Mon voyage en Islande a tourné à la catastrophe

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Arnaud a gardé un souvenir indélébile de l’Islande. Passionné de nature, il entame un trek près d’une rivière et tombe par accident dans une source d’eau chaude d’une température de 120 degrés ! Il ne reste que quelques secondes dans cette eau bouillante mais ses jambes sont totalement brûlées. Autour de lui, personne ne peut l’aider et il peut à peine marcher. Dans cette interview, Arnaud nous raconte comment il a supporté la douleur et comment son instinct de survie lui a permis d’arriver jusqu’aux urgences, avant d’être rapatrié en France.  Retrouvez Arnaud sur instagram : https://www.instagram.com/nohotravels/  Suivez O-Rigines le nouveau média qui s’intéresse à l’histoire des histoires. Podcast : bit.ly/Origines_podcast Youtube : https://www.youtube.com/@originesmedia Instagram : https://www.instagram.com/origines.media Twitter : https://twitter.com/Originesmedia TikTok : https://www.tiktok.com/@originesmedia

Transcript

00:00 J'étais au bord de la rivière, je me rapprochais pour me baigner

00:03 et là je suis tombé dans le trou de boue qui était à 120°C

00:07 et je suis resté 10 secondes, je me suis brûlé les jambes au second degré

00:11 juste assez de temps pour me faire fondre la peau comme on peut faire cuire le poulet au four.

00:18 A la fin de mon voyage, je me suis dit que j'allais faire une petite journée détente

00:22 près d'une rivière qui était avec des sources d'eau chaude

00:25 et ce jour là, j'ai fait 2 heures de trek pour rejoindre cette rivière

00:32 et je suis arrivé au point où il y a des spots de sources d'eau chaude

00:39 où la température est entre 38°C et 40°C pour se baigner.

00:43 Je me suis installé tranquillement, je me suis mis en maillot pour aller me baigner

00:48 et en allant près de la rivière, je suis tombé dans un trou de boue

00:53 qui est la source de chaleur de la rivière dont la température est à 120°C

00:59 et je suis tombé dans ce trou pendant 10 secondes, mais 10 secondes

01:03 qui en suffit pour me brûler les jambes au second degré.

01:06 Les médecins m'ont dit que j'étais à la limite de la brûlure au troisième degré

01:11 et c'est là où tu perds la sensibilité au niveau de la peau

01:14 et c'est ce qui est le pire parce que je sentais toute la douleur au niveau des jambes.

01:21 Il paraît que c'est plus douloureux que de se faire tirer par une balle.

01:24 En fait, la rivière était totalement sauvage, ce n'était pas du tout une zone touristique

01:29 parce qu'il y a par exemple en Islande, il y a Blue Lagoon qui est très fréquentée par les touristes

01:34 et du coup je n'avais pas spécialement envie d'aller à Blue Lagoon,

01:36 je voulais faire un truc plus sauvage et ce point-là n'était absolument pas signalé par les autorités

01:42 et il n'y avait pas d'endroit pour indiquer les sources d'eau chaude.

01:46 Je n'ai jamais imaginé qu'il pouvait y avoir la source d'eau chaude aussi proche de la rivière.

01:52 Alors ça a duré 10 secondes, mais 10 secondes absolument terribles.

01:55 Pendant ces 10 secondes, je me suis enfoncé jusqu'au niveau du genou

02:00 et après j'ai essayé de me rattraper à de la mousse qui était juste à côté

02:04 et j'ai tiré sur la mousse pour essayer de m'extirper parce qu'en fait je n'avais pas d'appui au niveau des pieds.

02:10 La mousse que je tirais avec les mains m'est restée entre les doigts

02:15 et j'ai essayé de tirer de plus en plus fort pour sortir et en fait pour moi dans ma tête,

02:21 ça a été une éternité.

02:23 J'ai senti le moment où tu as dans ta pupille le truc où tu dis "bon ben c'est terminé, c'était cool"

02:29 et après ça a basculé la microseconde après, je me suis dit "non non non, il faut que je tienne, que je résiste et que je tire"

02:36 et du coup j'ai continué à forcer et du coup ça a duré 10 secondes,

02:40 mais ça a suffit pour me brûler les jambes comme du poulet que tu fais cuire au four avec la peau qui coule

02:49 et donc c'était horrible.

02:51 Quand je suis sorti en fait, j'avais la douleur mais je voyais rien parce que j'avais de la boue qui était sur tous les mollets et les pieds

02:58 et du coup ce que j'ai fait, c'est que je voulais juste me rincer

03:02 donc je suis allé à la rivière qui était à côté où la température était quand même chaude

03:06 ce qui n'était pas l'idéal pour refroidir la blessure.

03:09 Pour essuyer, je regarde mes jambes parce que du coup j'ai encore la sensation du truc,

03:15 pour essuyer la peau, au moment où j'ai voulu nettoyer, j'avais toute la peau qui fondait, qui coulait le long de ma jambe.

03:24 Là la douleur était tellement vive que j'étais un peu perdu, j'ai essayé de voir autour de moi, il y avait deux allemandes,

03:32 je crois ou hollandaise qui étaient juste à côté, et en fait je leur ai montré, je leur ai demandé de l'aide

03:37 et certaines personnes des fois réagissent assez mal, elles ont eu peur, elles ont dit "non non non, débrouille-toi"

03:43 donc du coup je me suis retrouvé à une heure de marche de ma voiture, seul, et en fait je commençais à marcher

03:49 donc j'étais pieds nus à ce moment-là, sur de la pierre, sur une sorte de gravier,

03:54 et en fait tous les petits cailloux s'enfonçaient dans ma peau comme des clous

03:58 et là j'avais deux solutions, soit je marchais pendant une heure avec la sensation d'avoir des clous qui s'enfonçaient dans ma peau,

04:05 soit je mettais mes chaussettes et mes chaussures, quitte à arracher l'ensemble de la peau qui me restait,

04:11 et du coup j'ai choisi de mettre mes chaussettes et mes chaussures, de marcher pendant une heure pour rejoindre ma voiture,

04:18 là j'ai pris ma voiture et j'avais encore une heure de route jusqu'à Rijavik, rejoindre le service des urgences,

04:25 j'arrivais vraiment dans la sensation que je pouvais mourir à tout moment,

04:30 et sur la route j'avais des tablettes de chocolat qui étaient à côté de moi,

04:33 je me suis enfilé deux tablettes de chocolat pour me maintenir un peu sous adrénaline,

04:38 et je suis arrivé au service des urgences, j'étais tellement shooté par l'adrénaline pour tenir,

04:46 je suis arrivé au comptoir, je suis arrivé serein, je leur ai dit "je crois que je me suis un peu brûlé au niveau des jambes"

04:53 et j'étais calme, je me suis assis calmement, et la dame a dit "oui, assieds-vous, on va venir s'occuper de vous"

05:00 du coup je suis resté serein pendant trois heures, j'ai pas bronché,

05:04 au bout de trois heures j'ai commencé à enlever mes chaussures et mes chaussettes,

05:07 j'étais en plein délire du coup, et j'ai mis, j'ai aéré mes pieds,

05:12 et là il y a une infirmière qui est passée à côté, qui a vu l'état de mes jambes,

05:15 et qui m'a transporté directement au service derrière pour nettoyer et mettre de la glace,

05:22 surtout sur les brûlures, parce qu'en fait ça continuait à cuire, mes jambes,

05:25 et du coup elle m'a amené derrière au service d'urgence sur un brancard,

05:31 et elle m'a enlevé, elle devait m'enlever toute la terre qui restait, toutes les herbes,

05:38 tout ce qui restait sous la peau, elle m'a enlevé toute la dernière peau qui me restait avec une pince,

05:43 elle m'a shooté avec de la codéine, plein de médocs à pied en pouvoir,

05:48 et donc du coup ça a duré deux heures et demie pour enlever tout le reste de boue,

05:54 pour enlever tout le reste de peau, après une heure pour faire les bandages,

05:59 et après je suis sorti de l'hôpital, et après je suis allé à la voiture,

06:07 et j'ai dormi sur le parking.

06:09 Alors ce qui est marrant c'est que j'avais acheté une peluche pour mon petit neveu,

06:12 qui était né pendant l'année du tour du monde,

06:15 et du coup je dormais avec la peluche près de moi, comme un petit enfant,

06:19 et en fait j'avais tout simplement peur de me dire que je n'allais pas me réveiller,

06:24 parce que la douleur était tellement forte, la sensation était assez étrange à ce moment là,

06:28 de se dire, j'étais ensuqué par les médicaments,

06:32 et me dire j'espère juste de pouvoir me réveiller le lendemain,

06:36 donc un mélange entre être sur un petit nuage à cause des médicaments,

06:40 et avoir la boule au ventre, quoi que tu me diras,

06:44 mourir sur un petit nuage comme ça serait peut-être le mieux,

06:47 mais j'avais la sensation d'avoir la boule au ventre,

06:51 de ne pas me réveiller, et d'être un peu dans un coton à cause des médicaments.

06:56 Et après ce qui s'est passé, j'étais dans ma voiture,

07:01 j'ai dormi la nuit dans ma voiture,

07:03 et par chance deux jours plus tard j'avais mon avion pour rentrer sur Paris,

07:08 et initialement j'avais prévu de me rendre à la frontière à Saint-Jean-Pied-de-Port

07:13 pour faire le chemin de Compostelle pendant un mois,

07:16 mais le truc qui s'est passé c'est que du coup j'étais brûlé au second degré,

07:20 et j'ai dû rester un mois immobilisé.

07:22 Donc j'ai pris l'avion depuis Réjavik pour me rendre sur Paris,

07:26 là la compagnie aérienne a été très sympa,

07:28 en fait ils m'ont réservé toute la ligne de siège,

07:32 donc j'avais trois sièges rien que pour moi pour m'allonger,

07:36 donc j'étais là avec mes jantes en bandage et des pantoufles,

07:40 parce que c'est les pantoufles qui étaient la seule chose qui m'allait,

07:43 et tout le monde me regardait en disant "qui c'est ce pacha là qui se réserve tous les fauteuils rien que pour lui ?"

07:49 et du coup j'étais allongé comme ça sur les fauteuils.

07:52 J'arrivais donc à Paris, et à Paris je suis resté un mois.

07:57 Alors à la base j'ai fait deux jours chez un ami,

08:01 et au bout de ces deux jours j'ai fait une flibite.

08:06 J'étais chez un ami qui a deux enfants en bas âge,

08:12 et à un moment donné ils étaient en train de faire la sieste,

08:15 et j'ai dit à mon pote "j'arrive plus à poser le pied par terre"

08:18 et il regarde mon pied, c'était vraiment horrible,

08:22 enfin bon, ça tirait vers le violet la couleur,

08:27 totalement gonflé, je ne pouvais plus du tout poser le pied par terre,

08:31 et comme je ne voulais pas déranger les infirmiers quand on était à l'hôpital,

08:36 je ne voulais pas déranger lui avec ses enfants qui les réveillent de la sieste,

08:41 du coup je lui ai dit "non mais ça va t'inquiètes, ça va passer" etc.

08:44 Et il a insisté, il a insisté, il m'a amené, il a pris les enfants,

08:48 il l'a mis dans la voiture, on est allé aux urgences,

08:51 et en fait heureusement, parce que si ça avait traîné,

08:53 en fait la phlébite ça entraîne des cailloux sanguins

08:56 qui peuvent entraîner des accidents cardiovasculaires.

08:59 Donc du coup je suis arrivé à l'hôpital à Paris,

09:03 et du coup j'ai fait ça et j'ai continué ma rééducation sur Paris.

09:08 Alors moi je suis originaire de Marseille,

09:10 donc j'hésitais à rentrer sur Marseille à ce moment là,

09:12 mais dans ma tête j'avais toujours l'envie de faire le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle,

09:18 parce qu'après un an de voyage,

09:20 j'avais pas envie que ce soit un accident qui détermine la date de retour à la maison.

09:26 Et deux semaines après, j'ai pris le train pour aller à Saint-Jean-Pied-de-Port,

09:31 donc à la frontière française-espagnole, pour commencer le chemin de Compostelle.

09:36 Du coup j'ai enchaîné pendant 33 jours le chemin de Compostelle,

09:40 en faisant attention à mes blessures, je l'ai fait avec des bas de contention.

09:45 Et au cours du chemin de Compostelle, j'ai eu ce truc, cette révélation,

09:50 que je voulais écrire un roman,

09:52 et en fait j'ai écrit un roman d'aventure sur l'histoire que j'ai vécue sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle.

09:58 Je pensais pas pouvoir être aussi résistant, mais au final,

10:00 après cette expérience, je dirais que tout le monde a cette capacité là d'être résistant.

10:05 Quand tu es dans une situation où t'as pas d'autre choix, que tu es seul,

10:08 que tu as la sensation de mourir,

10:12 je pense qu'on a tous cette envie de vivre, de revoir nos proches, de rentrer à la maison, etc.,

10:18 qui nous force à tenir.

10:21 Donc je pense que toute personne aurait réussi, de manière différente,

10:25 à réagir de la meilleure des manières pour s'en sortir.

10:30 Donc je pense qu'on a tous ce truc-là en nous, cette force,

10:34 pour nous dépasser à un moment donné où c'est une situation très critique.

10:38 Merci.

10:39 [SILENCE]

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