Face à l'Info Été (Émission du 30/07/2023)

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Tous les soirs et pendant tout l'été, les chroniqueurs de #FacealinfoEte débattent de l'actualité du jour de 19h à 20h

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00:00 Bonsoir à toutes et tous, ravis de vous retrouver pour un nouveau numéro de Face Info l'été qui démarre dans un instant, mais avant cela, c'est le rappel de l'actualité avec Félicité Kindoqui, bonsoir à vous.
00:10 Dans le Tarn-et-Garonne, un homme de 49 ans s'est immolé par le feu hier près du domicile de son ex-compagne à Montauban. L'homme avait interdiction de l'approcher. La femme a alors activé son téléphone, grave danger.
00:21 Et c'est en voyant les policiers arriver qu'il s'est aspergé d'essence en pleine rue avant d'allumer le feu. Une enquête a été ouverte pour établir les circonstances de cette tentative de suicide.
00:30 Du côté de la Russie, les démonstrations des forces navales de Vladimir Poutine lors de l'annuelle parade de la marine russe ont eu lieu à Saint-Pétersbourg.
00:37 Le chef du Kremlin a tenu un discours offensif devant un parterre de chefs d'État africains. Il a déclaré continuer de renforcer la flotte nationale et a assuré que son peuple est capable de tenir et de défendre les frontières maritimes.
00:49 Il est l'incontestable leader au championnat du monde de Formule 1. Le néerlandais Mark Verstappen a facilement remporté le Grand Prix de Belgique aujourd'hui.
00:58 Il s'agit de son huitième succès consécutif. Il s'est imposé sur le circuit de Spa-Francorchamps devant son coéquipier Sergio Pérez et devant le monégasque Charles Leclerc, parti en pole position mais incapable de rivaliser.
01:12 Verstappen toujours exceptionnel, sublimé bien évidemment par les commentaires de notre ami qu'on embrasse Julien Fébreu et que vous avez le plaisir d'écouter à chacun, chacune des courses diffusées sur Canal+.
01:23 Au sommaire de cette émission, le Niger, des centaines de manifestants se sont rassemblés devant l'ambassade de France après le coup d'État. Un rassemblement dénoncé par Paris.
01:33 Emmanuel Macron prévient, il ne tolérera aucune attaque contre la France et ses intérêts et menace en cas de violence de répliquer de manière immédiate et intraitable comment la France est-elle en train de perdre pied dans la région du Sahel.
01:44 Comment l'expliquer et peut-on éviter une intervention armée ? L'analyse de Régis Le Sommier dans cette émission.
01:50 Les bouquinistes des Quai de Seine, sacrifiés des Jeux Olympiques. La préfecture de police de Paris estime indispensable l'enlèvement de ces célèbres boîtes vertes.
01:57 Un avis que ne partage pas l'association des bouquinistes de Paris. La mairie propose de prendre en charge l'enlèvement, la repose des boîtes et la rénovation, assez frais, de celles qui auraient pu être abîmées durant l'opération.
02:09 Pas de quoi calmer la colère de plusieurs d'entre eux qui sont prêts à s'enchaîner sur leurs boîtes s'il le faut.
02:14 Comment en est-on arrivé là ? Comment expliquer cette polémique ? Et plus intéressant peut-être, qu'est-ce que cela dit de notre époque ? L'analyse dans un instant de Paul Melun.
02:22 Restez bien avec nous, en fin d'émission nous reviendrons sur la communication d'Emmanuel Macron.
02:27 Une communication qui se veut in, branchée, décalée, peut-être trop, au risque de perdre une partie de la population.
02:33 Emmanuel Macron, président, influenceur qui voulait être un président cool. Nous verrons cela avec Nathan Devers. Face à l'info, c'est dans un instant. A tout de suite.
02:44 [Musique]
02:56 Bonsoir à toutes et tous. Face à l'info, début avec autour de cette table Régis Le Sommier, directeur de la rédaction d'Omerta, Nathan Devers, écrivain et Paul Melun, essayiste, qui nous rejoindra dans un instant.
03:08 Réjouissons cette émission bien évidemment avec ce qui se passe en Afrique, avec vous Régis Le Sommier.
03:13 Alors d'abord Régis, un point peut-être avant d'entamer le débat autour de ce qui se passe au Niger, sur les événements de ces dernières heures.
03:21 Oui, ce qui s'est passé aujourd'hui, alors vous l'avez signalé, une foule importante qui s'est rassemblée devant l'ambassade de France, qui a tenté d'y pénétrer, qui a mis partiellement le feu.
03:31 Il y a eu des jets de pierres, le service de sécurité de l'ambassade de France a riposté. Il y a eu aussi des forces de l'ordre nigériennes aussi qui ont tenté de disperser la foule.
03:42 Alors les manifestants étaient rassemblés, ils étaient par milliers, ils brandissaient des slogans soutenant les putschistes, hostiles à la France, ils agitaient des drapeaux russes,
03:51 mais surtout certains réclamaient notamment, et on va voir que c'est important pour la suite de ce que je vais vous dire, la fermeture de toutes nos bases dans le pays.
03:58 Ça c'est vraiment la grande crainte et on voit que les manifestants sont déterminés, en tout cas ceux qui soutiennent les putschistes, à ce que les Français partent.
04:07 Alors il y a eu aussi, en urgence aujourd'hui, à Abuja au Niger, un sommet convoqué de la CDAO, donc la Communauté des Nations d'Afrique de l'Ouest, qui a fixé un ultimatum, ils ont dit au Niger,
04:20 vous avez une semaine pour rétablir le président élu démocratiquement Mohamed Basoum dans ses fonctions, et ils ont exigé un retour complet à l'ordre constitutionnel.
04:30 En même temps ils ont fermé toutes les frontières de la CDAO au Niger, imposé un véritable blocus économique, suspension des vols, plus de transactions commerciales,
04:41 plus de transactions énergétiques avec le Niger, gel des avoirs bancaires, etc. Mais en dehors de ces moyens réels, de pression réelle, en dehors de ces sanctions économiques,
04:50 que peuvent-ils faire ? On sait que le Niger rejoint le club des exclus, il y en a, je vais en citer trois, le Burkina Faso, le Mali et la Guinée, qui avaient été exclus pour les mêmes raisons,
05:01 de putsch par la CDAO et l'Union africaine, sans que ça se sanche quoi que ce soit au comportement de leurs dirigeants.
05:07 Une différence cependant par rapport aux autres coups d'État, et on l'a évoqué, la menace d'un recours à la force si nécessaire.
05:16 C'est l'opération de la dernière chance pour la France au Niger ?
05:19 Alors c'est l'opération de la dernière chance, on va dire, les intérêts français sont en effet en péril. Pourquoi ? Parce que pourquoi cette situation est critique au Niger,
05:30 particulièrement pour la France en ce moment ? C'est qu'en fait c'est tout l'édifice de l'action militaire française et diplomatique dans la région qui est en péril.
05:37 D'abord les deux putsch que j'ai évoqués, dans les deux pays voisins, le Mali et le Burkina Faso, ont consacré le repli de l'armée française sur le Niger.
05:47 À Niamey aujourd'hui se trouvent 1500 de nos soldats sur la base aérienne près de l'aéroport, et même si le commandement des opérations au Sahel se trouve à N'Djamena au Tchad,
05:56 le Niger est la plaque tournante de l'essentiel des activités de la région, et en particulier celles liées au contre-terrorisme dans la fameuse zone des trois frontières,
06:05 vous savez là où se concentrent la plupart des groupes terroristes.
06:08 Burkina Faso, Niger, Mali.
06:10 Exactement, il y a aussi le nord du Mali, mais aujourd'hui c'est beaucoup plus difficile de l'atteindre, mais enfin en tout cas il y a toujours des activités dans cette région.
06:19 Alors ce qui est inquiétant dans l'évolution, c'est qu'on sait qu'au Mali, ça avait commencé de la même façon, il y avait eu un coup d'État, coup d'État condamné, séquestration du président, menace de la CDAO, fermeture des frontières, etc.
06:36 Et puis progressivement on avait fini par s'habituer aux putschistes, et jusqu'à ce que ceux-là même déclarent que nous devions partir.
06:45 C'est-à-dire qu'il a fallu quasiment moins de deux ans pour que l'ensemble de ces événements confluise au fait que l'armée française a dû quitter les lieux au Mali.
06:55 Voilà, 18 août 2020, coup d'État qui instaure le colonel Assimi Goïta à la tête du Mali, qui destitue notre poulain, Ibrahim Boubacar Keïta,
07:10 celui qui avait été mis par la France, enfin en tout cas qui avait appuyé l'intervention française dès 2013, donc destitution d'un poulain de la France,
07:19 et mise à la tête de l'ancien chef des... Goïta était l'ancien chef des forces spéciales maliennes, à la tête avec un carteron de colonels autour de lui,
07:30 exactement de la même veine que ceux qu'on a aujourd'hui au Niger.
07:34 Donc progressivement, on tente de s'accommoder, Wagner rentre dans l'équation, capitalisant, puisqu'on le sait, les Russes ont des propositions, ils sont derrière, etc.
07:46 Et nous, on est là, et bien on subit quelque part, et on va quelque part, à un moment, être obligé de partir.
07:53 Emmanuel Macron décrète la fin de Barkhane en juin 2021, et immédiatement, la jeune qui n'attend que n'importe quel prétexte pour dire "la France nous abandonne en plein vol devant la tribune de l'ONU,
08:07 le Premier ministre Shoïga Maïga avait déclaré ça", et progressivement les relations s'envenient jusqu'à ce que la France ne puisse plus rester sur place.
08:16 Il n'est pas sûr que les choses se passeront de cette façon, mais en tout cas, c'est extrêmement inquiétant, c'est le sentiment anti-français qui aujourd'hui s'est développé, on l'a dit, il est capitalisé.
08:29 Justement, vous connaissez bien le Mali, vous y êtes rendu à plusieurs reprises, est-ce qu'on peut faire un parallèle par rapport à ce qui s'est passé, ce qui potentiellement peut se passer au Niger,
08:36 avec ce sentiment anti-français, c'est peut-être ce qui nous a le plus choqués aujourd'hui sur cette manifestation devant l'ambassade française.
08:43 C'est ce sentiment, voilà, avec des drapeaux français brûlés.
08:47 Ce qui est assez terrible, moi j'ai connu le Mali, le Niger, j'ai été beaucoup en opération avec l'armée française, quasiment une fois par an, sur une période de 6 ans, 6-7 ans,
08:59 pendant l'opération Barkhane, j'y ai noté au départ une convivialité qui existait réellement avec les soldats français, les enfants hurlaient "François Hollande",
09:10 enfin ça c'était la période 2013, l'opération Serval, peut-être celle d'ailleurs, faut peut-être regretter aujourd'hui, on aurait peut-être dû s'arrêter là,
09:18 on aurait peut-être dû trouver une transition quitte à revenir après avec l'arme de la force.
09:22 Nous avions vaincu les djihadistes, nous avions vaincu les fameuses colonnes de Touareg et de militiais libyens qui déferlaient sur Bamako,
09:30 et il y avait eu une véritable victoire, et au Mali nous avions une capitale sympathie énorme.
09:34 J'ai vu au niveau de la population, avec l'armée française, ce sentiment se dégrader.
09:39 Alors les opérations que faisait l'armée française, c'était des opérations d'occupation de police, des occupations de fouilles de villages,
09:45 c'est jamais agréable quand vous avez, vous soulevez toutes les casques, vous êtes au milieu des gens, vous sentez que vous perturbez l'écosystème,
09:53 c'est pour la chasse aux djihadistes, c'est pour essayer de les traquer, parfois vous avez de la chance et vous arrivez à en trouver,
09:59 mais le but c'est véritablement de chasser ces groupes djihadistes, de les mettre en mouvement pour ensuite, en général c'est comme ça que les opérations se passaient,
10:08 appeler Niamey justement, où se trouvent les mirages pour qu'ils viennent bombarder les colonnes de motos qu'on avait pu mettre en mouvement.
10:16 Donc ça a toujours été, et progressivement, la dernière fois que je me suis rendu dans la région en 2021,
10:23 avec l'armée française, il n'y avait plus du tout d'accueil dans les villages, nous étions, c'était une indifférence,
10:31 et on sentait bien que ce sentiment il n'y restait plus que, je vais vous dire, j'ai gardé une image assez pathétique de cette époque-là,
10:39 où nous avions entraîné l'armée malienne, enfin les forces spéciales françaises, c'était le premier RPIMA, entraînaient l'armée malienne,
10:46 il y avait eu une grosse séquence de tir, et les gamins, à la fin de la séquence de tir, des villages voisins, venaient récupérer les douilles,
10:53 les étuis des balles, pour en faire, justement, pour profiter du cuivre, ils attendaient que la troupe soit partie pour venir récupérer.
11:03 Voilà, et je me suis dit quand même, philosophiquement, que le déchet de nos armes, en fait, de nos cartouches,
11:10 ça soit ça qu'on laisse à des villages qui semblaient totalement déconnectés avec l'activité que faisaient les français à l'époque.
11:17 La situation sécuritaire s'est dégradée en plus de ça, et le problème c'est qu'aujourd'hui, il y a eu un cumul de grogne auprès,
11:29 il y a des problèmes, des problèmes cruciaux dans le pays, des problèmes économiques, je ne parle pas que du Niger, le Mali c'est pareil,
11:36 il y a un problème d'emprise, de manque d'emprise, justement, de l'État central sur certaines provinces qui échappent complètement au contrôle,
11:44 et la France est accusée quelque part de ça, alors que ce n'est pas elle nécessairement qui en est responsable, mais elle est restée trop longtemps,
11:51 et le problème de rester trop longtemps, c'est qu'on vient de force libératrice, on se transforme en force d'occupation,
11:57 et ça veut dire qu'au bout d'un moment, on ne veut plus de vous, et vous êtes responsable de tous les maux.
12:02 C'est extrêmement intéressant l'analyse que vous faites sur la situation, notamment du fait que vous êtes rendu sur place à de nombreuses reprises,
12:09 mais la question qu'on se pose ce soir, c'est qu'est-ce qui va se passer ensuite, c'est-à-dire, est-ce que ce qui se passe actuellement au Niger,
12:16 on se dirige vers un scénario "à la malienne", et quelles conséquences cela peut-il avoir sur notre pays, sur notre capacité justement à tenter de réguler les questions de sécurité en Afrique ?
12:28 La question c'est, oui, on sait que les Russes sont en embuscade, je ne vais pas le rappeler, il n'y a pas que les Russes d'ailleurs,
12:35 en termes économiques au Niger, les Turcs sont en embuscade depuis très longtemps, d'ailleurs eux qui ont recueilli le dernier terminal de l'aéroport de Niamey,
12:44 donc ils ont des investissements, il y a plusieurs pays, les Chinois aussi, enfin bref, on n'est pas les seuls à être là-bas,
12:53 et beaucoup d'ailleurs se réjouissent de nos déboires, en se disant qu'ils vont en profiter économiquement,
12:58 le problème étant que si l'instabilité continue à s'aggraver, là ça posera des problèmes justement pour ces pays-là, pour y trouver un débouché économique.
13:07 Donc nous, le problème principal et crucial en ce moment, et on le dit peu je trouve, c'est que va devenir notre base, que va devenir notre base aérienne à Niamey,
13:16 qui est une base, je le rappelle, j'ai évoqué, qui comporte la capacité d'intervention par mirage justement pour frapper des cibles djihadistes une fois qu'elles ont été repérées,
13:25 mais aussi tout le dispositif pour repérer ces mêmes cibles djihadistes, notamment les drones Reaper qui décollent de cette base,
13:33 et juste à côté de l'endroit où décollent ces drones, vous avez une base américaine qui elle-même fait du renseignement, de la surveillance, etc.,
13:42 une partie des effectifs de la force américaine pour l'Afrique de l'Ouest.
13:48 Donc si vous voulez, c'est tout l'édifice occidental et toute la capacité d'intervention pour traiter des menaces djihadistes qui risquent de disparaître
13:56 si nous sommes contraints, et puis même, sentimentalement, et je vais dire au niveau de ce que représente la France,
14:03 il y a quand même, je regardais aujourd'hui, je suis tombé sur une archive de l'INA où on voit mars 1970, c'était à Niamey se tenait le premier sommet de la francophonie.
14:16 Donc si tout doit s'arrêter, quand même Niamey a été très important pour nous, a été très important pour la France.
14:22 Est-ce que, voilà, j'ai trouvé que ces images étaient assez cruelles au vu de ce qui se passe et au vu de ce qui est dit par les manifestants aujourd'hui,
14:30 de ce que représente la France pour eux ?
14:33 Oui, c'est fou, les bouleversements en termes de géopolitique qui ont eu lieu ces dernières années,
14:37 lorsque l'on voit justement le sentiment de la population vis-à-vis de la France dans les années 70,
14:43 par rapport à ces images terribles qu'on diffuse depuis le début de cette journée.
14:47 Vous souhaitiez réagir avant d'entamer votre chronique sur un tout autre sujet, bien évidemment.
14:51 C'est toujours compliqué de faire des transitions avec des sujets aussi complexes.
14:56 On abordera avec vous dans un instant Nathan Devers, le pape François.
15:00 Vous donnerez des nouvelles du pape François, mais premièrement sur ce sujet peut-être.
15:04 Alors sur ce sujet, contrairement à Régis Le Sommier, j'ai une forme d'illégitimité,
15:08 puisque je n'ai jamais mis les pieds ni au Mali ni au Niger.
15:11 Mais comme tout le monde, c'est toujours une tragédie de voir une ambassade française attaquée,
15:17 des drapeaux français brûlés, s'il y a quelque chose qui est insupportable.
15:21 Je dirais la chose suivante, c'est que moi je veux bien qu'on fasse absolument toute l'autocritique du monde.
15:25 Et je suis d'accord avec vous quand vous dites qu'une force de libération ne peut pas devenir une force d'occupation
15:31 sans inverser les sentiments qu'elle suscite.
15:33 J'ai lu avec intérêt aussi les analyses de Gérard Raraud, aujourd'hui le diplomate,
15:37 qui dit qu'il faut totalement repenser notre présence en Afrique, avec de la discrétion,
15:41 avec moins d'arrogance et faire une sorte de table rase de ce qui est fait.
15:45 Et des missions plus courtes.
15:46 Et des missions.
15:47 Et des fois que ça, Michel Goya également, l'historien militaire, dit qu'on aurait peut-être dû rester,
15:51 beaucoup de gens conviennent qu'on aurait dû rester moins longtemps.
15:54 En termes de présence militaire, et trouver une solution pour éventuellement revenir avec la puissance que nous avons,
16:03 mais justement éviter ce piège qu'ont subi les Américains en Irak, en Afghanistan,
16:10 et que subit finalement toute armée qui reste trop longtemps dans un pays.
16:14 Je suis d'accord avec ça, mais d'un autre côté, j'ai quand même l'impression qu'il y a quelque chose de fondamentalement hypocrite
16:19 dans ce discours anti-français.
16:20 Mais je ne dis pas ça parce que je suis français et que je suis blessé en tant que français.
16:22 C'est que si vous voulez, il y a quelque chose d'hypocrite à dénoncer le néo-colonialisme supposé de la France,
16:27 pour ensuite faire l'apologie de forces d'occupation ou d'influence qui sont pour le coup bel et bien coloniales
16:33 avec une brutalité sans limite, que ce soit du côté de l'influence turque, que ce soit du côté de l'influence russe,
16:39 et que ce soit du côté de l'influence chinoise.
16:41 Donc si vous voulez, je pense qu'il y a quelque chose, vraiment une contradiction énorme,
16:44 à dire que les Français sont trop présents en Afrique pour ensuite, ce sont les mêmes qui disent ça,
16:48 et qui veulent remettre les pays concernés à des puissances étrangères, beaucoup plus invasives.
16:53 C'est un sujet extrêmement intéressant, on aura l'occasion d'y revenir assez longuement,
16:59 notamment avec vous dans l'heure des pros.
17:01 Ce ne sera pas moi, ce sera Gauthier Lebret tout à l'heure, mais sujet passionnant,
17:06 et on verra l'évolution justement de la situation avec vous au Niger,
17:09 et les potentielles conséquences pour nous, y compris sur le territoire national,
17:14 puisque bien évidemment, notre présence en Afrique est notamment pour lutter contre le djihadisme sur place.
17:20 On évoque un tout autre sujet avec vous. Paul Melun, vous vouliez nous donner des nouvelles du pape François.
17:25 Oui, exactement. Alors on se souvient qu'il avait eu quelques soucis de santé récemment,
17:29 mais il va mieux, il sera en France.
17:31 Nathan Devers, j'ai dit.
17:32 Nathan Devers, mais ce n'est pas grave.
17:33 Parce que je pense à Paul Melun, qui n'est pas encore avec nous, qui a un petit retard,
17:37 c'est pour cela, et cela m'inquiète.
17:39 C'est pour cela, cela nous inquiète, et donc effectivement, Nathan Devers.
17:42 Moi aussi, je regardais, il vient de m'envoyer un texto, il me dit, je pense à lui.
17:46 Le pape François, il arrive.
17:48 Et donc le pape François viendra à Marseille le 22-23 septembre,
17:52 pour un programme qui est de faire une sorte de sommet de la Méditerranée,
17:57 donc il va rencontrer des éffets de toute la Méditerranée et des jeunes.
18:00 Il va faire une prière à la basilique Notre-Dame, une prière pour les marins naufragés et les migrants,
18:05 une messe au stade Vélodrome, et puis il va y avoir une rencontre avec le président Emmanuel Macron,
18:10 qui n'était pas prévu initialement, mais qui a lieu dans un contexte très symbolique aussi pour Emmanuel Macron,
18:15 qui est qu'il a tout un projet sur Marseille, qui est le projet Marseille en grand.
18:19 Donc évidemment, à partir du moment où le pape choisit la ville de Marseille,
18:22 c'est extrêmement symbolique.
18:23 Lui qui est un pape qui est quand même très, qui a pris énormément la parole
18:26 sur les questions relatives à la Méditerranée, notamment, il choisit cette ville-là.
18:29 C'était important, je pense, pour le président Macron de le rencontrer.
18:32 Disons-le très clairement à nos téléspectateurs, si vous voulez nous parler ce soir du pape François,
18:36 au-delà de son déplacement prochainement dans la ville de Marseille,
18:39 c'est pour nous parler d'un autre sujet, et notamment sa lettre apostolique sur Pascal.
18:45 Oui, c'était de ça vraiment dont je voulais vous parler.
18:47 Pascal est né le 19 juin 1623, donc nous célébrions cette année les 400 ans de sa naissance.
18:53 Et à cette occasion, le pape François a décidé de lui consacrer une lettre apostolique,
18:57 ce qui est extrêmement rare, qu'un pape consacre une lettre à un écrivain laïc.
19:02 Il l'avait fait les précédents, c'était notamment pour Dante.
19:05 Donc d'abord, c'est une forme de mise à l'honneur de Pascal, qui est extrêmement rare.
19:08 Deuxièmement, là où cet événement était particulier, c'est que Pascal a été engagé,
19:13 j'y reviendrai tout à l'heure, mais dans une polémique extrêmement intense,
19:16 plus qu'une polémique d'ailleurs, contre les jésuites.
19:18 Or, le pape François est un jésuite.
19:20 Donc pour ces deux raisons-là, la lettre apostolique du pape François
19:23 est une lettre très paradoxale et que j'ai lue avec grand intérêt.
19:26 Alors dans cette lettre, il revient sur trois caractéristiques grandes de l'œuvre de Pascal.
19:30 Premièrement, ce qu'il appelle une forme d'ouverture étonnée à la réalité.
19:34 Pascal, avant d'être l'auteur des pensées, avant d'être l'auteur qui voulait faire une apologie
19:39 de la religion chrétienne, était avant tout, dès sa petite jeunesse,
19:43 quelqu'un qui était fasciné par la physique, par la géométrie, par les mathématiques,
19:47 qui a écrit des traités de géométrie prédictive,
19:51 qui a en quelque sorte contribué à inventer le calcul des probabilités.
19:55 Donc c'était un grand scientifique, dans la lignée des grands scientifiques du XVIIe siècle.
19:59 Et donc c'est ça, la première chose que le pape François retient,
20:02 c'est que Pascal incarne une forme de foi, de catholicité,
20:07 qui est restée toujours ouverte à cette curiosité et à cette polyvalence.
20:11 Notamment une chose que rappelle le pape François qui est importante,
20:14 c'est que même après avoir s'être converti à la foi chrétienne de manière très intense,
20:19 Pascal n'a pas quitté cette curiosité-là, puisque notamment c'est lui qui a inventé les transports publics à Paris.
20:23 C'est lui qui a inventé une sorte de l'équivalent de l'ancêtre du taxi, ça vient du philosophe Pascal.
20:28 Ça c'est la première chose.
20:29 La deuxième chose qui est la plus importante, je pense, pour le pape François,
20:32 le pape François n'est pas considéré comme un pape philosophe, contrairement à Benoît XVI.
20:36 Et s'il a choisi de rendre hommage à Pascal, c'est parce que Pascal, paradoxalement,
20:40 est un philosophe qui n'est pas un philosophe rationaliste.
20:42 Après cette période de sa vie qui était une période de physicien, de géomètre, etc.,
20:46 il y a une fameuse nuit qui est la nuit du 23 novembre 1654, qui est la nuit de feu pour Pascal,
20:51 qui est une nuit où entre 10h30 et minuit et demi, il a une révélation mystique hallucinante,
20:55 comparable en quelque sorte au buisson ardent pour Moïse.
20:58 Et c'est là qu'il se met à écrire un texte qui est le mémorial,
21:01 qui est une sorte de recueil de citations bibliques,
21:03 et qui commence en invoquant le dieu d'Abraham, d'Isaac, de Jacob,
21:07 non pas le dieu des savants et des philosophes.
21:09 Et donc il dit le rapport à Dieu ne doit pas être un rapport purement intellectuel,
21:13 comme il existe chez Descartes, de démonstration de l'existence de Dieu, etc.,
21:16 mais ça doit être un rapport qu'on qualifiera, pour aller vite, de mystique.
21:19 Et ça, c'est quelque chose sur lequel François insiste profondément,
21:24 et ça va totalement de paire avec la conception que le pape François a lui-même de la foi chrétienne,
21:29 qui est que la foi chrétienne, ça ne doit pas être quelque chose qui est uniquement de l'ordre de la raison,
21:32 mais de l'amour, de la grâce, de la charité, etc.
21:35 Et le troisième aspect, donc je reviens sur la querelle avec le gens cénisme.
21:39 Alors pour résumer juste en deux mots la querelle,
21:43 quand du vivant de Pascal, il y a une grande crise à laquelle est confrontée l'Église,
21:50 qui est la publication d'un livre qui s'appelle l'Augustinus,
21:53 un livre publié par un évêque qui revient sur la foi de saint Augustin.
21:57 Et ce livre-là rentre en contradiction avec la manière dont la foi chrétienne est perçue,
22:01 notamment par les jésuites, entre guillemets, par l'Église officielle.
22:04 Querelle énorme qui aboutira à une sorte de persécution des gens cénistes,
22:08 et Pascal prend le parti des gens cénistes.
22:10 Il fréquente Port-Royal et puis il écrit ce fameux livre qui est les Provinciales,
22:14 qui est un livre très très violent contre les jésuites,
22:16 et qui a inspiré beaucoup Voltaire, si vous voulez, dans le style de l'ironie, etc.
22:20 Et donc là, en conclusion de sa lettre apostolique, le pape François revient sur cette question-là,
22:25 et il le fait avec deux biais.
22:26 Premièrement, il minimise l'importance de l'appartenance de Pascal au gens cénisme,
22:31 en disant qu'en fait Pascal a subi l'influence de sa sœur,
22:34 Christine Orban a écrit un bon roman là-dessus sur la sœur de Pascal,
22:36 qu'il a subi cette influence mais qu'il n'était pas fondamentalement très attaché aux gens cénismes.
22:40 Deuxième chose, il insinue assez finement que Pascal aurait mal compris la polémique du gens cénisme,
22:46 et qu'en fait s'il a défendu les gens cénistes, c'est parce qu'il croyait que c'était un vrai modèle de la foi chrétienne.
22:51 Et troisièmement, concernant sa polémique contre les jésuites, c'est le point le plus important,
22:55 l'interprétation de Pascal, c'est de dire que Pascal a cru que les jésuites étaient une sorte de réviviscence
23:02 de ce qui, à l'époque de saint Augustin, s'appelait le pélagianisme,
23:06 et qui était une doctrine qui minimisait l'importance du salut et de la foi.
23:10 Très intéressant, vous l'avez compris, on va mettre sur la petite musique,
23:13 on va marquer une très courte coupure pub, et ce qui nous intéresse c'est la polémique qui a suivi,
23:18 on en parle dans un instant, maintenant que vous nous avez donné l'ensemble des éléments pour comprendre un petit peu le contexte,
23:23 on va aborder la polémique et cette tribune publiée avant-hier dans les colonnes du Figaro
23:28 par trois spécialistes de Pascal critiqués, notamment cette lettre apostolique, restez bien avec nous,
23:33 on poursuit la discussion dans un instant, on évoquera également un tout autre sujet,
23:37 non pas le Niger mais l'Islande, qui peut potentiellement profiter du réchauffement climatique.
23:42 C'est très malin les Islandais.
23:43 C'est intéressant, on en parle dans un instant avec vous, Régis Le Saumire, restez bien avec nous tout de suite.
23:47 De retour sur le plateau de Face à l'Info, l'été toujours un bonheur bien évidemment de vous retrouver,
23:54 chaque soir on poursuit la discussion avec vous, Nathan Devers, autour de cette lettre apostolique,
23:59 puisque à présent, maintenant que vous avez donné tous les éléments de contexte,
24:03 on va voir ce qui s'est passé ensuite, et notamment cette tribune de spécialistes de Pascal
24:07 publiée dans les colonnes du Figaro.
24:09 Oui, exactement, c'est pour ça que j'en parle aujourd'hui d'ailleurs,
24:11 parce que la lettre date d'il y a un mois en fait, et la tribune a été publiée il y a deux jours.
24:16 Donc c'est trois spécialistes de Pascal, Constance Cagna de Boeuf, Tony Gerhardt et Laurence Plasnet,
24:22 qui ont écrit une tribune très intéressante dans le Figaro pour revenir sur cette lettre.
24:26 Alors, ce n'est pas une tribune qui est complètement critique, parce que naturellement,
24:30 en tant que spécialistes de Pascal, ils sont quand même heureux de voir que le Vatican s'approprie,
24:36 même si l'appropriation est contestable, mais s'approprie Pascal et décide de le mettre à l'honneur.
24:41 Quand un hommage est rendu, on ne peut que s'en féliciter et s'en réjouir.
24:45 Mais évidemment, et c'est d'ailleurs ce qui est dangereux dans l'héritage d'un philosophe,
24:50 c'est qu'un philosophe, s'il peut y avoir des malentendus sur son œuvre,
24:53 c'est rarement par ceux qu'il attaque, ça vient souvent de ceux qui veulent lui rendre hommage
24:57 ou de ceux qui s'en réclament, c'est là qu'il peut y avoir le plus de biais.
25:00 Et donc ces trois spécialistes rappellent que naturellement, Pascal a toujours été un enjeu politique
25:05 pour l'Église et pas seulement philosophique ou théologique.
25:08 Autour de deux questions. Premièrement, celle dont on parlait précisément pendant la publicité
25:12 qui était l'ouverture... - Il y a toujours des discussions très intéressantes,
25:15 il faut le dire à nos téléspectateurs, y compris durant les coupures pub.
25:17 - Elles sont beaucoup plus intéressantes pour moi. - Vraiment, parfois.
25:19 - Pour qu'on puisse filmer, qu'on puisse diffuser... - Dites pas ça.
25:22 - Non, je rigole. - Quel rôli, bien évidemment.
25:24 - Bien évidemment. Et donc oui, la question de l'ouverture de la foi aux sciences et à la philosophie.
25:31 C'est une question qui est brûlante au XVIIe siècle et qui, par exemple, agite aussi quelqu'un comme Descartes.
25:36 Descartes qui est obligé aussi tout le temps d'essayer de trouver des zones de recoupement
25:40 entre la pensée rationnelle, entre guillemets, et ce qui relève de la foi ou de la compatibilité avec l'Église.
25:45 Donc ça, Pascal s'insère dans cette problématique-là et la question brûlante de la querelle avec le jansenisme
25:51 et aussi plus largement de la querelle avec l'augustinisme.
25:54 Pour schématiser vraiment très très rapidement, d'un côté vous avez le jansenisme qui reproche aux jésuites
26:01 de pratiquer, et notamment c'est très présent chez Pascal, d'avoir une conception rusée de la foi.
26:06 Une conception pleine de rouris, une conception pleine de calculs, où en fait on cherche absolument à humaniser la foi
26:13 et à faire en sorte qu'elle puisse être compatible avec la nature humaine dans ce qu'elle peut avoir de plus faible,
26:18 de plus misérable et de plus, en quelque sorte, sordide.
26:22 Et donc ce que reproche notamment Pascal aux jésuites, c'est leur sens de la casuistique.
26:25 Trouver toujours une manière de se glisser entre les mailles de la loi et de la foi pour trouver des solutions et s'adapter à tout.
26:32 C'est un peu, entre guillemets, le personnage de Tartuffe dans Molière.
26:36 Et en face, vous avez une conception qui reproche au jansenisme d'être dans une posture où finalement l'humanité est presque perçue
26:43 comme aliénée à une misère, à une vanité, et elle ne peut pas s'en sortir, etc.
26:48 Et donc les trois universitaires reprochent au pape François d'avoir fait quelque chose qui est, en tant que jésuites,
26:55 roué, rusé, plein de sens de calcul, de s'être dit finalement "on va se réapproprier, Pascal, d'une manière jésuite".
27:03 Et donc c'est exactement ce qu'il leur reproche.
27:05 Deux critiques, donc ils disent, je cite, qu'ils proposent une lecture orientée selon les options théologiques et la sensibilité d'un pape jésuite.
27:13 Donc leur tribune contient deux critiques.
27:15 La première, c'est de montrer que le pape François essaye de rendre Pascal compatible avec le christianisme d'ouverture,
27:23 le christianisme moderne et raisonnable, et que Pascal, en tout cas le pape François, insisterait beaucoup sur la place de la raison dans l'œuvre de Pascal,
27:33 comme si finalement Pascal était quelqu'un qui nous disait que la raison et la foi étaient entièrement compatibles.
27:39 Or, selon les universitaires, et ils ont naturellement raison sur ce point, chez Pascal, il y a cette idée que le véritable lieu de la foi n'est pas la raison,
27:49 mais c'est plutôt le cœur et c'est la charité.
27:51 Et deuxièmement, qu'il y a dans les pensées de Pascal toute une peinture extrêmement noire, extrêmement sombre de la condition humaine,
27:59 avec l'homme qui est dépeint comme une créature qui est creuse et pleine d'ordures,
28:03 avec ces fameuses sections des pensées qui est misère et vanité, où l'homme peut, enfin veut, mais ne peut pas.
28:09 Bon, alors avec toujours ce problème dans les pensées de Pascal, c'est que comme c'est un livre inachevé, qu'on a reconstitué,
28:14 on ne sait jamais, il y a beaucoup de discussions pour savoir quelle est la place de ce tableau très noir de l'existence humaine.
28:19 Sur ce point, on peut donc dire que les universitaires ont raison, mais que François rappelle quand même la nécessité chez Pascal de penser un dépassement de la raison.
28:27 Il cite notamment ce fragment très important sur la distance infiniment plus infinie des esprits à la charité que la distance entre les esprits et les corps.
28:36 Et deuxièmement, et c'est à mon avis le point le plus brûlant, c'est qu'ils disent qu'il est faux, historiquement et philosophiquement,
28:41 de réduire la présence de Pascal à Port-Royal à un simple malentendu, donnant l'impression que Pascal aurait subi l'influence de sa sœur après sa nuit mystique.
28:49 Non, ils disent que c'est faux et qu'évidemment, Pascal était viscéralement attaché au gensénisme.
28:55 Et dernière chose, c'est que finalement, ce que reprochent ces auteurs au pape François, par-delà la question de Pascal,
29:02 c'est que le pape François véhicule toujours cette vision de Port-Royal comme une sorte de repère sordide de gens malheureux,
29:08 de gens tristes et de gens qui étaient incompatibles avec la foi chrétienne, en oubliant que Port-Royal a été un lieu de très grande spiritualité.
29:15 Et qu'est-ce qu'on peut alors penser de cette polémique, pour conclure autour de ce sujet ?
29:20 On peut penser, à mon avis, que sur le plan universitaire, évidemment, les auteurs de la tribune ont raison.
29:24 Et évidemment, le pape François n'est pas un spécialiste de Pascal et ce serait absurde de donner raison au pape François contre ces spécialistes-là,
29:31 d'autant que, encore une fois, c'est une lecture orientée.
29:34 Seulement, on peut se demander s'il n'y a pas un deuxième niveau de lecture dans la lettre apostolique du pape, typiquement très classique chez les jésuites.
29:41 Et je rappelle, mais tout le monde le sait, que naturellement, le pape François est très contesté au sein même du Vatican,
29:46 qu'il s'érige en permanence contre l'institutionnalisation de l'Église.
29:50 Par exemple, c'est le premier pape qui refuse d'habiter dans les appartements privés du pape, qui sont d'un luxe absolu au Vatican.
29:56 Et lui, il vit toujours dans, vous savez, cette résidence. Il a une chambre, un studio, en quelque sorte, dans laquelle vivent les cardinaux pendant l'élection du pape.
30:03 Donc il vit, et il a refusé les voitures de fonction, etc.
30:07 Et deuxièmement, le pape François reproche souvent à l'Église une certaine forme aussi parfois d'hypocrisie institutionnelle.
30:14 Et on peut se demander si en consacrant une lettre apostolique à Pascal,
30:17 et en disant que quand Pascal critiquait les jésuites, en fait Pascal reproduisait le geste de saint Augustin contre le pélagianisme,
30:25 on peut se demander si de manière un peu implicite, il n'y a pas une forme de stratégie ici,
30:29 où le pape François instrumentalise certes la mémoire de Pascal,
30:33 mais pour mener aussi un combat, qui est un combat assez pascalien finalement, contre l'institutionnalisation de la foi.
30:38 Débat extrêmement intéressant. C'est toujours bien de prendre de la hauteur, j'ai l'impression, dans cette émission,
30:44 sur un certain nombre de sujets et d'aborder des sujets qui ne sont pas, voire peu, commentés.
30:50 Donc merci à vous deux. On revient justement à vous, Régis Le Sommier, sur un tout autre sujet.
30:55 Tout à l'heure, on a évoqué ce qui se passe au Niger. On aura l'occasion, bien évidemment, dans l'ensemble des émissions aujourd'hui d'y revenir.
31:02 Mais aujourd'hui, on s'intéresse à un tout autre sujet. On part du Niger, on va en Islande.
31:06 Un peu plus au nord.
31:08 Un peu plus au nord, même. Beaucoup plus au nord.
31:10 Et on va s'intéresser au réchauffement climatique, puisque l'Islande pourrait en profiter en quelque sorte.
31:16 Oui, c'est comment le pays profite, enfin, tente de profiter, d'exploiter le réchauffement climatique.
31:22 Alors, c'est intéressant parce qu'on parle souvent ici d'ailleurs de problématiques de réchauffement climatique.
31:27 Hier, on a parlé d'un verre qui a 46 000 ans et qui est ressorti du permafrost.
31:33 Donc, on découvre plein de choses.
31:35 Là, c'est, si vous voulez, l'histoire de l'Islande.
31:40 L'Islande, en fait, le pays avait autrefois une forêt primitive qu'il a eue pendant des milliers d'années
31:48 et qui a été détruite en fait en 1050 par Éric le Rouge.
31:54 Vous savez, Éric le Rouge, c'est ce viking paria qui est parti de Norvège parce qu'il s'en est fait expulsé,
32:00 a découvert l'Islande, et donc il sera à nouveau chassé.
32:06 Et puis, il découvrira le Groenland et sa femme et son fils, Leif Eriksson,
32:11 finiront par découvrir l'Amérique environ 500 ans avant Christophe Colomb.
32:14 Bref, l'arrivée d'Éric le Rouge ne fume pas du tout une bonne nouvelle pour l'Islande.
32:20 Alors, qu'est-ce qui s'est passé ?
32:22 Cet Éric le Rouge, non satisfait d'être un bâcleur hors pair et un véritable fléau social,
32:28 fut aussi un fléau environnemental pour l'île qu'il venait de découvrir
32:34 puisqu'il éradiqua complètement la forêt primitive pour construire des villages,
32:38 de nouvelles embarcations, pour se chauffer, pour chauffer les forges aussi,
32:42 pour fabriquer les outils.
32:43 Et en fait, environ 40%, on estime à 40%, les forêts de l'Islande...
32:50 - Qui restaient, éliminées. - Voilà, et que Éric le Rouge a détruites.
32:54 - Ça veut dire que quasiment l'ensemble de la forêt d'origine n'existait plus.
33:00 - Oui, et jusque dans les années 50, on estimait, je vous donne un chiffre précis,
33:05 à 482 km² de forêt pour une superficie totale de l'île de 103 000 km².
33:11 C'est à ce moment-là que les Islandais ont commencé à réfléchir, à reboiser.
33:17 Ils ont débuté timidement parce que le boom économique du pays fut néfaste
33:20 à cause de la pollution qui lui est associée.
33:23 Et les Islandais étaient pauvres jusqu'alors, ils vont devenir riches plus tard.
33:26 Ils se mirent à être conscients de leur environnement et décidèrent de replanter des forêts.
33:30 Résultat, des millions d'armes ont été plantées chaque année.
33:34 Le but écologique n'était pas toujours invoqué.
33:36 Les Islandais ont ainsi inventé les forêts protectrices des tempêtes de cendres
33:40 liées à l'activité volcanique qu'ils ont judicieusement plantées
33:44 autour de leurs villes et de leurs villages.
33:46 - Par rapport au sujet de base, on a envie de vous poser la question.
33:49 Le réchauffement climatique dans tout ça, puisqu'on fait un pas de côté
33:53 sur ce qui s'est passé il y a 500 ans, etc.
33:56 - Sur l'histoire et sur le fameux Éric Lerouge.
33:58 Ils vont profiter du réchauffement climatique. Alors comment ?
34:02 Certains, vous savez, continuent à nier ce phénomène. Ils sont rares de nos jours.
34:06 Quand on voit l'étendue des incendies en Grèce, c'est difficile de dire qu'il n'y a pas de réchauffement.
34:11 - En Grèce, Algérie, Italie, France, Espagne, malheureusement.
34:14 - Le Canada avant où des millions de kilomètres carrés ont été brûlés.
34:17 Les Islandais, eux, ils en sont parfaitement conscients et ils ont décidé d'en tirer profit.
34:20 Vous allez voir comment. Dans un premier temps, le réchauffement climatique
34:24 et là, ça fait disparaître leurs glaciers. Il y a deux ans, ils ont même fait une cérémonie
34:28 pour dire adieu à leurs plus grands glaciers. Alors ne me demandez pas le nom,
34:31 c'est absolument imprononçable. - Ils sont assez complexes en Islande.
34:34 - Mais ce réchauffement a eu pour conséquence de fondre des glaciers,
34:39 mais aussi de faire pousser les arbres plus vite, ceux qu'ils avaient plantés, que prévu.
34:43 Et de pouvoir introduire d'autres espèces. Et dans les montagnes,
34:47 c'est là où c'est assez incroyable, la ligne d'altitude, vous savez,
34:51 jusqu'à laquelle les arbres peuvent pousser, a augmenté.
34:55 Donc en fait, le reboisement plus le réchauffement climatique
34:59 accélère la reforestation de l'Islande.
35:02 Conclusion, c'est vraiment l'homme et son impact sur l'environnement
35:05 grâce au réchauffement qui contribue à ce que l'Islande retrouve peu à peu
35:09 ces forêts d'antan. Et c'est un juste retour des choses, puisque rappelons-le,
35:13 c'était l'homme viking qui les avait détruites.
35:16 - Question extrêmement intéressante. C'est vrai que ça peut nous paraître paradoxal
35:20 de Prime abord. Et en même temps, ça rejoint souvent une question
35:23 que je me pose autour du réchauffement climatique, du combat des écologistes.
35:26 Est-ce que les écologistes veulent sauver la planète ?
35:29 Ou est-ce que les écologistes veulent sauver l'homme ?
35:32 Puisque lorsque l'on voit justement ce que la planète est capable de faire,
35:36 alors là, certes, avec l'aide de l'homme ou de la main humaine,
35:39 bien évidemment, mais globalement, la planète, elle s'adapte.
35:43 Et c'est ça qui est peut-être intéressant. Et malheureusement,
35:46 on n'a jamais ce débat en France, à savoir que veulent sauver
35:50 les écologistes, la planète ou l'homme ? Peut-être un petit mot
35:53 avant qu'on aborde une toute autre question. Emmanuel Macron est-il
35:56 influenceur, président influenceur ? C'est l'objet de votre deuxième édito
36:00 dans un instant. - Et un petit mot sur la planète ?
36:03 - Oui, je suis d'accord avec vous, c'est la question centrale, en fait,
36:06 qui est presque non traitée ou indécidable dans le combat écologique.
36:10 Alors, parce qu'en effet, il y a parfois ce glissement
36:14 ou cette zone d'ambivalence. Est-ce que l'objet du combat écologique,
36:19 c'est un objet, entre guillemets, d'un égoïsme collectif,
36:22 l'égoïsme de l'espèce humaine, qui se dit "nos conditions de vie
36:25 vont être menacées et on n'a pas envie de vivre dans une planète
36:28 où on a des incendies tout le temps, où on meurt de chaud,
36:31 où il va y avoir des déplacements massifs de population
36:34 à cause du réchauffement climatique ?" Et donc, dans ce cas-là,
36:37 ça suscite, entre guillemets, une morale qui va faire appel
36:40 à l'égoïsme universel, qui peut inclure nos descendants,
36:43 ce n'est pas forcément à l'échelle de notre génération,
36:45 mais en tout cas, c'est l'égoïsme. Ou est-ce que, et c'est une option
36:48 philosophiquement beaucoup plus intéressante, est-ce que l'objet
36:51 de l'écologie, c'est d'essayer de penser une morale
36:54 de l'altérité, mais de l'altérité totale ?
36:57 Ça veut dire que ce n'est même pas l'altérité de vous, de vos descendants
36:59 ou de nos descendants, mais c'est l'altérité de la planète,
37:01 c'est-à-dire, paradoxalement, d'un objet qui n'est pas
37:05 un sujet moral. Et donc, là, ça inviterait
37:08 à repenser, à faire en sorte que l'écologie soit la clé de voûte
37:10 d'une nouvelle morale. Il y a un philosophe américain,
37:13 Nicolas de Varennes, qui prépare un livre sur cette question,
37:15 qui sera bientôt traduit et publié.
37:17 Et on aura peut-être l'occasion d'en reparler. Malheureusement,
37:20 notre cher Paul Melun est coincé dans les embouteillages.
37:23 On verra peut-être un petit extrait
37:27 d'un reportage dans les années 70 autour des bouquinistes,
37:30 puisque Paul Melin voulait revenir autour de cette polémique
37:33 dont on parle depuis plusieurs jours maintenant, à savoir que
37:35 les bouquinistes vont devoir déménager, en quelque sorte,
37:39 durant les Jeux olympiques. Ce sont les sacrifiés
37:42 des Jeux olympiques, là, c'est sûr.
37:44 Je me suis dit qu'il y avait encore des recours.
37:46 On verra. Il y a une tentative, en tout cas, avec une partie
37:49 de la droite à Paris, mais visiblement, effectivement,
37:52 la préfecture de police de Paris semble bien décidée.
37:55 On évoque avec vous ce sujet à présent.
37:57 On en a discuté tout à l'heure, pour ne rien cacher
37:59 à nos téléspectateurs, puisqu'on a vu les récentes images
38:02 de Swayze de La Moissonnière, qui est la photographe officielle
38:06 du président de la République. On s'est posé cette question
38:08 ensemble. Est-ce que le président de la République,
38:10 Emmanuel Macron, on en voit certaines,
38:12 ce sont les images prises durant son voyage en Nouvelle-Calédonie,
38:15 c'était il y a quelques jours, n'est pas un président influenceur
38:18 qui veut être in, branché, cool ?
38:21 Oui, ce sont des images assez passionnantes,
38:24 parce qu'en effet, vous les faites succéder.
38:26 Et on voit bien que, comme d'ailleurs dans toutes les photographies
38:29 prises par Swayze de La Moissonnière, c'est qu'il y a une forme
38:31 d'alternance entre la mise en scène d'un président
38:35 qui est dans l'action, qui est très concentré.
38:37 Il y a certaines images où il est dans son avion,
38:38 la tête comme ça. On voit qu'il est au travail.
38:41 Il montre qu'il est au travail. Et en effet, parfois,
38:43 des images extrêmement décalées d'un président en costume
38:46 qui a un sourire un peu ironique ou d'un président,
38:48 il y avait un moment où on le voyait passer sa tête,
38:50 voilà, en train de regarder un match de football.
38:53 Et donc, ce décalage...
38:54 Je ne suis pas sûr que ce soit lui.
38:57 J'ai un petit doute sur cette image.
38:59 Elle a retenu de la barbe naissante peut-être.
39:01 Oui, vous avez raison. Erreur d'interprétation.
39:03 Mais donc, ce décalage-là, ça fait déjà penser, je trouve,
39:06 à la communication de Barack Obama.
39:08 Et notamment les photos de Barack Obama dans l'Air Force One,
39:10 où on avait exactement cette mise en scène-là.
39:12 C'est toujours beaucoup plus, entre guillemets,
39:14 dans l'échelle de la coolitude.
39:16 L'idéal, c'est de montrer un président en costume,
39:19 mais qui est dans une posture décalée.
39:21 C'est ça qui fait l'intérêt de l'image.
39:22 Ça m'a rappelé, au début de la guerre en Ukraine,
39:24 il y avait eu ce moment de communication très intéressant,
39:27 où Vladimir Zelensky était apparu dans les médias
39:32 et dans l'opinion publique occidentale.
39:33 Il était assez peu connu de l'opinion publique.
39:35 Et il était apparu en tee-shirt kaki,
39:39 et en short-shirt, etc.
39:41 Et donc, dans une tenue qui était vraiment une tenue
39:43 où on montrait bien qu'il était dans l'action,
39:45 qu'il n'avait pas le temps de mettre un costume.
39:46 Et dans ce contexte, Emmanuel Macron,
39:49 il y avait eu des photos de lui,
39:50 prises par la même Soazik de La Moissonnière,
39:52 à l'Elysée, dans des réunions de crise
39:54 consacrées à la guerre en Ukraine,
39:55 où lui-même était arrivé en jean, je crois,
39:58 et en sweatshirt, surtout, exactement comme...
40:00 CPAX, le nom des commandos de l'air.
40:03 Oui, c'est ça.
40:04 Il était arrivé à ce moment-là
40:05 avec le tee-shirt des commandos de l'air.
40:06 Oui, et donc, en Afrique, tout était calculé,
40:08 bien évidemment, avec cette question
40:10 qui nous intéresse ce soir.
40:11 Est-ce que le chef de l'État
40:13 est peut-être le plus grand influenceur de France ?
40:16 Oui, c'est possible.
40:17 Alors, il y a deux choses auxquelles
40:20 on pourrait se souvenir.
40:21 Premièrement, c'est qu'Emmanuel Macron
40:24 a eu une communication qui le dirait,
40:26 entre guillemets, disruptive,
40:28 et qu'un petit peu comme François Mitterrand,
40:30 quand il essayait de faire des coups
40:31 médiatiques inattendus,
40:32 en allant à l'époque chez Yves Mourouzi.
40:34 Yves Mourouzi, c'était le présentateur
40:35 chez qui un président de la République
40:37 ne pouvait pas aller parce que c'était pas sérieux.
40:39 Et Mitterrand y va, conseillé par le génial Jacques Pilan,
40:41 il y va et c'est là qu'il commence à parler
40:43 en chébrant, etc.
40:44 Donc, je pense qu'Emmanuel Macron
40:46 avait posé la question de se dire
40:47 quel est aujourd'hui le Yves Mourouzi
40:49 des temps modernes.
40:50 Et il l'a fait en allant chez McFly et Carlito,
40:52 ou plutôt en les faisant venir à l'Élysée.
40:54 Je suis pas sûr que le parallèle...
40:55 Mais bon.
40:56 Au sens où c'était inattendu,
40:57 du point de vue de la communication présidentielle.
40:59 Je pense que ça a été extrêmement vu.
41:01 Et alors, c'était très problématique
41:02 parce que par-delà la question de savoir
41:04 est-ce qu'un président peut faire des choses
41:06 avec un influenceur,
41:07 ça je dirais que c'est une question,
41:08 entre guillemets, de politique politicienne.
41:11 Mais la question derrière qu'il y avait,
41:12 c'est que ce qu'il avait fait avec McFly et Carlito
41:14 était très intéressant.
41:15 Il leur avait demandé de faire un défi
41:17 où ils devaient faire la promotion
41:19 de la politique sanitaire du gouvernement.
41:21 Si leur vidéo dépassait les 10 millions de vues,
41:23 alors ils avaient le droit de tourner une vidéo
41:25 avec le président.
41:26 Donc là c'était quand même conditionné
41:27 à un moment où il fallait mettre en scène
41:29 des demandes politiques du président de la République.
41:32 Et deuxième moment qui est peut-être plus intéressant,
41:34 on en a très peu parlé,
41:35 mais pendant la dernière campagne présidentielle,
41:38 donc en 2022,
41:39 Emmanuel Macron, enfin ses équipes, ont créé...
41:41 Ça a moins marché, c'est peut-être mon truc là.
41:43 Ça a moins marché évidemment,
41:44 mais ils ont créé une série télé,
41:45 enfin une série pas télé sur Internet.
41:47 C'était presque la série My Canal.
41:49 Voilà exactement, la série My Canal,
41:51 un peu dans l'esprit, entre guillemets,
41:53 baron noir, qui s'appelait Le Candidat.
41:55 Il y avait plusieurs épisodes
41:57 et c'était extrêmement bien filmé d'ailleurs.
41:59 On voyait Emmanuel Macron dans les voitures de fonction.
42:01 On voit certaines images là.
42:02 Voilà, certaines images.
42:03 Et c'était une série qui était extrêmement bien filmée,
42:05 mais qui n'avait pas pris, si je puis dire.
42:06 Ça n'avait pas pris et ça avait été
42:08 beaucoup critiqué par ses adversaires,
42:09 parce qu'il y avait la campagne présidentielle
42:11 en même temps, les autres faisant des meetings
42:13 et Macron évacuant justement ce contact avec le peuple
42:16 grâce à ces séries.
42:18 Finalement en disant, voilà, vous n'avez qu'à regarder
42:20 ce que je dis.
42:21 Donc ça avait été assez critiqué à l'époque.
42:24 Et ce qui est paradoxal peut-être Nathan,
42:26 c'est justement cette dichotomie presque
42:28 entre ce président qui se veut influenceur
42:30 et parallèlement au tout début du premier quinquennat,
42:33 ce président qui se rêvait Jupiter.
42:36 Oui, il y a sans doute deux volontés,
42:37 deux désirs qui sont ici profondément incompatibles
42:40 et on peut se demander en effet,
42:42 que reste-t-il de l'image médiatique d'Emmanuel Macron
42:45 entre 2016 et 2017 ?
42:47 Il était présenté vraiment,
42:48 c'était l'archétype de la coolitude.
42:50 C'était un président, enfin candidat justement,
42:53 qui était présenté non seulement comme jeune
42:55 en raison de son âge,
42:56 mais comme quelqu'un qui était souriant,
42:58 qui était drôle, qui était décalé,
42:59 qui avait une capacité d'autodérision absolue
43:02 et qui était vraiment l'équivalent du Obama français.
43:05 Or, dès qu'il a été élu, il s'est tout de suite mis,
43:08 il était dans la cour carrée du Louvre,
43:10 il a tout de suite là, joué un tout autre registre,
43:12 qui était le registre de la verticalité jupitérienne,
43:15 un registre très monarchique d'endosser l'histoire de France.
43:17 Et en effet, ces deux exigences sont incompatibles.
43:21 Alors à partir de là, il y aurait deux hypothèses.
43:23 Première hypothèse, ça consisterait à dire
43:25 qu'Emmanuel Macron serait un président, entre guillemets,
43:28 contradictoire, un peu peut-être manipulateur
43:30 de la communication, un influenceur.
43:32 Deuxième hypothèse, et moi c'est celle
43:34 à laquelle j'aurais plutôt tendance à adhérer,
43:36 c'est peut-être que c'est la société française ici
43:38 qui est traversée par une contradiction
43:40 dans la manière dont elle projette des impératifs
43:43 qui sont complètement contradictoires
43:45 chez un président de la République,
43:46 c'est-à-dire qu'elle attend de lui à la fois
43:48 qu'il soit l'équivalent d'un président super jupitérien
43:51 et si le président se revendique d'une certaine forme de normalité,
43:54 alors là, tout le monde va se moquer de lui
43:56 et dire que le président n'a pas le droit d'être normal.
43:58 Et en revanche, quand le président joue ce rôle jupitérien,
44:02 on lui reproche au contraire d'être trop autoritaire.
44:04 Donc peut-être que c'est chez nous qu'il y a
44:06 des attentes contradictoires et peut-être que la fonction
44:08 du président de la République dans la société,
44:10 dans la Ve République, est une fonction profondément ambivalente
44:13 en tant que telle.
44:14 Extrêmement intéressant, c'est pour cela que nous souhaitions
44:17 également aborder ce sujet.
44:18 Il ne nous reste pas le temps, malheureusement,
44:20 de vous diffuser cet extrait d'un reportage
44:23 de l'ORTF sur les boutiquinistes,
44:25 mais pour les personnes qui sont déçues justement
44:28 de ne pas avoir vu Paul Melun ce soir,
44:30 même si on était ravis.
44:31 Bien évidemment, oui, mais on le retrouvera à 22h.
44:34 Eh oui ! Donc restez bien avec nous,
44:37 ou du moins revenez à partir de 22h,
44:40 puisque Paul Melun sera avec nous.
44:42 On vous diffusera.
44:43 Vous, vous restez ? Ah bah oui, bien sûr, il faut rester
44:45 puisque dans quelques instants, ça sera au tour
44:47 de Gauthier Lebret de prendre la main dans l'heure des pros.
44:50 Revenez, restez dans quelques instants,
44:52 revenez à 22h, ça sera extrêmement intéressant
44:55 d'aborder justement ce qui se passe avec les boutiquinistes
44:57 et on vous diffusera cet extrait, c'est promis.
44:59 Paul Melun sera avec nous, mais c'était un vrai plaisir
45:02 de partager Face à la Faux avec vous deux,
45:05 Nathan Devers et Richard Sessomier.
45:06 Merci à vous, l'information continue sur CNews.
45:08 de l'Ontario.
45:09 Ici Olivier Véran,
45:09 [Musique]