BANQUE DE FRANCE - Le gouverneur François Villeroy de Galhau est l'invité de Yves Calvi

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Regardez L'invité d'Yves Calvi avec Yves Calvi du 15 mai 2024

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00:00 7h, 9h, RTL Matin.
00:02 *sonnerie de téléphone*
00:04 Écoutez, on vit de rentrée.
00:05 Il est 8h21. Bonjour François Villeroy de Gallo, vous êtes notre gouverneur de la Banque de France.
00:11 Merci beaucoup de prendre la parole ce matin sur RTL.
00:13 Je vous accueille avec François Langlais qui est resté avec nous pour cet entretien.
00:17 Monsieur le gouverneur de la Banque de France, vous avez publié hier soir vos prévisions de croissance pour le deuxième trimestre,
00:22 +0,2% si tout va bien. C'était le même chiffre au premier trimestre. C'est une bonne nouvelle ?
00:27 Bonjour Yves Calvi, d'abord. Effectivement, nous faisons une enquête de terrain qui est d'une certaine façon la meilleure photo de l'économie française.
00:35 C'est les hommes et les femmes de la Banque de France qui interrogent 8500 entreprises, y compris des PME dans l'ensemble du territoire.
00:42 Alors, ce que nous voyons, nous n'avons pas donné de chiffre sur le deuxième trimestre parce que le mois de mai est très difficile à prévoir à cause des ponts.
00:50 Mais nous disons croissance légèrement positive. Et c'est vrai, il y a eu +0,2% au premier trimestre.
00:55 Au passage, d'ailleurs, qualité de la photo, c'est ce que la Banque de France avait prévu.
00:59 Oui, on est d'accord.
01:00 Par contre, ce qui est intéressant, c'est avril. Parce qu'avril, ça s'est passé plutôt mieux que prévu. Il y a une résilience de l'économie française.
01:09 Alors, il y a un secteur qui, globalement, va plutôt mieux, c'est les services. Ça se confirme. Notamment les services aux entreprises.
01:16 Le conseil, l'informatique, etc. Les services aux particuliers, comme l'hébergement et restauration, ont un peu plus ouvert la météo.
01:22 Mais la bonne nouvelle d'avril, c'est qu'aussi l'industrie et même le bâtiment ont progressé. Ça, on ne s'y attendait pas.
01:28 Bon, croissance modérée, mais croissance quand même, s'il faut le dire.
01:30 Oui, absolument. Oui, souvenez-vous Yves Calbuy, il y a un peu plus d'un an, on craignait la récession.
01:36 Oui.
01:37 La France va échapper à la récession.
01:39 Alors, après, il y a une petite musique de la reprise qui joue parfois en Europe.
01:44 Nous, nous attendons la reprise plutôt pour l'année prochaine et l'année suivante, aidée par la baisse de l'inflation. On va en parler.
01:51 Mais je dirais qu'entre ces deux airs-là, la récession à laquelle on a échappé et puis la reprise qui va arriver,
01:57 aujourd'hui, c'est la résilience, c'est-à-dire l'économie française est relativement robuste.
02:02 François Villeroy de Gallo, on vous entend, je ne dis pas content, mais en tout cas, encourageant.
02:07 On entend Bruno Le Maire qui aussi se félicite de la croissance française.
02:09 Et quand on se compare, notamment à l'Europe du Sud, les taux de croissance en Espagne, au Portugal, sont beaucoup plus importants.
02:17 Et quand on se compare à ce qui se passe de l'autre côté de l'Atlantique, alors là, on est loin, l'Amérique fait la course en tête.
02:23 Finalement, cette croissance, fut-elle positive ? Elle est quand même assez modeste.
02:28 - Alors, je vais nuancer votre comparaison, François Langlais, si je peux.
02:31 Quand on se compare la France à la moyenne européenne, on est un peu au-dessus, aujourd'hui, et notamment nettement au-dessus de l'Allemagne.
02:36 - Parce que l'Allemagne tire à la baisse. - Nettement au-dessus de l'Allemagne, mais il n'y a pas que l'Allemagne.
02:39 Alors, c'est vrai que l'Europe du Sud a un gros phénomène de rattrapage parce qu'ils avaient beaucoup souffert du Covid.
02:44 Ils continuent avec ce phénomène de rattrapage, et puis le plan de soutien européen.
02:48 Le vrai sujet, vous l'avez dit, c'est la comparaison de l'ensemble de l'Europe par rapport aux États-Unis.
02:53 Nous sommes en retard de croissance, et ça dure malheureusement depuis longtemps.
02:59 Et nous sommes en retard de croissance, il y a des raisons ponctuelles, conjoncturelles,
03:04 mais il y a une raison centrale, c'est parce que nous sommes en retard d'innovation.
03:08 Je vais le dire autrement, quand vous comparez la masse du marché unique européen et du marché unique américain,
03:14 c'est la même.
03:15 Nous pesons autant, mais nous sommes beaucoup moins rapides.
03:19 Donc il faut pouvoir investir dans les transformations de l'Europe,
03:22 il faut pouvoir renforcer le marché unique pour jouer l'atout de la taille.
03:25 C'est tout ça que j'ai expliqué dans ce qu'on appelle la lettre au président de la République,
03:30 qui est en ligne et que j'ai envoyée le mois dernier.
03:32 - Et alors, il vous écoute le président de la République ?
03:34 - Ah, ça ne dépend pas que du président de la République, ça dépend de la mobilisation de tous les Européens,
03:39 mais je crois effectivement, Yves Calvi, qu'il y a des choses qui bougent.
03:43 L'ancien premier ministre italien Enrico Letta a remis un rapport pour approfondir le marché unique,
03:48 jouer vraiment l'atout de la taille.
03:50 L'euro est par ailleurs un vrai succès, nous allons revenir à 2% d'inflation.
03:55 Je crois qu'il y a une réalité simple, c'est que dans un monde qui est dur, qui est fragmenté,
03:59 l'Europe est plus forte si elle est unie et si elle agit ensemble.
04:03 - Parlons de notre dette.
04:04 Sommes-nous en capacité de réduire notre déficit public ?
04:06 Je rappelle qu'on doit revenir à 3% du PIB d'ici 2027.
04:10 - Alors, la dette est trop forte en France.
04:14 Et, je le disais tout à l'heure, depuis deux ans,
04:18 le débat de politique économique a été dominé par une urgence, c'était l'inflation,
04:23 qui était la première préoccupation de ceux et celles qui nous écoutent.
04:25 Là, il y a des bonnes nouvelles,
04:27 c'est que l'inflation qui avait culminé à 7% il y a un an, revient vers 2%.
04:31 Je le redis, nous serons à 2% l'an prochain, c'est un engagement.
04:34 Mais au fur et à mesure que la mer de l'inflation se retire,
04:37 on voit revenir les gros rochers, c'est-à-dire nos problèmes qui durent.
04:40 Je vais en citer deux, Yves Calvi.
04:42 Il y en a un où on a fait beaucoup de progrès, c'est l'emploi.
04:45 Et ça, il faut continuer avec l'objectif du plein emploi.
04:47 Il y en a un où on n'a pas progressé, c'est celui que vous dites,
04:50 c'est les finances publiques.
04:51 On a trop de déficits, on a trop de dettes.
04:55 Alors, c'est un problème ancien qui dure depuis 40 ans,
04:58 ça va prendre du temps à être réglé.
05:01 Mais, comme on parlait de la comparaison avec l'Europe,
05:03 nous avons à peu près le même modèle social que nos voisins,
05:05 simplement, il nous coûte beaucoup plus cher.
05:07 Nous avons plus de dépenses publiques que l'Europe du Nord, que l'Europe du Sud.
05:12 Regardons à chaque fois ce qui est le plus efficace chez nos voisins.
05:14 Moi, je crois au modèle social européen,
05:17 mais nous pouvons essayer de mieux maîtriser la dépense.
05:20 - Je vous dis que c'est un problème qui dure depuis 40 ans, oui.
05:22 Est-ce qu'il ne s'est pas aggravé quand même avec le président le plus dépensier de la Ve République,
05:28 alors que nous avons le niveau d'impôt le plus élevé de tous les temps et de tous les pays ?
05:34 - Vous savez, le rôle de la Banque de France, ce n'est pas de distribuer les bons et les mauvais points à tel ou tel dirigeant.
05:40 Je crois que la contradiction française, François Langlais, il faut le dire,
05:43 c'est que nous aimons bien la dépense publique, et je le comprends.
05:46 Je suis attaché aussi au service public, à la protection sociale, à la redistribution par les impôts.
05:51 Nous aimons bien la dépense publique, mais nous n'aimons pas l'impôt qui les finance.
05:55 Et donc, les déficits, c'est la façon de résoudre cette contradiction.
05:59 Le problème, c'est que ça marche aujourd'hui,
06:01 mais ça veut dire que nous transférons la facture aux générations suivantes.
06:05 - Vous savez que Jean-Luc Mélenchon explique depuis des années qu'on ne paiera jamais notre dette.
06:08 - Aujourd'hui, je peux vous dire qu'on paie les intérêts sur la dette, Yves Calvi,
06:12 et que ça pèse de plus en plus lourd.
06:14 Quand vous regardez à l'intérieur du budget, chaque année, ce que nous pouvons dépenser,
06:18 les dépenses qui sont liées au passé, c'est-à-dire la dette dont nous héritons,
06:21 c'est celle qui augmente le plus vite aujourd'hui.
06:24 Et du coup, nous n'avons pas de place pour les dépenses d'avenir,
06:26 le climat, notre sécurité, l'éducation des jeunes.
06:30 Donc il faut arriver à limiter ces dépenses liées à la dette,
06:33 mais évidemment, nous la payons.
06:35 Heureusement d'ailleurs, parce que sinon, plus personne ne prêterait à la France.
06:39 Or, les investisseurs continuent à prêter à la France.
06:42 - Le taux de nos livrets va-t-il rester inchangé à 3% ?
06:44 - Oui.
06:45 C'est un engagement que Bruno Le Maire a pris,
06:49 conformément à une proposition que je lui avais faite.
06:50 Donc au mois de juillet, on restera à 3%.
06:53 Et j'en profite pour dire sur les livrets
06:55 qu'il y a un produit pour l'épargne populaire qui est aujourd'hui un grand succès,
06:59 qui est le plus intéressant, c'est le livret d'épargne populaire.
07:01 Lui est rémunéré à 5%.
07:04 Et j'ai une bonne nouvelle ce matin, Yves Calvi,
07:07 nous venons de passer le cap des 11,5 millions de livrets d'épargne populaire.
07:11 C'est 2 millions de plus qu'il y a un an.
07:13 Et ça, je crois que pour nos concitoyens, je dis moins...
07:17 - Plus 2 millions en un an ?
07:18 - Plus 2 millions de livrets en un an, absolument.
07:20 On avait annoncé cet effort.
07:22 - Comment l'explique-t-on ? Pardonnez-moi de vous interrompre, mais c'est intéressant.
07:24 - Je crois qu'on en a parlé beaucoup plus,
07:26 mais il y a encore des millions de Français qui auraient droit à ce livret d'épargne populaire,
07:30 qui n'hésitent pas à consulter leur banque.
07:33 Et les sommes déposées sur ce livret d'épargne populaire ont augmenté de plus de 50% depuis un an.
07:38 Bruno Le Maire avait aussi annoncé un relèvement du plafond à 10 000 euros sur ce lep.
07:44 - Est-ce que vous pouvez nous confirmer que le gros de l'inflation est derrière nous
07:47 et qu'on entre dans une période plus sage,
07:49 où les prix seront à un niveau de croissance plus habituel, autour de 2% ?
07:53 - Oui, François Langley, sauf évidemment chocs, surprises, etc.
07:59 Mais je le redis ce matin, c'est un engagement de se mettre à 2,4% d'inflation,
08:03 ramené à 2% l'an prochain.
08:05 Ce qui veut dire, comme nous avons une confiance suffisante,
08:08 que nous allons très probablement commencer à baisser les taux de la Banque Centrale,
08:14 sans doute dans notre réunion début juin.
08:17 - Donc ça, ça va être aussi un soutien pour la croissance après ça ?
08:20 - Oui, je crois que ce que vous dites est très important,
08:22 c'est que quand je parlais de reprise vers l'an prochain,
08:26 je crois qu'il y a deux soutiens.
08:27 Moins d'inflation, ça fait plus de pouvoir d'achat,
08:30 et dès aujourd'hui, les salaires en moyenne augmentent plus vite que les prix.
08:34 Et puis deuxièmement, la baisse des taux, ça aide l'investissement.
08:37 Donc le moteur de la consommation va être le premier moteur de la croissance française,
08:41 mais l'investissement devrait aussi repartir.
08:43 - Merci beaucoup François Villerot-De Gallo.

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