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Christine Kelly et ses chroniqueurs débattent de l'actualité dans #Facealinfo

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00:00:00 Face à l'info, bonsoir à tous. Y a-t-il un tournant dans la mobilisation avec des
00:00:06 manifestations partout en France ? Une mobilisation record depuis le début du
00:00:11 mouvement. Pour la première fois, les jeunes sont largement présents. Pour la
00:00:15 première fois, des pompiers ont rejoint le mouvement. Pour la première fois, de
00:00:19 vives tensions ont émaillé les cortèges même si le calme a dominé.
00:00:24 Nous resterons pendant toute cette émission en direct avec les différents
00:00:28 points de manifestation et bien sûr les regards avisés de nos éditorialistes
00:00:32 mousquetaires. Justement d'abord le sommaire. Alors que 850 000 manifestants
00:00:39 hors Paris selon la police et 800 000 à Paris selon la CGT se sont réunis. Alors
00:00:46 que nous entendrons la suite du mouvement avec la décision de
00:00:50 l'intersyndicale en direct à 19h30 sur CNews, une question se pose ce soir.
00:00:56 La rue aura-t-elle le dernier mot ? Le passage en force de la rue sera-t-il
00:01:02 plus fort que celui du 49.3 ? Ces démonstrations de force sur le terrain
00:01:06 ne sont-elles pas le fait que les politiques ont démontré eux leur
00:01:11 impuissance ? L'édito de Mathieu Boclouti.
00:01:14 Ces manifestations sont-elles les prémices de la révolution ? En quoi ces
00:01:20 mobilisations peuvent-elles se transformer ? Quels sont les signes
00:01:23 lorsqu'on passe d'une grève à une révolte, d'une révolte à une révolution ?
00:01:28 L'édito de Guillaume Bigot. Violence policière ou violence sur les
00:01:34 policiers ? Alors que l'ONU interpelle la France sur son maintien de l'ordre à
00:01:39 l'heure de la multiplication des manifestations sauvages,
00:01:42 nous allons plonger au coeur de ces violences en décryptant, en prenant tous
00:01:46 les contextes. Les policiers ne tombent-ils pas dans le piège de la
00:01:49 provocation systématiquement tendue par certains manifestants qui s'empressent
00:01:54 de filmer le décryptage de Charlotte Dornel ? On parle toujours de
00:01:59 l'antagonisme entre les forces de l'ordre et les manifestants. De chaque
00:02:02 côté, le plus souvent, on se radicalise et ce sont les violences qui offusquent
00:02:06 qu'elles soient policières ou celles des émeutiers. Restent les fraternisations
00:02:11 entre les forces de l'ordre et les contestataires, les moments clés de
00:02:16 l'histoire comme Marc Menon nous raconte. Sommes-nous en train de vivre l'union
00:02:21 sacrée de la détestation, dédétestation, inflation, pouvoir d'achat, colère en tout
00:02:27 genre, la fameuse coagulation des luttes souvent redoutées par certains ou
00:02:31 attendues par d'autres, n'était pas en train de se produire là, sous nos yeux,
00:02:35 ce soir, l'édito de Mathieu Bogcouty. Une heure pour prendre un peu de hauteur
00:02:40 avec nos mousquetaires mais on reste en direct et connecté avec le terrain.
00:02:44 Allez c'est parti !
00:02:47 Bonsoir les amis, ravi de vous retrouver ce soir. Pour commencer, on va rejoindre
00:03:03 tout de suite le terrain Régine Delfour, vous êtes à Paris. Par rapport aux
00:03:09 autres manifestations, qu'est-ce qu'il y a de nouveau ce soir dans la capitale ?
00:03:16 Bonsoir Christine, et bien par rapport aux autres manifestations sur cette
00:03:21 mobilisation contre la réforme des retraites, on peut dire que la violence, la
00:03:26 colère est montée d'un cran pendant toute cette journée et ce n'est pas
00:03:29 terminé. Nous sommes avenue de l'Opéra qui cristallise en ce moment aussi des
00:03:33 tensions entre les manifestants et les forces de l'ordre. On a assisté à des
00:03:37 jets de projectiles, des jets de tirs de mortier d'artifice sur les forces de
00:03:42 l'ordre et puis des répliques aussi de tirs de gaz lacrymogènes pour essayer de
00:03:46 disperser cette foule. De nombreux incendies ont été déclarés un peu
00:03:50 partout. D'ailleurs j'en vois un juste devant moi dans une rue adjacente, c'est
00:03:55 la difficulté aussi pour les forces de l'ordre puisqu'il faut intervenir là où
00:03:59 les feux commencent à prendre une ampleur assez importante. Alors depuis
00:04:06 depuis une semaine, il y a une semaine tout juste, le 49.3 avait été
00:04:13 déclenché ce qui avait suscité la colère des manifestants. Hier l'intervention du
00:04:17 chef de l'état au journal télévisé de 13h n'a pas non plus, n'a fait qu'attiser
00:04:23 en fait cette colère puisque en fait la comparaison du
00:04:27 Capitole et avec les manifestants qui avaient envahi le Capitole est passé
00:04:31 très très mal. Le fait de dire qu'il avait été largement élu n'a pas plu
00:04:37 non plus et on sent vraiment une violence qui est montée d'un cran
00:04:42 puisque les violences ont commencé à partir de 15h, il est 19h et ce n'est pas
00:04:46 encore terminé. Là les manifestants sont toujours place de l'opéra, il n'y a pas
00:04:52 encore eu d'ouverture pour qu'ils puissent partir. Ça ne serait tardé mais
00:04:56 on sait que ça va durer encore pendant plusieurs heures. Il va y avoir encore
00:04:59 des violences. Christine. Beaucoup de régimes d'Elfour en direct de la place de
00:05:04 l'opéra à Paris, on restera connecté puisqu'on sait que les manifestants ne
00:05:09 sont pas prêts de quitter la sur place après justement le cortège.
00:05:15 On a noté, on l'a entendu, Régine Delfour a parlé de casseurs, on va en parler
00:05:20 au courant de cette soirée, 1.500 casseurs qui ont subitement apparu
00:05:24 aujourd'hui. C'est intéressant Mathieu Bocote parce que des pompiers qu'on ne
00:05:28 voyait pas qui sont arrivés ce soir, des jeunes qu'on ne voyait pas qui sont
00:05:32 arrivés largement ce soir. La manifestation, la rue, elle a plusieurs
00:05:37 visages. Question ce soir, quels sont les visages de la rue et la rue peut-elle
00:05:42 l'emporter ce soir? Alors vous venez de poser une question essentielle je crois, c'est
00:05:47 la rue pour l'instant rassemblait des cortèges massifs mais globalement
00:05:52 toujours les mêmes. Je parle de la rue de jour car la rue de nuit c'est un peu
00:05:57 différent mais la rue de jour, les manifestants de jour rassemblaient
00:06:01 globalement les forces syndicales rassemblées capables pour différentes
00:06:06 raisons de faire défiler leurs troupes à Paris et ailleurs. Or à partir du
00:06:10 moment, on verra si ça se massifie ou les pompiers s'en mêlent ou d'autres
00:06:14 catégories sociales s'en mêlent. Pour les jeunes c'est autre chose, une forme
00:06:17 d'excitation c'est ce que j'appelle la passion de l'odeur de la poudre.
00:06:21 Mais si on laisse de côté les jeunes là-dessus donc les catégories sociales
00:06:24 qui ont à perdre ou à gagner dans cette mobilisation, là il y a
00:06:28 la possibilité d'une massification de la foule.
00:06:32 Ensuite, est-ce que la rue est représentante
00:06:38 aujourd'hui d'autres choses que d'elle-même? C'est la grande question
00:06:40 posée par Emmanuel Macron, il y a eu des paroles manquant peut-être de tendresse
00:06:44 de sensibilité à l'endroit de tous ceux qui défilent. Pour peu que l'on se fie
00:06:48 au sondage, pour peu qu'on considère que les sondages veuillent dire quelque
00:06:51 chose aujourd'hui, la rue de jour est représentative de l'état
00:06:57 d'esprit des français. Elle est plus radicale, elle est plus... parce qu'elle est
00:07:01 militante, elle défile, mais elle est l'écho d'un malaise qui s'exprime dans les
00:07:06 sondages et qui est palpable ici et là, à la fois dans l'appui aux manifestants
00:07:10 mais aussi dans le fait que l'appui ne cesse pas même si les complications se
00:07:15 multiplient. Quel est le pari d'Emmanuel Macron pour l'instant? Il espère que la
00:07:20 rue finisse par s'épuiser. Il espère que finalement... - La stratégie du pourrissement?
00:07:25 - Alors ça c'est deux possibilités. Le pourrissement c'est une autre stratégie
00:07:28 possible. La stratégie pour l'instant de l'épuisement c'est cette idée que les
00:07:31 gens vont finir par se lasser, ils vont accepter tout cela sous le signe de
00:07:35 l'inévitable. Rappelez-vous ce que disait souvent Dimitri au début de cette
00:07:40 crise. Les gens étaient contre la réforme mais la croyaient inévitable,
00:07:43 croyaient qu'elle allait leur tomber dessus. On s'en désolait mais c'était
00:07:47 comme ça. Là on est à ce moment de basculement où plusieurs se disent
00:07:51 peut-être qu'on peut n'est capable de faire basculer le pouvoir, de l'amener à
00:07:55 céder. Cela dit donc quand Emmanuel Macron se dit quant à lui j'espère tout
00:07:59 simplement que ça va passer, les gens vont se lasser et c'est une stratégie qui
00:08:03 peut tenir à l'échelle de l'histoire, ça a déjà fonctionné ailleurs dans le monde.
00:08:06 Il arrive que les gens se lassent et que la vie ordinaire reprenne. La stratégie
00:08:10 du pourrissement existe aussi cela dit, j'y reviens dans un instant mais
00:08:13 globalement qu'est ce que ça consiste à dire? On va laisser la situation
00:08:16 dégénérer de telle manière, de telle manière que l'enjeu change. L'enjeu ce ne
00:08:22 sera plus les retraites, l'enjeu ce ne sera plus le malaise social français,
00:08:25 l'enjeu devient l'affrontement entre le pouvoir et la rue et là on mise sur le
00:08:30 réflexe légaliste et le fait que l'immense majorité des français préfère
00:08:33 en dernière instance les forces de l'ordre aux casseurs quels qu'ils soient.
00:08:37 Ayons cela à l'esprit. Cela dit, cela dit, un autre élément qui est important je
00:08:43 pense que ça l'histoire nous éclaire toujours, Marc est là pour nous le rappeler
00:08:46 chaque jour. La France est un pays qui a écrit une partie de son
00:08:50 histoire à l'encre de l'Ajacri et de la révolution.
00:08:53 C'est très très français. Si on regarde d'ailleurs dans le monde occidental la
00:08:57 fascination pour la rue, la fascination pour les meutes, la fascination pour la
00:09:01 violence, la fascination pour la grève, la fascination pour la manifestation
00:09:05 comme instrument pour faire tomber le pouvoir, c'est très français en dernière
00:09:10 instance. On ne retrouve pas ça ailleurs et je précise que ce n'est pas exclusif à
00:09:15 la gauche. Ça c'est une chose qu'on doit garder à l'esprit. Le parti de l'ordre
00:09:18 ici ne recoupe pas nécessairement la droite. Le parti de l'ordre en fait c'est
00:09:22 plutôt le parti orléaniste. C'est le parti du pouvoir installé qui ne veut pas
00:09:26 que la société soit bouleversée. Donc selon les époques la gauche ou la
00:09:30 droite se sont emparés de la rue et dans ces moments là la rue nous rappelle, et ça
00:09:34 c'est un élément qui est assez intéressant, ça nous rappelle la rue parisienne
00:09:37 finalement. Je pense qu'à l'histoire de l'échelle du monde la rue parisienne a
00:09:40 été un acteur qui compte. La France est un pays très centralisé, nous le savons,
00:09:44 très grande concentration du pouvoir à Paris mais très grande concentration
00:09:48 aussi de l'insurrection révolutionnaire possible ou de la jacquerie possible à
00:09:52 Paris et c'est ce que l'on voit aujourd'hui.
00:09:54 Alors revenons un peu peut-être un petit mot sur les chiffres puisqu'on a plus
00:09:58 d'un million de manifestants selon le ministère de l'intérieur dans toute la
00:10:02 France d'où 120 000 à Paris, ce qui est un record et justement il arrive parfois
00:10:08 Mathieu qu'une société se mette comme on le voit à gronder, se réchauffe,
00:10:13 devienne éruptive vous le disiez, est-ce que ce n'est pas le cas en ce moment?
00:10:17 J'en ai l'impression, on verra si ça dure mais ça commence à durer bien franchement.
00:10:20 Oui et puis il y a un tournant. Ah ben oui je crois et ça en fait on guette le moment,
00:10:24 rappelez-vous il y a quelques semaines on guettait le moment de l'épuisement des
00:10:27 manifestations, là on ne guette plus le moment de l'épuisement, tout le moins pas
00:10:30 à court terme, on guette le moment de l'amplification, l'effet multiplicateur
00:10:34 donc c'est appelons multiplié par 49,3 appelons ça comme ça, le résultat est assez fort.
00:10:39 Et là je me permets de faire deux références par des oeuvres littéraires
00:10:46 pour nous permettre de comprendre l'état d'esprit des choses.
00:10:48 Joseph Kessel, le plus grand écrivain du 20e siècle je crois, écrit dans un
00:10:52 livre magnifique qui est La Steppe rouge, son premier livre, recueil dessin, il fait
00:10:56 le portrait d'un personnage dans le premier chapitre et qu'est-ce qu'il nous
00:10:58 présente? Un homme plutôt normal, plutôt je dirais équilibré, un peu
00:11:04 colérique, mais appelons ça...
00:11:05 Je fais juste une parenthèse pour voir ici, pardonnez-moi pour
00:11:08 corrompre vos propos, on voit en direct à Paris les pompiers qui se font applaudir.
00:11:14 Vous voyez lorsqu'on parle de la foule, du terrain, de ces différents visages,
00:11:17 voilà un visage qu'on n'avait pas encore vu, voilà pourquoi on se pose des
00:11:20 questions ce soir, voilà pourquoi on se pose des questions du tournant, voilà ces
00:11:23 pompiers qui non seulement rejoignent le mouvement, n'oublions pas qu'il y a des
00:11:27 feux dans tout Paris et les pompiers rejoignent le mouvement et en même temps
00:11:30 ils se font applaudir.
00:11:31 Ce que vous dites est très important.
00:11:33 Voilà des hommes qui sont normalement dans la...
00:11:37 Ils servent les institutions avec raison, on en a besoin et là ils basculent parce
00:11:41 que la situation de crise s'accélère et c'est un peu ce que nous dit Kessel,
00:11:43 donc je le disais dans la step rouge, je me permets d'y référer parce que quelque
00:11:46 fois la littérature nous éclaire. Qu'est-ce qu'on voit quand une société
00:11:49 commence à se réchauffer? Des hommes ordinaires, pas des radicaux, pas des
00:11:53 black blocs, les black blocs on les connaît, ils rêvent de semer le chaos.
00:11:56 Des hommes ordinaires sentent monter en eux une colère normalement refoulée et
00:12:00 le ressentiment, la colère deviennent politique et dès lors, à ce moment, une
00:12:05 société rentre en ébullition parce que l'homme ordinaire entre en ébullition.
00:12:08 Et ça Kessel avait eu cette intuition et je trouve que c'est assez intéressant
00:12:11 pour l'instant. Un autre auteur, Guglielmo Ferreiro, grand, grand historien au
00:12:15 20e siècle, qui développe une thèse fascinante, il dit que se passe-t-il quand
00:12:19 le pouvoir prend peur? Quand le pouvoir prend peur de son peuple, quand le pouvoir
00:12:23 commence à trembler parce qu'il s'inquiète de la possibilité irruptive du
00:12:27 peuple justement. La thèse de Ferreiro, c'est que dans ces moments-là, c'est dans son
00:12:31 livre cité, il nous dit le pouvoir peut devenir violent et erratique, c'est-à-dire
00:12:36 il ne sait plus exactement comment gérer le peuple à la manière... il le
00:12:39 bestialise de plus en plus, il présente le peuple comme une masse un peu
00:12:43 indisciplinée, une masse irruptive, une masse animale qu'il faudrait être capable
00:12:48 de calmer et qui peut à tout moment mordre et là il y a la possibilité de la
00:12:51 violence dans la volonté de le réprimer. Je dis pas qu'on en est là, je dis que c'est
00:12:55 une réflexion sur le pouvoir qui prend peur. Et là ça nous ramène à la
00:12:59 question fondamentale, c'est dans quelle mesure les gouvernants comprennent-ils
00:13:03 la profondeur du malaise français? Est-ce que nos gouvernants comprennent
00:13:07 pour l'instant qu'il ne s'agit plus seulement d'une révolte sur la question
00:13:10 des retraites, qu'il ne s'agit pas simplement d'une colère autour du 62 à
00:13:15 64 ans? Est-ce qu'ils voient, on le dirait en deuxième édito, la convergence des
00:13:19 colères? Et là ça nous ramène à certains auteurs qui depuis 30 ans, 30 ans, ont
00:13:23 cherché à comprendre le malaise français. J'en nomme quelques-uns, Paul
00:13:27 Lyonnet, Marcel Gauchet, Philippe Reynaud, Jean-Pierre Le Goffre, Christophe Guélui,
00:13:31 Jacques Julliard. Je vais pas revenir sur l'oeuvre de chacun, mais je vais revenir sur le
00:13:34 diagnostic de fond de chacun. Il y a un désaccord profond entre la manière dont
00:13:39 les élites françaises ont voulu transformer la France et les préférences
00:13:42 de fond du peuple français. Mais quand sur le long terme, vous orientez la
00:13:46 société dans une direction, malgré les préférences populaires, vous
00:13:49 finissez par en payer le prix, se pourrait-il qu'une partie des élites en
00:13:52 France ait traité le peuple français comme une forme d'obstacle, de boulet, de
00:13:56 résidu historique, de peuple non modernisable et que de temps en temps ils
00:14:00 veulent lui faire payer le fait de ne pas être aussi docile qu'ils ne le souhaiteraient
00:14:03 l'idéologie moderniste, mondialiste ou européiste?
00:14:06 Avant de rejoindre sur le terrain Thomas Bonnet dans la partie calme de la
00:14:10 manifestation, une dernière question Mathieu sur ce sujet du peuple, de la rue
00:14:15 plutôt pardon, à quoi sert-il de voter finalement pour ses dirigeants s'ils sont
00:14:21 condamnés à ne pas pouvoir gouverner dès lors que la société remue?
00:14:26 Je vous dirais les choses très franchement, moi je suis un démocrate en ancienne, je crois
00:14:29 aux élections, je crois vraiment au primat du peuple électoral sur le peuple de la
00:14:32 rue, mais je constate une chose quand le système électoral est truqué, truqué
00:14:36 non pas la manière de je ne sais quel trucage de vote sur le mode
00:14:40 d'organisation mafieuse... - 49.3 c'est truqué? - Non non non, on n'a pas le 49.3, mais ce
00:14:45 que j'appelle le système truqué, c'est quand vous expliquez d'une élection
00:14:49 après l'autre que l'autre choix est fondamentalement illégitime, le cordon
00:14:53 sanitaire, l'idée que l'autre camp ce sont c'est l'infréquentable, puis ensuite
00:14:57 près de la moitié du peuple français ce sont les extrêmes, quand vous expliquez
00:15:00 sans cesse que les acteurs que le peuple décide de placer au coeur de la
00:15:04 concurrence électorale sont illégitimes, donc vous n'avez pas le choix, vous n'avez
00:15:07 pas deux options, vous avez une seule option ou sinon vous allez dans les
00:15:10 enfers, vous allez vous fréquenter les infréquentables, mais quand vous
00:15:14 délégitimez toujours le choix électoral, vous n'avez pas deux choix, vous en avez
00:15:17 seulement un, eh bien vous dévaluez la valeur du résultat électoral. Tous ces
00:15:21 syndicalistes qui nous disent "oh oui on a voté pour Emmanuel Macron, on n'avait
00:15:25 pas le choix, c'est une question de valeur", moi j'aimerais simplement savoir
00:15:27 sur le plan de la question des retraites, si on laisse de côté de l'hypothèse
00:15:30 que Marine Le Pen serait un diable, c'est possible, mais peut-être c'est pas le cas
00:15:34 non plus. Si on décide de simplement regarder sur le plan programmatique, est-ce
00:15:38 que sur le plan des valeurs, sur le plan social, une bonne partie des gens qui ont
00:15:42 voté pour Emmanuel Macron n'étaient-ils pas finalement plus près de la
00:15:45 candidate qu'ils vouaient aux gémonies? On voit aujourd'hui, la question n'est pas de
00:15:48 savoir pour qui voter, on se comprend bien, la simple question c'est quand on
00:15:51 décide de dire que le choix électoral c'est pas entre une bonne option et une
00:15:55 moins bonne option, mais entre le bien et le mal, entre la République et l'anti-
00:15:58 République, vous dévaluez la valeur du choix électoral et quand vous cherchez à
00:16:01 réformer, vous n'avez plus l'adhésion populaire nécessaire pour pousser vos
00:16:04 réformes quelles qu'elles soient. Merci pour ce premier regard. On rappelle
00:16:08 effectivement ce record de manifestants à Paris, 120 000 selon le ministère
00:16:13 de l'intérieur, plus d'un million dans toute la France. Pour la première fois
00:16:17 les black blocs sont arrivés, 1500 casseurs. Une stratégie de maintien de
00:16:22 l'ordre assez nouvelle où la foule est restée compacte et d'ailleurs vous, Thomas
00:16:27 Bonnet, vous étiez dans cette partie où les manifestants étaient calmes.
00:16:32 Tout à fait, Christine, et je suis encore actuellement au coeur de ce cortège
00:16:37 composé de milliers de personnes dans une ambiance calme. J'ai par exemple
00:16:42 assisté aux scènes que vous venez de décrire de pompiers ovationnés par la
00:16:46 foule. Une foule ici composée de personnes assez jeunes, des universitaires, des
00:16:51 lycéens même qui forment ce cortège et qui sont donc rassemblés ici depuis le
00:16:56 début de l'après-midi dans une ambiance calme. Alors ils sont en colère, ils
00:16:58 m'expliquent qu'ils sont en colère, particulièrement remonté par l'utilisation
00:17:02 du 49.3 mais aussi par l'intervention télévisée hier du président de la
00:17:05 République. Mais cette colère ici elle s'exprime de
00:17:07 manière pacifique, elle s'exprime sur les pancartes avec des pancartes qui sont
00:17:11 quasi toutes destinées au président de la République, à la première ministre ou à
00:17:15 l'utilisation du 49.3. Notez que ces manifestants avec lesquels je me trouve
00:17:20 qui sont autour de moi n'ont pas encore accédé à la place de l'Opéra. Ils ont
00:17:23 été bloqués pendant de longs instants dans la rue de boulevard des Italiens
00:17:27 précisément où ils sont actuellement. Ils n'ont pas accédé à cette place.
00:17:30 Vous voyez même des personnes rebroussées chemin. Le cortège semble-t-il vient de
00:17:33 repartir alors même que la pluie et la nuit font leur apparition ici.
00:17:38 Merci beaucoup Thomas Bonnet. Donc là vous êtes au coeur de la partie du
00:17:45 cortège parisien qui n'est pas encore arrivé à place de l'Opéra. On voit que
00:17:48 la foule était dense, compacte et qu'il y avait beaucoup de monde et on reviendra
00:17:52 dans un instant pour suivre un peu ce qui se passe. Alors Guillaume Bigot, on a vu à
00:17:57 la fois 1 500 casseurs, des restaurants comme McDonald's cassés, beaucoup de
00:18:04 détérioration, des voitures renversées à Paris. On a vu justement la partie
00:18:10 calme aussi, il faut le dire, des manifestants. On a vu ce record à Paris
00:18:13 et on sent ce tournant sur le terrain et la foule attisée par le 49.3, la foule
00:18:20 attisée par le discours d'Emmanuel Macron hier. Je dis bien discours, c'était
00:18:24 une interview pardon. Question Guillaume Bigot, ces manifestations sont-elles les
00:18:31 prémices de la révolution ? C'est une question que tout le monde se pose. En quoi
00:18:35 ces mobilisations peuvent-elles se transformer ? Quels sont les signes
00:18:39 lorsqu'on passe d'une grève ou bien d'un mouvement à une révolte, d'une révolte
00:18:43 à une révolution ? On va essayer d'expliquer ça mais d'abord je reprends ce que dit
00:18:47 Mathieu, il a raison, il y a le mouvement de jour, le mouvement de nuit, il y a l'équipe de jour,
00:18:50 l'équipe de nuit et jusqu'à présent on avait affaire à deux mouvements à mon
00:18:53 avis assez distincts. Depuis vendredi dernier dans les villes
00:18:56 universitaires disons, il y avait des étudiants un peu lycéens qui se réunissaient
00:19:01 le soir pour faire un peu des vidéos tiktok devant des feux de poubelle et on
00:19:05 avait en parallèle quelque chose qui n'avait jusqu'ici rien à voir, en
00:19:09 parallèle de ces petits soirs on avait des grandes journées, des grandes journées
00:19:12 à l'appel de l'intersyndicale, dans le calme avec des professionnels de la
00:19:15 manifestation qui encadraient des manifestations et ça dans tout le pays
00:19:20 c'était pas du tout la même sociologie, là on avait des salariés, des employés
00:19:24 et là ce qu'on est en train de voir c'est que les deux mouvements
00:19:26 commencent à fusionner, ça paraît le plus le plus important.
00:19:30 Évidemment les deux mouvements étaient assez différents, c'est à dire que le
00:19:32 premier était complètement illégal tandis que le second semblait cadré, il
00:19:36 y avait un parcours, il y avait une manifestation qui était autorisée etc.
00:19:40 Moi je pense qu'à ce stade aucun des deux mouvements n'est vraiment contrôlé
00:19:42 et contrôlable. D'abord la France Insoumise prétendait avec ses hashtags
00:19:47 déambulation etc, on voyait bien qu'elle était derrière, qu'elle essayait d'agiter
00:19:49 mais en réalité, c'est peut-être pas le feu, l'odeur de la poudre de Matthieu mais
00:19:53 je pense qu'effectivement il y a une sorte de rite initiatique comme ça depuis au
00:19:57 moins les manifestations de CPE automatiques, c'est à dire que les
00:19:59 jeunes sont très heureux de se retrouver et de tester un peu leur
00:20:02 bravoure, leur héroïsme etc. Bref il y a ce côté là.
00:20:04 Les images que l'on voit ce sont des images de cet après-midi.
00:20:08 Exactement, mais cet après-midi la caractéristique c'est, et on va voir parce que là le
00:20:12 soir tombe et la nuit va se prolonger, c'est probablement l'amalgame des deux.
00:20:15 Quant aux manifestations d'intersyndicales autour du mouvement social,
00:20:18 je pense qu'elles étaient déjà débordées de longue date parce qu'en
00:20:20 réalité toute cette colère rentrée, la colère des gilets jaunes, la fameuse
00:20:24 colère des gilets jaunes, elle utilise en réalité le mouvement social et la
00:20:27 contestation des mouvements des retraites, c'est déjà le cas.
00:20:29 Donc je pense que la nouveauté du jour c'est la jonction en fait entre les deux
00:20:33 mouvements et ce qui se prépare me semble-t-il, ça a l'air de ressembler à ça,
00:20:36 c'est les gilets jaunes 2, le retour. Voilà donc en version XXL, c'est à dire
00:20:42 c'est les gilets jaunes avec le soutien de la jeunesse et avec le soutien des
00:20:46 syndicats. Merci qui ? On l'a dit hier, merci au
00:20:50 verbe hautement inflammable, notre président de la République.
00:20:54 Parce que là je pense qu'il y aurait eu des facteurs de division du mouvement,
00:20:57 ça va être difficile à diviser, vous parliez tout à l'heure avec Charles de la
00:21:00 coagulation des colères, mais grosso modo évidemment que les syndicats sont
00:21:03 concurrents entre eux, bien sûr qu'ils sont concurrents, mais tous estiment comme
00:21:07 l'a dit monsieur Martinez et à mon avis à juste titre, que le président Macron
00:21:10 s'est "foutu de leur gueule" entre guillemets.
00:21:12 Bien sûr que les filles et les syndicats ne s'aiment pas, c'est vrai, mais tous ont
00:21:17 été humiliés par la comparaison avec les factions du capital.
00:21:20 Bien sûr que le RN n'appellera pas à la révolution, et sa patronne a quand même
00:21:24 dit qu'elle ne serait pas là pour éteindre l'incendie cette fois-ci.
00:21:27 Bien sûr qu'en pleine inflation, vous imaginez que la France périphérique n'a pas le luxe
00:21:31 de se révolter, oui, sauf que je pense qu'elle est vraiment à bout.
00:21:34 Et donc tout ce monde peut d'autant plus facilement s'unir que le président,
00:21:38 par une sorte d'amateurisme qu'il revendique lui-même, par un mépris
00:21:43 qu'il dissimule à peine, et par une morgue imbécile, enfin morgue imbécile c'est un peu
00:21:46 un pléonasme, et bien il incarne à merveille ce système qui prétend d'ailleurs
00:21:52 qu'il n'y a pas d'autres alternatives. Et là évidemment ça met le feu aux poudres.
00:21:55 La France est-elle dans une situation pré-révolutionnaire selon vous ?
00:22:01 Il faut déjà répondre à la question qu'est-ce que c'est qu'une révolution ?
00:22:03 Moi j'aurais une définition d'abord idéologique, et une définition technique pour compléter.
00:22:08 La définition idéologique, qu'est-ce que c'est qu'une révolution ?
00:22:10 C'est un changement politique violent, radical, en général assez soudain
00:22:14 et assez imprévisible il faut dire, qui aboutit à changer de régime
00:22:17 et qui aboutit à changer d'idéologie, c'est-à-dire de système de légitimité,
00:22:20 de système de valeurs. On passe de 1789 monarchie d'ancien régime à autre chose,
00:22:25 la république à terme, et on passe en 1979 du Shah d'Iran à la république islamique.
00:22:30 On a un autre système de valeurs. Et la caractéristique de la révolution
00:22:33 c'est que les gens sont prêts à mourir et à tuer pour ça.
00:22:36 Et là il y a une définition technique de la révolution, c'est que la foule en colère,
00:22:40 et bien on ne peut pas la réprimer, on ne peut pas, on ne veut pas la réprimer.
00:22:44 Et en fait généralement la révolution survient lorsque les CRS,
00:22:48 ou l'équivalent des CRS à toutes les époques, mettent la crosse en l'air.
00:22:51 Et effectivement on a entendu là aujourd'hui Fabien Roussel
00:22:54 appeler les CRS à rejoindre les cortèges.
00:22:57 Donc on est dans quelque chose, on n'est pas encore là, mais on s'en rapproche.
00:23:01 On en parlera avec Marmenant dans un instant, parce que c'est un point de bascule redouté.
00:23:07 Est-ce que la France d'aujourd'hui elle est révolutionnaire ?
00:23:09 Moi je vais vous décevoir parce que je ne peux pas avoir une réponse très claire.
00:23:12 Il me semble qu'objectivement elle n'est pas ou elle n'est plus révolutionnaire.
00:23:16 Subjectivement ce n'est pas la même chose.
00:23:18 Pourquoi objectivement elle n'est plus révolutionnaire ?
00:23:19 Parce qu'il manque au moins deux ingrédients.
00:23:21 Le premier ingrédient il est idéologique.
00:23:23 Si on fait des sondages, toute la population française est d'accord
00:23:26 pour soutenir la démocratie et la République.
00:23:28 Donc les Français ne sont pas contre cette idéologie,
00:23:30 ils ne veulent pas un autre régime, ils ne veulent pas une légitimité de remplacement.
00:23:34 Et puis surtout il y a un facteur démographique,
00:23:36 parce qu'en général la bascule idéologique elle est liée à la bascule démographique.
00:23:39 En général quand il y a révolution, c'était le cas en 1789
00:23:41 et encore tardivement dans notre histoire,
00:23:44 il y a 50% de la population qui a moins de 20 ans.
00:23:46 Donc il faut vraiment qu'on soit très jeune pour faire la révolution.
00:23:49 Donc la France n'en est plus là.
00:23:50 Par contre subjectivement, alors là oui,
00:23:53 je pense que la France elle est au bout du bout,
00:23:55 elle est au bord de l'explosion.
00:23:57 Et effectivement le pouvoir peut tomber.
00:23:59 Pourquoi il peut tomber ?
00:24:00 Parce qu'il y a un phénomène d'accumulation, de pression.
00:24:03 Il y a des décennies de mensonges, de trahison, de coquuffiage démocratique,
00:24:07 au moins depuis 2007, au minimum.
00:24:09 Et en fait la dernière fois, au plein cœur des Gilets jaunes,
00:24:13 ça m'avait beaucoup frappé,
00:24:14 40% des Français interrogés
00:24:16 soutenaient et comprenaient la violence des manifestants.
00:24:19 40% !
00:24:20 Alors vous me dire "on n'en est plus là".
00:24:21 Oui vous avez raison, on n'en est plus là.
00:24:22 Moi je crois qu'on est beaucoup plus loin que là,
00:24:24 ne serait-ce que parce que c'est déjà passé, les Gilets jaunes.
00:24:27 Et la deuxième caractéristique,
00:24:28 c'est parce que les CRS, les policiers, les gendarmes, etc.
00:24:31 sont très légalistes, ils font leur travail,
00:24:33 ils le font d'ailleurs très courageusement,
00:24:34 il faut les saluer, beaucoup en prennent plein la tête.
00:24:37 Mais ce sont des citoyens comme les autres.
00:24:39 Leur sociologie en plus,
00:24:41 à mon avis, ne les rend pas très solidaires du pouvoir.
00:24:43 Alors ils ont déjà défendu le président une fois,
00:24:46 je ne suis pas du tout sûr que cette fois-ci,
00:24:49 si ça empire, ils vont le défendre.
00:24:52 Mais comment sortir de cette situation
00:24:55 où l'ordre public pourrait tomber ?
00:24:58 Est-ce qu'il y aurait, selon vous, une issue politique ?
00:25:01 À court terme, l'issue politique, ce serait de retirer la loi,
00:25:03 ce serait le plus rapide.
00:25:05 L'article 11, le référendum de l'article 11,
00:25:07 on sait que ni ce scénario ni le suivant arriveront.
00:25:10 Moi, je pense que si le président attend trop,
00:25:12 l'issue, la seule issue pour calmer, ce serait la démission.
00:25:15 Mais même la démission,
00:25:16 je ne suis pas certain qu'il y ait une issue réellement politique.
00:25:18 Pourquoi ?
00:25:19 Et ça, c'est un phénomène sur lequel il faut, à mon avis,
00:25:21 s'arrêter un instant.
00:25:22 C'est une crise assez complexe.
00:25:23 C'est-à-dire que ce n'est pas une crise de régime pour moi,
00:25:25 c'est une crise de représentativité.
00:25:28 En gros, on l'a dit, le peuple ne veut pas sortir de la République,
00:25:30 il ne veut pas sortir des démocraties.
00:25:32 Il estime par contre que ses représentants
00:25:34 ne le représentent plus.
00:25:35 L'ont trahi d'une certaine façon.
00:25:37 Et d'un autre côté, vous avez des autorités
00:25:39 légalement élues, qui sont légitimes.
00:25:41 Le président de la République, pour commencer, qui dit
00:25:43 "Eh bien la démocratie, c'est moi.
00:25:45 C'est moi qui ai été démocratiquement élu
00:25:47 par le peuple souverain."
00:25:48 Alors, si le pouvoir n'avait pas été élu démocratiquement,
00:25:52 ce serait un usurpateur.
00:25:53 On pourrait le faire tomber, la solution serait très simple.
00:25:55 Si les manifestants
00:25:57 n'étaient pas soutenus par 70 à 80% des Français,
00:26:00 en effet, ce serait des factieux,
00:26:02 il suffirait de les réprimer et la solution serait très simple.
00:26:04 En fait, aucune de ces solutions simples n'est possible.
00:26:07 Le problème est beaucoup plus complexe que ça.
00:26:09 Il y a deux constats, à mon avis, qui expliquent
00:26:11 et qui permettent d'éclairer cette crise de la représentativité
00:26:14 et ce paradoxe d'un peuple français
00:26:16 qui s'estime mis en minorité par ses représentants.
00:26:20 Premier point, c'est très clair,
00:26:22 il y a entre un tiers et un demi à moitié des électeurs français
00:26:26 qui, depuis des décennies, ne votent plus.
00:26:28 C'est un phénomène massif.
00:26:30 Il faut ajouter à ces abstentionnistes
00:26:32 les électeurs du RN contre le système,
00:26:34 les électeurs du LFI contre le système,
00:26:36 et à l'arrivée, quand vous faites cette addition très simple,
00:26:38 vous vous rendez compte que deux tiers des Français
00:26:40 ne veulent plus de la politique qu'on vous essaie de leur imposer
00:26:44 depuis 40 ans maintenant.
00:26:46 Deuxième problème et deuxième éclairage,
00:26:50 ni la NUPES, ni le RN,
00:26:53 même le RN + Reconquête,
00:26:55 ne sont pris séparément, pris isolément,
00:26:58 plus représentatifs finalement que le système qui est au pouvoir.
00:27:01 On pourrait appeler le bloc élitaire,
00:27:03 c'est-à-dire grosso modo Renaissance et LR,
00:27:05 ce qui est incarné par le président de la République.
00:27:07 Donc, vous voyez, c'est éclaté en trois tiers plus les abstentionnistes.
00:27:10 Ni l'extrême gauche, comme ils disent,
00:27:12 ni l'extrême droite, comme ils disent,
00:27:14 n'est plus ou moins représentatif
00:27:16 que le président Macron, qui lui-même n'est pas représentatif.
00:27:19 Donc, je pense, c'est la conclusion à laquelle il faut arriver,
00:27:22 qu'on est dans une situation de transition,
00:27:24 que ça se décompose effectivement,
00:27:26 et que la critique sociale du système eurolibéral,
00:27:29 telle que portée par exemple par LFI,
00:27:31 tant qu'elle déteste plus finalement
00:27:34 la critique identitaire du système eurodiversitaire,
00:27:38 plus qu'elle ne critique le système lui-même,
00:27:40 tant que ces deux critiques du système sont hostiles l'une à l'autre
00:27:43 et ne peuvent pas s'unir, elles sont politiquement stériles.
00:27:47 Et donc, il n'y a pas de débouché politique.
00:27:49 Et comme il n'y a pas de débouché politique,
00:27:51 alors, il peut y avoir un débouché violent.
00:27:55 – Juste avant d'aller rejoindre Eliot De Waal sur le terrain,
00:27:58 j'aimerais vous entendre réagir par rapport à cette chronique de Guillaume Bigot.
00:28:01 Est-ce que pour vous, on est, selon vous, oui ou non,
00:28:06 en train de passer d'un mouvement à la révolte,
00:28:08 de la révolte à la révolution, est-ce que c'est possible ou pas du tout ?
00:28:11 – Alors, il est toujours difficile d'avoir l'effet loupe à travers l'histoire,
00:28:16 mais néanmoins, il y a des signes,
00:28:18 et on a le sentiment qu'effectivement, l'exaspération,
00:28:22 le moment où le peuple n'a plus la petite lueur,
00:28:25 l'espoir qui lui permet de tenir,
00:28:28 eh bien, dès lors, on n'a pas le désir de rester dans son petit cercle familial,
00:28:35 de croire à une sécurité,
00:28:37 plus rien n'est à perdre et là, tout peut basculer.
00:28:42 – Merci pour votre regard.
00:28:43 Dans un instant, on va parler justement de ce moment de bascule
00:28:46 où les forces de l'ordre peuvent rejoindre les manifestants dans l'histoire.
00:28:49 C'est intéressant de se pencher sur la question avec vous, Charlotte, on verra.
00:28:54 Qu'est-ce qui se passe réellement sur le terrain
00:28:55 lorsqu'on parle de violence policière ou de violence sur les policiers ?
00:28:59 En rappelant qu'il y a un policier qui a été hospitalisé à Durance-Anse aujourd'hui,
00:29:04 qui a reçu un coup à la tête en plein Paris.
00:29:07 Direction le terrain, Eliott Deval, vous êtes aussi place de l'Opéra.
00:29:11 Est-ce que pour vous, selon vous, on le voit sur ces images,
00:29:14 nous sommes à un tournant ce soir de la mobilisation ?
00:29:17 [Bruits de tirs]
00:29:20 – Ce qui est certain, Christine, c'est que, et les forces de l'ordre,
00:29:24 et les pompiers que vous voyez à l'image qui sont en train d'intervenir
00:29:27 sur une des rues parallèles de la place de l'Opéra, rue Comartin très précisément,
00:29:31 sont épuisées, sont conscientes, elles nous l'ont dit,
00:29:35 que le climat de tension aujourd'hui a atteint des niveaux quasi historiques.
00:29:40 Ce matin, je m'entretenais avec l'un des responsables de ces forces de l'ordre
00:29:45 qui nous disait "on s'inquiète pour ce soir parce que ce qu'on a vécu ces derniers jours,
00:29:49 on ne l'avait pas forcément vécu ces dernières années,
00:29:52 même au moment des Gilets jaunes".
00:29:55 Pourquoi on est sur cette rue Comartin, Christine ?
00:29:57 Tout simplement parce que, et on en a l'habitude de vivre maintenant une semaine,
00:30:02 les manifestants qui quittent le cortège officiel, une fois la nuit tombée,
00:30:08 tentent de prendre certaines rues, brûler du mobilier urbain,
00:30:13 et puis ensuite quittent les lieux le plus rapidement possible.
00:30:16 L'intervention des pompiers, elle se fait de façon assez complexe,
00:30:20 parce que vous imaginez bien qu'elles peuvent être prises à partie,
00:30:22 cette fois-ci ça n'était pas le cas,
00:30:24 mais elles ont attendu que les forces de l'ordre puissent sécuriser la zone pour intervenir.
00:30:30 C'était très intéressant ce qu'on a pu voir il y a quelques instants,
00:30:34 c'est-à-dire que vous avez des premiers feux de poubelles qui apparaissent,
00:30:38 et puis tout autour vous avez des gens qui étaient dans un bar,
00:30:41 et puis qui viennent se poser pas très loin de cet incendie,
00:30:45 et qui commencent à prendre un selfie,
00:30:46 comme s'ils avaient perdu en quelque sorte toute rationalité, toute logique,
00:30:52 c'est-à-dire que ça devenait un événement de voir un feu de poubelle sur une rue dans Paris,
00:30:59 et donc qu'il fallait en quelque sorte immortaliser le moment.
00:31:02 Cette séquence-là, je vais vous dire très honnêtement, Christine elle m'a plutôt perturbé,
00:31:07 je me suis dit "mais qu'est-ce qui se passe pour qu'aujourd'hui on se prenne en selfie tout heureux,
00:31:11 avec des feux de poubelles ?"
00:31:13 On va essayer d'avancer un peu, suivre les forces de l'ordre,
00:31:16 parce que vous avez bien compris l'enjeu maintenant,
00:31:17 c'est d'essayer de protéger tout un quartier d'éléments perturbateurs,
00:31:23 et donc on vous en dira plus dans les prochaines minutes,
00:31:25 mais c'est vrai que les forces de l'ordre et les pompiers qui sont sur place
00:31:29 ont conscience que c'est un moment de bascule.
00:31:31 – Merci beaucoup pour ce point mon cher Ayot,
00:31:33 on reste avec vous et n'hésitez pas à nous rappeler,
00:31:36 en fonction de ce qui se passe sur le terrain,
00:31:38 que ce soit calme ou pas, on veut tout savoir,
00:31:41 et merci beaucoup pour ces informations,
00:31:43 comme on sent qu'on est à un point de bascule,
00:31:45 et puis c'est intéressant puisque les manifestants se sont passé
00:31:48 les informations sur rejoindre après Saint-Augustin,
00:31:53 place de la Concorde, ou encore Châtelet-Léal,
00:31:56 lorsqu'ils vont se disperser pour aller dans ces coins,
00:31:58 donc on sent que la soirée sera longue.
00:32:00 Sachez que d'un instant à l'autre nous irons rejoindre l'intersyndicale
00:32:04 pour connaître les suites du mouvement.
00:32:06 Alors évidemment ils vont certainement se féliciter
00:32:08 de l'ampleur de la manifestation à Paris,
00:32:10 condamner certainement les violences,
00:32:12 et certainement décider de continuer,
00:32:14 n'empêche qu'on les prendra en direct d'un instant à l'autre.
00:32:17 Charlotte, un tournant dans la mobilisation,
00:32:20 une foule compacte des casseurs tenus à l'écart,
00:32:23 on le voit avec une nouvelle stratégie des forces de l'ordre,
00:32:26 on a réussi à les détacher de la mobilisation calme.
00:32:31 D'ailleurs ces derniers jours, Charlotte d'Orléans,
00:32:33 nous avons vu les manifestations se multiplier,
00:32:36 les images d'interventions policières être particulièrement commentées,
00:32:41 certaines images choquent vraiment.
00:32:44 La question qu'on va se poser avec vous ce soir,
00:32:46 la police n'est-elle pas un problème dans ces manifestations
00:32:50 dispersées et sauvages ?
00:32:53 C'est le discours qui est en train de naître depuis quelques jours,
00:32:58 à vrai dire ça fait des années qu'on l'entend dans la bouche de certains,
00:33:01 et je pense qu'il y a un manque de discernement des situations.
00:33:03 D'abord il n'y a eu aucun problème, aucun commentaire de ce genre,
00:33:06 il n'y a aucune action à commenter en réalité.
00:33:08 Ces dernières semaines où les manifestations se sont multipliées,
00:33:11 où elles étaient massives et où ça n'a pas du tout été une question,
00:33:14 c'est une question depuis quelques jours,
00:33:16 depuis qu'en effet il y a ce tournant dans la manière de manifester,
00:33:20 et ce n'est pas tellement la question de la manifestation sauvage,
00:33:23 parce qu'il y en a qui se passent extrêmement bien,
00:33:25 ce n'est pas la question du cortège de cet après-midi
00:33:27 où il n'y a aucun problème avec l'immense majorité des manifestants,
00:33:31 ce sont évidemment des comportements que l'on connaît très bien,
00:33:33 c'est les fameux éléments,
00:33:36 Antifa, Black Blog, qui se constituent en Black Blog dans les manifestations,
00:33:41 et qui viennent, si vous permettez, de plusieurs pays européens,
00:33:44 qui viennent de plusieurs pays européens et qui se rassemblent
00:33:48 pour venir casser et qui ont un vocabulaire
00:33:52 et un champ sémantique extrêmement révolutionnaire.
00:33:55 Et alors moi je suis toujours un peu étonnée,
00:33:57 qu'on s'étonne finalement que quand vous décidez de faire une barricade,
00:34:02 de brûler des poubelles, de casser une voiture ou d'aller attaquer quelqu'un,
00:34:07 de trouver les forces de l'ordre sur votre chemin.
00:34:09 Il y a un côté "je veux faire la révolution",
00:34:11 vous investissez un champ sémantique révolutionnaire
00:34:14 et vous venez ensuite vous plaindre, si possible,
00:34:16 sur une chaîne détenue par le grand capital dans le pays,
00:34:20 et vous allez porter plainte donc devant des policiers,
00:34:23 contre d'autres policiers.
00:34:24 Il y a un moment, la révolution,
00:34:26 et Marc nous en parle depuis quelques jours,
00:34:29 Guillaume vient de nous en parler,
00:34:30 soit vous investissez le champ révolutionnaire,
00:34:33 mais dans ces cas-là, venir pleurer le soir c'est assez contradictoire.
00:34:37 Ensuite, plus sérieusement, il faut comprendre
00:34:40 que les interventions policières se font dans des circonstances
00:34:43 extrêmement particulières.
00:34:44 Et commenter, le problème de la vidéo,
00:34:46 vous savez on en parle souvent, c'est la même question finalement,
00:34:50 plus largement que la question de la transparence.
00:34:52 Quand on est au courant de tout, on a des images sous les yeux,
00:34:54 on a l'impression de maîtriser absolument la situation.
00:34:57 Mais il y a cette fameuse phrase,
00:34:58 "Donnez-moi trois phrases et je vous fais prendre un homme",
00:35:01 enfin je le fais à ma sauce,
00:35:02 "Donnez-moi trois images,
00:35:04 "donnez-moi trois secondes d'une séquence qui dure 15 minutes,
00:35:07 "et je vous ferai prendre un homme",
00:35:08 et Marc montre l'image en question.
00:35:10 C'est vrai dans un sens comme dans l'autre,
00:35:12 évidemment la manipulation des images,
00:35:14 on connaît ça par cœur,
00:35:15 et par ailleurs, des images quand vous avez un feu,
00:35:18 quand vous avez une action de police,
00:35:21 quand vous avez des pompiers qui interviennent,
00:35:22 ce sont systématiquement des images extrêmement impressionnantes.
00:35:26 Ce sont de belles images, c'est d'ailleurs pour ça
00:35:28 que tout le monde se précipite dessus,
00:35:30 mais en elles-mêmes et seules,
00:35:32 elles ne disent pas nécessairement grand-chose,
00:35:34 et elles peuvent même vouloir dire exactement,
00:35:37 avoir l'air de dire exactement le contraire
00:35:39 de ce que nous voyons.
00:35:41 - Par ailleurs... - De ce qui se passe réellement.
00:35:42 De ce qui se passe réellement.
00:35:44 Et il y a des gestes individuels de certains policiers
00:35:47 qui peuvent être posés à tort,
00:35:48 c'est vrai hors manifestation,
00:35:50 c'est vrai tout le temps,
00:35:51 et c'est vrai évidemment dans les manifestations.
00:35:53 Ces gestes malheureux, voire graves parfois,
00:35:56 ils peuvent être posés volontairement ou non
00:35:59 dans une situation de manifestation,
00:36:01 ça c'est le travail de la justice qui se fait derrière,
00:36:03 et je note par ailleurs que quand il y a une plainte
00:36:07 ou des images qui sortent sur des interventions policières,
00:36:09 croyez-moi bien que les enquêtes qui pèsent sur les policiers
00:36:12 vont jusqu'au bout beaucoup plus que dans les cas inverses
00:36:15 où les manifestants sont poursuivis.
00:36:18 Donc en effet, je pense qu'il faut garder un discernement
00:36:23 dont beaucoup de nos confrères manquaient énormément
00:36:25 au moment de commenter des vidéos,
00:36:27 notamment des actions policières.
00:36:30 Alors il est vrai que ce sont des images qui génèrent des commentaires,
00:36:33 plus encore que les témoignages.
00:36:34 Or ces images, Charlotte, elles existent,
00:36:37 bel et bien,
00:36:38 et nous les avons sous les yeux.
00:36:41 Elles nous choquent, je le disais tout à l'heure.
00:36:42 Est-ce que justement elles ne suffisent pas ?
00:36:44 Comment analyser ces images justement de violences policières,
00:36:47 dites violences policières, que l'on voit ?
00:36:49 C'est ça, elles sont un indicateur,
00:36:51 comme toutes les images du monde,
00:36:52 mais ce que je disais, il faut s'en méfier,
00:36:53 parce que d'abord, quand on a une image
00:36:56 notamment spectaculaire,
00:36:58 en général, on a le moment,
00:37:00 ce sont des vidéos courtes,
00:37:02 on a le moment de ce qu'on appelle l'action de force,
00:37:04 le moment où il y a intervention.
00:37:06 On n'a jamais ce qui précède,
00:37:08 et vous avez un homme qui va être...
00:37:10 Vous avez trois policiers qui se jettent sur un homme,
00:37:13 et l'histoire ne vous dit pas ce que faisait cet homme
00:37:15 les dix minutes qui précédaient.
00:37:16 Et en général, dans une situation
00:37:19 où vous pouvez avoir de l'autre côté de la vidéo
00:37:21 une foule extrêmement hostile,
00:37:22 où vous savez souvent, on les voit tenir à distance
00:37:25 des gens qu'on ne voit pas sur la vidéo,
00:37:27 ils ne tiennent pas à distance leurs amis imaginaires, a priori.
00:37:29 Donc il y a forcément une hostilité
00:37:32 assez manifeste autour d'eux.
00:37:34 Et quand vous avez des images plus larges,
00:37:36 quand vous avez ce qui précède de l'image,
00:37:38 de l'action forte qu'on veut vous montrer,
00:37:41 vous comprenez parfois extrêmement différemment,
00:37:43 voire l'exact inverse
00:37:44 de ce que vous pensiez avoir vu sur la vidéo.
00:37:47 Par ailleurs, il faut noter une chose aussi,
00:37:49 c'est que vous voyez,
00:37:50 on le voit en permanence sur les images,
00:37:52 tout le monde filme dans ces situations.
00:37:54 Alors vous avez des gens qui ont presse sur le casque
00:37:57 et qui sont toussés, comme les street docteurs,
00:37:59 on a les street press maintenant,
00:38:00 qui sont un peu partout avec leur portable
00:38:02 ou avec des éléments...
00:38:03 - Ils nous en parlaient d'ailleurs, Eliott Deval.
00:38:05 - Qui se placent en général,
00:38:06 et les policiers en parlent de plus en plus,
00:38:07 parce qu'ils se placent en général
00:38:09 entre les manifestants hostiles,
00:38:11 voire les éléments radicaux dont on parle,
00:38:13 et la police.
00:38:14 D'abord, ils se mettent en danger eux-mêmes,
00:38:16 ils gênent parfois l'intervention
00:38:18 et ils la rendent encore plus compliquée,
00:38:20 ils complexifient la situation.
00:38:22 Et on le voit sur les images,
00:38:23 on voit des gens courir partout,
00:38:24 vous ne savez pas qui est hostile ou pas,
00:38:25 vous ne savez pas qui est le manifestant lambda,
00:38:28 et je pense que c'est ça qu'il faut garder à l'esprit aussi.
00:38:31 C'est-à-dire que ces images,
00:38:32 elles sont, dans un sens comme dans l'autre d'ailleurs,
00:38:34 nous on les commente bien sagement,
00:38:36 après coup, sur un plateau de télévision
00:38:38 où il n'y a absolument aucun stress,
00:38:40 aucune montée d'adrénaline,
00:38:42 et si...
00:38:42 Non mais, vous voyez, en tout cas pas ce stress-là
00:38:45 de la manifestation qui dégénère,
00:38:47 et par ailleurs, avec un calme
00:38:50 et une manière qu'on a parfois de décomposer les images.
00:38:54 Vous savez, les policiers vous disent,
00:38:55 nous quand on arrive sur une situation,
00:38:57 on a une seconde pour réfléchir à ce qu'on fait,
00:39:00 on a une seconde pour essayer de comprendre
00:39:01 ce qui vient à droite, à gauche, en face, derrière,
00:39:04 voire même du ciel,
00:39:04 puisque il y a beaucoup de jets de projectiles.
00:39:07 Alors évidemment, vous ne réagissez pas du tout de la même manière,
00:39:10 et quand vous décomposez des actions en disant,
00:39:12 là, à ce moment-là, est-ce qu'il fallait qu'ils prennent plutôt sa matraque,
00:39:14 plutôt qu'il envoie, qu'il se serve de sa gazeuse,
00:39:17 ou qu'il recule, ou qu'il voit ce que faisait son collègue d'à côté,
00:39:21 c'est un peu vivre dans un monde merveilleux
00:39:24 qui n'existe évidemment pas sur le terrain.
00:39:27 Par ailleurs, on a beaucoup de vidéos, je le disais,
00:39:29 on n'a pas celles des forces de l'ordre.
00:39:30 Vous savez, ils ont des caméras embarquées,
00:39:32 alors là, c'est un choix du ministère de l'Intérieur,
00:39:34 ces caméras servent pour les procédures judiciaires
00:39:37 ou administratives qui pèsent parfois sur certaines actions policières,
00:39:41 mais elles ne sont pas livrées au public.
00:39:43 Donc on n'a pas l'intégralité des vidéos.
00:39:45 Donc moi, je ne suis pas en train de dire,
00:39:47 les policiers se comportent forcément merveilleusement bien en toute situation,
00:39:51 je dis simplement que, et alors là, pour le coup,
00:39:54 je n'ai aucun problème à le dire,
00:39:55 de manière générale, le discours médiatique manque
00:39:58 énormément de prudence dans sa manière de commenter ces images-là,
00:40:02 et il se trouve qu'elle manque de prudence toujours dans le même sens.
00:40:05 C'est-à-dire que c'est systématiquement les forces de l'ordre
00:40:08 qui poseraient des gestes violents.
00:40:10 Alors évidemment, on dit de manière rhétorique,
00:40:12 on condamne les violences,
00:40:14 mais on a l'air de ne pas les prendre en compte
00:40:16 dans la manière dont les policiers sur le terrain sont obligés
00:40:19 d'interagir avec ces violences qui sont, pour le coup, bel et bien réelles.
00:40:24 Et ensuite, il peut y avoir, évidemment,
00:40:26 à côté des gestes individuels problématiques,
00:40:28 un problème de doctrine générale de maintien de l'ordre.
00:40:31 Alors c'est soit le choix du parcours,
00:40:34 surtout quand vous avez des travaux, des poubelles partout,
00:40:35 donc là, c'est la catastrophe,
00:40:37 là, en même temps, dans Paris, en ce moment, le parcours, c'est compliqué.
00:40:40 Vous pouvez avoir un problème,
00:40:42 ce qu'on avait vu, par exemple, au moment des Gilets jaunes,
00:40:44 le gros problème avec l'usage des LBD,
00:40:46 c'était le fait que, devant l'urgence de la situation,
00:40:50 le ministère de l'Intérieur avait décidé de mettre des LBD
00:40:53 entre les mains de policiers qui n'avaient pas l'habitude de s'en servir,
00:40:56 qui n'étaient pas formés pour ça.
00:40:58 Et là, je note deux choses absolument importantes.
00:41:00 D'abord, un, la nécessité de la formation des policiers,
00:41:03 qui est toujours prise comme quelque chose,
00:41:05 on le dit, mais personne ne s'en préoccupe vraiment.
00:41:08 Et je peux vous assurer que dans une situation,
00:41:09 on le sait tous, dans une situation de stress,
00:41:12 si vous n'êtes pas entraîné, c'est pire.
00:41:14 Donc, évidemment que la formation est extrêmement importante
00:41:16 pour réussir à garder son calme
00:41:18 et sa capacité de discernement dans ces situations-là.
00:41:23 Et par ailleurs, je note que l'extrême gauche,
00:41:25 qui en permanence fait la guerre à tous les moyens intermédiaires
00:41:29 dont la police dispose pour intervenir,
00:41:31 c'est-à-dire qu'à chaque fois qu'il y a un problème,
00:41:33 on dit "on va interdire ça, on va interdire ça, on va interdire ça",
00:41:36 à la fin, quand vous avez des policiers qui n'ont plus que
00:41:38 soit leurs points, soit leurs armes létales,
00:41:41 ils ne sont plus entraînés à se servir d'armes intermédiaires
00:41:44 qui sont absolument nécessaires pour maintenir l'ordre,
00:41:47 sans faire prendre trop de risques aux manifestants.
00:41:50 Donc tout ça a été dans une confusion générale
00:41:52 et on finit par tous communier un discours anti-flic de base
00:41:57 qui ne considère pas que nous avons besoin, évidemment,
00:42:00 de rétablir l'ordre dans certaines situations,
00:42:03 ce qui paraît quand même pourtant le B.A.B.
00:42:05 - Avant de rejoindre un autre de nos correspondants sur place,
00:42:10 encore une question, Charlotte, puisque chaque fois que ressurgit
00:42:14 justement cette colère qui s'exprime dans la rue,
00:42:16 le débat se porte sur les interventions des forces de l'ordre,
00:42:20 même le rapporteur, je le disais en titre,
00:42:22 le rapporteur spécial des Nations Unies
00:42:24 sur le droit de réunion pacifique et d'association s'inquiète.
00:42:28 Est-ce que là, ce n'est pas un véritable problème pour les policiers ?
00:42:32 - Alors, le rapporteur des Nations Unies,
00:42:33 bon la première chose quand on lui dit ça, on a envie de lui dire
00:42:36 "mêlez-vous de vos affaires".
00:42:39 Non, non, mais la question c'est, d'abord il faut regarder,
00:42:42 il nous dit "je suis de très près les manifestations
00:42:44 et les agissements des forces de l'ordre".
00:42:45 Et puis quand vous rentrez dans le détail, il vous dit
00:42:47 "je vous rappelle que les manifestations pacifiques
00:42:49 sont un droit fondamental", ce que personne n'a contesté,
00:42:52 les manifestations pacifiques, en l'occurrence,
00:42:53 n'ont eu aucun problème et je note par ailleurs
00:42:56 que les policiers, les manifestants se félicitent
00:42:59 que les pompiers rejoignent, je note que tous les syndicats
00:43:01 de policiers depuis le début sont hostiles à cette réforme.
00:43:03 Donc les policiers, comme citoyens français,
00:43:06 ont déjà rejoint ce mouvement par ailleurs.
00:43:08 Mais il y a une différence évidemment entre la fonction
00:43:11 et le citoyen, c'est vrai de un millier de métiers
00:43:14 et c'est vrai aussi pour les forces de l'ordre, évidemment.
00:43:17 Donc il nous dit que c'est un droit fondamental
00:43:19 et il dit par ailleurs que les autorités doivent
00:43:22 ouvrir des négociations avec les manifestants
00:43:24 pour éviter toute détérioration.
00:43:26 Mais là encore une fois, il s'adresse donc aux autorités
00:43:29 qui sont en l'occurrence politiques, les policiers eux
00:43:33 répondent à des ordres et maintiennent l'ordre
00:43:36 précisément dans la rue, c'est leur métier.
00:43:37 Et je note qu'ouvrir des négociations avec des manifestants,
00:43:40 c'est ce que précisément Emmanuel Macron a refusé de faire
00:43:42 ces derniers jours, et ouvrir des négociations
00:43:45 avec des manifestants pour éviter toute détérioration.
00:43:48 Donc on ouvre des négociations avec les manifestants,
00:43:50 à partir du moment où ils détériorent,
00:43:51 on ouvre moins de négociations en général,
00:43:53 on envoie en effet les forces de l'ordre.
00:43:55 Mais en deux mots, pour moi, le problème,
00:43:58 on parle beaucoup de la stratégie du pourrissement,
00:44:00 c'est-à-dire de la non-réponse politique à une colère sourde
00:44:04 et qui draine, Mathieu nous a cité,
00:44:06 un nombre de gens incalculable qui depuis des décennies
00:44:09 analysent ce sujet, il est irresponsable et injuste
00:44:13 de finir par traiter un problème politique
00:44:15 comme un problème de maintien de l'ordre.
00:44:17 C'est irresponsable vis-à-vis de la population
00:44:19 et vis-à-vis de l'avenir du pays,
00:44:20 et c'est injuste vis-à-vis des forces de l'ordre
00:44:22 qui finissent par être honnêtement de la chair à canon
00:44:25 de la démission des hommes politiques
00:44:27 qui sont premièrement responsables de la situation.
00:44:29 Et franchement, ça fait peur en fait,
00:44:31 parce que par ailleurs, ils sont en effet,
00:44:33 ce que nous disait Eliott, absolument épuisés,
00:44:35 et quand vous avez des forces de l'ordre qui sont épuisées
00:44:38 et qui en plus sont plutôt d'accord avec le mouvement
00:44:40 qu'avec les autorités, c'est dangereux en fait.
00:44:43 On fera un point particulier justement avec Marc Menard
00:44:46 dans un instant sur ce point de bascule
00:44:48 lorsque les pompiers rejoignent les manifestants
00:44:50 et lorsque les policiers rejoignent les manifestants.
00:44:53 Rappelons que nous avons plus d'un million de manifestants
00:44:57 en France selon la police, 3,5 millions selon la CGT.
00:45:01 Manifestations, records apparaissent avec 120 000 personnes.
00:45:04 Vous voyez ici les images en direct.
00:45:06 Nous allons rejoindre Jeanne Plancard.
00:45:08 Vous êtes sur place Jeanne Plancard.
00:45:09 Nous passons maintenant, on dirait,
00:45:11 dans la deuxième partie de cette mobilisation
00:45:14 où tout commence à être de plus en plus tendu.
00:45:16 - Oui, Christine, une deuxième partie de soirée
00:45:20 qui vient bientôt commencer.
00:45:22 Là, on se trouve sur l'avenue perpendiculaire
00:45:24 à la place de l'Opéra
00:45:26 où encore des centaines de manifestants sont présents.
00:45:28 Ici, quelques poubelles sont encore en feu
00:45:30 avec l'intervention des pompiers.
00:45:32 À l'instant, il faut dire que l'évacuation, depuis tout à l'heure,
00:45:34 elle est un petit peu compliquée.
00:45:36 Pourquoi ? Eh bien parce qu'il y a seulement une rue,
00:45:38 la rue Aubert, qui est ouverte
00:45:40 pour que les manifestants puissent partir.
00:45:42 Certains souhaitent tout simplement quitter ce cortège,
00:45:45 rentrer chez eux et puis d'autres veulent partir
00:45:47 pour créer de nouveaux cortèges.
00:45:49 Vous savez, les cortèges dits sauvages
00:45:51 pour des manifestations improvisées,
00:45:52 un petit peu partout dans différents points de la capitale,
00:45:55 comme on a pu voir un petit peu cette semaine.
00:45:57 Ceux qui restent ici, les manifestants qui restent ici,
00:46:00 pour l'instant, il y a ceux qui manifestent pacifiquement,
00:46:04 qui ont applaudi tout à l'heure les pompiers.
00:46:06 Vous l'avez vécu en direct sur notre antenne.
00:46:08 Et puis, il y a encore des éléments perturbateurs
00:46:10 qui sont présents ici.
00:46:11 Un autre kiosque à journaux a tout à l'heure
00:46:14 commencé une nouvelle fois à être incendié.
00:46:17 Il faut dire que quelques minutes avant,
00:46:18 c'était un qui était un petit peu plus haut,
00:46:20 qui a été en partie détruit.
00:46:23 Ce qui est compliqué toujours pour les sapeurs-pompiers,
00:46:25 c'est d'intervenir assez rapidement là.
00:46:27 C'est à ce moment-là que les forces de l'ordre
00:46:28 doivent se mettre en place pour leur permettre
00:46:30 de faire leur travail.
00:46:32 Mais c'est aussi à ce moment-là, à cet instant-là,
00:46:34 que des éléments perturbateurs viennent pour en profiter,
00:46:37 pour envoyer des projectiles contre les forces de l'ordre.
00:46:41 Une place de l'opéra et des avenues perpendiculaires
00:46:44 qui commencent au fur et à mesure à se vider.
00:46:46 Tout à l'heure, il y avait évidemment beaucoup de monde.
00:46:48 La place était noire de monde.
00:46:49 Là, on peut dire que c'est un petit peu plus clairsemé,
00:46:52 alors qu'on entend certains manifestants
00:46:54 appeler à des rassemblements improvisés
00:46:56 dans d'autres points de la capitale.
00:46:58 Rassemblements improvisés dans d'autres points de la capitale.
00:47:01 Saint-Augustin, place de la Concorde ou encore Châtelet.
00:47:04 Merci Jeanne Cancart qui est sur le terrain.
00:47:07 Revenez nous et appelez-nous s'il y a d'autres informations
00:47:12 sur le terrain.
00:47:14 Alors, rappelons qu'on se pose la question ce soir.
00:47:16 Est-ce que nous sommes à un tournant ?
00:47:18 Puisque pour la première fois, des jeunes ont largement
00:47:22 participé à la mobilisation.
00:47:23 Pour la première fois, on a vu des casseurs,
00:47:26 milliers et demi de casseurs dès cet après-midi.
00:47:28 Pour la première fois, des pompiers manifestent
00:47:31 au sein de la mobilisation.
00:47:34 Ça, c'est une première.
00:47:35 Ils ont été applaudis cet après-midi, ce soir,
00:47:38 par les manifestants.
00:47:40 Et là, c'est une question qu'on va se poser avec vous,
00:47:42 Marc Menand, dans l'histoire.
00:47:44 Ces moments de bascule où il y a eu fraternisation
00:47:48 entre les forces de l'ordre et les contestataires.
00:47:51 On a d'abord les forces de police
00:47:54 qui sont les forces de police du roi,
00:47:58 les forces de l'ordre.
00:47:59 Et ça, c'est relativement récent.
00:48:01 C'est sous Louis XV en 1776 qu'on a les gardes françaises
00:48:06 qui sont créées.
00:48:08 Et alors, en 1789, lors de la prise de la Bastille,
00:48:13 ces gens sont appelés à venir là où les échaux fourrés
00:48:17 sont en train de se dérouler.
00:48:20 Et que font-ils ?
00:48:21 Eh bien, au moment où on essaie d'entrer dans la Bastille,
00:48:26 que Delaunay tente de négocier avec les assaillants,
00:48:30 on voit ces troupes qui fraternisent
00:48:35 et offrent même leurs canons.
00:48:36 C'est la première fois de l'histoire,
00:48:39 et c'est là que l'on comprend,
00:48:40 que l'on passe effectivement de l'instant du grondement...
00:48:44 - Alors, je vous interroge juste un instant.
00:48:47 Nous avons l'intersyndical qu'on va rejoindre en direct
00:48:49 pour connaître la suite.
00:48:51 - La responsabilité de la situation explosive
00:48:55 n'incombe donc pas aux organisations syndicales,
00:48:58 mais bien au gouvernement.
00:49:00 Alors que l'exécutif cherche à tourner la page,
00:49:04 ce mouvement social et syndical pérenne et responsable
00:49:08 confirme la détermination du monde du travail et de la jeunesse
00:49:12 à obtenir le retrait de cette réforme.
00:49:15 A l'issue d'un parcours parlementaire chaotique
00:49:18 au cours duquel le gouvernement a utilisé
00:49:20 tous les outils constitutionnels à sa disposition
00:49:23 permettant de limiter l'exercice démocratique,
00:49:26 le texte de loi est à présent soumis au Conseil constitutionnel.
00:49:31 Dans ce cadre, l'intersyndical lui adressera prochainement
00:49:35 des contributions explicitant les raisons
00:49:38 pour lesquelles cette loi doit être entièrement censurée.
00:49:42 Face à l'absence de réponse de l'exécutif,
00:49:45 président de la République en tête,
00:49:48 les organisations syndicales et de jeunesse
00:49:51 ont demandé publiquement une consultation citoyenne.
00:49:54 Les parlementaires se sont saisis de l'outil constitutionnel
00:49:57 à leur disposition et ont transmis un projet de référendum
00:50:01 initiative partagée au Conseil constitutionnel.
00:50:05 Les organisations syndicales et de jeunesse
00:50:08 sont prêtes à y prendre toute leur part
00:50:11 au limite de leur représentation du monde du travail et de la jeunesse.
00:50:15 Le puissant rejet social de ce projet est légitime
00:50:18 et son expression doit se poursuivre.
00:50:21 Revendiquant le retrait de la réforme des retraites,
00:50:24 l'intersyndical appelle les millions de travailleurs
00:50:27 et travailleuses jeunes et retraités à continuer de se mobiliser.
00:50:31 Elle appelle à des rassemblements syndicaux de proximité ce week-end
00:50:35 et à une nouvelle grande journée de grèves et de manifestations
00:50:39 mardi 28 mars partout dans le pays.
00:50:42 L'intersyndical se réunira mardi 28 mars au soir.
00:50:47 Je vous remercie.
00:50:50 Et nous sommes à la disposition...
00:50:53 Vous avez pu entendre en direct sur CNews
00:50:56 Marie-Lise Léon, secrétaire générale adjointe de la CFDT
00:51:02 pour parler pour l'intersyndical, manifestation ce week-end
00:51:06 et dans toute la France mardi, comme on pouvait s'y attendre.
00:51:11 Dans un instant, on va pouvoir conclure avec vous
00:51:14 pour savoir est-ce que nous ne sommes pas dans l'union sacrée des détestations
00:51:18 puisqu'on voit et on vient de l'apprendre que la manifestation
00:51:21 et la mobilisation est loin de s'arrêter.
00:51:24 On était en train de parler de ce point de bascule
00:51:26 qui peut faire tout basculer, même aujourd'hui en France, Marc Menon.
00:51:29 C'est lorsque les forces de l'ordre,
00:51:31 on l'a vu que ça s'est passé avec les pompiers,
00:51:33 mais lorsque les forces de l'ordre rejoignent les contestataires.
00:51:35 Alors ces forces de l'ordre, elles étaient du côté du roi
00:51:39 et les révolutionnaires, après cette fraternisation, comprennent une chose.
00:51:44 C'est que les forces sont là pour défendre le pouvoir
00:51:48 et il y a quelque chose qui ne va pas.
00:51:50 Car ce sont donc des forces partisanes, on ne tient pas compte du peuple.
00:51:54 Or la révolution, c'est permettre au peuple d'être pris en considération.
00:51:59 Il faut donc une force qui ne soit pas là au service du pouvoir
00:52:04 mais qui soit au service de la loi.
00:52:06 Ça donne une grande nuance et c'est de là que l'on crée la garde nationale.
00:52:11 La garde nationale, ce sont les gens du peuple,
00:52:15 les commerçants, les artisans, les ouvriers,
00:52:20 tous ceux qui payent des impôts.
00:52:22 Et là, il n'est pas question de les placer dans des casernes,
00:52:25 ils auront un uniforme et on les mobilisera quand on le souhaitera.
00:52:30 En 1830, le mois de juillet, la fin de juillet,
00:52:35 avec le soleil qui est là, qui tisonne,
00:52:38 et au départ, toujours, je dirais, un élément
00:52:43 qui ne peut pas laisser présager que voilà, on va tomber dans la révolte.
00:52:47 Charles X est là tranquille, il prend une mesure liberticide contre la presse
00:52:52 et les gens se révoltent.
00:52:55 Et que fait-on à ce moment-là ?
00:52:57 On envoie effectivement la troupe pour réprimer.
00:53:01 Et que se passe-t-il ?
00:53:02 Cette troupe, elle est victime de cet ensoleillement,
00:53:05 elle n'a rien à boire, elle n'a rien à manger
00:53:08 et on fraternise en offrant à ces pauvres bougres,
00:53:12 ne pas oublier, ça c'est essentiel,
00:53:14 vous l'avez tous les trois évoqué tout à l'heure,
00:53:16 c'est-à-dire que ces forces de l'ordre, ces forces de police,
00:53:19 ce sont des membres du peuple,
00:53:22 ils sont donc de ceux qui contestent,
00:53:24 ils ont leur famille qui est là
00:53:27 et à un moment, ils comprennent qu'ils sont en quelque sorte
00:53:31 détenteurs d'une fraternisation nécessaire.
00:53:36 Et c'est ce qui se passe et le pouvoir tombera.
00:53:40 On retrouvera le même phénomène en 1848.
00:53:44 Et en 1848, Thiers qui veut faire intervenir les militaires,
00:53:50 Bugeaud qui dit "je tuerai même les femmes, les enfants",
00:53:54 l'ordre sera rétabli et simplement le roi Louis-Philippe
00:53:58 a la sagesse de dire "il n'est pas question d'aller là,
00:54:03 il préfère démissionner".
00:54:04 Le dernier point, c'est 1907.
00:54:07 1907, les viticulteurs, à Montpellier,
00:54:11 et face à eux, le 17ème régiment.
00:54:14 Et ce 17ème régiment, il est tenu par qui ?
00:54:16 Et bien par des gars du peuple, de la région
00:54:19 et eux, ils se disent "il n'est pas question de tirer sur nos frères,
00:54:24 il n'est pas question de tirer sur nos frères et nos pères"
00:54:27 et ils iront à Béziers à pied où ils sont accueillis,
00:54:31 où on leur offre les verres de vin, la nourriture, c'est la fraternisation.
00:54:36 Merci pour ce regard sur la fraternisation,
00:54:39 parce qu'on a eu peur au moment, par exemple, des Gilets jaunes,
00:54:41 qu'il y ait cette fraternisation et ça a failli faire tout basculer.
00:54:45 On le constate, Mathieu Bogdoté, la colère autour de cette réforme des retraites
00:54:50 qui agrège beaucoup d'autres colères.
00:54:53 Je rappelle encore que là, première fois des jeunes,
00:54:55 pour la première fois des pompiers, des pompiers applaudis,
00:54:57 pour la première fois aussi des casseurs,
00:54:59 on sent qu'on est passé à autre chose.
00:55:01 C'est probablement parce qu'une partie des élites
00:55:03 peine à comprendre que la France s'embrase.
00:55:06 Est-ce qu'on peut parler justement, dans les circonstances actuelles,
00:55:10 de l'union sacrée des détestations ?
00:55:13 C'est une excellente formule, je crois.
00:55:15 Lorsque je reviens sur cette idée, l'union sacrée des détestations,
00:55:19 il y a plusieurs critiques, plusieurs sources en ce moment
00:55:23 du malaise social français.
00:55:25 Il n'y a pas de doute là-dessus, malaise social, malaise politique.
00:55:28 Mais on pourrait dire que même s'ils n'ont pas toutes la même source,
00:55:31 l'ensemble de ce malaise converge vers un point central
00:55:34 qui me semble déterminant en ce moment,
00:55:36 c'est la critique d'un pouvoir jugé déconnecté.
00:55:39 C'est la critique d'un pouvoir jugé étranger désormais à son propre peuple.
00:55:43 C'est la critique d'un pouvoir jugé dans une situation
00:55:47 où il se barricade dans les institutions de la République
00:55:50 et où il traite désormais le peuple de plus en plus largement
00:55:53 sur le mode factieux.
00:55:55 Alors là, vous avez Jean-Luc Mélenchon d'un côté,
00:55:58 mais Marine Le Pen de l'autre.
00:56:00 Et vous avez aussi Aurélien Pradié.
00:56:03 Les figures sont nombreuses, qui ne communient pas
00:56:06 nécessairement la même religion politique dans chaque cas,
00:56:08 mais qui chacun, sur le plan politique, j'entends,
00:56:10 seulement sur le plan politique, disent qu'on est en désaccord
00:56:12 avec ce que ce pouvoir devient.
00:56:14 Peu importe ce que ce pouvoir fait, il n'est plus connecté
00:56:17 aux affects et aux racines profondes du consentement populaire.
00:56:20 Donc finalement, un pouvoir, c'est fascinant,
00:56:23 vous le voyez hier avec Emmanuel Macron, ça m'a frappé.
00:56:25 On est parti de « je vous ai compris », la phrase,
00:56:28 « vous ne m'avez pas compris ».
00:56:30 Lorsque le pouvoir se plaint de ne pas être compris par son propre peuple,
00:56:33 il y a une rupture symbolique qui s'opère.
00:56:35 Ensuite, il y a quelque chose qui m'a frappé beaucoup
00:56:38 ces derniers temps aussi, c'est que les partisans potentiels
00:56:41 de cette réforme, et il y en avait, il ne faut pas l'oublier,
00:56:44 se sont progressivement désolidarisés du pouvoir.
00:56:47 On est peut-être d'accord avec cette réforme sur le plan technique,
00:56:50 mais ce qu'elle devient dans le contexte présent,
00:56:53 dans le contexte social, dans le contexte politique,
00:56:55 cette réforme devient un bâton de dynamite lancé au cœur
00:56:58 de la Maison-France.
00:57:00 Donc, quand on est devant cette situation, plusieurs disent
00:57:02 que cette réforme, qu'elle soit nécessaire ou non techniquement,
00:57:05 ne justifie pas aujourd'hui l'embrasement du pays tel qu'on le voit.
00:57:10 Mais là, les malaises, vous avez dit l'union profonde des détestations,
00:57:12 les malaises sont nombreux en France.
00:57:14 Malaises démocratiques, le rapport au pouvoir,
00:57:16 malaises identitaires, le fait que le peuple historique français
00:57:18 devienne étranger chez lui, malaises sociales,
00:57:21 cette impression très réelle que la mondialisation a percuté
00:57:24 particulièrement violemment la France.
00:57:26 De quelle manière? En décomposant son modèle social.
00:57:30 Alors, à travers tout ça, le point de rupture, on pourrait le dire,
00:57:34 c'est que l'antimacronisme devient le point fédérateur
00:57:38 de toutes ces oppositions.
00:57:40 Donc, l'antimacronisme, ce n'est pas positif en tant que tel,
00:57:43 ce n'est pas un contenu, mais ça devient le symbole
00:57:45 de ce refus du pouvoir traité comme un corps étranger.
00:57:48 - Mais nous basculons alors vers une question
00:57:51 qui revient toujours, Mathieu Bocoté.
00:57:53 Pourquoi l'opposition ne parvient-elle pas
00:57:55 à créer une majorité alternative?
00:57:57 - Parce que pour l'instant, l'opposition a été traitée
00:57:59 sur le mode de la diabolisation.
00:58:01 Un jour, on va comprendre que quand on diabolise
00:58:04 une partie importante de son propre peuple,
00:58:06 ça finit par nous revenir au visage.
00:58:09 Et là, qu'est-ce qu'on voit, et ça me semble absolument central
00:58:12 dans le récit présent des événements, vous savez comment
00:58:14 la démocratie fonctionne?
00:58:16 Quand vous avez 2 options ou 3 options,
00:58:18 vous avez des options légitimes, et lorsque vous votez,
00:58:20 vous votez pour un avenir possible ou un autre avenir possible
00:58:22 ou un autre avenir possible.
00:58:24 Quand l'alternative n'existe plus,
00:58:26 quand vous n'avez plus la possibilité de voter
00:58:28 pour une autre option, une autre option jugée légitime,
00:58:31 bien, qu'est-ce qui se passe? Il n'y a plus que 2 options.
00:58:34 Le pouvoir ou le peuple.
00:58:36 Et là, quand vous avez cette tension-là,
00:58:38 quand la tension n'est plus entre projets différents,
00:58:40 mais entre d'un côté le sommet et de l'autre côté la base,
00:58:43 la France d'en haut, la France d'en bas,
00:58:45 entre le chef et le commun, entre le pouvoir et la plèbe,
00:58:49 bien, si c'est la seule opposition que vous avez,
00:58:51 vous courez ardemment, avec enthousiasme, vers la révolte.
00:58:55 C'est ça, le prix à payer, ce que j'appelle souvent
00:58:57 la légitimité négative.
00:58:59 Quand vous décidez de ne plus avoir le choix
00:59:01 entre 2 grandes options, vous avez finalement le choix
00:59:03 entre le pouvoir et le peuple, entre l'ordre et l'insurrection.
00:59:06 Ça se termine rarement bien, tout ça.
00:59:08 - Merci beaucoup pour votre regard à tous.
00:59:10 Peut-être un dernier mot, juste.
00:59:12 Qu'est-ce que vous pensez qu'il peut se passer maintenant,
00:59:14 Guillaume Bidon, en un mot, autour de Tabrapin?
00:59:18 - Je pense que ça va.
00:59:20 Le mouvement va probablement s'amplifier.
00:59:22 La seule chose qui peut faire basculer
00:59:24 l'un sous dans l'autre, ce serait des phénomènes de pillage,
00:59:29 des phénomènes de...
00:59:31 Qu'il y ait ce surgissement de l'illégalité,
00:59:37 là, ça viendrait, à mon avis, d'illégitimer le mouvement.
00:59:41 Et à mon avis, c'est ce que cherche Emmanuel Macron,
00:59:44 pour en prendre la main.
00:59:46 - Oui, en effet, c'est toujours la même question.
00:59:48 Est-ce que les manifestations vont se poursuivre
00:59:50 avec une ampleur pareille?
00:59:52 Est-ce qu'il y a une nouvelle mobilisation syndicale
00:59:54 qui tient malgré tout et malgré la loi, etc.?
00:59:58 Ou alors, est-ce que les casseurs vont l'emporter
01:00:01 et finir par détourner l'opinion publique
01:00:03 du soutien massif et durable à ce mouvement?
01:00:08 C'est évidemment la grande interrogation.
01:00:10 - Moi, je dirais qu'il faudrait que les manifestants
01:00:12 viennent demain avec des thermoses de café,
01:00:14 des petites brioches, car les policiers sont usés,
01:00:17 les policiers n'en peuvent plus,
01:00:19 les policiers appartiennent au peuple,
01:00:21 ils sont prêts à attendre sans doute
01:00:23 une sorte de main tendue, ils finiraient par se rallier.
01:00:26 Donc, demain, c'est pas avec des barramines
01:00:28 qu'il faut y aller, les gars.
01:00:30 Il faut y aller simplement, si vous voulez remporter la victoire.
01:00:32 Je ne suis pas le meneur, je ne suis rien que menant.
01:00:35 Mais je pense que c'est avec des thermoses de café
01:00:38 que les choses peuvent basculer.
01:00:40 - Ah, là, le mouvement a basculé
01:00:41 avec la recommandation de Marc-Étienne.
01:00:43 - Un dernier mot là-dessus.
01:00:44 Je pense que dans les circonstances,
01:00:45 le meilleur allié potentiel du pouvoir,
01:00:47 c'est l'extrême gauche des casseurs, et ainsi de suite.
01:00:49 - C'est-à-dire là, on est dans cette espèce de dialectique toxique
01:00:52 où le pouvoir mise sur...
01:00:54 Je sais pas si c'est sa stratégie,
01:00:55 mais c'est une partie de l'inconscient.
01:00:57 C'est-à-dire, plus il y aura de black blocs,
01:00:58 plus il y aura de casseurs, plus il y aura de...
01:01:00 - Mais c'est intéressant ce que vous dites, Mathieu,
01:01:01 parce que là, c'est tout à fait nouveau.
01:01:03 C'est-à-dire que, encore une fois,
01:01:04 c'est inédit aussi depuis le début du mouvement,
01:01:06 en partant d'aujourd'hui,
01:01:08 avec cette arrivée des casseurs, 1,5 million...
01:01:10 - De là l'importance des syndicats.
01:01:11 - 1 500 casseurs.
01:01:12 - 1 500 casseurs, c'est-à-dire que, dans l'intermédiaire,
01:01:14 dans une société, ça sert à encadrer la mobilisation sociale,
01:01:16 ça sert à encadrer la vie.
01:01:17 Sinon, vous avez justement l'expression sauvage
01:01:19 de la colère populaire.
01:01:20 Et de là l'importance majeure pour les syndicats
01:01:22 de tenir leur troupe.
01:01:23 C'est ce que disait Laurent Berger aujourd'hui, j'y reviens.
01:01:26 Laurent Berger qui s'est imposé comme le leader inattendu
01:01:28 dans cette crise.
01:01:29 Mais de là la nécessité de calmer toute forme de violence,
01:01:32 d'empêcher toute forme de violence.
01:01:33 Et dès lors, dès lors, une suite peut s'écrire.
01:01:36 Sinon, ça dégénère pour tout le monde, j'insiste là-dessus,
01:01:38 pour ou contre la réforme.
01:01:39 Et quand ça dégénère pour tout le monde, là-dessus,
01:01:41 la suite est désagréable et imprévisible.
01:01:44 - Merci pour votre regard.
01:01:45 Alors, on va résumer peut-être un peu ce qui s'est passé aujourd'hui.
01:01:49 3 points, 3 ou 4 points, peut-être 5 points à retenir aujourd'hui.
01:01:53 Déjà, malgré l'adoption de la réforme,
01:01:57 très grande mobilisation.
01:01:59 1 million selon la police en France, voire 3,5 millions
01:02:03 selon la CGT de manifestants.
01:02:06 Une mobilisation qui se poursuit,
01:02:08 puisque notre manifestation aura lieu mardi 28 mars,
01:02:12 décision de l'intersyndical ce soir.
01:02:15 Autre point, nous sommes à un tournant,
01:02:18 puisqu'on a vu ce soir, sous vos yeux, et cet après-midi,
01:02:22 à la fois les pompiers rejoindre le mouvement,
01:02:24 à la fois les pompiers être applaudis par les manifestants,
01:02:27 à la fois des jeunes manifestants en large,
01:02:30 largement aujourd'hui,
01:02:32 alors qu'ils n'étaient pas particulièrement présents sur le terrain.
01:02:35 On va aller, pour terminer, pour faire la passation du plateau,
01:02:38 avec Pascal Praud.
01:02:40 Oui, alors, Marc Benon me rappelle que,
01:02:43 comme c'est la fin de la semaine,
01:02:45 dimanche 11h, les Grands Destins sur CNews.
01:02:48 - Bonaparte. - Le Grand Destin de Bonaparte.
01:02:51 Alors, pour continuer, restons connectés sur ce qui se passe.
01:02:55 Vous voyez les images en direct.
01:02:57 Augustin Donadieu, vous êtes sur place.
01:02:59 Je disais tout à l'heure qu'il y a la manifestation de l'après-midi,
01:03:02 et puis maintenant, on entre dans une autre phase,
01:03:05 où non seulement les forces de l'ordre sont épuisées,
01:03:08 mais où les manifestants sont devenus plus redoutés.
01:03:11 Oui, tout à fait, mais ce qui se passe actuellement ici,
01:03:16 place de l'Opéra en plein cœur de la capitale,
01:03:19 c'était le point de chute de cette 9e journée de mobilisation.
01:03:22 C'est que les très nombreux éléments radicaux
01:03:25 qui étaient rassemblés ici depuis maintenant plus de 2 ou 3 heures,
01:03:28 et qui continuaient leur face à face avec les policiers
01:03:31 et gendarmes présents, ces éléments radicaux
01:03:34 ont rebroussé chemin et ont tenté de retrouver
01:03:37 le cortège qui, lui, est toujours sur son parcours.
01:03:41 Alors, c'est un petit peu la confusion.
01:03:43 On se demande même où sont passées toutes ces personnes.
01:03:46 À 19h30, 33 interpellations ont eu lieu.
01:03:49 Et alors que je suis en train de vous dire ça,
01:03:51 ces forces de l'ordre qui sont en train de resserrer le dispositif,
01:03:54 ici, place de l'Opéra, peut-être vont-ils agir
01:03:57 comme ils avaient déjà agi lors des précédentes mobilisations
01:04:00 sauvages, place de la Concorde, souvenez-vous,
01:04:03 leur stratégie était la suivante, c'est qu'ils resserraient
01:04:06 tous ces éléments radicaux, tous ces manifestants dans un coin,
01:04:09 et allaient piocher ensuite, un par un, celles et ceux
01:04:12 qui avaient été repérés les minutes précédentes.
01:04:15 C'est ce qui semble être, en tous les cas, en cours, ici,
01:04:18 place de l'Opéra, toutes ces forces de l'ordre
01:04:21 qui se déploient, 5 000, ils étaient 5 000 aujourd'hui
01:04:24 à Paris pour assurer l'ordre, et ils n'étaient pas trop nombreux,
01:04:27 puisqu'ils ont été la cible de très nombreuses exactions
01:04:30 avec des jets de projectiles divers, que ce soit
01:04:33 des pavés, des bouteilles, des excréments, même,
01:04:36 carrément, des excréments qui ont répandu une odeur,
01:04:39 des odeurs absolument nauséabondes dans les rues de la capitale,
01:04:42 et pire que ça, ils ont reçu également des cocktails Molotov
01:04:45 qui les ont obligés à se rétracter dans les rues adjacentes
01:04:48 tout à l'heure, ce qui a permis, évidemment,
01:04:51 aux éléments radicaux de s'attaquer à différentes vitrines,
01:04:54 différents fast-food américains.

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