Anne Fulda reçoit Mokhtar Amoudi pour son livre «Les conditions idéales» dans #HDLivres
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00:00 -Bienvenue à l'heure des livres, Moctar Hammoudi.
00:02 On vous reçoit pour la publication d'un premier roman
00:05 "Les conditions idéales" qui est paru chez Gallimard.
00:08 C'est un roman qui a déjà été remarqué,
00:11 qui est sur les listes du Goncourt, du Renaudot.
00:13 C'est un roman qui est écrit d'une plume alerte,
00:16 à la hauteur d'un enfant ou d'un adolescent qui parle.
00:20 Un livre qui n'est pas dénué d'humour,
00:24 qui est assez cocasse,
00:26 sans message politique à gros traits,
00:28 comme ça aurait pu être le cas.
00:30 Alors, on se demande pourquoi vous l'écrivez,
00:34 vous le publiez maintenant.
00:35 C'est un livre que vous avez en vous depuis longtemps ?
00:38 -Oui, tout à fait. Merci de l'invitation, d'abord.
00:40 Oui, c'est un livre que j'ai en moi depuis longtemps.
00:43 Je voulais écrire l'histoire de Skander, ce personnage,
00:47 donc issu de l'aide sociale à l'enfance
00:49 et qui va se trouver un peu chamboulé
00:52 à sa huitaine d'années, puisqu'il va changer de famille d'accueil
00:57 et devenir celui qu'il n'était pas.
01:00 Et ce livre, je l'ai mûri en moi pendant longtemps,
01:03 puisque je suis moi-même issu de l'aide sociale à l'enfance.
01:06 Après, il y a eu le parcours d'écriture,
01:09 mais je suis content d'avoir pu, justement,
01:11 vous souligner l'écriture rapide,
01:13 raconter le destin de ce Skander à travers plusieurs années.
01:17 -Oui, parce que jusqu'alors,
01:20 vous travailliez à la Caisse des dépôts.
01:22 Donc là, vous êtes en train de vous changer de vie.
01:27 Est-ce qu'il fallait...
01:28 Ce que je voulais savoir, c'est,
01:30 est-ce que vous aviez le besoin, justement, de parler,
01:32 puisque vous-même, vous tracez un parallèle
01:35 entre le héros de votre livre et vous-même ?
01:38 Est-ce que c'était quelque chose de nécessaire ?
01:40 Est-ce que vous le ressentez depuis longtemps ?
01:42 -Oui, absolument. L'envie d'écrire,
01:44 l'envie de publier un roman existait depuis longtemps.
01:48 Et il fallait trouver le bon cadre,
01:51 je veux dire, en parlant du texte,
01:54 les personnages, et donc créer ce monde
01:58 et l'offrir à Skander le personnage.
02:02 Voilà.
02:03 -Alors, Skander, le personnage,
02:05 il a des parents d'origine algérienne,
02:07 il est donc balotté de famille d'accueil en famille d'accueil.
02:13 Est-ce qu'on peut dire qu'il a envie, assez tôt,
02:15 de s'extraire de son milieu ?
02:17 -Il a envie de... Je dirais qu'il ne sait pas qui il est,
02:20 puisqu'il a été abandonné par sa mère, il n'a pas son père.
02:22 Il change de famille d'accueil à ce que je disais au début du livre.
02:27 Et donc, la seule chose qu'il aime, au plus profond de lui-même,
02:32 c'est la lecture, la lecture du dictionnaire Larousse,
02:36 les grandes thématiques aussi, que sont l'histoire,
02:41 ou bien même l'aventure qu'un petit enfant peut se faire,
02:44 un enfant qui lit.
02:45 Et ce qui est intéressant,
02:48 c'est qu'effectivement, très jeune, il pense aller vers un chemin,
02:53 qui est donc celui de la lecture et celui des bonnes notes à l'école.
02:56 Puis, alors là, il va se retrouver totalement
03:00 un autre chemin qui, hélas, n'est pas celui qu'il avait anticipé
03:05 ou même celui qu'on avait anticipé pour lui,
03:07 et quand je dis "celui qu'on",
03:09 le "on" étant l'aide sociale à l'enfance.
03:11 -Oui, alors l'aide sociale à l'enfance,
03:13 c'est visiblement quelque chose...
03:14 Vous ne parlez pas que de ça,
03:17 mais c'est ce qui, d'une certaine façon,
03:19 devrait déterminer son futur.
03:22 Et finalement, il va être en contre de ça.
03:24 -Oui, c'est vrai.
03:26 Il a une dame, Madame Davert, qui est une gentille républicaine,
03:31 qui l'a quasiment pris pour son fils,
03:34 mais son fils, on va dire, institutionnel,
03:36 et qui va s'occuper de lui et, en fait, un peu l'aider,
03:41 sans trop savoir ce qu'il fait,
03:42 mais en ayant détecté un petit peu ce petit potentiel.
03:46 Et oui, il l'a accompagné.
03:47 -Alors, le livre se déroule dans une ville qui est imaginaire,
03:53 qui s'appelle Courcennes,
03:56 qui est dans le Val-de-Marne.
03:58 C'est un décor qui sonne juste, qui a son importance,
04:02 parce que l'environnement, aussi,
04:04 ça peut déterminer le futur d'un gamin.
04:09 -Oui, tout à fait.
04:10 Donc c'est une ville, oui, une ville imaginaire,
04:13 mais qui a l'air bien réelle.
04:15 Et effectivement,
04:17 Skander se retrouve dans cette ville avec son grand quartier,
04:22 des bars immenses, des tours,
04:25 et dans sa jeunesse, puisqu'on parle à ce moment-là
04:28 d'un petit qui a 11, 12 ans, va se retrouver entraîné
04:31 par une sorte de petite musique
04:33 qui va un peu s'insérer dans son esprit.
04:36 Et les chanteurs de cette musique, ce sont ceux qui sont plus grands.
04:40 Et à un moment, il y a une question d'amour dans ce roman,
04:45 c'est-à-dire entre Skander, sa mère, Madame Khadija.
04:48 Et puis à un moment, l'illusion de l'amour va s'estomper,
04:52 et on va voir l'obsession de l'argent
04:54 s'emparer de Skander et du monde qui l'entoure.
04:58 -Il se pose la question, comment cette Madame Khadija,
05:00 qui est censée s'occuper de lui,
05:02 qui lui demande son amour, est-ce réelle,
05:05 sachant qu'elle est rétribuée pour s'occuper de Skander ?
05:09 Bon, alors, on n'a pas le temps d'en dire tellement plus,
05:13 mais juste, vous auriez pu faire référence
05:16 ou adopter un ton un peu misérabiliste,
05:19 et pas du tout le cas,
05:20 vous ne faites pas non plus référence
05:22 au chantre du déterminisme social.
05:25 Votre héros, c'est plutôt...
05:27 On sent que c'est du côté de Balzac.
05:29 -Il y a un petit côté romanesque qui est important, effectivement.
05:32 Et puis sinon, avec des thématiques aussi dures,
05:35 c'est bien de couper pour faire comprendre des choses par l'humour.
05:39 -Vous y parvenez très bien.
05:42 "Les conditions idéales", merci beaucoup, Moctar Hammoudi.
05:45 -Merci. -Votre livre paru chez Gallimard.
05:47 Merci. -Merci.
05:49 ...
05:53 [SILENCE]