• il y a 8 mois
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Clique, c'est présenté par Mouloud Achour, tous les jours à 19h45 en clair sur CANAL+ ! 

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Transcription
00:00 -Bienvenue dans "Clique". Alice Augustin, vous êtes journaliste,
00:03 grand reporter pour Elle, spécialisée dans les violences sexistes et sexuelles.
00:07 C'est vous qui avez enquêté sur les accusations de viol et d'agression
00:10 visant Gérard Miller.
00:11 Vous avez recueilli les premières confidences de Judith Gaudrech
00:13 il y a quelques mois déjà.
00:15 Vous suivez en parallèle les affaires qui concernent les cinéastes
00:17 Benoît Jacot et Jacques Doyon.
00:19 Vous avez aussi recueilli le témoignage de Charles Tarnouz
00:21 et Danouk Grimbert dans l'affaire Gérard Depardieu.
00:24 Sarah Barug, vous avez été victime de violences conjugales
00:26 et vous le dites, vous voulez faire bouger les lignes.
00:29 Vous êtes l'auteur du livre à succès "125 et des milliers"
00:32 aux éditions HarperCollins, qui est un succès.
00:35 Vous avez enquêté sur 125 familles de victimes de féminicides.
00:39 Vous dites qu'il y a eu un avant et un après ce livre pour vous.
00:42 Vous avez enfin l'impression qu'on vous écoute.
00:44 L'écoute, ça va être le sujet de cette émission.
00:47 Et demain soir, Canal+ diffuse un documentaire-événement,
00:49 ça s'appelle "Vivante", de Claire Lajeunie.
00:51 Ça raconte votre histoire et celle de votre combat
00:54 contre les violences conjugales.
00:55 Je l'ai regardé, je le disais tout à l'heure avant l'émission,
00:58 c'est impossible de le regarder d'une traite,
01:00 c'est extrêmement émouvant comme documentaire.
01:02 Il est réussi et je vous invite à le regarder sur MyCanal.
01:06 Ça passe demain sur Canal+.
01:07 Dans ce documentaire, vous voulez comprendre ce problème dans son ensemble,
01:10 le globaliser, combattre les idées reçues,
01:14 trouver des solutions, dialoguer.
01:16 Vous dites que vous faites ça
01:18 pour que les femmes ne soient pas mortes pour rien.
01:21 -C'est d'ailleurs pour ça qu'il s'appelle "Vivante".
01:24 C'est un double sens.
01:26 L'idée, c'est d'apporter des solutions très pragmatiques
01:30 pour que les femmes restent vivantes,
01:31 mais c'est aussi pour garder près de nous,
01:34 comme si elles étaient encore là,
01:36 celles qu'on appelle nos étoiles, avec les familles.
01:40 Donc toutes ces femmes qui sont mortes,
01:42 et faire en sorte que ce soit pas pour rien,
01:44 qu'on ait compris pourquoi ça avait failli, à un moment donné,
01:48 que ce soit à un niveau personnel, à un niveau judiciaire,
01:50 à plein de niveaux possibles.
01:52 En réalité, c'est une constellation d'étapes et de manquements,
01:57 parfois, qui font que les femmes meurent.
02:00 -Demain, Canal+ s'engage contre les violences faites aux femmes
02:02 avec une soirée spéciale.
02:03 Le documentaire "Vivante", je le rappelle, passe à 21h.
02:06 Il faut absolument voir ce documentaire.
02:08 Tout le monde le savait, la pièce d'Élodie Wallace
02:10 avec Sylvie Testu passe à 22h40.
02:12 On avait reçu Sylvie Testu d'Enclic pour en parler.
02:14 Et enfin, le film "L'amour et les forêts" de Valérie Donzelli
02:17 avec Virginie Effira et Méville Poupeau à 23h45.
02:21 C'est un film qui parle d'en faire conjugale et d'en prise.
02:24 César de la meilleure adaptation.
02:26 Je rappelle quelques chiffres avant de commencer.
02:28 Une femme meurt tous les 2 jours et demi,
02:30 118 féminicides en 2022.
02:32 Les chiffres de 2024 à minima,
02:34 25 féminicides par compagnon ou ex-compagnon en France
02:37 au 26 février 2024.
02:39 82 % des mortes au sein du couple sont des femmes.
02:43 En moyenne, le nombre de femmes âgées de 18 à 74 ans
02:47 qui, au cours d'une année, sont victimes de violences physiques,
02:50 sexuelles et/ou psychologiques commises par leur conjoint ou ex-conjoint
02:54 est estimé à 321 000 femmes.
02:57 Qu'est-ce que vous avez à dire quand on entend ces chiffres ?
03:01 -Déjà qu'ils ne bougent pas, en fait,
03:03 puisqu'on est toujours, à peu près depuis plusieurs années,
03:05 à 120-130 féminicides par an.
03:09 Ça varie suivant les associations qui les recensent.
03:12 Donc ce chiffre ne n'évolue pas,
03:14 même s'il y a eu quand même quelques progrès
03:17 au niveau de dispositifs mis en place,
03:19 même si ça reste assez lent, d'après des associations féministes
03:22 qui trouvent qu'on ne met pas les moyens qu'il faudrait,
03:24 comme en Espagne, par exemple.
03:26 Voilà, c'est terrible, ce décompte qui reste le même chaque année.
03:30 On a 25 femmes aujourd'hui tuées par leur compagnon.
03:34 -Oui, et moi, ce qui me chagrine toujours beaucoup,
03:37 c'est qu'en réalité, ce chiffre est très en-dessous
03:40 de ce qui se passe véritablement.
03:43 Ça veut pas dire qu'il est totalement faux,
03:44 mais en tout cas, il ne regarde qu'un seul aspect du problème.
03:47 Par exemple, ce chiffre ne comprend pas
03:49 ce qu'on appelle les suicides forcés,
03:51 qui sont reconnus comme des féminicides depuis 2020.
03:54 C'est-à-dire quand une femme est tellement désespérée,
03:57 tellement persuadée qu'elle va mourir dans la souffrance
03:59 et tellement persuadée que la société ne peut plus rien pour elle,
04:02 qu'elle préfère mettre fin à ses jours.
04:04 C'est arrivé à la première femme de Bertrand Cantat, par exemple.
04:06 -Il y en a 200, pardon. -Il y en a... Voilà.
04:08 Et donc si on compte ce chiffre,
04:10 c'est plus une femme qui meurt tous les deux jours et demi,
04:12 c'est une femme chaque jour qui meurt en France.
04:14 Ce chiffre ne prend pas en compte ce qu'on appelle...
04:17 Moi, j'aime pas ce terme, mais les victimes collatérales.
04:19 C'est-à-dire quand l'agresseur arrive, qu'il tue les enfants,
04:21 qu'il tue les parents qui avaient recueilli son ex-compagne, etc.,
04:26 ils apparaissent nulle part.
04:28 Et puis, il n'y a aucune étude officielle
04:31 qui parvient à déterminer l'impact sur la santé des femmes
04:35 de la violence au quotidien.
04:37 Or, on sait très bien que lorsqu'on subit un énorme stress,
04:40 qu'on subit du contrôle coercitif,
04:43 qu'on est dans le contrôle et dans la peur tous les jours,
04:46 on développe plus facilement des maladies
04:48 qui, très souvent, peuvent être mortelles.
04:49 -Vous en parlez dans votre documentaire.
04:51 On voit une séquence qu'on va regarder tout à l'heure avec votre père
04:53 qui parle même du fait que vous avez été dévitalisé,
04:57 que vous avez perdu le feu qui était en vous, toute passion.
04:59 Je vous le dis, ce documentaire, il s'appelle "Vivante".
05:02 Il faut vraiment, vraiment, vraiment le voir.
05:04 Un mot important que vous avez prononcé, c'est "féminicide".
05:06 Il a mis du temps, ce mot. -Beaucoup de temps.
05:09 Oui, c'est un mot qui, je crois, la première fois,
05:10 a été utilisé au Mexique
05:12 sur les femmes qui étaient tuées à la frontière mexicaine.
05:15 On met un nombre de femmes incalculable
05:16 et donc ce mot est apparu à ce moment-là.
05:18 Je pense pas qu'il soit encore entré dans la législation française,
05:22 mais il est, en tout cas, utilisé régulièrement dans les prétoires.
05:25 Et ça, c'est assez nouveau.
05:26 En tout cas, les gens de justice, maintenant,
05:29 utilisent ce mot lors des procès.
05:31 -Est-ce que ce mot faisait peur ?
05:32 -C'est pas qu'il fait peur, c'est qu'il a fallu accepter
05:35 que, oui, les femmes étaient tuées en raison de leur genre.
05:37 Et ça, c'est une acceptation qui vient
05:39 que quand la société atteint un niveau de conscience,
05:43 une prise de conscience telle qu'elle peut mettre ce mot...
05:45 Enfin, voilà, nommer les choses, ça veut dire en prendre conscience.
05:48 Et on voit que ce...
05:49 Enfin, le "L", par exemple, on traite de sujets de violence conjugale
05:52 depuis des années et des années,
05:54 et on voit, c'est vrai, une accélération de la prise de conscience
05:57 depuis, je dirais, une dizaine d'années,
05:59 mais c'est très, très long, le regard de l'humanité,
06:02 de toute l'histoire de l'humanité.
06:03 -On avait avant des mots comme "crime passionnel".
06:05 -Oui, alors ça, ça a été vraiment une façon
06:07 de ne pas vouloir reconnaître la question du genre.
06:10 Aujourd'hui, on peut plus utiliser le mot "crime passionnel"
06:12 ou "fait divers"
06:13 pour qualifier le meurtre d'une femme par son compagnon,
06:16 et je pense que c'est des progrès,
06:19 de dire ce que ces crimes sont,
06:21 pour ce qu'ils sont, à savoir des crimes en fonction du genre de la victime.
06:25 -C'est-à-dire que, juridiquement, il y a un terme,
06:28 et c'est d'ailleurs pour ça que c'est difficile aussi
06:30 de faire entrer dans la loi la notion de féminicide,
06:32 qui s'appelle "luxoricide",
06:34 et qui lit, en fait, le meurtre de la femme
06:37 à une faute au sein du mariage.
06:40 Et donc, justement, c'est toute la problématique,
06:43 c'est-à-dire qu'en gros, si on trompe son conjoint,
06:46 on a failli à son devoir conjugal,
06:49 et donc, quelque part,
06:50 il y a une forme de circonstance atténuante.
06:52 Donc on repart de très, très, très loin.
06:54 Et il y a un terme... -Je le savais pas, ça.
06:56 -Donc c'est difficile.
06:58 Et puis il y a beaucoup aussi d'avocats qui craignent
07:01 qu'en faisant entrer en vigueur dans la loi
07:04 la notion de féminicide,
07:06 finalement, on ait encore plus de difficultés
07:08 à montrer que l'assassin n'a pas tué juste sa femme,
07:12 mais parce qu'elle était sa femme.
07:13 Et c'est très compliqué.
07:15 Or, dans la grande majorité des cas, peut-être même 90 %,
07:19 le féminicide survient quand la femme s'en va,
07:21 ou que les papiers du divorce arrivent,
07:23 ou qu'elle noue une nouvelle relation.
07:25 En tout cas, quand il devient matériel
07:27 pour son compagnon ou ex-compagnon,
07:29 qu'elle ne lui appartient plus.
07:31 -Sarah, vous avez vécu pendant 10 ans la violence d'un homme.
07:35 Vous dites que vous avez vécu la peur au ventre.
07:37 Au début du documentaire, vous dites que vous aviez une certaine image
07:39 des femmes battues,
07:40 pensiez que ça pouvait arriver à tout le monde sauf à vous.
07:44 Et au début de votre relation, tout allait bien.
07:45 Et petit à petit, c'est devenu l'enfer.
07:48 Comment ça s'est manifesté ? Comment ça s'est installé ?
07:51 -C'est un grignotage, en fait.
07:52 L'emprise, c'est un grignotage.
07:54 La violence dans le couple, c'est un grignotage.
07:56 C'est très, très rare de se prendre une baffe au premier rendez-vous.
07:59 En revanche, moi, de ce que j'ai vécu,
08:03 la violence, elle s'immisce dans les failles narcissiques.
08:07 C'est-à-dire les failles d'estime de soi.
08:09 Moi, quand j'ai rencontré celui qui est devenu le père de ma fille,
08:12 j'avais l'impression d'être la dernière des nulles,
08:14 que jamais personne ne m'aimerait,
08:17 et donc que j'étais prête un peu à tout pour trouver mon sauveur
08:19 dans cette société.
08:21 Et le fait qu'il m'accorde tant d'importance,
08:24 qu'il soit à ce point jaloux,
08:26 qu'il me mette finalement des limites, ça me dérangeait,
08:29 et en même temps, ça me rassurait dans l'idée
08:31 que quelqu'un tenait à ce point à moi.
08:34 Et c'est comme ça que peu à peu la prison se referme.
08:38 -Elle se manifestait comment, ces limites ?
08:40 -Par exemple, j'avais pas le droit de parler aux garçons,
08:43 de rester trop tard à des réunions de travail,
08:45 d'aller voir des amis, d'aller voir mes parents.
08:48 C'était pas un écriteau qui avait marqué sur la porte.
08:51 Seulement, si j'y allais,
08:53 par exemple, si j'allais prendre un café avec une copine,
08:55 je pouvais recevoir jusqu'à 40 SMS en une heure
08:58 me demandant où est-ce que tu es, avec qui,
09:00 qu'est-ce que tu leur dis, vous parlez pas de moi,
09:02 tu me racontes bien tout ce que vous avez dit.
09:04 Enfin, en fait, un stress, sans compter les appels.
09:08 Il fallait que je sorte du café où j'étais pour répondre,
09:10 pour le rassurer, et petit à petit,
09:12 ça décourage d'aller voir des amis.
09:15 Ça décourage d'aller voir ses parents,
09:17 et on se retrouve seul.
09:19 -Mais je pose la question très naïvement.
09:21 Comment est-ce qu'on fait pour supporter ça, en fait ?
09:27 -On le supporte pas, je crois.
09:30 -On le supporte pas, simplement,
09:32 on sait pas comment faire pour que ça s'arrête.
09:33 -Moi, j'ai essayé de partir 700 fois.
09:35 700 fois, il m'a rattrapée, mais il m'a rattrapée véritablement.
09:39 C'est-à-dire que je partais me réfugier dans mon bureau,
09:41 il frappa la porte jusqu'à 5h du matin,
09:43 il m'empêchait de dormir, il m'empêchait de sortir.
09:46 Il fallait qu'on s'explique.
09:47 Les explications, ça pouvait durer deux jours,
09:49 ou je pouvais pas manger,
09:50 ou je pouvais demander...
09:51 Il fallait que je demande la permission pour aller aux toilettes.
09:53 Et en fait, quand on sort de là, on n'en peut plus.
09:56 -C'est très intéressant, ce que vous avez dit,
09:58 parce qu'on pourrait croire,
10:00 quand on écoute une histoire comme ça,
10:03 qu'on peut claquer la porte...
10:04 -Non, parce qu'en fait, c'est des années d'humiliation,
10:08 de propos dégradants.
10:09 Et elle a raison, ce que dit Sarah.
10:10 Ce qui est important, c'est que l'estime de soi, déjà,
10:12 elle est pas forcément super forte quand on rencontre un homme comme ça,
10:15 et souvent, ces hommes le sentent aussi, je pense.
10:17 Et en plus, elle ne fait que se dégrader.
10:19 Et ce que je voulais rajouter, c'est que beaucoup de femmes,
10:20 par exemple, développent des maladies auto-immunes.
10:23 Nous, on a interviewé beaucoup de femmes
10:24 victimes de violences psychologiques ou conjugales.
10:26 Elles développent donc des cancers, parfois, certains,
10:29 des symptômes du stress post-traumatique.
10:31 Donc vraiment, c'est une prison, en plus, mentale.
10:34 Plus on nous rabaisse, plus on pense qu'on est nul.
10:37 Donc si on pense qu'on est nul,
10:38 on a encore moins de ressources pour partir.
10:40 Donc en fait, c'est ça, le mécanisme d'emprise.
10:41 -Et qu'on ne vaut rien sans lui.
10:43 -Oui, qu'on ne vaut rien sans lui,
10:44 parce que toute la journée, c'est "t'es moche, t'es nul, tu sers à rien".
10:47 Et puis, il y a ce contrôle coercitif,
10:48 c'est le terme employé par certains spécialistes.
10:51 Donc c'est la façon dont la surveillance s'installe,
10:54 les menaces, les contrôles des téléphones portables,
10:56 l'interdiction d'aller travailler, d'avoir des amis.
10:59 Donc ce contrôle isole complètement la personne.
11:01 Et c'est ça qu'on dit souvent aux entourages de femmes battues ou violentées,
11:05 c'est qu'il faut jamais lâcher ces femmes.
11:07 Oui, parfois, ça peut paraître déstabilisant pour l'entourage,
11:10 parce qu'on leur demande une fois, deux fois,
11:12 "Est-ce que ça va ? Comment tu vas ? Est-ce que tu veux de l'aide ?
11:14 Est-ce que tu veux partir ?"
11:15 Et souvent, ces femmes, je crois que c'est votre histoire aussi,
11:17 ces femmes sont dans le déni, elles ont honte, elles disent
11:19 "Non, non, mais tout va bien, t'inquiète pas."
11:20 Et en fait, elles partent, elles reviennent.
11:22 Je crois qu'il faut savoir qu'une femme part en moyenne sept fois
11:25 et revient sept fois avant de réellement quitter son compagnon.
11:28 Donc c'est vrai que pour l'entourage, c'est très déstabilisant.
11:30 Et moi, je crois qu'il faut dire aussi à l'entourage,
11:32 il faut jamais les lâcher, ces femmes, en fait.
11:34 -Toujours être là. -Le temps de la victime,
11:36 le temps de la victime n'est pas le temps des autres.
11:39 Et souvent...
11:41 Tu as tout à fait raison. Pardon, je suis...
11:42 -Non, mais...
11:43 -Tout à fait raison d'insister sur le fait que oui, il faut tenir.
11:47 Souvent, on aimerait que ce soit efficace.
11:50 On aimerait conseiller quelqu'un qui va pas bien,
11:52 lui dire "Voilà, pars", et puis qu'elle parte.
11:55 Ou lui dire "Mais quitte-le", et puis qu'elle le quitte.
11:57 Sauf qu'en fait, là, on apporte des réponses rationnelles
12:00 à un problème émotionnel.
12:01 C'est-à-dire qu'une femme qui est dans une relation d'emprise
12:04 qui est épuisée, parce qu'il faut savoir que...
12:07 Quand ça fait des années qu'on est privé de sommeil,
12:09 qu'on est comme ça toute la journée à surveiller que le portable sonne pas...
12:12 On est dans un état de fatigue et de vigilance énorme.
12:17 Et c'est épuisant.
12:18 Donc on n'en sort pas comme ça de ça.
12:20 -En fait, c'est vraiment l'expression "avoir à l'usure".
12:22 -Mais c'est exactement ça, c'est du grignotage.
12:25 Et surtout, ce qu'on a tendance à oublier,
12:27 c'est que la violence, le choc de la violence,
12:30 crée sur le cerveau un état de sidération.
12:33 C'est pas juste une expression...
12:35 Véritablement, on a l'impression d'assister à sa vie de l'extérieur.
12:39 C'est une protection que le cerveau fait,
12:43 qui ferme finalement une porte
12:45 qui risquerait d'avoir trop de conséquences sur notre santé,
12:47 et on se met à observer nos vies de l'extérieur.
12:49 Et d'ailleurs, moi, je me suis rendue compte de ça,
12:54 et je le raconte dans "125 et des milliers",
12:56 il y a eu un moment donné où je me suis dit...
12:58 J'étais en train de changer mon bébé,
13:00 donc c'était pendant une énième dispute,
13:02 et je m'entends dire dans ma tête
13:04 "Mais enfin, c'est pas possible, ce qui fait subir à la mère de Lala."
13:07 Et là, je m'arrête, je me dis "Mais c'est moi."
13:10 -Vous avez parlé de vous à la troisième personne.
13:11 -C'est pas possible, ce qui fait subir à la mère de ma fille.
13:15 -C'est de la dissociation, en fait.
13:17 C'est vraiment l'idée que...
13:19 C'est pareil dans les viols ou les agressions sexuelles.
13:22 Ce qui arrive à la personne est tellement, tellement violent
13:25 qu'en fait, le cerveau se met en off
13:27 comme pour protéger d'un traumatisme trop fort
13:30 qui grillerait littéralement le cerveau.
13:32 et du coup...
13:34 [SILENCE]

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