisir,
08:47 encadré de spécialistes de la nutrition.
08:50 Le troisième point, c'est l'activité physique.
08:53 - Indispensable.
08:55 - Avant on disait "reposez-vous, vous êtes fatigué",
08:58 chez Rilesse je vais aller faire les courses etc.
08:59 et en pratique, on a fait une étude en France
09:01 avec le professeur Nézihem,
09:02 montrant que l'activité physique chez des patients
09:04 ayant des métastases de ce cancer
09:06 peut ralentir, en tout cas, peut-être l'évolution,
09:10 mais en tout cas améliorer les symptômes de cette maladie.
09:12 Et enfin, il faut un soutien psychologique.
09:14 Parce que tout aussi solide qu'on soit,
09:18 tout aussi équilibré qu'on soit avec une vie de couple,
09:19 des enfants, une vie heureuse,
09:21 je dis toujours "c'est l'armoire qui vous tombe sur la tête".
09:23 Donc n'importe quelle personne qui n'aime pas les psychologues ou les psychiatres
09:27 dira "c'est quand même rude"
09:28 et je pense que c'est bien de pouvoir en parler avec un psychologue.
09:31 Il peut dire "j'ai peur de mourir"
09:32 sans être obligé de le dire à sa femme et ses enfants.
09:34 Je crois que ces quatre pieds de support sont indispensables.
09:36 Merci professeur Amel d'être venu nous voir
09:39 pour nous parler de ce cancer.
09:41 Il est 12h26, se faire le point.
09:44 André Bercoff.

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