Parlons Vrai chez Bourdin avec Rudy Albina, avocat pénaliste au barreau de Paris qui défend des émeutiers jugés en comparution immédiate et Robert Ménard, Maire de Béziers.
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00:00 - Jean-Jacques Bourdin. - Il est 11h10, Robert Ménard, un mot encore sur les expulsions,
00:04 donc en cas de... dans une famille où l'enfant est délinquant, c'est possible ou pas ? C'est très difficile.
00:11 - On peut le faire, mais c'est très difficile. Je vais vous raconter un exemple, il y a quelques semaines,
00:16 il y a une dame, vous savez ce qu'on appelle des nourrices, c'est-à-dire qui avait chez elle de la drogue et de l'argent,
00:21 pour dire les choses tout simplement. Donc elle est allée en prison, elle n'a pas encore été condamnée,
00:28 mais elle est en détention. Son fils l'est aussi. - Provisoirement ? - Oui, mais provisoirement.
00:32 Et tant qu'il n'y a pas de condamnation, c'est compliqué. Et on essaye de simplifier, moi je discute avec le programme en disant
00:38 "Attendez, on sait bien que c'est tel, il faut qu'on prenne une sanction". Un des problèmes qu'on a,
00:43 c'est pas le laxisme de la justice, c'est pas vrai, parce qu'il y a plein de juges qui sont pas du tout laxistes.
00:48 - En ce moment, d'ailleurs, la justice semble ferme. On va en parler dans un instant.
00:52 - Et surtout, on en a parlé hier avec le chef de l'État, il faut que ça aille vite. Vous savez, si les gens,
00:58 ils ne voient pas tout de suite une sanction, ils se disent "Elle s'en tire à bon compte". Et ça, il faut que ça aille vite.
01:04 Et un des problèmes, c'est que ça ne va pas assez vite. Alors moi j'entends des magistrats dire
01:09 "Il faut se donner le temps de bien juger les gens", oui, il faut sûrement se donner le temps de bien juger les gens,
01:16 mais il faut vite pour que les gens comprennent, tu fais une connerie, t'es sanctionné.
01:20 - Alors, maître Rudi Albina, bonjour. - Oui, bonjour.
01:23 - Vous êtes avocat pénaliste au barreau de Paris, vous défendez des émeutiers jugés en comparution immédiate.
01:29 - C'est bien ça. - C'est bien cela ? - C'est bien ça.
01:32 - Combien de prévenus avez-vous, défendez-vous, avez-vous défendu ?
01:38 - Jusqu'ici, trois. - Jusqu'ici, trois. Les peines ?
01:43 - Ah écoutez, les peines, elles ont été très variables en fonction des juges et des compositions des tribunaux dans lesquelles je suis allé.
01:49 C'est allé de quelque chose de très acceptable au niveau de l'individualisation de la peine et de la pression médiatique qui est actuellement exercée,
01:57 à quelque chose qui est effectivement extrêmement ferme et extrêmement sévère.
02:03 - Extrêmement ferme et sévère ? Tout dépend de quoi ? Tout dépend du magistrat ? Tout dépend ?
02:08 - Tout dépend véritablement du magistrat. - Oui.
02:12 - C'est-à-dire, si vous voulez, moi j'ai eu un magistrat lors des comparutions immédiates vendredi soir,
02:18 c'est une audience qui a fini à 3h du matin. - Oui.
02:21 - Quand on n'a pas de justice rapide pour reprendre les propos de Robert Ménard, moi j'appelle ça une justice gâchée.
02:27 On ne peut pas simplement reprendre l'idée qu'on a besoin d'une sévérité pour faire comprendre
02:32 dès lors qu'on a une justice gâchée avec des procédures qui ne sont absolument pas abouties, des enquêtes qui mériteraient largement des obstructions.
02:38 Je vous explique. Moi j'ai eu effectivement à défendre un jeune de 23 ans vendredi soir à Lavanter
02:45 qui était notamment accusé de détention et de transport de mortiers, donc de chandelles romaines.
02:50 - Oui. - Alors qu'il y a un objectif, c'est la prévention, c'est l'infraction qui nécessitait un élément moral
02:57 dans un objectif de pouvoir l'excluser à des fins de destruction, voire de blessure et d'intégrité corporelle.
03:05 - Oui. - Sauf qu'aujourd'hui, on avait absolument, dans une procédure qui faisait 106 pages,
03:10 exactement 106 pages pour une procédure pénale, pour les personnes qui s'y connaissent, c'est très peu,
03:15 on n'avait aucun élément qui pouvait démontrer que la détention de la part de la personne que j'ai défendue
03:22 était un objectif de l'excluser dans le cadre des émeutes, pour l'justice, pour les policiers, etc.
03:27 - Rudy Albina, on transporte un mortier comme ça pour le plaisir ? - Ben, très bien.
03:33 - Pour aller au cinéma ou pour aller à la terrasse d'un café ? - Pour un tournoi de foot.
03:38 Et c'est l'intégralité des avocats qui étaient présents lors de la comparaison immédiate,
03:43 l'ont démontré, c'est qu'effectivement, il y avait une canne interquartier,
03:47 et il y avait des mortiers qui avaient utilisé et acheté pour cette canne interquartier,
03:53 et absolument pas pour une utilisation dans le cadre des émeutes.
03:58 - Ah bon. Donc on achète des mortiers. Bon, là, en l'occurrence, il a été condamné à quoi ?
04:04 - Alors, il a été condamné à 100 jours amende à 100 euros, c'est-à-dire une peine de 1000 euros d'amende.
04:09 - Bon, c'est pas une peine très lourde. - Non, absolument pas.
04:13 Justement, c'est pour ça que le magistrat l'a très bien compris et a très bien jugé selon moi,
04:18 parce que la procédure ne démontrait pas cette intention.
04:20 - Bon, ben donc la justice est clémente quand il le faut et ferme quand il le faut.
04:26 - Alors, pas véritablement, parce qu'il y a d'autres aussi qui ont été extrêmement compliqués.
04:31 J'avais notamment défendu un homme à Créteil avec une consœur que je connais extrêmement bien,
04:37 où il y avait simplement des violences avec des jets de cailloux,
04:42 et la personne a pris 6 mois de mandat de dépôt, 6 mois ferme.
04:46 - 6 mois ferme parce qu'il jetait des cailloux sur qui ? Contre quoi ?
04:50 - Sur les forces de l'ordre, il y avait des cailloux. - Sur les forces de l'ordre.
04:54 Est-ce que la justice permet ce genre de condamnation ?
05:00 - La justice permet totalement ce genre de condamnation, cela n'est pas le propos.
05:04 Maintenant, il me semble évident que ces jets de cailloux auraient été faits dans d'autres circonstances.
05:10 Si M. Réclamand, qui était ministre de la Justice, n'avait pas dit...
05:13 Justement, il a dit qu'il y avait des ordres, qu'il y avait des instructions qui étaient données...
05:17 - Mais est-ce que les magistrats ne sont pas hors-la-loi ?
05:22 - Non, absolument pas. - Bon, ben c'est l'essentiel, non ?
05:25 - C'est l'essentiel, mais au-delà de la loi, il y a des grands principes qui dirigent notre procédure pénale,
05:31 notamment l'individualisation de la peine.
05:33 Et quand on met 6 mois ferme à quelqu'un qui avait un casier totalement vierge,
05:38 moi, j'estime que le principe d'individualisation n'a pas été respecté.
05:41 - Merci Rudi Albina. Je vais vous donner la parole, Robert Ménard.
05:45 Simplement, puisqu'on parle de comparution immédiate, je vais vous donner 3 exemples.
05:49 20 ans, il fabriquait des cocktails Molotov à Carcassonne,
05:53 casier, judiciaire, vierge, 8 mois de prison, donc 4 avec sursis,
05:57 4 mois ferme, sous bracelet électronique à son domicile.
06:01 20 ans, il a appelé aux émeutes sur Snapchat et a menacé de mort un policier à Montrouge, dans les Hauts-de-Seine,
06:08 6 mois de prison, donc 4 mois avec sursis, bracelet électronique.
06:11 21 ans, il a jeté des projectiles enflammés sur la façade du poste de police de Cannes-Laboca,
06:20 il a jeté une bouteille remplie d'essence non-enflammée sur une policière,
06:24 18 mois de prison, dont 12 fermes.
06:26 Il était hébergé dans un foyer associatif dépendant au cannabis depuis 7 ans.
06:32 Justice ferme, tout le monde dit la justice est ferme, logique ?
06:35 - Logique, je viens d'entendre cet avocat, c'est son métier de défendre les gens,
06:39 et puis tout le monde doit être défendu.
06:41 Mais enfin, comment tu te trimbales avec des mortiers, la nuit, dans un endroit en pleine insurrection ?
06:47 - Pour faire festif, vous vous rappelez pas, c'était à Seine-Solines,
06:54 les gens arrivaient avec des boules de pétanque, évidemment c'était pour jouer à la pétanque,
06:58 je pense que les boules de pétanque c'était pour les jeter sur les forces de l'ordre.
07:02 Non, je veux bien qu'on fasse son métier, mais qu'on arrête, c'est un des problèmes qu'on a.
07:07 C'est une politique de l'excuse sans arrêt, et le droit, trop de droit, ça finit par tuer le droit.
07:13 Et vous savez, ça montra les gens contre les avocats et contre ça.
07:18 Et j'ai pas envie de dire des choses mal sur les avocats.
07:21 Mais à force de trouver des excuses sans arrêt à des gens qui n'en méritent pas,
07:25 non, honnêtement, je crois pas qu'on facilite les choses et on facilite le retour au calme, je le crois pas.
07:30 - Robert Ménard reste avec nous jusqu'à 11h30, nous allons avoir,
07:35 le débat se poursuit sur antenne de Sud Radio évidemment,
07:38 nous allons avoir dans un instant deux nouveaux invités, après les informations,
07:43 des invités qui sont Arnaud Robinet, le maire horizon de Reims,
07:48 et Razia Mahdi, qui est un ancien député socialiste,
07:51 qui était député socialiste de Montreuil et Bobigny.
07:54 10h58.