SMART BOSS - Emission du mardi 10 octobre

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Mardi 10 octobre 2023, SMART BOSS reçoit Kevin Bourgeois (cofondateur, Supermood) et Bénédicte Tilloy (Fondatrice, 10h32 et Ask for the Moon)

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00:00 Bonjour à tous et bienvenue dans Smart Boss, le rendez-vous des patronnes et des patrons.
00:12 Je suis ravie d'accueillir aujourd'hui Bénédicte Thillois.
00:16 Bonjour.
00:17 Bonjour Charline.
00:18 Tu es donc cofondatrice d'Ask for the Moon, une plateforme de connaissances pour les collaborateurs
00:23 et aussi de 10h32 que tu qualifies d'une agence un peu touriste pour les dirigeants.
00:28 Merci beaucoup d'avoir accepté cette invitation.
00:31 Au sommaire, on a une première séquence qu'on intitule « David contre Goliath »
00:37 dans laquelle tu seras confronté à une start-up et on parlera de sujets que vous avez en commun.
00:41 Très bien.
00:42 On aura une séquence en coulisses dans laquelle on parlera de tes différentes vies de dirigeante
00:49 et aussi de ton quotidien aujourd'hui d'entrepreneuse.
00:52 Et pour terminer, on aura la séquence « Top Chrono », l'interview top chrono où vraiment
00:57 on va faire question-réponse très rapide.
01:00 Ok.
01:01 Donc merci d'avoir encore une fois accepté cette invitation et on passe tout de suite
01:05 à la séquence « David rencontre Goliath ».
01:08 Et donc la start-up qui va te faire face Bénédicte, c'est donc Supermood, une solution qui permet
01:18 aux RH et aux managers de mesurer et d'améliorer l'engagement de leurs collaborateurs et je
01:23 suis ravie d'accueillir son cofondateur et CEO Kevin Bourgeois.
01:27 Bonjour.
01:28 Bonjour.
01:29 Alors peut-être on pourrait se dire tiens, il a intitulé l'émission de la séquence
01:34 plutôt « David contre Goliath », on pourrait se dire que c'est plutôt toi David ou toi
01:39 Goliath, ça dépend de comment tu es habillé.
01:42 Alors tu es qui ?
01:44 Alors donc Kevin, je suis cofondateur de Supermood et je suis David.
01:48 Voilà David.
01:49 Alors en fait je comprends que je suis le Goliath de service mais finalement dans ma
01:54 nouvelle vie, je me sens très David et je vois Kevin comme quelqu'un qui est un pionnier,
02:00 qui a ouvert la route avant moi.
02:02 Donc c'est amusant finalement de se retrouver dans cette situation de changer de métier,
02:09 changer de vie et d'inventer une start-up assez tardivement dans sa carrière mais de
02:14 fait je me sens très David aussi dans ma vie d'aujourd'hui.
02:17 Est-ce que d'ailleurs Supermood a déjà travaillé avec la SNCF qui était l'autre
02:22 ville de Bénédicte ?
02:23 Oui, ça fait trois ans qu'on travaille avec la SNCF sur 70 000 personnes et donc
02:28 on leur permet d'écouter le terrain régulièrement.
02:30 Et alors c'est quoi un petit peu le mood ?
02:32 Alors je n'ai pas le droit de partager les résultats mais en tout cas en termes de culture,
02:36 c'est une culture très très forte, très originale avec des gens hyper engagés dans
02:41 cette culture et des sujets comme partout mais beaucoup d'efforts qui sont faits pour
02:45 améliorer les choses.
02:46 Alors tous les deux vous êtes passionnés un peu de l'engagement collaborateur.
02:51 C'est quoi les Bénédictes un salarié heureux ?
02:56 C'est quelqu'un qui, enfin pour moi un salarié heureux c'est quelqu'un qui comprend ce
03:02 qu'il fait, qui a le temps de le faire et qui bosse dans une entreprise dans laquelle
03:07 il se sent aligné avec les valeurs sans forcément qu'elles soient racontées mais en tout cas
03:13 qu'il perçoit au quotidien.
03:15 C'est important d'ailleurs qu'il travaille avec des dirigeants qui sont alignés avec
03:21 le discours et les actes, dans lesquels il ne perçoit pas des incohérences ou des dysfonctionnements.
03:28 Parce que le problème aujourd'hui c'est qu'on parle beaucoup de la vie pro et de
03:32 la vie perso et on fait plein de choses.
03:35 Ce qui est important c'est que la culture elle soit incarnée par tous ceux qui en parlent
03:40 et toute la difficulté justement c'est cette incarnation, cette exemplarité.
03:44 Et quand c'est incarné et exemplaire, c'est parfois difficile à faire, les gens sont
03:48 plus heureux que dans l'inverse.
03:50 C'est tout d'accord ?
03:52 Oui tout à fait, c'est quand la place du travail ce n'est pas transactionnel, c'est
03:56 un peu au-delà de ça et qu'on peut se réaliser au travail notamment.
04:00 Et ça c'est bien dit, je trouve que le monde dans lequel on évolue est devenu extrêmement
04:05 transactionnel, il y a des process un peu pour tout et d'ailleurs nous-mêmes dans
04:10 notre vie d'aujourd'hui, dans notre vie professionnelle, on produit finalement des process transactionnels.
04:14 Mais en fait ce qui fait le plaisir du travail sont les échanges et toute l'inattendu qui
04:20 s'invite et qui fait que d'une rencontre avec quelqu'un va sortir un projet, que ce
04:25 projet on y a sa part, qu'on est écouté parce que le projet qu'on défend il rencontre
04:31 des objectifs stratégiques de l'entreprise.
04:33 C'est ça qui fait en fait le plaisir du travail.
04:36 Se contenter entre guillemets d'obéir à des process bien définis c'est infiniment
04:43 triste et ça rend les gens malheureux.
04:45 Tu as prononcé le mot culture, peut-être Kevin, quel est le moment dans la vie d'une
04:52 entreprise où la culture peut être mise à mal un petit peu, c'est quoi le petit
04:56 warning, le point d'attention ?
04:57 Alors il y a un discriminant partail, quand on est 5 c'est différent, quand on est 20,
05:04 quand on est 50 etc. et une image que j'aime bien c'est à 5 on recrute ses copains, des
05:10 gens qu'on connaît d'une vie d'avant, à 20 on recrute des inconnus, à 100 en tant
05:16 que patron on recrute des gens que l'on semble les avoir vus et à 400, 500 il y a des gens
05:22 qui partent avant qu'on les ait déjà vus dans sa propre entreprise.
05:24 Donc ça montre assez les différences puis après il peut y avoir des événements, des
05:29 personnes ou des événements de marché qui mettent à mal ou à bien la culture.
05:33 En fait la culture c'est ce qu'on fait sans s'en rendre compte, c'est les petites habitudes,
05:40 les usages, quand on arrive dans l'entreprise on en a conscience parce qu'en fait ça vient
05:44 éventuellement heurter notre pratique mais quand on y est depuis 5 ans, 10 ans on n'en
05:49 a plus conscience et parfois la culture est une raison de non-intégration parce qu'en
05:56 fait on ne fait pas l'effort de la rendre intelligible pour les gens qui arrivent.
06:01 Moi je suis très sensible au fait qu'il n'y ait pas de dissonance en fait dans la culture,
06:08 enfin on a tous en tête des gens qui ont voulu singer les start-up et dont c'était
06:13 pas la culture et qui se sont un peu ridiculisés et qui ont perdu le crédit de leurs collaborateurs
06:19 parce que ça a été considéré comme du bullshit ou en fait une posture et non pas
06:24 une réalité.
06:25 Oui et puis il n'y a pas qu'un type de culture qui marche, il y en a plein en fonction
06:29 des gens qu'il y a, de ce qu'on fait.
06:31 Exactement, il y a plein de cultures et la culture on y contribue aussi, il y a des cultures
06:38 très techniciennes, il y a des cultures plus bardes par exemple, parfois c'est pas facile
06:43 d'ailleurs de faire travailler les uns avec les autres, il faut décoder, il y a des cultures
06:47 de génération même si je m'inscris en faux, pas quand on cherche à saucissonner
06:53 les générations mais de fait il y a des rêves qui ne sont pas partagés et qui nécessitent
06:57 parfois de travailler à la part lente pour expliquer les raisons pour lesquelles on s'enthousiasme
07:01 pour un truc alors que les autres ne voient absolument pas l'intérêt.
07:03 Justement sur les générations, comment on fait cohabiter les différentes générations
07:08 au sein d'une entreprise ?
07:09 C'est hyper simple, il suffit que chacun se comprenne et donc chacun comprenne les
07:13 leviers, c'est beaucoup de clichés, il y en a un qui m'exaspère, c'est le fait
07:19 que la jeunesse a inventé le sens au travail et en fait quand on regarde les datas, qui
07:24 est notre boulot, on se rend compte que les seniors ont placé le sens et l'impact sur
07:29 la société beaucoup plus haut que les jeunes et ça s'explique super simplement qu'il
07:32 y ait entre en gros 30 et 40 ans, on est dans une accélération de carrière et on veut
07:38 monter la pyramide, quand on est à 50, déjà la pyramide est beaucoup plus fermée, on
07:42 a déjà prouvé, on a un confort et donc on est en haut de la pyramide de Maslow donc
07:46 plus sur le sens et l'impact.
07:48 Or de ce qu'on lit dans la presse, on a l'impression que le moteur numéro un des jeunes c'est
07:53 le sens et des seniors, en fait on n'en parle pas parce que tout le monde s'en fiche,
07:56 mais se comprendre les uns les autres, les générations, les codes, c'est ça qui
08:00 permet que tout le monde bosse ensemble.
08:02 Ça fait très plaisir d'entendre ça évidemment, parce que je fais plutôt partie des seniors
08:07 et il y a un truc par exemple que j'ai du mal à supporter, c'est que l'idée que
08:12 les seniors par exemple ne seraient là que pour transmettre.
08:14 Les seniors ils ont leur part aussi dans les projets, dans l'invention, la créativité,
08:20 le fait d'inventer des trucs nouveaux c'est très important aussi et le fait de le faire
08:24 de manière transgénérationnelle c'est précieux parce que ça ouvre totalement l'espace
08:30 créatif, c'est-à-dire quand on additionne finalement les savoirs, les expériences,
08:34 les connaissances, les codes, on arrive en fait à… on s'éclate.
08:38 Moi j'ai un associé qui a l'âge de mon fils, qui est le CEO de la boîte d'ailleurs,
08:43 de As for the Moon, je trouve ça extraordinaire, c'est-à-dire je crois qu'on s'apprend
08:49 mutuellement des choses tous les jours, dans les deux sens.
08:51 Et je rêve en fait que ce soit un peu partout la même chose parce qu'on a des cultures
09:00 d'entreprise qui sont quand même parfois très… à défaut d'être genrées, elles
09:04 sont moins genrées qu'avant, mais elles sont en tout cas très univoques en fait.
09:08 Il y a des boîtes de vieux, des boîtes de jeunes en fait.
09:12 Merci beaucoup Kevin d'être venu pour cette séquence et puis je vous dis à bientôt.
09:19 Merci et maintenant on passe à la séquence en coulisses.
09:22 On va commencer cette interview par plutôt votre expérience un peu à la SNCF.
09:34 Je ne vais prendre qu'un petit bout quand même parce que tu as été quand même une
09:37 vingtaine d'années, mais notamment quand tu as pris la direction générale de Transilien,
09:42 je me demandais c'est quoi le quotidien de la directrice générale du Transilien ?
09:47 Alors la vérité c'est qu'on se lève le matin très tôt, on se couche tard et
09:54 on ne sait pas le matin quand on se lève de quoi le quotidien va être fait parce qu'il
09:59 y a trois mille ans de clients tous les jours, six mille trains.
10:03 C'est le quotidien de tous les gens qui vont travailler et le trafic est dense.
10:12 L'exploitation est difficile et donc il y a des risques de problèmes à peu près
10:18 toutes les minutes.
10:19 Donc le quotidien c'est motiver les équipes bien sûr, travailler sur les projets d'investissement
10:26 pour que demain soit meilleur qu'aujourd'hui et puis beaucoup échanger avec les politiques,
10:34 les organisations syndicales, toutes les parties prenantes parce qu'il y a beaucoup de gens
10:39 qui sont concernés et intéressés par le transport en Ile-de-France.
10:42 D'ailleurs le transport est la responsabilité de la région donc on a des relations avec
10:46 la présidente de région et son équipe, les politiques des gares qu'on traverse, que
10:55 soient les maires ou les députés et les organisations syndicales, les personnels.
11:00 En fait moi j'ai eu plaisir à échanger avec tous ces gens là et à l'époque où j'étais
11:07 dirigeante de Transilien, j'avais ouvert d'ailleurs un compte Twitter pour avoir un
11:12 échange totalement horizontal avec toutes ces personnes à la fois.
11:15 J'en garde un très très bon souvenir parce que c'est grâce à ça qu'on a fait un certain
11:21 nombre d'innovations dont le fait de refaire les horaires de train de la gare Saint-Lazare
11:27 pour améliorer la ponctualité avec la contribution effective de toutes ces parties prenantes
11:33 qui ne s'étaient jusqu'à présent jamais produites et ça a fonctionné, ça a permis
11:37 d'améliorer la régularité de ces lignes de 10 points ce qui est considérable.
11:41 Et c'est comment de manager des cheminots ?
11:45 C'est des gens qui sont extrêmement fiers de leur travail, extrêmement engagés dans
11:55 le rapport à la belle ouvrage.
11:58 Et donc manager des cheminots d'abord c'est manager des métiers différents, il y a plein
12:07 de métiers qui contribuent à la fabrication d'un train et je crois que c'est comprendre
12:16 en fait ce qu'ils font vraiment et rappeler tous les jours le sens de ce pour quoi ils
12:22 travaillent et moi mon travail essentiel quand j'étais patronne de Transilien c'était
12:27 aussi de leur trouver des supporters parce que c'est compliqué quand on est responsable
12:32 de la ponctualité et donc de la non-ponctualité certains jours de rentrer chez soi et d'entendre
12:38 parler en mâle du travail qu'on a fait alors qu'on est conscient de toutes les énergies
12:43 et de tous les efforts qui ont été faits et donc un patron c'est quelqu'un qui fait
12:48 applaudir dans les stades et j'ai vraiment ressenti à quel point c'était nécessaire
12:56 compte tenu des efforts qui étaient réalisés.
12:57 Vous avez déclaré dans une interview à Bismarck "j'ai toujours mis un point d'honneur
13:03 à ce que la personne que j'étais soit fière des décisions que je prenais dans mes fonctions".
13:07 De quoi avez-vous été le plus fière du coup à la SNCF ?
13:11 Ce que je racontais tout de suite, le fait d'avoir permis de retravailler les horaires
13:19 qui concernent toute la gare Saint-Lazare avec toutes les parties prenantes, ça a été
13:26 un gros sujet de fierté.
13:27 Dans une vie antérieure à celle-là j'étais la patronne des contrôleurs de train qui
13:35 sont des gens qui ont la caractéristique d'être debout dans les trains toute la journée
13:40 et d'avoir 80% des questions des voyageurs et souvent 20% des réponses.
13:45 Pour moi, le fait de les avoir reliés à leurs collègues, de les avoir connectés,
13:52 de leur avoir donné pour la première fois des outils dignes de ce nom, c'était il
13:56 y a 20 ans, c'est une fierté.
13:59 C'est grâce à ces gens que je viens de citer que j'ai découvert le monde numérique
14:05 et que j'ai eu un grand plaisir d'ailleurs à en être l'acteur après, à comprendre
14:11 comment ça fonctionnait et à regarder comment on pouvait régler un problème compliqué.
14:17 Quand on a beaucoup de salariés, quand j'étais directrice de région j'en avais 12 000 en
14:22 responsabilité et qu'on s'occupe de 3 millions de voyageurs, le risque c'est d'oublier
14:26 la personne.
14:27 L'intérêt du numérique c'est qu'il permet de faire de la personnalisation à très grande
14:32 échelle.
14:33 Pour moi ça réglait une grande partie des problèmes que j'avais, je n'avais plus à
14:36 choisir entre est-ce que je m'occupe des foules ou est-ce que je m'occupe des gens dans les
14:40 foules.
14:41 Je pouvais m'occuper des deux à la fois.
14:42 Or c'est important pour que l'exploitation soit au carré d'être extrêmement pointue
14:47 vis-à-vis de la gestion des grandes masses de population et puis dans le même temps
14:51 de s'occuper de chacun.
14:52 Le numérique le permettait.
14:54 Merci à tous ces inventeurs parce qu'en 2010, quand j'ai pris mes fonctions de patronne
15:01 de Transilien, on avait des smartphones, on commençait à pouvoir exploiter de la data
15:10 et on commençait à pouvoir contextualiser l'information et la délivrer à chacune
15:16 des personnes sans l'enquiquiner avec tout ce qui ne les concernait pas.
15:19 Et après tu as fait le choix de quitter ce grand paquebot et d'entrer dans le monde des
15:25 startups, mais en retentant tu as rejoint Schoolab, qui est un studio d'innovation bien
15:29 connu dans le monde des startups.
15:31 Cette transition, c'était obligatoire sinon tu allais être complètement perdue ?
15:36 C'est à la fois le hasard, c'est-à-dire qu'à l'époque j'étais intéressée par
15:40 les questions d'éducation.
15:41 J'avais rencontré François Tadei qui dirigeait ce qu'on appelle aujourd'hui le Learning
15:47 Planet Institute.
15:48 Donc les questions d'éducation m'intéressaient.
15:50 Il y avait Schoolab, j'avais l'impression que c'était un lieu dans lequel on allait
15:53 remettre en question la manière de former.
15:56 C'était d'ailleurs le cas.
15:57 J'ai appris mon métier d'entrepreneur.
16:00 J'ai aussi réappris plein de choses que je ne savais plus.
16:03 Quand on est dirigeante depuis longtemps, il y a des réflexes qu'on perd.
16:09 On ne sait plus comment sont faites les choses.
16:11 On a une relation aux autres qui est quelquefois un peu perturbée par des crans hiérarchiques
16:15 importants.
16:16 Et donc toute cette période, ça a été bien mieux qu'un MBA.
16:22 Je me suis un peu, alors le terme est un peu galvaudé, mais déconstruite.
16:25 J'ai réappris le numérique de « from scratch » si je puis dire.
16:33 J'ai réappris à vraiment, enfin, ce que c'était créer, mettre en œuvre son idée,
16:42 rater, réussir et tout ce qu'on apprend en design thinking, en e-startup, etc.
16:49 Et puis j'ai rencontré surtout mon associé d'aujourd'hui.
16:52 Et pour moi, c'était important de pouvoir non plus parler des startups, mais faire
17:00 la même chose.
17:01 Un des amis que j'ai rencontré à l'époque me disait, c'est comme voir un reportage
17:07 sur le pôle Nord et aller soi-même au pôle Nord.
17:09 On s'aperçoit qu'il y a fait froid.
17:10 Donc, j'ai découvert ça et je suis ravie aujourd'hui d'avoir un peu dépassé tout
17:16 ça et de pouvoir être moi-même au quotidien, dans un quotidien d'entrepreneuse avec ce
17:23 que ça a comme truc formidable et truc difficile.
17:27 Une startup, c'est un chat de Schrödinger, il est toujours mort et vivant à la fois.
17:30 Si on passe les échéances de cash, l'avenir est devant nous.
17:36 Et l'avenir, quand on est sur un sujet qui manie l'intelligence artificielle et qu'on
17:44 voit arriver notamment les large language model qui permettent de mettre en connexion
17:48 les gens, de leur faire échanger des savoirs et de faire en sorte ensuite que ces savoirs
17:53 diffusent dans toute l'entreprise en étant attentif aux questions d'habilitation, de
17:59 traçabilité, de souveraineté, de confidentialité, c'est extrêmement intéressant.
18:04 Tu as d'ailleurs parlé de toute cette transition, du passage startup dans un livre, donc la
18:10 team, le jour où j'ai quitté mon connexe pour les startups.
18:12 Pourquoi tu as adopté le ton de l'humour ? Parce que les autres livres sont un peu
18:16 trop sérieux dans le management.
18:18 Je me suis d'abord moquée de moi-même parce que je me suis rendue compte dans les premiers
18:23 jours où je suis arrivée que tout ce que je savais était parfaitement inutile et
18:30 qu'il fallait que j'apprenne tout ce qui serait nécessaire à ma survie dans cet
18:34 univers.
18:35 En fait, j'ai parfois été amenée à, je ne sais pas si c'est faire semblant dans
18:47 le « fake it until you make it », mais en tout cas, je me le suis appliqué à moi-même
18:51 quand il s'est agi d'utiliser certaines applications ou de m'enregistrer moi-même.
18:58 Il y avait plein de choses que je ne savais plus faire parce que d'autres le faisaient
19:00 pour moi depuis longtemps.
19:02 Ça, c'était très intéressant et notamment après avoir longtemps managé, j'ai été
19:08 managée.
19:09 Ce qui m'a permis d'avoir aussi un regard critique, j'espère constructif et positif,
19:15 sur ce qui fait qu'on s'engage quand on est, cette fois-ci, du point de vue du salarié
19:19 et du managé.
19:20 Tu as ensuite créé les deux sociétés que j'ai présentées en début d'émission,
19:25 Ask for the Moon et 10h32.
19:27 Comment est-ce que tu t'organises ton temps entre ces deux entreprises ?
19:31 J'ai un peu mis l'accent sur Ask for the Moon parce que l'actualité fait qu'on est
19:40 en pleine croissance, que le monde industriel est un peu en revival depuis le Covid et que
19:48 notamment dans le monde nucléaire, on a eu besoin de nous.
19:52 Donc, je passe plus de temps aujourd'hui sur Ask for the Moon.
19:57 J'ai appris à répartir mon temps de manière formelle, c'est-à-dire à ne pas me laisser
20:03 envahir.
20:04 Ce qui était d'ailleurs un problème que j'ai rencontré quand j'étais à la SNCF,
20:08 c'était d'être sur-engagée et de perdre quelquefois l'inspiration ou la créativité
20:15 tellement… parce que je n'avais plus de bande passante.
20:18 Et là, j'ai vraiment mis un point d'honneur à répartir strictement mon temps.
20:24 Et en fait, je me rends compte que je suis beaucoup plus efficace et je me casse moins
20:27 les pieds avec des mails, des réunions, des machins dont je m'aperçois à la longue
20:31 qu'ils m'ont pris beaucoup d'énergie et de temps et sans doute pas au bénéfice
20:36 des résultats qu'on y a produits.
20:38 Et c'est pour ça que ça te laisse du temps pour faire de la peinture ? Tu publies beaucoup
20:43 d'aquarelles.
20:44 Oui, l'aquarelle, ça a toujours été un passe-temps.
20:46 Et la chance que j'ai eue, c'est une de mes collègues de la SNCF qui m'a demandé
20:53 un jour dans un atelier, je crois que c'était sur les valeurs de « Dessiner l'audace
20:57 ». Ça m'avait un peu mis… je m'étais demandé bien comment j'allais faire ça.
21:01 Bref, j'ai fait un premier dessin et je ne sais pas, ça m'a donné envie d'associer
21:09 l'aquarelle et le travail, ce qui n'est pas forcément naturel.
21:14 Et je me suis à dessiner les séquences de travail du monde d'aujourd'hui, c'est-à-dire
21:21 mon futur à moi, mon futur du travail, puis le futur du travail de tout le monde.
21:25 Et je les ai postées sur les réseaux sociaux et j'ai été encouragée par les gens qui
21:32 m'ont renvoyé des commentaires, à telle enseigne que ça a buzzé.
21:38 Et c'est vrai que l'art, c'est quelque chose d'infiniment personnel, mais quand
21:44 on a le plaisir d'avoir en retour des choses positives qui nous sont dites, on a envie
21:49 de continuer et c'est comme ça que je continue.
21:51 Et là dans ma semaine, j'ai gardé une demi-journée, alors je n'arrive pas toutes
21:58 les semaines à la conserver, mais pour retourner au beaux-arts parce que c'est extrêmement
22:02 agréable.
22:03 Et mine de rien, faire travailler ensemble la main et la tête, c'est extrêmement
22:09 précieux.
22:10 Les neuroscientifiques expliqueront que c'est parce que la main… il y a un très joli
22:17 livre là-dessus, je cherche le nom, "L'éloge du carburateur", d'un prof de Harvard
22:24 qui s'est mis à réparer des motos et qui explique que le travail de la main sur des
22:29 temps courts permet au cerveau d'apprendre plus vite.
22:33 Et c'est très précieux.
22:35 Et je le constate en dessinant.
22:40 On réfléchit à la façon de dessiner mieux et du coup ça entraîne la machine à penser.
22:50 Donc c'est bien.
22:51 En plus de poster ses aquarelles sur les réseaux sociaux, comme beaucoup de gens, tu dis ce
22:57 que tu penses.
22:58 Et j'ai vu que tu as parlé récemment, il y avait une opposition entre l'engagement
23:03 et l'addiction au travail.
23:04 Je trouve ça intéressant.
23:05 C'est de ne demander pas à vos salariés de s'engager que si vous leur laissez la
23:08 liberté de s'ouvrir à tout ce qui peut les inspirer.
23:10 On peut résumer ton style de management comme ça aujourd'hui ?
23:13 En fait, je pense que la personne qu'on est ne doit pas être abandonnée au bénéfice
23:25 de la fonction qu'on exerce.
23:26 C'est extrêmement important.
23:28 Et donc pour être la personne qu'on est, il faut qu'on soit toutes les personnes qu'on
23:32 est à la fois.
23:33 On n'est pas qu'un salarié ou qu'un dirigeant ou qu'un entrepreneur.
23:36 On est aussi parents.
23:38 On peut être aidant si on s'occupe éventuellement de ses parents.
23:43 On peut être militant associatif.
23:45 Et toutes ces personnes, toutes ces fonctions qu'on exerce, elles définissent qui on est.
23:51 Et il faut qu'au travail, on soit reconnu dans toutes ces personnes qu'on est et qu'on
23:55 ait le temps de les exercer.
23:58 Et c'est à ce prix-là qu'on peut s'engager.
24:01 Sinon finalement, au bout d'un moment, on est happé et on est plus utile mais utilisé.
24:07 Et en fait, pour moi, l'engagement, ça doit rester complètement de la liberté.
24:12 Il y a du consentement dans l'engagement.
24:15 Sinon, ce n'est pas du consentement, c'est de l'asservissement, de l'addiction.
24:18 Et maintenant, manager des salariés, des collaborateurs en start-up, est-ce que c'est
24:23 différent du coup de manager des cheminots ?
24:25 Oui, c'est très différent.
24:27 D'ailleurs, je n'ai pas l'impression de réellement manager.
24:29 J'ai l'impression aujourd'hui de travailler au milieu d'eux, d'entendre tout ce qui se
24:38 passe.
24:39 Et moi, mon rôle, indépendamment de développer l'activité, c'est aussi de m'assurer que
24:45 l'entreprise, elle grandit en faisant grandir les autres.
24:48 C'est-à-dire que mon rêve, c'est que les premiers salariés de l'entreprise puissent
24:56 être les futurs patrons de l'entreprise quand elle aura grandi.
24:58 Je trouve infiniment triste qu'une jeune entreprise soit obligée de faire venir des
25:05 gens de l'extérieur pour réapprendre à adresser des nouveaux sujets.
25:09 Je trouve que c'est bien quand on est capable de repérer dans la boîte les gens qui sont
25:18 encore jeunes et ils ont encore de la fraîcheur, mais on décèle des capacités à grandir.
25:25 Moi, ça me fait extrêmement plaisir de pouvoir le faire.
25:28 En plus, je le fais de manière totalement avec passion et en même temps dépassionnée
25:33 parce que je n'ai plus d'enjeu autrement que de faire grandir cette boîte et de leur
25:38 permettre à chacun de grandir.
25:40 Je trouve que c'est assez gratifiant.
25:44 Merci, c'est la fin de cette séquence en coulisses.
25:49 Et maintenant, on passe à la séquence interview top chrono.
25:54 BISMARCK
25:57 Une série de questions réponses assez courtes.
26:01 Première question, quel était ton dernier trajet en train ?
26:04 C'est récent, c'était la semaine dernière.
26:07 Je suis allée à Biarritz pour une conférence.
26:11 La dernière peinture que tu as faite ?
26:14 J'ai dessiné un jeune homme qui danse avec ce qui est une IA, une intelligence artificielle.
26:23 C'est au service d'un post que j'ai fait sur LinkedIn pour montrer qu'en fait, danser
26:29 avec l'IA, ce qui va être notre quotidien, c'est garder la maîtrise de ce que l'on
26:34 veut et ne pas se laisser marcher sur les pieds.
26:36 Est-ce que tu peux me citer une entrepreneuse ou une dirigeante française que tu apprécies ?
26:41 Catherine Barba.
26:42 Oui, qui maintenant est à une école de freelance.
26:45 Exactement, en vie.
26:46 Si tu devais écrire un autre livre, quel sera le thème ?
26:50 Je suis travaillée entre l'idée de faire un roman et j'ai aussi, comme on est en
26:56 ce moment en train de lever des fonds, j'aimerais bien faire un peu la suite de mon premier
27:01 livre sur un mode humoristique, sur toutes les questions que j'ai pu entendre à une
27:07 dirigeante de plus de 60 ans, posée par des jeunes analystes dans les fonds d'investissement.
27:12 Quels conseils que tu donnes le plus aux dirigeants ?
27:16 Il y a plusieurs conseils.
27:27 En fait, c'est à la fin de la journée d'essayer de réfléchir à ce qu'ils ont
27:36 réglé d'essentiel.
27:38 Parce qu'on a l'impression de courir toujours et se dire qu'on a été utile à régler
27:45 l'essentiel, c'est très gratifiant pour un dirigeant.
27:47 Sinon, il a l'impression que son temps s'est épuisé.
27:49 Tu as le droit de répondre joker à celle-ci, je pense qu'elle va être dure.
27:53 Mais est-ce que tu préfères travailler dans un grand groupe ou dans une start-up ?
27:56 En fait, j'aime passer d'un monde à l'autre.
28:01 Je pense que ça me caractérise.
28:03 J'aime apprendre en plongeant et en apprenant à nager en même temps.
28:07 Peu importe que ce soit grand ou petit, ce qui m'intéresse c'est d'apprendre des
28:14 nouveaux codes, des nouvelles manières de savoir respirer et nager.
28:20 Merci beaucoup Bénédicte d'être venue dans cette émission.
28:24 Merci Charlie.
28:25 Merci à vous d'avoir regardé toutes ces séquences.
28:30 Je vous donne rendez-vous la semaine prochaine pour un nouveau numéro.
28:33 Merci, au revoir.
28:33 [Musique]