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Lundi 12 février 2024, SMART BOURSE reçoit Marie de Leyssac (Gérante allocataire, Edmond de Rothschild AM)

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00:00 [Musique]
00:10 Et c'est parti pour Smart Bourse, nous allons passer une vingtaine de minutes ensemble et notamment une dizaine de minutes pour cette première interview avec Marie de l'Essac.
00:17 Bonjour Marie de l'Essac.
00:18 Bonjour Nicolas.
00:19 Gérante allocataire chez Edmond Rothschild Asset Management, on va essayer de comprendre un petit peu votre vision de la situation globale boursière aujourd'hui, notamment aux Etats-Unis et en Europe.
00:28 Une actualité boursière aujourd'hui beaucoup tournée autour des entreprises et notamment des résultats des entreprises sur le dernier trimestre de l'année 2023.
00:38 Quel est votre sentiment aujourd'hui ? Comment est-ce que vous vivez cette saison des résultats qui une fois encore aux Etats-Unis donne l'impression que les entreprises résistent encore et toujours ?
00:46 Oui, on est effectivement en pleine saison de publication des résultats.
00:49 Moi, je la qualifierais peut-être d'un peu mitigée quand même. Bonnes aux Etats-Unis, effectivement un peu moins en Europe.
00:58 Et puis après quand on regarde sous la surface, il y a des choses un petit peu plus mitigées.
01:04 Mais c'est vrai qu'aux Etats-Unis, vous l'avez dit, les surprises sont vraiment au plus haut.
01:08 80% des entreprises ont publié au-dessus des attentes.
01:11 Donc ça, c'est vraiment une bonne chose.
01:14 La croissance des résultats au quatrième trimestre 2023 par rapport au quatrième trimestre 2022, on est entre 7 et 8% de croissance des résultats.
01:22 C'est 4 à 5% au-dessus de ce qui était attendu avant la saison de publication des résultats.
01:28 Donc quand même un bon cru, ça c'est sûr.
01:31 Après, ça reste assez dichotomique tiré par les entreprises de croissance, de technologie.
01:38 On parle souvent des 7 magnifiques.
01:42 Ces 7 là réussissent à publier dans leur globalité vraiment au-dessus de quasiment tout le reste du marché.
01:51 On a des croissances des ventes à 10 ou 12% je crois, et des croissances des résultats qui approchent les 50% sur un an.
01:58 Donc vraiment un bon cru.
02:01 Mais alors un bon cru avec ces 7 magnifiques, quand on a des entreprises qui arrivent autant encore à générer des bénéfices et donc de la croissance,
02:11 est-ce que ça vaut le coup encore de faire des moyennes par exemple sur les publications du S&P 500
02:15 quand on a un tel écart par exemple, ou en tout cas une telle avance de cette entreprise par rapport au reste ?
02:21 Alors ça vaut le coup parce qu'on regarde le S&P 500 dans sa globalité, qu'on fait des moyennes sur les valorisations et sur son niveau.
02:29 Donc ça reste toujours intéressant, ça montre quand même une dynamique.
02:32 Il faut voir que ces secteurs-là avaient ralenti un peu en avance.
02:37 C'est-à-dire que si les croissances sont aussi fortes, c'est aussi qu'on a un effet de base qui permet des croissances fortes.
02:43 Elles avaient des résultats qui avaient ralenti au Q4 et au Q1 2023.
02:51 Donc ça va aussi permettre probablement au prochain trimestre d'avoir encore des croissances de résultats fortes sur ces entreprises-là.
02:58 A l'inverse, tout ce qui est un peu plus cyclique, industriel, énergie, matières premières, ont ralenti un peu plus tard.
03:05 Et donc là, effectivement, on est dans une période un peu plus difficile.
03:09 Et c'est ce qu'on retrouve finalement aussi en Europe, où on a une composition sectorielle des indices globaux européens qui est beaucoup plus cyclique.
03:16 Même une économie qui est beaucoup plus cyclique.
03:18 Et donc on est un peu là dans le creux de la vague.
03:20 En Europe, les résultats avaient très bien tenu, vraiment sur un plateau assez élevé jusqu'au Q2, on va dire, l'année dernière.
03:29 Et ça commence à baisser depuis.
03:31 Et donc du coup, en fait, on est encore dans cette phase où quand on regarde les chiffres en annualité, d'un an sur l'autre,
03:38 les comparaisons sont un peu plus difficiles.
03:41 En Europe, on est en baisse de 15% à peu près, ou 12-15% par rapport à l'année précédente.
03:49 Et ça fait le troisième trimestre qu'on a des baisses comme ça.
03:53 Donc effectivement, les éléments sont un peu plus difficiles.
03:57 Et ce qui change un peu en Europe, c'est que les surprises positives sont moindres.
04:03 C'est-à-dire que même les deux trimestres précédents, où les croissances annuelles n'étaient pas très bonnes,
04:07 on avait quand même des surprises positives qui étaient assez intéressantes.
04:10 Là, on voit que l'investisseur a un peu du mal à se positionner.
04:14 Même sur un secteur comme le luxe, où effectivement on avait vu un ralentissement sur une partie de l'année.
04:19 Et là, on a l'impression que, alors effectivement, pour certaines valeurs en particulier, on arrive à générer un peu de la croissance.
04:24 Alors je pense que c'est assez particulier, le luxe, parce que c'est aussi très lié à la Chine.
04:29 Et on l'a vu, il y a certaines valeurs qui ont réussi à s'en sortir en Chine, d'autres qui disent que ça ne repart pas encore.
04:36 Donc on a quand même des écarts assez importants.
04:39 Mais c'est vrai que pour les plus importantes d'entre elles, effectivement, les chiffres étaient très bons et ont tiré le marché.
04:45 Mais on a effectivement cet écart entre les valeurs très cycliques, qui sont principalement l'énergie, la matière première,
04:53 et aussi certaines industrielles, qui ont vraiment plombé cette saison de résultats.
04:58 Et donc la composition sectorielle fait qu'on a cet écart entre Europe et US.
05:03 Mais même si on met les deux indices avec les mêmes pondérations sectorielles,
05:09 en Europe, on reste avec des baisses de résultats par rapport à l'année dernière.
05:14 Si on revient aux États-Unis, donc effectivement, 80% des entreprises qui ont déjà publié, qui publient des résultats au-dessus de leurs attentes.
05:21 7 à 8% de progression au global par rapport au dernier trimestre de 2022.
05:26 On se souvient quand même que l'année 2023 a été une année de questionnement énorme vis-à-vis de la possibilité de croissance de cette économie américaine,
05:33 avec un spectre récessif dont certains pensent qu'il est éloigné aujourd'hui, d'autres appellent encore à la prudence.
05:39 Est-ce que quand on voit une fin d'année comme celle-là, avec des résultats au global qui continuent quand même à être tirés vers le haut,
05:45 ça veut dire que le scénario d'un soft lending, scénario Goldilocks sur les marchés financiers,
05:50 cette idée d'économie américaine qui resterait résistante et qui serait toujours capable de délivrer de la croissance, c'est un scénario central aujourd'hui ?
06:00 Alors pour l'instant, c'est effectivement ce scénario qui se dessine.
06:03 Mais sachant qu'on est dans une période, je pense, de transition justement entre s'intéresser plus aux chiffres d'inflation ou plus aux chiffres de croissance.
06:11 Et dans cette transition-là, dans cet atterrissage, on va avoir probablement un peu plus de volatilité.
06:17 Mais c'est vrai qu'en tout cas sur l'année dernière, on a vu les chiffres du PIB américain pour le quatrième trimestre ont été largement supérieurs aux attentes.
06:26 Donc on a cette forte croissance qui a tenu l'année dernière.
06:29 Et on a l'impression effectivement dans les chiffres et les indicateurs avancés qu'on ne garde peut-être pas une tendance aussi forte,
06:36 mais en fait que la récession s'éloigne. Le risque de récession a quand même un petit peu diminué,
06:43 notamment quand on voit les derniers indicateurs avancés, les rebonds sur entre autres les PMI manufacturing.
06:50 Ça augure plutôt d'un risque de récession un peu plus faible.
06:57 C'est là où ça devient un peu plus compliqué. On risque d'avoir un petit peu plus de volatilité, notamment sur les chiffres d'inflation.
07:04 Les derniers pas sont les plus compliqués à faire parce qu'on a une tendance des inflationnistes qui est en place.
07:12 Mais le dernier pourcent de baisse à avoir pour atteindre cet objectif de 2% par exemple, il va être un peu plus difficile.
07:22 Dans ce contexte, une économie américaine qui résiste encore mieux qu'attendu, où finalement le meilleur scénario est celui qui se réalise,
07:31 est-ce que ça peut remettre en cause les attentes qu'on a vis-à-vis d'une Fed qui devrait baisser ses taux cette année ?
07:37 Est-ce que ça peut repousser d'autant ? Et encore, alors qu'on a vu que ce chiffre révisé de l'inflation qu'on attendait pour vendredi
07:45 a montré que la Fed était assez finalement juste dans son analyse jusque là ?
07:50 Aujourd'hui, les attentes étaient principalement pour le mois de mars, pour la première baisse des taux de la Fed.
07:57 Elles ont été repoussées aujourd'hui majoritairement pour le mois de mai.
08:02 Selon nous, que ce soit entre mars ou juin, ça ne va pas fondamentalement changer grand-chose pour les marchés.
08:10 Mais effectivement, c'est une question qu'on pense quand même qu'elle va le faire parce que les conditions sont restrictives aujourd'hui.
08:18 La tendance des inflationnistes, elle est là. Et les chiffres, les révisions qu'on a eues hier, chaque année, il y a des révisions des chiffres d'inflation.
08:25 Elles sont tombées vendredi. Et finalement, il ne s'est pas passé grand-chose. Il y a eu très peu de révisions, contrairement à l'année dernière,
08:33 où là, les chiffres avaient été fortement révisés. Et donc, on craignait un peu que les révisions soient plus importantes et pas dans le bon sens.
08:40 Alors que là, on se rend compte qu'il y avait une estimation de l'inflation qui était assez proche de la réalité.
08:43 En l'occurrence, c'était assez proche de la réalité. Mais c'est vrai que du coup, chaque chiffre d'inflation qui va tomber est de plus en plus important.
08:49 Et demain, on attend les chiffres d'inflation aux États-Unis. Et probablement que les surprises, elles sont moins symétriques aujourd'hui.
08:59 C'est-à-dire que les mauvaises surprises risquent d'être plus fortement sanctionnées que les bonnes surprises ne pourraient accompagner une hausse supplémentaire des marchés.
09:10 Parce qu'on s'attend quand même à ce qu'il y ait des désinflations. Et donc toute mauvaise surprise peut faire reculer cette attente de baisse des taux de la Fed et donc mettre un peu de volatilité, effectivement.
09:23 On est donc dans un environnement restrictif. Vous nous l'avez dit. Qu'en est-il des conditions financières ? Dans un environnement de taux hauts pratiqués, les taux réels restent à des niveaux attractifs encore aujourd'hui quand même.
09:35 On a eu une détente des conditions financières en novembre et décembre avec la forte baisse des taux. Depuis le début de l'année, les taux ont un petit peu remonté.
09:46 Ils ont repris 20, 30 points de base, 25 points de base. Les taux réels, en fait, ont l'air assez stables. Ça a commencé un petit peu à monter.
09:54 Vendredi, on commence à avoir une hausse. Aujourd'hui, aux États-Unis, sur le 10 ans, on est à peu près à 1,90%. Selon nous, c'est des niveaux où il va falloir faire un petit peu attention.
10:06 Si on monte au-dessus de 2 ou 2,10%, là, ça peut commencer à agiter un peu les marchés. En tout état de cause, c'est vrai que ce qu'on regarde aussi, c'est en fait les taux réels de la Fed.
10:21 C'est-à-dire que le taux de la Fed moins l'inflation. Aujourd'hui, on est sur des niveaux assez élevés. Que ce soit la Fed ou la BCE, d'ailleurs, on est sur des niveaux qui sont assez élevés,
10:32 proches de 2% ou au-dessus de 2% aux États-Unis. Selon nous, ça laisse quand même de la marge de manœuvre à la banque centrale américaine pour réduire ces taux.
10:43 Et si on a une tendance à la désinflation, finalement, ce taux réel, si la Fed ne bouge pas, va augmenter. Et donc, il va peser encore plus sur l'économie.
10:51 Si on se rappelle du discours de M. Powell du mois de décembre, il veut quand même éviter la récession et de trop forte pression sur l'économie.
10:59 Donc, ça laisse un peu de marge quand même pour commencer le cycle de baisse des taux.
11:04 Un mot peut-être des marchés avant d'aller sur le sol européen. S&P 500 à 5 000 points dans le contexte qu'on vient d'évoquer.
11:10 Effectivement, scénario un peu idéal, en tout cas anticipé, idéal pour l'économie américaine. Des entreprises qui résistent, qui publient des résultats supérieurs aux attentes.
11:18 Et en plus, ces 7 magnificent qui tiennent la cote. Rien d'étonnant finalement sur un S&P 500 qui aurait potentiellement déjà réalisé la performance qu'on pouvait attendre de lui sur toute l'année 2024.
11:29 Pas mal d'entreprises, effectivement, voyaient le S&P à la fin de l'année entre 5 000 et 5 050. On y est.
11:37 On y est, oui.
11:38 On y est. Maintenant, ça dépend aussi des conditions. C'est vrai que ce qu'on a eu depuis le début de l'année, c'est-à-dire une croissance qui tient peut-être mieux qu'attendue
11:45 et une inflation qui continue sa lente décrue, finalement, ça reste le scénario Godly Lock.
11:54 Donc on peut éventuellement aller plus haut, bien sûr. Après, je pense que ça va être une année quand même où il y aura un petit peu plus de volatilité,
12:01 parce que ces atterrissages économiques sont souvent source de volatilité.
12:05 Et alors pour finir, Marie de Lessac, un petit mot sur l'Europe. Alors on a parlé effectivement de la stratégie de la Fed vis-à-vis de son assouplissement monétaire.
12:14 Quand on a d'un côté une Fed qui annonce qu'elle va baisser ses taux, mais on sent que les anticipations se décalent dans une économie qui se porte bien
12:22 et de l'autre une BCE dont on attend aussi un assouplissement monétaire, mais dans une économie qui, pour le coup, a plus de mal à résister.
12:28 Est-ce que la BCE peut intervenir avant la Fed sur un scénario de baisse de taux ? C'est possible, ça, aujourd'hui ?
12:34 Alors c'était quelque chose qui n'était pas forcément envisagé en fin d'année dernière. Maintenant, ça devient possible.
12:41 Il se trouve que cette année, en fait, les réunions de la BCE arrivent toujours avant celles de la Fed.
12:45 D'accord. Oui.
12:46 Donc on a un calendrier qui est un petit peu plus compliqué pour la BCE. Ceci étant, en général, les baisses de taux de la Fed sont bien anticipées avant
12:53 et il y a peu de surprises lors de la Fed. Donc oui, elle pourrait, parce que là aussi on a une désinflation qui continue.
13:03 Et en revanche, pour le coup, une situation économique un petit peu plus compliquée.
13:07 Donc une nécessité de baisser les taux plus qu'aux Etats-Unis, plus rapidement peut-être, ou c'est trop tôt pour le dire ?
13:13 En tout cas, la probabilité qu'elle le fasse avant la Fed remonte un petit peu.
13:20 Ce n'est pas du tout ce qui est attendu par les marchés, puisque pour l'instant, c'est plutôt le mois de juin qui est attendu,
13:26 le mois de mai pour la Fed, et donc du coup la BCE commencerait après la Fed.
13:29 Mais c'est une éventualité, effectivement, si ça se confirme aussi dans les chiffres d'inflation, c'est toujours, je pense, la problématique des banques centrales, aujourd'hui.
13:38 C'est toujours l'indicateur à suivre en ce début d'année.
13:41 Merci beaucoup, Marie de Lessagne, de nous avoir accompagné dans la première partie de Smart Bourse.
13:45 Je rappelle que vous êtes gérante allocataire chez Edmond de Rothschild Assets Management.
13:49 Merci beaucoup.
13:50 Merci.
13:51 Et quand à nous, on se retrouve tout de suite dans la deuxième partie de Smart Bourse.

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