Le premier président de la Cour des comptes et président du Haut Conseil des finances publiques était interrogé par Olivier Bost (RTL), Pauline Buisson (M6), Perrine Tarneaud (Public Sénat) et Loris Boichot (Le Figaro).
Regardez Le Grand Jury avec Olivier Bost du 26 janvier 2025.
Regardez Le Grand Jury avec Olivier Bost du 26 janvier 2025.
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00:00Générique
00:10Le Grand Jury, présenté par Olivier Bost
00:13Bonjour à tous, bienvenue dans ce Grand Jury en direct sur RTL et en direct également sur Public Sénat.
00:19Bonjour Pierre Moscovici.
00:20Bonjour.
00:21Vous êtes le premier Président de la Cour des Comptes et Président du Haut Conseil des Finances Publiques.
00:27Vous êtes chargé d'une mission flash sur les retraites, un état des lieux pour que les syndicats et le patronat rediscutent de la dernière réforme,
00:37la retraite à 64 ans, la durée de cotisation, un effort des retraités, voilà les enjeux.
00:44Autre enjeu très politique aussi, le budget 2025.
00:48Vous êtes chargé de l'expertiser entre économies et impôts nouveaux.
00:52Retrouvez-vous les 52 milliards d'euros de rigueur promis par le gouvernement.
00:57Bienvenue dans ce Grand Jury, Pierre Moscovici.
01:00A mes côtés pour vous interroger, Pauline Buisson de M6, Loris Boixot du Figaro.
01:05Bonjour.
01:06Et nous serons rejoints par Perrine Tarnot de Public Sénat.
01:09Dans ce Grand Jury, Pierre Moscovici, nous parlerons aussi des secteurs épinglés par la Cour des Comptes,
01:15comme le nucléaire par exemple, et puis de la menace de Donald Trump pour l'Europe.
01:19Vous répondrez aussi à nos questions express.
01:22Le Grand Jury, l'actualité de la semaine.
01:25Le gouvernement, je le disais, a rouvert le chantier des retraites
01:28et un débat a animé une partie de la semaine.
01:31Faut-il demander des efforts aux retraités les plus aisés ?
01:36L'idée a été amenée, ramenée par une ministre du gouvernement
01:40avant d'être retoquée par le ministre de l'économie.
01:43Pierre Moscovici, est-ce que pour vous la question se pose ?
01:46Je ne vais pas du tout entrer dans le débat par cet aspect-là
01:49parce que vous savez, moi je ne suis pas chargé d'animer le débat.
01:52Je ne suis pas chargé de trouver les solutions.
01:54Il y a un débat politique, c'est normal.
01:56Le rôle de la Cour des Comptes, il est différent.
01:58Nous sommes là pour expertiser et en quelque sorte mettre la table
02:02pour qu'ensuite les négociateurs, les partenaires sociaux discutent
02:05et puis qu'enfin le Parlement valide.
02:07Donc, pardonnez-moi de vous le dire,
02:09j'ai l'impression qu'en faisant comme ça, comme disent les anglo-saxons,
02:12on saute en conclusion.
02:13On n'est pas du tout en conclusion.
02:14On est au début du travail.
02:16Ça va un mois pour que la Cour des Comptes produise son rapport
02:19que je rendrai le 19 février au Premier ministre.
02:21Trois mois pour les partenaires sociaux
02:23puis ensuite la discussion politique.
02:25Et par ailleurs, il m'a semblé que la proposition d'Astrid Bévin-Pannossian
02:28n'avait pas été retenue.
02:30Mais est-ce que dans cet état des lieux,
02:32la question du niveau de vie des retraités par rapport aux actifs
02:36peut se poser ou pas ?
02:37Bien sûr.
02:38De quoi s'agit-il ?
02:39La mission qu'on a confiée à la Cour des Comptes,
02:41qui est déjà en route.
02:42C'est un groupe de travail d'une douzaine de personnes
02:44sous ma présidence qui travaille.
02:46Moi-même, je rencontre un par un les partenaires sociaux.
02:48J'ai déjà rencontré plus de la moitié d'entre eux la semaine dernière.
02:51J'ai également rencontré le futur négociateur M. Marrette.
02:53J'ai rencontré M. Cette,
02:54qui est le président du Conseil d'Orientation des Retraites.
02:57Notre mission, c'est de faire trois choses.
02:59D'abord, un état des lieux.
03:01Où en est-on exactement ?
03:02Quels sont les déficits ?
03:04On va prendre tous les régimes de retraite.
03:06Les régimes de retraite du privé, du public,
03:08complémentaire, sur complémentaire et les régimes spéciaux.
03:10Comme ça, on aura un panorama d'ensemble.
03:12L'essentiel, c'est le cœur de la mission,
03:14c'est-à-dire faire un chiffrage objectif indiscutable.
03:17La Cour des Comptes est reconnue pour être indépendante,
03:20et elle l'est totalement.
03:22C'est ce que nous offrirons aux partenaires sociaux.
03:24Est-ce que vous opérez des scénarios ?
03:26Deuxième chose, nous allons réfléchir à une projection à 20 ans.
03:31Je dis bien 20 ans, pas 2070,
03:33parce que je ne prends pas en compte la démographie.
03:35Comme vous l'avez dit très justement,
03:37il s'agit de réformer la réforme.
03:39Il ne s'agit pas de lancer une nouvelle réforme systémique.
03:42En tout cas, c'est comme ça que je comprends la commande,
03:44et ça me paraît assez clair.
03:46Et c'est aussi, me semble-t-il, le sentiment de tous les partenaires sociaux.
03:48Enfin, troisième chose, on ne fera pas de scénario.
03:51Ni scénario, ni proposition, ni recommandation.
03:53Non, parce que ce n'est pas notre rôle.
03:55En revanche, nous montrerons ce qui se passe quand on joue,
03:57et j'en arrive enfin à votre question,
03:59sur les différents paramètres, les différents leviers d'action.
04:01Alors, qu'est-ce que c'est ? C'est effectivement l'âge.
04:03Le premier serait dit que tout était sur la table,
04:06que rien n'était totem, que rien n'était tabou.
04:08Ce qui veut dire, par exemple, si on fait plus 64 ans,
04:10combien ça coûte ?
04:12Et comment fait-on pour allonger la durée de cotisation ?
04:15Ça, c'est un paramètre. Deuxième paramètre,
04:17c'est le niveau des prestations.
04:19Troisième paramètre, c'est le niveau des cotisations.
04:21C'est-à-dire, effectivement, qu'ils payent.
04:23Vous ne ferez pas de préconisation, par exemple, sur l'âge de la retraite ?
04:25Non, pas du tout.
04:27Mais vous estimerez les différents scénarios,
04:29le coût des différents leviers d'action ?
04:31Absolument. Et, en quelque sorte, on montrera
04:33ce que sont les différentes touches du piano,
04:35sur lesquelles on peut jouer,
04:37sur combien chacune coûte.
04:39Et si je rencontre les partenaires sociaux,
04:41c'est pour deux choses.
04:43C'est d'abord pour les assurer que notre travail est indépendant et objectif.
04:45Il peut y avoir toujours des suspicions,
04:47j'en entends ici ou là,
04:49mais vous vous rendez compte, croyez-moi,
04:51elle est résistante à toutes les pressions.
04:53Et elle travaillera à partir des scénarios existants.
04:55Donc, il ne faut pas s'attendre non plus à ce qu'il y ait des surprises considérables.
04:57Simplement, on va peut-être actualiser
04:59un certain nombre de prévisions, parce que, malheureusement,
05:01la situation de finances publiques et économiques
05:03et d'emplois, c'est un peu dégradé.
05:05Un des paramètres économiques sur lesquels je veux insister une seconde,
05:07c'est la productivité.
05:09C'est aussi le taux d'emploi.
05:11Selon qu'on a plus ou moins de productivité dans l'économie,
05:13selon qu'on a plus ou moins d'emplois,
05:15les recettes ne sont pas les mêmes.
05:17Ensuite, sur cette base-là,
05:19on aura mis le couvert, en quelque sorte.
05:21On aura aussi donné les ingrédients.
05:23Le sel, le poivre, de la viande, du poisson.
05:25C'est aux partenaires sociaux
05:27de faire le plat,
05:29de construire le consensus,
05:31le compromis.
05:33Pour moi, c'est qu'ils sont dans une disposition d'esprit,
05:35disons, constructive.
05:37Donc, ce que vous nous dites, c'est que la question
05:39du niveau des retraites aujourd'hui,
05:41je pense bien évidemment aux retraités
05:43qu'on dit les plus aisés.
05:45Pour la ministre, c'était au-dessus de 2000 ou 2500 euros.
05:47Cette question-là se pose
05:49et fait partie des paramètres
05:51dans les scénarios sur les retraites.
05:53Ce n'est pas du tout ce que je vous dis.
05:55Ce que je vous dis, c'est qu'il y a toute une série de leviers d'action,
05:57et on les connaît. C'est effectivement l'âge,
05:59la durée de cotisation, le niveau de prestation.
06:01Écoutez, bien sûr,
06:03on peut tout imaginer.
06:05Y compris de faire contribuer les retraités au redressement des finances.
06:07Là, vous allez me chercher
06:09à m'entraîner sur un terrain où je ne veux pas aller
06:11parce que je crois qu'il n'est pas juste. D'autant que
06:13le ministre de l'économie et des finances,
06:15mandaté par le Premier ministre, a dit
06:17qu'il excluait tout prélèvement sur les ménages.
06:19Donc, ça me paraît assez clair.
06:21Vous ne dites pas juste. À vos yeux,
06:23c'est une question...
06:25Non, ce que je veux dire, c'est que je ne suis pas en train de vous dire
06:27qu'on va taxer les retraités.
06:29Je suis en train de vous dire qu'il y a toute une série
06:31de possibilités et que notre rôle à nous,
06:33c'est de montrer toutes les possibilités. Ensuite,
06:35les choix seront faits par les partenaires sociaux
06:37et par les partenaires politiques. Vous savez, dans cette affaire,
06:39il y a une petite innovation,
06:41ou une rénovation. Ça fait longtemps qu'on dit
06:43à les corps intermédiaires,
06:45ça ne sert à rien, qu'on ne les écoute pas.
06:47Et bien là, on a choisi deux choses.
06:49D'abord, de faire confiance à une institution
06:51qui est respectée par les Français,
06:53la Cour des comptes pour son indépendance,
06:55alors que ce n'est pas toujours le cas. Et puis, deuxièmement,
06:57de donner sa chance au dialogue social.
06:59Et bien, donnons sa chance au dialogue social.
07:01C'est pour ça qu'aujourd'hui, on n'est pas
07:03du tout, du tout, autant des conclusions,
07:05on n'est pas du tout autant des solutions.
07:07On est dans une fabrique
07:09progressive d'un compromis possible.
07:11C'est une fusée à trois étages.
07:13Un, l'expertise. Deux, le dialogue social.
07:15Trois, la décision politique
07:17par le Parlement, la validation par le Parlement.
07:19Justement, à propos du dialogue social, vous avez rencontré déjà
07:21les syndicats et le patronat.
07:23Est-ce que vous sentez un terrain
07:25favorable pour des discussions ?
07:27Un terrain d'entente possible ?
07:29Mon rôle à moi, en les rencontrant,
07:31ce n'était pas de préparer une négociation.
07:33Encore une fois, je ne ferai pas de recommandation.
07:35C'était deux choses. C'était d'abord
07:37de les assurer que la Cour des comptes faisait un travail objectif
07:39et qu'elle n'était pas là pour valider tel ou tel chiffre.
07:41Vous avez vu, par exemple, que le Premier ministre, dans sa déclaration
07:43de politique générale, a parlé de 55 milliards.
07:45C'était une convention particulière.
07:47Une expertise qui
07:49provient de certaines réflexions.
07:51Moi, je ne suis pas là pour dire si c'est vrai ou si c'est faux.
07:5355 milliards, le trou dans le financement.
07:55Voilà. Je suis simplement pour dire
07:57que la Cour des comptes fera
07:59son propre travail.
08:01Elle n'est pas là pour confirmer le chiffre.
08:03Elle n'est pas là pour l'infirmer.
08:05Vous allez quand même donner un chiffre.
08:07On va donner un chiffre, bien sûr.
08:09Mais je ne le connais pas aujourd'hui. C'est le 19 février.
08:11Nous allons simplement partir des conventions usuelles.
08:13On va partir, naturellement,
08:15des préconisations de la loi organique sur les lois de finances.
08:17Ce serait étonnant que nous ne le fassions pas.
08:19On va partir des travaux du Corps,
08:21du Conseil d'orientation des retraites.
08:23J'ai rencontré son président.
08:25Vouloir nous opposer ne fait pas de sens.
08:27À partir de ce moment-là, on dira ce que
08:29coûtent tous les régimes de retraite.
08:31Ensuite, conventionnellement, on retiendra
08:33un chiffre et un seul.
08:35Ce que je sens des partenaires sociaux,
08:37c'est qu'ils n'ont pas envie de tout rouvrir.
08:39Ils n'ont pas envie de confondre
08:41les régimes de retraite du public et du privé
08:43en une seule grande caisse.
08:45Ce en quoi ils n'ont pas forcément tort d'ailleurs.
08:47Ce que vous êtes en train de nous dire,
08:49pour être très précis sur ce sujet-là,
08:51c'est que le mode de calcul de François Bayrou,
08:53on l'a entendu lors de sa déclaration de politique générale,
08:55il a estimé que le déficit global
08:57des retraites était de 55 milliards
08:59parce qu'il inclut effectivement
09:01ce que l'État compense sur les retraites
09:03de la fonction publique.
09:05Vous, vous considérez que le raisonnement
09:07du Premier ministre est inexact ?
09:09Non. Je pense que c'est un raisonnement
09:11qui sort d'abord
09:13d'un travail qu'avait fait le commissariat général
09:15au plan qu'il présidait avant.
09:17Il y a aussi des travaux d'un expert
09:19qui s'appelle Jean-Pascal Beaufray,
09:21je fais un peu de publicité au passage,
09:23même si je ne suis pas d'accord avec tout ce qu'il dit.
09:25C'est vrai que
09:29les régimes du public
09:31ne sont équilibrés que parce qu'il y a
09:33une très forte subvention de l'État.
09:35Mais moi je pars d'un autre point de vue
09:37qui est qu'en réalité c'est une dépense.
09:39Une dépense publique.
09:41Et cette dépense publique est dans le pont commun
09:43de toutes les dépenses de l'État.
09:45Et donc je sens la préoccupation
09:47de certains partenaires sociaux
09:49de dire attention,
09:51on veut nous demander de faire un transfert
09:53et donc d'ajouter encore des efforts.
09:55Je pense qu'il faut partir
09:57des conventions existantes
09:59et donc le chiffre du Premier ministre
10:01il est dans une forme de convention
10:03qu'on peut adopter mais qui n'est pas celle
10:05qui est usuellement
10:07la base de travail sur les retraites.
10:09Et la Cour des comptes
10:11j'imagine, je ne peux pas donner les résultats
10:13puisqu'encore une fois on est au travail
10:15la Cour des comptes donnera j'imagine
10:17des besoins de financement
10:19qui sont des ordres de grandeur
10:21qu'on connait aujourd'hui j'imagine.
10:23Avec peut-être une petite détérioration
10:25parce que c'est vrai que la situation économique
10:27celle du chômage notamment n'est plus la même
10:29que le monde des travaux de la réforme précédente.
10:31Est-ce qu'on pourrait arriver à une situation
10:33où vous sortez quelque part
10:35des chiffres qui imposent
10:37une nouvelle réforme des retraites
10:39plus dure que celle qu'on a eu
10:41il y a deux ans ?
10:43C'est-à-dire de passer à 65, 66,
10:4567 ans ?
10:47Non, je pense que ce n'est pas du tout l'objet.
10:49Encore une fois ce que nous allons faire
10:51c'est un travail je le redis indépendant et objectif
10:53qui partira des données existantes
10:55qui les actualisera avec un certain
10:57nombre d'hypothèses y compris des hypothèses économiques
10:59sur la productivité et l'emploi.
11:01Nous allons continuer d'ailleurs à travailler sur ce sujet là.
11:03Ensuite une projection à 20 ans
11:05qui montrera aussi sur quoi on peut jouer
11:07notamment sur le terme économique et enfin
11:09des leviers d'action. Et une fois qu'on aura
11:11tout ça, il s'agit d'avoir
11:13un travail encore une fois très
11:15fort et
11:17qu'il soit une référence. Ensuite
11:19il faut qu'il soit lisible. Je vous garantis que ce
11:21rapport sera très pédagogique. J'ai demandé aux équipes
11:23de le travailler. Et enfin
11:25ce qui est important c'est que c'est un travail
11:27qui doit être utile et
11:29il s'inscrit dans le moment présent. Et le moment présent
11:31c'est bien la réforme de la réforme
11:33précédente
11:35avec l'idée de l'améliorer.
11:37C'est pas faire un boulot
11:39qui impose une réforme supplémentaire. Même si
11:41au passage, c'est vrai que si on projetait
11:43à 2070, si on va plus loin
11:45on sait qu'à un jour il faudra sans doute
11:47une autre réforme des retraites. A chaque jour suffit sa peine.
11:49Mais vous ferez peut-être le constat que
11:51reporter à nouveau l'âge légal de départ
11:53est le levier d'action
11:55le plus efficace
11:57pour financer les retraites. Il y aura
11:59je pense quelque chose d'un peu différent
12:01encore une fois des leviers d'action et pas de recommandations
12:03pas de préconisations, pas de
12:05scénario central. Nous sommes là encore une fois
12:07dans ce premier étage de la fusée, celui
12:09de l'expertise. C'est déjà
12:11pas mal, ça suffit à notre bonheur.
12:13Et puis la deuxième raison pour laquelle je vois
12:15les partenaires sociaux, car je voulais les rassurer
12:17sur ce point de notre objectivité de ne pas
12:19être là pour valider les chiffres ou changer les conventions
12:21c'est aussi pour
12:23sentir ce que sont pour eux les
12:25paramètres de réflexion et les intégrer dans nos
12:27travaux. Et je veux dire que
12:29ces discussions sont pour moi extrêmement enrichissantes.
12:31J'espère aussi pour mes partenaires.
12:33Le patronat défend une part de retraite
12:35par capitalisation
12:37comme cela existe par exemple déjà
12:39pour les complémentaires des fonctionnaires.
12:41Est-ce que c'est une solution aussi
12:43pour sauver une partie de notre système ?
12:45Ça fait sans doute
12:47partie des éléments du débat.
12:49Vous le mettez dans votre raisonnement ou pas ?
12:51Non, parce que je pars moi des
12:53régimes par répartition, mais après il y a un besoin de financement.
12:55C'est ça le sujet. Est-ce que
12:57ce besoin est de 55 milliards ? Est-ce qu'il est d'une quinzaine
12:59de milliards ? Encore une fois, à court terme
13:01parce qu'à long terme, ça va probablement s'accroître
13:03et comment est-ce qu'on fait pour
13:05le résorber ? Parce qu'il y a quand même une chose que je veux dire.
13:07Je suis président de la Cour des Comptes
13:09et je suis président du Haut Conseil des Finances Publiques.
13:11J'ai naturellement le souci
13:13de l'équilibre global de nos finances publiques.
13:15Et nous sommes dans une situation tout à fait
13:17inquiétante. Il est hors de question
13:19à mes yeux, et ça on le comprendra
13:21comme président de la Cour des Comptes,
13:23que les préconisations
13:25qui peuvent être issues de nos travaux
13:27dégradent la situation de finances publiques.
13:29Comment dire ? On peut changer les paramètres
13:31de la réforme de 2023
13:33mais attention, il faut bien que l'équilibre
13:35financier soit lui inchangé.
13:37Donc il faut, chaque fois qu'on changera
13:39un paramètre, trouver des ressources en face.
13:41Ça c'est important et je veux que ce soit clair.
13:43Ce ne serait pas
13:45à mes yeux, pour le coup je reprendrai ma casquette plus tard
13:47de président de la Cour des Comptes, pas
13:49en tant que responsable de l'émission Flash,
13:51ce serait vraiment tout à fait
13:53dommageable si la discussion
13:55aboutissait sur une dégradation
13:57par rapport à la réforme.
13:59Ça, il faut que financièrement, ça boucle.
14:01Pierre Moscovici, parce qu'il est question notamment
14:03de faire des améliorations, par exemple sur la condition
14:05des carrières
14:07des femmes, pour les carrières longues
14:09également, est-ce que ces améliorations-là
14:11vous les chiffrez ou pas ?
14:13Oui, on va les chiffrer sans aucun doute.
14:15Je vois bien qu'il y a des demandes sur la pénibilité,
14:17qu'il y a des demandes sur les carrières longues,
14:19qu'il y a des demandes sur les carrières hachées,
14:21qui concernent au premier chef les femmes.
14:23Ce sont des paramètres de discussion.
14:25Oui, on aura des chiffres là-dessus.
14:27Ce que je sens,
14:29à travers la discussion des partenaires sociaux,
14:31et encore une fois, je ne saute pas aux conclusions,
14:33c'est qu'au fond, ils sont très conscients
14:35que
14:37oui, c'est un test
14:39pour les corps intermédiaires, c'est un test
14:41pour la négociation sociale.
14:43Ça va être très difficile, chacun le sait.
14:45Il y a des contradictions,
14:47il y a des visions qui sont assez écartées.
14:49Vous parliez de capitalisation, c'est pas forcément
14:51ce qui anime tous les partenaires sociaux,
14:53les partenaires sociaux syndicaux, mais ce n'est pas moi
14:55de parler à leur place. Et puis, à l'inverse,
14:57il y a le retour à la retraite à 60 ans,
14:59ce n'est pas forcément ce qui va animer le MEDEF.
15:01Donc, ça va être très compliqué.
15:03Mais ce que je sens, c'est quand même une volonté
15:05partagée de discuter vraiment.
15:07Donc, il faut laisser sa chance
15:09à la négociation, laisser sa chance
15:11aux corps intermédiaires, ne pas imposer.
15:13C'est très difficile, cette affaire.
15:15Mais, à chaque étape,
15:17l'expertise, on va être scruté, il faut qu'on soit bon.
15:19Les partenaires sociaux,
15:21est-ce qu'ils sont capables de bâtir ou pas incompris ?
15:23Et ensuite, le Parlement, à mon sens, si je peux me permettre,
15:25avec une petite expérience que j'ai du passer,
15:27je crois qu'il ne faudra pas rouvrir tout le dossier.
15:29Il faudra, en effet, réexaminer
15:31ou valider des accords
15:33totaux ou partiels, on verra bien arriver,
15:35de tous ou pas, sur tous
15:37ou pas, et puis ensuite
15:39avoir un
15:41état législatif assez rapide,
15:43qui soit davantage lors de la validation,
15:45parce que si on rouvre tout le dossier,
15:47alors, à ce moment-là, on est parti pour la gloire,
15:49dans un contexte politique qui ne m'échappe pas complètement,
15:51où il n'y a pas de majorité
15:53évidente, vous voyez, je suis très plainte, on passera peut-être
15:55à un peu moins de diplomatie plus tard, où il n'y a pas
15:57de majorité du tout, en fait, au Parlement,
15:59et sans majorité, repartir
16:01dans une cathédrale législative,
16:03ça me paraît difficile. Donc, voilà,
16:05c'est pour moi, les trois étages,
16:07chacun à son niveau,
16:09soyons responsables, essayons d'avancer,
16:11bonne expertise, compromis,
16:13validation parlementaire, et là,
16:15on peut peut-être arriver à quelque chose.
16:18Le grand jury.
16:20Ça se passe au Parlement.
16:22Alors, avant de parler du budget 2025,
16:24un mot encore sur le discours de François Bayrou,
16:26quand le Premier ministre a listé
16:28les gouvernements qui avaient plombé
16:30les déficits, en particulier
16:32ceux de Lionel Jospin, puis de François Hollande.
16:34Est-ce que vous avez trouvé cela sévère ?
16:36Il faut m'obliger
16:38à me replonger dans le passé, puisqu'il se trouve
16:40qu'en effet, j'ai été d'abord
16:42cinq ans ministre de Jospin, et puis
16:44j'ai été le premier ministre des Finances
16:46de François Hollande.
16:48Je change un peu de casquette une seconde.
16:50J'ai trouvé ça,
16:52oui, un peu hâtif. D'ailleurs, je crois
16:54que Lionel Jospin a réagi,
16:56a téléphoné à François Bayrou,
16:58parce qu'en effet, quand on regarde les chiffres sur la législature
17:001997-2002, incontestablement,
17:02les déficits ont baissé
17:04et le niveau d'aide était beaucoup plus faible qu'aujourd'hui.
17:06Je m'en souviens, en 2001,
17:08au moment où on entre dans l'euro, la France et l'Allemagne
17:10ont exactement, exactement
17:12le même niveau de dette publique.
17:1498,9% du PIB, exactement.
17:16Nos déficits sont à 1,5%,
17:18donc il y a incontestablement un effort.
17:20Et je me souviens aussi que quand j'arrive
17:22à Bercy, en 2012,
17:24le déficit est à 5,2%,
17:26et quand je quitte Bercy
17:28à la mi-2014, il est à 3,9%.
17:30Donc François Bayrou a été injuste avec la...
17:32Non, c'est pas ça, c'est qu'il a fait peut-être des trop grandes périodes.
17:34Moi, je pense
17:36qu'il faut un peu, sur cette affaire-là, être subtil.
17:38C'est-à-dire que oui, il y a une tendance générale
17:40à l'augmentation de la dette,
17:42une tendance générale à la dégradation des déficits.
17:44Nous n'avons pas voté un budget en excédent
17:46depuis 1974, et c'est pas pour demain,
17:48mais il y a quand même des gouvernements
17:50qui font plus d'efforts que d'autres
17:52de vertu en matière de finances publiques.
17:54Il y a de bonnes nouvelles dans ce panorama.
17:56Record de faillite d'entreprise, fermeture d'usine,
17:58condition de crédit à la France 6 d'intérieur,
18:00export en Berne, et par un record,
18:02tout ça s'ajoute justement au déficit important que vous venez d'évoquer.
18:04Est-ce que dans ces signaux,
18:06dans ces feux rouges,
18:08il y a des signaux au vert
18:10que vous relevez ?
18:12Honnêtement, on n'est pas dans un moment
18:14extraordinaire pour l'économie française, mais
18:16il ne faut pas non plus sombrer dans le catastrophisme.
18:18Nous avons des forces
18:20fondamentales qu'on ne doit pas oublier.
18:22Nous sommes, par exemple,
18:24la première destination touristique du monde,
18:26et de loin. Nous sommes
18:28la septième économie du monde.
18:30Nous sommes dans le G7,
18:32dans le G20. Nous avons
18:34des entreprises qui sont absolument magnifiques.
18:36Nous avons une main d'oeuvre qui est formée.
18:38Nous avons un système éducatif
18:40qui doit être amélioré, notamment dans le primaire et le secondaire,
18:42mais qui reste massif
18:44et qui forme
18:46des universitaires, des chercheurs,
18:48des innovateurs de grande qualité.
18:50Bref, la France a des atouts. C'est aussi
18:52un membre fondateur de l'Union Européenne,
18:54c'est un membre central de l'Union Européenne,
18:56c'est un membre permanent du Conseil de Sécurité,
18:58donc il ne faut pas être dans
19:00la flagellation ou dans le dénigrement
19:02de ce qu'est la France. Elle a des ressources,
19:04elle a des forces, elle a des capacités. Mais disons-le quand même,
19:06le moment est difficile.
19:08Il y a des difficultés économiques auxquelles
19:10il faut être vigilant, et ça ne sert à rien non plus
19:12d'être dans une euphorie qui ne correspond
19:14pas à la réalité. Et il y a tout de même une situation
19:16de finances publiques qui,
19:18elle, je le dis, est un point
19:20noir considérable, avec
19:22une situation préoccupante, inquiétante,
19:24et qui est assurément, pour le coup,
19:26aujourd'hui, la plus mauvaise
19:28de la zone euro, je dis bien la plus
19:30mauvaise, et qui donc doit être
19:32corrigée impérativement.
19:34Ça pèse aussi sur notre crédibilité.
19:36La plus mauvaise, c'est-à-dire qu'on est
19:38passé derrière la Grèce, derrière
19:40l'Italie, derrière...
19:42Alors, nous sommes
19:44le troisième pays le plus endetté
19:46de la zone euro, en pourcentage du PIB.
19:48Derrière la Grèce, derrière l'Italie.
19:50Nous sommes le premier émetteur de
19:52dettes, parce que nous avons un PIB justement plus
19:54important que l'Italie, nous sommes la deuxième
19:56économie de la zone euro. Donc nous sommes les premiers,
19:58nous avons la masse, si vous voulez, des 3 300
20:00et quelques milliards d'euros, c'est la plus importante
20:02dette de la zone euro. Mais surtout,
20:04par rapport à la Grèce ou l'Italie,
20:06évidemment, on pourrait dire qu'ils sont dans une situation
20:08de dette plus importante que la nôtre
20:10en stock, mais leur situation évolue
20:12dans le bon sens. La dette
20:14grecque diminue beaucoup, la dette
20:16italienne diminue beaucoup. Quand je regarde
20:18le marché financier, je vais donner un indicateur.
20:20C'est ce qu'on appelle les spreads.
20:22Les spreads, c'est le différentiel de taux
20:24d'intérêt entre les différents pays. Aujourd'hui,
20:26notre spread est assez
20:28important avec l'Allemagne, il a doublé
20:30depuis la dissolution, quelques 85
20:32points de base, 0,85%.
20:34Alors, nous sommes,
20:36nous empruntons plus cher que l'Espagne,
20:38nous empruntons plus cher que la Grèce, et franchement,
20:40quand j'étais ministre des Finances il y a une douzaine
20:42d'années, quand j'étais commissaire européen
20:44en charge des Finances il y a une dizaine d'années,
20:46qui aurait pensé que la France emprunterait
20:48plus cher que l'Espagne ou la Grèce ? Et je parle
20:50même pas du Portugal, qui pour le coup est aujourd'hui
20:52devenu un modèle en matière de finances publiques. Et ce qui me
20:54frappe, et qu'il faut garder, c'est que le
20:56spread entre l'Italie et la France, alors l'Italie a
20:58encore des taux d'intérêt un tout petit peu plus élevés
21:00que nous, mais ce spread-là diminue.
21:02Et moi, si vous voulez,
21:04je suis pas du tout dans le catastrophisme, mais
21:06je rêve. J'aime
21:08un pays qui est leader parce qu'il en a la capacité.
21:10Et ce que je constate aujourd'hui, c'est que
21:12on n'est pas... Quand certains
21:14parlent de crise grecque à propos de la France, ça n'a pas de sens.
21:16Le FMI va pas arriver demain.
21:18Notre dette est bonne, elle se place sur le marché.
21:20Oui, mais elle coûte plus cher.
21:22Et moi, ce que j'aime, c'est notre capacité
21:24de leadership. Notre place, c'est pas
21:26d'être les derniers au fond de la classe.
21:28Pas du tout. Et donc, il faut vraiment que là, on se secoue.
21:30D'autant qu'il n'y a pas que la dette.
21:32En matière de déficit, notre déficit est
21:34aujourd'hui à 6% du PIB, valeur
21:362024. C'est deux fois plus que ce qu'on
21:38attend de nous. C'est 3%, vous savez, les
21:40critères des traités. C'est à peu près deux fois
21:42plus que la moyenne de la zone euro.
21:44C'est donc beaucoup, beaucoup trop. Et
21:46l'année 2024, après l'année
21:482023... L'année 2023 a été une année
21:50plus que médiocre. L'année 2024, je le redis
21:52souvent, a été une année noire
21:54pour nos finances publiques. Ça suffit. Il faut
21:56rectifier le tir. Il faut redresser la barre.
21:58Il faut retrouver des finances publiques qui soient beaucoup plus solides. Parce que
22:00ce que j'ai appris en assez longue
22:02vie publique, c'est qu'on ne peut pas faire de bonnes
22:04politiques publiques. On ne peut pas investir
22:06si on n'a pas de bonnes finances publiques.
22:08C'est pareil pour un ménage. C'est pareil pour l'entreprise.
22:10C'est pareil pour l'État. C'est pareil pour
22:12les collectivités locales et pareil pour la sécurité sociale.
22:14Pauline Buisson. Nous n'avons toujours pas de budget
22:16pour 2025. Ça ne nous a pas
22:18échappé. La censure aurait coûté 12 milliards
22:20d'euros selon le gouvernement. Est-ce que vous confirmez ce
22:22chiffre ? Ça vous paraît vraisemblable ?
22:24C'est la réalité ? Je ne le confirme ni l'infirme.
22:26En tout cas, ce qui est certain, c'est que le
22:28temps perdu, comme on dit, c'est de l'argent.
22:30Et surtout, une chose sur laquelle
22:32je veux insister. Vous savez, aujourd'hui,
22:34vous parliez de l'économie. C'est vrai que
22:36ce qu'on voit, pour être moins
22:38catastrophiste, c'est qu'il y a de l'attentisme.
22:40Disons que les entreprises
22:42attendent pour investir.
22:44Les consommateurs attendent pour
22:46consommer. Donc, ils continuent d'épargner.
22:48Alors que pour qu'on ait de la croissance, il faut
22:50absolument qu'on ait une très forte consommation.
22:52La consommation est, et a toujours été,
22:54le moteur principal de la croissance
22:56française. Donc, il y a de l'attentisme. Et qu'est-ce qu'ils
22:58attendent ? Ils attendent de la stabilité politique.
23:00Et donc, vous avez au fond
23:02trois paramètres qui sont liés. Vous avez de l'incertitude
23:04économique et de l'attentisme.
23:06Vous avez une dégradation
23:08financière. Et tout ça, ça procède de
23:10l'instabilité politique. Parce que
23:12les entreprises, les consommateurs, au fond,
23:14ne savent pas exactement à quelle sauce
23:16ils vont être mangés. Vous parliez tout à l'heure des retraités.
23:18Je ne sais pas ce qui va être fait. Mais simplement,
23:20quand on ne sait pas si
23:22on va justement payer un impôt ou pas,
23:24quand on ne sait pas ce qui va se passer en face
23:26ou pas, s'il va y avoir une ressource ou pas,
23:28s'il va y avoir des investissements publics ou pas, alors à ce moment-là,
23:30on attend. Et donc,
23:32le cœur de la crise française du
23:34moment, c'est l'instabilité politique. Est-ce que ça
23:36coûte 12 milliards ou 10
23:38ou 14 ? Je ne peux pas vous le dire, mais il est certain
23:40que oui, ça nous coûte.
23:42Et donc, François Bayrou a bien fait de négocier avec le Parti
23:44socialiste au prix de certaines concessions coûteuses.
23:46C'est un indicateur qui est assez précis.
23:48Je suis président du Haut Conseil des Finances Publiques. Il faut peut-être expliquer
23:50aux Français ce que c'est, parce qu'à la Cour des Comptes,
23:52tout le monde la connaît. 90% des Français...
23:54Vous avez reçu le budget cette semaine.
23:56Le Conseil des Finances Publiques est une institution que, d'ailleurs, j'ai créée
23:58quand j'étais ministre des Finances, qui existe dans
24:00tous les pays de la zone euro,
24:02qui donne un avis sur le projet de loi de finances.
24:04Et donc, il se trouve que
24:06nous avons reçu le projet
24:08de loi de finances il y a deux jours et que nous rendrons notre avis
24:10jeudi. Je ne peux donc pas non plus le commenter trop.
24:12Mais il y a une donnée qu'on connaît déjà,
24:14c'est que la prévision de croissance a été réduite
24:16de 0,1 à 0,7.
24:18Pardon, de 1,1 à 0,9.
24:20Mon lapsus n'est pas totalement
24:22hasardeux. C'est parce qu'en réalité,
24:240,9, c'est encore un peu plus que la moyenne des
24:26prévisionnistes qui est à 0,7.
24:28Donc, le gouvernement est trop optimiste ?
24:30Non, mais
24:32c'est un chiffre qui est possible.
24:34Mais il est légèrement
24:36plus important
24:38que le consensus actuel. Mais c'est faisable.
24:40Et le deuxième chiffre ?
24:42Qu'est-ce qui se passe ? D'où ça vient ça ?
24:44Ça vient simplement du fait qu'en effet,
24:46la perception économique, le regard des
24:48agents économiques est plus inquiet et plus
24:50attentif. Et donc, est-ce que ça veut dire que pour
24:52tenter de garantir une forme de stabilité politique
24:54et maintenir le gouvernement le plus
24:56longtemps possible, est-ce que ça veut dire que François Bayrou a bien fait
24:58de négocier avec le
25:00parti socialiste
25:02quelques concessions très coûteuses ?
25:04Vous êtes journaliste politique, moi je ne le suis pas
25:06donc je ne vais pas faire de commentaire. Je vais simplement faire une remarque
25:08institutionnelle.
25:10Dans l'Assemblée élue
25:12cet été, il n'y a pas de majorité.
25:14Le gouvernement de
25:16François Bayrou n'est pas un gouvernement majoritaire.
25:18Il est soutenu par ce que Michel Barnier a appelé
25:20un socle commun, je ne sais plus comment on l'appelle aujourd'hui, disons
25:22essentiellement par le centre et par la droite.
25:24Et ça, ça fait
25:26210-220 députés.
25:28Si on veut faire voter un projet de loi de
25:30finance ou éviter qu'il soit censuré
25:32de manière arithmétique, il faut
25:34élargir la base. Donc cette base,
25:36on pouvait chercher à l'élargir du côté
25:38du Rassemblement National, on peut
25:40chercher à l'élargir du côté de la gauche.
25:42Si en toute hypothèse, on n'a ni l'un ni
25:44l'autre, le budget sera censuré.
25:46C'est ce qui est arrivé à Michel Barnier.
25:48Donc vous dites que la stabilité vaut bien quelques milliards ?
25:50Je dis simplement que quand vous discutez
25:52avec des partenaires,
25:54forcément vous devez écouter
25:56ce qu'ils demandent. Mais
25:58comme Président de la Cour des Comptes, je dis aussi
26:00attention.
26:02Le budget Barnier prévoyait
26:04quelques 5% de déficit
26:06alors que nous sommes à 6%.
26:08C'était peut-être difficile. Le budget
26:10je vais l'appeler Bayrou, prévoit 5,4%.
26:14Il faut vraiment les faire.
26:16Est-ce que vous avez un doute
26:18sur ces 5,4% ?
26:20Je ne veux pas anticiper sur l'avis de vos conseils
26:22des finances publiques. Disons que
26:24il faudra vraiment
26:28non seulement les voter
26:30sans dégrader les 5,4%,
26:32mais en plus après les exécuter.
26:34Moi ce qui m'a frappé en 2023
26:36comme en 2024, c'est qu'on a voté les budgets.
26:38Je ne sais pas si vous vous en souvenez, mais en 2023
26:40le projet de loi de finances était censé
26:42s'exécuter à 4,9%.
26:44Il est passé à 5,5%.
26:46Et puis le budget 2024,
26:48il a été voté il y a un peu plus d'un an
26:50avec 4,4% de déficit.
26:52128 milliards d'euros.
26:54A l'arrivée, c'est 6% et près de 180 milliards d'euros.
26:56Donc il faut à la fois
26:58voter quelque chose,
27:00et 5,4 me paraît un chiffre maximum,
27:02et il faut ensuite l'exécuter.
27:04Pourquoi ? Pas pour le plaisir.
27:06Moi je n'ai jamais été un partisan de l'austérité,
27:08et à 5,4% on n'est pas dans l'austérité, simplement parce que nous avons aussi
27:10des engagements. Nous avons adressé
27:12à la Commission européenne, c'est-à-dire à nous-mêmes en réalité
27:14et à l'Europe, une trajectoire
27:16de finances publiques qui doit nous amener à 3%
27:18en 2029.
27:20Et où est-ce que vous voyez ces nouvelles pistes d'économie ?
27:22Où est-ce que vous voyez ces nouvelles pistes d'économie ?
27:24C'est au gouvernement de les montrer.
27:26Ce n'est pas moi qui vais commenter les pistes d'économie.
27:28Il va les présenter, mais simplement
27:30il y a d'une part qu'il reprend
27:32des économies qui étaient prévues dans le budget Barnier,
27:34il y a une deuxième chose
27:36qui joue, c'est que vous savez que
27:38il n'y a pas de budget, mais il y a quand même
27:40ce qu'on appelle une loi spéciale. Et cette loi spéciale en réalité
27:42c'est les services votés, c'est-à-dire qu'on continue
27:44les dépenses de l'année précédente.
27:46Et donc on n'augmente pas.
27:48Donc si on tire le trait
27:50en quelque sorte, de manière mécanique
27:52ça crée ce qu'on appelle un rabot,
27:54et puis il y a sans doute aussi de nouvelles économies,
27:56mais il va falloir regarder ça dans le détail.
27:58Un effort de 52 milliards au total prévu.
28:00C'est ce que fera le Conseil des Finances Publiques
28:02dans les grandes mafs, c'est ce que fera ensuite
28:04le Parlement.
28:06C'est à documenter,
28:08et c'est ensuite à discuter,
28:10et c'est enfin à valider.
28:12Mais mon message il est très clair,
28:145,4 OK, mais il faut
28:16vraiment, vraiment, vraiment les faire.
28:18C'est une question de crédibilité,
28:20c'est une question de soutenabilité,
28:22parce que quand on s'endette davantage ça coûte plus cher,
28:24enfin c'est une question de souveraineté.
28:26Quand on est trop endetté, on ne peut rien faire.
28:28On ne peut pas investir notamment pour les générations futures.
28:30On reviendra sur cet avertissement, et puis aussi sur les
28:32critiques des années passées que vous avez pu faire,
28:34notamment cette semaine à l'Assemblée Nationale.
28:36Ça sera dans la seconde partie du Grand Jury
28:38avec vous, Pierre Moscovici. A tout de suite.
28:50Suite du Grand Jury, présenté par Olivier Bost.
28:52Pierre Moscovici,
28:54le premier Président de la Cour des Comptes
28:56et Président du Haut Conseil aux Finances Publiques
28:58est notre invité. A mes côtés
29:00pour vous interroger, Perrine Tarnot
29:02de Public Sénat et Loris Boischaud du Figaro.
29:08Une question Pierre Moscovici, après la
29:10première partie du Grand Jury que nous avons faite ensemble.
29:12Comment jugez-vous finalement
29:14la méthode de François Bayrou ?
29:16Politiquement et sur
29:18le plan du budget, est-ce qu'il n'est pas
29:20un peu trop flou ?
29:22Je ne me sens nullement légitime
29:24pour juger la méthode du Premier Ministre.
29:26Président d'une institution qui est à sa place
29:28dans les pouvoirs publics.
29:30Simplement,
29:32ce que je vois, c'est qu'il est assez fidèle
29:34à lui-même. C'est qu'au fond,
29:36c'est un homme qui croit aux vertus du compromis.
29:38Le compromis politique, le compromis social.
29:40C'est un homme qui croit aussi aux institutions.
29:42Et donc sa méthode, c'est ça.
29:44Je crois beaucoup de dialogue.
29:46Peut-être vous appelez ça trop flou.
29:48C'est du dialogue, mais c'est aussi prendre du temps.
29:50Donc, laisser le temps au temps.
29:52C'est un homme politique peut-être d'une autre génération
29:54et d'un autre style que ceux qui l'ont
29:56précédé dans ses fonctions
29:58ces dernières années, sans doute.
30:00Mais est-ce que vous diriez, ce matin, qu'il a
30:02clairement mis le cap à gauche ?
30:04On voit que les négociations vont peut-être
30:06être difficiles avec les LR.
30:08Laurent Wauquiez l'a déjà accusé de
30:10« cramer la caisse ».
30:12Cap à gauche, je ne crois pas.
30:14Simplement, ce qui est certain, c'est que
30:16je disais qu'il faisait confiance
30:18aux institutions, la Cour des comptes, qu'il fait
30:20confiance aux partenaires sociaux, c'est le dialogue social.
30:22Et manifestement, ses partenaires privilégiés
30:24pour chercher un compromis sont davantage
30:26à gauche qu'à droite, ou à l'extrême droite.
30:28À droite, ils sont déjà au gouvernement.
30:30Pourquoi on a un cap un peu plus à gauche ?
30:32Je ne sais pas, parce que c'est à la fin qu'on voit quel est le cap aujourd'hui.
30:34Il y a des discussions,
30:36il y a des dialogues. Mais vous savez, il est là
30:38depuis finalement très peu de temps.
30:40Et il faut attendre de voir quels sont les résultats
30:42de tout cela. Est-ce que ça marche ? Est-ce que ça marche pas ?
30:44Est-ce que justement, il trouve les compromis ou pas ?
30:46Est-ce que ce sont les bons compromis ou pas ?
30:48Ça, c'est la réalité qui va finir par trancher.
30:50Et à la fin, pour ce qui me concerne, je reprendrai
30:52en effet la casquette du contrôleur, mais après.
30:54Ce n'est pas sur la méthode politique.
30:56Mais ce qu'on voit quand même, c'est que les républicains sont au gouvernement,
30:58que le parti socialiste ne censure plus,
31:00pour l'instant bien entendu, mais en tout cas
31:02ne censure plus. Est-ce que vous diriez que finalement,
31:04la dissolution a fait bouger les lignes ?
31:06Qu'elle a un peu clarifié
31:08la situation politique, comme l'avait défendu
31:10le Président de la République ?
31:12Je vois quand même que
31:14l'année 2024 a été particulière sur le plan politique.
31:16Nous n'avons pas eu
31:18quatre premiers ministres en une année depuis 1934.
31:20Nous n'avons pas eu une censure de
31:22gouvernement depuis 1962.
31:24Et depuis 1979, nous n'avons
31:26pas eu non plus une absence de budget
31:28sur l'année suivante. Et à mon avis, on est entrés dans des
31:30zones calendaires
31:32qui sont inédites sur ce côté-là. Donc ça a quand même
31:34été une année de grands bouleversements.
31:36Et c'est pas facile quand même de gérer
31:38ce Parlement. Certains disent que c'est impossible,
31:40d'autres disent que c'est en tout cas très compliqué,
31:42c'est certain. Alors après, les lignes bougent,
31:44mais elles bougent un peu tous les jours. Est-ce que ça veut dire
31:46pour autant que le Parti Socialiste
31:48est en train de revenir à l'époque
31:50pré-Union de la Gauche ? Je parle même pas pré-NUPES
31:52ou pré-NFP.
31:54J'en sais rien.
31:56Est-ce que ça veut dire qu'on est en train d'avoir
31:58une nouvelle alliance entre les chrétiens démocrates
32:00et les sociaux-démocrates ? Certains peuvent en rêver.
32:02C'est pas sûr. Donc il faut quand même avoir un petit peu
32:04plus de profondeur et de durée
32:06pour dire précisément
32:08si une clarification est en train de se faire.
32:10Disons que
32:12il y a des bougées.
32:14Et puis, il est aussi
32:16possible qu'il y ait les allers-retours, qu'on aille dans un sens
32:18à ce moment-là, dans l'autre sens.
32:20Oui, on voit le budget du Sénat qui sort quand même durci
32:22en termes d'économie, mais qui ne satisfait pas
32:24les socialistes, et sur lesquels visiblement
32:26le gouvernement va revenir. On a déjà vécu dans des républiques
32:28où finalement les alliances étaient assez
32:30mobiles, et pas d'un jour.
32:32Je ne suis pas certain qu'on soit
32:34maintenant dans un système
32:36politique où on est en train de changer complètement
32:38il y a ce qu'on appelle la tripartition
32:40l'extrême droite
32:42le bloc central
32:44très composite
32:46et puis la gauche
32:48bon, est-ce que c'est en train
32:50de se fissurer ? Sans doute,
32:52peut-être. Est-ce que c'est en train de changer complètement ?
32:54C'est loin d'être certain. Donc je pense
32:56qu'il faut quand même prendre un petit peu de profondeur
32:58pour voir ce que sont les évolutions
33:00politiques réelles. On disait tout à l'heure,
33:02un effort de 52 milliards d'euros voulus
33:04par le gouvernement. Question concrète,
33:06est-ce que vous seriez favorable
33:08à la proposition avancée par
33:10certains de travailler 7 heures de plus
33:12par an ? Ça rapporterait environ
33:142 milliards d'euros. Est-ce que ça peut être un vivier
33:16d'économie ? J'ai été parlementaire
33:18pendant une vingtaine d'années, j'ai été
33:20ministre pendant quelques années, 7 ans
33:22précisément. J'ai fait de la politique pendant très longtemps
33:24mais ce n'est pas à moi de répondre à ça. Ça fait partie du débat
33:26politique. Ce n'est pas mon
33:28jugement. Justement à propos de débat politique,
33:30sur les déficits des années passées, vous l'avez
33:32évoqué en première partie du Grand Jury
33:34et vous vous êtes montré très sévère cette semaine
33:36à l'Assemblée Nationale. Dans
33:38une audition, vous avez dit que les prévisions de croissance
33:40de l'ancien ministre Bruno Le Maire
33:42étaient à la limite de l'insincérité.
33:44On vous reproche sur le sujet
33:46des propos politiques.
33:48D'abord, un, je n'ai pas dit ça.
33:50J'ai dit justement que je n'avais jamais
33:52évoqué l'insincérité parce que l'insincérité
33:54suppose une volonté de tromper et il n'y a pas eu volonté
33:56de tromper. Vous avez été dur quand même avec l'ancien
33:58ministre Bruno Le Maire. Ce n'est pas Bruno Le Maire.
34:00Bruno Le Maire est un homme que
34:02je respecte, que j'estime, que d'ailleurs
34:04j'apprécie. Non, c'est par rapport
34:06à la qualité des prévisions. Le Haut Conseil
34:08des Finances Publiques est là pour juger,
34:10pour donner un avis sur la qualité des prévisions.
34:12Et tout de même, on s'est trompé sur
34:14tout en 2023 et 2024. Y compris vous,
34:16la Cour des Comptes. Attendez, attendez. On s'est trompé
34:18sur les prévisions macroéconomiques,
34:20on s'est trompé sur les prévisions de dépenses, sur les prévisions
34:22de recettes. Et ce que j'ai voulu montrer, Mme Tarnot,
34:24c'est extrêmement précis dans mon audition,
34:26c'est que nous avions donné quand même, personne
34:28n'est parfait, mais une série d'alertes
34:30circonstanciées, précises
34:32à chacun de nos rapports, à chacun de nos avis
34:34qui n'ont pas été écoutés.
34:36C'est très loin des reproches
34:38qui sont faits aujourd'hui
34:40à l'équipe précédente. Vous savez, le Haut Conseil
34:42des Finances Publiques, et j'y viens, il a le choix
34:44entre dire insincérité. Insincérité veut dire
34:46inconstitué. C'est en quelque sorte l'arme atomique.
34:48Je n'aime pas utiliser l'arme atomique. En général
34:50d'ailleurs, elles ne vont mieux pas. C'est une arme de dissuasion.
34:52Ou bien faire des commentaires. Nous les faisons.
34:54Et après on dit qu'ils ne sont pas assez forts. Parce que le gouvernement
34:56ne les suit pas. C'est pour ça que je fais une proposition
34:58très précise. C'est en quelque sorte
35:00de soustraire la validation
35:02des prévisions macroéconomiques
35:04et de finances publiques uniquement à l'administration
35:06et aux politiques, et
35:08de les faire valider en lien
35:10avec une institution indépendante, qui serait ce Haut Conseil
35:12des Finances Publiques. C'est ce que font
35:14la plupart de nos partenaires.
35:16Donc c'est de confier, pour être bien clair,
35:18c'est de confier les prévisions de croissance dans ce déficit
35:20au ministère de l'Economie pour le faire
35:22passer à une autorité indépendante.
35:24Je ne veux pas être technique, mais il y a deux solutions. Soit effectivement
35:26on transfère les prévisions au Conseil des Finances Publiques,
35:28soit on demande
35:30au Conseil des Finances Publiques de valider
35:32les prévisions préparées par l'administration
35:34et donc d'éviter ce biais
35:36qui peut être effectivement un biais d'optimisme.
35:38C'est pour ça que je ne suis pas du tout dans la polémique
35:40avec Bruno Le Maire. Je ne fais absolument pas de politique.
35:42Enfin, je crains
35:44que ceux qui m'ont accusé de faire de la politique soient plus politiques
35:46que moi, et je pense qu'ils ont fait une erreur
35:48qui est qu'il faut toujours respecter les institutions
35:50dont je suis en l'occurrence le gardien
35:52de l'indépendance. Je ne parle pas en mon nom
35:54personnel, je parle en nom collectif.
35:56Je ferme cette parenthèse. Ce qui est très important
35:58c'est qu'on puisse avoir
36:00des prévisions réalistes
36:02qui soient établies de manière sereine,
36:04avec un tiers de confiance, et de manière
36:06indépendante. Ce qu'on a vu ces deux
36:08dernières années, c'est qu'en effet il y a eu un biais
36:10systématique de volontarisme et d'optimisme.
36:12Je ne dis pas plus, je ne parle pas d'insincérité,
36:14je ne mets pas en question un homme.
36:16Je suis en train de dire
36:18que si on fait comme ça, il y a un système qui pousse
36:20toujours vers le haut, et après on a toujours
36:22de mauvaises surprises. Et les mauvaises surprises,
36:24c'est les Français qui les payent, à travers
36:26le déficit et la façon de le financer.
36:33Alors on l'a déjà un petit peu évoqué,
36:35mais l'élection de 2027
36:37est-elle le seul
36:39moyen de débloquer
36:41la situation politique ?
36:43Est-ce qu'on peut parler de stabilité
36:45qui n'était pas tout à fait restable ?
36:47Je vais te faire une la palissade. Nous ne sommes pas en
36:492027, nous sommes au début de 2025.
36:51Il nous reste un peu plus de deux ans.
36:53Certains voudraient accélérer le calendrier.
36:55Dans deux ans maintenant, on sera à l'ouverture de la campagne présidentielle.
36:57Je ne suis pas du tout pour l'accélération du calendrier.
36:59Nous avons des institutions.
37:01Le président de la République a été élu en 2022
37:03pour cinq ans, et je crois vraiment qu'il faut
37:05éviter de déstabiliser
37:07nos institutions. Mais il y a une crise politique
37:09par rapport à ça. La dissolution a peut-être
37:11clarifié certaines choses dans certains esprits.
37:13Il n'y a pas à croire à un retour
37:15d'une stabilité politique avec les
37:17bougées qu'on a eues ces dernières années.
37:19Ce qui me fait peur, comme tout le monde,
37:21c'est qu'en effet, quand on est dans une
37:23situation politique comme celle-ci,
37:25sans majorité, avec
37:27des négociations toujours compliquées
37:29et toujours coûteuses, avec les uns ou avec
37:31les autres d'ailleurs, à mener,
37:33on n'avance pas
37:35au rythme suffisant. On n'est pas capable
37:37de faire les réformes nécessaires. On n'est pas capable
37:39de faire les corrections de finances publiques indispensables.
37:41Je vois bien que ça va aller un peu plus
37:43doucement que ce qui était prévu. Il faut que les Français
37:45sachent qu'en réalité, ils ont un budget de 2025
37:47difficile, mais qu'ils auront toute une série de budgets
37:49et d'efforts derrière.
37:51Il sera pire le budget 2026 ? Plus dur ?
37:53C'est un peu tôt pour le dire,
37:55mais en tout cas, il sera différent.
37:57Pour revenir au 3%, il sera forcément plus dur, non ?
37:59Les 3%, ce n'est pas tout de suite.
38:01Oui, je sais.
38:03Au fond, l'effort qu'il faut faire cette année,
38:05il faudra le faire chaque année pendant
38:075 ans. Il faut que les Français le sachent.
38:09Et cette année, il y a pas mal de fiscalité.
38:11Les années suivantes, il y en aura forcément beaucoup moins.
38:13Il faudra basculer sur des économies.
38:15Et cette fois-ci, des économies intelligentes.
38:17Et est-ce qu'il faudra des impôts supplémentaires ?
38:19Si vous dites aux Français qu'ils doivent s'attendre
38:21à des budgets plus difficiles en 2026 et en 2027,
38:23vous ne pouvez pas leur dire
38:25d'un autre côté ?
38:27Il faut travailler plus ? Est-ce qu'il faut plus d'impôts ?
38:29Je pense qu'il faudra surtout
38:31beaucoup plus d'économies en dépenses.
38:33Notre dépense publique est la plus importante
38:35de la zone euro, 57% du PIB.
38:37Elle était en dessous de 54% avant
38:39la crise Covid et je n'ai pas l'impression qu'on ait rajouté des
38:41strates de services publics dont les Français
38:43s'ébaubissent. Au contraire, ils se plaignent.
38:45Ce qui veut dire qu'il y a des poches
38:47d'inefficacité. Il y a des
38:49gains de productivité, des gains d'efficience.
38:51Il y a des dépenses publiques
38:53qui sont mal calibrées.
38:55Et ça, c'est aussi le travail de la Cour des Comptes et d'autres.
38:57Mais ça vaut sur
38:59à la fois les collectivités locales, la dépense sociale
39:01et la dépense de l'État. Il faut non pas
39:03être dans une cure d'austérité ou dans
39:05une cure de maigrissement, mais dans une, comment dire,
39:07de musculation, être plus performant.
39:09Voilà ce que je préconise.
39:11Il y a beaucoup plus que plus d'impôts. Pourquoi ?
39:13Vous vous souvenez peut-être que quand j'étais ministre des Finances, en 2013,
39:15j'avais prononcé une phrase qui m'est restée...
39:17Sur le ras-le-bol fiscal.
39:19Mais tout de même, est-ce qu'on ne va pas vers la fin
39:21de la doctrine Macron, c'est-à-dire pas plus d'impôts ?
39:23Madame Tardot, elle est finie.
39:25C'est fini. Dans le budget
39:27Barnier comme dans le budget Bayrou, il y aura
39:29des hausses d'impôts relativement substantielles.
39:31Et moi, ce que je veux vous dire,
39:33je reviendrai peut-être en septembre
39:35pour reparler de ras-le-bol fiscal,
39:37c'est qu'en matière de fiscalité, une fois ça va,
39:39deux fois, bonjour les dégâts.
39:41Et donc, la première année, on peut faire la fiscalité,
39:43je pense qu'il y aura quand même...
39:45On parle de 30 milliards d'euros d'économie.
39:47À voir. 52 milliards au total.
39:49Ça veut dire qu'il y a 20 milliards d'euros d'impôts en plus.
39:51C'est quand même une augmentation fiscale substantielle.
39:53Et au bout d'un moment, la fiscalité
39:55finit aussi par décourager les agents économiques.
39:57C'est pour ça que je pense qu'à partir de l'an prochain,
39:59il faudra basculer de la fiscalité
40:01sur les économies.
40:03Voilà une réponse précise à votre question.
40:05Et c'est très important.
40:07On va revenir
40:09sur un des éléments de la semaine.
40:11Bruno Roteuil.
40:13Je n'ai pas terminé sur 2027.
40:15D'ici à 2027, on va naviguer.
40:17On va faire le mieux possible.
40:19Mais la grande clarification,
40:21elle suppose quand même qu'on retrouve
40:23une situation politique plus solide.
40:25Est-ce que François Hollande a avancé sur cette grande clarification
40:27à gauche, selon vous ?
40:29Je ne parlais pas du Part socialiste ou de la gauche,
40:31je parlais de tout le monde.
40:33Je pense que le pays, d'ici 2027,
40:35on va naviguer le mieux possible,
40:37dans une situation assez contrainte,
40:39et puis ensuite, il faudra dessiner un nouveau cap.
40:41Bruno Roteuil, le ministre de l'Intérieur,
40:43a promulgué une nouvelle circulaire
40:45pour restreindre les régularisations,
40:47notamment de ceux qui travaillent.
40:49Notre économie a-t-elle besoin d'immigration ?
40:51Si on pose la question
40:53de cette façon-là,
40:55dans une économie mondialisée,
40:57et dans des sociétés vieillissantes,
40:59avec une démographie chancelante,
41:01on voit bien à la fois, heureusement,
41:03qu'à un certain bout de la vie,
41:05on vit plus longtemps et en meilleure forme,
41:07et à l'autre bout de la vie, on fait moins d'enfants.
41:09Eh bien oui, oui, forcément,
41:11il y a toujours besoin d'immigration.
41:13Il y a besoin d'immigration aux États-Unis,
41:15il y a besoin d'immigration en Europe,
41:17nos sociétés sont vieillissantes.
41:19La question, ce n'est pas de savoir si on a besoin ou pas d'immigration,
41:21c'est de savoir de quelle immigration on a besoin.
41:23C'est aussi de savoir comment on traite l'immigration illégale.
41:25Et la Cour des comptes avait fait, il y a un an,
41:27un rapport qui montrait...
41:29Vous savez, l'immigration illégale,
41:31soit vous restreignez les flux d'entrée,
41:33soit vous améliorez les flux de sortie.
41:35Que ça ne marchait pas très bien, au debout.
41:37C'est ça la question réaliste qu'il faut traiter.
41:39Je n'ai pas à commenter la façon dont le ministre
41:41la traite ou pas.
41:43Mais en général,
41:45s'imaginer qu'on est dans une société fermée,
41:47surtout quand elle est vieillissante, c'est malthusien.
41:49Mais on n'a pas non plus à accueillir
41:51tous les immigrés, et dans n'importe quelle condition.
41:53Et donc il faut une politique à la fois
41:55ouverte et très ferme.
41:57Pour évoquer un autre rapport de la Cour des comptes,
41:59vous avez fait un nouveau rapport, plutôt sévère,
42:01sur l'EPR de Flamanville,
42:03et sur la prochaine génération de réacteurs nucléaires.
42:05Les surcoûts de production
42:07et les incertitudes sur la rentabilité des EPR
42:09font peser un risque sur l'actionnaire,
42:11c'est-à-dire l'Etat, c'est ce qu'a écrit la Cour des comptes.
42:13C'est trop risqué de se lancer
42:15dans la construction de ces nouveaux EPR ?
42:17Alors, d'abord, ce que nous constatons,
42:19nous avions déjà fait un rapport sur Flamanville en 2020,
42:21qui était plus sévère que celui-ci.
42:23C'est que depuis là... Flamanville, on le rappelle,
42:2512 années de retard, presque 7 fois les coups initials.
42:27Absolument, et ça n'a peu augmenté depuis 2020,
42:29ces 23 milliards, au final, c'est quand même pas mal.
42:31Mais il est là. Maintenant, il est raccordé.
42:33Ce qu'on constate, c'est que depuis 2020,
42:35est intervenue une accélération très forte
42:37de la filière nucléaire,
42:39avec une volonté qui est de développer
42:41cette source d'énergie,
42:43qui est décarbonée, avec de nouvelles sources
42:45et aussi de nouvelles procédures,
42:47de nouvelles gouvernances, la Cour des comptes le montre.
42:49En même temps, il y a, c'est vrai,
42:51des incertitudes financières très fortes.
42:53On constate que la rentabilité
42:55de ces projets est toujours faible.
42:57On constate qu'elle est incertaine. On constate que les sources
42:59de financement ne sont pas forcément là.
43:01Et c'est EDF qui n'est pas capable de fournir un plan
43:03de rentabilité suffisant ?
43:05Un EPR, ça coûte très cher. Un couple d'EPR,
43:07c'est quelques 40 milliards d'euros.
43:09Et nous avons, non seulement l'EPR de Flamanville,
43:11mais nous avons aussi des EPR à Hinckley Point, au Royaume-Uni.
43:13J'en sais quelque chose. C'est moi qui avais aussi
43:15conclu cette négociation il y a une douzaine d'années,
43:17comme mises et finances. Il y a même un nouveau projet
43:19à Sizewell. Et donc,
43:21ce que nous disons, c'est d'être un peu prudent, c'est-à-dire quand même
43:23d'améliorer la rentabilité avant de nous lancer
43:25dans de nouvelles aventures. Et puis aussi, de retrouver
43:27un savoir-faire,
43:29une industrie
43:31qui fonctionne. Parce que, comme on avait quand même
43:33beaucoup abandonné la construction
43:35de réacteurs, on ne sait plus tout faire.
43:37Donc, il y a quand même beaucoup de choses à faire.
43:39Et il faut quand même que tout ça, là encore,
43:41soit finançable. Parce que pourquoi ? In fine, c'est toujours
43:43de la dette. Et la dette,
43:45c'est ce qui obstrue l'avenir
43:47pour la France et pour les Français.
43:49Le Grand Jury.
43:51Question express.
43:53Question express avec un principe. Réponse par oui ou par non.
43:55Pour ou contre. Faut-il supprimer
43:57les avantages des anciens présidents
43:59de la République et des anciens premiers ministres ?
44:01Non.
44:03Les calibrer, peut-être.
44:05Mais les supprimer, non. Ce sont quand même
44:07d'une part les personnes dont la sécurité
44:09doit être assurée, qui ont servi le payé, qui continuent
44:11à le servir à leur place. Un président doit-il
44:13soutenir des sportifs qui ne veulent pas
44:15avoir à réduire leur budget ?
44:17S'il a envie.
44:19Pour ou contre
44:21la Banque de la Démocratie, pour
44:23financer les campagnes électorales ?
44:25Plutôt oui, même si aujourd'hui
44:27le problème ne se pose plus avec la même acuité qu'au moment
44:29où François Bayrou l'avait lancé. Mais c'est vrai que
44:31constater qu'un certain nombre de partis sont exclus
44:33des participations
44:35à l'élection pour des raisons
44:37financières, parce qu'on ne les aimerait pas,
44:39ce n'est pas la bonne réponse.
44:41Faut-il organiser un référendum sur la légalisation du
44:43cannabis ? Proposition du maire écologiste
44:45de Grenoble, Éric Piolle.
44:47C'est le président de la République
44:49qui décide si on fait des référendums
44:51ou pas, et dans les conditions prévues par
44:53la Constitution, je ne suis pas sûr que ce soit le cas.
44:55Est-ce que vous, vous restez sur le réseau X ?
44:57Pour le moment, oui. Mais
44:59je fais très attention, parce que je constate
45:01effectivement que la modération
45:03n'existe plus, qu'il y a des paramètres
45:05qui sont quand même très dangereux, que c'est devenu
45:07vraiment une source d'insultes,
45:09notamment pour l'extrême droite, et pas seulement pour l'extrême droite.
45:11Donc j'attends quand même que l'Europe fasse un peu
45:13le ménage. Si ce n'est pas le cas,
45:15si on n'est pas capable de réguler X, alors
45:17moi personnellement, mais aussi l'institution
45:19que je préside, la Cour des Comptes, en sortira.
45:21Et nous en parlons avec les
45:23responsables de grandes institutions publiques françaises.
45:25Je pense qu'il faut une démarche groupée, et il faut aussi
45:27être capable de diversifier les sources sur ces réseaux sociaux.
45:29Pourquoi est-ce que je prends un peu plus de temps que
45:31L'Express ? C'est parce que c'est vraiment un très, très,
45:33très grand sujet, et la figure de
45:35M. Musk n'est pas une figure rassurante pour la démocratie.
45:37Alors justement, ça nous amène
45:39à Davos, avec le sommet des Grands
45:41Patrons cette semaine. Nous avons vu des
45:43patrons européens partagés entre fascination
45:45et inquiétude, alors face à Elon
45:47Musk, mais aussi face à Donald
45:49Trump. Vous êtes dans quel état
45:51d'esprit, vous, par rapport à Donald Trump ?
45:53Je ne suis pas un grand patron, mais
45:55quand même, je regarde ça avec un mélange
45:57disons de réalisme
45:59et d'inquiétude. Il ne faut pas être
46:01hostile.
46:03Les Etats-Unis ont choisi un président,
46:05ils sont nos alliés, nous appartenons
46:07ensemble à l'OTAN, nous avons des interactions
46:09économiques, politiques, internationales
46:11extrêmement fortes, donc
46:13démoniser Donald Trump n'a pas
46:15de sens. Mais il ne faut pas non plus être naïf.
46:17Le président, il est parti assez fort
46:19quand même. Et vous trouvez l'Europe trop naïve aujourd'hui ?
46:21Alors, ce qu'il a dit, il a dit qu'il était d'abord
46:23climato-sceptique, sorti des accords de Paris,
46:25et puis lui, on parlait du nucléaire,
46:27des hydrocarbures,
46:29en veux-tu, en voilà. Oui, son slogan, c'est Forêt Forêt.
46:31Il est protectionniste des droits
46:33de douane, et il est
46:35isolationniste. On voit bien que
46:37l'ambiance sur l'Ukraine ou sur le Proche-Orient
46:39est en train de changer. Et par rapport à ça,
46:41il faut être ni naïf, ni hostile,
46:43il faut être capable de riposter
46:45en fonction de nos intérêts, et surtout,
46:47ça je le dis, on va peut-être m'accuser
46:49de partialité, mais ça m'est égal, il faut
46:51vraiment que l'Europe se renforce, il faut que l'Europe
46:53apprenne à parler le langage de la puissance. Et sur quoi
46:55doivent porter ces éléments ? Le monde d'aujourd'hui,
46:57entre les Etats-Unis, tels qu'ils sont,
46:59la Chine, la Russie, l'Inde,
47:01est un monde de puissance. Si nous nous
47:03restons divisés et impuissants, alors
47:05nous serons balayés de la carte. D'autant plus
47:07que nous perdons du terrain sur le plan économique, pour le coup.
47:09Non seulement les Français, mais
47:11tous les Européens. Et donc, il faut absolument
47:13nous muscler sur le terrain
47:15industriel, économique, il faut nous muscler
47:17sur le terrain de la défense, et il faut nous unir
47:19politiquement, et il faut être aussi capable
47:21de proposer... Vous voyez, Donald Trump
47:23est un businessman. Il a écrit un livre qui s'appelle
47:25The Heart of the Deal. Il fait des deals.
47:27Il faut aussi proposer des transactions. Par exemple,
47:29éviter... Et vous trouvez que
47:31Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission Européenne,
47:33est trop silencieuse dans cette période ? On l'a peu entendue
47:35pour l'instant. Elle a été souffrante, assez gravement,
47:37peut-être, avec une pneumonie sévère.
47:39Si on dit ça, mais ils sont sans doute
47:41en train de définir leur position. Je vais prendre un exemple,
47:43les droits de douane. Mais ça peut être quoi ? Les droits de douane,
47:45ça peut être justement un deal avec Donald Trump.
47:47Les droits de douane, on peut dire, par exemple, vous ne faites pas de droits de douane,
47:49mais nous vous achèterons plus de gaz
47:51naturel liquéfié. C'est une possibilité.
47:53Mais si jamais on n'y parvient pas,
47:55il faut avoir nos propres outils.
47:57Pour ça, pour revenir au patron, quand même,
47:59ils sont peut-être fascinés, parce qu'ils se voient aux Etats-Unis,
48:01mais ils peuvent être inquiets, quand même.
48:03Parce que Donald Trump, quelqu'un qui va jouer
48:05America first, l'économie américaine,
48:07il va l'adopter, il va essayer d'attirer tous les investissements.
48:09Pour ceux qui sont
48:11attachés à l'Europe et à l'action en Europe,
48:13ce n'est quand même pas une grande nouvelle.
48:15Donc là encore, sur le terrain économique, il faut être prêt
48:17à agir ensemble. Non, la fascination,
48:19je ne la conseille pas.
48:21L'hostilité, il faut la restreindre.
48:23Mais le réalisme et le volontarisme,
48:25il faut l'accélérer. Et tout ça,
48:27il faut penser européen, français
48:29et européen.
48:31Est-ce que vous partagez les craintes d'Henri Colletta,
48:33l'ancien Premier ministre italien qui a remis un rapport
48:35au printemps dernier au Conseil européen,
48:37rapport dans lequel il dit que l'Europe
48:39risque de devenir une colonie financière,
48:41soit de l'Amérique, soit de la Chine.
48:43Est-ce que vous partagez ces craintes ?
48:45Oui, je partage ces craintes, comme je partage le diagnostic d'un autre rapport
48:47de Mario Draghi, qui montre que nous sommes en train de décrocher
48:49sur le terrain de l'innovation,
48:51décrocher sur le terrain du verdissement
48:53de notre économie.
48:55Il ne réagit pas.
48:57Oui, ça c'est certain. Et c'est pour ça que, si j'avais une préconisation
48:59très simple, je parlais de volontarisme en la matière,
49:01commençons par voir comment on peut
49:03appliquer ces rapports. Mais pour les appliquer,
49:05il faut avoir une volonté d'agir ensemble.
49:07Si l'Europe se complaît
49:09dans la division
49:11justement de la fascination, et je constate
49:13qu'il y a aujourd'hui, en effet, un certain nombre de partis
49:15ou de régimes qui sont fascinés par...
49:17Elon Musk a fait hier, quand même,
49:19un meeting pour
49:21l'extrême droite allemande. Il a fait un signe
49:23– moi je veux bien qu'il soit autiste,
49:25Asperger ou je ne sais pas quoi, mais enfin, son signe était nazi
49:27à la tribune. Tout ça,
49:29ça fait frissonner.
49:31Et donc, on doit se mettre en mouvement.
49:33On ne doit se laisser ni diviser, ni fasciner,
49:35ni hypnotiser. – Et quand les Etats-Unis investissent
49:37500 milliards d'euros en soutien
49:39à l'intelligence artificielle, où est l'Europe ?
49:41– Bien sûr, vous posez la bonne question.
49:43C'est là, il faut la poser aussi à Ursula von der Leyen.
49:45Si on reste les bras balancés, si on attend,
49:47on va être largués. On a déjà perdu beaucoup.
49:49Et vous savez, notre productivité est très faible.
49:51Ça, c'est ce que montre bien le rapport de Racky.
49:53Si nous restons avec la productivité actuelle,
49:55au fond, nous aurons le même revenu
49:57en 2050, alors que les autres
49:59auront explosé. La croissance américaine
50:01est le triple, et même un peu plus
50:03que celle de l'Union Européenne.
50:05La croissance chinoise, le quintuple.
50:07La croissance indienne, encore plus.
50:09Alors bien, la Russie, par ailleurs, est un danger militaire,
50:11mais ce n'est pas un danger économique, si vous voulez.
50:13Dans ce contexte-là, il faut vraiment qu'on accélère.
50:15Vous savez, il faut prendre la phrase de Napoléon.
50:17« Ma droite est attaquée,
50:19ma gauche est enfoncée.
50:21J'avance. » — Mais on a les moyens de répondre
50:23par du protectionnisme ?
50:25— Alors, nous pouvons, nous aussi, mettre
50:27en place des droits de douane. Je considère que le protectionnisme
50:29généralisé est une erreur. C'est pour ça qu'il
50:31vaut mieux essayer de trouver des solutions
50:33pour ne pas y recourir.
50:35D'abord, convaincre les autres qu'il ne faut pas le faire.
50:37Et il faut parler, effectivement, avec Donald Trump
50:39et avec son administration. Et ce n'est pas
50:41totalement impossible, parce qu'il a déjà été président.
50:45On dit que c'est quelqu'un qui est
50:47transactionnel. C'est-à-dire que
50:49voilà, on échange, on fait des deals.
50:51Il faut essayer de trouver des solutions.
50:53Mais si, in fine,
50:55il y avait des droits de douane et pas d'accord,
50:57il faudrait bien que nous aussi, nous soyons capables d'en avoir.
50:59Comme nous sommes capables, par exemple, d'augmenter nos droits de douane
51:01sur certains produits chinois, parce que
51:03nous sommes en train d'être inondés par des produits.
51:05Et si nous acceptons ça,
51:07encore une fois, naïveté, si nous sommes
51:09la zone la plus ouverte du monde, sans avoir
51:11aucune arme de rétorsion, alors,
51:13nous serons débordés, dépassés, enfoncés.
51:15Une toute dernière question.
51:17Donald Trump a lancé, juste avant son investiture,
51:19une cryptomonnaie.
51:21Pour vous, les cryptomonnaies, c'est quoi ?
51:23C'est un outil économique ou c'est un outil
51:25de spéculation ?
51:27C'est davantage un outil
51:29spéculatif qu'un outil économique.
51:31Mais il ne faut pas non plus négliger
51:33la place qu'elles prennent aujourd'hui
51:35dans le système financier.
51:37Là encore, pas d'hostilité
51:39systématique, mais pas de naïveté,
51:41de la régulation. Et ça, c'est aussi
51:43encore le rôle de l'Europé.
51:45Qu'un président lance quand même
51:47un business qui rapporte des milliards
51:49et des milliards de dollars en quelques jours.
51:51La fortune d'Elon Musk, dit-on, a presque
51:53doublé. C'est spéculatif. Depuis
51:55qu'il a soutenu Donald Trump,
51:57ça en dit long. C'est-à-dire qu'aux Etats-Unis, il y a une alliance
51:59entre une droite, enfin une extrême droite
52:01auteuritaire et des oligarques.
52:03Des multimilliardaires
52:05qui, par ailleurs, possèdent la tech.
52:07C'est, pour nous, européens, extrêmement
52:09dangereux. Et vous voyez, on a parlé de
52:11beaucoup de choses, de sujets politiques
52:13qui sont très importants, mais le vrai problème
52:15d'aujourd'hui, il est là. Comment
52:17nous, les Européens, nous résistons à
52:19exister dans ce monde plus dangereux
52:21avec des nouvelles donnes politiques
52:23qui est autre chose que l'alliance
52:25des uns et des autres au sein
52:27d'un Parlement, voyez-vous.
52:29Merci beaucoup pour ce grand jury.
52:31Je rappelle que vous êtes Premier Président
52:33de la Cour des Comptes et Président du Haut Conseil
52:35aux Finances Publiques. Bon dimanche à tous.
52:37À la semaine prochaine.