"Christine Malèvre, l'euthanasie en question" / En juillet 1998, Christine Malèvre, infirmière, avoue plus de trente meurtres de patients en fin de vie : femme courageuse ou meurtrière, c'est tout l'enjeu du procès. Retour sur cette affaire et sur les débats passionnés qu'elle a suscités et gros plan sur l'évolution de la législation concernant la fin de vie, à travers notamment les affaires Vincent Humbert et Nicolas Bonnemaison.
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00:00 C'est-à-dire que nous, on souhaite changer de logique.
00:02 On a une logique de loi qui sont faites par des médecins pour des médecins
00:05 et où on est dans une médicalisation de la mort.
00:07 Nous, on souhaite qu'il y ait une loi qui place tout simplement
00:10 la volonté de celle ou celui qui est en fin de vie au centre des décisions.
00:14 [Musique]
00:41 [Musique]
00:48 Christine Malèvre. En juillet 98, cette infirmière a avoué une trentaine de meurtres
00:55 commis sur des patients en fin de vie.
00:57 Pour la justice, elle est une meurtrière froide et cynique.
01:03 Pour ses défenseurs, Christine Malèvre est une femme courageuse
01:07 qui n'a fait qu'aider à mourir des patients qui le lui demandaient.
01:11 Quand on sait que la médecine n'y peut plus rien, faut-il se défiler ?
01:14 Faut-il laisser ces malades souffrir ?
01:18 Comment accompagner les malades vers la mort ?
01:21 Doit-on aider ceux qui veulent mourir ?
01:24 Il faut que les choses bougent, il faut que les lignes avancent,
01:26 il faut que la loi soit réformée.
01:28 Les médecins doivent-ils franchir la frontière de la vie en administrant la mort ?
01:34 Eh bien, c'est pas à eux de décider. Je pense que ma vie m'appartient
01:38 et j'aimerais bien pouvoir choisir la façon de la quitter.
01:42 Avec Imen Gouali, nous avons décidé de retrouver les protagonistes de cette affaire
01:47 et d'analyser avec eux les conséquences et les répercussions de ce dossier hors normes.
01:52 Le procès en appel de Christine Malèvre.
01:57 Dans cette affaire, on a d'abord parlé de Tanasi et puis d'assassinat.
02:02 Elle a d'ailleurs été condamnée à 10 ans de réclusion
02:04 pour 6 assassinats de patients à l'hôpital de Mante-la-Jolie.
02:10 Tout commence au centre hospitalier François Quenez dans les Yvelines.
02:14 Ce jour-là, Jacques Guton, un patient de 71 ans atteint de pneumopathie,
02:22 meurt brutalement à la surprise de l'équipe médicale qui s'interroge.
02:26 L'homme n'était pas mourant et les médecins lui donnaient encore plusieurs semaines à vivre.
02:32 Jacques Guton est mort alors qu'une infirmière, Christine Malèvre, était de service.
02:39 Chaque fois qu'elle est dans les parages, des patients meurent subitement.
02:43 Cette fois, les aides-soignantes alertent leur chef de service.
02:49 Je mets les choses un peu au clair en leur demandant
02:52 "Est-ce que vous pensez que Christine Malèvre peut avoir eu un rôle dans le décès du malade en question ?"
02:57 Elles me répondent que oui.
02:59 Je précise en leur demandant "Est-ce que vous pensez qu'elle a pu le tuer ?"
03:03 Elles me répondent que oui.
03:07 Des accusations graves qui viennent briser plusieurs mois de silence.
03:11 Car ce n'est pas la première fois que les aides-soignantes émettent des doutes
03:15 après le décès d'un patient suivi par Christine Malèvre.
03:18 15 mois plus tôt, en février 1997, c'est un homme de 64 ans atteint d'un cancer des poumons,
03:26 toujours en phase de traitement actif, qui est mort brutalement.
03:30 Il s'appelait Raymond Baudet.
03:34 J'avais vu les médecins, moi personnellement, qui m'avaient dit que le traitement allait être très fort,
03:39 mais il lui donnait au moins 6 mois à 1 an à vivre.
03:42 Son état s'est dégradé en l'espace de 4 jours.
03:46 Mais il n'est jamais rentré chez lui.
03:52 Le 6 novembre 1997, Hubert Bruel meurt dans le même hôpital.
03:59 Il avait 74 ans, lui aussi souffrait d'un cancer des poumons, et lui non plus ne semblait pas en fin de vie.
04:06 Mon père était rentré pour une visite de contrôle pour 2 ou 3 jours, pour passer des examens.
04:13 Finalement, 3 jours, il est resté, et il est parti au bout du 3e jour.
04:19 Je me demande pourquoi il est parti si vite.
04:27 On n'a pas pu se dire au revoir.
04:29 On a été pris de court.
04:34 Lui, nous, tout le monde.
04:38 3 jours plus tard, Denise Lemahou, 48 ans, décède dans le même service.
04:54 Le 17 novembre, Dominique Kostman meurt à l'âge de 47 ans, après que Christine Malèvre lui a administré une surdose de morphine.
05:02 Mais cette fois-ci, il y avait un témoin.
05:06 Je lui dis "Mais enfin Christine, qu'est-ce que tu as fait ?"
05:10 Et là, pour la première fois de ma vie, je l'ai vue paniquer, elle m'a dit "Je me suis trompée, la seringue est partie toute seule."
05:16 Ce qui n'était pas possible, parce qu'il faut une sacrée force pour le pousser.
05:22 Ce jour-là, Marie-Annick Michel a eu des soupçons, bien sûr.
05:26 Mais sans preuve, elle s'est eue.
05:29 Et les patients ont continué à mourir.
05:31 En mars 98, Patrick Augel décède à l'âge de 53 ans.
05:43 Un mois plus tard, même sort pour Patrice Collin, 29 ans.
05:50 Mais avec la mort de Jacques Buton, les collègues de Christine Malèvre brisent le silence.
05:55 Quand j'ai parlé en mai, c'est que je n'en pouvais plus.
06:00 Je ne supportais plus son manque de conscience, sa folie.
06:05 Trois jours après avoir été alerté, la direction de l'hôpital transmet l'affaire à la justice.
06:14 Et convoque l'infirmière.
06:19 Je l'ai reçue dans ce bureau-là, ici, et je lui ai dit, je ne vous suspends pas.
06:23 Demain, vous irez travailler aux consultations externes.
06:26 Mais si vous êtes coupable, je vous plains.
06:29 Christine Malèvre sort de l'hôpital, rentre chez elle et tente de se suicider.
06:37 Elle en réchappe in extremis.
06:39 L'infirmière est alors placée en hôpital psychiatrique.
06:42 L'enquête démarre dans le plus grand secret.
06:48 Les collègues et les supérieurs de l'infirmière défilent au commissariat.
06:52 Ils racontent que Christine Malèvre a toujours eu une attitude équivoque face à la mort.
06:57 Depuis plusieurs mois, une plaisanterie circulait même dans le service.
07:01 On disait, tiens, Christine est là, Yoran est mort.
07:06 Les policiers ont rapidement des éléments concrets pour étayer ces bruits de couloir.
07:12 Grâce aux archives de l'hôpital, ils établissent des statistiques.
07:17 Elles sont sans appel pour l'infirmière.
07:19 Quand Christine Malèvre travaille, le nombre de décès grimpe subitement dans le service.
07:25 En juillet 98, placée en garde à vue, Christine Malèvre craque.
07:36 Oui, elle a tué une trentaine de patients.
07:39 L'infirmière est mise en examen pour homicide volontaire.
07:46 Deux mois plus tard, l'affaire fuite dans les médias.
07:49 La presse s'en empare et titre sur l'euthanasie.
07:53 - On parle d'euthanasie parce que dans l'esprit d'une majorité de gens,
08:00 et à commencer par le mien, une infirmière qui donne la mort,
08:04 ça ne peut être que de l'euthanasie. En aucun cas, ça ne peut être un meurtre.
08:08 30 cas d'euthanasie.
08:13 Face à ces révélations embarrassantes pour l'image de son hôpital,
08:16 le directeur porte plainte contre Christine Malèvre.
08:20 Le cas de l'infirmière interpelle jusqu'à la classe politique.
08:24 Bernard Kouchner, alors secrétaire d'Etat à la Santé,
08:28 prend la parole en direct aux 20 heures de France 9.
08:31 - Je réagis avec tristesse, avec sérieux, mais avec compassion.
08:37 Je pense que c'est un drame que nous pouvons,
08:42 chacun d'entre nous, affronter.
08:43 L'intervention de Bernard Kouchner propulse l'euthanasie en une de l'actualité.
08:48 Durant tout l'été, pro et anti se déchirent dans les colonnes des journaux
08:52 et sur les plateaux télé.
08:54 À la rentrée, c'est Christine Malèvre elle-même qui crée l'événement.
08:59 Malgré sa mise en examen,
09:01 elle accepte l'invitation de l'émission "La marche du siècle".
09:05 - Dans quel état d'esprit êtes-vous aujourd'hui, Mlle Malèvre ?
09:08 Et d'abord, pourquoi vous avez décidé de parler ce soir ?
09:11 - Bonsoir.
09:12 - Bonsoir.
09:14 - Je crois que maintenant, le débat est ouvert.
09:17 En tant qu'infirmière, ayant vécu auprès de malades qui souffraient,
09:22 qui réclamaient à mourir, auprès de famille aussi,
09:25 mon témoignage peut être utile aujourd'hui.
09:29 Tout s'est fait dans un climat de confiance,
09:31 avec des patients, avec toute une relation,
09:35 des relations humaines se sont instaurées entre ces patients et moi.
09:39 Et lorsqu'on n'a rien à proposer aux malades,
09:42 pas de service spécifique,
09:44 quand on sait que la médecine n'y peut plus rien,
09:47 faut-il se défiler ?
09:49 Faut-il laisser ces malades souffrir ?
09:51 Au lendemain de ce passage dans "La marche du siècle",
09:56 Christine Malèvre reçoit le soutien de l'ADMD,
10:00 l'association pour le droit à mourir dans la dignité,
10:03 qui fait d'elle une icône.
10:07 De fait, tout le monde pense qu'elle était là,
10:09 qu'elle a fait son travail d'infirmière, qu'elle soulageait
10:12 qu'il y avait des personnes qui voulaient mourir,
10:14 que les méchants médecins ou que la méchante institution hospitalière
10:17 ne voulaient pas s'en occuper,
10:19 et elle, toute seule, dans sa grande sérénité
10:22 ou dans sa grande solitude, décidait et soulageait la personne.
10:26 Pour les familles des victimes,
10:29 la médiatisation de celles qui a ôté la vie de leurs proches
10:32 en les privant de leurs derniers instants est insupportable.
10:36 Elle passe donc à l'offensive.
10:37 Maître Maurice, Christine Malèvre est portée au nu
10:57 par les partisans de l'euthanasie, par des personnalités politiques.
11:00 Comment le vivent vos clients ?
11:02 Ils souhaitent savoir ce qu'il y a réellement
11:05 dans la procédure, dans le dossier.
11:07 C'est à ce moment-là qu'ils décident de se constituer parti civil,
11:11 de se regrouper, d'avoir accès à la procédure,
11:14 et c'est alors que c'est une grande surprise.
11:16 Il y a un décalage qui est énorme.
11:18 Elle essaye d'expliquer qu'elle a eu de nombreuses demandes
11:22 de malades qui ont sollicité son intervention
11:26 pour abréger leur souffrance, pour leur donner la mort.
11:30 On n'a aucune trace.
11:32 Il n'y a rien.
11:34 Il n'y a que sa seule parole.
11:36 Jusqu'à présent, elle était simplement mise en examen pour meurtre,
11:41 mais là, nous nous demandons une requalification,
11:44 à savoir que les actes étaient prémédités,
11:46 il s'agissait donc d'assassinat.
11:48 Face à ces accusations, l'infirmière change de version.
11:54 Elle qui avait avoué avoir aidé 30 patients à mourir,
11:58 n'en reconnaît plus que 4.
12:02 Un mois après l'intervention de Christine Malèvre à la télévision,
12:05 coup de tonnerre.
12:07 L'hebdomadaire L'Express publie un article accablant pour elle.
12:11 Un papier qui s'appuie sur l'enquête statistique des policiers,
12:14 selon laquelle les patients meurent beaucoup plus
12:17 lorsque Christine Malèvre est en poste.
12:19 Le taux de décès augmente jusqu'à 150 %.
12:23 C'est le choc.
12:25 C'est le choc pour deux raisons.
12:27 D'abord parce que la journaliste qui fait cet article
12:31 est une femme marrée qu'elle serait
12:32 et qui avait eu un rôle historique dans l'affaire du sang contaminé.
12:35 Bref, c'était une journaliste extrêmement crédible.
12:38 Et deux, les chiffres et le papier qu'elle fait
12:41 est absolument sidérant.
12:43 Alors qu'on restait dans une image de la sainte Christine Malèvre,
12:46 de la pauvre infirmière qui se sacrifiait pour ses tristes patients,
12:49 là, il y a une interrogation massive.
12:51 On s'est dit "mais qu'est-ce qui se passe ?"
12:53 Christine Malèvre va réagir.
12:55 Elle écrit un livre qui s'appelle "Mes Aveux".
12:57 Qu'est-ce qu'elle raconte dans ce livre ?
13:00 Elle a fait du service à des malades mourants.
13:01 Elle a répondu à je ne sais quel signe de ces malades
13:04 qui, par déclinement des yeux, lui disaient
13:07 "Allez, il faut que ça s'arrête."
13:09 Il y avait quelque chose de touchant, d'enfantin,
13:11 et en même temps, il y a quelque chose d'un petit peu obscène.
13:14 Alors que l'histoire est encore en cours,
13:16 que l'affaire n'est pas du tout jugée,
13:18 on a une jeune femme, infirmière,
13:20 qui raconte, qui se plaint.
13:22 Il y a quelque chose d'un petit peu décalé.
13:25 Désormais, c'est la parole de Christine Malèvre
13:29 contre celle des familles
13:30 qui refusent d'entendre les affabulations de l'infirmière.
13:33 - Elle m'étonnerait qu'en l'espace d'une semaine,
13:36 elle lui ait demandé de mourir.
13:38 C'est assez faux.
13:40 Et nous, on a passé toute la semaine avec lui.
13:42 Au contraire, il voulait se battre.
13:44 Il avait dit "Je vais me battre et puis je vais y arriver."
13:46 Malgré les doutes des familles,
13:49 la justice a du mal à réunir des preuves tangibles.
13:52 La mort de Dominique Costman,
13:55 décédée après une surdose de morphine,
13:58 retient toutefois l'attention du juge d'instruction.
14:00 - Christine Malèvre avait décrit
14:03 une certaine pratique
14:05 qu'elle avait eue avec une seringue à morphine
14:07 pour laquelle elle aurait fait une injection massive.
14:09 Et ça, on pouvait le reconstituer
14:13 parce qu'elle avait dit que,
14:15 de telle façon qu'avait été montée la perfusion,
14:17 il y avait eu une mauvaise manipulation
14:20 et que c'est à cause de cette mauvaise manipulation
14:22 que la morphine était partie d'un seul coup
14:25 dans le corps du patient.
14:27 Et ça, ça a été reconstitué dans mon bureau.
14:28 - Une reconstitution qui porte un sérieux coup
14:32 à la version de Christine Malèvre.
14:34 Malgré les différentes tentatives
14:37 dans le bureau du juge d'instruction,
14:39 il s'avère impossible
14:41 d'injecter par accident
14:43 autant de morphine d'un coup.
14:45 - C'est le seul élément matériel tangible,
14:47 à mon sens, incontestable.
14:49 À partir du moment où, sur ce point,
14:51 j'estime qu'il y a une contre-vérité,
14:53 alors le reste de la justice
14:56 peut être entaché du saut de la contre-vérité.
14:58 - En juin 1999,
15:02 le parquet de Versailles
15:04 requalifie les faits.
15:06 Christine Malèvre est désormais
15:08 mise en examen pour assassinat.
15:10 Pour le juge,
15:12 l'infirmière n'a pas aidé à mourir.
15:14 Elle a voulu tuer.
15:16 Christine Malèvre encourt désormais
15:19 la réclusion criminelle à perpétuité.
15:21 - Mais c'est pas la fin.
15:26 Maître Maurice,
15:27 cette requalification,
15:29 c'est une victoire pour vos clients ?
15:31 - C'est simplement une adaptation
15:33 à la réalité du dossier.
15:35 Ce pourquoi on était dans une forme d'étonnement,
15:37 c'est qu'il a fallu que nous prenions
15:39 l'initiative de solliciter
15:41 cette requalification.
15:43 - Vous allez à ce moment-là
15:45 employer une phrase
15:47 qui va marquer les esprits.
15:49 Vous qualifiez Christine Malèvre
15:51 de tueuse en série.
15:54 - C'est une femme qui n'a pas agi
15:55 avec compassion
15:57 pour soulager la souffrance des malades.
15:59 C'est une femme qui, en réalité,
16:01 est en souffrance personnelle importante
16:03 et qui n'a pas su du tout
16:05 transposer,
16:07 je dirais,
16:09 une relation
16:11 qui soit une relation saine
16:13 avec ces malades.
16:15 C'est une relation perverse.
16:17 Christine Malèvre ressemble davantage
16:19 à une tueuse en série
16:21 qu'à la madone de l'euthanasie.
16:24 - Le serial killer,
16:25 ça me donnait l'impression
16:27 qu'on parlait de quelqu'un d'autre.
16:29 Ça ne peut pas être Christine.
16:31 Toutes les personnes qui connaissent Christine
16:33 ont été profondément choquées
16:35 par ces titres-là.
16:37 C'est de la révolte, c'est de la colère,
16:39 c'est de l'humiliation.
16:41 - Après 18 mois,
16:46 l'instruction est bouclée.
16:48 Christine Malèvre devra répondre
16:50 de sa façon plus simple
16:52 que d'une tueuse.
16:53 Elle devra répondre de sept assassinats
16:55 devant la cour d'assises.
16:57 L'infirmière change alors d'avocat,
17:00 mais aussi de stratégie.
17:02 Elle nie tout en bloc.
17:04 - Ça n'enlève rien à tout ça.
17:06 Il n'y a pas de lien de causalité
17:08 entre son geste
17:10 et le décès des patients
17:12 qui, vous le savez,
17:14 étaient quasiment tous en fin de vie
17:16 et dans des conditions atroces.
17:21 - Malèvre s'ouvre devant la cour d'assises de Versailles.
17:23 L'infirmière, qui risque la prison à vie,
17:25 arrive libre aux côtés de son avocat.
17:28 Les parties civiles se succèdent
17:30 et elles le martèlent.
17:32 Encore et encore,
17:34 jamais leurs proches n'ont demandé à mourir.
17:37 Seul le témoignage de Pascal Collin,
17:39 le frère de la plus jeune des victimes,
17:41 n'accable pas l'accusé.
17:43 - Vous voyez votre frère de 29 ans
17:48 sur son lit
17:50 qui pèse 45 kg
17:51 dans un état pitoyable,
17:53 même si elle n'a pas demandé
17:55 l'avis de la famille
17:57 ni les médecins.
17:59 Moi, à titre personnel, son frère,
18:01 je ne pourrais pas lui en vouloir.
18:03 - Pourtant, l'avocat général
18:05 réclame au moins 10 ans d'emprisonnement
18:07 pour celle qu'il qualifie
18:09 de voleuse de temps,
18:11 de voleuse d'amour.
18:13 Maître Liebmann,
18:15 l'avocat de Christine Malèvre,
18:17 tente, lui, de minimiser
18:19 les faits reprochés à sa cliente.
18:20 - Lorsque j'ai plaidé,
18:22 j'ai demandé pour les cas
18:24 qui n'étaient pas, à mon sens, établis,
18:26 bien entendu, de l'équité,
18:28 et pour les deux cas
18:30 qu'elle avait reconnus,
18:32 de dire qu'elle n'était pas coupable de.
18:36 Ca ne veut pas dire
18:38 qu'elle n'est pas à l'origine de.
18:40 Elle n'est pas coupable de.
18:42 - Après 4 heures de délibérés,
18:46 Christine Malèvre,
18:48 est acquittée dans le dossier
18:49 de Denise Lemahout.
18:51 Mais elle est reconnue coupable
18:53 des 6 autres assassinats
18:55 qui lui étaient reprochés.
18:57 Elle est condamnée
18:59 à 10 ans de prison
19:01 et à l'interdiction d'exercer
19:03 la profession d'infirmière à vie.
19:05 - Christine Malèvre n'est pas reconnue
19:09 coupable de la mort de Denise Lemahout.
19:11 Qu'est-ce qui s'est passé dans ce cas précis ?
19:13 - Nous ne savons pas
19:15 parce que les décisions
19:17 qui ont été effectuées à l'époque,
19:18 on peut imaginer des discordances
19:20 en termes d'emploi du temps.
19:22 C'est-à-dire que l'absence
19:24 de Christine Malèvre
19:26 à certains moments
19:28 où Madame Lemahout a été suivie,
19:31 a pu jeter un doute
19:34 dans l'esprit des jurés
19:36 et a conduit à cet acquittement.
19:39 Mais ce n'est qu'une hypothèse.
19:42 - Si condamnation
19:44 et un acquittement,
19:46 selon vous,
19:47 les jurés ont pris en compte
19:49 cette notion d'euthanasie ou pas du tout ?
19:51 - Je ne crois pas du tout.
19:53 Je pense qu'en réalité,
19:55 les jurés ont très vite compris
19:57 qu'on n'était pas en présence du tout
19:59 d'une affaire qui pouvait conduire
20:01 à un débat de société sur l'euthanasie.
20:03 - Ça a été de la colère,
20:11 de sentiments d'injustice,
20:15 d'incompréhension,
20:16 de dégoût face à un système
20:18 qui n'a pas compris
20:20 ou qui n'a pas voulu comprendre.
20:22 Dans tous les hôpitaux de France,
20:25 les pratiques d'aide à mourir
20:27 se font quotidiennement.
20:29 Et apparemment,
20:31 il n'y a qu'à l'hôpital de Mantes
20:33 où ça ne se fait pas.
20:35 - Christine Malèvre fait immédiatement
20:37 appel de sa condamnation.
20:39 - Christine Malèvre observera
20:41 de sa prison
20:44 le débat national
20:45 qui s'est amplifié
20:47 du fait de son sacrifice.
20:49 Observera de sa prison
20:51 le débat national
20:53 sur les soins palliatifs
20:55 et l'euthanasie.
20:57 - Quelques mois seulement
21:13 après sa condamnation,
21:14 un nouveau cas d'euthanasie
21:16 va bouleverser la France.
21:18 Une affaire qui dépasse largement
21:20 l'intimité d'une chambre d'hôpital.
21:22 En septembre 2000,
21:26 Vincent Imbert,
21:28 un pompier de 19 ans,
21:30 est victime d'un grave accident
21:32 de la route.
21:34 Hospitalisé au centrelio marin
21:36 de Berck-sur-Mer,
21:38 il se réveille après 6 mois de coma,
21:40 aveugle, muet et tétraplégique.
21:42 Vincent ne peut communiquer
21:43 avec ses proches
21:45 qu'avec son pouce droit,
21:47 mais il est parfaitement conscient.
21:49 Vincent Imbert le sait,
21:53 la médecine ne peut plus rien pour lui.
21:55 Le 30 novembre 2002,
21:58 il adresse une lettre bouleversante
22:00 au président de la République.
22:02 "Monsieur Chirac,
22:05 "je m'appelle Vincent Imbert,
22:07 "j'ai 21 ans,
22:09 "j'ai eu un accident de la circulation,
22:11 "tous mes sens vitaux ont été touchés.
22:12 "Vous avez le droit de grâce
22:14 "et moi, je vous demande le droit de mourir.
22:16 "Je voudrais que vous sachiez
22:18 "que vous êtes ma dernière chance."
22:20 Mais Jacques Chirac refuse d'accéder à cette demande.
22:28 Il ne peut pas accorder le droit de mourir.
22:31 Ce refus n'entame en rien
22:34 la détermination de Vincent Imbert
22:36 dont le combat est porté par sa mère Marie.
22:39 -Il y a plus d'un an qu'il me parle de la mort.
22:41 Je me rappelle un soir,
22:43 je lui ai dit, comme tous les soirs,
22:45 "Bonsoir, mon titi, demain, je t'aime."
22:48 Il m'a repris la main en me disant,
22:52 "Mais arrête, maman, tu m'aimes pas.
22:54 "Si tu m'aimais, tu me laisserais mourir."
22:57 -Maître Vigier, Marie Imbert vous raconte.
22:58 Qu'est-ce qu'elle vous dit de la souffrance de son fils ?
23:00 -C'est un homme qui a été tué.
23:02 -C'est un homme qui a été tué.
23:04 -C'est un homme qui a été tué.
23:06 -C'est un homme qui a été tué.
23:08 -C'est un homme qui a été tué.
23:10 -C'est un homme qui a été tué.
23:12 -C'est un homme qui a été tué.
23:14 -C'est un homme qui a été tué.
23:16 -C'est un homme qui a été tué.
23:18 -C'est un homme qui a été tué.
23:20 -C'est un homme qui a été tué.
23:22 -C'est un homme qui a été tué.
23:25 -C'est un homme qui a été tué.
23:26 -C'est un homme qui a été tué.
23:28 -C'est un homme qui a été tué.
23:30 -C'est un homme qui a été tué.
23:32 -C'est un homme qui a été tué.
23:34 -C'est un homme qui a été tué.
23:36 -C'est un homme qui a été tué.
23:38 -C'est un homme qui a été tué.
23:40 -C'est un homme qui a été tué.
23:42 -C'est un homme qui a été tué.
23:44 -C'est un homme qui a été tué.
23:46 -C'est un homme qui a été tué.
23:48 -C'est un homme qui a été tué.
23:50 -C'est un homme qui a été tué.
23:52 -C'est un homme qui a été tué.
23:54 -C'est un homme qui a été tué.
23:55 -C'est un homme qui a été tué.
23:57 -C'est un homme qui a été tué.
23:59 -C'est un homme qui a été tué.
24:01 -C'est un homme qui a été tué.
24:03 -C'est un homme qui a été tué.
24:05 -C'est un homme qui a été tué.
24:07 -C'est un homme qui a été tué.
24:09 -C'est un homme qui a été tué.
24:11 -C'est un homme qui a été tué.
24:13 -C'est un homme qui a été tué.
24:15 -C'est un homme qui a été tué.
24:17 -C'est un homme qui a été tué.
24:19 -C'est un homme qui a été tué.
24:21 -C'est un homme qui a été tué.
24:23 -C'est un homme qui a été tué.
24:24 -C'est un homme qui a été tué.
24:26 -C'est un homme qui a été tué.
24:28 -C'est un homme qui a été tué.
24:30 -C'est un homme qui a été tué.
24:32 -C'est un homme qui a été tué.
24:34 -C'est un homme qui a été tué.
24:36 -C'est un homme qui a été tué.
24:38 -C'est un homme qui a été tué.
24:40 -C'est un homme qui a été tué.
24:42 -C'est un homme qui a été tué.
24:44 -C'est un homme qui a été tué.
24:46 -C'est un homme qui a été tué.
24:48 -C'est un homme qui a été tué.
24:50 -C'est un homme qui a été tué.
24:52 -C'est un homme qui a été tué.
24:53 -C'est un homme qui a été tué.
24:55 -C'est un homme qui a été tué.
24:57 -C'est un homme qui a été tué.
24:59 -C'est un homme qui a été tué.
25:01 -C'est un homme qui a été tué.
25:03 -C'est un homme qui a été tué.
25:05 -C'est un homme qui a été tué.
25:07 -C'est un homme qui a été tué.
25:09 -C'est un homme qui a été tué.
25:11 -C'est un homme qui a été tué.
25:13 -C'est un homme qui a été tué.
25:15 -C'est un homme qui a été tué.
25:17 -C'est un homme qui a été tué.
25:19 -C'est un homme qui a été tué.
25:21 -C'est un homme qui a été tué.
25:22 -C'est un homme qui a été tué.
25:24 -C'est un homme qui a été tué.
25:26 -C'est un homme qui a été tué.
25:28 -C'est un homme qui a été tué.
25:30 -C'est un homme qui a été tué.
25:32 -C'est un homme qui a été tué.
25:34 -C'est un homme qui a été tué.
25:36 -C'est un homme qui a été tué.
25:38 -C'est un homme qui a été tué.
25:40 -C'est un homme qui a été tué.
25:42 -C'est un homme qui a été tué.
25:44 -C'est un homme qui a été tué.
25:46 -C'est un homme qui a été tué.
25:48 -C'est un homme qui a été tué.
25:50 -C'est un homme qui a été tué.
25:51 -C'est un homme qui a été tué.
25:53 -C'est un homme qui a été tué.
25:55 -C'est un homme qui a été tué.
25:57 -C'est un homme qui a été tué.
25:59 -C'est un homme qui a été tué.
26:01 -C'est un homme qui a été tué.
26:03 -C'est un homme qui a été tué.
26:05 -C'est un homme qui a été tué.
26:07 -C'est un homme qui a été tué.
26:09 -C'est un homme qui a été tué.
26:11 -C'est un homme qui a été tué.
26:13 -C'est un homme qui a été tué.
26:15 -C'est un homme qui a été tué.
26:17 -C'est un homme qui a été tué.
26:20 -Hasard du calendrier, le lendemain,
26:22 la cour d'appel de Paris se penche à nouveau sur le cas de Christine Malèvre.
26:26 -A l'occasion de ce procès en appel,
26:31 le débat sur l'euthanasie est dans toutes les têtes,
26:34 puisqu'il vient d'avoir l'affaire Vincent Imbert.
26:36 Vous craignez que ça détourne l'attention des jurés ?
26:39 -Du tout.
26:41 Du tout, parce que notre travail sera justement de montrer
26:44 que cette instrumentalisation qui est faite,
26:48 nous ne sommes pas dans la situation de M. Imbert.
26:51 Nous sommes en présence d'une femme qui a dérapé
26:54 et qui n'a pas su établir une relation équilibrée avec ces malades
26:58 et qui, déontologiquement, a violé toutes les règles,
27:00 et pénalement également.
27:02 -Crispées et inquiètes,
27:07 les sœurs de l'accusé se sont installées au fond de la salle d'audience.
27:10 -C'était toujours le même discours, mais qui peut se justifier,
27:17 c'est-à-dire des patientes qui voulaient mourir,
27:19 qui souffraient trop, et la défense se mettait sur cette autoroute-là
27:23 de l'émotion, de l'empathie, de la compassion,
27:26 alors que plus les jours et les audiences du procès se passaient,
27:30 plus on avait le sentiment que les choses étaient un peu différentes,
27:33 que Christine Malèvre était trop présente.
27:36 -On n'avait plus de doute ?
27:38 -Non, on avait guère de doute.
27:40 -Christine Malèvre va s'adresser à la salle, vous vous souvenez de ce qu'elle dit ?
27:42 -On a le sentiment qu'elle ne comprend pas l'histoire
27:44 ou qu'elle est toujours dans la même histoire,
27:46 qu'elle est toujours embourbée par elle-même.
27:48 L'important, d'une certaine façon, c'est ni le médecin ni l'infirmière,
27:52 c'est la personne malade. Mais non, là, elle parle d'elle.
27:55 -Le 15 octobre 2003, la cour d'appel de Paris rend son verdict.
28:01 L'infirmière est reconnue coupable de six des sept assassinats
28:05 qui lui sont reprochés.
28:07 Elle est acquittée pour le cas de Denise Lemahou,
28:09 comme en première instance.
28:13 La condamnation de Christine Malèvre est donc maintenue,
28:16 cette fois avec 12 ans de prison
28:19 et toujours interdiction d'exercer la profession d'infirmière à vie.
28:25 -Olivier Maurice, deux ans de plus qu'en première instance,
28:31 c'est une victoire pour vous ?
28:33 -C'est pas une victoire, c'est la réponse judiciaire
28:35 à un dossier important, parce qu'il était présenté
28:41 comme quelque chose qui allait éventuellement pouvoir émouvoir
28:44 l'opinion publique et susciter un débat au Parlement.
28:47 Et c'est un échec pour ceux qui ont tenté d'instrumentaliser
28:50 Christine Malèvre.
28:52 -Quelques jours après la condamnation de Christine Malèvre
28:59 et moins d'un mois après la mort de Vincent Imbert,
29:03 le procureur de Boulogne-sur-Mer ouvre une information judiciaire
29:07 contre le docteur Chauçois.
29:10 Le médecin est poursuivi pour empoisonnement avec préméditation.
29:14 Il risque la prison à perpétuité.
29:17 Marie Imbert, elle, est poursuivie pour administration
29:23 de substances toxiques commises avec préméditation
29:26 sur personnes vulnérables. Elle encourse 5 ans de prison.
29:30 -Maître Vigier, même mise en cause, la maman de Vincent
29:33 va continuer à se battre.
29:35 -Son combat, c'est le droit de mourir dignement
29:38 et le droit du suicide assisté, en quelque sorte.
29:41 Le problème de Vincent, c'est que je veux mourir
29:43 et je n'en ai pas les moyens. Je ne peux pas me donner la mort.
29:46 Vincent, avec des facultés un peu moins réduites,
29:49 il se donne la mort tout seul.
29:51 La Vincent ne peut pas.
29:53 Il n'a aucun moyen de se donner la mort et il veut mourir.
29:55 Il faut que les choses bougent, il faut que les lignes avancent,
29:57 il faut que la loi soit réformée.
29:59 Il faut qu'il y ait une loi Vincent Imbert.
30:01 Il faut que ça ait servi à quelque chose.
30:03 Ça a servi parce que Vincent n'est plus là,
30:05 c'est un soulagement immense,
30:07 il faut que ça serve à d'autres.
30:08 -En janvier 2005, maître, Marie Imbert est mise en examen.
30:12 Comment est-ce qu'elle vit cette décision ?
30:14 -Elle ne la vit pas mal parce qu'à la limite,
30:16 je crois qu'elle la souhaite.
30:18 Il faut être clair.
30:20 À ce moment-là, ce qui est envisagé,
30:22 c'est que cette procédure judiciaire, ce sera une tribune.
30:24 Ce sera une tribune qui deviendra une tribune politique.
30:26 La cour d'assises sera une tribune politique.
30:28 Le procès, ce sera un débat, comme il y en a eu
30:30 quelques 30 ans avant,
30:32 sur l'interruption volontaire de grossesse.
30:34 -Le Dr Chaussois, lui aussi,
30:36 va être mis en examen.
30:37 Comment est-ce qu'il réagit ?
30:39 -C'est un homme qui semble être un notable de province,
30:42 père de famille.
30:44 Et du jour au lendemain, ce geste qu'il fait aussi
30:47 par soutien pour Vincent et pour Marie bouleverse sa vie.
30:51 Il sait que s'il est renvoyé, il peut être condamné.
30:53 Il mesure, lui, cette aléa et il sait que sa vie professionnelle,
30:56 son amour de ce métier, tout peut être rompu.
30:58 -En février 2006, deux ans et demi après la mort de Vincent Imbert,
31:05 la juge d'instruction délivre un non-lieu.
31:07 Il n'y aura donc pas de procès,
31:09 ni pour le Dr Chaussois, ni pour la mère de Vincent.
31:13 -Lorsque cette décision est rendue,
31:16 votre cliente a une réaction assez inattendue.
31:19 -Ce que la juridiction de Boulogne-sur-Mer va choisir,
31:22 c'est de considérer que, à la fois, le Dr Chaussois
31:25 et Marie Imbert étaient sous une contrainte morale,
31:28 résultant, pour Marie, de la demande pressante de son fils,
31:33 comme si Vincent avait exercé une pression telle sur sa mère
31:36 qu'elle n'aurait pas pu y résister.
31:38 C'est d'une violence inouïe pour elle.
31:40 Parce que ce choix qu'elle revendique, on lui enlève ce choix.
31:43 On lui dit qu'on ne respecte plus son libre arbitre.
31:46 Ce n'est pas vous qui avez décidé ça, vous y avez été contrainte.
31:48 Une contrainte d'ailleurs irrésistible.
31:50 La preuve, c'est qu'elle vous exonère de responsabilité.
31:52 C'est insupportable.
31:54 Le choix qu'elle fait est un choix d'amour,
31:56 c'est un choix philosophique,
31:58 et c'est aussi un choix fondamentalement politique.
32:00 Et on le lui enlève.
32:02 C'est dramatique.
32:03 Et le docteur Chauçois, comment accueille-t-il ce non-lieu ?
32:07 Pour lui, par contre, c'est un soulagement.
32:10 Il faut imaginer que s'il est renvoyé devant une cour d'assises
32:12 et condamné en tant que médecin pour avoir donné la mort volontairement à quelqu'un,
32:15 pour un homicide,
32:17 c'est le contraire du serment d'Hippocrate, dans une certaine mesure.
32:20 On aurait pu lui faire interdiction d'exercer.
32:22 Contrôle judiciaire, on aurait pu lui dire
32:24 "Ecoutez docteur, vous n'exercez plus la médecine."
32:26 Ce double non-lieu est bien sûr une victoire
32:31 pour les partisans de l'euthanasie,
32:32 mais aussi un moyen d'interpeller la classe politique,
32:35 très réticente à s'emparer de la question de la fin de vie.
32:39 Jean-Luc Romero, pas de procès,
32:57 ni contre la mère de Vincent Imbert,
33:00 ni contre le médecin.
33:01 Qu'est-ce qui a motivé cette décision pour vous ?
33:03 C'est la justice qui est compatissante
33:05 et c'est elle qui fait que ces personnes ne se retrouvent pas en prison.
33:10 Et ça, ce n'est pas normal.
33:12 Ce n'est pas normal parce que ça veut dire
33:14 que les députés, les sénateurs ne jouent pas leur rôle,
33:17 ne font pas leur travail.
33:19 La justice fait ce que le législateur ne fait pas.
33:21 Face au retentissement de l'affaire Imbert,
33:29 le 22 avril 2005,
33:31 le Parlement adopte enfin une loi sur la fin de vie,
33:34 la loi Leonetti.
33:36 À peine votée, le texte suscite de nombreuses critiques.
33:39 Jean-Luc Romero, cette loi Leonetti,
33:43 elle propose des avancées.
33:45 Est-ce que pour vous c'est suffisant ?
33:47 Elle propose des avancées, oui et non.
33:49 Globalement, pour la personne qui meurt,
33:51 elle n'est toujours pas au centre de la décision
33:53 puisque c'est toujours ceux qui sont autour du lit qui décident.
33:55 Évidemment, pour les médecins, c'était important.
33:58 Parce qu'elle le protège d'une certaine manière.
33:59 Cette loi notamment, elle permet à un médecin
34:01 de faire ce qu'on appelle le double effet.
34:03 C'est-à-dire qu'un médecin, pour soulager vos douleurs,
34:05 il vous injecte un produit, par exemple de la morphine,
34:07 et puis sachant que s'il augmente la dose de morphine,
34:09 vous allez mourir.
34:11 En fait, il ne sera pas poursuivi
34:13 parce que sa première intention,
34:15 c'est de soulager votre douleur.
34:17 Donc vous voyez, c'est une grande sécurité pour eux,
34:19 une grande hypocrisie aussi quelque part.
34:21 Après, on a proclamé un certain nombre de choses.
34:23 La fin de l'acharnement thérapeutique,
34:25 qu'on a rebaptisé le "final".
34:27 Qu'on a rebaptisé "obstination des raisonnables".
34:28 On a créé les directives anticipées.
34:30 La possibilité pour chacune et chacun d'entre nous
34:33 d'écrire ses volontés au cas
34:35 où on ne serait plus en capacité de le dire.
34:37 Sauf que voilà, on le voit bien dans la réalité,
34:39 tout ça est quand même toujours autour
34:41 d'une mort médicalisée.
34:43 Pour vous, il faudra aller beaucoup plus loin ?
34:45 C'est-à-dire que nous, on souhaite changer de logique.
34:48 On a une logique de loi qui sont faites
34:50 par des médecins, pour des médecins,
34:52 et où on est dans une médicalisation de la mort.
34:54 Nous, on souhaite qu'il y ait une loi
34:56 qui place tout simplement la volonté de celle
34:58 ou celui qui est en fin de vie au centre des décisions.
35:01 Les soutiens de Vincent Imbert, eux,
35:05 attendent encore plus de la loi Leonetti.
35:07 Pourtant adoptée après l'émotion
35:09 suscitée par la mort du jeune homme,
35:11 elle ne s'applique pas au cas comme le sien.
35:14 Ce sont des lois sur la fin de vie
35:18 pour des patients dans des situations incurables,
35:20 mais avec un pronostic vital engagé.
35:23 Le pronostic vital de Vincent n'a jamais été engagé.
35:25 Aujourd'hui, on est dans la même situation.
35:26 Un gamin comme Vincent Imbert,
35:28 victime du même accident il y a une vingtaine d'années,
35:30 mais il vit.
35:32 Et on n'a pas de vraie solution.
35:34 C'est-à-dire qu'il va mourir comment ?
35:36 Il va mourir dans des souffrances atroces.
35:38 Il faut que ce soit transparent,
35:40 que la volonté puisse être exprimée
35:42 et qu'elle puisse être respectée
35:44 dans des cas comme ceux de Vincent Imbert.
35:46 Et aujourd'hui, on n'a toujours pas réglé cette situation.
35:48 Pour les patients,
35:54 comme pour le corps médical,
35:55 la loi Leonetti de 2005
35:57 est donc loin de répondre à toutes les questions.
35:59 En 2011,
36:01 13 ans après le cas Christine Malèvre,
36:03 une autre affaire fait les gros titres.
36:06 Le docteur Nicolas Bonnemaison,
36:08 un médecin urgentiste,
36:10 est accusé d'avoir accéléré la mort de sept patients.
36:13 Le docteur Bonnemaison intervenait
36:15 dans ce qu'on appelle le temps de l'agonie.
36:17 C'est-à-dire qu'il faisait un geste médical
36:19 qui, au mieux ou au pire,
36:21 raccourcissait une vie
36:23 de une heure, deux heures.
36:24 On était dans l'extrême agonie.
36:26 Des patients à l'agonie
36:30 que le docteur Bonnemaison aurait aidé à mourir
36:32 en leur injectant du curare,
36:34 un médicament non homologué.
36:36 Cette décision,
36:38 l'urgentiste l'aurait prise seul,
36:40 sans en discuter avec ses collègues,
36:42 ce qui est contraire à la loi.
36:44 Le docteur Bonnemaison
36:47 encourt la réclusion criminelle à perpétuité.
36:49 Il bénéficie pourtant d'un soutien sans-accès
36:52 et de la part des proches de ses victimes.
36:53 -Il l'a fait parce qu'il a voulu nous aider.
36:59 C'est pas un crime
37:01 d'aider les gens à mourir dignement.
37:04 C'est pas un crime.
37:06 Le crime, c'est de les laisser mourir comme ça.
37:09 -Maître Arnaud Dupin,
37:10 le docteur Bonnemaison a-t-il été soutenu
37:12 durant son procès ?
37:14 -La majeure partie des gens
37:16 qui ont été confrontés à la mort,
37:19 ont été les victimes de la mort.
37:21 -C'est un crime.
37:23 -C'est un crime.
37:25 -C'est un crime.
37:27 -C'est un crime.
37:29 -C'est un crime.
37:31 -C'est un crime.
37:33 -C'est un crime.
37:35 -C'est un crime.
37:37 -Les gens qui ont été confrontés à la mort
37:38 et qui ont été accompagnés par le docteur Bonnemaison
37:40 l'ont soutenu parce qu'il leur a
37:42 tellement apporté d'humanité
37:44 dans ces moments difficiles
37:46 qu'ils ne l'ont jamais vu
37:48 comme l'auteur d'un crime.
37:50 -Ses collègues aussi vont le soutenir publiquement ?
37:52 -Oui, parce que les médecins
37:54 sont confrontés quotidiennement à cela.
37:56 La grande hypocrisie en France,
37:58 c'est de ne jamais parler de la mort,
38:00 de ne jamais parler de la fin de vie.
38:02 On s'imagine que tambour battant,
38:04 on va faire de nouvelles lois pour modifier les choses.
38:06 Alors qu'on lui reproche
38:07 de ne pas avoir marqué sur le dossier
38:09 comme il aurait dû le faire.
38:11 Mais c'est une infraction à la loi,
38:13 ce n'est pas un crime.
38:15 -Malgré ses soutiens
38:17 et alors que l'instruction est toujours en cours,
38:19 le docteur Bonnemaison est radié
38:21 par le Conseil national de l'ordre.
38:23 Comment vit-il cette sanction administrative ?
38:25 -C'est terrible.
38:27 Parce que ce qui caractérise sa vie,
38:29 c'est la médecine.
38:31 Donc sans médecine, il n'y a pas de vie.
38:33 Il vit ça comme un immense déchirement
38:35 parce qu'il pensait
38:36 que ses pères allaient pouvoir le comprendre
38:39 et que ses témoignages et ses soutiens
38:41 qui venaient de professeurs,
38:44 de médecins éminents,
38:46 allaient justement permettre à l'institution
38:48 de comprendre ce qui lui était réellement arrivé.
38:50 -En juin 2014,
38:53 le procès du docteur Bonnemaison
38:55 débute devant la cour d'assises de Pont.
38:57 Les soutiens de l'urgentiste sont là en nombre.
39:00 Une seule famille s'est constituée partie civile.
39:04 À la barre, pas moins de 70 témoins défilent.
39:07 Tout le gratin médical est là
39:09 pour soutenir le docteur Bonnemaison.
39:12 Bernard Kouchner, vous avez été témoin
39:28 au procès du docteur Bonnemaison. Pourquoi ?
39:31 -Parce que c'est un sujet
39:33 mais parce qu'on m'a demandé,
39:34 parce que j'estimais
39:36 d'être un tout petit peu qualifié
39:38 pour témoigner que
39:41 dans l'imperfection absolue
39:43 des lois françaises,
39:45 il avait fait ce qu'il avait pu.
39:47 On a l'impression que c'est un assassinat
39:49 à chaque fois qu'on parle de ça.
39:51 C'est pas un assassinat,
39:53 c'est la volonté des gens
39:55 dont les médecins ont la charge.
39:57 -Maître Dupin, que plaidez-vous ?
40:00 -Nous plaidons l'acquittement
40:02 on le plaide à la fois sur un côté humain
40:05 mais aussi sur un côté technique.
40:07 C'était un peu fastidieux
40:09 mais c'était indispensable
40:11 parce qu'il y avait 7 cas
40:13 dont on devait répondre
40:15 et il a fallu les prendre minutieusement
40:17 un par un, à expliquer pourquoi
40:19 il n'y avait pas de crime
40:21 et que le médecin n'avait pas commis
40:23 le crime d'empoisonnement qui lui était reproché.
40:25 -Et quel est le verdict ?
40:27 -C'est l'acquittement,
40:29 l'acquittement avec une motivation très claire.
40:31 On n'a jamais eu l'intention de donner la mort
40:33 quels que soient les médicaments et les substances
40:35 qu'il ait pu utiliser.
40:37 Il a été accueilli par des applaudissements,
40:43 il a été accueilli par un soulagement.
40:46 Nous sortons de la cour d'assises
40:49 pour nous frayer un chemin
40:51 il fallait que les policiers nous encerclent
40:53 parce qu'il y avait une espèce de joie collective
40:58 parce que c'était fini.
41:01 -Comment il réagit, lui, à ce verdict ?
41:03 -Il est ému parce que...
41:05 il est entendu.
41:07 Il est ému parce qu'il se sent médecin à ce moment-là.
41:12 -Le parquet fait immédiatement appel de cet acquittement
41:17 et le Conseil d'Etat confirme la radiation
41:19 du Dr Bonnemaison de l'ordre des médecins.
41:22 L'exurgentiste réintègre finalement l'hôpital de Bayonne
41:28 mais dans un service administratif.
41:30 Près d'un an et demi après son acquittement,
41:35 Nicolas Bonnemaison est de retour dans le box des accusés.
41:39 -Maître Dupin, le procès en appel a lieu à Angers.
41:43 Les soutiens du Dr Bonnemaison sont toujours là ?
41:46 -Toujours. Encore et toujours.
41:50 Ce sont des Français qui ne comprennent pas
41:55 cet acharnement derrière tout cela,
41:58 cet acharnement sur le Dr Bonnemaison
42:00 et qui attendent beaucoup, encore une fois,
42:03 de la justice de leur pays.
42:05 -Comment le Dr Bonnemaison vit-il cette nouvelle épreuve ?
42:08 -Il le vit difficilement,
42:11 en ayant quand même l'idée que sa victoire,
42:15 il ne pourra pas la rééditer.
42:18 Il sent poindre que les armes sont beaucoup plus affûtées
42:23 et il faut arracher coûte que coûte sa condamnation.
42:26 C'est un procès extrêmement tendu.
42:28 -Il pense que c'est peut-être une décision autre que judiciaire,
42:33 que c'est une décision politique, une décision sociétale ?
42:36 -Nous l'appréhendons tous. Nous avons tous cette image en tête.
42:39 Mais nous le faisons tout pour nous battre, jusqu'au bout.
42:42 Il ne pouvait pas y avoir autre chose que l'acquittement.
42:45 Il ne pouvait pas y avoir autre chose que de dire
42:48 que le Dr Bonnemaison n'a jamais empoisonné personne,
42:52 qu'il n'a jamais commis de crime d'empoisonnement.
42:54 Voilà ce que nous étions venus dire.
42:56 -Le Dr Bonnemaison sort de l'audience entouré de son épouse et de ses avocats,
43:00 tout sourire, soulagé, dit-il, applaudi par ses soutiens.
43:04 Il vient pourtant d'être condamné à deux ans de prison avec sursis,
43:08 coupable d'avoir attenté à la vie d'une seule de ses patientes,
43:12 acquittée pour les six autres au bénéfice du doute.
43:19 -Quand on lit bien, finalement, on a l'impression que,
43:22 derrière cette décision de justice, qui pour moi est un acquittement,
43:26 il y a juste un mot pour l'opinion publique.
43:29 Ce n'est pas rien. C'est un tout petit peu.
43:33 C'est une décision, comme je le dis, pour montrer
43:38 qu'on n'a pas donné une absolution totale.
43:41 -Une semaine après la fin de son procès, il va se passer quelque chose de grave.
43:45 -Oui. Il tente de se suicider.
43:48 Il tente de mettre fin à ses jours.
43:51 Il est retrouvé dans un bois, par un joggeur.
43:55 Et, ironie du sort,
43:59 le médecin qui reçoit l'appel au SAMU de Bayonne
44:03 comprend ce qui se passe, comprend que c'est un de ses collègues
44:07 et va mettre en œuvre un dispositif qui va justement
44:11 lui permettre d'être très rapidement soigné.
44:15 -Qu'est-ce qui, selon vous, l'a poussé à commettre ce geste extrême ?
44:19 -Un trop-plein, peut-être. Un trop-plein de tout.
44:23 Et très certainement, l'absence d'espoir.
44:27 -Qu'est-ce que vous retenez, Bernard Kouchner, de cette affaire Bonne Maison ?
44:36 -La solitude.
44:41 La solitude des médecins qui ont choisi
44:45 d'accomplir ce qu'ils pensaient être, ou étaient sûrs,
44:51 que c'était le désir du malade,
44:56 le désir de l'homme ou de la femme qui était là.
44:59 -En février 2016, les parlementaires revoient leur copie.
45:09 Une nouvelle loi sur la fin de vie. La deuxième en dix ans.
45:12 -On a bien senti que la première loi était une loi faite pour les médecins,
45:18 pour rassurer les médecins, leur donner un cadre.
45:21 La deuxième loi, le curseur va se déplacer un petit peu vers les patients.
45:25 Et pour cela, deux éléments un peu nouveaux,
45:28 ce qu'on appelle les directives anticipées.
45:31 Avant, ces directives anticipées n'étaient pas ce qu'on appelle opposables,
45:34 c'est-à-dire que le médecin pouvait en prendre connaissance
45:37 et dire qu'il faisait ce qu'il veut.
45:39 Là, le médecin est obligé de suivre les directives anticipées.
45:42 Ça, c'était un premier changement.
45:45 Et le deuxième changement, qui était le plus problématique,
45:48 était autour de ce qu'on appelle la sédation terminale,
45:51 c'est-à-dire la possibilité, pour dire les choses rapidement,
45:54 lorsque des patients sont en fin de vie, dans des situations de maladie incurable,
45:57 et qu'ils le souhaitent, la possibilité de les endormir jusqu'au décès.
46:02 -Ce nouvel arsenal législatif va-t-il permettre d'éviter de nouvelles affaires ?
46:06 -Pour moi, c'est une grosse opération de communication.
46:08 C'est-à-dire qu'on reprend ce qu'il y a dans la loi de 2005,
46:10 on y rajoute les décrets de 2010, etc.
46:12 Et on nous dit qu'il y a deux nouveaux droits dans cette loi.
46:15 Le droit de dormir avant de mourir, qui est en fait une sédation terminale,
46:19 on vous endort, vous n'allez plus jamais vous réveiller,
46:22 mais ce n'est pas un droit dans la réalité des choses,
46:24 puisque c'est encore sous le contrôle des médecins.
46:26 On est toujours dans une affaire médicale.
46:28 Et la deuxième chose, c'est les directives anticipées,
46:30 dont on nous a dit qu'elles étaient désormais opposables,
46:32 c'est-à-dire que ce que vous avez écrit quand vous étiez conscients,
46:35 eh bien ça doit s'imposer aux médecins.
46:37 Dans la réalité des choses, c'est comme dans les contrats,
46:39 vous savez, il y a des trucs écrits en gros,
46:41 puis en bas, il y a des exceptions.
46:43 Et là, il y a deux exceptions qui enlèvent les choses,
46:45 puisque les directives anticipées, elles ne sont pas opposables
46:47 si il y a urgence vitale, ce qui arrive quand même un peu souvent,
46:49 c'est 50 % des certificats de décès sont faits aux urgences des hôpitaux.
46:52 Et puis la deuxième exception, c'est que si le médecin estime
46:55 que vos directives sont manifestement inappropriées.
46:58 Notion juridique que personne ne connaît,
47:01 qui a été inventée par M. Leonetti,
47:04 et dont d'ailleurs plusieurs magistrats de la Cour de cassation
47:06 ont dit qu'un jour, il y aura forcément des problèmes avec ça,
47:09 parce qu'il y aura des médecins qui ne voudront pas les respecter
47:11 juste par rapport à leur éthique, leur religion, voilà.
47:17 Est-ce qu'on peut faire quelque chose pour combler les failles de cette loi
47:20 ou est-ce qu'il faut imaginer toute autre chose ?
47:22 Moi, il faut partir d'une autre logique.
47:24 Alors évidemment, les devoirs du médecin
47:26 et puis les protections qu'on a mises dans le cadre des autres lois,
47:28 bien sûr qu'il faut garder ça.
47:30 Mais je vous dis maintenant, il faut une logique
47:33 qui soit au centre de la décision,
47:34 celui qui est en fin de vie.
47:36 Et cette loi, elle a attendu, et ce n'est pas nous qui le disons,
47:38 même Lacroix a eu l'audace de publier un sondage
47:42 qui nous dit que 89% des Français voudraient des lois
47:45 qui permettent la légalisation de l'euthanasie
47:47 ou du suicide assisté, ou les deux.
47:49 Donc je pense qu'à un moment,
47:51 ça fait 20 ans qu'on a les mêmes sondages,
47:53 il serait temps que les politiques entendent.
47:55 Parallèlement à l'adoption de cette loi,
48:02 une nouvelle structure est mise en place en 2016
48:04 par le gouvernement.
48:06 Le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie.
48:12 Véronique Fournier, vous êtes présidente
48:17 du Centre national des soins palliatifs.
48:19 Quelle est la mission de ce centre ?
48:21 Elle est triple.
48:23 Elle est premièrement d'informer nos concitoyens
48:26 de leurs droits en matière de fin de vie.
48:28 La deuxième mission du centre,
48:31 c'est de collecter l'ensemble des données disponibles
48:33 sur la fin de vie et sur les soins palliatifs.
48:36 Et la troisième mission du centre,
48:38 c'est de participer à l'évaluation des politiques publiques
48:41 en matière de soins palliatifs et de fin de vie.
48:43 Est-ce que les Français sont tous égaux
48:45 face à l'accès aux soins palliatifs ?
48:47 Alors nous, on a fait des cartographies
48:49 qui montrent qu'en fonction des départements et des régions,
48:51 il n'y a pas la même densité en soins palliatifs.
48:54 De manière pragmatique, ça coûte très cher ?
48:56 Je ne pense pas qu'on puisse dire que ça coûte très cher.
48:58 Par contre, on a fait des cartographies
49:00 qui montrent que ça coûte très cher.
49:01 Par contre, ce qu'on peut dire,
49:03 c'est que ça ne rapporte pas beaucoup d'argent.
49:05 Aujourd'hui, les hôpitaux fonctionnent grâce au budget
49:07 qu'on leur alloue.
49:09 Et le budget, il est proportionnel à la technologie
49:11 qu'ils déploient.
49:13 Or, les soins palliatifs, ce sont des soins non technologiques.
49:15 Donc, il y a peu d'argent qui vient avec ces soins-là.
49:17 Comme ça ne rapporte pas beaucoup d'argent,
49:19 ce n'est pas valorisé dans les hôpitaux.
49:21 Pourquoi en France, on oppose les soins palliatifs
49:23 à l'euthanasie ou au suicide assisté ?
49:25 Pour des raisons historiques et culturelles,
49:28 c'est en 1984 qu'on a commencé à développer
49:30 les soins palliatifs,
49:32 précisément pour résister à la tentation euthanasique.
49:35 Et donc, il existe dans le monde des soins palliatifs
49:38 un sentiment de nécessité de résistance très fort.
49:42 Je peux tout à fait comprendre qu'on résiste
49:44 à cette tentation ou à cette façon de vouloir mourir.
49:49 C'est un peu dommage que les deux ne puissent pas coexister.
49:56 Aujourd'hui, de plus en plus de pays dans le monde
49:58 autorisent l'euthanasie.
50:00 À nos frontières, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas
50:03 ont légalisé le suicide assisté.
50:05 C'est donc vers ces pays que se tournent
50:07 celles et ceux qui veulent choisir leur fin de vie.
50:11 On a la même époque que celle de l'avortement,
50:14 où les femmes qui avaient les moyens allaient se faire avorter à l'étranger,
50:17 les autres, elles avaient les faiseuses d'anges,
50:19 certaines en mourraient.
50:21 Nous, on est dans la même situation.
50:23 On a les gens qui partent à l'étranger
50:25 pour se faire avorter à l'étranger,
50:26 pour se faire avorter à l'étranger,
50:28 pour se faire avorter à l'étranger,
50:30 pour se faire avorter à l'étranger,
50:32 pour se faire avorter à l'étranger,
50:34 pour se faire avorter à l'étranger,
50:36 pour se faire avorter à l'étranger,
50:38 pour se faire avorter à l'étranger,
50:40 pour se faire avorter à l'étranger,
50:42 pour se faire avorter à l'étranger,
50:44 pour se faire avorter à l'étranger,
50:46 pour se faire avorter à l'étranger,
50:48 pour se faire avorter à l'étranger,
50:50 pour se faire avorter à l'étranger,
50:52 pour se faire avorter à l'étranger,
50:54 pour se faire avorter à l'étranger,
50:55 de la façon dont il quitte cette vie.
50:57 En France, l'affaire Christine Malèvre,
51:04 libre depuis août 2007,
51:06 et celle de Vincent Imbert,
51:08 ont su libérer la parole
51:10 et faire évoluer la justice
51:12 sur la question de la fin de vie.
51:14 Pourtant, l'euthanasie reste toujours un délit.