Les informés de franceinfo du jeudi 14 mars 2024

  • il y a 6 mois
Autour de Bérengère Bonte, les informés débattent de l'actualité du jeudi 14 mars 2024.

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00:00 *Musique*
00:02 20h, 21h, France Info, les informés, Bérangère Monte.
00:07 Bonsoir à tous, les informés avec une double actualité autour de la Russie, de l'Ukraine.
00:12 Emmanuel Macron aux 20h de TF1 et France 2, vous l'avez compris.
00:15 On va suivre ça ensemble dans une dizaine de minutes.
00:18 Le président très attendu notamment sur ses déclarations autour de l'envoi possible de troupes en Ukraine.
00:25 Et ce alors que la Russie s'apprête à voter demain en pleine guerre ukrainienne.
00:29 Vladimir Poutine en route pour un cinquième mandat, espère un plébiscite.
00:33 Comment s'est passée cette non-campagne, couïe des quelques opposants de l'opinion russe.
00:39 Bref, pour parler Russie, Ukraine et politique française, nous avons les informés.
00:44 Qu'il vous faut, François Reynaud, journaliste, écrivain et chroniqueur à l'Obs,
00:48 et auteur de "La grande histoire de la Russie" aux éditions Flammarion.
00:51 À côté de vous, Manon Loiseau, grand reporter, prix Albert Londres 2006, spécialiste de la Russie.
00:56 Et vous avez co-réalisé avec Ksenia Bolchakova ce documentaire qui est toujours disponible d'ailleurs sur Arte,
01:04 sur le site d'Arte l'Ukraine, sur les traces des bourreaux.
01:07 Et puis pour le service politique de France Info, j'ai le plaisir d'accueillir Paul Barcelone.
01:11 Bonsoir, bienvenue à tous les trois.
01:13 Emmanuel Macron s'exprime aux 20h de TF1 de France 2, dans moins de 6 minutes maintenant.
01:21 Anne-Sophie Lappix, Gilles Boulot, ça c'est pour les interviewers.
01:24 Pourquoi il parle maintenant Paul Barcelone ?
01:25 Alors, interview vers 20h10 dans 6 minutes à peu près, qui devrait durer une demi-heure.
01:31 Pourquoi il parle maintenant ?
01:32 À mon sens, pour au moins deux raisons.
01:35 D'abord, avec un objectif de clarification.
01:38 Lui qui a semé le trouble s'est peut de le dire ces dernières semaines.
01:41 Vous vous souvenez qu'il a récemment dit que rien ne devait être exclu,
01:45 pas même l'envoi de troupes au sol en Ukraine.
01:47 Donc probablement des questions autour de la clarification sur cette sortie
01:51 qui a ému notamment les capitales européennes.
01:54 Expliquer aux Français, ça me semble être la deuxième raison,
01:57 les conséquences concrètes de la guerre en Ukraine.
02:00 Plus de deux ans de guerre maintenant, quelles sont les conséquences ?
02:02 L'inflation, le prix des céréales, l'agriculture,
02:05 quelles armes on envoie, quelle aide on envoie aux Ukrainiens.
02:09 Et puis, le troisième élément me semble être important,
02:12 qui est à minima un élément de contexte politique,
02:15 c'est le début de la campagne des Européennes dans moins de trois mois.
02:18 Donc c'est le chef des armées, mais c'est aussi le chef de la majorité.
02:20 Un peu le costume du chef de guerre, oui, bien sûr,
02:23 pour Emmanuel Macron qui aime ce costume-là.
02:25 Il faut aussi avoir à l'esprit que cette semaine,
02:28 sa ligne politique, si je puis dire, a été validée par deux votes,
02:33 non contraignants, symboliques, mais deux votes quand même au Parlement,
02:35 d'abord à l'Assemblée nationale et au Sénat.
02:38 À chaque fois, deux votes à très large majorité qui ont probablement,
02:43 c'est en tout cas l'argument avancé par l'Elysée, validé sa ligne.
02:47 Reste à savoir ce soir comment il se défend,
02:50 notamment sur cette affaire d'envoi de troupes en Ukraine.
02:53 - Est-ce qu'il s'agit aussi peut-être de rassurer les Européens, François Reinhardt ?
02:58 On sait que ses déclarations sur l'envoi de troupes précisément,
03:00 ont un peu semé le trouble, notamment avec les Allemands.
03:02 Il sera demain d'ailleurs avec Olaf Scholz.
03:04 - Là, je ne suis pas sûr que dans une interview à la télé française,
03:06 il rassure les Européens, parce que ce qu'on avait reproché,
03:08 on l'avait dit sur ce plateau, c'est le fait qu'ils disent
03:12 on va envoyer des troupes, mais qu'ils le fassent
03:13 sans concertation avec les autres Européens.
03:16 Non, là, il y a une séquence.
03:17 - Est-ce que ce n'est pas l'occasion de rectifier le tir ?
03:19 - Vous avez raison, je ne pensais pas à ça.
03:21 Effectivement, il va peut-être dire ça tout à l'heure.
03:24 Mais en tout cas, je vois plutôt une séquence française,
03:27 comme le disait Paul à l'instant, sur le côté,
03:29 il a reçu les anciens présidents de la République.
03:31 Il y a eu ce débat et maintenant, il s'explique face aux Français.
03:34 Alors, le travail de Paul Barcelone, c'est d'expliquer que c'est quelque chose
03:38 qui est lié à la politique intérieure française.
03:40 Mais ce n'est pas inutile non plus.
03:41 Je veux dire, on est dans un moment grave de l'histoire de l'Europe.
03:44 Il y a la guerre qui est aux portes.
03:45 Donc, je trouve normal que le président de la République
03:47 en parle et explique aux Français.
03:49 Après, les Français, ils en penseront ce qu'ils voudront.
03:50 Mais que l'on mette tout ça sur la table,
03:53 l'heure est grave quand même, de fait.
03:55 Deux ans après cette guerre, on pensait tous que...
03:58 Enfin, cette guerre, elle a commencé,
03:59 Poutine pensait qu'il allait la régler en trois jours.
04:01 Enfin, je parle sous le contrôle de Manon Loiseau,
04:03 qui connaît tout ça par cœur.
04:04 Je fais une minuscule parenthèse,
04:06 je suis très fier d'être à côté de Manon Loiseau,
04:07 parce que c'est une grande journaliste.
04:08 L'honneur de notre métier, c'est une femme...
04:10 - Et nous, on est très fiers de la recevoir aussi.
04:11 - Elle a eu un courage exceptionnel.
04:12 Voilà, parce qu'elle a suivi déjà les guerres de Tchétchénie, etc.
04:15 Bon, bref, fin de la parenthèse.
04:16 En tout cas, non, non, mais c'est vrai.
04:18 Il y a l'heure est grave, et en fait,
04:22 ensuite, les Occidentaux, on a pensé, nous,
04:25 du côté occidental, que cette guerre allait s'arrêter tout de suite,
04:27 parce qu'on allait mettre la Russie à genoux avec les sanctions, etc.
04:30 Puis, deux ans plus tard, ça continue,
04:32 et Poutine, rien ne le calmera.
04:34 C'est un ogre qui a besoin de manger les enfants tous les jours.
04:36 Donc, voilà, c'est très bien qu'on en parle.
04:38 - Manon Loiseau, sans retracer tout votre parcours,
04:41 mais votre rapport avec la Russie, il commence...
04:44 Il y a combien de temps ?
04:46 - Oh, quand j'ai 13 ans, donc voilà,
04:48 au moment de la pérestroïka, et puis après, je suis partie là-bas,
04:50 j'ai vécu 10 ans, de 1995 à 2005.
04:53 Donc, j'ai vécu et l'époque Yeltsin, où tout était permis,
04:56 où, avec les jeunes amis russes que j'avais,
04:58 on rêvait de démocratie ensemble.
05:00 Et puis, dès la première année de Poutine,
05:03 la nature du régime était très claire, en fait.
05:05 Poutine est venu au pouvoir sur le sang,
05:09 avec les attentats de Moscou, avec la Deuxième Guerre de Tchétchénie,
05:13 et finalement, on découvre,
05:16 et on a découvert de quoi il est capable,
05:19 depuis deux ans, ce qui se passe en Ukraine,
05:21 mais tout a été écrit en Tchétchénie,
05:22 tout avait été écrit par Anapolite Kovskaya, qui a été assassinée.
05:25 De nombreuses... - Et l'histoire se répète, là.
05:28 - L'histoire se répète, et c'est la nature de ce régime
05:31 qui s'écrit depuis 20 ans.
05:33 - Quand Emmanuel Macron dit
05:36 "c'est un moment critique de cette guerre",
05:38 Jens Stoltenberg, le patron de l'OTAN,
05:40 le dit aussi aujourd'hui à nouveau à Bruxelles,
05:42 en appelant les membres de l'OTAN à se mobiliser,
05:45 notamment sur les craintes autour des munitions.
05:49 On a le sentiment qu'on pourrait presque le dire...
05:52 Enfin, on aurait pu le dire de nombreuses reprises.
05:55 Pourquoi ce moment-là est critique dans cette guerre ?
05:57 - Je crois que la défaite à Avdiv, il y a quelques semaines,
06:00 une ville qui a été reprise par les troupes russes,
06:02 a commencé à inquiéter sérieusement les Ukrainiens
06:07 et aussi l'Europe, parce qu'effectivement,
06:10 on s'est rendu compte à ce moment-là,
06:12 ce qui est le cas depuis plusieurs semaines,
06:14 sans doute depuis plusieurs mois,
06:16 qu'il y a un défaut, qu'il y a un manque absolu de munitions.
06:20 Et un moment aussi où Zelensky devait passer une loi
06:24 pour renouveler les appels et envoyer d'autres personnes sur le front,
06:28 et où les jeunes Ukrainiens n'ont plus tellement envie d'aller se battre.
06:30 Il y a eu énormément de blessés, énormément de morts.
06:32 Et ça fait que l'élan national qu'il y a eu,
06:35 nous on a passé un an et demi avec Senér Yalé,
06:37 et on a vu cette nation entière qui veut se battre pour son peuple.
06:40 C'est vrai qu'aujourd'hui, il y a un manque de munitions,
06:43 et il y a un manque d'hommes aussi.
06:44 - Je vous interromps, et bien c'est parfait.
06:46 Emmanuel Macron, donc, en direct sur France Info.
06:49 Dans un petit instant,
06:53 dès que la connexion avec l'Elysée sera établie...
06:56 - Bonsoir Monsieur le Président. - Bonsoir.
06:58 - Bonsoir Monsieur le Président. - Bonsoir.
07:00 Vous avez choisi de vous exprimer dans les 20 heures de nos deux chaînes
07:04 pour clarifier votre position sur notre engagement aux côtés de l'Ukraine.
07:08 Le 26 février, après une conférence internationale,
07:11 vous avez scidéré tout le monde
07:13 en refusant d'exclure l'envoi de troupes occidentales en Ukraine.
07:17 Vous avez, quelques jours plus tard,
07:19 appelé les Européens à ne pas être lâches.
07:22 Enfin, vous avez affirmé qu'il n'y avait aucune limite,
07:25 aucune ligne rouge au soutien français à Kiev.
07:28 Alors, est-ce qu'on a bien compris ?
07:30 Est-ce que vous envisagez d'envoyer des troupes occidentales françaises en Ukraine ?
07:34 Bonsoir et bienvenue.
07:36 Vous êtes assis devant moi.
07:38 Est-ce que vous êtes debout ?
07:40 Non.
07:42 Est-ce que vous excluez de vous lever à la fin de cette interview ?
07:45 Au cas où sûr, vous n'allez pas l'exclure.
07:48 - On est même sûr de le faire. - Voilà.
07:50 Nous, on n'est pas sûr de le faire,
07:52 mais en tout cas, on n'est pas dans cette situation-là, aujourd'hui.
07:55 Mais être assis ou debout, c'est pas une question de vie ou de mort.
07:58 Non, mais d'abord, il y a une différence,
08:00 il y a une gradation, et ça dépend où on le fait.
08:03 Je fais cette comparaison pour expliquer ce qu'est ne pas exclure des options,
08:06 et il y a une raison de ne pas le faire,
08:08 et la position qui consiste à dire simplement ce qu'on fait,
08:12 et nous, nous donner des lignes rouges.
08:14 Quelle est la situation ?
08:16 Depuis dix ans, parce que tout ça a commencé en 2014,
08:20 la Russie a lancé une guerre d'agression contre l'Ukraine.
08:24 Nous avons ensuite tout fait pour rétablir la paix.
08:27 Tout. Les accords de Minsk,
08:29 les négociations qui sont menées sous l'égide de la France et de l'Allemagne,
08:34 avec l'Ukraine et la Russie.
08:36 Ici même, c'est tenu, dans cette salle,
08:39 le seul rendez-vous entre le président Zelensky et le président Poutine,
08:43 le 9 décembre 2019.
08:45 Et la Russie, le régime du Kremlin,
08:49 une fois encore, a décidé de lui-même,
08:51 en février 2022,
08:53 de lancer le deuxième temps de cette offensive,
08:56 une guerre complète contre l'Ukraine,
08:58 et pas simplement le Donbass, parce qu'il ne nous dit pas ses limites.
09:01 Il bombarde Kiev régulièrement, attaque Odessa, etc.
09:05 Nous avons un objectif.
09:07 La Russie ne peut pas et ne doit pas gagner cette guerre.
09:12 Depuis deux ans, nous avons aidé l'Ukraine,
09:14 et si les choses devaient dégénérer,
09:16 ça ne serait une fois encore que la responsabilité de la Russie.
09:21 Et donc nous, si, ça veut dire que nous,
09:24 si nous décidons aujourd'hui d'être faibles,
09:26 si, face à quelqu'un qui n'a pas de limites,
09:29 face à quelqu'un qui a franchi toutes les limites qu'il nous avait données,
09:32 nous lui disons naïvement,
09:34 "Je n'irai pas plus loin que ceci ou que cela."
09:37 À ce moment-là, nous ne décidons pas la paix,
09:40 on décide déjà la défaite.
09:42 - Et vous décidez de le dire, qu'on peut envoyer...
09:44 - Bien sûr. - Et ça, c'est un geste très fort
09:47 de décider de dire qu'on ira peut-être jusque-là.
09:50 - Et je l'assume parce que c'est le rôle du président de la République,
09:53 dans nos institutions.
09:54 Le président de la République est en charge de la défense nationale.
09:57 Il ne fait pas de commentaire.
09:59 Il décide pour la sécurité des Françaises et des Français.
10:03 Qu'est-ce qui se joue en Ukraine ?
10:05 Une guerre qui est existentielle pour notre Europe et pour la France.
10:09 J'espère qu'on y reviendra parce que c'est un sujet clé.
10:12 Et donc, je décide, parce qu'après deux ans de guerre,
10:16 après d'ailleurs, je veux ici le rappeler,
10:19 que nous ayons systématiquement fait ce que nous disions
10:23 que nous n'allions pas faire.
10:24 Ce qui relativise aussi les propos très définitifs
10:27 tenus parfois par certains à travers l'Europe.
10:29 Il y a deux ans, nous disions "jamais on n'enverra de chars".
10:32 On l'a fait.
10:33 Il y a deux ans, on disait "jamais nous n'enverrons de missiles
10:36 de longue et moyenne portée".
10:38 On l'a fait.
10:39 On disait "jamais on n'enverra d'avions".
10:40 Certains sont en train de le faire.
10:41 Donc, nous avons mis trop de limites, si je puis dire,
10:45 dans notre vocabulaire.
10:47 Nous ne sommes pas dans l'escalade.
10:49 Nous, nous ne sommes pas en guerre contre la Russie.
10:51 Simplement, il faut être clair,
10:53 nous ne devons pas laisser la Russie gagner.
10:55 Mais les Français n'ont pas compris, vous parliez de vocabulaire,
10:58 à quelle condition précise, concrète,
11:00 des soldats, des militaires français iraient se battre en Ukraine.
11:04 Est-ce que c'est parce que l'armée russe
11:06 ferait une percée décisive sur le front ?
11:09 Est-ce que c'est parce qu'une ville clé, Odessa par exemple,
11:12 serait sur le point de tomber ?
11:13 Vous n'avez pas été précis sur ce point-là.
11:15 Mais peut-être que j'ai raison de ne pas être précis.
11:17 Et je vous le redis.
11:18 Mais les deux conditions que je viens d'évoquer
11:19 relèvent de la science-fiction ou ce sont des scénarios possibles,
11:22 à vos yeux ?
11:23 Depuis quelques années, nous vivons tous dans un monde
11:26 où ce qu'on croyait impensable arrive.
11:29 C'est cette fin de l'insouciance que j'évoquais il y a quelques années.
11:34 On y est.
11:35 La guerre est sur le sol européen.
11:39 Il y a, entre Strasbourg et Lviv, moins de 1500 kilomètres.
11:44 Vous imaginez ?
11:46 La guerre est dans ce pays.
11:48 Donc ce n'est pas une fiction et ce n'est pas loin de nous.
11:51 Ce qui s'est passé...
11:52 Donc toutes ces options sont possibles.
11:54 Le seul qui en aura la responsabilité,
11:57 c'est le régime du Kremlin.
11:59 Ce ne sera pas nous.
12:00 Jamais nous ne mènerons d'offensive.
12:02 Jamais nous ne prendrons l'initiative.
12:04 La France est une force de paix.
12:06 Simplement, aujourd'hui, pour avoir la paix en Ukraine,
12:09 il ne faut pas être faible.
12:11 Donc il nous faut lucidement regarder la situation.
12:14 Et il nous faut, avec détermination, volonté, courage,
12:18 dire que nous sommes prêts à mettre les moyens
12:21 pour atteindre notre objectif, qui est que la Russie ne gagne pas.
12:23 Si on est prêt, c'est qu'on se prépare.
12:25 Ça veut dire qu'en ce moment,
12:27 on s'entraîne pour des opérations aériennes.
12:30 Mais la France...
12:32 Au sol.
12:33 La France n'a pas attendu février 2022 pour se préparer.
12:38 Nous avons un modèle d'armée complète,
12:41 une force de dissuasion,
12:42 et des armées opérationnelles.
12:44 Et je veux ici le rappeler,
12:46 pour rendre une fois encore hommage à nos soldats
12:49 et à leur famille,
12:50 nous sommes un des rares pays en Europe
12:54 qui, pendant dix ans, a eu des forces déployées au Sahel
12:57 pour lutter contre le terrorisme.
12:59 Et nous avons perdu là-bas des dizaines d'hommes.
13:01 - Mais avant, ce n'était pas le même type de combat.
13:04 - Mais est-ce que vous pensez que c'était...
13:06 - On combattait les islamistes, qui étaient nos ennemis...
13:09 - Nous combattions des terroristes qui étaient...
13:10 - Domestiques, également.
13:11 - À la demande d'un État...
13:12 Pour éviter qu'un État souverain ne s'effondre,
13:14 et pour protéger nos avant-postes.
13:17 Mais est-ce qu'on pense que c'est plus accessoire ?
13:19 Aujourd'hui, ça ne s'impose pas en Ukraine.
13:21 Mais est-ce qu'on doit tout exclure pour autant ?
13:23 Ce que je veux dire par là, c'est que nous, nous sommes prêts.
13:25 C'est que j'ai décidé, dès mon premier mandat,
13:28 et dès le début, une augmentation du budget de nos armées considérable,
13:33 qui fait que les deux lois de programmation militaire
13:35 que j'aurais eues à décider comme président
13:37 auront conduit à un doublement du budget de nos armées.
13:40 Donc, nous ne nous réveillons pas sur ce sujet.
13:42 Je voudrais juste clarifier un point.
13:44 C'est que ce qui s'est passé ces derniers mois
13:47 est un changement profond.
13:48 Et ce sursaut, que j'ai appelé de mes voeux,
13:50 dès le 16 février, aux côtés du président Zelensky ici,
13:54 et qui m'a conduit à dire cela,
13:56 mais surtout à décider des choses très concrètes avec nos alliés.
13:59 C'est que la contre-offensive ukrainienne
14:01 ne s'est pas passée comme attendue durant ces derniers mois.
14:04 Et c'est que quand vous regardez la situation de ces dernières semaines,
14:07 la situation est difficile sur le terrain pour les Ukrainiens.
14:10 C'est une litotte.
14:11 C'est une litotte.
14:12 Certains experts disent qu'elle est…
14:13 Parce que je ne suis pas défaitiste, mais elle est difficile.
14:15 Ils sont courageux, une fois encore.
14:17 Mais ils ont des limites.
14:18 Ils ont des limites en termes d'hommes,
14:20 parce que la Russie est un plus grand pays.
14:22 Et à partir du moment où il n'y a que les hommes ukrainiens,
14:25 ils ont cette limite et ils en perdent beaucoup.
14:27 Et ils ont une limite en termes d'obus, de missiles,
14:31 puisque à peu près au moment où je vous parle,
14:33 quand la Russie tire 10 obus, on lui répond avec 1.
14:37 Et donc vous voyez que ça met la situation sur le front en grande fragilité.
14:42 Et à côté de ça, vous avez un régime au Kremlin qui s'est profondément durci.
14:47 À quel moment ? Parce que…
14:48 Dans tous ces derniers mois, et je dirais en gradation,
14:51 en multipliant les attaques informationnelles et cyber,
14:55 et y compris dans notre quotidien, sur des hôpitaux, en France et ailleurs en Europe,
14:59 qui a durci en décidant de tuer des opposants politiques.
15:03 Mais ce n'est pas nouveau.
15:04 Vous étiez bien alerté en 2014.
15:06 Mais je ne dis pas que c'est nouveau, je dis que ça s'intensifie.
15:09 Mais l'alarme aurait pu être sonnée plus tôt, c'est ce que je veux dire.
15:12 En 2014, Vladimir Poutine…
15:14 Vous ne pouvez pas tout à la fois me reprocher de la sonner trop tôt
15:17 et d'avoir pu la sonner plus tôt.
15:19 Je crois que, je regarde avec lucidité la situation,
15:22 nous avons d'abord tout fait, au-delà de sonner l'alarme, pour être exigeants.
15:25 Mais des accords avec les présidents Poutine, la lucidité que j'évoque devant vous,
15:30 je la porte dès le mois de juin 2017 à Versailles,
15:35 en lui disant "vous nous attaquez, vous manipulez nos données".
15:38 J'en ai été victime dans ma première campagne.
15:40 Et donc il faut qu'un respect s'établisse et que vous cessiez d'être une force de déstabilisation.
15:45 Je le réitère en 2018, en 2019.
15:47 Mais dans ce temps-là, nous voulions éviter la guerre.
15:50 Puis il y a eu le temps où on a aidé l'Ukraine à résister.
15:53 Mais là, le contexte sur le terrain ukrainien change.
15:56 La situation est beaucoup plus difficile pour eux.
15:59 La Russie durcit chez elle et elle multiplie les attaques.
16:02 Et donc, oui, je vous le dis avec la plus grande solennité,
16:05 ce début d'année 2024 doit être pour nous celui du sursaut.
16:09 Donc si on envoie des militaires là-bas, pardon de rester dans ce scénario sombre,
16:13 c'est des fantasains, c'est des conseillers, c'est des aviateurs ?
16:16 Je ne rentrerai pas, je ne vais pas faire de la politique future.
16:18 D'accord, donc on en aura peut-être, mais on n'en parle pas.
16:21 Mais d'abord, je ne le souhaite pas.
16:23 Je souhaite que la Russie cesse cette guerre,
16:26 se retire des positions qui sont les siennes et permette la paix.
16:29 Mais vous n'y croyez plus.
16:31 Mais ce qui est important ici, d'abord, un, ça n'est pas mon souhait.
16:34 Mais deux, je ne vais pas donner de la visibilité à quelqu'un qui ne m'en donne pas.
16:37 C'est au président Poutine qu'il faut poser cette question.
16:40 Allez lui demander où sont ses lignes rouges.
16:42 Votre ministre des armées, lui, il a donné une certaine visibilité.
16:44 Mais non, non, on ne voit pas d'hommes là-bas.
16:46 Ce sera peut-être des démineurs.
16:48 Ce n'est pas ce à quoi on s'attendait.
16:50 Parce qu'il a fait le distinguo entre ce qui était décidé et ce que nous mettons en place.
16:53 Et ce qu'il ne faut pas exclure parce que nous nous adapterons.
16:56 Nous avons décidé, le 26 février dernier à Paris,
17:00 d'aller plus loin dans l'aide à l'Ukraine.
17:03 De mettre en place une coalition pour leur fournir des missiles ou des bombes
17:06 qui leur permettent de toucher, leur seule, jamais la Russie.
17:09 Mais d'atteindre derrière les positions russes aujourd'hui.
17:13 Nous avons décidé aussi d'accélérer,
17:16 pour aller chercher des munitions partout où elles sont disponibles.
17:19 C'est ce qu'ensuite je suis allé faire à Prague quelques jours plus tard.
17:21 Et nous avons décidé de mener 5 actions communes.
17:24 Et là on était tous d'accord autour de cette table.
17:27 Européens, Américains, Canadiens, Britanniques.
17:29 Pour dire on va ensemble faire du déminage,
17:32 produire et réparer du matériel,
17:36 déployer des forces civiles à la frontière avec la Biélorussie,
17:41 protéger la frontière avec la Moldavie, là aussi avec des forces civiles,
17:45 et avoir des actions défensives en cyber sur le sol ukrainien.
17:50 En revanche, ils n'ont pas du tout décidé d'envoyer des troupes.
17:52 Et vous l'ont fait savoir dès que vous avez prononcé cette phrase.
17:55 On peut systématiquement revenir là-dessus.
17:58 Parce que c'est un peu le sujet qui préoccupe les Français.
18:02 Ils ont tout à fait raison, mais je dis aujourd'hui on a décidé ça,
18:05 et ça c'est un changement.
18:06 On l'a décidé à Paris, c'est le début de ce sursaut.
18:09 Ensuite, je vous le dis, nous ferons ce qui est nécessaire pour atteindre notre objectif.
18:13 Parce que si la Russie venait à gagner, la vie des Français changerait.
18:20 De quelle manière ?
18:22 Nous n'aurons plus de sécurité en Europe.
18:24 Qui peut penser une seule seconde que le président Poutine,
18:29 qui n'a respecté aucune de ses limites et aucun de ses engagements, s'arrêterait là ?
18:34 Donc ce qui se passe en Ukraine aujourd'hui,
18:36 c'est qu'il y a un problème également des intérêts vitaux de la France.
18:39 Il y a un danger d'existence pour la France.
18:41 La sécurité de l'Europe et la sécurité des Français se jouent là-bas.
18:47 Et ce sont nos intérêts vitaux.
18:48 Vous employez là un terme qui a des connotations particulières,
18:51 je vous dis la sécurité.
18:53 Mais vous-même vous avez utilisé "menace existentielle".
18:56 Mais où ?
18:57 Existentielle, ça veut dire que c'est notre résistance qui est en cause.
19:00 Je le dis et je l'assume.
19:02 Nous avons déjà subi les conséquences de cette guerre dans notre quotidien.
19:05 On a déjà subi ces attaques.
19:06 On a déjà, dans plusieurs de nos hôpitaux,
19:08 subi des jours et des jours de dysfonctionnement à cause de cette agressivité russe.
19:12 Nous avons subi les conséquences en Europe.
19:15 Le prix du gaz, la situation de notre économie, le coût des céréales,
19:21 les dérèglements économiques qui s'en sont suivis sont la conséquence de cette guerre qu'a lancée la Russie.
19:26 Et si la Russie gagne cette guerre, la crédibilité de l'Europe sera réduite à zéro.
19:34 Quelle serait la crédibilité sur notre sol d'une puissance, l'Union Européenne,
19:39 de ces membres qui auraient laissé faire cela ?
19:41 La sécurité des Européens, quelle serait-il ?
19:44 Est-ce que vous pensez que les Polonais, les Lituaniens, les Estoniens, les Lettons,
19:48 les Roumains, les Bulgares pourraient une seconde rester en paix ?
19:52 Et je ne parle même pas de la Moldavie qui certes n'est pas dans l'Union Européenne aujourd'hui,
19:55 mais qui à la seconde serait menacée.
19:58 Donc vous dites en creux, Poutine ne s'arrêtera pas là.
20:01 S'il gagne cette guerre, il poursuivra ailleurs, il trouvera d'autres proies.
20:04 C'est ce que vous dites ?
20:05 Mais par notre passé, nous avons déjà connu des régimes qui tuaient les opposants chez eux,
20:11 avaient des dérives autoritaires et avaient la volonté de conquérir tout ce qu'on les laissait conquérir.
20:16 Donc Poutine ne s'arrêterait pas là s'il gagnait cette guerre.
20:19 Et je crois que ce que je dis là est un consensus complet.
20:22 Du président Biden au chancelier allemand, tous les dirigeants de l'Europe.
20:26 Donc seule la force, notre force, français, européen, l'OTAN, je ne sais pas, peut l'arrêter, peut le stopper.
20:32 Il faut stopper en Ukraine.
20:34 Aujourd'hui, il faut avoir, pour reprendre une vieille formule de Churchill, le nerf de la paix.
20:40 Vouloir la paix, ce n'est pas choisir la défaite.
20:44 Vouloir la paix aujourd'hui, ce n'est pas laisser tomber l'Ukraine.
20:47 C'est faire la guerre ?
20:48 Vouloir la paix, non, c'est d'être crédible, d'être fort et prêt pour nous adapter aux choix que la Russie ferait.
20:56 Et donc si la guerre venait à s'étendre, si la guerre venait à s'étendre en Europe,
21:03 ce serait le seul choix et la seule responsabilité de la Russie.
21:07 Mais décider, nous aujourd'hui, d'être faibles, décider, nous aujourd'hui, que nous n'y répondrions pas, c'est déjà être dans la défaite.
21:17 Pourquoi vos homologues ne le disent pas ?
21:19 Et ça, je ne le veux pas.
21:20 Mais contrairement à ce que vous voulez croire, beaucoup de mes homologues m'ont suivi.
21:23 J'étais quelques jours après à Prague, à côté de moi, le président tchèque a dit exactement la même chose.
21:32 Vous aviez ici même, il y a quelques jours, le président lituanien, il a dit lui-même,
21:37 toutes les options doivent être ouvertes, il a même obtenu un mandat de son parlement pour envoyer des trucs.
21:41 Ça veut dire que vous les avez convaincus ? Vous êtes en train d'emmener avec vous les Etats ?
21:45 Mais comme on l'a fait à chaque fois. En février 2022, pardon, en mars 2022, à Versailles, nous avons décidé un agenda stratégique.
21:55 L'agenda pour l'autonomie stratégique de l'Europe. On l'appelle encore l'agenda de Versailles.
21:59 Il vaut encore et nous avons été aux avant-gardes.
22:03 On a eu le débat sur la possibilité de reconnaître la candidature de l'Ukraine pour rentrer dans l'Union européenne.
22:11 Il n'y avait pas grand monde. Deux mois après, j'allais en train à Kiev avec le chancelier Scholz, le président du conseil Draghi,
22:19 le président de Roumanie et nous disions à tous les trois avec le président Zelensky que nous étions pour.
22:26 Et nous décidions dans le conseil suivant que ce serait le cas. Les choses bougent.
22:29 Il faut simplement les mettre en mouvement par lucidité et parce que c'est ma responsabilité.
22:36 Et ce que je veux vous faire toucher du doigt, c'est que ma responsabilité, c'est la sécurité des Français et la défense nationale.
22:43 Et notre sécurité se joue aussi en Ukraine aujourd'hui.
22:47 À ce propos, est-ce qu'aujourd'hui, mars 2024, le régime russe, le régime de Vladimir Poutine, est-il l'ennemi de la France ?
22:55 Il est l'adversaire.
22:56 Quelle est la nuance sémantique entre adversaire et ennemi ?
22:59 Nous ne faisons pas la guerre à la Russie.
23:01 Mais elle nous fait la guerre.
23:02 Vous voulez qu'elle soit ?
23:03 Elle nous attaque sur le plan cyber.
23:04 Oui, c'est une forme de guerre.
23:06 Des agents russes stipendiés par la Russie qui étaient moldaves ont tagué des enfants de David à Paris.
23:12 Vous avez raison de dire tout cela, qui est une forme hybride.
23:15 Mais il faut faire attention de ne pas tout de suite les qualifier parce que sinon on serait nous-mêmes dans l'escalade.
23:19 Alors que faudrait-il pour que vous prononciez le mot "ennemi" ?
23:22 Qu'est-ce qu'il faudrait que la Russie fasse, commette ?
23:24 Mais si la Russie décidait à nouveau une escalade qui nous entraînerait tous dans un conflit.
23:28 Je souhaite de toutes mes forces qu'il n'en soit pas le cas.
23:30 Mais à coup sûr aujourd'hui la Russie est un adversaire.
23:33 Le régime du Kremlin est un adversaire.
23:35 Mais je l'ai toujours dit, nous, nous ne faisons pas la guerre à la Russie et au peuple russe.
23:39 Et nous soutenons l'Ukraine, nous faisons tout pour qu'elle puisse mettre la Russie en échec.
23:45 Parce que, je vais vous dire très simplement, il n'y a pas de paix durable
23:51 s'il n'y a pas une souveraineté et un retour aux frontières internationalement reconnues de l'Ukraine.
23:58 Y compris la Crimée ?
24:00 Mais ce sera aux Ukrainiens de le décider, c'est à eux de le négocier.
24:03 C'est un peu leur pays quand même.
24:04 Oui, et vous avez raison de le dire, c'est à eux, c'est leur pays.
24:06 C'est des frontières internationalement reconnues d'Ukraine.
24:08 Mais ce que je veux dire c'est qu'il n'y aura pas de sécurité et de paix durable
24:11 si elle n'est pas le fruit d'une négociation qui sera menée par les Ukrainiens.
24:14 Mais il n'y aura pas de sécurité pour les Français s'il n'y a pas la paix là-bas.
24:19 Vous dites que ce n'est pas notre ennemi ?
24:21 Et la paix, je veux juste dire, la paix ce n'est pas la capitulation de l'Ukraine.
24:26 Ni l'amputation de l'Ukraine ?
24:29 Parce que tout ça, c'est déjà choisir que nous sommes faibles.
24:32 Donc, il y a une grande cohérence dans la position de la France depuis le début.
24:37 Simplement, il y a une escalade de la part de la Russie.
24:41 Et à cette escalade, nous devons dire que nous sommes prêts à répondre.
24:43 Est-ce que la Russie serait capable de vous cibler ?
24:45 Vous avez annulé une visite en Ukraine récemment, pour des raisons de sécurité ?
24:50 Pas du tout.
24:51 C'est ce qu'a dit la Russie, il ne faut pas les croire.
24:54 Vous savez, c'est intéressant parce que le débat public est imprégné par les fausses informations russes.
25:00 Ils ont fait croire cette affaire, beaucoup de gens maintenant sont persuadés.
25:03 Le sujet des troupes au sol arrive dans le débat collectif, c'est un de vos confrères qui me pose la question.
25:08 Parce que le Premier ministre slovak, très proche de la Russie,
25:11 dit que le projet secret que nous avons c'est d'envoyer des troupes au sol.
25:14 Et nous, à chaque fois, on réagit, on ferme des portes, on se calfeutre.
25:17 Non !
25:18 Donc, j'ai décalé le voyage que j'avais fait. Pourquoi ?
25:22 Parce que le président Zelensky venait en Europe pour la conférence de sécurité à Munich.
25:26 Et donc, je lui ai proposé de venir signer l'accord bilatéral ici.
25:30 Et ensuite, je lui ai dit, fort de la très longue discussion que nous avons eue,
25:33 et du constat lucide que je fais et que je viens de vous exposer,
25:36 je lui ai dit au fond, mon utilité, plutôt que d'être à vos côtés, à Kiev,
25:42 est de mettre en œuvre ce sursaut, de convaincre les Européens et nos alliés d'aller plus loin,
25:48 ce qu'on a fait ici le 26 avec ces nouvelles initiatives qui ont été prises,
25:51 et d'essayer d'aller plus loin et, justement, de faire réaliser à tout le monde que les choses changent,
25:56 et qu'elles changent vite, et qu'elles ne changent pas dans le bon sens.
25:59 Et c'est ce que j'irai porter d'ailleurs dès demain à Berlin,
26:02 où je verrai le chancelier Scholz et le Premier ministre polonais.
26:05 Toutes les semaines, ou presque, le président russe Vladimir Poutine
26:08 brandit de manière assez claire, assez menaçante, la menace nucléaire.
26:12 La France est le seul pays membre de l'Union européenne à être doté de l'armée nucléaire.
26:16 Est-ce que vous vous sentez, est-ce que nous devons nous sentir particulièrement visés ?
26:20 Nous devons nous sentir d'abord particulièrement protégés,
26:24 parce que nous sommes justement cette puissance dotée.
26:27 Sauf qu'il mentionne beaucoup la France, plus la France que d'autres pays.
26:30 Et que c'est le sens même du choix qui a été fait par le général de Gaulle
26:35 dès après la Deuxième Guerre mondiale.
26:37 Ensuite, nous sommes prêts, nous avons une doctrine qui est établie,
26:41 et en matière de nucléaire, il faut peu de mots.
26:45 Et le nucléaire n'est pas un instrument de déstabilisation ou de menace.
26:50 C'est un instrument de sécurité.
26:52 Et le fait d'avoir la bombe comme la Russie, nous installe dans un face-à-face particulier,
26:56 donne une responsabilité supérieure ou un poids supérieur selon vous à la France ?
27:01 Notre capacité nucléaire donne d'abord une sécurité aux Françaises et aux Français,
27:06 qu'ont peu de pays dans le monde.
27:08 Ça nous donne une responsabilité, celle d'être une puissance dotée de cette arme,
27:13 et donc de ne jamais être dans l'escalade, ni verbal, ni évidemment de faite.
27:19 Mais pourtant il brandit la menace.
27:20 Je pense que ça n'est pas...
27:21 Et il reprend vos termes sur les lignes rouges.
27:23 Ce n'est pas approprié quand on a justement l'arme nucléaire.
27:27 Vous ne parlez plus à Poutine depuis combien de temps ?
27:30 Depuis plusieurs mois.
27:32 Est-ce que ce n'est pas un handicap de ne plus lui parler ?
27:34 Écoutez, je lui ai parlé à chaque fois que c'était nécessaire.
27:38 Je lui ai parlé évidemment des centaines d'heures avant février 2022,
27:43 longuement entre février et avril 2022,
27:46 pour essayer d'arrêter cette guerre et de négocier la paix.
27:49 Mais à partir du moment où lui-même n'a plus respecté aucun cadre,
27:53 c'est-à-dire que, contrairement à ce qu'il disait,
27:55 il ne faisait pas une opération spéciale que nous condamnions déjà,
27:57 et qu'il n'avait aucun cadre juridique, aucune légitimité, aucune légalité,
28:01 mais qu'il attaquait Kiev, qui menait des crimes de guerre dans le nord du pays,
28:05 la discussion n'avait plus de sens.
28:07 - Vous avez prolongé quand même jusqu'au mois de septembre.
28:09 - J'ai ensuite eu des discussions ponctuelles sur la question nucléaire,
28:13 parce que nous avons pris l'initiative, à cause de la centrale de Zaporizhia,
28:17 qui était proche de la ligne de front,
28:19 en lien avec l'Agence internationale de l'énergie atomique,
28:22 de tout faire pour protéger cette centrale.
28:24 Et donc j'ai eu les échanges à ce moment-là.
28:27 Mais les discussions, je suis tout à fait prêt à les mener, à tout moment.
28:33 Mais encore faut-il qu'on ait face à nous quelqu'un qui dit la vérité,
28:36 et dont l'intention est de faire la paix, et ce n'est pas le cas aujourd'hui.
28:39 - Et selon vous, Vladimir Poutine, c'est un patriote russe, c'est un autocrate,
28:45 c'est un dictateur, tout ce que vous dites depuis deux minutes,
28:48 c'est-à-dire les crimes qu'il commet contre des civils,
28:50 on regarde dans un dictionnaire, on se dit que seul un dictateur peut commettre ça.
28:55 - Je ne suis pas un commentateur, c'est le président de la Fédération de Russie
28:59 qui aujourd'hui est pris dans une dérive répressive et autoritaire dans son pays,
29:07 et qui a fait le choix ces dernières années, de manière accrue ces derniers mois,
29:12 d'être une puissance de déstabilisation.
29:15 En Europe, en lançant une guerre dont il a la seule responsabilité,
29:19 et en menaçant la sécurité de tous, mais dans beaucoup d'autres théâtres d'opération,
29:23 du Proche et Moyen-Orient au Caucase, en allant jusqu'à l'Afrique,
29:26 où la Russie est une puissance qui déstabilise.
29:29 - Vous ne lui parlez plus donc, ce ne sera pas vous qui négocierez la paix avec lui ?
29:33 Qui pourra le faire ? Est-ce que ce sera les Etats-Unis ?
29:36 - Il y a un ordre des temps.
29:38 Je suis sans doute le dirigeant en responsabilité qui lui est le plus parlé.
29:41 - Oui, mais à présent, on peut dire qu'il y a un certain froid entre vous.
29:45 - Mais ce n'est pas un froid, les choses ne sont pas personnelles.
29:47 Et d'ailleurs, je ne veux pas essayer de les personnaliser, ça n'a aucun sens.
29:50 Nous ne sommes pas dans une fiction, ça n'est pas un roman ou une série.
29:54 - Trump lui parle, par exemple.
29:56 - On parle de la vie et de la mort.
29:58 Aussi loin que je suis informé, je n'ai pas le sentiment que Donald Trump
30:02 soit président des Etats-Unis d'Amérique.
30:04 - Il y a un risque.
30:05 - Aujourd'hui, il est clair, il n'y a pas un risque, il y a la guerre.
30:08 Au moment où on se parle, il y a des femmes et des hommes qui meurent en Ukraine
30:11 par la responsabilité du président Poutine.
30:13 Et ce que je vous dis, c'est que si l'Ukraine tombe,
30:15 c'est notre sécurité qui est menacée.
30:17 Nous, nous sommes dans un temps aujourd'hui qui est de résister.
30:21 Et nous sommes dans un temps, et c'est celui que j'assume,
30:23 qui consiste à dire, si la Russie continuait son escalade,
30:26 si la situation devait se dégrader, nous devons être prêts,
30:29 et nous serons prêts, et nous serons prêts,
30:32 et nous serons prêts à prendre les décisions qui s'imposent
30:36 pour que la Russie ne gagne jamais.
30:39 - Raison pour laquelle, vous avez dit début janvier,
30:41 la France est en économie de guerre.
30:43 - Et viendra, et viendra, je l'espère, le plus tôt possible,
30:46 le moment où nous aurons à reparler avec le président
30:50 de la Fédération de Russie, quel qu'il soit,
30:52 au moment où cela s'imposera.
30:54 - Et la France est en économie de guerre, disiez-vous,
30:56 au début de l'année. Vous parliez des obus tout à l'heure.
30:58 Regardez les chiffres avec Anne-Sophie.
31:00 À l'heure où on parle, la France produit moins de 100 obus par jour,
31:04 sauf erreur de notre part.
31:06 C'est ce que des soldats ukrainiens utilisent en quelques minutes.
31:11 C'est, pardon, c'est très modeste,
31:13 c'est le maximum que nous puissions faire.
31:15 - C'est très modeste et c'est assez normal
31:17 pour ce qui est de ces catégories,
31:19 parce que nous n'avons pas une industrie de défense
31:22 qui est adaptée à une guerre de haute intensité territoriale
31:26 qui n'est dans aucun de nos pronostics
31:28 et que nous ne nous apprêtions pas à mener pour nous-mêmes.
31:30 - Le sera-t-elle un jour ?
31:32 - Et donc, plusieurs choses.
31:34 D'abord, dès février 2022, j'ai indiqué,
31:38 j'ai déclaré à tous les industriels
31:40 que nous passions en économie de guerre.
31:42 Nous aurions demandé des efforts,
31:44 produire davantage et produire plus vite.
31:46 C'est le chantier que j'ai confié aux ministres des armées
31:48 dès ce moment-là.
31:50 Nous avons, sur plusieurs segments qui étaient essentiels
31:52 pour les Ukrainiens, fait le travail.
31:54 Les canons César, qui sont déterminants
31:56 pour la défense de l'Ukraine,
31:58 nous avons multiplié leur production.
32:02 Et là où nous avons livré quelques dizaines
32:04 depuis le début du conflit, cette année,
32:06 parce que nous avons multiplié les lignes,
32:08 multiplié les cadences,
32:10 nous allons produire près de 75 canons César
32:12 et ils iront tous sur le front ukrainien.
32:14 C'est beaucoup plus qu'on en a livré depuis le début.
32:16 Nous avons multiplié par plus de trois nos productions,
32:18 des catégories d'obus et de missiles
32:20 qui sont pertinents pour les Ukrainiens.
32:22 Simplement, en effet, on a des limites.
32:24 Et c'est vrai de tous les pays européens.
32:26 Et donc, qu'est-ce qu'on fait face à ça ?
32:28 On accroît nos capacités et nos cadences,
32:30 mais surtout, ça met du temps à faire,
32:32 parce qu'il faut créer de nouvelles lignes,
32:34 de nouvelles structures de production.
32:36 C'est pourquoi on a décidé qu'on allait les créer en Ukraine,
32:38 parce que c'est plus proche du terrain,
32:40 parce que ça peut aller beaucoup plus vite.
32:42 C'est ce qui a été décidé ici, avec l'ensemble des partenaires.
32:44 Et c'est ce qu'on va faire, d'ailleurs,
32:46 main dans la main avec l'Allemagne.
32:48 - C'est le plus exposé aussi au bombardement.
32:50 - Oui, mais ça a été acté.
32:52 Vous soulignez là une forme peut-être de contradiction
32:54 qu'il y a chez certains de mes partenaires
32:56 qui sont prêts à les produire sur le sol ukrainien,
32:58 mais pas prêts à prendre certains engagements pour la suite.
33:00 Bon, mais ça viendra.
33:02 - On pourrait être là, des ingénieurs français
33:04 en vocation à construire des usines en Ukraine.
33:06 - Oui, mais on va faire en sorte que les gens qui sont prêts
33:08 à les produire sur le sol ukrainien,
33:10 ils puissent aller en Ukraine,
33:12 et on va faire en sorte que les gens qui sont prêts
33:14 à les produire sur le sol ukrainien,
33:16 ils puissent aller en Ukraine,
33:18 et on va faire en sorte que les gens qui sont prêts
33:20 à les produire sur le sol ukrainien,
33:22 ils puissent aller en Ukraine,
33:24 et on va faire en sorte que les gens qui sont prêts
33:26 à les produire sur le sol ukrainien,
33:28 ils puissent aller en Ukraine,
33:30 et on va faire en sorte que les gens qui sont prêts
33:32 à les produire sur le sol ukrainien,
33:34 ils puissent aller en Ukraine,
33:36 et à côté de ça, nous mettons l'industrie européenne
33:38 de défense en capacité
33:40 de produire beaucoup plus dans la durée.
33:42 - Et comment vous financez ?
33:44 Parce qu'on a des petits problèmes de budget en ce moment,
33:46 on l'a vu, on refait beaucoup d'économies, des milliards,
33:48 comment on finance tout cet effort de guerre, finalement ?
33:50 - Mais d'abord, je vais être très franc
33:52 avec nos compatriotes et avec vous.
33:54 On ne peut pas dire "tous" depuis deux ans,
33:56 et nous le disons,
33:58 tous les dirigeants européens le disent,
34:00 tous, il n'y a pas une exception.
34:02 C'est une guerre, on y joue notre avenir,
34:04 cette guerre est existentielle,
34:06 et dire "on va continuer de vivre" comme si de rien n'était.
34:08 - Non, je vous demande juste les moyens déployés pour ça.
34:10 - Non, mais donc, ça, c'est pas possible.
34:12 Donc nous, comme je vous le dis, déjà, on a anticipé,
34:14 puisqu'on a une loi de programmation militaire
34:16 qui vient après l'autre,
34:18 on a doublé notre budget des armées.
34:20 À ça s'ajoutent des choix budgétaires
34:22 qu'on a faits depuis 2022,
34:24 en plus de cela, on finance l'aide à l'Ukraine.
34:26 - Et pour conclure, ces usines en Ukraine ?
34:28 - Nous avons déjà financé 4,8 milliards d'euros à peu près,
34:30 et on va aller jusqu'à 3 milliards d'euros cette année.
34:32 Et ensuite, c'est notre engagement européen.
34:34 C'est pour ça qu'on a, là, lancé une facilité européenne de paix,
34:36 et on l'actera la semaine prochaine en Conseil européen,
34:38 et elle prévoit de donner, justement, des contrats
34:40 à nos industriels de défense pour produire sur notre sol,
34:42 pour produire entre Européens davantage d'armement
34:44 pour nous, pour notre flanc oriental et pour l'Ukraine,
34:46 et nous allons utiliser cet argent,
34:48 nous allons utiliser cet argent
34:50 pour faire des armements
34:52 pour les pays de l'Ouest,
34:54 pour les pays de l'Est,
34:56 pour les pays de l'Ouest,
34:58 nous allons utiliser cet argent,
35:00 nous allons aussi utiliser l'argent qu'on a
35:02 dans le programme d'investissement pour aller
35:04 produire en Ukraine avec les Ukrainiens.
35:06 Et donc, c'est l'Europe qui aussi se mobilise
35:08 aux côtés de notre investissement national.
35:10 Et en plus de ça,
35:12 il ne faut pas exclure, là aussi,
35:14 que, comme sur le plan opérationnel,
35:16 il ne faut pas exclure que nous ayons
35:18 à prendre des décisions supplémentaires
35:20 en européen,
35:22 - C'est-à-dire ? - Et c'est-à-dire décider
35:24 de financer de nouvelles initiatives.
35:26 - Et pour ? - Moi, je ne l'exclus pas.
35:28 Et je pense que ce que nous avons su faire pendant la période
35:30 du Covid, qui était de dire
35:32 "Nous sommes face à un choc,
35:34 à cette pandémie, on est tous touchés,
35:36 et on doit, en quelque sorte, aller lever
35:38 de l'argent en commun sur les marchés en mettant notre
35:40 signature à chacun sur la table",
35:42 c'est ce qui nous a permis de tenir.
35:44 Et c'est ce qui nous a permis de relancer.
35:46 Moi, je pense que si les besoins devaient être plus importants,
35:48 c'est d'ailleurs une proposition qui a été faite par la
35:50 première ministre d'Estonie, c'est pas une proposition française,
35:52 mais j'y souscris.
35:54 Et donc, je pense que ce que je veux
35:56 vous faire toucher du doigt,
35:58 depuis le début de notre conversation,
36:00 et au fond depuis une dizaine de jours,
36:02 et ce que je veux que nos compatriotes comprennent,
36:04 il n'y a qu'un responsable
36:06 de la situation dans laquelle nous sommes.
36:08 C'est le régime du Kremlin.
36:10 Mais nous, nous avons une responsabilité.
36:12 Et je vous le dis en conscience
36:14 comme président de la République.
36:16 - Et vous voulez convaincre les Français ?
36:18 - Je vous le dis en conscience. - C'est pas facile en ce moment ?
36:20 - Mais ce ne sera jamais facile. - Non, mais vous avez vu les sondages,
36:22 les chutes du soutien
36:24 à cette guerre en Ukraine. - Mais, vous savez,
36:26 on l'a connu dans d'autres temps de notre histoire,
36:28 c'est toujours beaucoup plus facile
36:30 d'aller chanter des comptines aux gens.
36:32 Je pourrais vous dire ce soir,
36:34 parce que ça n'est pas populaire,
36:36 vous savez, c'est loin, nous,
36:38 on est pour la paix.
36:40 Les gens qui disent ça aujourd'hui,
36:42 les mêmes qui ne veulent pas d'ailleurs soutenir l'Ukraine,
36:44 ils ne font pas le choix de la paix.
36:46 - Vous parlez de qui ? - Ils font le choix de la défaite.
36:48 - Il y a quelques jours. - Ils font le choix
36:50 de l'abandon de souveraineté, parce qu'ils font le choix
36:52 dès maintenant de dire "nous, nous avons des limites".
36:54 Et donc,
36:56 à celui qui jusqu'à présent n'en a pas eu,
36:58 a pris toutes les responsabilités d'agression,
37:00 nous vous laisserons progresser, car nous avons peur.
37:02 - Vous parlez de qui ? - Mais de ceux en Europe
37:04 qui sont sur ce registre,
37:06 et de ceux qui, en France,
37:08 très clairement, décident
37:10 de ne pas soutenir l'Ukraine. - Monsieur le Président,
37:12 il y a quelques jours,
37:14 Sénat, Assemblée nationale ont dû se prononcer
37:16 par vote, sur un traité,
37:18 sur un accord de sécurité que vous avez signé
37:20 avec le Président ukrainien.
37:22 Plusieurs partis politiques se sont abstenus,
37:24 ont voté contre. Rassemblement national s'est abstenu,
37:26 le parti communiste, la France insoumise
37:28 ont voté contre. Qu'est-ce que vous pensez
37:30 de leur position ? Ce sont des pacifistes,
37:32 c'est leur droit le plus strict. - Bien sûr.
37:34 - Ce sont des instruments du Kremlin,
37:36 ce sont des idiots utiles, comme on aurait pu le dire
37:38 il y a quelques décennies. - Mais, d'abord, je n'aurais jamais...
37:40 Vous savez, j'ai constamment cherché
37:42 à tenir l'unité du pays,
37:44 depuis le début. Les rencontres
37:46 de Saint-Denis que j'ai menées, je l'ai encore
37:48 fait en voyant tous les chefs de parti et les présidents
37:50 des assemblées institutionnelles
37:52 il y a quelques jours.
37:54 Et après, c'est la liberté,
37:56 c'est le pluralisme politique, donc il faut être respectueux
37:58 de cela. Mais,
38:00 j'ai un désaccord très profond.
38:02 C'est que, je pense qu'aujourd'hui,
38:04 en conscience, choisir
38:06 de s'abstenir ou de voter contre
38:08 un soutien à l'Ukraine,
38:10 ce n'est pas choisir la paix,
38:12 c'est choisir la défaite.
38:14 Et c'est très différent.
38:16 - Et quand ils vous reprochent
38:18 d'instrumentaliser le conflit en Ukraine,
38:20 au service de la politique intérieure ?
38:22 - On a déjà eu ce débat,
38:24 parce que la dernière élection présidentielle
38:26 s'est tenue quelques mois après le lancement
38:28 du conflit de février 2022.
38:30 Écoutez, ça n'est pas sérieux.
38:32 C'est tout ce que je peux vous dire.
38:34 Parce que la responsabilité
38:36 de cette guerre,
38:38 la responsabilité des coups de boutoir
38:40 qui sont donnés au front ukrainien,
38:42 elle n'est que celle de la Russie.
38:44 Notre responsabilité,
38:46 c'est d'être fort pour la paix.
38:48 Notre responsabilité, c'est justement
38:50 de tenir cette unité européenne.
38:52 Et à chaque fois, nous avons obtenu l'unité européenne.
38:54 Depuis le début, nous étions sous présidence française.
38:56 Et nous l'obtiendrons, vous verrez.
38:58 C'est tenir notre unité, mais c'est d'être fort.
39:00 C'est d'être fort pour dissuader.
39:02 C'est d'être fort pour résister.
39:04 C'est d'être fort pour notre sécurité.
39:06 - Monsieur le Président, cet entretien est consacré
39:08 à la guerre en Ukraine. Nous ne pouvons pas
39:10 ne pas aborder une autre guerre.
39:12 Elle se déroule à Gaza.
39:14 Elle a fait sans doute 30 000 morts.
39:16 Les circonstances sur place sont atroces.
39:18 Vous avez toujours dit, depuis les attentats
39:20 terroristes du 7 octobre en Israël,
39:22 que vous étiez derrière Israël et qu'Israël
39:24 avait le droit le plus absolu de se défendre.
39:26 Israël a-t-il le droit de se défendre
39:28 jusqu'à la vengeance ?
39:30 Est-ce que vous pensez de l'action
39:32 de l'armée israélienne aujourd'hui dans la bande de Gaza ?
39:34 - Les mots étant importants,
39:36 je n'ai jamais dit qu'Israël avait un droit absolu.
39:38 - Le droit de se défendre,
39:40 c'est ce que vous aviez dit.
39:42 - Oui, c'est exact.
39:44 Mais "absolu" a une signification.
39:46 Et je n'ai jamais dit le mot "absolu".
39:48 La France a une position constante
39:50 depuis le début. Et d'ailleurs,
39:52 là aussi, nous étions peut-être seuls
39:54 à un moment donné en octobre dernier.
39:56 Nous avons été rejoints.
39:58 La première chose, nous avons condamné de manière implacable
40:00 l'attentat terroriste massif
40:02 lancé par le Hamas
40:04 contre Israël et sa population.
40:06 - Vous avez aussi après appelé
40:08 à créer une coalition contre le Hamas.
40:10 Ça n'a pas tellement pris, pour le coup.
40:12 - Vous m'excuserez, mais nous sommes tous en train de dissoudre
40:14 des associations qui financent.
40:16 - La coalition internationale contre le Hamas.
40:18 - C'est de dire
40:20 "Lutter contre le Hamas n'est pas que votre histoire.
40:22 Vous, responsable israélien,
40:24 c'est aussi la nôtre.
40:26 Et donc, nous devons agir.
40:28 Qu'est-ce qu'on est en train de faire aujourd'hui avec plusieurs partenaires ?
40:30 On coupe les financements partout où ils existent.
40:32 Nous avons dissous des associations.
40:34 On le fait, je vous rassure.
40:36 - Les autres pays n'avaient pas trop compris au départ
40:38 la volonté des extrémiers.
40:40 - La meilleure façon, vous savez, de ne pas
40:42 gêner les autres, c'est de ne rien dire.
40:44 Ou de dire simplement ce que la masse
40:46 veut répandre.
40:48 La position de la France, ça n'a jamais été à travers
40:50 notre histoire. Nous, nous avons une position,
40:52 si vous me permettez de l'exprimer,
40:54 simple.
40:56 Premièrement, condamnation implacable, claire,
40:58 de l'attentat. Ensuite, on a dit
41:00 "La sécurité d'Israël n'est pas que votre affaire."
41:02 Vous ne pouvez pas mener
41:04 votre défense dans toutes les conditions.
41:06 Mais nous sommes prêts à coopérer,
41:08 par exemple sur le financement, c'est ce que j'ai dit tout de suite,
41:10 pour lutter contre la masse.
41:12 Deuxièmement, vous êtes une démocratie.
41:14 Vous avez donc une responsabilité, vous devez
41:16 respecter le droit humanitaire,
41:18 le droit de la guerre, le droit international.
41:20 Et c'est pourquoi, dès le mois d'octobre,
41:22 la France a appelé à une trêve.
41:24 C'est pourquoi nous sommes le premier pays
41:26 européen à avoir porté une résolution
41:28 au Conseil de sécurité,
41:30 avec plusieurs pays de la région, Jordanie,
41:32 Emirat Arabe Uni, pour appeler à un
41:34 cessez-le-feu. C'est pourquoi nous avons
41:36 organisé ensuite en octobre, ici, la seule
41:38 conférence humanitaire de soutien
41:40 pour le peuple palestinien et l'Unrwa,
41:42 en appelant officiellement à ce cessez-le-feu.
41:44 Et le troisième volet, c'est une réponse
41:46 politique, car la sécurité
41:48 de toute la région d'Israël,
41:50 du peuple palestinien,
41:52 et de tous les États de la région, c'est qu'il y ait une réponse
41:54 politique, au droit légitime
41:56 des Palestiniens, à avoir un État.
41:58 - Il y a aujourd'hui trois otages français
42:00 détenus par le Hamas depuis plus de 5 mois.
42:02 - Oui. - Sont-ils vivants ?
42:04 Savez-vous où ils sont ?
42:06 Êtes-vous en négociation ? Ou un intermédiaire
42:08 est-il en négociation pour les faire
42:10 libérer ? - Merci d'évoquer ce sujet
42:12 qui est pour nous essentiel.
42:14 Nous nous sommes beaucoup battus avec
42:16 le Qatar et l'Egypte
42:18 en particulier,
42:20 pour obtenir la libération
42:22 de nos otages. - Ils sont vivants ?
42:24 - Qui ont été libérés
42:26 ces derniers mois ? Nous avons encore en effet
42:28 trois otages. Je ne dirai rien
42:30 ce soir et vous le comprendrez.
42:32 Les discussions sont en cours, seules les familles
42:34 sont informées.
42:36 Les discussions sont en cours, nous mettons
42:38 beaucoup d'énergie et je veux remercier les partenaires
42:40 que je citais et j'espère
42:42 vraiment que nous obtiendrons
42:46 ces libérations. C'est pour nous essentiel
42:48 et je souhaite qu'au-delà des otages français, tous les
42:50 otages israéliens et du monde
42:52 entier soient libérés parce que c'est
42:54 une pratique inadmissible
42:56 et des vies
42:58 brisées et confisquées.
43:00 - Merci beaucoup. - En tout cas là-bas aussi,
43:02 nous ferons tout pour la paix et la sécurité pour tous.
43:04 C'est le sens de l'initiative que nous avons
43:06 levée et nous faisons
43:08 tout pour rappeler encore une fois au cessez-le-feu.
43:10 - Merci beaucoup, monsieur le Président, d'avoir répondu
43:12 à nos questions. - Merci à vous.
43:14 - Très bonne soirée à tous.
43:16 - Voilà pour cette
43:18 interview du Président de la République.
43:20 35 minutes, 36 minutes si on veut être précis.
43:22 Et on va
43:24 débriefer ça avec nos informés.
43:26 François Reinhardt de L'Obs,
43:28 Manon Loiseau, la grand reporter spécialiste
43:30 de la Russie et Paul Barcelone du
43:32 service politique de France Info. Peut-être que je me tourne vers vous d'abord.
43:34 On a tous été frappés autour
43:36 de la table sur le choix
43:38 des mots extrêmement
43:40 précis par le Président de la République.
43:42 - Il a fait très attention évidemment
43:44 Emmanuel Macron ce soir
43:46 et le début de l'interview est frappant
43:48 puisque d'emblée il a été interrogé,
43:50 Emmanuel Macron, sur sa petite
43:52 phrase qui avait semé le trouble y compris
43:54 jusqu'aux plus grandes capitales européennes
43:56 ces dernières semaines. "Rien ne doit être exclu,
43:58 pas même l'envoi de troupes au sol."
44:00 Il s'est clarifié
44:02 en quelque sorte ce soir en assumant
44:04 et en disant ce qu'a donné un début d'interview
44:06 un peu scabreux d'ailleurs, presque surprenant,
44:08 en a levé un sourcil. "C'est pas
44:10 parce que je n'exclus pas que je vais forcément faire."
44:12 Ça a été un petit peu sa ligne de défense.
44:14 - Quand on vous dit "scabreux", c'est qu'il a
44:16 renvoyé la question. Est-ce que vous êtes debout ?
44:18 Est-ce que vous excluez de vous relever ?
44:20 - Exactement. Ce qui était une manière
44:22 là aussi d'agir
44:24 peut-être un peu par surprise mais en tout cas de vouloir
44:26 clarifier les choses et c'était son objectif
44:28 ce soir. Nous devons dire que nous sommes
44:30 prêts, ça c'est le message qu'il veut envoyer à la
44:32 Russie. Mais vous avez raison
44:34 de dire qu'il a fait extrêmement attention
44:36 au mot. Il parle de "guerre existentielle"
44:38 pour l'Europe qui serait réduite à zéro
44:40 en cas de victoire de la Russie.
44:42 Il parle de "sécurité" pour les Français.
44:44 Il reemploie l'expression de
44:46 Churchill "le nerf de la paix".
44:48 Donc il y a vraiment le langage
44:50 diplomatique du chef de l'État ce soir à souligner.
44:52 - François Reynard,
44:54 Paul parlait du "nerf de la paix".
44:56 Il y a en elle une alternance aussi
44:58 de vocabulaire
45:00 de guerre et de paix.
45:02 - Alors sur le plan du vocabulaire, il fait très
45:04 attention au mot. Par exemple, à un moment, il y avait
45:06 "intérêt vitaux". Si je me trompe
45:08 pas, je crois pas me tromper, mais "intérêt vitaux"
45:10 ça veut dire que si on commence à dire que les intérêts
45:12 vitaux français sont menacés, là
45:14 il y a le risque nucléaire.
45:16 C'est une des possibilités. C'est pour ça qu'il
45:18 utilise pas ça. Et qu'il met notre sécurité
45:20 en danger, etc. Donc il y a toutes ces choses-là.
45:22 Je veux pas utiliser "ennemis"
45:24 et j'utilise "adversaires" parce que "ennemis" ça voudrait dire
45:26 qu'on est en guerre. - À propos du régime russe.
45:28 - Il y a des soldats français qui se battent contre des soldats russes, ce qui n'est pas le cas pour l'instant.
45:30 Mais je voulais juste te dire
45:32 de manière générale, par rapport à tout ce que j'ai entendu,
45:34 je sais pas ce que pense mon ami Manon,
45:36 moi je suis là en tant que journaliste du Nouvelle Obs,
45:38 je suis un homme de gauche, j'ai toujours été
45:40 un homme de gauche, etc. Il y a des tas de trucs de Macron que je déteste.
45:42 La réforme des retraites,
45:44 les cadeaux à la FNECA, les pesticides,
45:46 tout ça c'est pas pour moi. Mais là, je pense
45:48 qu'il est à la hauteur de l'histoire
45:50 parce que l'histoire c'est qu'on a face à nous
45:52 un homme qui est un belliciste.
45:54 Manon disait tout à l'heure que dans les années
45:56 1990,
45:58 à l'époque de Elstine au pouvoir,
46:00 Elstine c'était un pourri, c'était un corrompu,
46:02 mais c'était quelqu'un qui laissait
46:04 une relative liberté en Russie.
46:06 Mais ça créait aussi un désordre,
46:08 une désorganisation dans le pays.
46:10 Poutine est arrivé au pouvoir en disant "moi je vais restaurer
46:12 l'ordre et je vais donner la prospérité au pays".
46:14 Il n'a jamais donné la prospérité au pays.
46:16 Il a volé le pays depuis qu'il est au pouvoir.
46:18 La seule chose qu'il dit
46:20 c'est "la guerre, la guerre, la guerre".
46:22 Je suis désolé, mais la comparaison
46:24 qui s'impose, qui est évidente, c'est Hitler.
46:26 C'est le bellicisme.
46:28 Heureusement pour
46:30 ceux qui sont là-bas, il n'y a pas
46:32 l'élimination d'une population en raison de sa
46:34 religion, comme les juifs ou Hitler,
46:36 mais par ailleurs, Hitler, c'est un homme
46:38 qui disait "je vais rendre sa grandeur à l'Allemagne
46:40 en réunissant le pangermanisme,
46:42 en réunissant tous les petits peuples
46:44 allemands qui sont autour, les Sudètes,
46:46 les bouts de Pologne, Danzig, etc."
46:48 C'est exactement ce que fait Poutine.
46:50 Il dit aux Russes "je vais restaurer
46:52 la grandeur de la Russie", c'est-à-dire "je vais vous refaire
46:54 la carte de la Russie comme elle était à peu près du temps de l'URSS".
46:56 C'est-à-dire, là il y a 17 millions de kilomètres carrés,
46:58 l'URSS c'était 22, il rêve de
47:00 5 millions de kilomètres carrés, c'est évident.
47:04 Il est interrogé aussi sur Vladimir Poutine lui-même,
47:08 Manon Loiseau, et je me tourne vers vous parce que vous en avez
47:10 connu un certain nombre de régimes
47:12 russes et de locataires
47:14 du Kremlin. Celui-là il s'éternise,
47:16 comme vous dites.
47:18 Et là aussi, il est quand même prudent.
47:20 Alors, effectivement la question de savoir si c'est un dictateur,
47:22 un autocrate, je pense que
47:24 c'est compliqué quand on est dans
47:26 une fonction de président, de qualifier
47:28 d'un terme. Il dit "c'est une puissance
47:30 de déstabilisation". Voilà, ce que
47:32 c'est. On est clairement,
47:34 là on est aussi en Russie,
47:36 dans le contexte électoral.
47:38 Quand Vladimir Poutine
47:40 menace, rebrandit
47:42 la menace nucléaire, qu'il fait assez régulièrement,
47:44 c'est aussi pour ses électeurs.
47:46 Voilà, donc je pense que,
47:48 moi je suis comme toi, je pense qu'en fait il est
47:50 au rendez-vous de l'histoire.
47:52 Je pense que c'est un "wake up call", c'est pas forcément
47:54 de vouloir envoyer des troupes, mais c'est
47:56 l'heure, effectivement, est grave.
47:58 La Russie, clairement,
48:00 n'est plus en guerre contre l'Ukraine,
48:02 elle est en guerre contre l'OTAN et contre l'Europe.
48:04 Il y a plein de forces de déstabilisation,
48:06 que ce soit par les cyberattaques,
48:08 en présence en Europe.
48:10 Il y a quand même
48:12 le principal talk show russe qu'il y a
48:14 une semaine, avec Vladimir Salaviov, a dit
48:16 "Alors, sur quelle ville en France
48:18 on pourrait envoyer
48:20 une bombe nucléaire ?" Alors Lyon,
48:22 Paris, Marseille, alors peut-être plutôt Lyon.
48:24 Mais ce même Salaviov parlait
48:26 de la même chose pour Mariupol,
48:28 Odessa...
48:30 Bien sûr que c'est dans un contexte
48:32 électoral, mais nous sommes
48:34 l'ennemi, en ce moment,
48:36 qui est construit
48:38 par le Kremlin.
48:40 Je pense que dans ce cadre-là, effectivement,
48:42 ce que
48:44 dit le président français
48:46 aujourd'hui,
48:48 il est au rendez-vous de l'histoire.
48:50 Et après,
48:52 jusqu'où ?
48:54 C'est la question. - Sur la menace nucléaire,
48:56 vous en parlez, il est interrogé
48:58 là aussi, est-ce que nous sommes visés ? Et il répond
49:00 "Nous sommes protégés". - Oui, c'est le principe
49:02 de la dissuasion nucléaire.
49:04 - Je rebondis sur Paris, Lyon, Marseille,
49:06 qui ont quand même été pointés.
49:08 - Le principe de la dissuasion nucléaire,
49:10 grosso modo, c'est de dire "même si tu tapes
49:12 sur Tavernier, là où il y a
49:14 le PC nucléaire français, nous on a des soins..."
49:16 - Mais ça veut dire qu'il écarte la menace
49:18 d'un Poutine... - En tout cas, le principe de la dissuasion,
49:20 c'est ça. Tu peux pas nous taper,
49:22 puisque nous on te tape en retour. - Je pense que
49:24 la menace nucléaire, elle est pas encore envisagée
49:26 par le Kremlin. Mais c'est clair qu'à partir
49:28 du moment où on a laissé, il y a 10 ans,
49:30 la Russie annexer la Crimée, sans
49:32 rien dire, tout était écrit.
49:34 Et aujourd'hui, alors Mario Paul
49:36 va voter,
49:38 et les chinois russes disent
49:40 "de toute façon, ils veulent tous voter, les
49:42 territoires annexés vont tous voter Poutine.
49:44 Et comme ils peuvent pas se déplacer,
49:46 les électeurs, on va venir avec des urnes directement
49:48 chez vous, vous allez voter". Donc on se retrouve...
49:50 Et aujourd'hui, en Russie, de plus en plus,
49:52 on entend "ah mais Odessa est russe".
49:54 De la part du Kremlin, ça commence à circuler.
49:56 Donc c'est... Il va pas...
49:58 Il va certainement pas s'arrêter,
50:00 ni à la Crimée, ni à Mario Paul.
50:02 Et il vise bien entendu
50:04 une...
50:06 de reprendre en...
50:08 le contrôle de l'Ukraine,
50:10 et il s'arrêtera pas à l'Ukraine.
50:12 - Peut-être que, sur n'importe quel
50:14 autre thème...
50:16 que les autres, la question
50:18 de l'escalade nucléaire, de la menace nucléaire
50:20 est celui sur lequel le langage
50:22 diplomatique est le plus important,
50:24 et le poids des mots le plus important.
50:26 Et Emmanuel Macron, ce soir, effectivement, il dit
50:28 le fait que la France possède
50:30 l'arme nucléaire doit être une sécurité
50:32 pour les Français. C'est aussi une manière de les concerner
50:34 par le conflit qui se passe en Ukraine,
50:36 de dire "votre sécurité est assurée"
50:38 par cet élément-là.
50:40 Il parle de responsabilité,
50:42 et il dit bien "il ne faut pas être dans l'escalade".
50:44 Quand on détient l'arme nucléaire, ça n'est pas approprié
50:46 que d'être dans l'escalade,
50:48 c'est une manière à la fois de calmer le jeu
50:50 et de dire aux Français "vous êtes protégés".
50:52 Ce qui rejoint son message plus global,
50:54 qui a été ce soir, de dire
50:56 "rendez-vous compte", et il a cité l'exemple
50:58 de la distance entre Strasbourg et Lviv,
51:00 1500 km, "ce conflit est à nos portes,
51:02 il nous concerne directement, il concerne
51:04 directement votre quotidien", ça a été son message.
51:06 - Les gens qui l'ont écouté ce soir,
51:08 ou regardé, d'après vous,
51:10 est-ce qu'ils ont clairement compris
51:12 ce qu'ils entendaient par "ne rien exclure".
51:14 Il dit "nous ne mènerons
51:16 jamais l'offensive, nous ne prendrons pas l'initiative".
51:18 - C'était ça son défi, essayer d'être le plus...
51:20 Voilà, c'est ça.
51:22 Essayer d'être le plus clair possible, alors même qu'il a semé
51:24 le trouble, et vous faites bien de rappeler,
51:26 Veranger, nous ne serons jamais à l'offensive,
51:28 c'est pas nous qui allons prendre l'initiative
51:30 d'envoyer des soldats français directement
51:32 sur le front ukrainien,
51:34 c'est ce qu'il essaye
51:36 de dire, tout en
51:38 laissant l'impression d'une menace
51:40 sur la Russie. C'est vraiment
51:42 une ligne de crête et un équilibre qui est pour lui
51:44 extrêmement difficile à trouver, mais il dit bien que tenir
51:46 ce langage, cela relève aussi
51:48 de son rôle institutionnel, de son rôle
51:50 de président, de sa place de président.
51:52 - Alors, dans les...
51:54 On l'avait dit, avant, évidemment,
51:56 il y avait l'idée du chef de majorité
51:58 et
52:00 un message qui pouvait être aussi politique,
52:02 et quand on l'évoque... - Il en parle que beaucoup.
52:04 - Non, mais quand on... Je voudrais savoir
52:06 ce que vous comprenez, vous, quand il évoque
52:08 suite aux votes
52:10 et aux partis
52:12 communistes et la France insoumise qui votent contre
52:14 le traité
52:16 franco-ukrainien, la Rassemblement
52:18 national qui s'abstient, et il dit "Ceux qui choisissent
52:20 la défaite ne choisissent
52:22 pas la paix". Ce
52:24 défaitisme. - Oui, je pense qu'il a raison,
52:26 parce que, si vous voulez, tout le monde
52:28 a deux histoires, deux types, deux moments
52:30 historiques dans la tête. Moi,
52:32 je pense, comme Macron, pour le coup, ou comme
52:34 Manon, j'imagine, qu'on a plutôt l'idée
52:36 "Munich", c'est-à-dire l'idée "Il y a Hitler
52:38 qui est au pouvoir et qui bouffe les pays
52:40 les uns contre les autres, et il faut l'empêcher
52:42 de le faire, parce que sinon, de toute façon, on va
52:44 s'y retrouver, et si on s'engage à cette guerre, si on s'engage
52:46 mal, on va la perdre". C'est-à-dire que nous,
52:48 on a en tête 36, 37,
52:50 31, 1940, et
52:52 il y a d'autres gens qui ont, les insoumis
52:54 par exemple, ils sont avec l'idée "J'aurai
52:56 avant la guerre de 14", c'est-à-dire, ils ont
52:58 l'idée en tête "C'est une escalade
53:00 qui va amener le monde dans la guerre, c'est la première guerre mondiale
53:02 qui va se déclencher", comme si c'était...
53:04 Mais, pour moi, ce qui se passe aujourd'hui n'a rien
53:06 à voir avec la première guerre mondiale. La première guerre mondiale,
53:08 c'est des pays, l'Allemagne, la France,
53:10 Angleterre, etc., qui se cherchent depuis des décennies,
53:12 enfin, qui s'opposent depuis des décennies,
53:14 et il y a un petit prétexte qui est le petit
53:16 assassinat de Sarajevo, je dis "petit assassinat",
53:18 c'est triste pour celui qui est assassiné, mais enfin, c'est juste
53:20 un mec qui a été assassiné, en Autriche
53:22 même, ils s'en foutaient à peu près, et ça a été le prétexte
53:24 "Tout est rentré à la guerre",
53:26 parce qu'il y a eu une suite d'alliances, la Serbie est rentrée en guerre
53:28 avec l'Autriche-Hongrie, l'Allemagne a été
53:30 l'Autriche-Hongrie, la Russie est rentrée dans la guerre,
53:32 la France, etc. On n'est pas du tout
53:34 dans ce contexte-là. Les Insoumis,
53:36 ils faisaient référence à Jaurès, mais Jaurès,
53:38 il serait évidemment, aujourd'hui, pour le fait
53:40 de bloquer un dictateur qui écrase son
53:42 peuple, c'est évident. Le Jaurès, il était
53:44 pour le fait de ne pas faire la guerre avec l'Allemagne, parce que
53:46 en Allemagne, c'était le Parti Socialiste qui était
53:48 majoritaire dans le pays, donc en 1914,
53:50 on a oublié ça, mais donc, voilà,
53:52 ça n'a absolument rien à voir.
53:54 - Ça va être nouveau de la fin ? - Juste, Bérangère,
53:56 sur la répartition, ce qui est important aussi d'avoir
53:58 bien à l'esprit sur le contexte politique,
54:00 il y a une répartition des rôles entre Emmanuel Macron
54:02 et Gabriel Attal. On a beaucoup entendu Gabriel Attal,
54:04 le Premier ministre, cette semaine, à l'Assemblée
54:06 et au Sénat. Lui tape sur
54:08 l'URN, schématiquement, lui tape sur le Rassemblement
54:10 National, dit, effectivement, un peu
54:12 comme le dit ce soir Emmanuel Macron, "ils ne choisissent
54:14 pas la paix",
54:16 et plutôt, acceptent la défaite
54:18 en quelque sorte, là où, lui, Emmanuel
54:20 Macron essaye d'être en surplomb, et c'était
54:22 aussi l'objectif de son intervention de ce soir.
54:24 - Alors, la tradition, c'est de finir par la une,
54:26 très rapidement. Gros dossier
54:28 dans l'Obs ? - Il y a une énorme enquête, une à une,
54:30 sur Rachida Dati. Alors, on disait qu'elle avait
54:32 des casseroles, contrairement au silence, je peux vous dire que c'est des faitous.
54:34 C'est-à-dire que, là, on parle d'affaires
54:36 de corruption très lourdes, dans lesquelles
54:38 il y a l'Azerbaïdjan, le Qatar, etc.
54:40 Une petite référence au livre de Bérangère Bonte sur le Qatar,
54:42 d'ailleurs, mais en tout cas,
54:44 c'est une enquête énorme,
54:46 et à mon avis, la phrase clé de l'enquête,
54:48 c'est Brice Hortefeux,
54:50 l'homme de droite, qui dit, "on pensait que..."
54:52 Pardon. - Non, mais allez-y,
54:54 finissez votre phrase, je vous dessigne, mais il faut qu'on croise.
54:56 - C'est Brice Hortefeux qui disait,
54:58 "Macron a pensé envoyer une bombe à fragmentation
55:00 chez le Républicain en le piquant Dati,
55:02 et c'est nous qui lui envoyons une bombe en fragmentation
55:04 en lui mettant Dati." C'est une affaire énorme.
55:06 - Et donc, c'est à la une de l'Obs. Je rappelle le titre
55:08 de votre documentaire,
55:10 "Manon l'oiseau", qui est toujours visible sur le site
55:12 d'Arte L'Ukraine, sur les traces des bourreaux,
55:14 co-réalisé avec Ksenia Bolshakova. Merci beaucoup
55:16 à tous les trois d'avoir été là.
55:18 Les informer demain à 9h,
55:20 Jean-Rémi Baudot et Renaud Delis, et j'aurai le plaisir
55:22 de vous retrouver à 20h. Bonne soirée.

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