• il y a 10 mois
Christine Kelly et ses chroniqueurs débattent de l'actualité dans #Facealinfo

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00:00:00 - Face à l'info, 19h, c'est l'heure. Nous n'avons pas de croissant paysan ce soir, mais nous avons du comté qui sera distribué au Mousquetaire.
00:00:10 Et qui l'a amené ce soir sur le plateau ? Je vous laisse réfléchir. Mettez un petit hashtag #facealinfo.
00:00:16 - Sur qui comptez ? - Sur qui comptez ? En attendant l'info avec Barbara Durand. Bonsoir Barbara.
00:00:23 - Bonsoir Christine, bonsoir à tous. Dans l'actualité, ce mardi, la révolte agricole gronde dans toute l'Europe.
00:00:30 Après la France, les agriculteurs belges multiplient les actions à travers tout le pays. Ils ont d'ailleurs prévu de se rendre à Bruxelles demain, veille d'un sommet européen extraordinaire en Espagne.
00:00:41 Ce mardi, les trois principaux syndicats agricoles ont eux aussi annoncé rejoindre le mouvement de colère des agriculteurs européens.
00:00:49 Une prime spécifique sera versée à tous les agents mobilisés pour les Jeux Olympiques de Paris l'été prochain.
00:00:55 Celle-ci pourra aller jusqu'à 1900 euros, a annoncé le ministre de l'Intérieur.
00:01:00 Elle concerne les policiers et les gendarmes travaillant en Ile-de-France. Gérald Darmanin s'est également engagé au paiement à 100% des heures supplémentaires.
00:01:10 Enfin, un trafic de faux documents d'identité démantelé dans 20 départements.
00:01:15 Trois hommes interpellés il y a une semaine à Marseille, Grenoble et Rouen-Nissoubois ont été mis en examen et écroués hier soir.
00:01:23 Ils sont poursuivis pour aide au séjour en bande organisée, fourniture et obtention indue de faux documents.
00:01:30 Merci Barbara et Osomer ce soir.
00:01:34 Les agriculteurs sont toujours en colère malgré les annonces du Premier ministre.
00:01:40 On en parle dans un instant. D'abord, comment analyser le discours de politique générale tant attendu de Gabriel Attal à l'Assemblée Nationale ?
00:01:48 Un discours de rupture ? Un discours de plus ? Un discours qui annonce l'action ? Un discours qui rassemble le pays ?
00:01:54 L'édito de Mathieu Boccuti.
00:01:57 "Notre agriculture est notre force et notre fierté", déclaration de Gabriel Attal parmi les nombreuses annonces envers les agriculteurs lors de son discours de politique générale.
00:02:07 Des moyens pour faire face à l'inflation, un fonds d'urgence débloqué, des mesures pour éviter la surtransposition de l'Union Européenne.
00:02:15 Mais les agriculteurs répondent qu'il n'y a rien de concret.
00:02:18 Sur le terrain, les manifestants poursuivent leur mobilisation et se rapprochent toujours du blocus de Paris.
00:02:26 L'analyse de Dimitri Pavlenko.
00:02:29 En cette période d'agitation des paysans où la plainte principale est le manque de gains pour les acteurs du secteur,
00:02:37 il y a des paysans heureux, on les trouve dans le Jura, et ils produisent un fromage devenu mythique, le comté.
00:02:43 Leur secret allié, la tradition et une relative modernité, mais l'équilibre est si fragile, le regard de marque le mot.
00:02:53 Si la France est la première puissance agricole en Europe, un produit alimentaire sur cinq de l'hexagone provient de l'étranger,
00:03:02 une tendance en hausse ces dernières années, les Français se disent prêts à préférer les produits français à ceux importés.
00:03:09 Mais quelle est la réalité de cette consommation aujourd'hui ? De sur quoi en pleine inflation ?
00:03:15 Est-ce un vœu pieux ? Est-ce réellement possible de consommer français ?
00:03:19 Le décryptage de Charlotte Dornelas.
00:03:22 Et puis, on fera un détour, une fois n'est pas coutume, au Texas en fin d'émission.
00:03:27 Le Texas est en conflit ouvert avec l'État fédéral américain.
00:03:31 Au cœur de cette querelle, un choc migratoire, l'État, dirigé par le gouverneur républicain Greg Abbott,
00:03:38 a décidé de s'occuper seul de sa frontière, bloquant ainsi l'accès aux agents fédéraux.
00:03:45 En quoi est-ce important ce qui se passe entre le Texas et Washington ? L'édito de Mathieu Bobcoutet.
00:03:53 On vient reprendre un peu de hauteur sur l'actualité avec le comté, emmené par Marc Menon.
00:03:59 Je vous dis tout. C'est parti !
00:04:13 Donc le comté emmené par le compteur. Vous êtes fiers de votre jeu de mots ?
00:04:16 Oh bah écoutez, ça coûte pas cher !
00:04:19 Donc il est là sur le plateau. Ça va Charlotte, l'odeur ne vous gêne pas trop ?
00:04:22 Non, pas du tout.
00:04:23 Elle est habituée, il y a la mienne, ça couvre.
00:04:25 Oui c'est ça. Le port de parcours, largement celle du comté.
00:04:29 Commençons par deux tweets de réaction. Ça va Charlotte, Dimitri, Mathieu ? Tout va bien ?
00:04:35 Tout va bien.
00:04:36 Deux tweets de réaction au discours de Gabriel Attal. On va longuement en parler ce soir.
00:04:39 Jean-Luc Mélenchon qui dit "Gabriel Attal est très content"
00:04:43 Non, pas Gabriel, Attal est très content car le peuple refuse d'admettre qu'il vit au paradis,
00:04:48 il punit durement les ingrats, suppression du SMIC, travail gratuit obligatoire pour le RSA, etc.
00:04:54 Le discours le plus réactionnaire depuis un siècle.
00:04:57 Ou encore, Jean-Luc Mélenchon, ou encore la réaction d'Éric Ciotti.
00:05:03 Le discours du Premier ministre a manqué de vision. Notre pays a besoin de réformes profondes et d'ambition sur la sécurité,
00:05:10 la baisse des prélèvements agricoles obligatoires, l'industrie, l'écologie.
00:05:15 Le conseiller en communication d'Emmanuel Macron a fait du marketing politique.
00:05:20 Je me tourne vers vous et dans un instant je vais faire écouter un petit sonore peut-être de Gabriel Attal et la souveraineté parce qu'il en a parlé.
00:05:27 Mathieu, beaucôté, le discours de politique des générales de Gabriel Attal était très attendu.
00:05:32 Aujourd'hui, en pleine crise agricole, quelle orientation a voulu donner le nouveau Premier ministre ce soir ?
00:05:40 Juste un élément de contexte nécessaire. Rappelons-nous, il y a quelques semaines,
00:05:44 enfin était-ce il y a quelques semaines, quelques mois, quelques jours, on perd le fil du temps, l'arrivée de Gabriel Attal à Matignon.
00:05:51 Il arrive et là c'était le moment, c'était, on en avait parlé, le concert, la symphonie des compliments.
00:05:58 À qui serait le plus louangeur ou flagorneur, bon, peut-être les deux, à son endroit ?
00:06:06 Ça en était peut-être même un peu gênant. C'est Saint-Gabriel, venez nous délivrer, vous êtes exceptionnel,
00:06:12 vous êtes puissant, vous êtes beau, vous êtes jeune, vous êtes intelligent, vous avez réussi à casser la baïa, vous êtes exceptionnel.
00:06:18 Et il y avait chez lui un parfum de modernité, un parfum, c'est l'homme, le jeune homme qui allait trancher.
00:06:23 Et là, boum, la crise archaïque, entre guillemets, qui surgit, celle des agriculteurs, qui ne semblait pas taillée pour Gabriel Attal.
00:06:32 Je dirais que dans l'imaginaire collectif, pour répondre à la crise des agriculteurs, on a davantage besoin de premier ministre
00:06:37 qui ressemblera à Gérard Larcher qu'à Gabriel Attal. La politique est chose d'incarnation et on a l'impression spontanément
00:06:44 que Gérard Larcher comprend mieux l'univers de la terre que Gabriel Attal.
00:06:49 Et pourtant, et pourtant, c'est lui qui est là et c'est lui qui doit répondre aux événements, donc il devait frapper fort.
00:06:55 Alors qu'est-ce qu'il a fait? Un discours très vigoureux, je pense que ce serait tout à fait malhonnête de ne pas le noter,
00:07:00 qui prenait tous les mots clés témoignants, cherchant à traduire l'exaspération des Français.
00:07:08 Les mesures, on y reviendra avec Dimitri, mais tout le code symbolique utilisé, mobilisé pour dire « je vous ai compris » aux Français était là.
00:07:17 Je reprends certains des termes, mais en fait tout relève d'abord du volontarisme.
00:07:22 C'est comme si nous étions dans une société absolument bloquée, c'est peut-être vrai, mais qui la gouverne depuis un temps,
00:07:27 une société tout à fait bloquée et là, le grand déblocage allait commencer.
00:07:33 Alors, sous le signe du volontarisme, souveraineté. Le mot est répété tout le temps ces temps-ci, souveraineté française et européenne.
00:07:39 Vous savez, je suis un esprit simple, je continue de croire qu'il y a une contradiction logique entre les deux,
00:07:44 mais apparemment le premier ministre ne le croit pas. Je lui laisse ses convictions, on verra de quelle manière il est possible d'avoir la souveraineté à Bruxelles et à Paris en même temps,
00:07:51 sans que les deux se contredisent, mais je crois qu'en Macronie, je pense que ça fait partie de la double radicalité complexe dont on nous avait parlé.
00:07:57 Mais, souveraineté, souveraineté, souveraineté, le discours est fort, donc c'est le retour de la puissance chez soi.
00:08:03 Nous ne serons plus dépendants, nous ne serons plus paralysés quand on envoie le mot souveraineté, c'est-à-dire le retour à la puissance.
00:08:11 Déverrouiller, ça c'est un autre terme utilisé, et on le comprend, le sentiment d'une société bloquée, d'une société suradministrée, surréglementée, surnormée,
00:08:21 d'une société étouffée où la moindre initiative de quelqu'un a besoin de l'autorisation de 492 000 fonctionnaires pour être certain d'avoir le droit de faire quelque chose,
00:08:29 il nous dit, nous allons déverrouiller. Il parle au monde de l'entreprise, de la petite entreprise, les TPE, les TME,
00:08:37 et vous allez pouvoir fonctionner entre vous sans devoir nécessairement passer par l'État ou par je ne sais quel corps de métier constitué, généralisé.
00:08:44 En gros, vous allez avoir le droit, en tant que citoyen d'une société libérale normale avancée, d'interagir entre vous sans passer par l'intermédiaire étatique.
00:08:53 D'un point de vue nord-américain, je le confesse, c'est ce qu'on pourrait appeler un gain élémentaire.
00:08:57 Mais, quoi qu'il en soit, pour Gabriel Attal, c'est une rupture importante.
00:09:01 Simplification. Simplification, encore une fois, on est dans le langage de la complexité administrative étouffante.
00:09:09 Il faut un autre choc de simplification. On les accumule et c'est toujours plus complexe ensuite.
00:09:13 Mais, quoi qu'il en soit, l'appel au choc de simplification est lancé.
00:09:16 Donc, il dit encore une fois, je vous comprends, vous qui souffrez de cette administration qui vous écrase, qui vous étouffe, je vous comprends, moi, et avec moi, ça va changer.
00:09:25 Désmicardiser. Le message est lancé, il faut rompre avec une société qui ne paie pas suffisamment ses gens.
00:09:31 Et ça va de soi. La France est un pays très riche qui paie très mal ses gens.
00:09:35 Alors, comment répondre à ça? Il dit, désmicardiser, nous allons rompre avec cette logique d'appauvrissement général, ce qu'on appelle aux États-Unis le "working poor",
00:09:44 c'est-à-dire vous travaillez pour vous appauvrir, ce qui n'est pas nécessairement la chose agréable dans la vie.
00:09:48 Maîtrise de la dette. C'est important la maîtrise de la dette. Nous allons protéger les générations qui viennent, nous allons cesser d'être écrasés,
00:09:55 et aussi, rupturer avec la logique de la taxation généralisée.
00:10:00 Donc, on va cesser de taxer, taxer, taxer tout le temps, imposer, imposer, imposer.
00:10:04 C'était un formidable discours, en fait, de David Lysnard, pardonnez-moi, de Gabriel Attal.
00:10:09 D'ailleurs, si j'étais républicain aujourd'hui, je serais un peu de mauvaise humeur, parce que je dirais, on vient de me piquer mon programme, encore une fois.
00:10:15 Ah, tout le monde vient de me piquer mon discours. Pour ce qui est du programme, on verra.
00:10:19 Mais le programme, le discours a été siphonné par Gabriel Attal.
00:10:23 Ça va encore plus loin, encore une fois, c'est intéressant.
00:10:26 Il nous dit, il faut offrir des services à ceux qui en manquent.
00:10:29 Donc, ce que ça veut dire, c'est que vous payez, vous payez sans arrêt, on vous encadre, mais finalement, quand vient le temps du service, vous ne l'avez pas.
00:10:35 Le message est assez clair. Donc, ça va très loin.
00:10:37 Et finalement, on pourrait dire que s'il y avait une philosophie qui inspire l'action gouvernementale de Gabriel Attal,
00:10:43 on pourrait l'appeler ainsi, ne plus nuire.
00:10:45 Plus l'État agit, plus il nuit.
00:10:48 Dès lors, je vous promets que nous agirons beaucoup pour ne plus agir.
00:10:52 Vous savez, c'est une promesse en fait pour bien des libéraux, c'est-à-dire qu'un gouvernement arrive en promettant d'abolir des lois régulièrement
00:10:57 et de ne plus jamais imposer la moindre taxe.
00:11:00 Bon, alors ça, il envoie tous ses messages. Il y a quelque chose d'un peu tachyrien là-dedans.
00:11:04 Ajoutez, c'est intéressant, l'appel à la vérité.
00:11:07 Il dit là, il faut se dire des choses, tout est bloqué, ça ne fonctionne plus, tout est foutu.
00:11:11 Il est temps de rompre avec cette culture du mensonge.
00:11:14 Il faut dire des choses. Ah oui, il faut aussi restaurer les valeurs, l'autorité, mater les violents,
00:11:19 mater ceux qui ne respectent pas les règles.
00:11:21 Il faut permettre le fait d'enseigner l'histoire, la culture de la France dans toutes les écoles de la République.
00:11:26 On doit rompre avec la censure en ces matières.
00:11:28 Il faut noter le constat de la fracture culturelle du pays.
00:11:32 Et on se dit, mais mon Dieu, ce chef de l'opposition est tout à fait remarquable.
00:11:36 Franchement, un discours aussi sévère à l'endroit de l'état d'un pays, ça prend un chef de l'opposition
00:11:42 qui depuis des années regarde les choses de l'extérieur,
00:11:45 depuis des années se dit, si j'étais aux manettes, moi je changerais tout.
00:11:49 Il se dit, depuis des années, si mon équipe était au pouvoir, franchement la France changerait.
00:11:54 Et là, le seul petit élément un peu étrange, c'est que voilà la même équipe qui est au pouvoir depuis si longtemps,
00:12:01 qui nous explique désormais qu'elle doit rompre avec tout ce qu'elle a fait, tout en demeurant dans la continuité.
00:12:06 Encore une fois, mon cerveau tourne ici avec des problèmes logiques.
00:12:09 Alors, à vous entendre, c'est un discours de rupture.
00:12:12 Oui, rupture, mais alors là vous me direz que je suis un peu moqueur.
00:12:15 Moi, je ne le suis pas du tout.
00:12:17 Pas du tout, non, pas du tout.
00:12:18 Jamais vous ne l'êtes d'ailleurs.
00:12:20 Ce n'est pas le style de la maison.
00:12:22 Mais ce qui est intéressant, c'est que tous ceux qui gouvernent la France depuis 2007,
00:12:26 il y a un point de départ là-dedans que je pense à Nicolas Sarkozy,
00:12:29 qui ont réussi, puis ensuite il ne s'agit pas de dire qu'ils ont eu tort ou raison, je note la constance des discours.
00:12:36 Pour quelqu'un qui veut émerger en politique en France, imprimer sa marque, il doit rompre.
00:12:43 C'est le point de départ.
00:12:44 2007, Nicolas Sarkozy, qui était par ailleurs ministre de Jacques Chirac, dit c'est la rupture,
00:12:49 c'est la rupture profonde, c'est la rupture avec les rois fainéants.
00:12:52 Donc moi, qui étais dans cette équipe, je romps avec cette équipe pour rendre possible l'action nécessaire pour redresser le pays.
00:12:59 Mais c'est aussi Nicolas Sarkozy, 2012, qui était président et qui dit je vais rompre désormais,
00:13:04 on va me laisser être moi-même, je ne gouvernerai plus en fonction des interdits qu'on m'a imposés depuis longtemps,
00:13:09 donc je romperai avec moi-même pour devenir moi-même et imposer la politique nécessaire pour la France.
00:13:15 Mais c'est aussi le discours d'Emmanuel Macron, 2017.
00:13:18 Je serai la rupture, plus que la rupture, la révolution et je vais même balayer la table, on va recommencer tout à zéro.
00:13:26 Sauf qu'Emmanuel Macron faisait partie lui-même d'une équipe gouvernementale,
00:13:30 donc il veut révolutionner et jeter par terre tout à quoi il participait à ce moment-là.
00:13:36 Et en 2022, il reprend l'argument Sarkozy, 2012, en disant là il me reste seulement un mandat,
00:13:42 je vais rompre, un seul quinquennat, je vais rompre avec moi-même pleinement pour devenir pleinement qui je suis,
00:13:48 mais mon moi-même ayant été entravé pour différentes raisons, je deviendrai enfin qui je suis.
00:13:53 Alors on pourrait être moqueur, je le dis, mais on pourrait aussi y voir, je vais faire ce que je ne suis jamais,
00:13:58 je quitte la sociologie pour la psychanalyse un instant.
00:14:01 C'est le moment d'un aveu, c'est-à-dire tous ces gens qui se présentent aujourd'hui,
00:14:06 en fait depuis 2007, sous le signe de la rupture alors qu'ils sont au pouvoir, qu'est-ce qu'ils nous disent?
00:14:11 Mais c'est un aveu, on l'évoquait hier, qu'ils n'ont pas le pouvoir.
00:14:13 Ils sont au pouvoir, mais ils n'ont pas le pouvoir.
00:14:15 Ils ont les apparences du pouvoir, ils ont l'institution du pouvoir, mais l'institution vidée du pouvoir.
00:14:21 Mais le vrai pouvoir est ailleurs. Il est à Bruxelles, dans les marchés financiers,
00:14:25 il est dans les cours de justice, il est un peu partout, sauf là où il devrait être,
00:14:28 c'est-à-dire là où il est connecté à la souveraineté populaire.
00:14:31 Alors ma petite hypothèse, en fait, c'est qu'il y a une forme d'aveu,
00:14:34 celui qui veut émerger en politique, celui qui veut surgir,
00:14:37 celui qui veut s'imposer est obligé d'avouer à tous, on est tous au courant,
00:14:42 qu'un système est plus puissant que nous, ce système nous écrase,
00:14:45 même quand on y participe, on le sent qu'il nous écrase, il faut se révolter contre lui.
00:14:51 Je note que toutes ces ruptures, pour l'instant, n'ont pas donné la grande rupture
00:14:54 qui rendrait possible l'autre politique dont on parle tant,
00:14:57 qui était celle de Jacques Chirac en 1995, soit dit en passant,
00:14:59 qui voulait lui-même rompre avec ce qu'il avait fait, avec la dure, depuis 1993.
00:15:03 Enfin oui, j'aurais pu remonter jusqu'à 1993, 1995.
00:15:05 Donc qu'est-ce qui se passe avec ça? C'est un incroyable aveu.
00:15:08 C'est-à-dire lorsque tous nos politiques disent « je veux rompre, rompre, rompre »,
00:15:11 ce n'est pas que de la com', c'est un aveu, ils avouent qu'ils n'ont pas le pouvoir,
00:15:15 qu'ils doivent le reprendre, le ressaisir, et pour l'instant, ça ne fonctionne pas,
00:15:19 ils ont échoué.
00:15:20 Mais Gabriel Attal, de ce point de vue, reprend cette rhétorique en disant
00:15:24 « c'est à mon tour, j'aurai une grande politique pour rompre ».
00:15:27 - Et c'est intéressant, petite parenthèse, parce que Gabriel Attal,
00:15:32 il nous a surpris lorsqu'il était ministre de l'Éducation nationale
00:15:36 pour nous montrer qu'il savait ce que c'est que la réelle rupture.
00:15:39 Et on l'attendait peut-être là, justement, sur une réelle rupture.
00:15:43 - Je crois que vous avez tout à fait raison, et ça va dans l'esprit.
00:15:45 En fait, qu'est-ce qui est la marque distinctive de ce discours de Gabriel Attal?
00:15:49 Je pense qu'il a compris là.
00:15:52 Personne ne pourra dire que nos dirigeants ne comprennent pas ce que veut le peuple.
00:15:56 Manifestement, ce discours est cadré pour répondre aux attentes profondes de la population.
00:16:01 Donc ne croyons plus, ne faisons plus l'erreur de croire
00:16:04 qu'ils sont entre eux quelque part à Bruxelles ou à Paris ou ailleurs,
00:16:08 et qu'ils ne comprennent pas. Non, ils comprennent.
00:16:10 Manifestement, ce discours, c'est le discours d'un homme qui a compris ce que veut la population.
00:16:15 La question est de savoir si de cette compréhension,
00:16:18 on est simplement un discours sur le mode rhétorique,
00:16:21 ou alors une véritable rupture politique qui viendrait de l'intérieur du système.
00:16:25 C'est toujours possible à l'échelle de l'histoire.
00:16:27 Est-ce que la rupture viendra là ou est-ce que la rupture viendra avec la rupture,
00:16:31 l'émergence d'une nouvelle classe politique?
00:16:33 Ça, c'est l'autre scénario.
00:16:34 Mais dans cet état d'esprit, il y a une rupture, cela dit, un contraste entre deux personnes,
00:16:38 entre Emmanuel Macron et Gabriel Attal.
00:16:41 Rappelez-vous la conférence de presse d'Emmanuel Macron il y a quelques jours, semaines,
00:16:46 on avait l'impression que c'était le conseiller technique universel.
00:16:49 L'homme qui sait tout et qui voulait nous expliquer que tout allait beaucoup moins mal qu'on le pense,
00:16:53 tout allait moins mal, et d'ailleurs le conseiller technique universel savait,
00:16:57 c'était la formule de Marlex qui était très dure, en ministre de tout, président de rien, c'était cruel,
00:17:01 mais que nous disait-il, le président de la République,
00:17:04 finalement ça va bien les enfants et je connais tout par cœur.
00:17:08 Mais aujourd'hui, que fait Gabriel Attal? Il fait un discours tout autre.
00:17:13 Il dit tout va très mal et je ne suis pas conseiller technique,
00:17:16 je fixe une vision, je fixe une orientation, je fixe un cap, je veux autre chose.
00:17:20 Le risque évidemment ce ne sont que des mots. Je citerai Véronique Besse,
00:17:23 qui est une députée de la Vendée, qui a résumé la chose d'un tweet, j'aimerais y croire.
00:17:28 J'aimerais y croire. Merci pour votre regard Mathieu Beaucoupté.
00:17:33 J'allais ajouter quelque chose, je l'ai pas, j'oublie.
00:17:37 C'est pas grave, ça reviendra.
00:17:39 Non, non, non, mais ça va pas. Pendant qu'il parlait, j'avais plein d'idées, mais bon, ça reviendra.
00:17:44 On va passer un petit sonore de Gabriel Attal avant de regarder un peu ce qu'il a dit aux agriculteurs ce soir.
00:17:51 Il a beaucoup parlé, vous le disiez, de souveraineté.
00:17:54 Écoutons un petit extrait de Gabriel Attal sur ce sujet.
00:17:57 Pour beaucoup de Français, l'avenir est davantage une crainte qu'une promesse.
00:18:01 Et encore trop de Français ont le sentiment de perdre le contrôle de leur propre vie.
00:18:05 Avec le président de la République, avec mon gouvernement, je ne m'y résous pas, je ne m'y résoudrai jamais.
00:18:11 Sous les ides du président de la République, l'identité même de cette majorité, de ce gouvernement,
00:18:17 c'est de reconquérir notre souveraineté française et européenne.
00:18:20 Notre promesse aux Français est claire.
00:18:24 Oui, nous voulons reprendre notre destin en main en ouvrant une nouvelle page de cette conquête.
00:18:28 Nous pouvons nous abuyer sur un bilan concret, tangible et solide.
00:18:32 Ce que je voulais vous dire, en fait, c'est qu'aujourd'hui aussi, Emmanuel Macron a parlé quelques instants avant Gabriel Attal,
00:18:39 avant son discours de politique générale, et où effectivement il a dit, bon, voilà, il a laissé comprendre,
00:18:45 exactement comme il y a une dizaine de jours, qu'on a bien conscience de ce qui se passe,
00:18:50 et sans véritablement apporter des solutions.
00:18:53 Qui est-ce qui veut ? Je vous donne la parole, mais peut-être Charlotte, une réaction de façon globale, peut-être ?
00:18:58 Sur cette question de la souveraineté, qui en effet a été répétée et répétée,
00:19:02 juste en résumé, Emmanuel Macron nous fait savoir hier qu'il va aller voir Madame Van der Leyen
00:19:07 pour discuter avec elle des possibles aides à donner aux agriculteurs,
00:19:11 donc il va quand même là où ça se passe, apparemment, c'est quand même ça l'annonce.
00:19:14 Il nous explique, en étant en Suède dans sa conférence de presse,
00:19:17 que la France s'oppose au traité sur le Mercosur, et on nous laisse entendre la petite musique,
00:19:22 on nous laisse entendre dans le débat public qu'il a obtenu la suspension de cet accord-là.
00:19:26 On a le porte-parole de la Commission européenne qui vient dans la foulée faire une conférence de presse en disant
00:19:31 "les accords sont toujours en cours de négociation aujourd'hui à l'heure où on parle",
00:19:35 et à la fin on a Emmanuel Macron qui vient nous expliquer que ça sert à rien de tout mettre sur le dos de l'Europe.
00:19:40 Bon, moi, c'est exactement pour moi, cette chronologie-là résume le hiatus qu'il y a entre la souveraineté française et européenne
00:19:48 qui dans un même temps ne peuvent pas se défendre.
00:19:50 Dimitri.
00:19:51 Moi je trouvais globalement, il a été à bonne école pour ce discours, parce qu'il y avait un peu de Thatcher,
00:19:56 Mathieu l'a dit, il y avait aussi un peu de Churchill, parce qu'il a dit aussi,
00:20:00 enfin, ça va pas être facile, la sueur du sang et des larmes,
00:20:03 il a pas dit dans ces termes-là, mais c'est à ça que ça ressemblait.
00:20:06 Il a fait le tableau d'une catastrophe généralisée, et la question est de savoir si derrière c'est Hercule,
00:20:10 est-ce qu'il va arriver à remporter tous ses paris, à déblayer ce terrain très compliqué qu'est devenu la France,
00:20:18 ou est-ce que c'est Sisyphe ? Est-ce qu'il va pousser ça en son rocher, puis ça retombera, il se passera rien,
00:20:22 comme on a souvent l'impression que ça se passe.
00:20:25 Pas uniquement Thatcher, à côté un peu gauche, lorsqu'il parle des logements,
00:20:30 moi je trouve ça formidable qu'il ait ce souci, la conscience,
00:20:35 il y a 400 000 personnes qui vivent dans des taudis, dans l'insalubre aujourd'hui,
00:20:39 et il dit "nous irons jusqu'à reprendre des locaux de bureaux pour aménager et que les gens soient dans une dignité".
00:20:49 - Ça fait des années qu'on dit qu'on va le faire et que ça se passe bien.
00:20:53 - Oui, d'accord, mais il le dit, j'essaie de m'inscrire dans la perspective où il agirait.
00:20:57 Le deuxième point, Mathieu l'a dit tout à l'heure, c'est qu'au niveau de l'enseignement,
00:21:02 redonner la noblesse à l'histoire, à la langue, et le fait de prendre en considération les gamins,
00:21:09 s'ils ne sont pas capables d'être intégrés, on les mettra dans des internats, dans des pensionnats,
00:21:16 quel que soit le prix, pour leur donner une deuxième chance.
00:21:19 - Alors comme disait Mathieu Bocote, c'est un peu du "je vous ai compris",
00:21:22 et on va maintenant s'arrêter un peu sur le regard qu'il a porté sur les agriculteurs.
00:21:27 Dimitri, j'ai quand même l'impression que c'est une sorte de confirmation des mesures qu'il avait déjà annoncées vendredi,
00:21:34 des petites précisions, on sait une chose, c'est que les agriculteurs ce soir disent "voilà, il n'y a rien de concret,
00:21:39 on continue, on se rapproche du blocus de Paris".
00:21:42 Qu'est-ce qu'il a dit concrètement, Dimitri, pour les agriculteurs ce soir ?
00:21:45 - Ils sont un peu durs parce que quand même il y a du concret, il y a des choses pour la fin de la semaine.
00:21:49 - C'est ça, qui ont été précisées.
00:21:51 - Oui, bien sûr, il y a eu déjà des annonces vendredi, il y en a un peu plus aujourd'hui, il y en aura encore un peu jeudi,
00:21:56 voilà, ça arrive comme ça par petits paquets.
00:21:59 Alors moi j'ai trouvé que sur les agriculteurs ça avait bien commencé avec, dès les premières minutes,
00:22:03 il dit "il faut une exception agricole française".
00:22:06 Et là on se dit "oh super", enfin enfin le choc attendu, cette exception que les Danois ont eue sur l'immigration,
00:22:12 que les Espagnols ont eue sur l'énergie, et bien Emmanuel Macron il va aller la chercher à bout de ses...
00:22:16 - Et que nous avons c'est la culture.
00:22:17 - Voilà, il va aller l'arracher pour les agriculteurs, sur la question des normes, sur la question des accords internationaux,
00:22:22 c'est ça qu'il contient très concrètement.
00:22:24 C'est pas une rupture avec l'Europe, mais enfin ça veut dire quand même des réaménagements.
00:22:29 Et alors il attaque comme ça, dès les premières minutes du discours,
00:22:32 et il dit ça au moment où il parle de la nécessité d'avoir des actes rapides et concrets, des changements, tout de suite,
00:22:38 et il dit "reprendre notre destin en main".
00:22:40 Et alors là évidemment quand on a un peu de culture politique, on pense à quoi ? On pense Brexit !
00:22:45 C'était, je veux dire, "take back control", reprenons le contrôle,
00:22:48 c'était l'essence même, si vous voulez, l'injonction du Brexit, de tourner autour de ça.
00:22:54 Et après il continue, il parle aussi beaucoup d'identité française,
00:22:57 il lie la question agricole à l'identité française, il le répète au moins 3 ou 4 fois en l'espace de 5 minutes,
00:23:02 et puis il promet que le gouvernement sera au rendez-vous sans aucune ambiguïté de la crise agricole.
00:23:08 Donc il envoie des signaux, il emploie les bons mots, c'est ce qu'a dit Mathieu.
00:23:11 Et puis en fait l'ambiguïté très vite elle arrive.
00:23:13 Alors elle arrive comment ?
00:23:15 Elle arrive parce qu'en fait il faut attendre près d'une heure avant que les agriculteurs aient droit à leurs annonces spécifiques.
00:23:21 Alors moi je pense qu'il y a une intention politique, il y a une volonté de Gabriel Attal de dire aux agriculteurs
00:23:26 "vous savez beau assiéger Paris, on ne va pas se rouler par terre, on ne va pas se mettre à genoux pour satisfaire vos revendications".
00:23:33 Je pense que c'est un peu ce que disait Emmanuel Macron juste un peu avant, il donnait déjà un peu le la.
00:23:37 Donc pour vous dire, le discours de politique générale de Gabriel Attal, il tient sur 56 pages, c'est page 44 l'agriculture.
00:23:45 Vous voyez, ça arrive quand même assez tard.
00:23:47 Et ça arrive après l'écologie, donc ça dit quelque chose aussi de l'ordre des priorités, et avant les droits des femmes.
00:23:54 Vous voyez, donc c'est un peu entre le fromage et le dessert.
00:23:57 Et c'est-à-dire que les agriculteurs à travers ça, quelque part, sont ramenés à ce qu'ils sont en effectif,
00:24:03 c'est-à-dire moins d'un demi-million de Français, si vous voulez.
00:24:07 C'est donc une catégorie sociale qui, malgré tout, reste petite, étroite, et qui a tendance à s'amenuiser.
00:24:14 Il y a ce message implicite qui est envoyé aux agriculteurs, mais il faut bien le dire, quand même,
00:24:19 ce sont eux qui ont le droit au plus grand nombre d'annonces spécifiques,
00:24:22 en réponse évidemment à la question, à leurs revendications du moment, sous le label,
00:24:27 alors évidemment c'était un peu couru d'avance, du réarmement agricole.
00:24:31 - 14 fois dans son discours, le mot réarmement.
00:24:33 - Avec une mise en garde, il le dit très tôt, au moment où il aborde la question des mesures pour les agriculteurs,
00:24:37 il dit "j'assume de dire que tout ne sera pas réglé en quelques semaines,
00:24:41 j'assume de dire que les chantiers sont complexes et que pour certains, il faudra y travailler encore et encore".
00:24:46 Bon, ben c'est vrai, je veux dire, on ne va pas résoudre des questions aussi difficiles que la question des normes,
00:24:50 du rapport à l'Union Européenne, etc., en l'espace de trois jours.
00:24:54 - Alors justement, les annonces, on va s'arrêter dessus.
00:24:58 Et on a l'impression, ce soir Dimitri, que les agriculteurs, ils attendent des réponses là, tout de suite,
00:25:05 et que lui le gouvernement lâche un petit peu, un peu comme le petit pousset, un petit peu ici,
00:25:11 un on va peut-être faire croire qu'il va sortir quelque chose jeudi du sommet européen,
00:25:16 pour un peu, vous voyez, pour un peu diluer le mouvement, non ?
00:25:20 - Non, je ne pense pas, je pense que c'est effectivement très compliqué comme crise,
00:25:23 ils ne sont pas idiots, les agriculteurs, ils savent qu'il y a des points dans leur revendication qui ne sont pas faciles
00:25:28 et qui vont prendre effectivement beaucoup de temps.
00:25:30 La question du Mercosur, le bras de fer que ça suppose d'engager avec la Commission Européenne,
00:25:34 ils savent très bien que ça va être compliqué.
00:25:36 Ce sont des gens qui sont éduqués, les agriculteurs, ils savent tout ça.
00:25:39 Alors les annonces. - Alors les annonces, on marque une pause justement,
00:25:42 et on attaque sur les annonces pour bien comprendre pourquoi les agriculteurs sont encore en colère à l'heure qu'il est
00:25:50 et se rapprochent de la capitale pour le blocus de Paris. A tout de suite.
00:25:54 Retour sur le plateau de Face à l'Info, je dis à Mathieu Bocoté que j'avais remarqué sa cravate qui est exceptionnelle.
00:26:02 - Ah bah merci, j'en suis très touché. - Et elle est neuve en fait, ou bien ?
00:26:05 - C'est la première fois que je la porte, oui en effet. - Oui, oui, je vois tout.
00:26:08 - Vous avez tout vu. - Mais oui, je vous ai à l'oeil tous.
00:26:10 - Vous avez compris, parce que nous on n'a jamais eu moins de compliments sur nos tenues.
00:26:15 - Merci mon Marc, je sais que vous avez toujours la même cravate.
00:26:17 - Mais pas vrai, elle change. Aujourd'hui c'est une rouge, demain ça sera une bleue, après il y a une bleue clé.
00:26:24 - Oui mais ce sont les mêmes, je te connais, vous en avez trois.
00:26:27 - Dimitri, avant de parler des annonces de Gabriel Attal, on va écouter un petit extrait tout à l'heure.
00:26:32 C'est intéressant lorsqu'il dit "l'agriculture c'est le fondement de notre identité".
00:26:36 C'est ce qu'on a dit nous sur le plateau à plusieurs reprises. Discours de séduction, écoutons.
00:26:41 - Notre agriculture est une force. Pas simplement parce qu'elle nous alimente au sens propre du terme,
00:26:47 mais parce qu'elle constitue un des fondements de notre identité, de nos traditions.
00:26:51 Parce que nos agriculteurs incarnent des valeurs fondamentales,
00:26:55 et lorsqu'elles sont bridées, fragilisent l'ensemble de la société.
00:26:59 Je pense à la valeur travail, à l'effort et à la liberté d'entreprendre.
00:27:03 Notre agriculture est une force, et notre fierté aussi.
00:27:07 Alors je le dis ici solennellement, il y a et il doit y avoir une exception agricole française.
00:27:13 - Alors Dimitri, quelles sont les annonces concrètes ce soir pour les agriculteurs qui restent en colère et assoiffés ?
00:27:20 - Alors je dirais qu'il y a des annonces d'urgence, c'est le gros des annonces qu'il a faites.
00:27:25 Il y a des annonces de moyen et de long terme, mais surtout de moyen terme.
00:27:28 Et puis en substance, il y a les annonces cash, c'est-à-dire l'argent, vraiment, et puis des annonces marteaux.
00:27:33 Alors l'annonce marteaux, il a commencé par ça d'ailleurs, la répression des fraudes.
00:27:37 Il nous annonce qu'on a 100 inspecteurs de la DGCCRF, donc la répression des fraudes,
00:27:41 qui vont arriver, on va doubler les effectifs de contrôleurs de la DGCCRF
00:27:45 pour aller contrôler les industriels et les magasins qui ne respectent pas la loi EGalim.
00:27:49 Vous savez, c'est ce train de loi qui est censé sanctuariser, dans le prix des produits alimentaires,
00:27:55 la part qui doit revenir aux agriculteurs.
00:27:57 Et effectivement, souvent ça arrive que ceux à qui on rogne la marge, ce sont les agriculteurs.
00:28:02 Ceux dont ils se plaignent depuis des années, et ces lois EGalim, ça fait quand même 5 ans qu'elles existent,
00:28:07 visiblement, ils ont du mal à être appliquées, parce que la preuve, il faut doubler les effectifs des contrôleurs
00:28:12 pour le faire appliquer.
00:28:14 Et ça se double de la promesse de mise en place d'un système que je qualifierais de Robin des bois,
00:28:20 avec cette idée que ces inspecteurs à la répression des fraudes, qui infligeront des amendes,
00:28:25 que ce soit aux industriels ou à la grande distribution, on va faire une cagnotte,
00:28:29 et cet argent des amendes, on va les reverser aux agriculteurs.
00:28:34 Je ne vous cache pas qu'il y a une part de démagogie assez importante là-dedans,
00:28:37 parce que c'est le petit refrain qu'on entend tout le temps,
00:28:39 "la grande distribution elle se gave, la grande distribution elle s'en met plein les poches".
00:28:42 Je rappellerais une chose, c'est que la marge nette, la grande distribution en France,
00:28:46 c'est entre 1 et 2%. C'est pas tant que ça, finalement.
00:28:50 - Qui se gave ?
00:28:52 - On sait que l'an dernier, en 2022-2023, l'agro-industrie,
00:28:57 ceux qui transforment les produits alimentaires, ont augmenté leur marge de manière assez importante,
00:29:02 de 28 à 48% de marge brute, c'est-à-dire avant d'avoir payé ses impôts, etc.
00:29:07 Mais la grande distribution en elle-même, c'est M. Carrefour, M. Leclerc, M. Auchan,
00:29:12 en réalité, ils n'ont pas une marge si conséquente que ça.
00:29:15 Mais bon, évidemment, c'est chez eux que tout se vend, donc c'est eux qui prennent.
00:29:19 Et puis, c'est un bouc émissaire bien commode.
00:29:21 Les agriculteurs ne sont pas dupes non plus de cette manœuvre-là,
00:29:23 qui a été mise en place à destination du grand public,
00:29:26 ce week-end, en disant "M. Leclerc, c'est pas bien, M. Leclerc".
00:29:28 Vous l'aurez remarqué.
00:29:30 Voilà. Donc ça, c'est la mesure marteau, si je puis dire.
00:29:32 Après, les mesures cash, les mesures de trésorerie.
00:29:35 Alors, il y en a plein. Bon, je passe un peu, parce que c'est un peu technique,
00:29:38 mais par exemple, vous savez l'histoire du GNR, le gasoil non routier qu'on met dans les tracteurs.
00:29:44 Il y a tout un système très compliqué, où ils récupèrent une partie de la taxe carbone, la TICPE.
00:29:49 Bon, ben voilà, on va avancer la trésorerie à partir de février.
00:29:52 Ça, c'est les mesures pouvoir d'achat, si vous voulez, pour les agriculteurs.
00:29:55 Il y a un guichet qui va être mis en place pour prendre en charge 90%
00:30:00 de tous les frais concernant la fameuse maladie bovine MHE.
00:30:04 Vous savez, c'est la maladie qui pourrit les yeux des vaches et qui crée une certaine mortalité.
00:30:08 Les aides à la PAC. Alors ça, c'est intéressant.
00:30:10 Il a annoncé que ces aides de la PAC, elles seront versées d'ici le 15 mars sur les comptes bancaires des exploitants.
00:30:15 Il l'a dit comme ça.
00:30:16 Ça, c'est intéressant, parce que le vrai point de départ du mouvement des agriculteurs, c'est quoi ?
00:30:20 Et bien, c'est que depuis cet automne, l'argent de la PAC, qui d'habitude arrive comme ça tous les automnes,
00:30:24 ben là, il n'arrive pas, parce qu'on a une réforme du système PAC, avec justement prise en compte
00:30:28 est-ce que vous faites les achats de 4% comme on vous dit de le faire ?
00:30:31 Si vous ne le faites pas, vous ne touchez pas l'argent de la PAC.
00:30:33 Ça, ça met les agriculteurs absolument hors d'eux.
00:30:35 Et les aides de la PAC, c'est chiffrerine C.
00:30:38 En 1991, l'argent de la PAC, ça représentait 18% en moyenne du revenu,
00:30:44 du résultat avant impôt d'une exploitation agricole.
00:30:47 18% en 1991, c'est 138% aujourd'hui.
00:30:51 C'est-à-dire qu'une exploitation, 2 fois et demi, 50 à 60% de ce que gagne une exploitation, c'est l'argent de la PAC.
00:31:00 C'est vraiment cette assistance sociale européenne qui est devenue la politique agricole commune pour les agriculteurs.
00:31:06 Et ça, évidemment, pour eux, c'est inacceptable.
00:31:08 C'est une perte de sens totale du métier.
00:31:10 Après, il y a un fonds d'urgence qui va être créé pour les viticulteurs d'Occitanie, etc.
00:31:15 Donc ça, c'est pour les mesures sonnantes et trébuchantes.
00:31:17 Après, vous avez des mesures de simplification.
00:31:19 C'est le gros sujet pour les agriculteurs.
00:31:22 Il a cité l'exemple de la Haute-Garonne, où il s'est rendu vendredi.
00:31:26 Il a dit "on a mis les agriculteurs face au préfet, ils ont supprimé 4 arrêtés,
00:31:30 bon ben voilà, ça on va le faire par exemple dans tous les départements".
00:31:33 Vous voyez, ça c'est le côté très concret.
00:31:35 C'est le côté Gabriel Attal, le ministre, je dis, je fais et on passe à autre chose.
00:31:40 Et puis, un plan de contrôle, de traçabilité des produits, etc.
00:31:44 Et puis arrive le niveau européen.
00:31:46 Alors là, c'est un peu plus flou, je ne vous le cache pas.
00:31:49 Donc c'est l'histoire des jachères, les histoires du Mercosur.
00:31:52 La question aussi des importations ukrainiennes.
00:31:54 Vous notez, c'est très récent, ça fait deux jours,
00:31:56 qu'on commence à avoir cette petite musique de remise en cause de ce cadeau qu'on a fait.
00:32:01 Pardonnez-moi le mot de cadeau, je ne suis pas sûr qu'il soit très bien adapté.
00:32:04 De permettre aux Ukrainiens de vendre leurs produits agricoles sans droit de douane,
00:32:08 pour les aider à financer leur effort de guerre.
00:32:11 Et bien, ça commence à être remis en cause,
00:32:13 parce qu'on sait que nos betteraviers, par exemple, qui font le sucre,
00:32:16 souffrent énormément de cette concurrence-là.
00:32:19 Les poulets, on parle beaucoup aussi du poulet ukrainien.
00:32:21 Mais bon, il est un peu flou, Gabriel Attal,
00:32:23 parce que ça, ça dépend d'Emmanuel Macron, qui va négocier ça au niveau européen.
00:32:28 Et il n'y a pas du tout de garantie que ça aboutisse.
00:32:31 Mais on a un peu cette image, à la fin, d'un Gabriel Attal, en gros, premier agriculteur de France.
00:32:37 Comme le ministre de l'Intérieur serait le premier flic de France.
00:32:39 Gabriel Attal, il termine avec cette phrase,
00:32:42 "Nous ne laisserons pas faire, notre détermination est totale."
00:32:45 Total ! Il le dit deux fois.
00:32:48 Alors ça, c'était les annonces spécifiques, Dimitri Pavloko.
00:32:53 Il y a également eu des annonces de portée plus générale,
00:32:56 qui concernent aussi les agriculteurs.
00:32:58 Absolument. Et alors là, c'est tout le passage libéral du discours,
00:33:01 qui n'avient plus à Mathieu. Moi, j'ai bien aimé aussi.
00:33:03 Quand il parle de la débureaucratisation,
00:33:06 alors là, copyright, David Lissnard, le maire de Cannes.
00:33:09 Parce que, alors c'est frappant, il a repris, Gabriel Attal,
00:33:12 tout ce que dit David Lissnard tout le temps.
00:33:14 Par exemple, David Lissnard ne cesse de dire,
00:33:16 "Le poids de la bureaucratie, ça coûte 60 milliards par an à la France."
00:33:19 Bon, et Gabriel Attal dit exactement la même chose.
00:33:21 Il a dit, "Dans l'Égypte-France", c'est-à-dire qu'il compile à peu près
00:33:24 toutes nos législations, "il y a 44 millions de mots."
00:33:27 Bon, et Gabriel Attal dit exactement la même chose.
00:33:29 Et puis là, il nous a fait toute une série de slogans,
00:33:31 mais regardez comme ça sonne bien aux oreilles.
00:33:33 "La bureaucratie qui recule, ce sont des projets qui avancent."
00:33:36 "Trop de délais, c'est moins de projets."
00:33:39 "Laisser vivre les Français, c'est du miel aux oreilles."
00:33:42 Et puis après, il a promis plus de croissance, moins d'impôts.
00:33:46 "Quand on taxe tout, il n'y a plus rien du tout."
00:33:48 Vous voyez, c'est très fort en termes de slogans.
00:33:51 Mais enfin bon, ce sont des mots d'amour,
00:33:53 mais maintenant on va attendre l'épreuve d'amour.
00:33:55 Et là, je vous avoue qu'à la fin du discours,
00:33:57 vous savez, c'est ce qu'on appelle dans le discours la péroraison.
00:33:59 C'est le moment où on conclut, on est censé enlever tout ça.
00:34:01 Là, il nous dit, Gabriel Attal,
00:34:03 "Nous ne serons jamais, nous la France, une puissance moyenne."
00:34:06 Alors là, moi, je me suis dit, mais qu'est-ce qu'il raconte ?
00:34:08 Et ça fait combien d'années, combien de décennies,
00:34:11 combien de siècles que la France est une puissance moyenne ?
00:34:13 Semble-t-il, lui ne l'a pas remarqué.
00:34:15 - Merci pour votre analyse, Dimitri Pavlenko.
00:34:18 En cette période d'agitation des paysans,
00:34:20 où la plainte principale est le manque de gains,
00:34:23 on a vu qu'il a essayé d'y répondre.
00:34:25 Pour les acteurs du secteur, il y a des paysans heureux.
00:34:28 On les trouve dans le Jura, je le disais en titre.
00:34:30 Et ils produisent un fromage devenu mythique, le comté.
00:34:32 Alors, je vous disais, Marc Menand,
00:34:34 menez le comté sur le plateau.
00:34:36 Leur secret, vous allez nous expliquer.
00:34:39 C'est leur secret, c'est allié à la tradition et à une relative modernité.
00:34:43 Il va nous dire à quel point l'équilibre est fragile.
00:34:46 - Je vais vous raconter l'histoire du comté.
00:34:48 - Avant, donnez-nous un peu de comté.
00:34:50 - Alors, vous allez voir.
00:34:51 Ce qui est formidable, c'est que le comté, c'est l'authenticité.
00:34:56 C'est la non-industrialisation.
00:34:58 C'est comment s'attacher aux terres noires
00:35:00 et faire en sorte qu'ils puissent se poursuivre, en quelque sorte.
00:35:05 Et là, c'est à la fin...
00:35:07 - On envoie du papier, mon chéri.
00:35:09 - C'est avec un meilleur ouvrier de France.
00:35:11 C'est-à-dire que du début à la fin, vous êtes dans le meilleur.
00:35:15 Alors, je ne sais pas ce qui se passe,
00:35:17 parce que théoriquement, ça va être écoupé...
00:35:19 Ah, si, vous allez avoir chacun une petite tranche.
00:35:21 Allez-y, ma chère Charlotte.
00:35:23 - Ah oui, c'est magnifique.
00:35:24 - Une petite tranche.
00:35:25 - Je vais que je fasse le...
00:35:26 - On le fait passer.
00:35:27 - Et pendant que vous savourez, vous me donnez votre avis,
00:35:30 c'est un comté de 18 mois.
00:35:32 J'ai hésité entre le comté de 18 mois et le comté de 30 mois.
00:35:37 - Vous êtes généreux. Vous avez été chez...
00:35:39 - Vous aurez après chacun votre petite palette pour rentrer chez vous.
00:35:42 - Donnez-moi ma palette.
00:35:43 - Directement.
00:35:44 - Parce qu'on ne peut pas manger tout de suite, on va partir.
00:35:46 - C'est important. Pourquoi 18 mois ?
00:35:49 Parce que moi, j'aime bien celui de 24 mois.
00:35:52 Sauf que les mois ne veulent pas toujours dire quelque chose.
00:35:55 Ce qui compte, c'est le moment où la vache est dans le pâturage.
00:35:59 Ouvrez la fenêtre.
00:36:01 Oubliez les immeubles qui sont face à vous.
00:36:04 La laideur disparaît.
00:36:06 Nous nous propulsons dans le Doubs, à l'est de l'Ain,
00:36:11 ou alors dans le Jura en tant que tel.
00:36:13 Les airs pâturages, les collines, on est au moins 300 m,
00:36:17 300 m, 1000 m,
00:36:19 et les vaches passent plus de la moitié de l'année
00:36:22 aller et venir.
00:36:25 Et elles ont la flore, l'une des plus vivaces,
00:36:29 des plus variées qui existe.
00:36:32 200 espèces de fleurs sont proposées aux ruminants.
00:36:37 Oh, elles vont meuh, meuh.
00:36:40 Elles sont là.
00:36:42 Et le fait de pouvoir avoir ce fromage
00:36:47 qui vient de moment de l'été,
00:36:51 ça donne ce fruité, et je vous demanderai après votre avis.
00:36:54 Tandis que sinon, c'est l'hiver.
00:36:56 Alors l'hiver, ce qui est extraordinaire,
00:36:58 c'est que quand on est avec ce comté,
00:37:01 qui est une appellation contrôlée,
00:37:03 la première AOC dès 1952,
00:37:06 et maintenant depuis 1996, c'est devenu une AOP,
00:37:10 eh bien, tout ne peut venir que du terroir.
00:37:14 Il n'est pas question d'avoir du foin qui vous vienne de Normandie,
00:37:18 mon ami, c'est des pâturages que l'hiver,
00:37:21 on continue à nourrir les bêtes.
00:37:23 Reste que le foin, c'est pas la vivacité
00:37:27 de l'herbe encore toute fiérotte qui émerge de la terre.
00:37:31 C'est pour ça que le meilleur, c'est l'été,
00:37:34 et que par conséquent, j'ai retenu le 18 mois,
00:37:38 sinon, il fallait passer au 30 mois,
00:37:40 mais le 30 mois, c'est un palais, disons déjà,
00:37:43 bien entraîné pour pouvoir avoir la capacité.
00:37:47 - Alors le goût est exceptionnel,
00:37:49 mais par contre, mettez-nous tout ça en perspective,
00:37:51 comment ça, la fragilité de cette excellence ?
00:37:55 - Eh bien, parce que les vaches,
00:37:59 ce sont soit des Montbéliard,
00:38:01 oh, les Montbéliard, c'est de la rustique, ça, la Montbéliard,
00:38:05 alors d'ailleurs, on en voit dans le Massif Central aussi,
00:38:08 ou alors de la cimentale,
00:38:10 et alors ce sont les anabistes qui, au 17ème siècle,
00:38:13 les anabistes, anabatistes, pardon,
00:38:16 les religieux, qui sont arrivés de Suisse,
00:38:20 et du côté du Jura,
00:38:24 ils avaient de belles vaches,
00:38:27 et ça a impressionné les paysans,
00:38:30 qui, à ce moment-là, se sont attachés à ces bêtes
00:38:34 qui produisent ce lait exceptionnel,
00:38:37 à condition d'avoir les pâturages adéquats,
00:38:40 et pour cela, il faut faire attention à cet environnement,
00:38:44 il faut le bichonner,
00:38:47 et ne jamais sortir de cette structure,
00:38:50 et ça, c'est formidable, et ils se sont groupés,
00:38:53 parce que pour former un comté,
00:38:56 il faut au moins 450 litres,
00:39:00 et par conséquent, si vous n'avez que quelques vaches,
00:39:03 vous ne pouvez pas seul fabriquer votre meule,
00:39:07 alors ensemble, ils ont érigé des fruitières,
00:39:13 c'est là où on fabrique le fromage,
00:39:16 le savoir-faire du fromager, c'est dans la fruitière,
00:39:19 il faut que ça tourne en petits grains,
00:39:22 mais il ne faut pas que le grain soit trop gros,
00:39:24 il ne faut pas que le grain soit trop faible,
00:39:26 et tout le talent vient de cette première opération.
00:39:30 - J'ai eu deux morceaux, j'en profite,
00:39:32 je n'entends plus rien de ce que vous dites.
00:39:34 - C'est dommage, parce que vous sauriez que,
00:39:37 en moyenne, c'est maximum,
00:39:40 il y en a qui sont un peu plus gros,
00:39:42 mais c'est 60 vaches.
00:39:44 En plus, les vaches ne vont pas à plus d'un kilomètre et demi,
00:39:47 il ne faut pas qu'elles se fatiguent, les petites,
00:39:49 pour avoir un meilleur lait.
00:39:51 Et elles disposent chacune d'un hectare
00:39:55 et 300 mètres à peu près carrés.
00:39:58 Ça donne la dimension qui vaut à la biodiversité
00:40:05 de s'entretenir, parce que si la vache,
00:40:08 elle est là à pètre au même endroit
00:40:10 ou dans un périmètre trop court,
00:40:12 forcément, à un moment donné, ça manque.
00:40:14 Et tout ça, c'est ce qui donne l'excellence du comté
00:40:18 et la fraternité des uns et des autres.
00:40:21 Et on est dans les mêmes opérations
00:40:24 depuis que, disons, la fin du Moyen-Âge,
00:40:27 et après que ces vaches, les Montbéliardes,
00:40:30 sont arrivées dans la région avec les religieux.
00:40:34 Le problème de tout ça, c'est que ces vaches
00:40:37 ont fait, ça a été le coup d'œil,
00:40:39 le cul terreux, on peut dire ça comme ça,
00:40:41 mais dans le bon sens du terme,
00:40:43 ils arrivaient à la foire, où ils disaient
00:40:45 "Celle-là, vous me la mettez de côté,
00:40:48 elle est pour moi mon gars",
00:40:49 on se topait dans la main,
00:40:51 et on était certains qu'elle aurait un bon rendement.
00:40:54 Même chose pour le taureau.
00:40:56 Mais aujourd'hui, l'Union européenne
00:40:58 essaie d'intervenir,
00:41:00 et essaie d'imposer, par exemple, sur les taureaux,
00:41:03 on est dans l'insémination artificielle,
00:41:06 alors que jusque dans les années 80,
00:41:09 on était dans la présence de la bête
00:41:12 face à Demoiselle Vache.
00:41:15 Et maintenant, non,
00:41:17 c'est cette insémination artificielle,
00:41:20 et on essaie de décoder le génome de la vache
00:41:25 pour savoir si on est dans la bonne qualité.
00:41:27 Donc le savoir-faire du paysan,
00:41:29 il est un tout petit peu menacé.
00:41:31 Et dans tout cela, on étend aussi,
00:41:34 alors que le périmètre, lui, il reste fixé,
00:41:37 sinon, on ne peut pas.
00:41:38 Et ce qui est formidable, c'est qu'il n'y a pas de concurrence,
00:41:41 parce que vous ne pouvez former ce fromage
00:41:44 qu'avec du lait de ce secteur relativement étendu.
00:41:49 Donc personne ne peut venir.
00:41:51 Moralité, aujourd'hui, victime du succès,
00:41:55 les industriels qui sont venus et qui vous vendent du comté,
00:41:59 parce qu'il est noté le comté après, quand vous le dégustez,
00:42:02 au-dessus de 20, c'est le comté extra,
00:42:05 au-dessus de 15, entre 15 et 20.
00:42:07 Entre 13 et 15, c'est le comté.
00:42:09 Si il est en dessous, il est déclassé.
00:42:11 Et puis les industriels, ils prennent le moins bon comté,
00:42:15 ils le vendent, soit en rapé, soit etc.
00:42:18 Et on a étendu la partie où la vache,
00:42:21 elle bute contre la forêt, contre le bois.
00:42:24 Et ce qui fait que, comme disait son président,
00:42:28 Claude Viermeier, au dérocher en 2016,
00:42:31 c'est le président du comité interprofessionnel de gestion du comté.
00:42:35 Il disait "insolente la réussite du comté".
00:42:38 Ah ! Non, juste fragile,
00:42:41 parce qu'aujourd'hui, comme il y a plus de vaches,
00:42:44 eh bien l'olisier finit par infiltrer les sols,
00:42:47 ça touche les cours d'eau,
00:42:49 et ça appauvrit cette diversité de fleurs,
00:42:52 telle que je vous disais tout à l'heure.
00:42:54 Donc ils sont obligés de veiller pour revenir à quelque chose
00:42:57 de plus centré, pour ne pas tomber dans l'industriel
00:43:01 qui dénaturerait leurs produits.
00:43:04 - Merci pour cette enquête d'analyse.
00:43:07 Vous revenez quand vous voulez.
00:43:09 - Alors, le pif !
00:43:11 - Il est excellent, très bien choisi,
00:43:14 et salué le meilleur revêveur de France.
00:43:16 - Et en sachant que, par exemple, vous avez le fort,
00:43:19 le fort Saint-Antoine, ou le fort de la Brousse,
00:43:21 c'est là où les meules tournent.
00:43:24 - Vous voulez pas goûter le comté comme ça ?
00:43:26 - Je voulais le faire !
00:43:28 Je le mangerai à la maison ce soir.
00:43:30 - Pendant que vous parlez, on a appris deux informations
00:43:33 que l'Assemblée nationale a adoptées,
00:43:35 le projet de loi pour inscrire la liberté de recours
00:43:37 et de rallie-végé dans la Constitution, on s'y attendait.
00:43:40 Et puis, une autre information,
00:43:42 Gabriel Attal et Marc Fesneau recevront ce soir à 20h
00:43:45 la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs,
00:43:47 donc succession de réunions,
00:43:49 je ne sais pas si ça calmera les agriculteurs,
00:43:52 en tout cas ce soir.
00:43:54 Français, dans leur soutien aux agriculteurs,
00:43:57 Charlotte Dornelas se disperait à préférer des produits français
00:44:01 comme ceux que nous dînons ce soir,
00:44:04 avec dégustation, avec plaisir,
00:44:08 aux produits importés.
00:44:10 Question, on en a beaucoup parlé déjà ici,
00:44:12 est-ce que c'est réellement possible
00:44:15 de consommer uniquement français ?
00:44:18 Charlotte Dornelas, si on va s'arrêter sur cette question.
00:44:20 - D'abord, il y a la question de la réalité,
00:44:23 on va dire, de notre consommation aujourd'hui.
00:44:25 Il y a un produit alimentaire sur cinq en France
00:44:28 qui provient de l'étranger, dans ce que nous mangeons.
00:44:30 Alors évidemment, la question du fromage,
00:44:32 elle est un peu à part dans la question de l'alimentation
00:44:37 d'une population globale.
00:44:38 Évidemment, le fromage, on peut se permettre
00:44:41 un peu plus de dépenses sur un fromage
00:44:44 que sur les fruits et les légumes, par exemple,
00:44:46 ou la viande, notamment dans la question
00:44:48 des transformations de produits,
00:44:49 bien que ça guette aussi le fromage.
00:44:51 Et par ailleurs, les tendances sont à la hausse
00:44:53 sur ces importations, puisqu'elles ont doublé
00:44:55 en seulement 20 ans.
00:44:56 Et pourtant, évidemment, à partir de ce constat-là,
00:44:58 on se dit, avant que ces importations deviennent massives,
00:45:01 les Français mangeaient à leur faim.
00:45:03 Oui, ils mangeaient à leur faim, mais ils ne mangeaient pas
00:45:05 de la même manière, ils n'y consacraient pas
00:45:08 le même budget.
00:45:09 En fait, ce chiffre, il est la conséquence
00:45:11 de beaucoup de choses.
00:45:12 En même temps, il y a la question
00:45:14 de la mondialisation de l'agriculture.
00:45:16 Et on l'a vu, notamment hier, avec Dimitri,
00:45:18 le fait que l'agriculture, en plus,
00:45:20 dans cette mondialisation, soit une variable
00:45:22 d'ajustement, bien souvent.
00:45:24 La consommation qui a changé avec l'offre.
00:45:26 On parle beaucoup du prix, mais il y a également
00:45:28 la manière dont on consomme et la manière
00:45:30 dont on se nourrit, et qui est parfois
00:45:32 bien loin de tout le respect de la nature
00:45:34 que, par ailleurs, auxquelles on communie,
00:45:36 par ailleurs tous, publiquement.
00:45:38 L'exigence verte, qui est au cœur
00:45:40 d'un monde ouvert, c'est pas l'exigence verte
00:45:42 en soi. En soi, les paysans,
00:45:44 il y a 70 ans, étaient infiniment plus verts
00:45:46 que n'importe lequel des modèles agricoles
00:45:48 aujourd'hui plébiscités.
00:45:50 Donc c'est pas la question en soi
00:45:52 de cette exigence verte, c'est évidemment
00:45:54 dans le modèle tel qu'il est par ailleurs défendu
00:45:56 et encouragé par les mêmes.
00:45:58 Il y a d'un côté la décroissance
00:46:00 de la production, de l'autre côté la croissance
00:46:02 des prix, et la spécialisation
00:46:04 qui est choisie ou subie
00:46:06 de l'agriculture française.
00:46:08 Au carrefour de quoi on trouve la consommation ?
00:46:10 Alors, plus concrètement,
00:46:12 dans la consommation, outre la question
00:46:14 du prix, ce sont les habitudes.
00:46:16 Un, on mange désormais des produits qui n'existent
00:46:18 pas initialement en France.
00:46:20 On a changé la consommation, il suffit de
00:46:22 demander à tous, aux générations
00:46:24 précédentes,
00:46:26 il y a des produits que nous mangeons
00:46:28 habituellement désormais, qu'ils n'avaient
00:46:30 jamais goûtés en France. Il fallait
00:46:32 voyager pour découvrir des produits ailleurs.
00:46:34 On consomme par ailleurs hors saison,
00:46:36 et je pense même qu'on ne connaît plus les saisons.
00:46:38 On ferait un micro-trottoir dans la rue pour savoir
00:46:40 quels légumes il faut manger en ce moment. Je pense que
00:46:42 plus personne ne sait, en tout cas, peu de gens.
00:46:44 Il y a la question, d'accord, de la
00:46:46 réduction du pouvoir d'achat, mais l'élargissement
00:46:48 aussi de la consommation. On a eu
00:46:50 plusieurs chroniques de Dimitri là-dessus, mais
00:46:52 nous avons beaucoup plus d'indispensables,
00:46:54 entre guillemets, qu'avant. Et alors, il y a un
00:46:56 chiffre de l'INSEE qui résume
00:46:58 le relativisme, on va dire,
00:47:00 du budget qui accordait la nourriture.
00:47:02 C'était 35% du budget
00:47:04 d'une famille en 1960, c'est
00:47:06 18% d'une famille aujourd'hui.
00:47:08 Vous voyez, certes, il y a une baisse
00:47:10 du pouvoir d'achat, mais il y a aussi beaucoup d'achats
00:47:12 qui n'existaient pas avant.
00:47:14 Ensuite, on a la deuxième partie,
00:47:16 plus du côté de l'agriculture. On a une agriculture
00:47:18 qui n'est plus une agriculture française,
00:47:20 qui n'est plus autosuffisante dans certains
00:47:22 domaines où elle l'était, en raison
00:47:24 - alors là, c'est pareil - soit de choix,
00:47:26 on a dopé certains secteurs au détriment
00:47:28 d'autres, soit de normes, on en a beaucoup
00:47:30 parlé, des décisions qui sont parfois subies,
00:47:32 et de l'importation qui est devenue
00:47:34 nécessaire en réponse à
00:47:36 toutes ces décisions précédentes.
00:47:38 Et l'exemple type,
00:47:40 c'est on importe 50% de nos fruits et de légumes
00:47:42 et 50% de notre volaille,
00:47:44 alors que ce sont deux secteurs
00:47:46 que nos agriculteurs maîtrisent.
00:47:48 Ils savent le faire, mais à l'inverse,
00:47:50 dans notre consommation, on consomme en France
00:47:52 plutôt notre lait - alors à perte,
00:47:54 parfois, pour ceux qui le produisent - mais on consomme
00:47:56 plutôt du lait français, nos pommes de terre et notre
00:47:58 bœuf, encore majoritairement,
00:48:00 mais à l'inverse - et là, tout le monde va comprendre
00:48:02 immédiatement ce que je dis sur la consommation -
00:48:04 il est quasiment impossible, en tout cas très difficile,
00:48:06 de trouver en France du riz, du soja, du thé,
00:48:08 du café, des fruits tropicaux,
00:48:10 qui sont devenus habituels. Aujourd'hui, vous prenez
00:48:12 une salade de fruits, vous avez des fruits tropicaux partout
00:48:14 dans les salades de fruits. Evidemment, ils ne sont pas
00:48:16 produits ici. Donc, il y a
00:48:18 à la fois un affranchissement aussi du comté du consommateur,
00:48:20 au-delà de la question du prix,
00:48:22 un affranchissement des saisons et des frontières.
00:48:24 Et l'autre exemple, ce serait sur la pêche.
00:48:26 Les pêcheurs sont aujourd'hui
00:48:28 également inquiets.
00:48:30 C'est la même chose. On a une insuffisance,
00:48:32 notamment en raison des contraintes qui pèsent
00:48:34 sur la pêche française par rapport aux autres,
00:48:36 mais également
00:48:38 une consommation de produits non français.
00:48:40 Je vais vous en donner quatre, qu'on consomme tout le temps.
00:48:42 Saumon, cabillaud, thon et crevette.
00:48:44 Il n'y en a pas en France. Donc, vous voyez que même
00:48:46 dans la consommation, consommer français,
00:48:48 ce n'est pas toujours possible par rapport
00:48:50 aux habitudes qu'ont pris les consommateurs en France.
00:48:52 - Alors,
00:48:54 au-delà du prix,
00:48:56 on comprend que si tous les Français voulaient consommer
00:48:58 français, ce serait impossible, c'est ça ?
00:49:00 - C'est le problème de fond,
00:49:02 parce que, non seulement,
00:49:04 il n'y a pas de politique protectionniste
00:49:06 en France,
00:49:08 ce n'est pas un choix qui a été fait,
00:49:10 mais les mesures qui sont envisagées,
00:49:12 elles poussent plutôt à la décroissance.
00:49:14 - J'avais une question avant, ça ne vous embête pas ?
00:49:16 - Oui, parce que
00:49:18 j'allais dire que ce serait alors impossible
00:49:20 si on savait faire
00:49:22 et produire nos agriculteurs en France
00:49:24 au minimum. - Oui, alors là, c'est
00:49:26 la question du déclin de la production nationale.
00:49:28 Justement, je vous disais, il y a un déclin de la production
00:49:30 et on va reprendre l'exemple des fruits
00:49:32 qui sont produits en France, qu'on sait produire
00:49:34 la cerise, la pêche, la pomme ou la poire.
00:49:36 Sur ces fruits-là, il y a un recul
00:49:38 de 17% en seulement
00:49:40 10 ans. Or, la raison de cette
00:49:42 baisse de production, ce n'est pas la baisse de la
00:49:44 consommation, mais la raison des normes
00:49:46 et des exigences qui pèsent sur ces producteurs-là.
00:49:48 Mais puisque la consommation reste
00:49:50 la même, eh bien, on compense
00:49:52 par des importations, et donc
00:49:54 ça provoque la mort de la filière. Pourquoi ?
00:49:56 Parce que les importations avec des exigences
00:49:58 moindres, avec un coût du travail
00:50:00 moindre, coûtent beaucoup moins cher.
00:50:02 Donc, naturellement, on se reporte
00:50:04 là-dessus, et c'est absolument évident.
00:50:06 Par exemple, justement, dans les produits
00:50:08 transformés, avant même le consommateur directement,
00:50:10 dans les produits transformés. Alors, je prends
00:50:12 un exemple. Il y a un produit qui est, par exemple
00:50:14 sur la pomme, prenons l'exemple de la pomme,
00:50:16 un produit qui est interdit par l'Europe à partir
00:50:18 de 2026.
00:50:20 L'alternative à ce produit qui est proposée par
00:50:22 l'Europe, elle est déjà interdite en France
00:50:24 aujourd'hui. Seulement en Pologne,
00:50:26 aujourd'hui en France, c'est limité. Vous avez 300
00:50:28 molécules qui sont autorisées sur les pommes.
00:50:30 En Pologne, par exemple, c'est
00:50:32 450. Et, par ailleurs,
00:50:34 le coût du travail en Pologne est beaucoup
00:50:36 plus faible qu'en France. Résultat,
00:50:38 aujourd'hui, la pomme française coûte
00:50:40 le double de la pomme polonaise
00:50:42 en France. Donc,
00:50:44 le... comment dire... à partir du
00:50:46 moment où vous allez fabriquer de la compote,
00:50:48 des tartes qui sont déjà faites et qui sont vendues
00:50:50 en produits transformés,
00:50:52 eh bien, toutes les pommes qui sont utilisées sont évidemment
00:50:54 beaucoup plus polonaises que françaises.
00:50:56 Parce qu'évidemment, nous, l'agriculteur, on se dit "bon, moi,
00:50:58 je vais aller demain acheter mes pommes, je vais faire bien
00:51:00 attention qu'elles soient françaises". Vous imaginez que le gros
00:51:02 de la consommation, il se fait aussi sur ce
00:51:04 terrain-là. Et, par ailleurs, et les agriculteurs
00:51:06 le disent souvent, l'étiquetage est
00:51:08 extrêmement opaque et donc très
00:51:10 trompeur. Parce qu'avec une pomme, si votre
00:51:12 compote, elle est fabriquée en France, la
00:51:14 pomme, elle peut être polonaise. Vous ne le voyez pas sur l'étiquette.
00:51:16 Je résume à gros traits, mais
00:51:18 concrètement, l'étiquetage est très trompeur,
00:51:20 même quand vous voulez bien faire.
00:51:22 Et, il y a un rapport...
00:51:24 Je vous parlais du coût du travail, parce que c'est pareil,
00:51:26 on parle beaucoup des normes.
00:51:28 Le coût du travail, c'est un rapport de France Agrimaire
00:51:30 qui dit que la main-d'oeuvre est 1,7 fois
00:51:32 plus chère en France qu'en Espagne,
00:51:34 11 fois plus qu'en Pologne,
00:51:36 70 fois plus qu'au Maroc.
00:51:38 Là, vous ajoutez ça
00:51:40 aux normes inférieures,
00:51:42 on va dire, dans ces pays-là,
00:51:44 et vous ne pouvez pas
00:51:46 avoir une concurrence qui soit
00:51:48 correcte.
00:51:50 L'autre exemple, évidemment, je vais le faire rapidement,
00:51:52 mais l'autre exemple éclatant, c'est le poulet.
00:51:54 On en a beaucoup parlé ces derniers jours,
00:51:56 notamment avec la question
00:51:58 ukrainienne, mais un seul exemple,
00:52:00 il y a une nouvelle directive qui date de novembre,
00:52:02 une nouvelle directive européenne, qui abaisse
00:52:04 le seuil à 21.500
00:52:08 volailles par an,
00:52:10 par ferme. Aujourd'hui, c'était
00:52:12 40.000 jusqu'à maintenant. Toutes les
00:52:14 exploitations concernées, elles doivent faire les travaux pour faire la mise
00:52:16 aux normes. Ce sont des travaux qui coûtent cher.
00:52:18 Pendant le même temps, vous avez
00:52:20 cette discussion au niveau européen
00:52:22 qui n'a pas abouti sur la clause de réciprocité.
00:52:24 Donc, dans le même temps,
00:52:26 vous avez une augmentation de 74%
00:52:28 de l'importation de volailles
00:52:30 ukrainiennes l'année dernière.
00:52:32 Mais en Ukraine, vous avez
00:52:34 des...
00:52:36 Les fermes, elles sont détenues en gros par un
00:52:38 gros complexe, on va dire,
00:52:40 qui fait ces fermes. Une seule
00:52:42 ferme en Ukraine, d'où viennent ces poulets-là,
00:52:44 je ne vous parle même pas des normes et des produits qui sont utilisés,
00:52:46 c'est 440.000 tonnes de
00:52:48 poulets qui sortent par an.
00:52:50 Alors, avec... Évidemment, quand vous réduisez
00:52:52 les droits de douane, vous avez à la fin,
00:52:54 avec la main-d'oeuvre, encore une fois, un poulet qui vaut
00:52:56 4 euros, en France,
00:52:58 et le poulet français, il en vaut 8.
00:53:00 Vous ne pouvez pas vous en sortir
00:53:02 avec de tels modèles.
00:53:04 - Ce que vous êtes en train de nous expliquer,
00:53:06 c'est que même si le consommateur
00:53:08 veut consommer français,
00:53:10 il ne peut pas, il n'a pas l'information,
00:53:12 on n'y arrive pas, et que c'est impossible finalement
00:53:14 de consommer français. Parce que souvent, ces derniers temps,
00:53:16 on se dit que, oui, mais on n'a qu'à
00:53:18 payer un peu plus cher, on va y arriver,
00:53:20 on peut sauver les agriculteurs en payant plus cher.
00:53:22 Ce n'est pas possible, finalement. - Alors, il y a
00:53:24 quelque chose qui est possible, c'est à l'échelle individuelle.
00:53:26 Je parlais tout à l'heure, par exemple, de l'éducation
00:53:28 à manger, ne serait-ce que les saisons,
00:53:30 respecter les saisons, ce qui collerait beaucoup
00:53:32 plus à ce que sont capables de faire nos agriculteurs.
00:53:34 Vérifier quand vous achetez individuellement
00:53:36 les fruits, les légumes, la viande,
00:53:38 quand vous avez les moyens de le faire aussi,
00:53:40 évidemment, de le faire, en tout cas, de faire cet effort-là
00:53:42 de temps en temps. Mais encore une fois, c'est à
00:53:44 l'échelle globale. Il faut comprendre que
00:53:46 c'est un modèle, on va dire, qui pousse
00:53:48 à la décroissance. Je vous ai pris des
00:53:50 exemples extrêmement précis. Tout à l'heure,
00:53:52 Dimitri nous parlait de la question des
00:53:54 betteraves et de ce fameux... Là, encore une fois,
00:53:56 c'est la question de l'insecticide qui a été
00:53:58 interdit. L'Union européenne, elle a... Je vous reprends
00:54:00 un dernier exemple pour bien comprendre
00:54:02 que le modèle pousse à
00:54:04 consommer autre chose que français,
00:54:06 c'est que l'Union européenne a interdit
00:54:08 trois substances. Elle en a autorisé une
00:54:10 quatrième. La France a interdit la quatrième
00:54:12 substance à mettre
00:54:14 sur les betteraves. Et la France, à l'époque,
00:54:16 c'était en 2016, a dit "on va privilégier
00:54:18 l'alternative". Sauf que l'alternative, c'est
00:54:20 une bonne chose en soi. Elle n'existait pas encore.
00:54:22 Et elle n'existe pas. Donc,
00:54:24 les producteurs de betteraves,
00:54:26 qu'est-ce qu'ils ont fait ? Ils ont eu des cultures
00:54:28 ravagées la première année, un rendement catastrophique.
00:54:30 Alors là, le gouvernement français a dit
00:54:32 "Bon, ben, finalement, on va faire une dérogation temporaire",
00:54:34 c'est vous dire à quel point, par ailleurs, c'est
00:54:36 une religion à laquelle on s'adapte
00:54:38 de manière assez
00:54:40 circonstancielle. Donc, la dérogation
00:54:42 temporaire, Bruxelles a dit non.
00:54:44 Donc, résultat, au bout de 5 ans,
00:54:46 vous avez un rendement qui est catastrophique
00:54:48 et 5 usines qui ferment. 5 usines
00:54:50 pour chacune ses 700 à 900 tonnes
00:54:52 de production de sucre.
00:54:54 Et bien, le sucre, immédiatement, il est importé.
00:54:56 Il est importé, notamment
00:54:58 en Ukraine. Alors, en Ukraine, vous avez
00:55:00 des plantations OGM. Vous avez un
00:55:02 enrobage par néonicotinoïdes
00:55:04 (je me suis nicotinoïdée, voilà, j'ai raté)
00:55:06 qui est total
00:55:08 de la fleur de betterave. Vous avez
00:55:10 les molécules fongicides qui sont interdites depuis
00:55:12 des années en Europe qui sont utilisées là-bas.
00:55:14 Mais toutes ces tonnes de sucre qui vous
00:55:16 manquent et de betterave qui vous manquent, vous les importez
00:55:18 quand même. Et bien, résultat,
00:55:20 vous avez une habitude de consommation
00:55:22 notamment sur la question du prix,
00:55:24 au niveau global, pas individuel,
00:55:26 qui impose des habitudes de
00:55:28 consommation qui se font au détriment
00:55:30 de nos agriculteurs. C'est là que se
00:55:32 nicherait, normalement, une politique
00:55:34 beaucoup plus protectionniste, parce que
00:55:36 vous finissez par encourager, par ailleurs, un modèle
00:55:38 qui est l'exact contraire de celui que vous prétendez
00:55:40 défendre en imposant
00:55:42 toutes ces contraintes à vos agriculteurs. Donc, tout le monde est
00:55:44 perdant à la fin, même la planète, je tiens à le préciser.
00:55:46 - Et vous venez de nous démontrer
00:55:48 que même si, voilà, on ne peut pas
00:55:50 reporter
00:55:52 la responsabilité sur le consommateur,
00:55:54 parce que même s'il veut... - Pas seulement, il peut
00:55:56 faire des efforts à l'échelle individuelle, mais le modèle,
00:55:58 clairement, là, il y a du boulot. - Merci beaucoup
00:56:00 pour votre regard. On va
00:56:02 parler avec vous,
00:56:04 mon cher Mathieu, on va faire un petit tour au
00:56:06 Texas. Je regarde parce qu'il y a
00:56:08 Philippe Devilliers qui envoie des SMS, il faut toujours
00:56:10 regarder ses SMS, parfois, ça peut être intéressant.
00:56:12 - Parfois.
00:56:14 - Non, je ne vais pas lire ce qu'il a mis.
00:56:16 Non, on n'en parle pas.
00:56:18 - Il veut du compter ? - Non, il a dit
00:56:20 qu'il y a un sujet de Gabriel Attal qu'on n'a pas parlé
00:56:22 ce soir. Je vous laisse deviner.
00:56:24 On ne peut pas parler de tout.
00:56:26 Allons au Texas,
00:56:28 puisque le conflit ouvert
00:56:30 avec l'État fédéral américain nous
00:56:32 interpelle. On voulait déjà en parler un peu
00:56:34 hier. Au coeur de cette querelle,
00:56:36 un choc migratoire,
00:56:38 et c'est sur ce conflit dont on parle
00:56:40 avec vous, Mathieu Bocoté, maintenant.
00:56:42 Que se passe-t-il ? Et quelles leçons peut-on
00:56:44 tirer en front ? - Vous allez voir, mais c'est majeur,
00:56:46 mais absolument majeur.
00:56:48 Il y a une crise migratoire aujourd'hui
00:56:50 au Texas. On pourrait dire, soit disant,
00:56:52 en passant, dans l'ensemble du sud des États-Unis depuis
00:56:54 des années, mais elle s'est amplifiée.
00:56:56 300 000 entrées
00:56:58 en décembre. Il faut comprendre.
00:57:00 Le Texas est complètement
00:57:02 débordé. Le gouverneur,
00:57:04 donc, qui est républicain,
00:57:06 décide, Greg Abbott,
00:57:08 décide dans les circonstances, il dit, on va empêcher
00:57:10 les gens d'arriver, dans des barbelés
00:57:12 notamment. Et il appelle la garde nationale.
00:57:14 La garde nationale, c'est comme une forme d'armée
00:57:16 entre guillemets, de volontaire,
00:57:18 une armée de milices au sens à l'américain.
00:57:20 Une armée, mais au niveau des États,
00:57:22 plutôt qu'au niveau fédéral. Ce sont des volontaires,
00:57:24 pour l'essentiel, en disant, on va bloquer
00:57:26 la frontière, on va prendre les moyens
00:57:28 nécessaires parce que nous sommes débordés.
00:57:30 Washington
00:57:32 s'y oppose, il faut comprendre,
00:57:34 et les tribunaux fédéraux, la Cour suprême
00:57:36 s'y oppose aussi.
00:57:38 Donc là, théoriquement, le tribunal le plus élevé
00:57:40 dit, vous démantelez ça,
00:57:42 les barbelés ne sont pas
00:57:44 permis, c'est réglé. Sauf
00:57:46 que le gouverneur dit, non, non, non, je me
00:57:48 fous de ce que dit la Cour suprême, je me fous
00:57:50 de ce que disent les tribunaux, je décide
00:57:52 de l'imposer.
00:57:54 C'est absolument nécessaire
00:57:56 pour notre État, pour nous, le Texas.
00:57:58 Et plus encore,
00:58:00 il y a des gouverneurs de 25 États
00:58:02 républicains qui disent, on est
00:58:04 solidaires du Texas et on va envoyer
00:58:06 nous aussi notre aide
00:58:08 si il le faut pour contenir
00:58:10 ce que le Texas présente comme une invasion
00:58:12 migratoire et
00:58:14 ce qui est prévu, ou qui est vu par Washington
00:58:16 comme un rapport trouble,
00:58:18 parce que Washington, il comprenne bien que c'est un problème, la question
00:58:20 de l'immigration, il la voit, mais dans quelles
00:58:22 mesures peuvent-ils stopper ça?
00:58:24 Imaginez, c'est un choc de légitimité,
00:58:26 j'insiste là-dessus, parce que vous avez des gens armés
00:58:28 qui relèvent du Texas,
00:58:30 vous avez des gens armés qui relèvent, théoriquement,
00:58:32 de l'État fédéral, et il y a un choc
00:58:34 à l'intérieur d'un même État, entre
00:58:36 deux autorités qui s'affrontent.
00:58:38 Donc c'est un choc, non seulement de l'égalité,
00:58:40 mais de légitimité aux États-Unis.
00:58:42 Comprenez-dont-il les questions?
00:58:44 Je parle souvent ici, je reviendrai à la fin,
00:58:46 des tensions
00:58:48 qui sont structurantes aujourd'hui aux États-Unis,
00:58:50 entre les États qui sont de plus en plus
00:58:52 importants et Washington
00:58:54 qui change de mission. Washington,
00:58:56 c'est de moins en moins une capitale nationale. Washington,
00:58:58 c'est pas Paris. Il faut seulement comprendre,
00:59:00 je fais la comparaison, on pourrait dire
00:59:02 que Paris, en fait, c'est la synthèse de Boston,
00:59:04 de Washington, de New York,
00:59:06 de Los Angeles, de San Francisco, c'est une centralisation
00:59:08 française. Washington, c'est une capitale
00:59:10 de plus en plus fédérale,
00:59:12 impériale, davantage que nationale.
00:59:14 Et les Américains sont de plus en plus
00:59:16 aliénés par rapport à Washington,
00:59:18 qui globalement, disent-nous, notre rôle,
00:59:20 c'est d'assurer l'extension de l'État américain
00:59:22 dans le monde et la défense des intérêts de l'Empire
00:59:24 dans le monde, mais au niveau national,
00:59:26 les Américains se représentent
00:59:28 beaucoup, bien davantage au niveau
00:59:30 de leur État, au sens
00:59:32 de la Floride, la Californie,
00:59:34 le Texas, qu'au niveau fédéral.
00:59:36 Donc le choc est assez
00:59:38 vif et là, qu'est-ce qu'on voit en ce moment?
00:59:40 C'est une forme de dynamique de sécession
00:59:42 qui ne dit pas son nom, qui se met en place.
00:59:44 Quand vous avez les gouverneurs républicains qui disent
00:59:46 « on est solidaires de l'État » plutôt que
00:59:48 des tribunaux supérieurs du pays,
00:59:50 ça commence à causer problème. Ajouter une dimension
00:59:52 à ça, c'est pas rien. Il y a au sud,
00:59:54 donc le sud des États-Unis, la vague
00:59:56 migratoire qui les frappe, ça fait des années.
00:59:58 On appelle ça, du point de vue des Mexicains,
01:00:00 certains appellent ça même une forme de
01:00:02 « reconquista mexicaine », parce qu'à
01:00:04 l'échelle de l'histoire, ces territoires-là ont été pris
01:00:06 au Mexique. Donc il y a une hispanisation
01:00:08 du sud des États-Unis
01:00:10 aujourd'hui, une hispanisation,
01:00:12 ce qui fait que dans certains États, l'espagnol
01:00:14 est dans une situation à peu près équivalente en anglais.
01:00:16 Donc comprenez, on s'imagine toujours aux États-Unis,
01:00:18 l'identité américaine est toute puissante,
01:00:20 l'anglais est tout puissant, l'anglais est la norme,
01:00:22 eux-mêmes se disent, les Américains,
01:00:24 chez eux, dans l'empire de notre temps, nous nous sentons
01:00:26 dépossédés chez nous,
01:00:28 et les États se présentent désormais en disant
01:00:30 « nous allons défendre, nous, l'identité américaine,
01:00:32 parce que Washington n'est pas capable
01:00:34 de le faire ». Les ingrédients sont
01:00:36 rassemblés pour que ça explose.
01:00:38 - Quand vous parlez, moi je vois tout de suite la France, l'Europe,
01:00:40 enfin bon, j'essaie d'appliquer un peu.
01:00:42 Alors vous évoquiez récemment une forme
01:00:44 de reconfédéralisation
01:00:46 des États-Unis, vous en avez parlé,
01:00:48 est-ce que ça en est un exemple?
01:00:50 - Je pense que c'est un exemple criant. L'histoire des États-Unis,
01:00:52 depuis un siècle, il y a eu quelques mouvements
01:00:54 de centralisation du pouvoir
01:00:56 à Washington et à la présidence.
01:00:58 Le New Deal, après la crise de 1929,
01:01:00 les années 60 avec la Great Society,
01:01:02 et les États ont perdu
01:01:04 des pouvoirs. Les États étaient transformés
01:01:06 en entités plus administratives que
01:01:08 politiques. Aujourd'hui, qu'est-ce qu'on voit?
01:01:10 Les États reprennent une densité politique
01:01:12 et se comportent quasiment, quelquefois,
01:01:14 comme des petits États souverains.
01:01:16 Ajoutez à ça le fait qu'une bonne partie de la droite américaine
01:01:18 dit "Washington, c'est la décadence,
01:01:20 Washington, c'est perdu,
01:01:22 Washington, on n'y peut rien, Washington, ils sont foutus
01:01:24 et ils nous entraînent avec eux
01:01:26 dans une situation compliquée.
01:01:28 Donc, nous allons finalement
01:01:30 miser sur nos États plutôt que sur le
01:01:32 grand État fédéral. À court terme,
01:01:34 soit l'a dit, soit dit en passant, ça peut aider Donald Trump
01:01:36 pour ceux qui s'intéressent à la politique américaine
01:01:38 parce que plus la crise migratoire va être forte,
01:01:40 plus elle sert au cœur de la campagne présidentielle
01:01:42 et de ce point de vue, la question migratoire
01:01:44 sert très clairement les républicains plutôt que les démocrates.
01:01:46 Ça va être intéressant à suivre.
01:01:48 - Vous répondez par oui ou par non parce qu'on n'a pas le temps,
01:01:50 mais est-ce que, par exemple, on peut voir
01:01:52 ce paradoxe, cette scission
01:01:54 entre la France et l'Europe?
01:01:56 - C'est pas exactement la même chose que...
01:01:58 Le Texas, c'est pas la France.
01:02:00 Les Texans étaient longtemps d'abord des Américains
01:02:02 avant d'être des Texans. Mais cela dit, ce qui est certain,
01:02:04 c'est que plus le pouvoir est lointain,
01:02:06 désincarné, impérial
01:02:08 et détaché des identités concrètes,
01:02:10 et plus ce pouvoir est rejeté par les peuples aujourd'hui.
01:02:12 - Merci. - Tirez les conclusions que vous souhaitez.
01:02:14 - Merci à tous. Le comté, distribuez le comté.
01:02:16 Tout de suite lors des pro-deux.
01:02:18 Mon comté, mon comté.
01:02:20 Merci Marc Menand, merci.
01:02:22 - Oh! - Génial!
01:02:24 - Hop, pardon!