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L'HÉRITAGE MORTEL ⚠️ _ Sur la scène du Crime _ Épisode entier

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00:00 L'affaire qui suit relate des faits réels dont le déroulement est illustré par des reconstitutions.
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00:52 Il est un peu plus de 22 heures quand le standard du commissariat de Livry-Gargan, dans la banlieue est de Paris, reçoit l'appel affolé de Madame Janine Gilbert.
01:04 Retraitée de 68 ans, elle habite un pavillon costu dans le quartier résidentiel de la ville, avec sa mère de 91 ans et son mari Roger.
01:12 Mais ce soir du 4 avril, Roger n'est pas rentré.
01:16 Elle signale la disparition par un appel au commissariat local de Livry-Gargan, en disant "Mon mari est parti promener le chien comme d'habitude vers 22h30 et il n'est pas rentré, le chien seul est rentré à la maison, je vous déclare la disparition de mon mari".
01:33 Donc le commissariat de Livry-Gargan envoie des effectifs au domicile de Madame Gilbert, qui leur explique dans quelles circonstances le mari a disparu, Roger Gilbert, et ils cherchent un peu dans le quartier, ils ne trouvent rien.
01:47 Dans les minutes qui suivent, vers 22h40, un appel anonyme d'une voix de femme parvient toujours au standard du commissariat de Livry-Gargan, disant qu'il y a peut-être un corps sous un véhicule, sans donner trop de détails.
02:02 Environ 100 mètres de la maison, les effectifs trouvent effectivement une chaussure qui est ramenée à Madame Gilbert, et Madame Gilbert leur dit "Effectivement, c'est bien une chaussure de mon mari".
02:13 J'ai reçu un coup de fil le dimanche matin, je pense que ça devait être le 5, à 9h30, ma belle-mère qui m'appelait, complètement paniquée, comme quoi mon beau-père était parti promener le chien la veille, et que le chien est rentré tout seul, et que Roger n'est pas rentré.
02:30 Donc c'était un peu la panique, on était en train de se lever, on était tous couchés, j'ai tout de suite donné le téléphone à Eric, parce que tout de suite ma fille a été réveillée par le téléphone, elle est arrivée en me disant "Qu'est-ce qui se passe, Whisky a disparu", je lui ai dit "Non, a priori c'est pas Whisky, c'est pas le chien, c'est Papy qui a disparu".
02:48 Donc on a vu les enfants, et puis avec ma femme, on a fait en marche arrière, donc en partant de chez nous, au cas où mon père aurait eu un problème, donc on a fait tout le chemin à l'envers, jusque chez eux, par la route. On n'a rien trouvé.
03:02 On a vraiment pensé à tout, en se disant "Bon bah il a pris une valise, il est parti, il en avait marre", mais il était en pyjama donc ça paraissait dérisoire, après on a pensé qu'il avait fait peut-être une rupture d'aneurysme, quelque chose comme ça, donc il fallait appeler tous les hôpitaux pour voir si quelqu'un l'avait ramassé, ou qu'il ait carrément perdu la mémoire, et qu'il se soit mis à marcher à perte de vue jusqu'à ce qu'il fatigue, ou qu'il trouve un logement pour se coucher, ou quoi que ce soit.
03:28 Et donc avec Eric, on a laissé les enfants chez ma belle-mère, et on a commencé à chercher dans toutes les rues aux alentours, enfin lui il connaît bien la région, donc il est monté jusqu'à Clichy, dans les forêts, dans les parcs, et ma fille, elle était dans la rue, à sonner chez tous les voisins, demandant s'ils avaient pas entendu un peu quelque chose en la nuit, s'ils avaient pas entendu une voiture, s'il avait pas été, dans le pire des cas, kidnappé, on savait pas quoi, c'était la folie.
03:55 Et puis après j'ai récupéré une photo de lui, j'ai fait des photocopies, en marquant "personne disparue, veuillez contacter monsieur Gilbert", donc j'avais fait des photos partout, et j'avais donné à certaines personnes dans le travail où j'étais, pour qu'ils les mettent dans des boutiques, qu'on les mette sur des poteaux, au niveau de Bagnolet, Lelylas, Romainville.
04:12 Ils les ont distribués dans tous les magasins, les boulangeries, et tous les magasins qu'ils pouvaient trouver sur l'ivrier Gargan, à la gare, dans tous les alentours.
04:21 J'ai fait des bosquets, j'ai fait tous les bosquets, j'ai fait le bois fermeugé, c'était un immense parc où il y a des petits lacs, donc la police a fait des recherches dans les lacs de Sévigné, donc vous voyez, il y a même un petit lac qui est un peu plus haut, qui est fermé, donc on a même été dedans, on a demandé aux gens s'ils pouvaient nous laisser rentrer, on a cherché partout, on a rien trouvé.
04:41 On a appelé la famille à Saint-Vite pour savoir si, à tout hasard, il n'aurait pas pris le train ou quoi que ce soit pour les rejoindre, on a appelé la famille dans la Somme, enfin on a essayé de chercher un petit peu, vraiment dans tous les sens.
04:51 La presse aussi est mise à contribution.
04:55 Le jour où j'ai fait paraître l'article dans le journal, on a voulu aller voir ma belle-mère, je ne pensais pas qu'il allait paraître ce jour-là, donc on a voulu aller voir ma belle-mère pour l'avertir que l'article allait paraître dans le journal.
05:07 Au moment où je suis arrivée à la maison, elle était en pleurs en disant que quelqu'un l'avait appelée, enfin que des jeunes l'avaient appelée, et qu'on lui avait dit que ce n'était pas la peine de le rechercher, qu'il avait été tué, qu'il avait été coupé en morceaux, dépossé, et qu'il était dans la nature et qu'on ne le retrouverait jamais.
05:28 Donc Eric lui a dit tout de suite "tu vas prendre un appareil spécial où on peut identifier les numéros, comme ça on saura qui c'est qui t'appelle, on pourra rechercher".
05:36 Malheureusement il n'y a plus jamais personne qui a appelé.
05:38 Ils ont consulté tous les services officiels et moins officiels, y compris je crois des radiesthésistes, des gens qui font tourner des pendules.
05:53 Normalement on est assez ésotérique et dans des cas comme ça je crois qu'on essaye de penser, enfin d'ouvrir toutes les portes possibles et inimaginables.
06:00 Et bon on sait qu'il y a des charlatans c'est certain, mais donc moi je suis allée voir des voyants de mon côté, ma maman est allée voir des voyants de son côté, pour essayer de recouper les informations qu'on pouvait avoir à travers ces voyants et pour essayer peut-être de nous donner une voie ou une issue pour essayer de le retrouver.
06:19 La disparition elle est largement troublante quand même parce que la personnalité de Roger, son mode de vie, sa situation de fortune aussi parce que c'est malgré tout des gens qui n'ont pas d'énormes moyens, ne fournissent aucune explication à cette disparition.
06:39 L'enquête est d'abord confiée au 9ème bureau de délégation judiciaire chargé des disparitions inquiétantes de Majeur.
06:47 Eux se déplacent, réentendent de nouveau Madame Gilbert, font des recherches sur ses comptes et ils s'aperçoivent que en fait Madame Gilbert après la disparition de son mari a fait des virements à son profit, c'est à dire du compte de son mari sur le sien.
07:14 C'est un comportement qui évidemment leur paraît suspect au moins dans le domaine de son honnêteté.
07:21 D'ailleurs sans avoir retrouvé le disparu, bien évidemment ils sont obligés au bout de quelques semaines de renvoyer un rapport au parquet de Bobigny.
07:33 Dans ce rapport ils précisent que malgré la mauvaise foi et la malhonnêteté de Madame Gilbert qu'ils ont pu déterminer par leurs recherches, sa responsabilité dans la disparition ne peut être engagée.
07:45 Mais les doutes concernant l'honnêteté de Janine vont être renforcés par des rumeurs troublantes au sein même du commissariat de Livry-Gargan.
07:53 Et notamment par les déclarations du gardien de la paix affecté au standard le soir de la disparition de Roger Gilbert.
08:02 Lui au sein du commissariat commence à raconter à ses collègues qu'il est au courant de l'affaire et que ce serait Madame Gilbert qui aurait tué son mari la veille.
08:17 Et quand ce fonctionnaire qui se trouve au standard du commissariat de Livry-Gargan est entendu par les hiérarchies sur les renseignements qu'il a concernant cette disparition,
08:28 il revient sur ses déclarations en disant que finalement c'est un gros canular qu'il a voulu faire à ses collègues et qu'en fait il est au courant d'absolument rien et qu'il n'y a jamais eu de meurtre.
08:42 Il revient complètement sur les déclarations qu'il a faites à ses collègues le soir où on connaît la disparition de M. Gilbert.
08:49 Informé des déclarations contradictoires du gardien de la paix, le parquet de Bobigny décide d'ouvrir une information judiciaire.
08:56 En juin 1998, l'enquête est confiée au service départemental de la police judiciaire de Seine-Saint-Denis.
09:02 Trois mois après la disparition, on repart pratiquement à zéro.
09:07 Personne pour l'instant n'a de renseignements sur le corps, sur le disparu.
09:12 On a très peu de renseignements sur cette famille.
09:15 On a juste en lisant le dossier ces deux éléments, à savoir que Mme Gilbert n'a pas passé un comportement très honnête,
09:26 notamment depuis la disparition de son mari par rapport aux virements qu'elle fait sur ses comptes
09:33 mais également par rapport aux déclarations du fonctionnaire de l'ivier gargan qui laisse supposer qu'il y a peut-être eu un meurtre à la base.
09:43 Malgré les recherches de la police, malgré les moyens employés, jusqu'au plus improbable,
09:48 la seule trace laissée par Roger reste cette chaussure retrouvée sous un véhicule à proximité de son domicile.
09:54 Mais que sait-on vraiment de Roger et de Jeannine Gilbert ?
10:00 Des gens qui avaient entre 60 et 70 ans, qui vivaient dans un petit pavillon assez coquet de l'ivier gargan et qui avaient un mode de vie assez simple.
10:10 Ils faisaient tout ensemble. Ils allaient toujours au marché ensemble, ils allaient toujours au magasin ensemble,
10:15 ils faisaient les grands hypermarchés ensemble, ils regardaient toujours les bons prix et tout ça, donc toujours ensemble.
10:21 Surtout sur les derniers temps où mon beau-père a disparu, ils avaient des habitudes très régulières.
10:29 Ils allaient au cimetière tous les mercredis matin, toujours ensemble.
10:32 Dehors de la séance au supermarché le samedi, quand ils recevaient leurs enfants, il n'y avait pas grand-chose qui rythmait leur vie.
10:41 Monsieur Gilbert apparaît lui comme un homme tranquille, ne faisant pas de vagues, très gentil avec tout le monde,
10:48 et promenant son chien régulièrement tous les soirs quasiment à la même heure, 22h30.
10:54 Le bon grand-père avec une vie très simple, un peu réglée, qui allait chercher son journal le matin,
11:00 qui s'intéressait beaucoup à ses petits-enfants, le brave retraité.
11:07 Le tempérament de Roger contraste avec celui de son épouse Jeannine, beaucoup plus retenue.
11:14 Elle présentait bien, une femme qui faisait son âge mais qui était bien mise de sa personne, parlant peu, assez réservée, mais une mamie nova assez digne.
11:31 Une mamie nova que les enquêteurs de la police judiciaire soupçonnent de s'être débarrassée de son mari.
11:37 Mais pour l'instant, ils n'ont que des soupçons.
11:41 Ils vont donc devoir adopter une technique d'enquête inhabituelle.
11:44 Habituellement, quand on a un meurtre, on pratique le système de l'escargot,
11:48 c'est-à-dire qu'on part de l'endroit où on découvre le cadavre ou de l'endroit où se sont déroulés les faits,
11:55 pour trouver des indices et des renseignements, et on élargit les recherches au fur et à mesure de l'enquête.
12:01 Or là, comme on n'a pas de cadavre, on a un disparu, et on n'a pas vraiment d'endroit où s'est déroulé un fait criminel,
12:08 on décide de faire le système de l'escargot, mais à l'inverse, c'est-à-dire de prendre des témoignages au plus large,
12:13 au plus large dans l'environnement géographique et personnel de Mme Gilbert,
12:19 et vu les déclarations du gardien de la paix chargé du standard, comme quoi c'est elle qui aurait peut-être tué son mari,
12:25 on ne veut pas non plus lui déclencher des soupçons sur notre enquête.
12:30 En auditionnant les riverains, les enquêteurs vont recueillir le témoignage de la boulangère,
12:36 qui connaît d'autant mieux les Gilbert qu'elle habite dans la même rue qu'eux.
12:39 Le soir de la disparition, elle n'a pas vu du tout M. Gilbert promener son chien.
12:44 Et ça, elle nous confirme, elle nous dit, dans son audition, elle nous dit "je suis certain qu'il ne l'a pas promené,
12:51 parce que j'ai appris sa disparition le dimanche, et si je l'avais vu la veille, je m'en serais souvenu.
12:56 Or la dernière fois que je l'ai vu, c'est le vendredi."
12:59 Le témoignage de la boulangère pourrait laisser penser qu'au soir du samedi 4 avril, Roger Gilbert avait déjà disparu.
13:05 Mais cette hypothèse est contredite par le témoignage de Patrick, le fils cadet des Gilbert.
13:10 "Mon beau-frère et ma belle-sœur habitaient l'appartement qu'appartenait à mon beau-père, juste en face de leur maison,
13:18 et ils avaient décidé de refaire tout le parquet. Et c'était ce week-end-là qu'ils faisaient le parquet.
13:22 Donc ils travaillaient toute la journée dans l'appartement, et le soir, ils allaient coucher chez mes beaux-parents."
13:27 "Donc mon frère a dû travailler jusqu'à 7h je crois, 19h en fait, et après il est venu manger, ou 10h ou 20h, il est venu manger chez mes parents.
13:34 Donc ma mère a dit comme quoi que mon père était souffrant."
13:38 "Il pensait qu'il était dans son lit, puisque toutes les portes étaient fermées."
13:42 "Et à un moment, Patrick va monter aux toilettes, et va s'apercevoir que la porte est fermée."
13:51 "C'était forcément la dernière personne qui était dans la maison, c'était mon beau-père qui était dans les toilettes."
13:55 "Donc il était absolument convaincu que son père était là."
14:00 Les policiers poursuivent leur enquête de voisinage. Direction la poste de Livry-Gargan.
14:05 "Évidemment dans un quartier, qu'est-ce qu'il y a de plus important qu'un facteur ?
14:12 Donc on s'adresse au facteur, le facteur nous dit 'mais de toute façon, elle ne se fait jamais livrer son courrier, elle a une poste restante'."
14:18 "On n'a jamais vu ça nulle part. La poste garde votre courrier 15 jours, quand vous êtes en vacances. Point barre."
14:24 "Elle, elle a demandé, et elle paye je crois 150 francs par an, pour qu'on garde son courrier."
14:31 "Avant que le postier ne vienne le distribuer. Donc elle fait le tri."
14:36 "On a interviewé le postier, et le postier dit 'moi je suis arrivé il y a 4 ans'."
14:40 "Et quand je suis arrivé il y a 4 ans, ça existait déjà depuis plusieurs années."
14:44 "Ça a été confirmé, c'est dans le dossier."
14:46 "C'est-à-dire qu'en fait son mari n'a jamais de courrier, que celui qu'elle veut bien lui laisser dans la boîte."
14:54 Pourquoi Jeannine se donne-t-elle tant de mal pour intercepter le courrier ? Qu'a-t-elle donc à cacher ?
14:59 La réponse viendra presque par hasard, grâce aux initiatives de la famille pour retrouver Roger.
15:04 "La photo qu'on a fait paraître dans le Parisien, a déclenché quand même des témoignages de certaines personnes qui ont reconnu mon beau-père et ma belle-mère."
15:15 Parmi eux, celui d'un commerçant qui tient une librairie à deux rues de chez les Gilbert.
15:22 "Il se trouve que ce commerçant réagit immédiatement à la vue de cette photo en se faisant connaître auprès du commissariat de librairie en disant"
15:29 "Mais je connais cette femme, je connais moins son mari mais elle je la connais parce que c'est une cliente de mon commerce."
15:37 "Ça fait des mois voire des années qu'elle vient et qu'elle y falsifie des documents par le biais de la photocopie."
15:45 "Elle arrive avec des bandelettes de papier qu'elle a fabriquées chez elle avec des chiffres, des montants et elle va tricher."
15:53 "Et il le voit, il le dit, il a été interrogé, il la voit faire, il la voit tripatouiller les relevés bancaires."
16:00 "Elle procédait à ce maquillage des relevés et une fois qu'il était fait, elle remettait les relevés dans une enveloppe qu'elle glissait dans sa propre boîte à lettres."
16:11 Les enquêteurs savent maintenant que la digne retraitée se livre depuis des années à un trafic sur les comptes du ménage.
16:18 "Elle montait une carambouille, une opération douteuse pour se procurer de l'argent pour boucher un trou qu'elle avait précédemment creusé."
16:33 Car en remontant plus loin dans son passé, les enquêteurs vont s'apercevoir que Jeannine Gilbert, née Fabre, a toujours pris certaines libertés avec la comptabilité.
16:42 En particulier lorsqu'elle était à la tête des mobiliers Fabre, l'entreprise familiale dont son père lui avait confié les rênes.
16:50 "Elle était prise, je crois, dans le désir de son père qui était que Mobilier Fabre continue et elle a continué. Elle a continué contre toute logique financière ou économique."
17:03 "En 84, je cherchais du travail et quand je cherchais du travail, vu que je suis restée quelques mois au chômage, elle m'a demandé d'aller l'aider à l'atelier, de lui tenir sa comptabilité à l'atelier et c'était un fiasco total."
17:15 "Il y avait un arriéré de je sais pas combien de mois, enfin bon, il y a des choses qui m'ont paru bizarres."
17:20 "Et ça a été de pire en pire, donc elle s'est endettée. Elle a passé son temps à s'endetter, elle a passé son temps à payer des fournisseurs, probablement avec des intérêts et probablement d'une façon qui était totalement antinomique d'une gestion pensée."
17:37 "Souvent, elle avait des amendes, donc elle avait des 10%, elle avait des 10%, elle avait des amendes d'amende, donc elle avait plein de choses qui se greffaient dessus, elle avait oublié de payer l'Ursa, elle avait pas payé ci, donc systématiquement, on avait plus d'amendes que ce qu'elle avait à payer."
17:51 En 1991, le coup près tombe. Mobilier Fabre est mise en liquidation judiciaire. Mais l'entreprise est en nom propre. Tous les biens de Janine Fabre, épouse Gilbert, sont susceptibles d'être saisies pour régler ses dettes.
18:05 Pendant 7 ans, elle va tout mettre en oeuvre pour cacher ses ennuis financiers à son entourage, sans jamais parvenir à éponger l'ardoise.
18:15 "Il est évident qu'elle vit au-dessus de ses moyens, qu'elle cherche à le faire en tout cas, c'est-à-dire à continuer à vivre comme une chef d'entreprise alors qu'elle est en faillite."
18:24 "Roger lui avait donné le rôle de... c'est elle qui tenait les comptes, elle devait tenir les comptes, elle devait remplir le frigo, il fallait que la face visible de l'iceberg de la famille soit cohérente et qu'à aucun moment on ne réduise le train de vie. Pour ça, il fallait de l'argent et elle en avait pas."
18:47 Les années passent et le problème ne fait que s'aggraver. Janine est prête à tout pour sortir de l'impasse.
18:54 "Elle entretient des correspondances avec des marabouts, elle achète des gris-gris, elle commande des trucs par correspondance, elle attend une solution miraculeuse et elle espère gagner au loto comme énormément de gens quand même, en pensant que ça va être la solution de ses problèmes et qu'elle va rembourser et qu'elle pourra sauver tout, le patrimoine et l'héritage de son père et donner à ses enfants, etc."
19:23 "On lui avait même demandé si on ne leur souhaitait pas du malheur, mais s'ils mourraient dans un accident ou quoi que ce soit, est-ce qu'il fallait refuser l'héritage ou pas?"
19:32 "Elle nous a dit texto 'mais y'a aucun problème, vous pouvez prendre tout ce que vous voulez'."
19:38 Une faillite personnelle, des dettes insurmontables, un train de vie irréaliste et des comptes truqués. Aux yeux des enquêteurs, le profil de Janine se précise.
19:51 "On est maintenant sûr qu'elle a un comportement parfaitement malhonnête depuis des années vis-à-vis de son mari. On verra en auditionnant également la famille qu'elle profite d'eux également à leur insu."
20:03 "Avec ma belle-mère, on était en froid parce qu'on a eu beaucoup de soucis d'argent à cause d'elle."
20:07 "Qu'à l'âge de 18 ans, j'ai travaillé dans l'entreprise Fabre et l'argent, je le faisais déposer dans un compte parce que moi, j'aimais pas aller dans les banques, j'aimais pas faire plein de choses, donc j'avais fait une procuration et en fait, je profitais de ça pour me vider mon compte."
20:20 "En fin de compte, en grattant un petit peu, on s'est aperçu qu'à l'époque, elle nous faisait des faux documents pour croire qu'on avait un solde positif à la banque alors qu'en fait, il n'y avait pas d'argent."
20:32 "Donc quand je m'en suis aperçue avec le banquier, on l'a appelée d'urgence, elle s'est débrouillée avec le banquier et elle m'a remboursée le plus vite possible en me disant qu'il fallait surtout rien que je dise à Eric parce que ça lui poserait des problèmes et tout ça."
20:45 "Donc depuis cette période, j'étais un peu en froid."
20:48 "Certes, c'est une manipulatrice, c'est vrai, parce qu'elle tripatouille, mais tout le monde est au courant. C'est pas du tout Machiavel, Machiavel réussit. Machiavel, c'est la ruse réussie. Janine, c'est tout le contraire, c'est des trucs grossiers, grossiers."
21:04 Roger aurait-il fini lui aussi par découvrir la vérité ? Que sa femme lui avait menti pendant toutes ces années ?
21:11 "Ça nous crée une sorte de raison ou de mobile et on revient gentiment à penser que peut-être elle avait une bonne raison de faire disparaître son mari."
21:26 Ses soupçons vont être renforcés par un nouveau témoignage, celui de la femme de ménage des Gilbert.
21:35 "Elle connaît évidemment la maison du couple Gilbert par cœur et elle nous déclare qu'à la suite de la disparition de M. Gilbert, elle a remarqué dans la chambre du couple qu'un tapis avait disparu et qu'un pouf avait été recouvert différemment de ce qu'il était avant la disparition du mari."
21:55 "Elle nous fait part de ces éléments, comme ça, à toutes fins utiles, mais c'est vrai que ça nous amène sur l'éventuelle piste d'une bagarre."
22:06 Une bagarre qui aurait mal tourné. Piste d'autant plus plausible que Roger le brave homme, Roger le retraité tranquille, avait tendance à s'en porter.
22:14 "Mon père, il montait très vite en température et puis ça baissait très vite."
22:20 "Il claquait la porte ou il allait dans un coin bouder avec son journal ou il partait, mais un quart d'heure après il était revenu ou deux heures après il était revenu et tout repartait normalement."
22:30 Mais en admettant que Jeannine, qui n'est pas une force de la nature, ait pu venir à bout de Roger et de ses 95 kilos, comment aurait-elle pu se débarrasser du corps ?
22:41 "On se disait depuis le début, si Mme Gilbert a tué son mari et qu'elle l'a fait disparaître après, il y a bien quelqu'un qui est complice."
22:50 "Donc c'est ou un de ses fils ou une personne étrangère à la famille."
22:56 "Et on apprend qu'il existe donc un personnage dans le quartier qui a pour prénom Daniel et qui lui fait des petits travaux."
23:03 "Le but de notre enquête va être maintenant donc d'identifier ce Daniel."
23:07 Le Daniel en question est rapidement localisé. Il s'agit d'un ancien ouvrier de l'entreprise familiale qui est devenu l'homme à tout faire de Jeannine et qui a connu quelques ennuis avec la justice.
23:18 "Donc nous arrivons à un moment de l'enquête où nous avons des soupçons assez importants sur le comportement et notamment un mobile, un mobile éventuel d'un meurtre perpétré par Jeannine Gilbert."
23:35 "Nous avons évidemment le fonctionnaire de police à la base qui a déclaré à ses collègues que c'était la vieille dame qui avait tué son mari la veille de la déclaration de la disparition."
23:51 "Et on a identifié Daniel Lavev qui est susceptible d'avoir donné un coup de main à Mme Gilbert pour faire disparaître le corps."
24:01 "Donc nous décidons tout simplement d'interpeller tous ces gens et ça se fait le 14 octobre 1998."
24:10 Soit 6 mois après la disparition. Croyant tenir un éventuel complice, les enquêteurs ont en fait mis la main sur le témoin clé de l'affaire.
24:18 "Lui dans son édition nous déclare que le matin du 4 avril 1998, il est harcelé au téléphone par Mme Gilbert qui veut absolument qu'il vienne chez elle."
24:33 "Lui connaît Mme Gilbert depuis longtemps, il se dit oui elle veut encore me faire faire des petits travaux, ça peut attendre, j'ai des courses à faire."
24:42 "Donc il part faire des courses et en début d'après-midi il se présente chez Mme Gilbert qui lui explique, qui lui dit Daniel j'ai fait une grosse bêtise, j'ai tué mon mari et il faut que tu m'aides à me débarrasser du corps."
24:52 "Ce monsieur qui avait déjà des petits antécédents judiciaires a pas voulu, elle lui avait d'ailleurs proposé une somme assez dérisoire."
25:00 "Je crois qu'elle lui devait pour d'anciens travaux à peu près 20 ou 25 000 francs et elle lui avait proposé 1000 francs pour l'aider à se débarrasser du corps."
25:10 "Elle veut faire disparaître le corps parce qu'elle a toujours fait disparaître tout, tout ce qui la gênait, tout ce qu'elle ne pouvait pas assumer, tout ce qu'elle ne pouvait pas expliquer, il faut que ça disparaisse."
25:20 "Elle va demander à l'****, il est complètement catastrophé évidemment."
25:27 "Je lui dis il est hors de question que je vous aide à cette tâche et vous ne m'appelez plus, vous ne me parlez plus."
25:35 "Et elle lui fait des menaces en lui disant si tu répètes ça t'auras de mes nouvelles, tu gardes ça pour toi."
25:41 Mais pour Daniel le secret est trop lourd à porter et il ne va pas tarder à s'en décharger.
25:47 "Il se rend au café qu'il fréquente habituellement dans le quartier, le café La Fontaine, il y trouve donc des amis de bar à qui il raconte ça et c'est là qu'on lui dit bah écoute on va faire venir un ami policier que je connais, tu vas lui raconter."
26:03 L'ami policier en question est affecté au standard du commissariat de Livry-Gargan.
26:09 En milieu d'après-midi, le 4 avril 1998, il se rend au café Le Fontaine pour y rencontrer Daniel.
26:16 Mais il ne croit pas vraiment à cette histoire.
26:19 Alors il va lui proposer une solution qui selon lui ne mouillera personne.
26:23 "Il dit bah moi je prends mon service ce soir, à ce moment là passe moi un coup de fil et j'enverrai des effectifs, j'enverrai des effectifs sur place."
26:35 "Quand il prend son service le soir, Daniel Lavev déguisant sa voix en voix de femme appelle donc le commissariat disant qu'il y a peut-être un corps sous un véhicule à proximité du domicile ou enfin sans donner trop de détails."
26:48 "C'est comme ça qu'on ferme la boucle des déclarations du fonctionnaire de police."
26:52 Reste à interpeller le suspect numéro 1.
26:57 "La police me téléphone le mercredi vers 16h me demandant où est ma mère, elle est où votre mère ?"
27:05 "Bah j'ai écouté normalement ma mère récupère ma fille et mes enfants donc ils me le déposent à la maison et puis elle doit rentrer chez elle ensuite."
27:14 "Donc j'ai compris qu'il y avait un truc qui se passait donc j'ai appelé ma femme et à ce moment là c'est là qu'on a su que ma mère était arrêtée."
27:23 "Nous interpellons donc madame Gilbert à son domicile qui est en présence de sa mère qu'elle a en charge."
27:28 "Son comportement tout de suite nous paraît bizarre parce que quand on l'interpelle elle rentre de faire des courses."
27:35 "Elle a des sacs, on l'aide même à rentrer chez elle à lui porter ses sacs."
27:40 "On rentre donc dans son domicile où sa mère attend, sa mère qui est pas gravataire mais en très mauvaise santé qui est dans un coin de la pièce."
27:49 "Et immédiatement quand on rentre dans la maison elle nous dit à tous les enquêteurs présents surtout ne dites pas à ma mère que j'ai vendu sa maison."
27:59 "Donc nous ça nous choque immédiatement cette réflexion parce qu'on savait qu'elle faisait des malversations vis-à-vis de tout le monde, la famille, les enfants, son mari."
28:08 "Mais ça c'était un élément nouveau qui nous apparaissait."
28:11 "Et ensuite elle fait tout un jeu où elle nous culpabilise, elle interpelle sa mère au moment où on est avec elle dans la pièce en lui disant tu vois on va te laisser toute seule, tu vas te débrouiller, ils vont m'emmener etc."
28:25 "Personnellement quand je vois cette attitude je me dis tout de suite qu'il faut briser le lien entre elle et sa mère."
28:35 "Et j'ai l'idée immédiatement de faire venir les sapeurs-pompiers et de faire transporter sa mère, Mme Farbre, à l'hôpital."
28:43 "Je suis arrivé parce que en fait je suis arrivé voir ma mère, j'ai vu ma mère avec les menottes donc j'ai compris que c'était elle qui l'avait tuée."
28:52 Démarre alors pour Jeannine une garde à vue de 48 heures.
28:55 48 heures au cours desquelles il faudra 4 auditions et 2 perquisitions pour qu'elle fournisse enfin aux enquêteurs une version plausible des faits.
29:04 "Elle nous raconte la disparition de son mari comme elle l'a raconté à tout le quartier."
29:12 "Donc à savoir que de toute façon son mari il n'a pas pu lui arriver autre chose que de disparaître tel qu'elle l'a raconté."
29:19 "Puisque le soir même son fils mangeait à la maison et que son fils même a vu son mari à l'étage souffrant puisqu'il n'a pas mangé avec eux."
29:28 Patrick est effectivement persuadé que son père était là le soir du 4 avril.
29:33 Mais tout ce qu'il a vu en réalité c'est une porte fermée.
29:36 Jeannine l'aurait-elle fermée à dessein ?
29:39 "En quelque sorte elle s'est servie de ses propres enfants et c'était pas la première fois comme d'un alibi."
29:46 "Puis remontait simplement."
29:48 Car après sa première audition Jeannine Gilbert va se confier à une autre femme gardée à vue qui partage la même cellule qu'elle.
29:55 Et elle va lui avouer que Roger est mort le matin du 4 avril.
29:59 Après la première nuit de garde à vue, la codétenue de Jeannine demande à parler aux enquêteurs.
30:05 "On auditionne donc cette gardée à vue et par la suite évidemment nous reprenons en audition Mme Gilbert qui elle-même confirme toutes ses déclarations à la gardée à vue."
30:13 "Et Mme Gilbert, Jeannine lui explique qu'en fait ils se sont disputés dans le jardin de la maison."
30:18 "Qu'il a retourné sur elle une barre de fer qu'il avait pris dans le jardin et qu'elle pour se défendre a réussi à retourner la barre de fer et lui a mis un coup."
30:26 "Un ou plusieurs coups en état de légitime défense."
30:30 "Et qu'à la suite de ça son mari est tombé et qu'elle s'est rendu compte qu'il était mort."
30:35 "Et qu'en fait elle l'avait mis dans le coffre d'une voiture et balancé dans le canal de Lourdes que proche du domicile."
30:44 La raison invoquée par Jeannine pour expliquer cette dispute fatale colle parfaitement avec ce que l'on sait déjà d'elle.
30:50 Il s'agit d'un problème d'argent. Une fois de plus, une fois de trop.
30:56 "Roger, petit retraité, voulait changer de voiture."
31:01 "Et à cet effet il voulait casser un plan d'assurance vie qui avait été ouvert depuis un certain nombre d'années, peut-être depuis une quinzaine d'années."
31:12 "Et donc dont il pouvait disposer à sa guise."
31:15 "Tout le monde savait aussi, la voiture était commandée, que Roger se faisait une joie à l'idée de changer de voiture."
31:23 "Bon, on a les plaisirs qu'on peut et si c'était sa dernière belle fantaisie, pourquoi pas."
31:30 "Il faut qu'elle dise la vérité à Roger et elle va lui dire."
31:33 "Elle lui dit enfin, elle lui dit écoute non, il n'y aura pas, il n'y aura pas ce capital."
31:38 "On ne l'aura jamais parce que je n'ai pas payé."
31:40 "Et on peut très bien imaginer que cet homme qui ne l'a jamais frappé, et elle l'a dit, soit rentré dans une colère folle."
31:48 "Parce que il devait s'en vouloir aussi de ne pas avoir mis son nez là-dedans avant."
31:55 "À ce moment-là, Roger Dixit, Janine Gilbert serait entrée dans une grande colère et lui aurait dit que ça faisait trop."
32:10 "Que ce n'était pas la première fois et que cette fois-ci c'était fini, il fallait qu'elle s'en aille le lendemain avec sa mère."
32:17 Jeudi 15 octobre, deuxième jour de garde à vue.
32:21 Les enquêteurs retournent au domicile des Gilbert pour une perquisition détaillée en présence de la suspecte afin de vérifier sa première version du meurtre.
32:29 Cette fois, ils sont accompagnés par les techniciens de l'identité judiciaire.
32:34 "Lorsque nous sommes face à une scène de crime sans cadavre, donc la difficulté déjà est de vérifier l'importance des aveux circonstanciés du potentiel suspect."
32:45 "Il ne s'agit pas seulement d'avouer un crime, il va falloir vérifier l'authenticité et la véracité des propos tenus par le suspect."
32:53 Aucun indice ne permet de vérifier la thèse d'une bagarre dans le jardin.
32:57 Les policiers poussent donc leurs investigations à l'intérieur du pavillon.
33:01 "Nous observons dans la chambre, effectivement, que le pouf dont nous avait parlé la femme de ménage était recouvert d'un tissu bien plus neuf que le reste du pouf."
33:14 "Donc nous confirmons les déclarations de cette femme de ménage."
33:17 "Avec l'assistance de nos collègues de l'identité judiciaire, nous trouvons des traces rougeâtres, des traces marron sur la lampe de chevet, sur la tapisserie de la chambre."
33:29 "On trouve la barre de fer qui aide à fermer les volets."
33:32 "Et Mme Gilbert, dans ses déclarations, devant tous ces objets qu'on trouve, nous donne donc cette nouvelle version de la dispute dans sa chambre vers 4h du matin avec son mari."
33:43 "Elle nous dit, bah effectivement, c'est la barre de fer dont mon mari s'est servi pour me frapper."
33:48 "Et j'ai réussi à lui prendre la barre de fer des mains et je lui ai mis des coups de barre de fer, c'est là qu'il est tombé sur le lit."
33:54 "Et ensuite je l'ai descendu avec le tapis dans le garage."
33:57 Désormais convaincus qu'ils sont au coeur de la scène de crime, les policiers continuent de passer la chambre au peigne fin, à la recherche de nouveaux éléments.
34:05 "Nous faisons dans nos constatations une découverte macabre."
34:10 "Quand nous ouvrons la housse du matelas, nous découvrons qu'une des parties du matelas qui a été retournée est complètement imbibée de sang."
34:18 "Quand nous demandons à Mme Gilbert de s'expliquer à ce sujet, c'est là qu'elle nous dit qu'elle s'est défendue, qu'elle lui a mis trois coups de hachette qui s'est vidé de son sang sur le matelas."
34:30 "Et que ne pouvant pas faire disparaître le matelas, elle l'a laissé sécher toute la nuit et peut-être le lendemain."
34:38 "Et elle a recouvert ce matelas d'une housse neuve et qu'elle a retourné le matelas."
34:43 Dans cette nouvelle version du meurtre, la troisième que donne Janine, l'arme du crime n'est plus une barre de fenêtre mais une hachette.
34:50 Où Janine se l'est-elle procurée ?
34:53 "Quand on était plus jeune, on adorait tout ce qui était un petit peu couteau, épée, tout ça, des petites hachettes, des petites machettes qu'on mettait au-dessus des armoires."
35:02 "Ça nous sécurisait, comme on dit, et donc on savait qu'il y en avait une qui était au-dessus, sur l'armoire."
35:10 Au domicile des Gilbert, les enquêteurs vont saisir un véritable arsenal d'armes à feu et d'armes blanches.
35:16 Mais la fameuse hachette est introuvable.
35:19 Reste au technicien de l'identité judiciaire à vérifier le chemin que Janine dit avoir suivi pour emporter le corps de son mari.
35:26 "Pour ce qu'on appelle les traces latentes, donc les traces invisibles à l'œil nu, l'identité judiciaire est munie de matériel qui va permettre de pouvoir détecter des traces latentes."
35:40 "Donc recherche de traces papillaires, recherche de traces de sang, recherche de fibres, tout autant d'éléments qui vont pouvoir étayer l'enquête et faire coïncider ces éléments aux propos tenus par le suspect."
35:53 "Donc nos collègues de l'IGINE diffusent leurs produits à la fois sur le sol de la chambre, sur les murs, dans l'escalier, et nous disent 'demain matin on reviendra et on verra si ce produit a tourné au vert'."
36:05 "Mais l'escalier sera vert, certaines parties du sol de la chambre, au pied du lit aussi, le bas de la fenêtre, donc il y aura dans cette maison plusieurs parties qui auront tourné au vert et qui révéleront effectivement les traces de sang."
36:20 Les traces latentes indiquent que le corps de Roger a bien été traîné dans l'escalier. Janine était-elle physiquement capable de transporter un tel fardeau ?
36:29 "La reconstitution l'a montré, elle pouvait descendre un cadavre pesant environ 100 kg dans l'escalier en l'enroulant dans le tapis et en faisant glisser le tapis dans cet escalier pentu."
36:47 "Grâce au tapis, elle descend de son mari au sous-sol et là elle cherche à hisser le corps grâce à un système de cordes passées dans les tuyauteries du sous-sol pour soulever le corps et le mettre dans le coffre d'une des voitures garées dans le garage de la maison. Quelques jours plus tard, elle ira balancer le corps dans le canal de Lourdes."
37:08 "N'oublions pas que dans ce dossier, tout ce qu'on peut savoir c'est essentiellement par les déclarations de Janine Gilbert, laquelle on le sait aussi est une menteuse alors il faut tout prendre avec beaucoup de réserve."
37:20 Comme elle l'a déjà raconté à sa codétenue, Janine répète qu'elle a jeté le corps dans le canal au pont de l'Europe, à moins de 2 km de son domicile.
37:29 Les plongeurs de la brigade fluviale de Paris ont donc dragué le canal. Mais ils n'ont rien découvert. Une fois de plus, Janine a menti. Mise face à ces contradictions, elle capitule et livre aux enquêteurs la version qui sera finalement retenue lors de son procès.
37:45 "Elle avait caché son visage, ce qui semble assez cohérent. Elle ne peut pas le voir parce que sinon c'est vraiment lui. Alors que s'il y a un sac sur son visage, c'est un corps, c'est un objet, c'est un problème. C'est un problème qu'elle a. Et il faut qu'elle gère le problème.
38:13 Et quand on a un problème de 95 kg et qu'on n'arrive pas à le régler, quand on a un problème énorme et qu'on n'arrive pas à le régler, on le découpe, on le fractionne. Et elle tourne en rond, elle est dans le garage et là, elle va voir la tronçonneuse."
38:32 Elle a effectivement descendu le corps de Roger au garage. Elle a effectivement essayé de le hisser dans le coffre de la voiture. Mais elle n'y est pas parvenue. C'est là qu'elle a fait appel à Daniel. Devant son refus catégorique, elle n'a plus qu'une solution.
38:51 Janine désigne l'outil dont elle se serait servi pour découper le corps. Aussi épouvantable que soit sa déclaration, il faut, comme toujours, la vérifier. La tronçonneuse va être examinée par l'identité judiciaire.
39:06 "Sur cet instrument, divers examens vont être réalisés. Tout d'abord, une recherche de traces digitales. Ensuite, une recherche de traces génétiques. Soit grâce à du sang qui va être retrouvé, soit le sang de l'auteur qui se sera blessé ou le sang de la victime.
39:23 Soit d'autres éléments, comme par exemple des éléments pileux. Ça peut être un poil ou un cheveu appartenant à la victime et sur lesquels on va travailler pour essayer d'obtenir un profil génétique.
39:34 Mais également, considérant que la victime était habillée au moment du découpage, on peut encore retrouver des fibres de vêtements."
39:41 Entre les dents de la tronçonneuse, on retrouve un fragment de fibre textile. Les analyses concluront qu'elle provient du pyjama que Roger portait la nuit du 3 avril et révéleront également la présence de son ADN.
39:56 La tronçonneuse, la fibre, l'analyse des traces biologiques racontent la fin tragique de Roger Gilbert.
40:04 Quant à l'arme du crime proprement dite, elle ne sera jamais retrouvée. La suite des aveux de Janine, elle, fait froid dans le dos.
40:15 "Elle va découper très facilement parce qu'elle a l'habitude de découper des poulets, des rôtis. Elle découpe, elle s'est découpée."
40:23 "Elle nous déclare avoir découpé son mari en 4 parties. La tête, les bras et les épaules d'abord. Ensuite le buste lui-même et ensuite à hauteur des genoux."
40:34 On s'imagine bien sûr les fusions de sang qui résultent d'une telle opération. Mais aucune trace n'est retrouvée dans le garage.
40:41 Première explication fournie par Janine. Elle a disposé une toile cirée sous le corps avant de procéder au découpage.
40:48 De plus, elle l'a fait dans l'après-midi du 4 avril, soit une douzaine d'heures après la mort.
40:54 "On a passé un délai de plusieurs heures. Le sang aura coagulé et donc on n'aura pas forcément beaucoup de sang qui va s'extérioriser du corps."
41:04 "Et donc on aura sur la scène de crime, on aura peu de sang."
41:07 "La présence de sang que l'on va retrouver suite au découpage va dépendre également de la région anatomique qui a été choisie."
41:13 "Si c'est le cou qui est la zone découpée, on aura évidemment beaucoup plus de sang qui sera extériorisé que si le corps est laissé intact juste ici et découpé par exemple sous les bras."
41:25 "Tout dépend en fait de la région anatomique si c'est une région très vascularisée ou pas."
41:30 Reste encore pour Janine à se débarrasser des morceaux.
41:34 "Elle aurait mis les morceaux dans des grands sacs poubelles de 100 litres. Bon, on double."
41:43 "Les 15 sacs poubelles qu'elle rentre dans le coffre de voiture et elle sait que le mardi suivant, les poubelles de la ville passent et donc la veille, elle prend sa voiture."
41:54 "Elle fait le tour du quartier et dissémine les différents sacs poubelles contenant les morceaux du corps de son mari dans les différentes poubelles de la ville."
42:02 Janine Gilbert donne même les lieux exacts où elle a déposé les sacs.
42:06 Avenue Antonin Magne, Allégeant Baptiste Clément, Allégeant d'Arc.
42:11 Tous dans un rayon de 500 mètres autour du pavillon.
42:15 "Tous ces sacs poubelles de la ville sont baignés naturellement dans une décharge à ciel ouvert."
42:20 "C'est la raison pour laquelle dans cette affaire, on ne retrouvera jamais le corps, puisque même si on était intervenu immédiatement après les faits, le corps se serait déjà retrouvé sous 5-6 mètres de terre et de détritus."
42:35 "Et là, 6 mois plus tard, c'est impossible de retrouver quoi que ce soit."
42:39 "Lorsqu'il n'y a pas de corps, c'est priver l'enquêteur d'un élément essentiel."
42:44 "Le corps, ça permet de connaître les derniers instants de vie de la victime, de connaître la manière dont la personne est décédée."
42:50 "Lorsque le corps n'est jamais retrouvé, finalement, même si l'enquête est dite résolue parce que, aveu circonstancié, parce qu'on retrouve des éléments probants, eh bien l'enquêteur reste sur sa faim."
43:01 L'affaire restera à jamais comme un puzzle incomplet.
43:07 Jeannine finira par avouer que c'est elle qui, au soir du 4 avril, avait placé la chaussure sous une voiture pour faire croire à une disparition.
43:15 Mais elle a vraiment fait disparaître l'argent du ménage, l'arme du crime et les restes de son mari.
43:21 Au-delà de la frustration, les enquêteurs retiendront le caractère extraordinaire de l'affaire qu'ils viennent de résoudre.
43:30 "Notre ordinaire en Seine-Saint-Denis, c'est plutôt des cadavres qui découlent de règlements de contre, entre bandes, dans les cités, sur fonds de trafic d'armes, de drogues, mais rarement des affaires aussi gores, en fait, et dans des milieux bourgeois."
43:49 "Jeannine Gilbert, on la voit comme une mamie confiture, je dirais. C'est une mamie un peu enveloppée, avec une blouse des années 60 et des charantaises au pied.
44:01 Et ce décalage entre le personnage et la froideur qu'elle a pu démontrer dans tout son comportement avant et pendant son interpellation, on a des affaires comme ça trois, quatre fois dans sa carrière."
44:18 A l'issue de la garde à vue, le 16 octobre 1998, Jeannine Gilbert est mise en examen pour assassinat. Elle aura gardé son terrible secret pendant plus de six mois.
44:29 "Elle a fait semblant pendant six mois, en espérant encore, comme c'est écrit, que peut-être tout ça, ça avait été un cauchemar, peut-être ça n'avait pas existé, que peut-être Roger, il allait revenir.
44:41 Mais comme elle est effectivement clivée psychiquement dans cet espèce de masquage, elle arrive à donner le change. Et on ne voit pas, on ne comprend pas, on ne voit pas. On ne la voit pas s'effondrer. Et elle ne s'effondre pas."
44:56 Et elle laisse ses fils et ses belles-filles chercher Roger en vain.
45:00 "Au regard de cette activité qu'ils ont développé, déployé pendant six mois, ils auront le sentiment d'avoir été littéralement floués, qu'elles s'est véritablement moquées d'eux."
45:14 Mais ils ne sont pas au bout de leur surprise. Dans les semaines qui suivent l'arrestation, ils vont découvrir l'ampleur du désastre que Jeannine laisse derrière elle.
45:23 "La morale, je dirais, traditionnelle, on peut imaginer que ce qu'on a reçu de ses parents, on essaye de l'améliorer, sinon l'équivalent est peut-être même un peu mieux à ses enfants. Là, elle leur laisse zéro. Et des ennuis, mais vous n'imaginez pas."
45:39 "J'ai été arrêté que la première semaine, j'ai été voir aux impôts qu'il y avait quand même 6,5 millions de francs de dette, plus d'autre chose qui était bloquée au niveau des appartements de mes grands-parents, tout ça. Là, vous commencez à vous dire, là, il y a un gros problème."
45:53 "Roger Gilbert avait un petit portefeuille de valeurs au Crédit Lyonnais à Saint-Denis. Les relevés n'arrivaient pas à la date où ils auraient dû arriver. Jeannine Gilbert, comme elle avait procuration, leur faisait subir un petit retraitement, c'est-à-dire qu'elle les maquillait complètement.
46:12 Elle faisait figurer des montants tout à fait autres, puisqu'ils recevaient des relevés pour 1,7 million de francs et qu'au moment de la disparition de Roger Gilbert, il n'y avait plus que 400 000 francs. Il y avait 1,3 million de francs qui avaient disparu au passage.
46:28 Il faut savoir quand même que Jeannine Gilbert a escroqué absolument tout le monde dans sa famille, c'est-à-dire sa propre mère, son père aussi puisqu'elle avait oublié de déclarer quand même qu'il était mort en 1986 et qu'elle continuait à percevoir jusqu'à son interpellation et sa détention en 1998, 12 ans plus tard.
46:50 Elle continue à recevoir la retraite pleine de son propre père.
46:56 Elle a ruiné ses parents, elle a ruiné sa belle-mère et ruiné son mari. Et c'est le début de ruiner ses enfants. Et ça, je ne peux pas l'accepter.
47:06 Tout le monde a laissé faire, que ce soit les banques, que ce soit les syndicats, que ce soit les impôts. Ce n'est pas normal qu'on laisse faire les choses comme ça.
47:13 Donc il y a tout un patrimoine financier, c'est certain, mais ce n'est pas très grave. Et surtout tout un patrimoine psychologique qui est parti.
47:20 Ce qui fait que mes enfants, qui avaient 10 et 12 ans à l'époque, ont perdu tout leur repère psychologique quelque part. Et c'est très très très dur à reconstruire.
47:31 Jeannine Gilbert comparaît le 25 juin 2002 devant la cour d'assises de Seine-Saint-Denis pour l'assassinat de son mari Roger.
47:39 Or, elle a toujours dit qu'elle l'avait tué au cours d'une dispute. Les débats vont donc viser à lever le dernier doute qui subsiste dans l'affaire.
47:47 Certes, Jeannine Gilbert a fait croire à ses enfants que Roger était souffrant à l'étage alors que ses restes étaient déjà dans le coffre de la voiture.
47:55 Certes, elle a induit les policiers en erreur en déposant une chaussure dans la rue. Mais a-t-elle pour autant prémédité le meurtre de son mari ?
48:03 Une dispute tourne mal. Il est douteux que derrière on aille se lancer dans une comédie de disparition d'un chien qui revient tout seul, etc.
48:12 Et qu'on tienne tout l'entourage dans une telle angoisse pendant aussi longtemps alors que, bon, s'il n'y a pas véritablement l'intention de donner la mort, on n'a pas de raison de ne pas le faire savoir.
48:25 Je crois qu'on a confondu dans ce procès les actes postérieurs avec les actes antérieurs. L'assassinat, c'est la préméditation.
48:34 C'est je décide comment je vais faire et puis si je décide comment je vais faire et si je décide de tuer, je décide aussi de ce que je vais faire du corps après.
48:42 Et j'ai une solution. Mais Janine Fabre, elle a absolument pas de solution. Elle a tellement pas de solution qu'elle va tout de suite, 4 heures après les faits, elle va aller voir...
48:55 L'analyse des traces de sang retrouvées dans l'escalier montre qu'elles contiennent aussi l'ADN de Janine. Elle était donc blessée quand elle a traîné le corps, ce qui semble accréditer la thèse de la dispute.
49:06 La question du matelas va également retenir l'attention. Pourquoi Janine ne s'en est-elle pas débarrassée?
49:13 Rappelons quand même qu'elle n'avait pas hésité à faire coucher et à plusieurs reprises la fille d'Eric et d'Evelyne Gilbert sur le matelas même, qui était encore taché de sang et qu'elle avait retourné.
49:29 Et ça, ça passait très difficilement. Elle n'a pas planqué. Elle aurait pu raconter n'importe quoi. Elle avait souillé qu'elle aurait pu le jeter. Elle aurait pu faire ça. Elle n'a pas fait.
49:41 Elle dort dessus. C'est sa punition. Ça fait 6 mois qu'elle dort dessus. Mais ce qui va véritablement hypnotiser le jury et conditionner son verdict, c'est la dernière vérité concédée par Janine.
49:52 Sa vérité la plus terrible. On n'a que les déclarations de Janine. Et c'est Janine qui nous dit qu'elle l'a découpé à la tronçonneuse et qu'elle l'a mis dans quatre sacs poubelle.
50:04 Ça la dessert gravissimement. C'est ce qui va faire d'ailleurs toute la différence dans ce dossier. Et c'est ce qu'on ne peut pas lui pardonner.
50:11 Est ce que ses fils d'ailleurs ne peuvent pas lui pardonner? Ils ont dit au procès, ils parlaient d'elle en disant notre ex mère.
50:21 Après seulement trois jours d'audience et trois heures de délibération, Janine Fabre, épouse Gilbert, est reconnue coupable d'effet d'assassinat sur la personne de son mari.
50:31 Le jugement sera confirmé en appel. Elle est condamnée à 20 ans de réclusion criminelle.
50:45 Voici mes dernières volontés. Je sous-signé, Fabre Janine, épouse Gilbert, certifie avoir la volonté lors de mon décès de faire brûler mon corps et déposer mes cendres dans une poubelle de livres y gargant.
50:58 Fait à Fleury-Mérogis, le 24 janvier 1999.
51:03 Le jour de la mort de Janine Fabre.
51:08 Le jour de la mort de Janine Fabre.
51:13 Le jour de la mort de Janine Fabre.
51:18 Le jour de la mort de Janine Fabre.
51:23 Le jour de la mort de Janine Fabre.
51:28 Le jour de la mort de Janine Fabre.
51:33 Le jour de la mort de Janine Fabre.
51:38 Le jour de la mort de Janine Fabre.
51:43 Le jour de la mort de Janine Fabre.
51:48 Le jour de la mort de Janine Fabre.

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