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Démission, absentéisme, quiet quitting… Le monde du travail semble traverser une crise de l’engagement des collaborateurs. Perception erronée ou réelle fracture ? Plusieurs experts débattent dans le CERCLE RH des raisons du désengagement et surtout, des pistes pour réenchanter le monde de l’entreprise.

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00:00Générique
00:12Le cercle RH avec une question fondamentale pour vous qui êtes des chefs d'entreprise, peut-être des DRH, des recruteurs,
00:18qui peut sauver en France l'engagement des collaborateurs ?
00:21Il est en berne, sur les chiffres Gallup, 7% des collaborateurs seraient engagés,
00:27ça veut dire que le reste est en train de s'effilocher dans une sorte de gris jusqu'au noir,
00:31de désengagement, de manque d'envie.
00:34Comment réenchanter le travail ? Comment donner envie aux jeunes,
00:37mais aussi aux seniors, mais aussi aux collaboratrices de 40 ans,
00:41de rester engagés dans son travail ? C'est la question du jour.
00:45Et on en parle avec mes invités qui sont des experts de ce sujet.
00:49Flore Villemot, directrice Conseil RH, ravie de vous retrouver.
00:53Vous êtes venu ici il y a à peu près un an sur notre plateau,
00:56Organisation et Culture au Boson Project, avec une étude excessivement détaillée,
01:01très fine, sur justement ce désengagement, et vous dites dans un des titres, ça m'a marqué,
01:05le travail craque, c'est ça ? Le travail, c'est ça ?
01:09Donc c'est évidemment assez impressionnant.
01:11Marc Landré, ravi de vous accueillir, associé chez SIA Partners,
01:15et vous faites régulièrement des études autour de cet engagement ou désengagement,
01:20et vous avez peut-être un diagnostic, peut-être des solutions,
01:23je ne sais pas, peut-être qu'on va trouver des solutions aujourd'hui.
01:25Fabrice Gatti, on a probablement en tête, ses conférenciers,
01:29cabinet Mankell, vous étiez venu nous parler de votre livre précédent,
01:33mais là vous en sortez un nouveau, il est très direct,
01:35SOS Travail sous tension, les défis et solutions d'un monde professionnel en détresse,
01:41chez Henrik B, ça sort le 13 novembre prochain.
01:45J'ai envie de commencer par vous, on est vraiment en détresse ?
01:48Vous allez jusque-là ?
01:50Oui, je vais jusque-là parce qu'en fait on a la rencontre d'un système économique néolibéral,
01:57et qui est simplement sur le profil d'utilité,
02:00et quand on est sur un système qui est comme ça, qui est déshumanisé,
02:04c'est normal d'organiser le travail sous un angle purement économique.
02:08Et l'homme dans tout ça ?
02:10Et donc l'homme est simplement un rouage,
02:13et les pratiques tayloristes n'ont pas permis à cet homme de se réaliser.
02:18Mais ce n'était pas un problème, ce n'était pas un problème,
02:20parce qu'on n'était pas là pour ça, on était là pour assurer la sécurité de sa famille,
02:24on était là aussi pour avoir l'ascension sociale,
02:27et puis depuis les années 80, on a cassé le contrat social,
02:31avec de nouveau les inégalités économiques qui sont reparties à la hausse,
02:34et donc la promesse de l'entreprise,
02:37la promesse de l'entreprise, en fait,
02:40dans la réalité, on observe à tout âge que ce n'est plus vrai.
02:44Donc il y a plein de gens qui commencent à se dire,
02:46soit je vais au burn-out parce qu'on me fait une injonction paradoxale,
02:49soit je me désengage, et puis voilà.
02:51Et ils font un pas de côté, et vont au travail pour le travail, mais sans engagement.
02:55Ils sont obligés.
02:56Marc Landré, est-ce que vous partagez cette analyse-là,
02:58qui est très macro-économique, qui est très dans les cycles économiques ?
03:01Oui, elle est totalement documentée,
03:03c'est Antoine Fouché, l'ancien directeur de cabinet de Muriel Pénicaud,
03:06qui vient souvent ici, qui est venu présenter son livre il n'y a pas longtemps,
03:09il le dit très bien dans son nouveau livre,
03:11sortir du travail qui ne paye plus.
03:13Dans les années 70, il fallait 15 ans à un salarié moyen
03:17pour pouvoir doubler son niveau de vie.
03:19Aujourd'hui, en 2024, il faut 80 ans.
03:22Ça veut dire deux fois une vie de travail.
03:24C'est ça l'origine du désengagement aujourd'hui des salariés.
03:27Donc c'est des enjeux financiers ?
03:29C'est un enjeu d'espérance, c'est un enjeu de projection.
03:32Aujourd'hui, on ne se projette plus grâce,
03:34on ne se réalise plus grâce au travail.
03:36Une minorité, en tout cas la majorité des gens,
03:39ont l'impression qu'ils vont travailler pour pas grand-chose
03:42et pour avoir un horizon de vie qui va être moins bien
03:45que ce qu'ont vécu leurs parents.
03:46On est la première génération aujourd'hui au travail
03:48qui pense que l'avenir est plus sombre que celui d'avant,
03:52que ce qu'ont vécu les générations précédentes.
03:55Et ça, c'est un changement fondamental de paradigme
03:58et donc de positionnement dans la société et dans l'entreprise.
04:01On n'a pas le temps, évidemment, vu le temps imparti à ce débat,
04:03mais le contexte global dans lequel on évolue depuis presque 5 ans,
04:07je parle du Covid, de turbulences, guerres et sensations comme ça.
04:11Inflation.
04:12Et l'inflation, évidemment, génère des murs.
04:16L'étude que vous dévoilez, elle dit à peu près la même chose avec des chiffres.
04:21Comment vous constatez ce désengagement ?
04:23Qu'est-ce qui justifie ce désengagement ?
04:25Vous partagez l'avis de Fabrice Gattier et de Marc Landré ?
04:28Effectivement, il se voit de deux manières ce désengagement.
04:32Déjà dans les faits et dans les chiffres, comme vous l'avez dit,
04:34avec un impact aujourd'hui sur la productivité.
04:37Et c'est là que ça devient un sujet économique, un sujet dont on se préoccupe.
04:40Et nous, on n'a jamais vu autant de dirigeants nous parler d'engagement.
04:43Donc il y a un vrai momentum.
04:44Excusez-moi, on n'a jamais parlé autant d'engagement de QVT.
04:47Et sur ce plateau en particulier, avec des DRH engagées.
04:50Et je les crois quand elles viennent. Vraiment.
04:52Elles me parlent, elles me font la liste des cours de tout ce qu'elles proposent aux collaborateurs.
04:55Et pourtant, ils sont désengagés.
04:58Pour revenir, il y a des effets au long cours.
05:01Et là, je souscris totalement 80 ans au lieu de 15 ans.
05:056 générations pour passer du revenu minimum au revenu médian.
05:08Donc il y a des sujets de type sécurité de l'emploi.
05:11Et de type basique.
05:13Est-ce que mon emploi me permet de vivre dignement et sereinement ?
05:16Et après, il y a d'autres choses. Il y a des effets qui sont plus compliqués.
05:19Et du coup, il faut bien les investiguer.
05:21Je pense qu'on est tous les trois d'accord là-dessus.
05:23C'est que l'objectif, ce n'est pas de dégainer le maximum de solutions.
05:26Et surtout pas les solutions les plus innovantes ou les plus tendances.
05:29C'est d'aller décrypter ce qui se passe dans les organisations.
05:32D'ouvrir le capot pour voir ce qui pourrait faire la différence.
05:35Vous qui êtes dans le capot, parce que vous avez un regard chez SiaPartner.
05:38Vous avez un regard par l'intervention que vous faites dans les entreprises.
05:41Vous les voyez bien ces DRH. Ils vous parlent.
05:44Et ils vous parlent comme à moi. Ils font des choses.
05:47Ils font des choses. Ils font beaucoup de choses.
05:50Et on y reviendra plus tard sur les remèdes à mettre en oeuvre.
05:54Mais je pense que la problématique, avant tout, c'est qu'il faut faire quelque chose de sur mesure.
05:58C'est-à-dire que le désengagement, il est individuel.
06:01On est dans une société de plus en plus individualiste.
06:03Et le désengagement, il reste sur cette règle-là qu'il est individuel.
06:07Et donc, il va falloir trouver quasiment des solutions au cas par cas,
06:11en fonction des problèmes des gens, des individus, pour les faire rebrancher sur l'engagement.
06:15Je prends un exemple.
06:18Entre Paris et la province, les problèmes ne sont pas les mêmes.
06:21Les remèdes à mettre en place ne sont pas les mêmes selon qu'on est en pouvoir d'achat,
06:25les questions de logement, les questions de transport ou les questions de parcours de carrière.
06:28Selon que vous êtes cadre ou ouvrier, aujourd'hui, un ouvrier, ce n'est plus quelqu'un
06:31qui a les pieds dans la suive et qui a les mains dans le cambouis.
06:34Aujourd'hui, c'est un ouvrier spécialisé, technicien, technologique,
06:38qui a une autre vision que ce qu'avaient ses parents.
06:41Et dernier point, et après, j'en conclus là.
06:43Le grand mal de notre société aujourd'hui, c'est que vous avez des jeunes qui se disent
06:46« Moi, je n'ai pas envie d'avoir la même vie que mes parents.
06:48Ils ont trimé toute leur vie pour un salaire de misère et à 50 ans, ils divorcent.
06:52Moi, je n'ai pas envie de cette vie-là.
06:54Et donc, je vais me réaliser autrement à travers des loisirs, à travers de la culture,
06:59à travers des amis, des voyages qui sont beaucoup plus facilités
07:02par rapport à ce que nos parents ont pu connaître.
07:04Et donc, on a vraiment un changement de paradigme dans la société
07:07qui se traduit dans l'engagement individuel.
07:09Je vais faire une moue parce que les DRH, quand on parle avec elles,
07:12et avec eux, mais principalement des femmes, vous disent
07:14« Moi, quand j'amène aussi des outils un peu innovants d'individualisation,
07:17on a quand même des décideurs, pas tous, qui disent « Attends, attends.
07:20D'abord, on va faire le financier, on va faire le commercial,
07:23on va gérer le réseau marketing, on fera un peu de RH et de QVT qui est un peu le gadget. »
07:27Vous l'avez dit, Arnaud, quand on amène des outils.
07:29Et en fait, on est aujourd'hui sur du saupoudrage managérial,
07:33on est sur du saupoudrage organisationnel.
07:35Mais on ne se pose pas la question de qu'est-ce que le travail.
07:38Donc, fondamentalement.
07:40Mais fondamentalement.
07:41Donc, on a un environnement, on n'est pas sortis,
07:44c'est François Dupuy qui le disait extrêmement bien,
07:46« Commençant par le constat brutal, on n'est pas sortis des pratiques tayloristes. »
07:50Et il disait, bien sûr, c'est plus que le management classique,
07:53les décisions centralisées, c'est tous les nouveaux outils technologiques,
07:56les KPI, les reporting, les outils de mesure de la performance.
07:59Ça étouffe les collaborateurs.
08:00Ça étouffe.
08:01Mais ça étouffe, ce qu'il ne faut qu'apprendre, c'est que ça étouffe nos besoins fondamentaux.
08:05C'est-à-dire que si on ne se questionne pas sur la place de l'humain dans l'organisation,
08:08si on ne se questionne pas de ce dont on a besoin,
08:11et c'est ce que dit Flore,
08:13comme avant on pouvait gagner suffisamment d'argent, Marc le dit,
08:16avant on mettait 15 ans pour y aller.
08:18Bon, allez, ça vaut le coup, même si mon boulot n'est pas top,
08:20au moins j'y vais parce que je vais mieux vivre.
08:22Là, la ligne de vent, elle est longue et on ne l'atteint pas.
08:25On n'y croit pas.
08:26On n'y croit plus parce que le discours que tu me tiens
08:29n'est pas conforme à la réalité que j'observe dans l'entreprise.
08:32Et dans ma vie quotidienne, d'ailleurs.
08:33Donc je me désengage parce que sinon ça devient mes schizophrènes.
08:37Et ceux qui essayent, c'est pour ça qu'il y a une multiplication de burn-out.
08:40Parce qu'ils y croient, ils s'engagent à fond et ils se traitent le mur.
08:43Sauf que, c'est ce que dit très bien Flore dans le rapport,
08:46il y a une responsabilisation totale des managers,
08:50sauf qu'on ne leur donne pas le pouvoir, l'autonomie,
08:52ce que j'appelle l'autonomie dans mes bouquins,
08:54c'est la capacité de donner des idées sur les sujets qui les concernent.
08:57Donc ils sont complètement contraints, ils explosent.
09:00Les managers, ça c'est un vrai sujet,
09:01parce qu'on voit dans votre étude qu'il y a un désengagement complet
09:04ou total du manager qui dit, moi je suis fait remonter,
09:07mais ça ne redescend pas, on ne me donne pas les bons outils,
09:09je ne sais pas quoi faire, avec des cas presque sociologiques
09:12par rapport à des jeunes, des positions d'horaire de travail.
09:14Ils ne sont pas formés.
09:15Et pas de formation.
09:16En fait, les managers, ils sont en première ligne
09:18de tout ce qui craque dans le monde du travail.
09:20Donc c'est eux qui ont toutes les demandes d'individualisme,
09:23c'est eux qui ont parfois le moins d'autonomie,
09:25c'est la population la plus désengagée.
09:27Et donc la recommandation, c'est de remonter les sujets d'un cran.
09:31Et je pense qu'il y a deux grandes responsabilités aujourd'hui
09:33d'un point de vue des dirigeants RH et des dirigeants tout court
09:36qu'il faut réinvestir.
09:37Oui, pour le surmesure dans une certaine mesure,
09:40et plutôt pour trouver des cas de figures qui sont,
09:44en fait, effectivement...
09:45Un peu typologiques.
09:46Des typologies, des choses qui permettent de garder l'équité au cœur.
09:50Et ça, c'est une grande responsabilité de dirigeants.
09:52Parce que là, la fracture qui est en train de se créer
09:54entre les cols bleus, les cols blancs,
09:56ceux qui ont le droit au télétravail
09:57et ceux pour lesquels on n'a pas ouvert la boîte de Pandore
09:59de la modernité sociale...
10:00Qui arrive la semaine des 4 jours.
10:01Ça, ça peut fraquer.
10:02Qui est une réponse au télétravail.
10:04Voilà.
10:05Qui peut être une réponse au télétravail.
10:07Il y a cette scission.
10:08Le contrepoids, moins de télétravail,
10:10semaine des 4 jours.
10:11Mais je vous ai vu lever les yeux au ciel tout à l'heure.
10:13Encore une fois, on va vers quoi ?
10:15Parce qu'on nous vend l'IA en ce moment d'une manière très, très...
10:18En disant, vous allez voir, ça va alléger.
10:20On déchante beaucoup sur l'IA.
10:21On est d'accord, mais c'est vendu.
10:23On nous dit, vous allez voir, toutes les tâches pas agréables,
10:26on va vous les alléger,
10:27et vous allez trouver le monde merveilleux du travail.
10:29Arnaud, si on regarde l'histoire de l'entreprise,
10:31on nous a dit la même chose avec Internet.
10:33Les mecs n'en peuvent plus parce qu'ils ont 150 e-mails dans leur boîte.
10:36On leur dit la même chose avec les KPIs.
10:38Vous allez voir, ça va dire...
10:39Mais non, maintenant, on ne peut plus bouger.
10:41C'est tout pareil.
10:42Donc, ce n'est pas l'outil qui est mauvais.
10:43C'est que dans la philosophie même,
10:45on est toujours sur une philosophie de la rationalité et de l'utilité.
10:48Donc, tant que l'utilité est vue comme le principal critère de l'action,
10:52tout le reste, c'est du temps perdu.
10:54Donc, si on ne modifie pas...
10:55C'est terrible ce que vous dites.
10:56Mais non, mais ce n'est pas terrible.
10:58C'est que plus on sera conscient du problème,
11:00plus on pourra le traiter.
11:01Plus on peut le traiter.
11:03Je pense que la prise de conscience, maintenant,
11:05avec la guerre des talents,
11:06avec les pénibilités de recrutement,
11:08avec les tensions sur le marché du travail,
11:09les DRH et les recruteurs ont pris conscience
11:12que cette notion d'engagement,
11:13elle devait être repensée,
11:15elle devait être réinitialisée
11:17pour, un, recruter les meilleurs
11:19et, deux, pour ne pas les perdre.
11:20Et les garder.
11:21Nous, on parle d'un phénomène de bascule
11:24de la guerre des talents à la guerre de l'engagement.
11:26Et il y a peut-être un sujet,
11:27c'est que là, il y a un sujet de narratif.
11:29Tu parlais, tout à l'heure,
11:30des gens qui ne font plus rêver,
11:32ceux qui ont donné toute leur vie au travail
11:33et qui ont été...
11:34Ils ne font pas rêver leurs enfants.
11:35Voilà.
11:36Et, par ailleurs, en fait,
11:37nous, on a fait une étude auprès de jeunes générations
11:39qui n'ont pas mis encore un orteil dans le monde du travail
11:41et qui parlent de labeur, de pénibilité,
11:43de charge, de burn-out.
11:44Ils ont peur.
11:45Et, en fait, la responsabilité des dirigeants,
11:46c'est aussi d'être enthousiastes
11:47ou, en tout cas, de raconter
11:49que le travail, c'est de la matière vivante,
11:51c'est de la matière réelle.
11:52Il y a des gens, il y a des femmes.
11:55En fait, faire des choses ensemble,
11:56tricoter des choses...
11:57Donc, réenchanter le travail.
11:58Oui, mais c'est pas que des dirigeants,
11:59parce que là, on a interrogé des dirigeants,
12:00mais c'est de la société tout entière.
12:02C'est des politiques qui n'ont que le mot souffrance,
12:05pénibilité, prévention.
12:07L'éducation.
12:09L'éducation, pour que les enfants puissent se dire
12:11j'ai envie d'y aller.
12:12Mais j'ai vu un reportage à la télé,
12:13ça m'a fait halluciner,
12:14sur France 3,
12:15où on interrogeait les gens sur
12:16aimez-vous votre travail ?
12:17Et ce reportage montrait,
12:18à 75% de ce micro-trott,
12:20même 80%,
12:21les gens aimaient leur travail.
12:22Mais bien sûr.
12:23Ils disaient, je suis content d'être au travail.
12:24J'aime mon travail.
12:25Mais c'est notre identité, le travail.
12:26Comme on ne l'entend jamais.
12:27Mais non, on ne l'entend jamais.
12:28On ne l'entend pas assez.
12:29Bah oui, il y a des gens heureux d'aller au travail.
12:30Il y a une grande différence entre le déclaratif et le réel.
12:32Parce que quand on leur demande,
12:33est-ce que vous aimez suffisamment votre travail
12:34pour travailler deux ans de plus ?
12:35Parce que, collectivement,
12:36il faut qu'on travaille un peu plus ?
12:37Là, ils vous disent, non,
12:38je préfère partir avant et toucher moins.
12:39Oui, mais ça montre bien une chose,
12:41c'est que l'homme est plutôt positif.
12:44Il se lève le matin en disant, j'ai envie de bosser.
12:46Mais il rencontre des conditions qui sont défavorables.
12:50Et moi, ce que je dis vraiment,
12:51c'est qu'il faut sortir de cette vision quantitativiste,
12:54cette vision individualiste pour dire,
12:56il y a une interdépendance nécessaire entre un contexte,
12:58c'est-à-dire l'environnement,
12:59les pratiques de l'organisation, la culture de l'entreprise.
13:02Deux, les leaders, donc les managers et les dirigeants.
13:05Donc, il faut les former.
13:07Trois, il faut mettre en position managériale
13:08quelqu'un qui a envie.
13:10Et ce n'est pas une récompense, le management,
13:11c'est une compétence.
13:12Et puis trois, il y a les acteurs du système
13:14qui vont négocier, qui sont des êtres rationnels.
13:16Et donc, c'est une négociation.
13:18Il faut sortir du dogmatisme, en fait.
13:20Marc Landré, Aude et...
13:22Aude, hein ?
13:23Flore.
13:24Flore, voilà. C'est très joli, Aude aussi.
13:26Et Fabrice, vous êtes tous les trois à la tête d'une entreprise.
13:30Vous réunissez votre comexe.
13:32Et vous décidez de prendre à bras-le-corps
13:34le sujet de l'engagement.
13:35C'est quoi la première mesure que vous mettez en place ?
13:37Pour moi, il y en a deux.
13:38C'est équilibre vie pro-vie perso
13:39pour faire en sorte qu'on vienne travailler,
13:41non pas les pieds derrière.
13:42Et deux, c'est la question des aidants.
13:44Parce qu'aujourd'hui, vous avez 10% des salariés qui sont aidants.
13:46On sait qu'en 2030, ça sera 25%.
13:48Parce qu'on aura soit un enfant malade, soit un parent malade,
13:50donc il faudra s'occuper.
13:51Et donc ça, ça participe.
13:53Si l'entreprise se montre qu'elle est capable...
13:55D'écouter ça.
13:56D'écouter, mais surtout d'apporter des solutions,
13:58des éléments de réponse aux problématiques
14:00qui touchent à l'intérieur d'eux-mêmes leurs salariés,
14:02là, ils se diront
14:03« Tiens, ma boîte se soucie de ce que je suis,
14:05de là où je vais,
14:06et donc ça va me donner envie de m'engager pour elle. »
14:12Et je renvoie quelque chose.
14:14Et je lui rends quelque chose.
14:16Moi, je regarderais si sur le basic,
14:18les back to basics, on y est,
14:20c'est-à-dire considération, management, autonomie,
14:22on y est, on n'y est pas.
14:24Et ensuite, sur ce qu'on fait ensuite ou de plus,
14:27j'aime beaucoup effectivement cette réflexion
14:29sur c'est quoi le nouveau commun,
14:31c'est quoi le nouveau collectif qui est beaucoup plus inclusif,
14:33c'est quoi les règles du jeu équitable
14:35où chacun, à l'intérieur, se sent considéré.
14:38Et moi, je suis tout à fait d'accord sur les aidants,
14:40sur les parents,
14:42sur des choses qu'on peut faire à la maille,
14:44mais en retrouvant des catégories globales.
14:46C'est-à-dire prendre en compte la globalité d'un être humain
14:48et pas uniquement son caractère utilitariste.
14:50Mais se dire que le commun d'hier
14:52ne sera pas le commun de demain, ça c'est certain.
14:54Fabrice Gatti, votre proposition ou vos propositions,
14:56parce que la question est posée là.
14:58Trois choses. La première, c'est, déjà,
15:00mettre en place une configuration
15:02qui favorise le sentiment de compétence,
15:04c'est-à-dire je sens que je peux arriver à ce qu'on me demande.
15:06Deux, d'autonomie, je peux amener des idées.
15:08Trois, de relation, parce qu'on est des êtres de lien.
15:10Ça, c'est la première chose.
15:12Deuxième chose, il faut réinventer la qualité du travail.
15:14Donc, moi, je sors de la qualité de vie au travail,
15:16c'est-à-dire de permettre aux gens de prendre conscience
15:18de ce qu'ils font naturellement
15:20et de dire vers quel type d'activité tu vas te réaliser.
15:22À partir de ce moment-là, en fait,
15:24on crée une motivation interne.
15:26J'existe à l'égard de la qualité de mon travail.
15:28Oui, oui.
15:30Mais donc, on sort de quelque chose
15:32de très utilitariste.
15:34Et trois, c'est un pacte, c'est un cadre de collaboration
15:36sans sécurité pour agir.
15:38Mais j'ai des responsabilités en tant que salarié
15:40et j'ai des responsabilités en tant que garçon.
15:42Il y a un petit fil rouge dans tout ce que vous dites.
15:44Il y a quand même un rapport à l'écoute de l'autre
15:46et de le prendre en considération.
15:48Écoutez, reconnaissance.
15:50Je dirais même un point supplémentaire,
15:52qui est un mot qu'on n'a pas l'habitude d'utiliser en France
15:54et qui pourtant est très usité ailleurs,
15:56c'est le droit à l'erreur.
15:58On doit reconnaître aux salariés et notamment aux managers
16:00ce droit à l'erreur qui les fait progresser
16:02et donc qui leur montre que, OK,
16:04tu y mets de la bonne volonté, tu te plantes,
16:06c'est pas grave, on est là, on te soutient,
16:08on va avancer ensemble.
16:10Et juste par rapport à ça, parce que j'en parle dans le bouquin,
16:12c'est la responsabilité va forcément de pair
16:14avec le droit à l'erreur
16:16sinon c'est une injonction paradoxale.
16:18Si je te demande de prendre des responsabilités
16:20mais que je te punis si tu fais une erreur, alors j'en prends plus.
16:22Laisse-moi un champ d'expérimentation.
16:24Flore, le mot de la fin.
16:26Je rappelle les grands défis de la réinvention
16:28Boson Project.
16:30C'est un travail assez titanesque que vous avez fait
16:32et c'est votre sujet.
16:34L'humain, c'est un mot un peu valoche
16:36mais quand même, écouter l'autre,
16:38prendre le temps de comprendre ce qu'il veut.
16:40Je pense que le mot de la fin qu'on a tous les trois prononcé
16:42c'est vraiment l'histoire du pacte.
16:44S'engager, c'est donner au présent
16:46pour recevoir au futur.
16:48Qu'est-ce qu'on donne au présent, qu'est-ce qu'on construit dans le futur
16:50et comment on se donne la main
16:52et comment on le fait explicitement,
16:54comment on se reparle des règles du jeu
16:56et comment on n'hérite pas de règles du jeu
16:58dans des organisations auxquelles
17:00on ne conscrit pas ou qui ne créent pas de mieux.
17:02C'est un débat passionnant,
17:04c'est un débat de fond,
17:06parce que c'est un débat qui impacte aujourd'hui la réflexion
17:08de tous les décideurs, de tous les managers, des dirigeants
17:10et de la société entière, et de notre société
17:12et des politiques. Vous avez raison Marc Landré de les impliquer
17:14de ne pas être toujours dans le noir,
17:16le dark, mais aussi de valoriser le beau.
17:18Merci, c'était passionnant.
17:20Merci à vous Fabrice Gatti, vous avez fait un très bon teasing de votre livre.
17:22J'ai pu tenter une dernière prononciation
17:24d'intégration du travail.
17:26Sous tension, défis et solutions
17:28d'un monde professionnel en détresse
17:30sorti c'est Henrik B.
17:32C'est le 13 novembre prochain.
17:34Merci à vous Flore Villemot
17:36avec cette étude sous le bras, les grands défis de la réinvention
17:38chez Boson Project et merci à Marc Landré
17:40pour sa présence associée chez SIA Partners.
17:42Merci à vous.
17:44On termine notre émission avec Fenêtre sur l'emploi
17:46et on parle chiffres.
17:48Et oui, chiffres, c'est important les chiffres.

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