"STARS DE FAIT DIVERS" / A travers un focus sur l'affaire Zahia, l'affaire Cantat / Trintignant, l'affaire Florence Rey, l'affaire Polanski, l'affaire Stern, ou encore l'affaire Giraud / Treiber, analyse du nouveau phénomène de pipolisation des criminels.
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00:00 Il n'y a pas de fait divers sans personnage fort.
00:02 Les people touchent toutes les catégories de la société,
00:05 donc y compris les personnages de fait divers.
00:08 Un fait divers avec des people, c'est une histoire avec des personnes déjà connues.
00:12 Donc du coup on a la bonne histoire, écrite toute seule,
00:15 pas la peine de l'écrire, elle a déjà eu lieu, il n'y a plus qu'à la raconter,
00:18 et en plus on a des bons personnages.
00:20 On ne supporte les stars que parce qu'elles dérapent.
00:22 Si une star était un vrai dieu et était parfaite, ça serait insupportable,
00:25 et tout le monde la détesterait.
00:27 Il y a une demande aujourd'hui des rédactions en chef dans les journaux
00:31 pour couvrir le people mêlé aux faits divers.
00:36 People ça veut dire quoi ? Ça veut dire des gens.
00:38 Les faits divers c'est toujours des histoires de gens.
00:40 Après, dans ces faits divers, certains personnages ressortent,
00:45 et ces gens-là, on les "héroïse".
00:48 Mais...
01:15 Nous sommes dans les locaux de Grazia, dernier né des journaux féminins haut de gamme,
01:19 lancés en septembre 2009.
01:21 Cas particulier, Grazia est aussi le seul féminin à traiter de faits divers.
01:26 L'idée en est venue un jour au chef des infos du magazine.
01:30 Moi personnellement j'ai envie de lire ça, ça m'intéresse,
01:34 et puis ça plaît aux lectrices, ça plaît aux gens,
01:39 il y a une vraie attente, sans tomber dans un espèce de populisme.
01:43 Les gens ont envie de lire des histoires.
01:46 Et les faits divers c'est le type de sujet sur lequel tu peux le mieux raconter des histoires.
01:51 Je la fais le biais de croire que rien n'est gagné,
01:54 qu'on a réussi à trouver le traitement Grazia.
01:57 Pas trop trash, pas rentré dans les détails.
01:59 Il y a des faits un peu sordides qu'on passe volontairement sous silence,
02:04 parce qu'on n'a pas envie de donner le crapouteux, raconter.
02:08 On n'a pas envie de voir la scène des crimes, comment ça s'est passé.
02:12 On élague certains aspects de l'histoire pour pouvoir être le plus Grazia possible,
02:18 le plus chic possible.
02:20 Chic pour le féminin Grazia, branché pour le magazine People voici.
02:25 Aujourd'hui le fait divers est partout.
02:27 Le fait divers fait fantasmer, le fait divers révulse ou passionne.
02:31 Le fait divers a ses stars, victimes ou assassins.
02:34 Le fait divers se people-lise.
02:36 A longueur de journaux, d'émissions de radio, de magazines télé.
02:40 50 minutes inside, l'émission People de TF1 traite autant de people que de faits divers.
02:46 Une nouvelle revue sort au nom sans ambiguïté, Serial People.
02:50 Une quinzaine d'émissions lui sont consacrées à la télévision.
02:53 Et une étude de l'INA rapporte qu'en 10 ans,
02:55 les faits divers sont passés de 630 sujets dans les JT des chaînes herziennes à 1710,
03:00 occupant aujourd'hui 10% de chaque journal télévisé.
03:04 Moi je crois que les chaînes de télévision en programment de plus en plus,
03:07 parce que le public aime ça.
03:09 De la part de la chaîne, c'est pragmatique.
03:12 Elle voit bien que quand on met du fait divers à l'antenne,
03:15 ça fait souvent une bonne audience,
03:18 voire une très bonne audience en ce qui concerne Faites Entrer l'Accusé.
03:22 C'est une histoire qui ressemble à un roman noir.
03:25 Star incontesté du genre avec son émission Faites Entrer l'Accusé sur France 2,
03:29 Christophe Ondelat a son idée sur les raisons pour lesquelles le fait divers marche à la télévision.
03:34 La plupart des téléspectateurs viennent voir une émission de fait divers
03:38 un peu pour avoir eu le rire et un peu pour s'interroger eux-mêmes
03:41 sur leur capacité à passer à l'acte en telle et telle circonstance,
03:44 parce que dans un point de leur tête, il y a ça.
03:47 Il y a cette idée que moi peut-être je pourrais ou je ne pourrais pas,
03:50 ou j'ai failli, ou j'ai été tenté, ou l'idée m'a traversé l'esprit.
03:54 J'aime bien la nature humaine, je la trouve formidablement intéressante,
03:57 je ne la comprends pas complètement.
03:59 Et je trouve que dans le fait divers, on arrive à une espèce d'état de paroxysme.
04:05 C'est-à-dire qu'on en arrive à une espèce de point de rupture.
04:10 Personne n'a l'air de lire les faits divers, personne n'achète une nouvelle détective,
04:13 et en même temps c'est des journaux qui se vendent bien,
04:15 et dans la presse quotidienne, c'est les pages qui sont les plus lues.
04:18 Pourquoi ? Parce qu'on y trouve les grandes affaires de l'amour, de la mort, de la vie,
04:23 et que ça nous met en contact direct avec les grandes questions de l'existence.
04:28 Oh mon Dieu, mon amour.
04:30 C'est tellement bon.
04:33 C'est tellement bon.
04:36 Avril 2010, une escorte-girl fait trembler le football français.
04:40 Zaya, 18 ans, révèle qu'elle a couché moyennant de l'argent,
04:44 avec trois stars du ballon hexagonal.
04:47 Karim Benzema, Sidney Gauvoux, et surtout Franck Ribéry.
04:51 Dans le cas de ce dernier, l'affaire semble plus grave,
04:54 puisqu'à l'époque des faits en 2009, Zaya était mineure.
04:57 Ou comment une partie de jambes en l'air tarifées tourne aux faits divers.
05:01 Sans aucune volonté de nuire, Zaya est gagnante sur toute la ligne.
05:05 Elle n'incrimine pas Ribéry, et en profite pour faire parler d'elle.
05:09 D'anciennes vidéos un peu chaudes ressortent sur Internet,
05:13 un compte Twitter, un blog au nom de Zaya D.A.R.,
05:17 et 116 comptes Facebook, plus ou moins crédibles.
05:20 Une créature people est née.
05:22 Si Zaya devient tout d'un coup un peu au centre des préoccupations,
05:27 c'est parce qu'elle-même a un tempérament people qui éclate au grand jour.
05:37 On le voit sur la couverture de Paris Match,
05:40 on le voit à sa façon de poser, de parler.
05:44 On sent bien que cette fille est assez à l'aise avec la notoriété.
05:49 Et donc, elle a effectivement un potentiel people extraordinaire.
05:53 Véritable consécration pour une jeune femme inconnue un mois auparavant.
05:57 Le 28 avril, Paris Match lui accorde 6 pages assorties d'un interview.
06:01 Paris Match faisant la une avec une escorte-girl, il fallait oser.
06:05 L'affaire Zaya et la couverture de match a suscité de la part de lecteurs
06:09 des réactions qui ont, certaines étaient positives,
06:12 certaines étaient négatives, certains lecteurs ont été choqués
06:15 qu'on puisse avoir une prostituée en couverture du journal,
06:18 même si j'ai expliqué que depuis l'affaire Profumo en 1963,
06:21 en passant par Christine de Vieillejoncourt,
06:24 la scandaleuse n'avait jamais été un sujet tabou dans Match.
06:27 Alors évidemment, il y a encore Match, les autres en parlent,
06:29 et Match le montre.
06:31 Christine de Vieillejoncourt du nom de cette maîtresse de Roland Dumas,
06:34 ministre de Mitterrand, impliquée dans l'affaire Elf,
06:37 et qui s'était autoproclamée la putain de la République.
06:40 Et Profumo, du nom d'un ministre britannique
06:43 compromis dans un scandale avec une call-girl dans l'Angleterre des années 60.
06:47 Deux femmes sulfureuses qui ont fait les beaux jours de Paris Match.
06:51 Si le paparazzi William Abenaim connaît bien le monde des people,
06:54 c'est aussi un passionné de faits divers.
06:57 Pour lui, avec l'affaire Zaya, on se situe vraiment au croisement des deux.
07:00 - L'histoire de Ribéry avec la prostituée, etc.
07:03 Là, vous allez avoir une couv' dans Match, avec six pages,
07:06 avec cette femme qui a été interviewée par Match.
07:09 C'est quoi, c'est bien un fait divers, People's Ilk ?
07:12 Ah oui, oui, je pense que oui,
07:15 c'est une tendance qui se fait de plus en plus.
07:18 Bertrand Villegas a créé l'agence The Wit,
07:21 spécialisée dans la veille audiovisuelle en France et à l'étranger.
07:24 Pour lui, si Zaya n'a rien à se reprocher,
07:27 Franck Ribéry a étrangement réussi à passer entre les gouttes.
07:31 - Zaya, très bien, elle fait son business,
07:34 elle exploite l'affaire comme elle peut, puisque ça a toujours été son but.
07:37 Si on regarde sa biographie, apparemment, ça a toujours été son but d'être une célébrité.
07:40 Les médias se jettent sur elle aussi uniquement,
07:43 parce que l'autre, celui qui pourrait être coupable,
07:46 qui aurait peut-être enfreint la loi, ne communique pas du tout.
07:49 On peut imaginer, peut-être dans un autre pays,
07:52 un type comme Ribéry,
07:55 on lui aurait conseillé de s'exprimer, de dire quelque chose.
07:59 Peut-être que les médias français ne sont pas assez violents,
08:02 peut-être qu'ils n'ont pas assez traqué à la sortie de chez lui,
08:05 ils n'ont peut-être pas foutu une pression tellement insupportable
08:08 qu'il aurait dû, qu'il serait expliqué.
08:11 C'est un type qui protège,
08:14 qui épargne relativement certaines personnalités.
08:17 Finalement mis en examen après le Mondial 2010,
08:20 Ribéry aura à répondre de sa relation clandestine.
08:23 L'affaire Zaya n'est peut-être pas terminée.
08:26 Ce n'est pas une histoire qui passionne la France.
08:29 Il y a une curiosité sur le personnage de Zaya,
08:32 mais la curiosité s'arrête assez rapidement.
08:35 Dans les grands faits divers, la curiosité sur les personnages,
08:38 la curiosité sur les protagonistes ne s'arrête pas.
08:41 Je ne mettrais pas du tout l'affaire Zaya dans la catégorie des grands faits divers,
08:44 c'est un fait divers sans lendemain.
08:47 C'est "end of the story" après la première histoire.
08:50 C'est entendu, le mini-scandale entre l'escorte-girl Zaya et le joueur du Bayern,
08:53 à la frontière du fait divers sulfureux et de la pipolisation accélérée,
08:56 n'est peut-être pas l'affaire du siècle.
08:59 Mais à quoi reconnaît-on qu'un fait divers a une dimension "people" ou non,
09:02 que les protagonistes soient ou ne soient pas connus ?
09:05 Selon Laurence Lacour, tout a commencé avec l'affaire Villemin en 1984.
09:08 À l'époque, jeune journaliste, elle fut pendant 4 ans l'envoyée spéciale d'Europe 1
09:11 sur ce fait divers à nul autre pareil.
09:14 Un fait divers dont elle dit qu'il a brisé sa carrière
09:17 et même son envie de poursuivre son métier.
09:20 J'ai eu le temps de voir quand même les dégâts qu'on a laissés derrière nous
09:23 et bon, moi je suis désolée, mais ça ne me satisfait pas
09:26 de savoir qu'il y a derrière nous un homme qui est mort,
09:29 un autre qui est devenu assassin alors que vraiment,
09:32 intrinsèquement parlant, il était destiné à tout sauf à ça
09:35 et une femme totalement broyée sur l'autel,
09:38 non pas de la justice ni de la vérité,
09:41 mais de tout un tas d'autres paramètres.
09:44 Donc voilà, moi j'avais pas envie de continuer
09:47 dans un système qui laissait les gens sur le carreau.
09:50 Donc je suis partie et c'est moi qui, d'une certaine manière,
09:53 brisait ma carrière.
09:56 L'affaire Villemin commence en octobre 1984.
09:59 Avec l'assassinat du petit Grégory, 4 ans,
10:02 retrouvé mort noyé dans la Vologne, une rivière des Vosges.
10:05 Je me souviens encore du soir de bouclage
10:08 où on a appris la mort d'un petit garçon,
10:11 trouvé mort dans la Vologne avec les mains et les pieds liés.
10:14 Dès le premier bouclage, ça a été un grand sujet dans le journal,
10:17 6 pages je crois, je me souviens.
10:20 Et ensuite ça a été le grand feuilleton qui a démarré,
10:23 qui a enflammé toute la rédaction parce qu'évidemment,
10:26 c'était l'histoire qui traversait des rebondissements incroyables.
10:29 Et tout d'un coup, la France s'est mise à se passionner
10:32 pour ce fait divers.
10:35 La suite est connue.
10:38 Persuadée de la culpabilité de son cousin Bernard Laroche,
10:41 Jean-Marie Villemin l'abat d'un coup de fusil.
10:44 Puis sur la foi de témoignages douteux,
10:47 Christine Villemin est inculpée.
10:50 Si elle finira par bénéficier d'un non-lieu,
10:53 elle sera au centre de l'affaire comme une possible mère infanticide.
10:56 Couverture de journaux, instructions bâclées,
10:59 commérages et insinuations, en peu de temps,
11:02 Christine Villemin devient une célébrité malgré elle.
11:05 Comment vous, personnellement, vous réagissez au fait qu'on puisse vous soupçonner ?
11:11 Pas trop bien quand même.
11:14 C'est quand même mon petit qu'on a enlevé.
11:17 Oui mais finalement, c'est quand même vous la victime dans cette affaire.
11:20 Vous avez l'impression qu'on essaie un peu de semer le trouble dans l'enquête ?
11:23 Oui, parce que le petit n'est plus là, il n'est plus rien.
11:26 Je ne sais pas ce que ça m'aurait rapporté d'avoir fait ça.
11:29 Elle ne peut pas faire un pas hors de chez elle.
11:32 Lorsqu'elle rend visite à son mari en prison, elle est traquée sans relâche.
11:36 Grégory est passé au second plan et d'ailleurs, après on n'en parlait plus beaucoup.
11:40 C'était plus la fascination qu'exerçait cette jeune femme.
11:43 Tout était cristallisé sur elle, autour d'elle, comment elle était habillée,
11:48 pourquoi elle faisait ci, pourquoi elle faisait ça.
11:51 Elle, c'était l'incarnation à la fois du mystère,
11:54 à la fois, j'ai du mal à le dire parce que 26 ans après c'est tellement horrible,
11:59 c'est du monstre, à la fois de l'ange pour d'autres.
12:03 Donc ce n'était plus Grégory, c'était Villemin et Villemin c'était elle.
12:06 Et au-delà de la vedettarisation de Christine Villemin,
12:09 c'est toute une communauté qui se retrouve sous le feu de la rampe.
12:13 C'est un fait divers qui est un véritable cas d'école.
12:16 Je pense qu'on vit aujourd'hui de plus en plus dans une société fermée.
12:18 Chaque policier doit être pixelisé, chaque témoin doit être pixelisé.
12:22 C'est la règne de l'anonymat.
12:25 Le fait divers d'affaire Grégory, c'est que tout le monde est à visage découvert.
12:28 C'est peut-être terrible quand on le revisite 20 ans après,
12:30 mais en tous les cas, tout le monde apparaît à visage découvert,
12:32 il y a des photos partout et Match va être un témoin direct du fait divers.
12:36 C'est-à-dire qu'une semaine après la mort du petit Grégory,
12:39 je crois que c'est 15 jours, on réunit, Jean-Kerre,
12:43 réunit le clan Villemin autour d'une table.
12:46 Et cette photo-là, un an après, sera encore pour les policiers
12:51 une source d'information, savoir comment le suspect, le criminel,
12:55 le corbeau est-il sur cette photo.
12:57 Donc il y a eu cet incroyable, ce fait divers reste un cas d'école unique
13:02 parce que les journalistes étaient immergés dedans.
13:05 On ne pouvait pas sortir le matin sans voir sur le kiosque
13:09 cette affaire faire la une, ce qui n'est quand même pas toutes les affaires.
13:13 Ce n'est quand même pas de l'ordre de toutes les affaires.
13:16 Par ailleurs, il y a eu à un certain moment une traque totale de la mère de l'enfant.
13:24 Et on avait le sentiment que petit à petit, l'opinion publique
13:28 se faisait par finalement tous ces articles sur cette traque de la mère.
13:35 Paris Match consacrera 14 couvertures à Christine Villemin en deux ans.
13:39 Elle prendra même le risque de l'impopularité
13:42 en se laissant photographier à la maternité avec son deuxième enfant
13:45 un an après la mort de Grégory.
13:47 Si elle se prête à cet exercice moyen en finances,
13:50 c'est aussi pour payer ses avocats.
13:53 Je me souviens d'une interview qui avait été faite justement de Christine Villemin
13:58 dans ces années-là, enfin dans cette époque-là,
14:01 où quelqu'un lui avait dit "Vous vous rendez compte que vous avez un statut de vedette
14:05 aujourd'hui et que vous êtes très critiquée pour ça ?"
14:08 Et elle avait dit "Mais on croirait que les gens sont envieux du malheur qui nous arrive."
14:13 Elle avait vraiment ce sentiment.
14:15 C'est vrai qu'ils étaient pris dans un engrenage dont ils n'arrivaient pas à sortir à une certaine époque,
14:19 c'est-à-dire la presse qui accuse, il faut répondre,
14:22 il faut répondre d'une certaine manière, il faut trouver de l'argent.
14:24 C'était un système totalement délirant.
14:26 Évidemment, ils étaient très critiqués pour ça,
14:28 parce que ça n'allait pas avec le deuil, ça n'allait pas avec l'humilité,
14:31 ça n'allait pas avec l'innocence, donc rien n'allait dans cette histoire.
14:34 De toute façon, rien n'allait jamais.
14:36 La défense de Christine et Jean-Marie Villemin durera 9 ans.
14:40 Elle coûtera jusqu'à 250 000 euros
14:42 que leurs avocats se chargeront de récolter en négociant des séances photos.
14:48 Épiphénomène de la médiatisation outrancière qui a entouré l'affaire,
14:52 le grand photographe de mode Helmut Newton sera dépêché sur les lieux par Paris Match.
14:57 Il fait poser les protagonistes de l'affaire tel des mannequins d'un jour.
15:01 Et un soir, moment de grâce, un corbeau vient s'échouer sur la fenêtre de son hôtel,
15:06 comme un écho aux nombreuses lettres anonymes dont le dossier est rempli.
15:14 Mais sur toute libération, on verra Marguerite Duras faire un reportage sur Christine Villemin.
15:19 Son article, à charge pour la mère de Grégory,
15:22 alors même qu'elle ne l'a pas rencontrée, restera célèbre pour son titre,
15:26 "Sublime, forcément sublime".
15:28 Aujourd'hui, plus de 25 ans après les faits,
15:33 Christine et Jean-Marie Villemin ont retrouvé le calme de l'anonymat.
15:36 Avec leurs trois enfants, ils ont quitté l'Est de la France
15:39 pour s'installer en région parisienne.
15:41 Toute la dérive sur l'affaire Villemin a totalement changé de métier.
15:45 Et aujourd'hui, on lutte pour revenir et faire comprendre qu'on n'est pas que des chiens.
15:52 Pipolisation excessive, interprétation fantasmatique de fait dramatique,
16:01 vénétarisation d'une criminelle qui cherchait tout sauf la lumière des sunlights,
16:05 telle est l'affaire Florence Ray, avec son amant et complice Audrey Maupin,
16:09 un soir d'octobre 1994,
16:12 elle part braquer les policiers de la préfourrière de Pantin, en Seine-Saint-Denis.
16:16 En s'enfuyant, ils prennent un taxi en otage.
16:19 L'odyssée des deux hors-la-loi se poursuit place de la nation.
16:22 Le taxi percute une voiture de police,
16:25 le chauffeur est tué ainsi que deux policiers par Audrey Maupin.
16:28 La fin de l'escapade meurtrière aura lieu au bois de Vincennes,
16:31 dans lequel un autre policier est abattu et Audrey Maupin lui-même touché.
16:35 Il succombera à ses blessures le lendemain.
16:38 Bilan du carnage, cinq morts et plusieurs blessés.
16:41 Un carnage dans lequel Florence Ray n'aura qu'un rôle de complice,
16:44 mais qu'elle devra assumer seule.
16:46 Une certaine presse l'appellera d'ailleurs la tueuse de flics.
16:49 La mort des quatre policiers est absolument effroyable.
16:55 Ils sont morts sur le trottoir, dans les bras des passants.
16:58 Match montre les photos d'ailleurs.
17:01 Et pourquoi Florence Ray arrive en couverture de Match ?
17:04 Parce qu'il y a un mystère, parce que c'est un personnage incroyable,
17:07 on n'arrive pas à comprendre comment cette fille,
17:10 qui a un regard presque, qui a une adieu presque cherubin,
17:13 qu'est-ce qui a pu se passer ?
17:15 Et à ce moment-là, ça devient un fait divers national, ça devient la une de Match.
17:18 Et d'ailleurs, c'est pas une une,
17:21 c'est une une qui a été problématique pour le journal,
17:24 parce que les lecteurs ne comprenaient pas
17:26 pourquoi nous avions mis une criminelle en une de Match.
17:29 Une criminelle qui pourtant ce soir-là n'aura tiré aucune balle mortelle.
17:33 (Musique)
17:38 Patricia Touranchot est spécialiste du fait divers à Libération.
17:41 Elle a couvert de nombreuses affaires,
17:43 comme celle du gang des postiches ou l'affaire Allègre.
17:46 Elle s'est tout particulièrement passionnée pour l'affaire Florence Ray.
17:49 Cette fille a suscité une passion incroyable.
17:55 Dans les banlieues, certains ont sorti des t-shirts
17:59 à l'effigie de Florence Ray.
18:02 Elle est devenue l'égérie de révolutionnaires,
18:05 de gens qui voulaient mettre le système par terre,
18:08 foutre en l'air le monde, comme elle disait avec Audrey Maupin.
18:11 Et cette fille, avant d'aller de monter au braquage avec son amoureux,
18:15 s'était taillé les cheveux à la sauvageonne,
18:17 comme ça, avec des ciseaux et tout, un peu toute guingouin.
18:20 Et elle avait un air un peu buté.
18:24 Et donc, cette photo a fait le tour du pays.
18:27 Elle a reçu des milliers de lettres qu'elle n'a pas ouvertes.
18:30 Elle a demandé à son avocat de les cramer.
18:33 Moi, j'ai reçu des cassettes, de la musique, des cadeaux pour Florence Ray.
18:38 C'était un délire.
18:40 Les hommages se multiplient.
18:42 De façon presque imperceptible, Claude Chabrol, dans la cérémonie,
18:45 fait un clin d'œil à l'affaire en glissant dans les mains d'Isabelle Huppert,
18:49 un journal avec Florence en couverture.
18:51 C'était pour faire comprendre aux spectateurs le principe de la folie à deux,
18:56 qui est une chose extrêmement importante dans le fait divers.
19:00 La folie à deux, c'est des actes qu'accomplissent des individus,
19:07 mais quand ils sont par deux.
19:10 S'ils étaient seuls, ils ne les accompliraient pas.
19:13 Et Florence Ray, c'était exactement ça.
19:17 Et j'ai voulu montrer que c'était ce genre de folie qui allait amener les deux filles.
19:23 Excusez-moi de vous déranger, je suis Jeanne Marchal, la postière de Saint-Colomb.
19:26 Effectivement, la cérémonie se terminera mal par un massacre collectif
19:30 perpétré par les personnages qui incarnent Isabelle Huppert et Sandrine Bonner.
19:34 Mais il n'y a pas que le cinéma qui s'inspire de l'affaire.
19:40 Romans, bandes dessinées, pièces de théâtre,
19:43 ou musiciens comme les anglo-saxons de The Kills ou MC Solar
19:47 rendent hommage au couple Ray Maupin.
19:49 Ce monde est tiens, bien, c'est toi qui le fais,
19:52 mais de l'affaire au concret, je ne veux pas être ta main, Florence Ray.
19:55 Mais pour son avocate, la réalité du personnage Florence Ray
19:59 était à son lieu de cette marchandisation soudaine.
20:02 J'ai connu Florence Ray à peu près deux mois après les faits.
20:07 Et évidemment, j'avais l'image d'une espèce de passionnariat
20:13 dont la presse s'était fait l'écho.
20:15 Et donc j'avais des idées assez préconçues en venant la voir.
20:19 Et puis donc je suis arrivée à Fleury-Mérogis,
20:21 et puis j'ai découvert une petite chose, toute fragile, toute timide.
20:27 Et c'est vrai que j'étais très surprise,
20:30 parce que ce n'était pas du tout l'image que j'attendais,
20:33 enfin, à laquelle je m'attendais.
20:35 Finalement, elle n'est pas si extraordinaire que ça, cette jeune fille.
20:41 Et d'ailleurs, elle s'est plainte à un moment donné
20:43 qu'on lui donne tant d'importance.
20:46 Elle ne se rendait même pas compte, la veille du procès,
20:49 qu'on allait parler d'elle.
20:51 Moi, j'étais allée voir ses avocats pour avoir des éléments
20:54 sur ce qu'elle faisait en prison, faire un portrait d'elle,
20:56 à publier le jour de l'ouverture de son procès d'assise à Paris.
21:00 Et elle disait "mais je ne veux pas qu'on parle de moi".
21:03 Elle ne se rendait même pas compte de l'intérêt médiatique
21:07 qu'elle suscitait en France.
21:10 Effectivement, elle avait honte.
21:11 Elle avait honte d'être célèbre pour des faits comme ça.
21:14 Elle aurait préféré devenir célèbre pour des choses
21:17 quand même beaucoup plus avoibles.
21:19 Suite à l'épopée meurtrière de Florence et de son amant,
21:22 une affiche du film d'Oliver Stone, "Tueur né",
21:24 avait été retrouvée dans le squat qui les occupait.
21:27 L'histoire d'un couple de tueurs avides de médiatisation.
21:30 Il n'en faudra pas plus à certains journalistes
21:32 pour comparer le couple qui a fait un carton sanglant
21:34 place de la nation et celui du film.
21:38 Mickey et Mallory, le meilleur que ça puisse se passer.
21:40 Ils sont chauds.
21:41 Ils sont chauds, ils sont plus cool.
21:42 Dans le cirque de la vie médiatique,
21:44 Qu'en penses-tu de Mickey et Mallory ?
21:46 Elles sont devenues l'attraction principale.
21:48 Je n'ai jamais vu ça !
21:50 Les tueurs naturels.
21:53 Les médias les ont fait des dieux.
21:56 Elle n'avait rien à voir avec les personnages de "Tueur né".
21:59 Mais je pense que c'est vrai que le film "Tueur né" à l'époque
22:02 dépeignait peut-être une certaine jeunesse.
22:05 C'était facile de faire coller une jeune fille
22:07 avec un jeune homme qui avait commis des faits
22:11 tels qu'on les connaît.
22:13 Et puis de faire coller avec peut-être une image de cinéma.
22:17 Voilà, c'est le côté un petit peu négatif,
22:21 si j'ose dire, de la presse.
22:23 J'ai vraiment eu le sentiment qu'en arrivant au procès,
22:28 les jeux étaient presque faits.
22:30 En fait, il y avait des articles dans tous les sens.
22:34 Mais allant toujours dans le même sens.
22:38 C'est vrai qu'on arrivait, avec Henri Leclerc,
22:42 à devoir défendre une espèce de fille horrible.
22:45 Une tueuse, quoi.
22:47 Ce n'était pas le cas.
22:49 Entre tueurs sans foi ni loi et anarchistes romantiques,
22:52 Florence Ray et Audrey Maupin auront alimenté les spéculations
22:55 pendant de longs mois.
22:57 Au procès, les ressorts éventuellement romanesques de leur cavale
23:00 n'auront pas droit de citer.
23:02 La jeune fille de 20 ans de prison,
23:04 enfermée pendant 15 ans, est sortie en 2009.
23:06 Ce n'est pas du tout une affaire romantique.
23:09 Simplement parce que les gens voient un crime commis,
23:12 ou une série de crimes commis par des jeunes gens,
23:15 un couple, etc., qui partent comme ça.
23:18 Oui, ça peut évoquer chez certains une certaine folie amoureuse,
23:23 enfin, un certain vagabondage romantique.
23:26 Mais en fait, non, pas du tout.
23:29 Donc ça, c'est vraiment une déformation
23:32 et une réinterprétation de la réalité par les médias,
23:36 par les écrivains, par les gens qui ont fait un crime romantique.
23:39 Qu'est-ce qu'un crime romantique ?
23:41 J'ai rarement vu de crime romantique.
23:43 Romantique, l'histoire d'amour tragique
23:48 entre Bertrand Cantat et Marie Trintignant
23:51 l'a pourtant été jusqu'au moment fatal.
23:53 Nous sommes à Vilnius, en Lituanie, fin juillet 2003.
23:57 Le couple, qui se voue une passion réciproque,
23:59 s'est retrouvé sur le tournage de Colette
24:01 que tourne la mère de Marie, Nadine Trintignant, pour France 2.
24:04 Un soir où le couple se dispute à son hôtel,
24:07 Bertrand Cantat frappe violemment Marie,
24:09 qui succombera quelques jours plus tard à ses blessures.
24:12 En une poignée de secondes,
24:14 une histoire d'amour fou a viré au cauchemar.
24:16 Le fait d'hiver le plus people de la décennie
24:18 va défrayer la chronique.
24:20 Frédéric Wezart et Stéphane Boucher
24:22 travaillaient à l'époque pour Le Parisien.
24:24 Ils furent parmi les premiers journalistes
24:26 à se rendre sur les lieux.
24:28 Quand j'étais dans l'avion en partance pour Vilnius,
24:31 j'avais assez peu d'informations, mais on avait l'essentiel.
24:33 C'est-à-dire qu'il y avait eu une dispute,
24:35 qu'elle était quasi perdue,
24:37 et que lui était en garde à vue.
24:39 Et je me suis dit dans l'avion qui m'amenait pour Vilnius
24:41 que c'était quand même une affaire
24:43 avec des ingrédients hors du commun,
24:45 que je pense que je n'aurais pas d'autre affaire
24:48 de ce niveau-là, avec une telle portée émotionnelle,
24:50 à traiter dans toute une carrière, je pense.
24:54 C'est assez unique de voir tout d'un coup
24:56 que le meurtrier et la victime sont deux stars.
25:00 Ça c'est une situation un petit peu unique.
25:02 Et tout d'un coup arrivent deux clans.
25:04 D'un côté vous avez le clan Trintignant,
25:07 mais le clan Quintrignant qui est un clan à rallonge
25:09 puisque Marie a eu plusieurs hommes dans sa vie.
25:12 Vous avez les parents qui sont aussi Nadine et Jean-Louis Trintignant
25:16 qui sont des grands personnages français.
25:18 De l'autre côté vous avez le clan Quanta,
25:21 avec les musiciens de Noir Désir.
25:23 Mais l'une des raisons pour laquelle le fait divers
25:25 va grandir dans le journal, c'est parce qu'il y a
25:27 ces deux personnages très forts qui sont des gens
25:29 que tout le monde connaît.
25:30 Et puis parce qu'il y a aussi l'absurdité de la situation.
25:35 Un antagonisme qui va se poursuivre pendant le procès.
25:38 Un procès à l'issue duquel Bertrand Quanta
25:41 sera condamné à huit ans de prison.
25:43 Quanta était à ce moment-là un homme complètement détruit.
25:45 L'image de Quanta arrivant dans le boxe
25:47 avec son pull trop grand.
25:49 Moi j'avais eu l'occasion de le voir sur scène
25:51 devant un homme qui était un mec flamboyant,
25:53 avec une énergie extraordinaire, un charisme incroyable.
25:56 On se trouvait face à un espèce de gamin
25:58 engoncé dans son pull, complètement shooté
26:01 sur les médicaments.
26:02 C'était assez étonnant.
26:04 Il y avait une haine perceptible dans cette salle
26:06 qui était très prenante.
26:08 Donc c'était difficile de ne pas rentrer là-dedans.
26:11 C'était un procès assez étrange, assez théâtral.
26:13 Quand on est journaliste, notamment dans la presse populaire,
26:15 une affaire avec des ingrédients comme ça,
26:17 c'est sûr qu'évidemment on saute dessus.
26:19 Après, elle nous touche tous,
26:21 que ce soit journaliste, pas journaliste,
26:23 ou simple citoyen.
26:25 Donc il a fallu essayer de travailler en toute objectivité,
26:30 de ne pas aller vers la passion aussi,
26:32 parce qu'on a forcément un avis sur l'histoire.
26:34 Mais ça a été une expérience journalistique assez intéressante.
26:37 Et puis ça a mis tout le monde dans la boucle,
26:39 que ce soit les journalistes de médias,
26:42 de spectacles, de faits divers, de sociétés.
26:46 Donc ça a touché tout le monde.
26:48 Mais je pense que dans l'ensemble,
26:50 la presse a été, malgré le côté passionnel de l'affaire,
26:53 plutôt digne dans cette affaire,
26:55 quoi qu'aient pu en dire certains protagonistes.
26:58 Que s'est-il passé à l'hôtel Domina ce soir-là ?
27:02 L'affaire occupera toute la presse pendant l'été 2003.
27:05 Et en tout premier lieu, les journo-people.
27:08 Il y a un mystère. Qu'est-ce qui s'est passé ?
27:10 Qu'est-ce qu'il y a eu dans la tête de Bertrand Cantat ?
27:13 Est-ce que Marie Tratignan a reçu autant de coups qu'on le dit ?
27:16 Donc il y a un feuilleton, il y a des questionnements
27:19 qui se développent sur des sujets
27:22 qui sont ultra connus et ultra populaires.
27:25 Donc quelque part, effectivement,
27:27 c'est une affaire idéale, si je puis dire,
27:30 pour la presse people.
27:32 En dérapant dans la rubrique faits divers,
27:34 Bertrand Cantat et sa victime Marie Tratignan
27:36 deviennent alors l'espace d'une surmédiatisation galopante
27:39 de simples people dont l'opinion publique va s'emparer.
27:42 C'est vrai que dans cette affaire, vous avez raison de dire
27:45 qu'ils étaient certainement sur un statut de star
27:47 qui sont "descendus" du côté du people.
27:50 Et ça, ça s'explique par plusieurs raisons.
27:52 D'abord parce que ce sont deux personnes connues déjà.
27:54 Et donc ça, la presse people préfère toujours
27:57 avoir deux personnes connues.
27:59 Après, il va y avoir plusieurs choses
28:01 qui vont faire buzzer le people
28:03 et faire que le récit people continue.
28:05 En général, c'est les vacances, évidemment,
28:08 les enfants, les disputes, les séparations,
28:10 les retrouvailles et toutes ces choses-là.
28:12 Tous ces récits, le poids, le travail,
28:14 mais surtout les amours.
28:16 Dans le cas du meurtre, évidemment,
28:18 c'est horrible à dire, mais la mort est ce qui...
28:22 d'abord, ce qui rapproche également du public,
28:24 puisque ça nous arrive tous un jour
28:26 et qu'on se pose tous des questions là-dessus.
28:28 Donc c'est malheureusement un sujet tentant
28:30 et un sujet plaisant.
28:32 Et c'est, hélas, pour les médias,
28:34 le sujet qui marche le mieux.
28:36 Dernier épisode d'un feuilleton
28:38 qui mélange tragédie et people.
28:40 Le suicide en janvier 2010
28:42 de la mère des deux enfants de Bertrand Cantat,
28:44 Christine Aradie.
28:46 Loin de la tragédie, quant à Trintignant,
28:52 certains people pointent à la rubrique "faits divers",
28:54 parfois pour des broutilles montées en épingle
28:56 par les tabloïds.
28:58 Excès de vitesse, alcool au volant,
29:00 comportement provocateur,
29:02 ces people semblent franchir les limites
29:04 uniquement pour que l'on parle d'eux.
29:06 Elles ont pour nom Lindsay Lohan, Paris Hilton,
29:08 Britney Spears ou encore Naomi Campbell.
29:10 Et leurs écarts de conduite font plus souvent
29:12 parler que leurs performances.
29:14 Il suffit de conduire
29:16 comme Lindsay Lohan bourrée
29:18 ou d'insulter
29:20 comme Naomi Campbell
29:22 son personnel de maison
29:24 et voilà, comme ça, on se fait
29:26 remarquer plus ou moins volontairement
29:28 et on est toujours dans les médias.
29:30 Mais parfois,
29:32 la peopleisation a ses limites et suscite
29:34 l'agressivité, comme ici avec Britney Spears,
29:36 s'acharnant contre une voiture de paparazzi.
29:38 *musique*
29:40 *musique*
29:42 *musique*
29:44 La célébrité, c'est quelque chose de très particulier
29:46 qui vous fait ne plus toucher terre.
29:48 Vous n'avez plus de limites
29:50 et n'ayant plus de limites personnelles,
29:52 vous ne voyez plus les limites collectives
29:54 qui sont celles fixées par la loi.
29:56 Du coup, effectivement, il est presque naturel
29:58 que les people dérapent.
30:00 Et si nos propres journaux people sont truffés
30:02 des frasques de ces starlets, c'est parce
30:04 qu'il n'y a aucun risque éditorial.
30:06 C'est vraiment super pratique
30:08 de faire des couvertures sur Britney Spears ou Paris Hilton
30:10 ou des personnalités américaines parce qu'elles n'attaquent pas
30:12 la presse française contrairement aux français.
30:14 Donc on préférera toujours faire une couverture
30:16 un peu limite sur un people américain,
30:18 c'est beaucoup plus facile.
30:20 C'est vraiment la raison la plus simple
30:22 mais la plus véridique et juridique en fait.
30:24 Parce que maintenant, les titres ne veulent vraiment pas
30:26 avoir le minimum de procès.
30:28 Et d'autre part, des personnes comme Amy Winehouse
30:30 ou Paris Hilton et Britney Spears, bien sûr,
30:32 alimentent leur vie tout le temps
30:34 de petites choses comme ça, la prison pour Paris Hilton,
30:36 Britney Spears qui se rase les cheveux
30:38 devant 30 paparazzis.
30:40 Elle-même, en fait, elle crée son propre récit.
30:42 Il n'y a rien à faire que juste à la suivre.
30:44 Et donc en effet, c'est du petit
30:46 fait divers, entre guillemets, mais ça marche très bien et ça vend.
30:48 Et ça vend très très bien.
30:50 Annick Dubier est sociologue à l'université de Genève.
30:52 Elle est l'une des rares universitaires
30:54 à avoir travaillé sur les relations
30:56 entre fait divers et people.
30:58 Le fait divers à l'intérieur
31:00 des nouvelles people a toujours existé.
31:02 Ce qui me paraît plus nouveau
31:04 et relativement
31:06 contemporain,
31:08 c'est ce que nous, on a appelé le phénomène
31:10 des trajectoires trash.
31:12 C'est-à-dire qu'on insiste
31:14 sur un certain nombre de célébrités
31:16 qui connaissent le contraire
31:18 d'une success story.
31:20 Après avoir gravi toutes les marches de la célébrité
31:22 et du succès, ces célébrités-là
31:24 dégringolent et redescendent
31:26 une à une les marches
31:28 du succès dans une espèce de
31:30 unsuccess story.
31:32 Et la presse en rapporte chacune des étapes
31:34 l'une après l'autre.
31:36 On a vu apparaître ce genre de trajectoire
31:38 en particulier chez des jeunes femmes ces dernières années
31:40 que ce soit Britney Spears, Amy Winehouse,
31:42 Lindsay Lohan ou Samina Seri
31:44 dans le champ francophone,
31:46 qui sont ces célébrités qu'on montre
31:48 comme perdant tout ce qu'elles avaient gagné.
31:50 Au fond, ces stars viennent incarner
31:52 les incertitudes du monde contemporain.
31:54 Et là, je dirais qu'il y a
31:56 fait diversification du people,
31:58 dans ce sens-là.
32:00 C'est qu'on voit de plus en plus apparaître
32:02 ces histoires à long terme
32:04 de l'ascension
32:06 et de la chute d'une célébrité.
32:08 Grandeur et décadence
32:10 d'une célébrité, c'est en résumer
32:12 ce qui est arrivé au cinéaste
32:14 Roman Polanski, retenu en Suisse
32:16 pendant dix mois dans l'attente d'une possible
32:18 extradition aux Etats-Unis,
32:20 inculpé de viol sur mineurs.
32:22 Une affaire sur laquelle
32:24 était revenu en 2008
32:26 dans le documentaire "Wanted and Desired".
32:28 Roman Polanski
32:40 rattrapé quelque part par la justice
32:42 des années après,
32:44 avec la question, mon Dieu,
32:46 est-ce qu'il va faire de la prison, est-ce qu'il va être axé ?
32:54 Ça crée...
32:56 C'est le registre de la peur,
32:58 et ce registre-là, ce levier-là,
33:00 est important dans la presse People.
33:02 Des hordes de photographes et de caméramens
33:04 devant la résidence où était assigné
33:06 Roman Polanski, une image
33:08 qui soulevait alors une question.
33:10 Impliqué dans un fait divers,
33:12 un People est-il, au regard de la loi,
33:14 un individu comme un autre ?
33:16 C'est le problème du People qui achète quelque chose
33:18 dans le commerce. Il y a des commerçants
33:20 qui veulent lui faire un cadeau parce que les People
33:22 ont un pub derrière ou je sais pas quoi, et puis il y en a d'autres
33:24 qui vont lui mettre un prix plus cher
33:26 parce qu'il est supposé avoir plus d'argent que les autres.
33:28 La justice ne doit pas se comporter
33:30 comme ça. La justice doit être équitable
33:32 pour tout le monde, quelle que soit la qualité des gens.
33:34 Jusqu'à sa libération
33:38 inattendue en juillet 2010,
33:40 Roman Polanski a reçu le soutien
33:42 d'une grande partie du monde culturel
33:44 et artistique, mais pas sûr que la
33:46 réaction quasi unanime du Gotha du Showbiz
33:48 ait servi la cause du cinéaste.
33:50 Ce qui est certain, c'est que
33:52 le fait d'origine a été renforcé
33:54 et c'est là que le People intervient
33:56 par toute une série d'interventions
33:58 qui sans doute ont plus desservi Roman Polanski
34:00 qu'ils ne l'ont favorisé,
34:02 notamment d'un
34:04 certain nombre de célébrités qui sont
34:06 venues à son secours en évoquant des arguments
34:08 très rapidement, comme ça, et qui au fond
34:10 a fonctionné
34:12 comme défense de quelqu'un qui fait partie du même monde.
34:14 Et je pense que c'est
34:16 en partie ça qui a déclenché la contre-réaction
34:18 et qui a déclenché la violence des attaques
34:20 inverses.
34:22 On reste en Suisse
34:26 pour se pencher sur un cas très particulier,
34:28 celui de l'assassinat du banquier
34:30 Edouard Stern par sa maîtresse
34:32 Cécile Brossat en février 2005.
34:34 Les ingrédients sont sulfureux,
34:36 un financier international retrouvé
34:38 mort tué de quatre balles, le corps
34:40 gainé d'une combinaison en latex,
34:42 un déguisement sadomaso.
34:44 La fin d'une liaison tumultueuse, comme il sera
34:46 dit au procès, dans laquelle Cécile
34:48 Brossat aurait été la proie d'un homme
34:50 humiliant, harcelant et cruel.
34:52 L'accusé ne sera condamné
34:54 qu'à huit ans de prison.
34:56 Une affaire qui a inspiré à l'écrivain
34:58 Régis Geoffray un
35:00 livre sévère. Et
35:02 voilà comment un homme d'affaires uniquement connu
35:04 des cénacles de la finance devient
35:06 une fois mort un possible
35:08 people dont on décortique les pratiques sexuelles.
35:10 L'affaire Stern est intéressante parce que la dimension
35:14 des people est peut-être moins évidente à l'origine.
35:16 C'est effectivement une personnalité qui
35:18 appartenait à une certaine élite
35:20 dont on avait parlé
35:22 même si on n'en avait pas parlé comme on parle
35:24 des people habituellement, mais dont on a
35:26 commencé à parler au moment de
35:28 sa mort et des suites de sa mort
35:30 en reprenant un certain nombre
35:32 d'éléments qui sont typiques du traitement people.
35:34 La description d'un monde enviable,
35:36 d'un monde privilégié
35:38 qui est tout à coup rattrapé par le
35:40 sordide, par la transgression.
35:42 On a des transgressions morales, des transgressions
35:44 légales, bref par le fait
35:46 divers dans sa nature transgressive
35:48 absolue au fond.
35:50 Le fait que ces histoires prennent
35:54 c'est qu'on fait accéder à un
35:56 grand, très grand public
35:58 des récits
36:00 autour des gens riches, des personnes qui ne sont
36:02 pas de notre milieu. Et donc
36:04 c'est une sorte de satisfaction aussi qu'on essaie de
36:06 convoquer chez les gens qui regardent ça, qui disent
36:08 ça, c'est "tiens tu vois, eux aussi
36:10 ont des problèmes, eux aussi tu vois, ça finit
36:12 toujours mal ces histoires là". Donc c'est
36:14 vraiment rassurer une population,
36:16 rassurer le grand public
36:18 en essayant de dévoiler des choses auxquelles on n'aurait
36:20 pas accès. Et donc ces personnes là sont plus
36:22 intéressantes que d'autres, du moins pour les médias
36:24 parce que c'est comme
36:26 s'il y avait quelque chose à cacher parce qu'ils ont de l'argent.
36:28 En novembre 2004, disparaissait
36:34 la fille de l'acteur Roland Giraud, Géraldine
36:36 Giraud et sa compagne, Katia Lherbier.
36:38 Les deux corps seront retrouvés
36:40 calcinés dans le jardin de Jean-Pierre
36:42 Trébert, garde-chasse.
36:44 Emprisonné, mis en examen pour le double
36:46 meurtre, Trébert s'évade en septembre
36:48 2009 de la prison d'Auxerre,
36:50 nargue la police pendant deux mois
36:52 avant d'être repris. Il se suicidera
36:54 en février 2010, trois mois
36:56 avant son procès. Dans cette affaire
36:58 ce qui frappe, c'est le glissement de notoriété
37:00 qui va s'opérer entre Roland Giraud
37:02 et Trébert justement, comme si le
37:04 people n'était pas forcément celui que l'on croit.
37:06 Stéphane Minka est fait diversier,
37:08 il s'est passionné pour l'affaire depuis le début,
37:10 pour VSD, puis pour Paris Match.
37:12 Cette affaire a-t-elle été
37:14 médiatisée au départ
37:16 parce que c'est la fille de Roland Giraud qui
37:18 disparaît ? Oui.
37:20 Il est certain
37:22 qu'un homicide, un double homicide
37:24 de deux femmes
37:26 lesbiennes
37:28 dans toute autre
37:30 région de France et dont les
37:32 parents sont inconnus,
37:34 auraient pu monter, comme on dit,
37:36 en national, c'est-à-dire
37:38 passer vraiment des pages locales
37:40 à quelques
37:42 JT, etc. Mais n'auraient jamais
37:44 dépassé ça. C'est évidemment
37:46 parce que Roland Giraud
37:48 est le père d'une des victimes qu'autant
37:50 de journalistes se sont
37:52 intéressés à l'affaire au départ, oui.
37:54 Si au tout début de l'affaire, la personnalité
37:56 de Roland Giraud occupe tout l'espace
37:58 de ce fait divers particulièrement sordide,
38:00 petit à petit, l'enquête prend
38:02 le dessus. De l'importance ou de la
38:04 personnalité, de la notoriété de
38:06 Roland Giraud, on s'en est débarrassé
38:08 pour s'intéresser à l'affaire elle-même.
38:10 Et au fur
38:12 et à mesure, non plus se
38:14 dire, il s'agit là
38:16 du crime,
38:18 d'un crime concernant une personnalité
38:20 célèbre, mais au contraire il s'agit d'un mystère
38:22 qui va bien au-delà
38:24 de la personnalité
38:26 d'une des victimes.
38:28 C'est au cœur de ce mystère que tous les
38:30 regards se tournent vers l'inquiétant Jean-Pierre
38:32 Trébert, dont tout porte à croire qu'il est le
38:34 meurtrier, même si l'enquête
38:36 piétinera longtemps. Très vite écroué,
38:38 il se fait oublier dans l'attente de son
38:40 procès, avant coup de théâtre,
38:42 de s'évader en septembre 2009.
38:44 La situation bascule, c'est Trébert
38:46 qui devient la célébrité de l'affaire.
38:48 Ce qui s'est passé avec Jean-Pierre
38:50 Trébert c'est un peu étonnant parce qu'il a
38:52 plutôt bien
38:54 négocié
38:56 quelque part son
38:58 repositionnement médiatique
39:00 parce qu'il est apparu
39:02 pas très longtemps mais comme quelqu'un
39:04 finalement plutôt sympathique et
39:06 peut-être en tout cas
39:08 quelqu'un d'innocent aux yeux
39:10 du grand public.
39:12 Il a occupé quelque part aussi
39:14 tout le terrain que ne voulait pas occuper
39:16 Roland Giraud, qui au contraire
39:18 dans cette histoire a toujours été
39:20 très très pudique. Preuve supplémentaire
39:22 de la traique exerce Trébert, sa
39:24 folle cavale inspire toute une série de sketchs
39:26 de plus ou moins bon goût sur le net.
39:28 *Musique*
39:37 J'ai vu Jean-Pierre Trébert
39:39 c'est un beau gosse, plutôt "where"
39:41 *Musique*
39:51 Jean-Pierre Trébert, Jean-Pierre Trébert
39:53 Jean-Pierre
39:55 Jean-Pierre, euh, putain suive-moi
39:57 Jean-Pierre, je te balancerai pas, Jean-Pierre
39:59 Eh, je te jure
40:01 si on réussit à le choper
40:03 tu fais une interview de Jean-Pierre Trébert
40:05 tu refiles à Christophe Ondelat
40:07 y'a moyen de se faire un max de pognon
40:09 fais-moi confiance, je te jure
40:11 Parmi les indices que sème Trébert
40:13 durant sa cavale, des lettres
40:15 pour le journal Marianne et d'autres
40:17 que Stéphane Minka va intercepter
40:19 et faire publier dans Paris Match
40:21 le présumé innocent entretient sa propre
40:23 petite mythologie
40:25 Quand on publie dans Match
40:27 les lettres de Jean-Pierre Trébert
40:29 on fait de l'information brute, on raconte
40:31 en tout cas
40:33 on laisse
40:35 on laisse un
40:37 fugitif s'exprimer
40:39 et ça va très loin
40:41 ça va tellement loin que je finis
40:43 par retrouver Trébert
40:45 en guignol de l'info
40:47 et
40:49 c'est super violent
40:51 T'as fait un mois et demi qu'il échappe
40:53 à 100 gendarmes d'élite
40:55 La forêt vietnamienne est tellement dense
40:57 que tu peux retrouver personne
40:59 Non mais il est pas au Vietnam, il est en Seine-et-Marne
41:01 dans la forêt de Bonbon, près de Melun
41:03 Dans cette forêt, il échappe à 300 hommes ?
41:05 Ah oui
41:07 Je connais ce genre d'individu
41:09 C'est un cauchemar
41:11 fort comme un buffle
41:13 agile comme un singe
41:15 il se déplace qu'en roulet-boulet
41:17 et il a une vision nocturne hors du commun
41:19 Trébert est très maigre, un peu âgé
41:21 et il louche
41:23 Y'a pas eu de concurrence entre Girod d'un côté
41:25 et Trébert de l'autre, lequel sera le plus people
41:27 ça c'est du discours quand on n'est pas dans l'affaire
41:29 Je comprends qu'on se dise ça
41:31 à n'importe qui
41:33 à la terrasse d'un bistrot, à se raconter
41:35 à être en compte
41:37 il est encore plus connu que l'acteur maintenant
41:39 Toujours est-il que Jean-Pierre Trébert
41:41 aura réussi, presque malgré lui
41:43 à accéder à un statut d'inculpé
41:45 d'exception, auréolé de mystère
41:47 et de soufre
41:49 il a réussi à devenir un personnage médiatique
41:51 en s'adressant aux médias, en jouant avec les médias
41:53 et donc finalement, là on est moins dans le people
41:55 que dans le médiatisé tout simplement
41:57 Trébert, c'était un personnage
41:59 qui a habité selon les personnes qui parlaient de lui
42:01 qui était à la fois un Robin des bois
42:03 un héros
42:05 le plus pourri
42:07 on a tout dit sur lui
42:09 et en fait ça faisait vente, ça marchait bien
42:11 et en plus il racontait sa vie dans Paris Match
42:13 et il parlait pas au moindre des médias
42:15 donc il a lui-même
42:17 en fait réussi à gérer
42:19 cette image média et c'est vrai que ça a créé
42:21 du récit jusqu'à la fin
42:23 jusqu'à la fin, c'est à dire jusqu'à son suicide
42:25 qui laisse la famille Giraud
42:27 ainsi que la justice sur un point d'interrogation
42:29 qui était et qu'a réellement
42:31 fait Jean-Pierre Trébert, aucun magazine
42:33 People ne pourra jamais nous le révéler
42:35 Et puis au delà de tous ces crimes qui font
42:41 l'actualité et mettent leur protagoniste en lumière
42:43 existe une catégorie de meurtriers
42:45 qui sans être vraiment des people
42:47 exercent une fascination très particulière
42:49 sur l'opinion publique
42:51 il s'agit des tueurs en série
42:53 ils ont pour nom Thierry Polin
42:55 18 meurtres, Francis Holm
42:57 6, Guy Georges
42:59 7, Patrice Allègre 5
43:01 Emile Louis 7
43:03 ou encore Michel Fourniret, 9 meurtres
43:05 Nous sommes au centre psychiatrique du bois de Bondy
43:09 dans la région parisienne
43:11 c'est là qu'officie le docteur Daniel Zaguri
43:13 les tueurs en série il connaît bien
43:15 il a en effet été expert psychiatre
43:17 au procès de Guy Georges, Patrice Allègre
43:19 et Michel Fourniret et il se défend
43:21 des idées reçues sur le sujet
43:23 On leur attribue des pouvoirs
43:25 et des qualités
43:27 qu'ils n'ont pas
43:29 et ce faisant
43:31 on prend un risque parce que
43:33 on s'identifie
43:35 à la toute puissance imaginaire
43:37 qui est la leur au moment
43:39 du passage à la criminelle
43:41 on croit toujours plus intelligents qu'ils ne sont
43:43 donc on leur attribue
43:45 des désirs
43:47 des plaisirs, des jouissances
43:49 des motivations
43:51 qui ne sont pas vraiment
43:53 celles qui les font aller sur le chemin du crime
43:55 et
43:57 c'est un petit peu
43:59 si vous voulez
44:01 cette démythification
44:03 qui moi
44:05 m'a intéressé
44:07 Une démythification à laquelle s'emploie
44:09 depuis plus de 30 ans Stéphane Bourgoin
44:11 spécialiste des tueurs en série
44:13 auquel il a consacré de nombreux ouvrages
44:15 selon lui la pipolisation du serial killer
44:17 n'existe souvent
44:19 que dans la tête du tueur lui même
44:21 Avec les tueurs en série on est confronté
44:23 à un paradoxe
44:25 ils n'ont
44:27 aucune envie de se faire
44:29 arrêter contrairement à ce que peuvent dire
44:31 un certain nombre de psychiatres
44:33 mais en même temps
44:35 ils rêvent d'acquérir
44:37 cette notoriété
44:39 d'être reconnus pour leur
44:41 "oeuvre" criminelle
44:43 parce qu'ils ont ce désir
44:45 de toute puissance
44:47 de devenir l'égal de Dieu
44:49 d'être reconnus comme les plus forts
44:51 parce que dans leur vie quotidienne
44:53 ce sont des êtres totalement
44:55 médiocres, totalement
44:57 négatifs qui n'ont jamais rien
44:59 construit de positif dans leur existence
45:01 La plupart des tueurs en série
45:03 la plupart ont un ego
45:05 surdimensionné
45:07 et cherchent à faire part à les deux
45:09 La contrepartie c'est qu'à un moment
45:11 ils se font choper
45:13 certains le cherchent même
45:15 et à ce moment là ils deviennent célèbres
45:17 et à ce moment là on fout du pari
45:19 et pour les people il y a aussi des people
45:21 qui jouent ce jeu là
45:23 qui s'exposent volontairement
45:25 qui laissent raconter des histoires
45:27 autour d'eux
45:29 parce que ça les flatte et parce que ça leur permet d'exister
45:31 C'est vrai qu'on a starifié les tueurs en série
45:33 récemment, moi j'ai fait un documentaire
45:35 sur Fourniret il n'y a pas très longtemps
45:37 et c'est vrai que c'est devenu
45:39 une sorte de
45:41 people du crime quelque part
45:43 par la durée dans laquelle
45:45 il a tué
45:47 son mode opératoire, le fait qu'il tue avec sa femme
45:49 enfin c'est un personnage hors normes
45:51 mais qui est devenu un personnage public
45:53 Pédophile, violeur et assassin
45:55 Michel Fourniret est probablement
45:57 le pire de tous les tueurs en série
45:59 Surnommé l'ogre des Ardennes
46:01 il a commis ses forfaits de Belgique en France
46:03 pendant plus de 15 ans
46:05 Ouliyama Benahim au cours d'une planque
46:07 l'a photographié pour Paris Match pendant une garde à vue
46:09 L'occasion de troquer son costume de paparazzi people
46:11 pour une tenue camouflage
46:13 de fée diversier
46:15 Voilà c'est cette photo là
46:19 qui avait fait l'apparu
46:21 Quand je l'ai vu en face de moi
46:25 pour moi c'était, je veux dire c'était ma cible
46:27 je veux dire c'était ma cible
46:29 c'est le mec que je devais shooter
46:31 notre mission c'était d'avoir sa tronche à Fourniret
46:33 donc moi j'ai appuyé sur le bouton
46:35 je lui ai dit putain ça y est je l'ai
46:37 on va le publier ce salopard là
46:39 j'étais content de l'avoir
46:41 Fascination, répulsion
46:43 le tueur en série inspire des sentiments contradictoires
46:45 mais la pipolisation
46:47 prend une tournure inquiétante
46:49 lorsque ses prédateurs suscitent de singulières passions
46:51 Reconnu coupable de pédophilie
46:53 de viol et d'assassinat
46:55 dans les années 90
46:57 le truc du trou est de cela
46:59 Face à du trou qui tue
47:01 plusieurs jeunes filles et des enfants
47:03 on se dit que c'est le
47:05 tout le monde va le rejeter
47:07 il reçoit des lettres d'amour en prison
47:09 aujourd'hui, de même que par exemple
47:11 en Belgique il y a deux ans
47:13 il y a un jeune garçon qui a été tué des enfants
47:15 dans une crèche, c'est donc des jeunes
47:17 enfants de 3 ans
47:19 il reçoit maintenant des lettres d'admiratrices
47:21 il y a des sites web qui lui sont consacrés
47:23 de personnes qui trouvent que c'est un geste de défi
47:25 de révolte, etc.
47:27 c'est un peu incompréhensible mais
47:29 c'est une force de fascination qui existe
47:31 Des serial killers,
47:33 Stéphane Bourgoin en a interviewé plus de 70
47:35 parmi eux Gérard Schaeffer
47:37 accusé du meurtre de 34 femmes
47:39 alors qu'il exerçait la profession de policier
47:41 c'est un tueur qui
47:43 cumulait absolument
47:45 toutes les perversités possibles
47:47 et même inimaginables
47:49 il a par la suite
47:51 publié des textes
47:53 de fiction qui racontent
47:55 ses propres fantasmes
47:57 nécrophiles
47:59 sous forme de nouvelles et qui ont été
48:01 publiés
48:03 et ensuite vendus
48:05 des gens m'ont écrit
48:07 "Waouh, c'est terrible, c'est dégueulasse
48:09 peux-je en avoir plus ?"
48:11 et j'ai dit "Waouh, c'est vraiment bizarre"
48:13 des gens l'ont écrit et ils l'aiment
48:15 ils en veulent plus et ils disent "c'est horrible"
48:17 une fille a écrit
48:19 "J'étais tellement effrayée
48:21 que je ne pouvais dormir pendant 3 jours
48:23 avez-vous un autre livre qui sort ?"
48:25 et j'ai dit "qu'est-ce qui se passe ici ?"
48:27 Dans ses livres, Schaeffer parlait
48:29 aussi d'autres serial killers
48:31 comme Ted Bundy ou Otis Toole
48:33 notamment pour en détailler quelques pratiques
48:35 très très morbides
48:37 La sauce barbecue d'Otis Toole
48:57 en vente, la recette en détail
48:59 sur internet, rien d'étonnant à cela
49:01 il existe tout un marketing
49:03 autour des tueurs en série aux Etats-Unis
49:05 Ceci par exemple
49:07 c'est des cartes
49:09 comme par exemple
49:11 en France on a les paninis avec les footballeurs
49:13 là il y a
49:15 les trading cards
49:17 puisque c'est fait pour des échanges
49:19 où vous avez les tueurs en série
49:21 les plus célèbres
49:23 Ed Gein qui a inspiré Psychose
49:25 Massacre à la tronçonneuse
49:27 et le personnage de Buffalo Bill dans le Silence des Agneaux
49:29 Ici vous avez
49:31 un t-shirt d'un goût douteux
49:33 qui est à l'effigie
49:35 de John Wayne Gassie
49:37 un tueur en série
49:39 gay qui a tué 33 adolescents
49:41 et qui a été exécuté
49:43 sur la chaise électrique dans l'Illinois
49:45 Un article
49:47 que l'on peut trouver sur le net
49:49 au même titre que divers vêtements et accessoires
49:51 t-shirt à l'effigie de
49:53 Charles Manson qui s'est rendu
49:55 célèbre pour avoir fait tuer Sharon Tate
49:57 la femme de Roman Polanski en 1969
49:59 t-shirt mais aussi
50:01 sac de plage, mug
50:03 taie d'oreiller ou encore
50:05 le pire de tous
50:07 bodies et bavoir en coton bio
50:09 pour les bébés
50:11 Le fait divers fait vendre c'est indéniable
50:15 même les victimes peuvent en profiter
50:17 c'est le cas de Natasha Kampusch
50:19 22 ans, cette autrichienne enlevée
50:21 à l'âge de 10 ans est séquestrée pendant 8 ans
50:23 un temps elle a animé
50:25 un talk show à la télévision
50:27 et sa vie sera bientôt portée à l'écran
50:29 Kate Winslet a été contactée pour jouer son rôle
50:31 Autres films à venir en France cette fois-ci
50:35 présumés coupables avec
50:37 Philippe Toretton sur Alain Maréco
50:39 l'huissier impliqué dans l'affaire d'Outreau
50:41 ou encore Omar Mathieu et des Roches d'Isème
50:43 avec Samy Bouajila dans la peau d'Omar Haddad
50:45 Et puis preuve s'il en était encore besoin
50:51 de la traie pour le fait divers
50:53 de l'exposition "Crime et Châtiment"
50:55 exploration du regard des artistes sur le mal
50:57 au fil des siècles
50:59 présentée de mars à juin 2010 au musée d'Orsay à Paris
51:01 dans la file d'attente
51:03 une dame nous confirmait l'intérêt du public
51:05 pour le sujet
51:07 On est attirés par le crime
51:09 C'est peut-être comme ça
51:11 mais c'est vrai que ça fascine un petit peu
51:13 le crime
51:15 La fascination pour le crime a donc traversé le temps
51:21 aujourd'hui elle s'expose au musée
51:23 la pipolisation ultime du fait divers
51:25 est décidément entrée dans les mœurs
51:27 de la police
51:29 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
51:32 [Musique]